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Title: Les langues sur le web
Author: Lebert, Marie
Language: French
As this book started as an ASCII text book there are no pictures available.


*** Start of this LibraryBlog Digital Book "Les langues sur le web" ***


LES LANGUES SUR LE WEB

MARIE LEBERT

NEF, Université de Toronto, 2010

Copyright © 2010 Marie Lebert. Tous droits réservés.



Ce livre est dédié à toutes les personnes
interviewées de par le monde
sur ce vaste sujet.

On dit souvent que l'internet abolit le temps, les distances et les
frontières, mais qu'en est-il des langues? Comme l'écrit si bien Maria
Victoria Marinetti, professeure d’espagnol en entreprise et
traductrice, «il est très important de pouvoir communiquer en
différentes langues. Je dirais même que c’est obligatoire, car
l’information donnée sur l'internet est à destination du monde entier,
alors pourquoi ne l’aurions-nous pas dans notre propre langue ou dans
la langue que nous souhaitons utiliser? Information mondiale, mais pas
de vaste choix dans les langues, ce serait contradictoire, pas vrai?»
Tel est le sujet de ce livre. Il s'agit de la version revue et
actualisée de L'internet et les langues, publié en 2009.

Marie Lebert, chercheuse et journaliste, s'intéresse aux technologies
dans le monde des médias et des langues. Elle est l'auteure des livres
suivants: Le livre, de l'imprimé au numérique (NEF, 2010), L'internet
et les langues (NEF, 2009) et Le multilinguisme sur le web (NEF, 1999).
Ses livres sont publiés par le NEF (Net des études françaises),
Université de Toronto, et sont librement disponibles sur le site du NEF
tout appareil électronique.



TABLE


Introduction

L'Ethnologue
  * Un catalogue exhaustif des langues
  * Une œuvre de longue haleine
  * La codification des langues

De l'ASCII a l'Unicode
  * L'ASCII
  * L'Unicode
  * ASCII et/ou Unicode

Des «nations de langues»

Vers un web multilingue
  * Premiers pas
  * La Kotoba Home Page
  * OneLook Dictionaries
  * Autres expériences
  * L'affaire de tous

L'anglais reste prédominant
  * Une réalité statistique
  * Commentaires francophones
  * Des solutions logicielles

Le français sur le web
  * Une «nation de langue» francophone
  * Le patrimoine linguistique en ligne

Premiers projets multilingues
  * Travlang
  * Les projets de Tyler
  * NetGlos
  * Logos

Dictionnaires de langues
  * Dictionnaires imprimés en ligne
  * Répertoires de dictionnaires
  * yourDictionary.com
  * Le Grand dictionnaire terminologique
  * Eurodicautom et IATE
  * WordReference.com

L'apprentissage des langues
  * Quelques expériences
  * Des outils pour les enseignants
  * La LINGUIST List

Les langues minoritaires
  * La liste de Caoimhín
  * Le site Windows on Haiti

Des encyclopédies multilingues
  * Des projets précurseurs
  * Wikipédia

Localisation et internationalisation

La traduction assistée par ordinateur

La traduction automatique
  * Définition
  * Historique
  * Quelques avis
  * Un marché en 2000
  * L'UNL, métalangage numérique

Chronologie

Remerciements



INTRODUCTION


On dit souvent que l'internet abolit le temps, les distances et les
frontières, mais qu'en est-il des langues?

# Des «nations de langues»

«Comme l’internet n’a pas de frontières nationales, les internautes
s’organisent selon d’autres critères propres au médium. En termes de
multilinguisme, vous avez des communautés virtuelles, par exemple ce
que j’appelle les "nations de langues", tous ces internautes qu’on peut
regrouper selon leur langue maternelle quel que soit leur lieu
géographique. Ainsi la nation de la langue espagnole inclut non
seulement les internautes d’Espagne et d’Amérique latine, mais aussi
tous les Hispanophones vivant aux États-Unis, ou encore ceux qui
parlent espagnol au Maroc.» (Randy Hobler, consultant en marketing
internet chez Globalink, société de produits et services de traduction,
septembre 1998)

# La «démocratie linguistique»

«Dans un rapport de l'UNESCO du début des années 1950, l'enseignement
dispensé dans sa langue maternelle était considéré comme un droit
fondamental de l'enfant. La possibilité de naviguer sur l'internet dans
sa langue maternelle pourrait bien être son équivalent à l'Âge de
l'Information. Si l'internet doit vraiment devenir le réseau mondial
qu'on nous promet, tous les usagers devraient y avoir accès sans
problème de langue. Considérer l'internet comme la chasse gardée de
ceux qui, par accident historique, nécessité pratique ou privilège
politique, connaissent l'anglais, est injuste à l'égard de ceux qui ne
connaissent pas cette langue.» (Brian King, directeur du WorldWide
Language Institute, septembre 1998)

# Un médium pour le monde

«Il est très important de pouvoir communiquer en différentes langues.
Je dirais même que c’est obligatoire, car l’information donnée sur
l'internet est à destination du monde entier, alors pourquoi ne
l’aurions-nous pas dans notre propre langue ou dans la langue que nous
souhaitons utiliser? Information mondiale, mais pas de vaste choix dans
les langues, ce serait contradictoire, pas vrai?» (Maria Victoria
Marinetti, professeure d’espagnol en entreprise et traductrice, août
1999)

# De bons logiciels...

«Quand la qualité des logiciels sera suffisante pour que les gens
puissent converser par écrit et par oral sur le web en temps réel dans
différentes langues, nous verrons tout un monde s'ouvrir à nous. Les
scientifiques, les hommes politiques, les hommes d'affaires et bien
d'autres groupes seront à même de communiquer immédiatement entre eux
sans l'intermédiaire de médiateurs ou traducteurs.» (Tim McKenna,
écrivain et philosophe, octobre 2000)

# ...dans toutes les langues

«Les recherches sur la traduction automatique devraient permettre une
traduction automatique dans les langues souhaitées, mais avec des
applications pour toutes les langues et non les seules dominantes (ex.:
diffusion de documents en japonais, si l’émetteur est de langue
japonaise, et lecture en breton, si le récepteur est de langue
bretonne). Il y a donc beaucoup de travaux à faire dans le domaine de
la traduction automatique et écrite de toutes les langues.» (Pierre-
Noël Favennec, expert à la direction scientifique de France Télécom
R&D, février 2001)

# Des dictionnaires de langues en ligne

«J'ai débuté WordReference.com en 1999 pour procurer des dictionnaires
bilingues gratuits en ligne et d'autres outils pour tous sur
l'internet. Depuis, le site s'est progressivement développé pour
devenir l'un des sites de dictionnaires en ligne les plus utilisés, et
le principal dictionnaire en ligne pour les paires de langues anglais-
espagnol, anglais-français, anglais-italien, espagnol-français et
espagnol-portugais. Ce site est toujours classé sans interruption parmi
les 500 sites les plus visités du web. Aujourd'hui, je suis heureux de
continuer à améliorer ces dictionnaires, les autres outils
linguistiques du site et les forums de langues. J'ai vraiment plaisir à
créer de nouvelles fonctionnalités pour rendre ce site de plus en plus
utile.» (Michael Kellogg, fondateur de WordReference.com, mars 2010)

***

Ce livre est issu des multiples liens tissés sur le Net des études
françaises (NEF), fondé en mai 2000 par Russon Wooldridge, professeur à
l’Université de Toronto (Canada). Sauf indication contraire, les
citations sont des extraits des Entretiens du NEF  et des entretiens qui ont suivi pour les
actualiser et les compléter.



L'ETHNOLOGUE


= Un catalogue exhaustif des langues

Le nombre de langues vivantes parlées sur notre planète s'élève très
exactement à 6.909, un décompte datant de 2009. Ces langues vivantes
sont toutes recensées dans L'Ethnologue: Languages of the World,
catalogue exhaustif à la fois par la masse d'informations glanées et
par la qualité de ces informations, vérifiées une à une sur le terrain
dans le monde entier par un réseau composé de milliers de linguistes.

Travaillant au sein de l'organisme SIL International (SIL signifiant:
Summer Institute of Linguistics), l'équipe de l'Ethnologue insiste à
juste titre sur la minutie avec laquelle les informations sont
collectées puis vérifiées. Une petite équipe de chercheurs basée à
Dallas, dans le Texas, est elle-même relayée par des équipes nationales
et linguistiques présentes sur tous les continents.

Barbara Grimes, directrice de publication entre 1971 et 2000 (8e-14e
éditions), relate en janvier 2000 : « Il s’agit d’un catalogue des
langues dans le monde, avec des informations sur les pays où elles sont
parlées, une estimation du nombre de personnes qui les parlent, la
famille linguistique à laquelle elles appartiennent, les autres termes
utilisés pour ces langues, les noms de dialectes, diverses informations
socio-linguistiques et démographiques, les dates des Bibles publiées,
un index des noms de langues, un index des familles linguistiques et
enfin des cartes géographiques pour les langues.»

L'index des noms de langues (Ethnologue Name Index) donne la liste des
noms de langues et de dialectes ainsi que leurs synonymes, et l'index
des familles linguistiques (Ethnologue Language Family Index) organise
les langues selon leurs familles linguistiques.

Lors d'un entretien précédent, en août 1998, Barbara Grimes explique
aussi que, si la version web est utile, la version imprimée l'est
encore plus, en langue anglaise pour toucher un large public: «Nous
avons eu des demandes nous demandant l'accès à l'Ethnologue dans
plusieurs autres langues, mais nous n'avons pas le personnel ni les
fonds pour la traduction ou l'actualisation, indispensable puisque
notre site est constamment mis à jour. L'internet est (...) un moyen
commode pour mettre notre documentation à la disposition d'une audience
plus large que celle de l'Ethnologue imprimé. D'un autre côté,
l'Ethnologue sur l'internet n'atteint en fait qu'une audience limitée
disposant d'ordinateurs. Or, dans les personnes que nous souhaitons
atteindre, nombreuses sont celles qui ne disposent pas d'ordinateurs.
Je pense particulièrement aux habitants du dit "Tiers-monde".»

Une nouvelle édition de l'Ethnologue est publiée environ tous les
quatre ans. L'édition la plus récente, la 16e, date de 2009, avec une
version imprimée payante et une version web gratuite... comme
d'habitude depuis que le web existe. Les éditions précédentes
proposaient aussi une version CD-ROM payante, pendant quelques années,
avant que l'internet à débit rapide ne devienne monnaie courante.


= Une œuvre de longue haleine

Contrairement à ce que certains croient, cette vaste entreprise n'est
née ni avec l'internet (1974) ni avec le web (1993), même si sa version
web a beaucoup contribué à la faire connaître. Il s'agit d'un projet de
recherche actif depuis plus de cinquante ans.

L'Ethnologue est fondé en 1951 par Richard Pittman, qui est le
directeur de publication des sept premières éditions, de 1951 à 1969. À
l'origine, son but est de partager les informations glanées sur les
langues minoritaires avec ses collègues de SIL International et
d'autres linguistes. L'Ethnologue débute comme un catalogue de langues
minoritaires avant de prendre de l'ampleur au fil des ans.

Barbara Grimes est la directrice de publication des sept éditions
suivantes, de la 8e à la 14e, entre 1971 à 2000. À partir de 1971, le
champ des informations s'élargit pour ne plus concerner seulement les
langues minoritaires, mais pour englober aussi peu à peu toutes les
langues vivantes connues dans le monde. Entre 1967 et 1973, Barbara
Grimes révise d'abord en profondeur toutes les informations disponibles
sur les langues d'Afrique, des Amériques, du Pacifique et de quelques
pays d'Asie. Pendant ses années comme directrice de publication, entre
1971 et 2000, le nombre de langues recensées passe de 4.493 à 6.809, et
les informations disponibles pour chaque langue sont elles-mêmes plus
complètes, si bien que l'encyclopédie triple de taille.

En 2000, Raymond Gordon Jr. devient le troisième directeur de
publication de l'Ethnologue et produit la 15e édition (2005). Il cède
ensuite la place à Paul Lewis, aidé de Conrad Hurd pour la gestion de
la base de données et de Raymond Gordon pour la direction des équipes
nationales et linguistiques sur le terrain.

Dans l'introduction de la 16e édition (2009), on peut lire ceci : «La
manière dont chacun choisit de définir une langue dépend des motifs
qu'on a d'identifier cette langue comme étant distincte d'une autre.
Certains basent la définition d'une langue sur des raisons purement
linguistiques. D'autres reconnaissent la nécessité de prendre également
en compte des facteurs sociaux, culturels ou politiques. En outre, les
locuteurs d'une langue donnée ont souvent leurs propres critères sur
l'appropriation d'une langue comme étant la leur. Ces critères sont
souvent bien davantage liés à des questions de patrimoine et d'identité
qu'aux traits linguistiques de la langue ou des langues en question.»


= La codification des langues

Comme expliqué dans l'introduction de la 16e édition (2009), une
caractéristique de la base de données de l'Ethnologue est un système de
codification des langues au moyen de trois lettres (par exemple FRA
pour la France), ce depuis sa création. Cette codification est incluse
dans l'encyclopédie elle-même à partir de la 10e édition (1984).

L'Organisation internationale de normalisation (ISO) adopte pour sa
part la norme ISO 639-2 en 1998. Cette norme, qui codifie également
chaque langue au moyen de trois lettres, est une convergence de la
norme ISO 639-1 (un ancien standard de deux lettres pour chaque langue,
adopté en 1988) et de la norme ANSI Z39.53 (les codes de langues MARC,
trois lettres pour chaque langue, développés par les bibliothèques
américaines et adoptés en tant que norme nationale en 1987).

La norme ISO 639-2 (1998) devient vite insuffisante puisqu'elle codifie
moins de 400 langues individuelles. En 2002, l'ISO invite donc SIL
International à établir une nouvelle norme permettant d'harmoniser les
codes utilisés dans l'Ethnologue avec les codes de la norme ISO, en y
intégrant aussi les codes des langues mortes utilisés par la Linguist
List, une grande liste de diffusion à destination des linguistes.

Le résultat, officiellement approuvé en 2006 et publié en 2007, est la
nouvelle norme ISO 639-3, qui attribue un code de trois lettres à près
de 7.500 langues. SIL International est également désigné comme
l'organisme responsable de l'enregistrement de nouvelles langues pour
l'ISO 639-3, et gère donc le cycle annuel des modifications et des
mises à jour sur une page de son propre site.



DE L'ASCII À L'UNICODE


= L'ASCII

Communiquer dans plusieurs langues implique d’avoir des systèmes
d'encodage adaptés à nos alphabets ou idéogrammes respectifs.

Le premier système d'encodage informatique est l’ASCII (American
standard code for information interchange). Publié en 1968 aux États-
Unis par l’American National Standards Institute (ANSI), avec
actualisation en 1977 et 1986, l'ASCII est un code standard de 128
caractères traduits en langage binaire sur sept bits (A est traduit par
«1000001», B est traduit par «1000010», etc.). Les 128 caractères
comprennent 33 caractères de contrôle (qui ne représentent donc pas de
symbole écrit) et 95 caractères imprimables: les 26 lettres sans accent
en majuscules (A-Z) et minuscules (a-z), les chiffres, les signes de
ponctuation et quelques caractères spéciaux, le tout correspondant aux
touches du clavier anglophone.

L'ASCII permet uniquement la lecture de l’anglais et du latin. Il ne
permet pas de prendre en compte les lettres accentuées présentes dans
bon nombre de langues européennes, et à plus forte raison les langues
non alphabétiques (chinois, japonais, coréen, etc.). Ceci ne pose pas
de problème majeur les premières années, tant que l’échange de fichiers
électroniques se limite essentiellement à l’Amérique du Nord. Mais le
multilinguisme devient bientôt une nécessité vitale. Des variantes de
l’ASCII (norme ISO-8859 ou ISO-Latin) prennent en compte les caractères
accentués de quelques langues européennes. La variante pour le
français, par exemple, est définie par la norme ISO-8859-1 (ISO-Latin-
1).


= L'Unicode

Avec le développement du web, l’échange des données s’internationalise
de plus en plus. On ne peut plus se limiter à l’utilisation de
l’anglais et de quelques langues européennes, traduites par un système
d’encodage datant de 1968. De plus, le passage de l’ASCII original à
ses différentes extensions devient vite un véritable casse-tête, y
compris au sein de l’Union européenne, les problèmes étant entre autres
la multiplication des variantes, la corruption des données dans les
échanges informatiques ou encore l’incompatibilité des systèmes, les
pages ne pouvant être affichées que dans une seule langue à la fois.

Olivier Gainon, fondateur de CyLibris et pionnier de l’édition
électronique littéraire, écrit en décembre 2000: «Il faut que le réseau
respecte les lettres accentuées, les lettres spécifiques, etc. Je crois
très important que les futurs protocoles permettent une transmission
parfaite de ces aspects - ce qui n’est pas forcément simple (dans les
futures évolutions de l’HTML ou des protocoles IP, etc.). Donc il faut
que chacun puisse se sentir à l’aise avec l’internet et que ce ne soit
pas simplement réservé à des (plus ou moins) anglophones. Il est
anormal aujourd’hui que la transmission d’accents puisse poser problème
dans les courriers électroniques. La première démarche me semble donc
une démarche technique. Si on arrive à faire cela, le reste en découle:
la représentation des langues se fera en fonction du nombre de
connectés, et il faudra envisager à terme des moteurs de recherche
multilingues.»

Publié pour la première fois en janvier 1991, l’Unicode est un système
d'encodage universel sur 16 bits spécifiant un nombre unique pour
chaque caractère. Ce nombre est lisible quels que soient la plateforme,
le logiciel et la langue utilisés. L’Unicode peut traiter 65.000
caractères uniques et prendre en compte tous les systèmes d’écriture de
la planète. A la grande satisfaction des linguistes, il remplace
progressivement l’ASCII, avec des variantes UTF-8, UTF-16 et UTF-32
(UTF: Unicode transformation format) en fonction du nombre de bits
utilisés. Il devient une composante des spécifications du World Wide
Web Consortium (W3C), l'organisme international chargé du développement
du web.

L’utilisation de l’Unicode se généralise à partir de 1998, par exemple
pour les fichiers texte sous plateforme Windows (Windows NT, Windows
2000, Windows XP et versions suivantes), qui étaient jusque-là en
ASCII.

Mais l’Unicode ne peut résoudre tous les problèmes, comme le souligne
en juin 2000 Luc Dall’Armellina, co-auteur et webmestre d’oVosite, un
espace d’écriture hypermédia: «Les systèmes d’exploitation se dotent
peu à peu des kits de langues et bientôt peut-être de polices de
caractères Unicode à même de représenter toutes les langues du monde;
reste que chaque application, du traitement de texte au navigateur web,
emboîte ce pas. Les difficultés sont immenses: notre clavier avec ses ±
250 touches avoue ses manques dès lors qu’il faille saisir des Katakana
ou Hiragana japonais, pire encore avec la langue chinoise. La grande
variété des systèmes d’écriture de par le monde et le nombre de leurs
signes font barrage. Mais les écueils culturels ne sont pas moins
importants, liés aux codes et modalités de représentation propres à
chaque culture ou ethnie.»

Patrick Rebollar, professeur de littérature française au Japon et
modérateur de la liste de diffusion LITOR (littérature et ordinateur),
donne son sentiment en janvier 2000: «Il s'agit d'abord d'un problème
logiciel. Comme on le voit avec Netscape ou Internet Explorer, la
possibilité d'affichage multilingue existe. La compatibilité entre ces
logiciels et les autres (de la suite Office de Microsoft, par exemple)
n'est cependant pas acquise. L'adoption de la table Unicode devrait
résoudre une grande partie des problèmes, mais il faut pour cela
réécrire la plupart des logiciels, ce à quoi les producteurs de
logiciels rechignent du fait de la dépense, pour une rentabilité qui
n'est pas évidente car ces logiciels entièrement multilingues
intéressent moins de clients que les logiciels de navigation.»


= ASCII et/ou Unicode

Le Projet Gutenberg est fondé dès 1971 par Michael Hart pour numériser
les œuvres littéraires et les mettre gratuitement à la disposition de
tous.

Les œuvres sont numérisées en mode texte, en utilisant l’ASCII original
sur sept bits ou, pour les langues avec accents, l'ASCII sur huit bits
pour une prise en compte des caractères accentués. Mais, même dans ce
cas, le Projet Gutenberg propose  systématiquement en complément une
version ASCII sur sept bits sans accents. Sauf, bien entendu, dans le
cas de langues non encodables en ASCII, comme le chinois, qui est
encodé au format Big-5 pour le chinois traditionnel.

Surnommé à juste raison «le plus petit dénominateur commun», l'ASCII
sur sept bits est le seul format compatible avec 99% des machines et
des logiciels, et pouvant être converti dans de nombreux autres
formats. Il sera toujours utilisé quand d’autres formats auront
disparu. Il est l’assurance que les collections ne deviendront jamais
obsolètes, et survivront aux changements technologiques des prochaines
décennies ou même des prochains siècles. Il n'existe pas d'autre
standard aussi largement utilisé, y compris l'Unicode, système
d'encodage universel créé en 1991. Ce jusqu'en 2008, date à laquelle
les deux systèmes d'encodage sont également représentés sur le web.

Le Projet Gutenberg propose certains livres dans d’autres formats que
l'ASCII, notamment dans les trois formats répandus que sont les formats
HTML, XML et RTF. Des fichiers Unicode sont également présents et
remplacent peu à peu les fichiers ASCII sur huit bits pour les langues
avec accents comme le français. De plus, tout format proposé par tel ou
tel volontaire est généralement accepté (PDF, LIT, TeX et beaucoup
d'autres), dans la mesure où un fichier ASCII est également présent.

Les collections du Projet Gutenberg sont d'abord essentiellement
anglophones, puisque ce projet est basé aux États-Unis et qu'il sert en
priorité la communauté anglophone nationale et internationale. En
octobre 1997, Michael Hart annonce son intention d'intensifier la
production de livres dans des langues autres que l'anglais. Début 1998,
le catalogue comprend quelques œuvres en allemand, en espagnol, en
français (dix titres), en italien et en latin. En juillet 1999, Michael
écrit: «J'introduis une nouvelle langue par mois maintenant, et je vais
poursuivre cette politique aussi longtemps que possible.»

Le multilinguisme devient ensuite l'une des priorités du Projet
Gutenberg, tout comme l'internationalisation, avec le LibraryBlog
Australia (créé en août 2001), le Projet Gutenberg Europe (créé en
janvier 2004), le LibraryBlog Canada (créé en juillet 2007), et
d'autres Projets Gutenberg à venir dans divers pays, notamment au
Portugal.

Dans le Projet Gutenberg original, 25 langues sont représentées en
janvier 2004, 42 langues en juillet 2005, dont le sanscrit et les
langues mayas, et 50 langues en décembre 2006. À cette date, les
langues principales sont l’anglais, le français, l’allemand, le
finnois, le hollandais, l’espagnol, l’italien, le chinois, le portugais
et le tagalog.

Dès ses débuts en janvier 2004, le Projet Gutenberg Europe propose un
site multilingue pour gérer la relecture partagée entre les
volontaires, afin de prendre en compte les principales langues
nationales. En avril 2004, grâce à des traducteurs volontaires, le site
est disponible en douze langues. L'objectif à moyen terme est un site
en soixante langues, et donc soixante équipes linguistiques, avec prise
en compte de toutes les langues européennes. Le Projet Gutenberg Europe
utilise l'Unicode et non l'ASCII, pour pouvoir traiter des livres dans
un grand nombre de langues.



DES «NATIONS DE LANGUES»


Consultant en marketing internet chez Globalink, une société de
produits et services de traduction, Randy Hobler écrit en septembre
1998: «Comme l’internet n’a pas de frontières nationales, les
internautes s’organisent selon d’autres critères propres au médium. En
termes de multilinguisme, vous avez des communautés virtuelles, par
exemple ce que j’appelle les "nations de langues", tous ces internautes
qu’on peut regrouper selon leur langue maternelle quel que soit leur
lieu géographique. Ainsi la nation de la langue espagnole inclut non
seulement les internautes d’Espagne et d’Amérique latine, mais aussi
tous les Hispanophones vivant aux États-Unis, ou encore ceux qui
parlent espagnol au Maroc.»

Si Randy donne l'exemple d'une «nation de langue» hispanophone répartie
sur trois continents, la même remarque vaut pour la Francophonie, une
communauté de langue française présente sur cinq continents, ou encore
la Créolophonie, puisque le créole est parlé non seulement dans les
Caraïbes mais aussi à Paris, Montréal et New York.

À ses débuts, l'internet est anglophone à pratiquement 100%, ce qui
s'explique par le fait qu'il débute aux États-Unis en tant que réseau
reliant les agences gouvernementales et les universités, suite à la
création du protocole TCP/IP en 1974 par Vinton Cerf et Robert Kahn.
Après la création du World Wide Web en 1990 par Tim Berners-Lee au
Centre européen pour la recherche nucléaire (CERN) à Genève (Suisse) et
le lancement en novembre 1993 du premier navigateur Mosaic, ancêtre de
Netscape, l'internet se développe rapidement, d'abord aux États-Unis
grâce aux investissements considérables du gouvernement, puis au
Canada, puis dans le monde entier.

Après avoir été anglophone à pratiquement 100%, l’internet est encore
anglophone à plus de 80% en 1998, un pourcentage qui s’explique par
trois facteurs: (a) la création d’un grand nombre de sites web émanant
des États-Unis, du Canada et du Royaume-Uni; (b) une proportion
d'usagers particulièrement forte en Amérique du Nord par rapport au
reste du monde, les ordinateurs étant bien meilleur marché qu'ailleurs,
tout comme la connexion à l'internet sous forme de forfait mensuel à
prix modique; (c) l’usage de l'anglais en tant que principale langue
d’échange internationale.

Dans plusieurs pays d'Europe, par exemple, cette connexion est d'abord
tarifée à la durée, avec un tarif de jour et un tarif de nuit moins
élevé. Les usagers passent donc beaucoup moins de temps sur l'internet
qu'ils ne le souhaiteraient, et choisissent souvent de surfer la nuit
pour éviter les factures trop élevées. Fin 1998 et début 1999, des
mouvements de grève sont lancés en France, en Italie et en Allemagne
pour faire pression sur les sociétés prestataires afin qu'elles
baissent leurs prix et qu'elles proposent des forfaits internet, avec
gain de cause dans les mois qui suivent.

En 1997, Babel, initiative conjointe d'Alis Technologies et de
l'Internet Society, mène la première étude sur la répartition des
langues sur l'internet. Datée de juin 1997, le Palmarès des langues de
la toile donne les pourcentages de 82,3% pour l'anglais, 4% pour
l'allemand, 1,6% pour le japonais, 1,5% pour le français, 1,1% pour
l'espagnol, 1,1% pour le suédois et 1% pour l'italien.

Dans un article publié le 21 juillet 1998 par ZDNN (ZDNetwork News),
Martha Stone, journaliste, précise: «Cette année, le nombre de nouveaux
sites non anglophones va probablement dépasser celui de nouveaux sites
anglophones, et le monde cyber est en train de véritablement devenir
une toile à l'échelle mondiale. (...) Selon Global Reach [une société
promouvant la localisation des sites web], les groupes linguistiques se
développant le plus vite sont les groupes non anglophones: on note une
progression de 22,4% pour les sites web hispanophones, 12,3% pour les
sites nippons, 14% pour les sites germanophones et 10% pour les sites
francophones. On estime à 55,7 millions le nombre de personnes non
anglophones ayant accès au web. (...) Alors que 6% seulement de la
population mondiale est de langue maternelle anglaise (et 16% de langue
maternelle espagnole), 80% des pages web sont en anglais.» Toujours
selon Global Reach, 15% seulement des 500 millions d'habitants que
compte l'Europe sont de langue maternelle anglaise, 28% maîtrisent bien
l'anglais, et 32% consultent le web anglophone.

Le concept de «démocratie linguistique» est développé par Brian King,
directeur du WorldWide Language Institute (WWLI), dans un entretien
daté de septembre 1998: «Dans un rapport de l'UNESCO du début des
années 1950, l'enseignement dispensé dans sa langue maternelle était
considéré comme un droit fondamental de l'enfant. La possibilité de
naviguer sur l'internet dans sa langue maternelle pourrait bien être
son équivalent à l'Âge de l'Information. Si l'internet doit vraiment
devenir le réseau mondial qu'on nous promet, tous les usagers devraient
y avoir accès sans problème de langue. Considérer l'internet comme la
chasse gardée de ceux qui, par accident historique, nécessité pratique
ou privilège politique, connaissent l'anglais, est injuste à l'égard de
ceux qui ne connaissent pas cette langue.»

Jean-Pierre Cloutier est l'auteur des Chroniques de Cybérie, une lettre
d'information électronique sur l'actualité de l'internet. Il écrit en
août 1999: «Cet été, le cap a été franchi. Plus de 50% des utilisateurs
et utilisatrices du réseau sont hors des États-Unis. L'an prochain,
plus de 50% des utilisateurs seront non anglophones. Il y a seulement
cinq ans, c'était 5%. Formidable, non?»

Les usagers non anglophones atteignent en effet la barre des 50% au
cours de l'été 2000. Selon Global Reach, ce pourcentage est de 52,5% en
été 2001, 57% en décembre 2001, 59,8% en avril 2002, 64,4% en septembre
2003 (dont 34,9% d’Européens non anglophones et 29,4% d’Asiatiques) et
64,2% en mars 2004 (dont 37,9% d’Européens non anglophones et 33%
d’Asiatiques).

De plus, nombre de communautés pratiquent le bilinguisme au quotidien,
par exemple à Genève pour le français et l’allemand ou San Francisco
pour l’anglais et l’espagnol, avec l'exigence de proposer toutes les
informations en deux langues, le cas extrême étant la Communauté
européenne avec ses 11 langues officielles en 2003, puis ses 24 langues
officielles en 2007 après son élargissement progressif vers l'Europe de
l'Est.



VERS UN WEB MULTILINGUE


= Premiers pas

Professeure d’espagnol en entreprise et traductrice, Maria Victoria
Marinetti écrit en août 1999: «Il est très important de pouvoir
communiquer en différentes langues. Je dirais même que c’est
obligatoire, car l’information donnée sur l'internet est à destination
du monde entier, alors pourquoi ne l’aurions-nous pas dans notre propre
langue ou dans la langue que nous souhaitons utiliser? Information
mondiale, mais pas de vaste choix dans les langues, ce serait
contradictoire, pas vrai?»

Yahoo! est précurseur dans ce domaine. En Californie, deux étudiants de
l'Université de Stanford, Jerry Lang et David Filo, lancent en janvier
1994 l'annuaire Yahoo! pour recenser les sites web et les classer par
thèmes. L'annuaire est un succès, avec un classement plus pointu que
celui de moteurs de recherche comme AltaVista, où ces tâches sont
entièrement automatisées. Mais, si une recherche ne donne pas de
résultat dans Yahoo!, elle est automatiquement aiguillée vers
AltaVista, et réciproquement.

Trois ans plus tard, Yahoo! propose un classement en 63 grandes
catégories thématiques, tout comme une interface en plusieurs langues:
anglais, allemand, coréen, français, japonais, norvégien et suédois.

En décembre 1997, AltaVista est le premier moteur de recherche à lancer
un service gratuit de traduction automatisée de l'anglais vers cinq
autres langues (allemand, espagnol, français, italien et portugais) et
vice versa, la page originale et la traduction apparaissant en vis-à-
vis à l’écran. AltaVista Translation, surnommé aussi Babel Fish, est
l'œuvre de SYSTRAN, une société franco-américaine pionnière dans le
traitement automatique des langues. Babel Fish est alimenté par des
dictionnaires multilingues comprenant 2,5 millions de termes.

Bien qu'ayant ses limites, avec une traduction de trois pages maximum
et un texte traduit très approximatif, ce service est immédiatement
très apprécié des douze millions d'usagers que compte l'internet de
l'époque, dont un nombre croissant d'usagers non anglophones. Babel
Fish ouvre aussi la voie à d'autres services du même genre - développés
entre autres par Alis Technologies, Lernout & Hauspie, Globalink ou
Softissimo - et contribue grandement au plurilinguisme du web.


= La Kotoba Home Page

Yoshi Mikami, informaticien à Tokyo (Japon), lance en décembre 1995 le
site bilingue anglais-japonais The Languages of the World by Computers
and the Internet, plus  connu sous le nom de Logos Home Page ou Kotoba
Home Page. Le site donne un bref historique de chaque langue, ses
caractéristiques, son système d'écriture, son jeu de caractères et
enfin la configuration du clavier dans la langue donnée. Yoshi Mikami
est également co-auteur (avec Kenji Sekine et Nobutoshi Kohara) de Pour
un web multilingue, publié en août 1997 en japonais par les éditions
O'Reilly avant d'être traduit en anglais, en allemand et en français
(version française parue en septembre 1998).

Yoshi écrit en décembre 1998: «Ma langue maternelle est le japonais.
Comme j'ai suivi mes études de troisième cycle aux États-Unis et que
j'ai travaillé dans l'informatique, je suis devenu bilingue
japonais/anglais américain. J'ai toujours été intéressé par différentes
langues et cultures, aussi j'ai appris le russe, le français et le
chinois dans la foulée. A la fin de 1995, j'ai créé sur le web The
Languages of the World by Computers and the Internet et j'ai tenté de
donner - en anglais et en japonais - un bref historique de toutes ces
langues, ainsi que les caractéristiques propres à chaque langue et à sa
phonétique. Suite à l'expérience acquise, j'ai invité mes deux associés
à écrire un livre sur la conception, la création et la présentation de
pages web multilingues, livre qui fut publié en août 1997 dans son
édition japonaise, le premier livre au monde sur un tel sujet.»

Comment voit-il l'évolution vers un web multilingue? «Il y a des
milliers d'années de cela, en Égypte, en Chine et ailleurs, les gens
étaient plus sensibles au fait de communiquer leurs lois et leurs
réflexions non seulement dans une langue mais dans plusieurs. Dans
notre monde moderne, chaque État a le plus souvent adopté une seule
langue de communication. A mon avis, l'internet verra l'utilisation
plus grande de langues différentes et de pages multilingues - et pas
seulement une gravitation autour de l'anglais américain - et un usage
plus créatif de la traduction informatique multilingue. 99% des sites
web créés au Japon sont en japonais!»


= OneLook Dictionaries

Robert Ware, enseignant, lance en avril 1996 le site OneLook
Dictionaries pour permettre une recherche rapide dans des centaines de
dictionnaires couvrant divers domaines: affaires, informatique et
internet, médecine, religion, sciences et techniques, sports,
généralités et argot.

Il explique en septembre 1998: «À titre personnel, je suis presque
uniquement en contact avec des gens qui ne pratiquent qu'une langue et
qui n'ont pas beaucoup de motivation pour développer leurs aptitudes
linguistiques. Être en contact avec le monde entier change cette
approche des choses. Et la change en mieux! (...) J'ai été long à
inclure des dictionnaires non anglophones (en partie parce que je suis
monolingue). Mais vous en trouverez maintenant quelques-uns.»

OneLook Dictionaries compte 2 millions de termes provenant de 425
dictionnaires en 1998, 2,5 millions de termes provenant de 530
dictionnaires en 2000, et 5 millions de termes provenant de 910
dictionnaires en 2003.

Robert Ware raconte aussi dans le même entretien: «Un fait intéressant
s'est produit par le passé qui a été très instructif pour moi. En 1994,
je travaillais pour un établissement scolaire et j'essayais d'installer
un logiciel sur un modèle d'ordinateur particulier. J'ai trouvé une
personne qui était en train de travailler sur le même problème, et nous
avons commencé à échanger des courriels. Soudain, cela m'a frappé... Le
logiciel avait été écrit à 40 kilomètres de là, mais c'était une
personne située à l'autre bout du monde qui m'aidait. Les distances et
l'éloignement géographique n'importaient plus! Et bien, ceci est
formidable, mais à quoi cela nous mène-t-il? Je ne puis communiquer
qu'en anglais mais, heureusement, mon correspondant pouvait utiliser
aussi bien l'anglais que l'allemand qui était sa langue maternelle.
L'internet a supprimé une barrière, celle de la distance, mais il
subsiste la barrière de la langue, bien réelle.

Il semble que l'internet propulse simultanément les gens dans deux
directions différentes. L'internet, anglophone à l'origine, relie les
gens dans le monde entier. Par là même, il favorise une langue commune
pour communiquer. Mais il suscite aussi des contacts entre des
personnes de langue différente et permet ainsi de développer un intérêt
plus grand pour le multilinguisme. Si une langue commune est
appréciable, elle ne remplace en aucun cas la nécessité de plusieurs
langues. L'internet favorise ainsi à la fois une langue commune et le
multilinguisme, et ceci est un facteur qui aide à trouver des
solutions. L'intérêt croissant pour les langues et le besoin qu'on en a
stimulent de par le monde la création de cours de langues et
d'instruments d'aide linguistique, et l'internet fournit la possibilité
de les rendre disponibles rapidement et à bon marché.»


= Autres expériences

Même si l'anglais est encore prédominant à la fin des années 1990, les
sites bilingues ou plurilingues sont de plus en plus nombreux, ce pour
des raisons aussi bien commerciales que culturelles, qui prennent en
compte le fait que tout le monde ne comprend pas l'anglais.

Brian King, directeur du WorldWide Language Institute (WWLI), écrit en
septembre 1998: «De même que l'utilisateur non anglophone peut
maintenant avoir accès aux nouvelles technologies dans sa propre
langue, l'impact du commerce électronique peut constituer une force
majeure qui fasse du multilinguisme la voie la plus naturelle vers le
cyberespace. Les vendeurs de produits et services dans le marché
virtuel mondial que devient l'internet doivent être préparés à
desservir un monde virtuel qui soit aussi multilingue que le monde
physique. S'ils veulent réussir, ils doivent s'assurer qu'ils parlent
bien la langue de leurs clients!»

Le réseau ELSNET (European Network in Language and Speech) regroupe une
centaine de partenaires académiques et commerciaux, l'objectif étant de
mettre sur pied des systèmes multilingues pour la langue parlée et la
langue écrite.

Steven Krauwer, coordinateur d'ELSNET, explique en septembre 1998: «En
tant que citoyen européen, je pense que le multilinguisme sur le web
est absolument essentiel.  À mon avis, ce n'est pas une situation saine
à long terme que seuls ceux qui ont une bonne maîtrise de l'anglais
puissent pleinement exploiter les bénéfices du web. En tant que
chercheur (spécialisé dans la traduction automatique), je vois le
multilinguisme comme un défi majeur: pouvoir garantir que l'information
sur le web soit accessible à tous, indépendamment des différences de
langue. (...) Je compte passer le reste de ma vie professionnelle à
utiliser les technologies de l'information pour supprimer ou au moins
réduire la barrière des langues.»

Il ajoute en août 1999: «Je suis de plus en plus convaincu que nous
devons veiller à ne pas aborder le problème du multilinguisme en
l'isolant du reste. Je reviens de France, où j'ai passé de très bonnes
vacances d'été. Même si ma connaissance du français est sommaire (c'est
le moins que l'on puisse dire), il est surprenant de voir que je peux
malgré tout communiquer sans problème en combinant ce français sommaire
avec des gestes, des expressions du visage, des indices visuels, des
schémas, etc. Je pense que le web (contrairement au système vieillot du
courriel textuel) peut permettre de combiner avec succès la
transmission des informations par différents canaux (ou différents
moyens), même si ce processus n'est que partiellement satisfaisant pour
chacun des canaux pris isolément.»

Pour un véritable multilinguisme sur le web, Steven Krauwer suggère
plusieurs solutions pratiques: «(a) en ce qui concerne les auteurs: une
meilleure formation des auteurs de sites web pour exploiter les
combinaisons possibles permettant d'améliorer la communication en
surmontant la barrière de la langue (et pas seulement par un vernis
superficiel); (b) en ce qui concerne les usagers: des logiciels de
traduction de type AltaVista Translation, dont la qualité n'est pas
frappante, mais qui a le mérite d'exister; (c) en ce qui concerne les
logiciels de navigation: des logiciels de traduction intégrée,
particulièrement pour les langues non dominantes, et des dictionnaires
intégrés plus rapides à consulter.»


= L'affaire de tous

Le multilinguisme est l'affaire de tous, témoin cet Appel du Comité
européen pour le respect des cultures et des langues en Europe (CERCLE)
qui, diffusé en 1998 dans les onze langues officielles de l'Union
européenne (allemand, anglais, danois, espagnol, finlandais, français,
grec, hollandais, italien, portugais et suédois), défend «une Europe
humaniste, plurilingue et riche de sa diversité culturelle». Le CERCLE
propose aux réviseurs du Traité de l'Union européenne douze amendements
prenant en compte le respect des cultures et des langues.

On lit dans cet Appel que «la diversité et le pluralisme linguistiques
ne sont pas un obstacle à la circulation des hommes, des idées et des
marchandises ou services, comme veulent le faire croire certains,
alliés objectifs, conscients ou non, de la culture et de la langue
dominantes. C'est l'uniformisation et l'hégémonie qui sont un obstacle
au libre épanouissement des individus, des sociétés et de l'économie de
l'immatériel, source principale des emplois de demain. Le respect des
langues, à l'inverse, est la dernière chance pour l'Europe de se
rapprocher des citoyens, objectif toujours affiché, presque jamais mis
en pratique. L'Union doit donc renoncer à privilégier la langue d'un
seul groupe.»

Bruno Didier, webmestre de la bibliothèque de l’Institut Pasteur, écrit
en août 1999: «L'internet n’est une propriété ni nationale, ni
linguistique. C’est un vecteur de culture, et le premier support de la
culture, c’est la langue. Plus il y a de langues représentées dans leur
diversité, plus il y aura de cultures sur l'internet. Je ne pense pas
qu’il faille justement céder à la tentation systématique de traduire
ses pages dans une langue plus ou moins universelle. Les échanges
culturels passent par la volonté de se mettre à la portée de celui vers
qui on souhaite aller. Et cet effort passe par l’appréhension de sa
langue. Bien entendu c’est très utopique comme propos. Concrètement,
lorsque je fais de la veille, je peste dès que je rencontre des sites
norvégiens ou brésiliens sans un minimum d’anglais.»

En 2000, le web est multilingue, mais la barrière de la langue est loin
d'avoir disparu. Si toutes les langues sont désormais représentées sur
le web, on oublie trop souvent que de nombreux usagers sont unilingues,
et que même les polyglottes ne peuvent connaître toutes les langues. Il
importe aussi d'avoir à l'esprit l'ensemble des langues, et pas
seulement les langues dominantes. Il reste à créer des passerelles
entre les communautés linguistiques pour favoriser la circulation des
écrits dans d'autres langues, notamment en améliorant la qualité des
logiciels de traduction.



L'ANGLAIS RESTE PRÉDOMINANT


= Une réalité statistique

L’anglais reste prépondérant et ceci n’est pas près de disparaître.
Comme indiqué en janvier 1999 par Marcel Grangier, responsable de la
section française des services linguistiques centraux de
l’Administration fédérale suisse, «cette suprématie n’est pas un mal en
soi, dans la mesure où elle résulte de réalités essentiellement
statistiques (plus de PC par habitant, plus de locuteurs de cette
langue, etc.). La riposte n’est pas de "lutter contre l’anglais" et
encore moins de s’en tenir à des jérémiades, mais de multiplier les
sites en d’autres langues. Notons qu’en qualité de service de
traduction, nous préconisons également le multilinguisme des sites eux-
mêmes. La multiplication des langues présentes sur l'internet est
inévitable, et ne peut que bénéficier aux échanges multiculturels.»

Professeur en technologies de la communication à la Webster University
de Genève (Suisse), Henk Slettenhaar insiste tout autant sur la
nécessité de sites bilingues, dans la langue originale et en anglais.
«Les communautés locales présentes sur le web devraient en tout premier
lieu utiliser leur langue pour diffuser des informations, écrit-il en
décembre 1998. Si elles veulent présenter ces informations à la
communauté mondiale, celles-ci doivent être disponibles aussi en
anglais. Je pense qu’il existe un réel besoin de sites bilingues. (...)
Mais je suis enchanté qu’il existe maintenant tant de documents
disponibles dans leur langue originale. Je préfère de beaucoup lire
l’original avec difficulté plutôt qu’une traduction médiocre.»

Henk ajoute en août 1999: «A mon avis, il existe deux types de
recherches sur le web. La première est la recherche globale dans le
domaine des affaires et de l’information. Pour cela, la langue est
d’abord l’anglais, avec des versions locales si nécessaire. La seconde,
ce sont les informations locales de tous ordres dans les endroits les
plus reculés. Si l’information est à destination d’une ethnie ou d’un
groupe linguistique, elle doit d’abord être disponible dans la langue
de l’ethnie ou du groupe, avec peut-être un résumé en anglais.»

Guy Antoine, créateur de Windows on Haiti, un site de référence sur la
culture haïtienne, croit en la nécessité de l'anglais en tant que
langue commune. «Pour des raisons pratiques, l'anglais continuera de
dominer le web, relate-t-il en novembre 1999. Je ne pense pas que ce
soit une mauvaise chose, en dépit des sentiments régionalistes qui s'y
opposent, parce que nous avons besoin d'une langue commune permettant
de favoriser les communications à l'échelon international. Ceci dit, je
ne partage pas l'idée pessimiste selon laquelle les autres langues
n'ont plus qu'à se soumettre à la langue dominante. Au contraire. Tout
d'abord l'internet peut héberger des informations utiles sur les
langues minoritaires, qui seraient autrement amenées à disparaître sans
laisser de traces. De plus, à mon avis, l'internet incite les gens à
apprendre les langues associées aux cultures qui les intéressent. Ces
personnes réalisent rapidement que la langue d'un peuple est un élément
fondamental de sa culture. De ce fait, je n'ai pas grande confiance
dans les outils de traduction automatique qui, s'ils traduisent les
mots et les expressions, ne peuvent guère traduire l'âme d'un peuple.
Que sont les Haïtiens, par exemple, sans le kreyòl (créole pour les non
initiés), une langue qui a permis de souder entre elles diverses tribus
africaines transplantées à Haïti pendant la période de l'esclavage?
Cette langue représente de manière la plus palpable l'unité de notre
peuple. Elle est toutefois principalement une langue parlée et non
écrite. A mon avis, le web va changer cet état de fait plus qu'aucun
autre moyen traditionnel de diffusion d'une langue. Dans Windows on
Haiti, la langue principale est l'anglais, mais on y trouve tout aussi
bien un forum de discussion animé conduit en kreyòl. On y trouve
également des documents sur Haïti en français et dans l'ancien créole
colonial, et je suis prêt à publier d'autres documents en espagnol et
dans diverses langues. Je ne propose pas de traductions, mais le
multilinguisme est effectif sur ce site, et je pense qu'il deviendra de
plus en plus la norme sur le web.»

Geoffrey Kingscott est directeur général de Praetorius, une société
britannique spécialisée en linguistique appliquée. Il explique en
septembre 1998: «Les caractéristiques propres au web sont la
multiplicité de générateurs de sites et le bas prix de l'émission de
messages. Ceci favorisera donc le multilinguisme au fur et à mesure du
développement du web. Comme celui-ci a vu le jour aux États-Unis, il
est encore principalement en anglais, mais ce n'est qu'un phénomène
temporaire. Pour expliquer ceci plus en détail, je dirais que, quand
nous comptions sur l'imprimé ou l'audiovisuel (film, télévision, radio,
vidéo, cassettes), l'information ou le divertissement que nous
attendions dépendait d'agents (éditeurs, stations de télévision ou de
radio, producteurs de cassettes ou de vidéos) qui devaient subsister
commercialement et, dans le cas de la radio-télédiffusion du service
public, avec de sévères contraintes budgétaires. Ceci signifie que la
quantité de clients est primordiale, et détermine la nécessité de
langues autres que l'omniprésent anglais. Ces contraintes disparaissent
avec le web.

Pour ne donner qu'un exemple mineur tiré de notre expérience, nous
publions la version imprimée de notre magazine Language Today
uniquement en anglais, qui est le dénominateur commun de nos lecteurs.
Quand nous utilisons un article qui était originellement dans une autre
langue que l'anglais, ou que nous relatons un entretien mené dans une
autre langue que l'anglais, nous le traduisons en anglais et nous ne
publions que la version anglaise, pour la raison suivante: le nombre de
pages que nous pouvons imprimer est limité, et déterminé en fonction de
notre clientèle (annonceurs et abonnés). Par contre, dans notre version
web, nous proposons aussi la version originale.»


= Commentaires francophones

Luc dall'Armellina, co-auteur et webmestre d’oVosite, un espace
d’écriture hypermédia, écrit en juin 2000: «L'anglais s'impose sans
doute parce qu'il est devenu la langue commerciale d'échange
généralisée; il semble important que toutes les langues puissent
continuer à être représentées parce que chacune d'elle est porteuse
d'une vision "singulière" du monde. La traduction simultanée (proposée
par AltaVista par exemple) ou les versions multilingues d'un même
contenu me semblent aujourd'hui les meilleures réponses au danger de
pensée unique que représenterait une seule langue d'échange. Peut-être
appartient-il aux éditeurs des systèmes d'exploitation (ou de
navigateurs?) de proposer des solutions de traduction partielle, avec
toutes les limites connues des systèmes automatiques de traduction...»

Pierre François Gagnon, fondateur d'Éditel et pionnier de l'édition
littéraire francophone en ligne, écrit en juillet 2000: «Je pense que,
si les diverses langues de la planète vont occuper chacune l'internet
en proportion de leur poids démographique respectif, la nécessité d'une
langue véhiculaire unique se fera sentir comme jamais auparavant, ce
qui ne fera qu'assurer davantage encore la suprématie planétaire de
l'anglais, ne serait-ce que du fait qu'il a été adopté définitivement
par l'Inde et la Chine. Or la marche de l'histoire n'est pas plus
comprimable dans le dé à coudre d'une quelconque équation mathématique
que le marché des options en bourse!»

Philippe Loubière, traducteur littéraire et dramatique, dénonce pour sa
part la main-mise anglophone sur le réseau. «Tout ce qui peut
contribuer à la diversité linguistique, sur internet comme ailleurs,
est indispensable à la survie de la liberté de penser, explique-t-il en
mars 2001. Je n’exagère absolument pas: l’homme moderne joue là sa
survie. Cela dit, je suis très pessimiste devant cette évolution. Les
Anglo-saxons vous écrivent en anglais sans vergogne. L’immense majorité
des Français constate avec une indifférence totale le remplacement
progressif de leur langue par le mauvais anglais des marchands et des
publicitaires, et le reste du monde a parfaitement admis l’hégémonie
linguistique des Anglo-saxons parce qu’ils n’ont pas d’autres horizons
que de servir ces riches et puissants maîtres. La seule solution
consisterait à recourir à des législations internationales assez
contraignantes pour obliger les gouvernements nationaux à respecter et
à faire respecter la langue nationale dans leur propre pays (le
français en France, le roumain en Roumanie, etc.), cela dans tous les
domaines et pas seulement sur internet. Mais ne rêvons pas...»

C'est aussi le sentiment de Blaise Rosnay, webmestre du site du Club
des poètes, qui écrit en janvier 2000: «Dans la mesure où la culture
française, y compris contemporaine, pourra être diffusée sans
obstacles, la langue française aura la possibilité de rester vivante
sur le réseau. Ses œuvres, liées au génie de notre langue, susciteront
nécessairement de l'intérêt puisqu'elles sont en prise avec l'évolution
actuelle de l'esprit humain. Dans la mesure où il y aura une volonté
d'utiliser l'internet comme moyen de partage de la connaissance, de la
beauté, de la culture, toutes les langues, chacune avec leur génie
propre, y auront leur place. Mais si l'internet, comme cela semble être
le cas, abandonne ces promesses pour devenir un lieu unique de
transactions commerciales, la seule langue qui y sera finalement parlée
sera une sorte de jargon dénaturant la belle langue anglaise, je veux
dire un anglais amoindri à l'usage des relations uniquement
commerciales.»

Richard Chotin, professeur à l’École supérieure des affaires (ESA) de
Lille, rappelle à juste titre que la suprématie de l’anglais a succédé
à celle du français. «Le problème est politique et idéologique,
explique-t-il en septembre 2000. C’est celui de l’"impérialisme" de la
langue anglaise découlant de l’impérialisme américain. Il suffit
d’ailleurs de se souvenir de l’"impérialisme" du français aux 18e et
19e siècles pour comprendre la déficience en langues des étudiants
français: quand on n’a pas besoin de faire des efforts pour se faire
comprendre, on n’en fait pas, ce sont les autres qui les font.»

Bakayoko Bourahima, bibliothécaire de l'École nationale supérieure de
statistique et d’économie appliquée (ENSEA) d'Abidjan (Côte d'Ivoire),
écrit en juillet 2000: «Pour nous les Africains francophones, le diktat
de l’anglais sur la toile représente pour la masse un double handicap
d’accès aux ressources du réseau. Il y a d’abord le problème de
l’alphabétisation qui est loin d’être résolu et que l’internet va poser
avec beaucoup plus d’acuité, ensuite se pose le problème de la maîtrise
d’une seconde langue étrangère et son adéquation à l’environnement
culturel. En somme, à défaut de multilinguisme, l’internet va nous
imposer une seconde colonisation linguistique avec toutes les
contraintes que cela suppose. Ce qui n’est pas rien quand on sait que
nos systèmes éducatifs ont déjà beaucoup de mal à optimiser leurs
performances, en raison, selon certains spécialistes, des contraintes
de l’utilisation du français comme langue de formation de base. Il est
donc de plus en plus question de recourir aux langues vernaculaires
pour les formations de base, pour "désenclaver" l’école en Afrique et
l’impliquer au mieux dans la valorisation des ressources humaines.
Comment faire? Je pense qu’il n’y a pas de chance pour nous de faire
prévaloir une quelconque exception culturelle sur la toile, ce qui
serait de nature tout à fait grégaire. Il faut donc que les différents
blocs linguistiques s’investissent beaucoup plus dans la promotion de
leur accès à la toile, sans oublier leurs différentes spécificités
internes.»

Lucie de Boutiny, romancière, écrit en septembre 2000: "Les chiffres de
septembre 2000 montrent que 51% des utilisateurs sont anglo-saxons, et
78% des sites aussi. Les chiffres de cette prépondérance baissent à
mesure qu'augmentent le nombre des internautes de par le monde...
L'anglais va devenir la deuxième langue mondiale après la langue
natale, mais il y en aura d'autres. Un exemple: personnellement, à
l'âge de 4 ans, je parlais trois langues alors que je ne savais ni lire
ni écrire. Pour parler une langue, il peut suffire d'avoir la chance de
l'écouter. On peut espérer que le cosmopolitisme traverse toutes les
classes sociales en raison, par exemple, de l'Union européenne, du
nomadisme des travailleurs, de la facilité de déplacement à l'étranger
des étudiants, de la présence des chaînes TV et sites étrangers, etc."

Gérard Fourestier, créateur de Rubriques à Bac, un site destiné aux
étudiants du premier cycle universitaire, écrit en octobre 2000: «Je
suis de langue française. J'ai appris l'allemand, l'anglais, l'arabe,
mais je suis encore loin du compte quand je surfe dans tous les coins
de la planète. Il serait dommage que les plus nombreux ou les plus
puissants soient les seuls qui "s'affichent" et, pour ce qui est des
logiciels de traduction, il y a encore largement à faire. (...) Pour
l'instant, [il importe] de connaître suffisamment d'anglais et de créer
beaucoup plus encore en français.»


= Des solutions logicielles

Alain Bron, consultant en systèmes d'information et écrivain, explique
pour sa part en novembre 1999: «Il y aura encore pendant longtemps
l'usage de langues différentes et tant mieux pour le droit à la
différence. Le risque est bien entendu l'envahissement d'une langue au
détriment des autres, donc l'aplanissement culturel. Je pense que des
services en ligne vont petit à petit se créer pour pallier cette
difficulté. Tout d'abord, des traducteurs pourront traduire et
commenter des textes à la demande, et surtout les sites de grande
fréquentation vont investir dans des versions en langues différentes,
comme le fait l'industrie audiovisuelle.»

Tôt ou tard, le pourcentage des langues sur le réseau correspondra-t-il
à leur répartition sur la planète? Rien n’est moins sûr à l’heure de la
fracture numérique entre riches et pauvres, entre zones rurales et
zones urbaines, entre régions favorisées et régions défavorisées, entre
l’hémisphère nord et l’hémisphère sud, entre pays développés et pays en
développement.

Selon Zina Tucsnak, ingénieur d’études au laboratoire ATILF (Analyse et
traitement informatique de la langue française), interviewée en octobre
2000, "le meilleur moyen serait l’application d’une loi par laquelle on
va attribuer un "quota" à chaque langue. Mais n’est-ce pas une utopie
de demander l’application d’une telle loi dans une société de
consommation comme la nôtre?"

À la même date, Emmanuel Barthe, documentaliste juridique, exprime un
avis contraire: «Des signes récents laissent penser qu’il suffit de
laisser les langues telles qu’elles sont actuellement sur le web. En
effet, les langues autres que l’anglais se développent avec
l’accroissement du nombre de sites web nationaux s’adressant
spécifiquement aux publics nationaux, afin de les attirer vers
internet. Il suffit de regarder l’accroissement du nombre de langues
disponibles dans les interfaces des moteurs de recherche généralistes.
Il serait néanmoins utile (et bénéfique pour un meilleur équilibre des
langues) de disposer de logiciels de traduction automatique de
meilleure qualité et à très bas prix sur internet. La récente mise sur
le web du GDT (Grand dictionnaire terminologique, rédigé par l'Office
de la langue française du Québec) va dans ce sens.»

Michel Benoît, romancier vivant à Montréal (Québec), écrit en juin
2000: «Lorsqu'un problème affecte une structure, quelle qu'elle soit,
j'ai toujours tendance à imaginer que c'est techniquement que le
problème trouve sa solution. Vous connaissez cette théorie? Si les
Romains avaient trouvé le moyen d'enlever le plomb de leur couvert
d'étain, Néron ne serait jamais devenu fou et n'aurait jamais incendié
Rome. Escusi, farfelu? Peut-être que oui, peut-être que non. E que
save? L'internet multilingue? Demain, ou après-demain au plus. Voyons,
pensez au premier ordinateur, il y a de cela un peu plus que cinquante
ans. Un étage au complet pour faire à peine plus que les quatre
opérations de base. Dans ce temps-là, un bug, c'était véritablement une
mouche - ou autre insecte - qui s'insérait entre les lecteurs optiques.
De nos jours [en 2000], un carte de 3 cm x 5 cm fait la même chose. La
traduction instantanée: demain, après-demain au plus.»

C'est aussi l'avis de Pierre Magnenat, responsable de la cellule
«gestion et prospective» du centre informatique de l'Université de
Lausanne, qui écrit en octobre 2000: «La seule solution que je vois
serait qu'un effort majeur et global soit entrepris pour développer des
traducteurs automatiques. Je ne pense pas qu'une quelconque incitation
ou autre quota pourrait empêcher la domination totale de l'anglais. Cet
effort pourrait - et devrait - être initié au niveau des États, et
disposer des moyens suffisants pour aboutir.»

Pierre-Noël Favennec, expert à la direction scientifique de France
Télécom R&D, souligne en février 2001: «Les recherches sur la
traduction automatique devraient permettre une traduction automatique
dans les langues souhaitées, mais avec des applications pour toutes les
langues et non les seules dominantes (ex.: diffusion de documents en
japonais, si l’émetteur est de langue japonaise, et lecture en breton,
si le récepteur est de langue bretonne...). Il y a donc beaucoup de
travaux à faire dans le domaine de la traduction automatique et écrite
de toutes les langues.»



LE FRANÇAIS SUR LE WEB


= Une «nation de langue» francophone

En décembre 1997, Tim Berners-Lee, l'inventeur du World Wide Web (en
1990), déclare à Pierre Ruetschi, journaliste à la Tribune de Genève,
un quotidien suisse: «Pourquoi les Francophones ne mettent-ils pas
davantage d’informations sur le web? Est-ce qu’ils pensent que personne
ne veut la lire, que la culture française n’a rien à offrir? C’est de
la folie, l’offre est évidemment énorme.»

C’est chose faite dans les années qui suivent, d'abord par le Québec,
une région dynamique qui dispose d'un accès beaucoup plus facile et
économique à l'internet les premières années, et ensuite par la
Francophonie dans son ensemble.

Début 1998, les Québécois, pionniers de l'internet francophone,
attendent de pied ferme l'arrivée en masse de sites web français, y
compris commerciaux. Lors d'un entretien publié par le magazine en
ligne Multimédium, Louise Beaudouin, ministre de la Culture et des
Communications au Québec, déclare en février 1998: «J'attendais depuis
deux ans que la France se réveille. Aujourd'hui, je ne m'en plaindrai
pas.» À cette date, le Québec (avec 6 millions d'habitants) propose
plus de sites web que la France (avec 60 millions d'habitants). La
ministre attribue le retard de la France à deux facteurs: d'une part
les tarifs élevés du téléphone (et donc de l'internet, puisque la
connexion s'effectue par le biais de la ligne téléphonique), d'autre
part les transactions commerciales possibles sur le minitel (le
videotex français) depuis plusieurs années, ce qui ralentit l'expansion
du commerce électronique sur l'internet.

C'est l'UREC (Unité réseaux du Centre national de la recherche
scientifique) qui, en France, lance le premier annuaire de sites web
francophones. L'annuaire de l'UREC a pour but de se familiariser avec
le web sans se noyer dans la masse d'informations mondiale, et de
connaître les sites qui petit à petit fleurissent en langue française.
Créé début 1994, il recense d'abord les sites académiques avant de
devenir plus généraliste. D'autres annuaires voient ensuite le jour,
dont certains débutés avec l'aide de l'UREC. Le nombre de sites web, y
compris commerciaux, augmente de manière exponentielle, si bien que la
gestion d'un annuaire généraliste devient difficile. En juillet 1997,
considérant sa mission comme accomplie, l'UREC arrête la mise à jour de
cet annuaire généraliste, et le remplace par un annuaire spécialisé
consacré à l'enseignement supérieur et à la recherche.

Fondée en mars 1970 à Niamey (Niger) pour regrouper 21 États
francophones, l'Agence la Francophonie - qui se prénomme d'abord
l'Agence de coopération culturelle et technique (ACCT) - compte 47
États francophones en 1997. Cette agence se veut un «instrument de
coopération multilatérale née d'un idéal, celui de créer une communauté
qui fasse entendre sa voix dans le concert des nations».

Une Conférence des ministres francophones chargés des inforoutes a lieu
à Montréal en mai 1997. Datée du 21 mai 1997, la Déclaration de
Montréal propose de «développer une aire francophone d'éducation, de
formation et de recherche; soutenir la création et la circulation de
contenus francophones et contribuer à la sauvegarde et à la
valorisation des patrimoines; encourager la promotion de l'aire
francophone de développement économique; mettre en place une vigie
francophone (veille active); sensibiliser prioritairement la jeunesse
ainsi que les utilisateurs, les producteurs et les décideurs; assurer
la présence et la concertation des Francophones dans les instances
spécialisées.»

Par ailleurs, l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF) crée le
réseau internet REFER pour desservir la communauté scientifique et
technique en Afrique, en Asie et en Europe orientale, avec 24 pays
participants en 2002.

Le 20 mars 2010, la Francophonie fête ses quarante ans d'existence.
L'Organisation internationale de la Francophonie (OIF) rassemble
désormais 70 États et gouvernements (56 membres et 14 observateurs)
totalisant 870 millions d'habitants, soit 13% de la population
mondiale.

Mais, selon diverses sources, on ne recenserait en fait que 200
millions de Francophones dans le monde, dont 72 millions de «locuteurs
partiels». 96,2 millions de Francophones vivraient en Afrique. Le
français serait la neuvième langue de la planète et 5% des pages
internet seraient rédigées en français. Tous chiffres à prendre avec
précaution.

S'il est la langue des pays francophones, le français est aussi la
deuxième langue utilisée dans les organisations internationales. Malgré
la pression anglophone - réelle ou supposée selon les cas -, des
Francophones veillent à ce que leur langue ait une place significative
dans le monde, au même titre que les autres grandes langues de
communication que sont l'anglais, l'arabe, le chinois et l'espagnol. Là
aussi, l'optique est aussi bien la défense d'une langue que le respect
du multilinguisme et de la diversité des peuples.


= Le patrimoine linguistique en ligne

L'internet peut favoriser non seulement l'usage du français, en cas de
volonté politique et culturelle dans ce sens, mais aussi la
transmission du patrimoine linguistique. Un exemple parmi d'autres est
celui des dictionnaires anciens, qui trouvent une nouvelle vie grâce au
web.

Dès 1996, le site de l'Institut national de la langue française (InaLF)
offre des ressources terminologiques sur le discours littéraire des 14e
au 20e siècles (contenu, sémantique, thématique), sur la langue
courante (langue écrite, langue parlée, argot) et sur le discours
scientifique et technique.

Christiane Jadelot, ingénieur d'études à l'INaLF-Nancy, explique en
juin 1998: «Les premières pages sur l'INaLF ont été mises sur
l'internet au milieu de l'année 1996, à la demande de Robert Martin,
directeur de l'INaLF. J'ai participé à la mise sous internet de ces
pages (...). La direction a senti la nécessité urgente de nous faire
connaître par l'internet, que beaucoup d'autres entreprises utilisaient
déjà pour promouvoir leurs produits. Nous sommes en effet "Unité de
recherche et de service" et nous avons donc à trouver des clients pour
nos produits informatisés, le plus connu d'entre eux étant la base
textuelle FRANTEXT [sur l'internet depuis début 1995, NDLR], ainsi
qu'une maquette du tome 14 du TLF [Trésor de la langue française]. Il
était donc nécessaire de faire connaître l'ensemble de l'INaLF par ce
moyen. Cela correspondait à une demande générale.»

La base FRANTEXT comprend, en mode interactif, 180 millions de mots-
occurrences provenant d'une collection représentative de 3.500 unités
textuelles en arts, sciences et techniques des 16e-20e siècles. Début
1998, 82 centres de recherche et bibliothèques universitaires sont
abonnés, en Europe, en Australie, au Japon et au Canada, ce qui
représente 1.250 postes de travail ayant accès à la base, avec une
cinquantaine de sessions d'interrogations par jour.

Le Projet ARTFL (ARTFL: American and French Research on the Treasury of
the French Language) est un projet commun du Centre national de la
recherche scientifique (CNRS, France) et de l'Université de Chicago
(Illinois, États-Unis). À l'origine, ce projet a pour but de constituer
une base de données de 2.000 textes des 13e-20e siècles ayant trait à
la littérature, la philosophie, les arts et les sciences.

En 1998, l'ARTFL travaille à la version en ligne exhaustive de la
première édition (1751-1772) de l'Encyclopédie ou Dictionnaire raisonné
des sciences, des métiers et des arts de Diderot et d'Alembert. 72.000
articles rédigés par plus de 140 collaborateurs - dont Voltaire,
Rousseau, d'Alembert, Marmontel, d'Holbach, Turgot, etc. - ont fait de
cette encyclopédie un monumental ouvrage de référence pour les arts et
les sciences. Destinée à rassembler puis divulguer les connaissances de
l'époque, elle porte la marque des courants intellectuels et sociaux du
18e siècle, et c'est grâce à elle qu'ont été propagées les idées du
Siècle des Lumières.

L'Encyclopédie comprend 17 volumes de texte - qui représentent 18.000
pages et 20.736.912 mots - et 11 volumes de planches.

La base de données correspondant au premier volume est accessible en
ligne à titre expérimental. La recherche peut être effectuée par mot,
portion de texte, auteur ou catégorie, ou par la combinaison de ces
critères entre eux. On dispose de renvois d'un article à l'autre, au
moyen de liens permettant d'aller d'une planche au texte ou du texte au
fac-similé des pages originales. L'automatisation complète des
procédures de saisie entraîne des erreurs typographiques et des erreurs
d'identification qui sont ensuite corrigées au fil des mois. La
recherche d'images par mot, portion de texte ou catégorie est également
possible dans un deuxième temps.

L'ARTFL travaille aussi à un projet de base de données pour le
Dictionnaire de l'Académie française, dont les différentes éditions se
sont échelonnées entre 1694 et 1935. Ce projet inclut la saisie et
l'édition du texte, ainsi que la création d'un moteur de recherche
spécifique. La première édition (1694) et la cinquième édition (1798)
du dictionnaire sont les premières à être disponibles pour une
recherche par mot, puis pour une recherche en texte intégral. Les
différentes éditions sont ensuite combinées dans une base de données
unique, qui permet de juger de l'évolution d'un terme en consultant
aussi bien une édition particulière que l'ensemble des éditions.

Les autres projets de l'ARTFL sont la version image de l'édition de
1740 du Dictionnaire historique et critique de Philippe Bayle, le
Roget's Thesaurus de 1911, le Webster's Revised Unabridged Dictionary
de 1913, le Thresor de la langue française de Jean Nicot (1606), un
projet multilingue sur La Bible comprenant entre autres La Bible
française de Louis Segond (1910), etc.



PREMIERS PROJETS MULTILINGUES


= Travlang

Travlang, site dédié à la fois aux voyages et aux langues, est créé par
Michael C. Martin en 1994 sur le site de son université alors qu'il
était étudiant en physique. Devenu chercheur au Lawrence Berkeley
National Laboratory (Californie), Michael Martin poursuit la gestion de
ce site devenu très populaire.

La section Foreign Languages for Travelers donne la possibilité
d'apprendre les rudiments de soixante langues sur le web. La section
Translating Dictionaries donne accès à des dictionnaires gratuits dans
diverses langues (afrikaans, allemand, danois, espagnol, espéranto,
finnois, français, frison, hollandais, hongrois, italien, latin,
norvégien, portugais et tchèque). Ces dictionnaires sont le plus
souvent sommaires et de qualité inégale. Le site offre aussi de
nombreux liens vers des services de traduction, des écoles de langue,
des librairies multilingues, etc.

Michael Martin écrit en août 1998: «Je pense que le web est un endroit
idéal pour rapprocher les cultures et les personnes, et ceci inclut
d'être multilingue. Notre site Travlang est très populaire pour cette
raison, et les gens aiment le contact avec d'autres parties du monde.
(...) L'internet est vraiment un outil important pour communiquer avec
des gens avec lesquels on n'aurait pas l'occasion de dialoguer
autrement. J'apprécie vraiment la collaboration générale qui a rendu
possibles les pages de Foreign Languages for Travelers. (...) Je pense
que les traductions intégrales informatisées vont devenir monnaie
courante, et qu'elles permettront de communiquer à la base avec
davantage de gens. Ceci aidera aussi à amener davantage l'internet au
monde non anglophone.»


= Les projets de Tyler

Créée par Tyler Chambers en mai 1994, la Human-Languages Page est un
catalogue détaillé de 1.800 ressources linguistiques dans une centaine
de langues. Ces ressources sont classées dans plusieurs rubriques:
langues et littérature, écoles et institutions, ressources
linguistiques, produits et services, organismes, emplois et stages,
dictionnaires et cours de langues.

Tyler Chambers mène aussi un autre projet relatif aux langues,
l'Internet Dictionary Project, un projet coopératif ouvert à tous pour
la constitution de dictionnaires en accès libre sur le web, de
l'anglais vers d'autres langues (allemand, espagnol, français, italien,
latin et portugais).

Comme expliqué sur le site web, «le but de l'Internet Dictionary
Project est de créer des dictionnaires de traduction grâce à l'aide des
internautes. Ce site permet aux usagers du monde entier de consulter et
de participer à la traduction de termes anglais dans d'autres langues.
Les listes de termes anglais et leurs correspondants dans d'autres
langues sont ensuite mis à la disposition de tous sur ce site, sans
restriction d'aucune sorte. (...) L'Internet Dictionary Project a
débuté en 1995 pour combler une lacune et procurer des dictionnaires de
traduction gratuits à la communauté des internautes et à tous ceux qui
s'intéressent à l'informatique. Non seulement il est très utile d'avoir
immédiatement accès à des dictionnaires par le World Wide Web, mais
ceci permet aussi le développement de logiciels pouvant tirer parti de
tels dictionnaires, que ce soit des programmes de traduction ou des
vérificateurs d'orthographe ou encore des guides d'apprentissage des
langues. En facilitant la création de ces dictionnaires en ligne par
des milliers de volontaires, et en les mettant gratuitement à la
disposition de tous, l'Internet Dictionary Project espère imprimer sa
marque sur l'internet et susciter d'autres projets qui seront plus
bénéfiques que de générer des revenus purement financiers.»

Tyler écrit en septembre 1998 lors d'un entretien par courriel: «Le
multilinguisme sur le web était inévitable bien avant que ce médium ne
se développe vraiment. Mon premier vrai contact avec l'internet date de
1994, un peu après ses débuts mais bien avant son expansion. 1994 a été
aussi l'année où j'ai débuté mon premier projet web multilingue [The
Human-Languages Page, NDLR], et il existait déjà un nombre significatif
de ressources linguistiques en ligne. Ceci était antérieur à la
création de Netscape. Mosaic était le seul navigateur sur le web, et
les pages web étaient essentiellement des documents textuels reliés par
des hyperliens. Avec l'amélioration des navigateurs et l'expérience
acquise par les usagers, je ne pense pas qu'il existe une langue
vivante qui ne soit pas maintenant représentée sur le web, que ce soit
la langue des Indiens d'Amérique ou les dialectes moyen-orientaux. De
même une pléthore de langues mortes peut maintenant trouver une
audience nouvelle avec des érudits et autres spécialistes en ligne. À
ma connaissance, très peu de jeux de caractères ne sont pas disponibles
en ligne: les navigateurs ont maintenant la possibilité de visualiser
les caractères romains, asiatiques, cyrilliques, grecs, turcs, etc.
Accent Software a un produit appelé "Internet avec accents" qui serait
capable de visualiser plus de 30 encodages différents. S'il existe
encore des obstacles à la diffusion d'une langue spécifique sur le web,
ceci ne devrait pas durer.»

En ce qui concerne les projets en ligne de Tyler: «Mon activité en
ligne a été de rendre l'information linguistique accessible à davantage
de gens par le biais de deux de mes projets sur le web [Human-Languages
Page et Internet Dictionary Project, NDLR]. Bien que je ne sois pas
multilingue, ni même bilingue moi-même, je suis conscient du fait que
très peu de domaines ont une importance comparable à celle des langues
et du multilinguisme. L'internet m'a permis de toucher des millions de
personnes et de les aider à trouver ce qu'elles cherchaient, chose que
je suis heureux de faire. (…) Dans l'ensemble, je pense que le web est
important pour la sensibilisation aux langues et pour les questions
culturelles. Dans quel autre endroit peut-on chercher au hasard pendant
vingt minutes et trouver des informations susceptibles de vous
intéresser dans trois langues différentes sinon plus? Les médias de
communication rendent le monde plus petit en rapprochant les gens; je
pense que le web est le premier médium - bien plus que le courrier, le
télégraphe, le téléphone, la radio ou la télévision - à réellement
permettre à l'usager moyen de franchir les frontières nationales et
culturelles. (…) Notre monde est désormais suffisamment petit pour
tenir sur un écran d'ordinateur.»

Comment Tyler voit-il l'avenir? «Je pense que l'avenir de l'internet
réside dans davantage de multilinguisme, d'exploration et de
compréhension multiculturelles que nous n'en avons jamais vu. Toutefois
l'internet sera seulement le médium au travers duquel l'information
circule. Comme le papier qui sert de support au livre, l'internet en
lui-même augmente très peu le contenu de l'information. Par contre il
augmente énormément la valeur de celle-ci dans la capacité qu'il a de
communiquer cette information. Dire que l'internet aiguillonne le
multilinguisme est à mon sens une opinion fausse. C'est la
communication qui aiguillonne le multilinguisme et l'échange
multiculturel. L'internet est seulement le mode de communication le
plus récent qui soit accessible aux gens plus ou moins ordinaires.
L'internet a un long chemin à parcourir avant d'être omniprésent dans
le monde entier, mais il est vraisemblable que lui-même ou un médium de
la même lignée atteigne ce but. Les langues deviendront encore plus
importantes qu'elles ne le sont quand tout le monde pourra communiquer
à l'échelle de la planète (à travers le web, les discussions, les jeux,
le courrier électronique, ou toute application appartenant encore au
domaine de l'avenir), mais je ne sais pas si ceci mènera à un
renforcement des attaches linguistiques ou à une fusion des langues
jusqu'à ce qu'il n'en subsiste plus que quelques-unes ou même une
seule. Une chose qui m'apparaît certaine est que l'internet sera
toujours la marque de notre diversité, y compris la diversité des
langues, même si cette diversité diminue. Et c'est une des choses que
j'aime au sujet de l'internet, c'est un exemple à l'échelle mondiale du
dicton: "Cela n'a pas vraiment disparu tant que quelqu'un s'en
souvient." Et les gens se souviennent.»

Au printemps 2001, la Human-Languages Page fusionne avec le Languages
Catalog (Catalogue des langues), une section de la WWW Virtual Library,
pour devenir iLoveLanguages. En septembre 2003, iLoveLanguages offre
2.000 ressources linguistiques dans une centaine de langues. Quant à
l'Internet Dictionary Project, faute de temps, Tyler met fin à ce
projet en janvier 2007, tout en laissant les dictionnaires existants
tels quels sur le web pour consultation ou téléchargement.


= NetGlos

NetGlos - abrégé de The Multilingual Glossary of Internet Terminology -
est lancé en 1995 à l'initiative du WorldWide Language Institute
(WWLI). Il s'agit d'un projet coopératif en treize langues (allemand,
anglais, chinois, croate, espagnol, français, grec, hébreu,
hollandais/flamand, italien, maori, norvégien et portugais), avec la
participation de nombre de traducteurs et autres professionnels des
langues.

Brian King, directeur du WorldWide Language Institute, explique en
septembre 1998: «Bien que l'anglais soit la langue la plus importante
du web et de l'internet en général, je pense que le multilinguisme fait
inévitablement partie des futures orientations du cyberespace. Voici
quelques éléments qui, à mon sens, permettront que le web multilingue
devienne une réalité:

1. . La
technologie des ordinateurs a longtemps été le seul domaine d'une élite
"technicienne", à l'aise à la fois dans des langages de programmation
complexes et en anglais, la langue universelle des sciences et
techniques. Au départ, les ordinateurs n'ont jamais été conçus pour
manier des systèmes d'écriture ne pouvant être traduits en ASCII. Il
n'y avait pas de place pour autre chose que les 26 lettres de
l'alphabet anglais dans un système d'encodage qui, à l'origine, ne
pouvait même pas reconnaître les accents aigus et les trémas, sans
parler de systèmes non alphabétiques comme le chinois. Mais la
tradition a été bouleversée, et la technologie popularisée. Des
interfaces graphiques tels que Windows et Macintosh ont accéléré le
processus. La stratégie de marketing de Microsoft a consisté à
présenter son système d'exploitation comme facile à utiliser par le
client moyen. A l'heure actuelle, cette facilité d'utilisation s'est
étendue au-delà du PC vers le réseau internet, si bien que même ceux
qui ne sont pas programmeurs peuvent maintenant insérer des applets
Java dans leurs pages web sans comprendre une seule ligne de
programmation.

2. . L'extension de cette popularisation à l'échelon local est
l'exportation des technologies de l'information dans le monde entier.
La popularisation est maintenant effective à l'échelon mondial, et
l'anglais n'est plus nécessairement la langue obligée de l'utilisateur.
Il n'y a plus vraiment de langue indispensable, il y a les langues
propres aux utilisateurs. Une chose est certaine: il n'est plus
nécessaire de comprendre l'anglais pour utiliser un ordinateur, de même
qu'il n'est plus nécessaire d'avoir un diplôme d'informatique. La
demande des utilisateurs non anglophones  - et l'effort entrepris par
les sociétés de haute technologie se faisant concurrence pour obtenir
les marchés mondiaux - ont fait de la localisation un secteur en
expansion rapide dans le développement des logiciels et du matériel
informatique. Le premier pas a été le passage de l'ASCII à l'ASCII
étendu. Ceci signifie que les ordinateurs commençaient à reconnaître
les accents et les symboles utilisés dans les variantes de l'alphabet
anglais, symboles qui appartenaient le plus souvent aux langues
européennes. Cependant une page ne pouvait être affichée que dans une
seule langue à la fois.

3. . L'innovation la plus récente est
l'Unicode. Bien qu'il soit encore en train d'évoluer et qu'il ait tout
juste été incorporé dans les derniers logiciels, ce nouveau système
d'encodage traduit chaque caractère en 16 octets. Alors que l'ASCII
étendu à huit bits pouvait prendre en compte un maximum de 256
caractères, l'Unicode peut prendre en compte plus de 65.000 caractères
uniques et il a donc la possibilité de traiter informatiquement tous
les systèmes d'écriture du monde. Les instruments sont maintenant plus
ou moins en place. Ils ne sont pas encore parfaits, mais on peut
désormais surfer sur le web en utilisant le chinois, le japonais, le
coréen, et nombre d'autres langues n'utilisant pas l'alphabet
occidental. Comme l'internet s'étend à des parties du monde où
l'anglais est très peu utilisé, par exemple la Chine, il est naturel
que ce soit le chinois et non l'anglais qui soit utilisé. La majorité
des usagers en Chine n'a pas d'autre choix que sa langue maternelle.

Une période intermédiaire précède bien sûr ce changement. Une grande
partie de la terminologie technique disponible sur le web n'est pas
encore traduite dans d'autres langues. Et, comme nous nous en sommes
rendus compte dans NetGlos, notre glossaire multilingue de la
terminologie de l'internet, la traduction de ces termes n'est pas
toujours facile. Avant qu'un nouveau terme soit accepté comme le terme
correct, il y a une période d'instabilité avec plusieurs candidats en
compétition. Souvent un terme emprunté à l'anglais est le point de
départ et, dans de nombreux cas, il est aussi le point d'arrivée.
Finalement émerge un vainqueur qui est ensuite utilisé aussi bien dans
les dictionnaires techniques que dans le vocabulaire quotidien de
l'usager non spécialiste. La dernière version de NetGlos est la version
russe, et elle devrait être disponible dans deux semaines environ [à
savoir fin septembre 1998, NDLR]. Elle sera sans nul doute un excellent
exemple du processus dynamique en cours pour la russification de la
terminologie du web.

4. . Dans un rapport de l'UNESCO du début
des années 1950, l'enseignement dispensé dans sa langue maternelle
était considéré comme un droit fondamental de l'enfant. La possibilité
de naviguer sur l'internet dans sa langue maternelle pourrait bien être
son équivalent à l'Âge de l'Information. Si l'internet doit vraiment
devenir le réseau mondial qu'on nous promet, tous les usagers devraient
y avoir accès sans problème de langue. Le considérer comme la chasse
gardée de ceux qui, par accident historique, nécessité pratique ou
privilège politique, connaissent l'anglais, est injuste à l'égard de
ceux qui ne connaissent pas cette langue.

5. . Bien qu'un web multilingue soit
souhaitable sur le plan moral et éthique, un tel idéal ne suffit pas
pour en faire une réalité à vaste échelle. De même que l'utilisateur
non anglophone peut maintenant avoir accès aux technologies dans sa
propre langue, l'impact du commerce électronique peut constituer une
force majeure qui fasse du multilinguisme la voie la plus naturelle
vers le cyberespace. Les vendeurs de produits et services dans le
marché virtuel mondial que devient l'internet doivent être préparés à
traiter avec un monde virtuel qui soit aussi multilingue que le monde
physique. S'ils veulent réussir, ils doivent s'assurer qu'ils parlent
bien la langue de leurs clients!»

En ce qui concerne le WorldWide Language Institute, quelles sont les
perspectives? «Comme l'existence de notre organisme est liée à
l'importance attachée aux langues, je pense que son avenir sera
excitant et stimulant. Mais il est impossible de pratiquer
l'autosuffisance à l'égard de nos réussites et de nos réalisations. La
technologie change à une allure frénétique. L'apprentissage durant
toute la vie est une stratégie que nous devons tous adopter si nous
voulons rester en tête et être compétitifs. C'est une tâche qui est
déjà assez difficile dans un environnement anglophone. Si nous ajoutons
à cela la complexité apportée par la communication dans un cyberespace
multilingue et multiculturel, la tâche devient encore plus
astreignante. Probablement davantage encore que par le passé, la
coopération est aussi indispensable que la concurrence. Les germes
d'une coopération par le biais de l'internet existent déjà. Notre
projet NetGlos dépend du bon vouloir de traducteurs volontaires de
nombreux pays: Canada, États-Unis, Autriche, Norvège, Belgique, Israël,
Portugal, Russie, Grèce, Brésil, Nouvelle-Zélande, etc. À mon avis, les
centaines de visiteurs qui consultent quotidiennement les pages de
NetGlos constituent un excellent témoignage du succès de ce type de
relations de travail. Les relations de coopération s'accroîtront encore
à l'avenir, mais pas nécessairement sur la base du volontariat.»


= Logos

Fondé en 1979 à Modène (Italie) par Rodrigo Vergara, Logos est une
société de traduction offrant des services dans 35 langues en 1997,
avec 300 traducteurs travaillant sur place et un réseau mondial de
2.500 traducteurs travaillant en free-lance. La moyenne de production
est de 200 textes par jour.

Fin 1997, Logos décide de mettre tous ses outils professionnels en
accès libre sur le web. Le Logos Dictionary est un dictionnaire
multilingue de 7,5 millions d'entrées. La Wordtheque est une base de
données multilingue de 328 millions de mots, constituée à partir de
milliers de traductions, notamment des romans et des documents
techniques. La recherche dans la Wordtheque est possible par langue,
par mot, par auteur ou par titre. Linguistic Resources offre un point
d'accès unique à 553 glossaires. L'Universal Conjugator propose des
tableaux de conjugaison dans 17 langues.

Annie Kahn, journaliste au quotidien Le Monde, publie le 7 décembre
1997 un article Les mots pour le dire, dans lequel Robert Vergara
relate: «Nous voulions que nos traducteurs aient tous accès aux mêmes
outils de traduction. Nous les avons donc mis à leur disposition sur
internet, et tant qu’à faire nous avons ouvert le site au public. Cela
nous a rendus très populaires, nous a fait beaucoup de publicité.
L’opération a drainé vers nous de nombreux clients, mais aussi nous a
permis d’étoffer notre réseau de traducteurs grâce aux contacts établis
à la suite de cette initiative.»

Annie Kahn explique dans le même article: «Le site de Logos est
beaucoup plus qu'un dictionnaire ou qu'un répertoire de liens vers
d'autres dictionnaires en ligne. L'un des piliers du système est un
logiciel de recherche documentaire fonctionnant sur un corpus de textes
littéraires disponibles gratuitement sur internet. Lorsque l'on
recherche la définition ou la traduction d'un mot, "didactique" par
exemple, on trouve non seulement le résultat recherché, mais aussi une
phrase d'une œuvre littéraire utilisant ce mot (en l'occurrence, un
essai de Voltaire). Un simple clic permet d'accéder au texte intégral
de l'œuvre ou de commander le livre grâce à un partenariat avec
Amazon.com, le libraire en ligne bien connu. Il en est de même avec les
traductions étrangères. Si aucun texte utilisant ce mot n'a été trouvé,
le système fonctionne alors comme un moteur de recherche et renvoie aux
sites web concernant ce mot. Pour certains termes, il est proposé d'en
entendre la prononciation. Si une traduction manque, le système fait un
appel au peuple. A chacun d'enrichir la base, les traducteurs de
l'entreprise valident ensuite les traductions proposées.»

En 2007, la Wordtheque, devenue la Logos Library, comprend 710 millions
de termes. Conjugation of Verbs, devenu l’Universal Conjugator, propose
des tableaux de conjugaison dans 36 langues. Et Linguistic Resources
offre un point d’accès unique à 1.215 glossaires.



DICTIONNAIRES DE LANGUES


= Dictionnaires imprimés en ligne

Le premier dictionnaire de langue française en accès libre est le
Dictionnaire universel francophone en ligne, qui répertorie 45.000 mots
et 116.000 définitions tout en présentant «sur un pied d’égalité, le
français dit "standard" et les mots et expressions en français tel
qu’on le parle sur les cinq continents».

Issu de la collaboration entre Hachette et l’AUPELF-UREF (devenu depuis
l’AUF: Agence universitaire de la Francophonie), il correspond à la
partie «noms communs» du dictionnaire imprimé disponible chez Hachette.
L’équivalent pour la langue anglaise est le site Merriam-Webster
OnLine, qui donne librement accès au Collegiate Dictionary et au
Collegiate Thesaurus.

En mars 2000, les 20 volumes de l’Oxford English Dictionary (OED) sont
mis en ligne par l’Oxford University Press (OUP). La consultation du
site est payante. Le dictionnaire bénéficie d’une mise à jour
trimestrielle d’environ 1.000 entrées nouvelles ou révisées.

Deux ans après cette première expérience, en mars 2002, l’Oxford
University Press met en ligne l’Oxford Reference Online (ORO), une
vaste encyclopédie conçue directement pour le web et consultable elle
aussi sur abonnement payant. Avec 60.000 pages et un million d’entrées,
elle représente l’équivalent d’une centaine d’ouvrages de référence.


= Répertoires de dictionnaires

Le répertoire Dictionnaires électroniques est un excellent répertoire
établi par la section française des Services linguistiques centraux
(SLC-f) de l'Administration fédérale suisse. Cette liste très complète
de dictionnaires monolingues (allemand, anglais, espagnol, français,
italien), bilingues et multilingues est complétée par des répertoires
d'abréviations et acronymes et des répertoires géographiques,
essentiellement des atlas.

Marcel Grangier, responsable de la section française des Services
linguistiques centraux, écrit en janvier 1999: «Travailler sans
internet est devenu tout simplement impossible: au-delà de tous les
outils et commodités utilisés (messagerie électronique, consultation de
la presse électronique, activités de services au profit de la
profession des traducteurs), internet reste pour nous une source
indispensable et inépuisable d'informations dans ce que j'appellerais
le "secteur non structuré" de la toile. Pour illustrer le propos,
lorsqu'aucun site comportant de l'information organisée ne fournit de
réponse à un problème de traduction, les moteurs de recherche
permettent dans la plus grande partie des cas de retrouver le chaînon
manquant quelque part sur le réseau.»

Comment voit-il l'avenir? «La multiplication des langues présentes sur
internet est inévitable, et ne peut que bénéficier aux échanges
multiculturels. Pour que ces échanges prennent place dans un
environnement optimal, il convient encore de développer les outils qui
amélioreront la compatibilité. La gestion complète des diacritiques ne
constitue qu'un exemple de ce qui peut encore être entrepris.»

Quelques années après, le répertoire Dictionnaires électroniques
rejoint le site de la Conférence des Services de traduction des États
européens (CST).


= yourDictionary.com

Robert Beard, professeur de langues à la Bucknell University (États-
Unis), crée d'abord en 1995 A Web of Online Dictionaries (Un web de
dictionnaires en ligne), qui est un répertoire de dictionnaires en
ligne (avec 800 liens en automne 1998) dans de nombreuses langues,
auquel s'ajoutent d'autres sections: dictionnaires multilingues,
dictionnaires anglophones spécialisés, thésauri et vocabulaires,
grammaires en ligne, et enfin outils linguistiques pour non
spécialistes.

Robert Beard écrit en septembre 1998: «On a d'abord craint que le web
représente un danger pour le multilinguisme, étant donné que l'HTML et
d'autres langages de programmation sont basés sur l'anglais et qu'on
trouve tout simplement plus de sites web en anglais que dans toute
autre langue. Cependant, les sites web que je gère montrent que le
multilinguisme est très présent et que le web peut en fait permettre de
préserver des langues menacées de disparition. Je propose maintenant
des liens vers des dictionnaires dans 150 langues et des grammaires
dans 65 langues. De plus, ceux qui développent les logiciels de
navigation manifestent une attention nouvelle pour la diversité des
langues dans le monde, ce qui favorisera la présence d'un nombre encore
plus grand de sites web dans différentes langues.»

Robert Beard co-fonde ensuite le portail yourDictionary.com, qui
intègre son site précédent, avec mise en ligne du portail en février
2000.

Il écrit en janvier 2000: «Nos nouvelles idées sont nombreuses. Nous
projetons de travailler avec l'Endangered Language Fund aux États-Unis
et en Grande-Bretagne pour rassembler des fonds pour cette fondation et
nous publierons les résultats sur notre site. Nous aurons des groupes
de discussion et des bulletins d'information sur les langues. Il y aura
des jeux de langue destinés à se distraire et à apprendre les bases de
la linguistique. La page Linguistic Fun [qui propose des éléments de
linguistique pour les non initiés, NDLR] deviendra un journal en ligne
avec des extraits courts, intéressants et même amusants dans
différentes langues, choisis par des experts du monde entier. (...) Si
l'anglais domine encore le web, on voit s'accentuer le développement de
sites monolingues et non anglophones du fait des solutions variées
apportées aux problèmes de caractères.»

En septembre 2003, yourDictionary.com, devenu un portail de référence,
répertorie plus de 1.800 dictionnaires dans 250 langues, ainsi que de
nombreux outils linguistiques: vocabulaires, grammaires, glossaires,
méthodes de langues, etc. En avril 2007, le répertoire comprend 2.500
dictionnaires et grammaires dans 300 langues.

Soucieux de servir toutes les langues sans exception, le portail
propose comme prévu l'Endangered Language Repository, une section
spécifique consacrée aux langues menacées. «Les langues menacées sont
essentiellement des langues non écrites, écrit Robert Beard en janvier
2000. Un tiers seulement des quelques 6.000 langues existant dans le
monde sont à la fois écrites et parlées. Je ne pense pourtant pas que
le web va contribuer à la perte de l’identité des langues et j’ai même
le sentiment que, à long terme, il va renforcer cette identité. Par
exemple, de plus en plus d’Indiens d’Amérique contactent des linguistes
pour leur demander d’écrire la grammaire de leur langue et de les aider
à élaborer des dictionnaires. Pour eux, le web est un instrument à la
fois accessible et très précieux d’expression culturelle.»


= Le Grand Dictionnaire terminologique

Le Grand dictionnaire terminologique (GDT) est une initiative majeure
de l'Office québécois de la langue française (OQLF). C'est en effet la
première fois qu'un organisme propose une base terminologique aussi
importante en accès libre sur le web, en septembre 2000. Le GDT est
précédé par Le Signet, une base terminologique pour les technologies de
l'information, dont les 10.000 fiches bilingues français-anglais sont
ensuite intégrées au GDT.

Le GDT est un dictionnaire bilingue français-anglais de 3 millions de
termes appartenant au vocabulaire industriel, scientifique et
commercial. Sa mise en ligne est le résultat d'un partenariat entre
l'OQLF, auteur du dictionnaire, et Semantix, société spécialisée dans
les solutions logicielles linguistiques. Événement célébré par de très
nombreux linguistes, cette mise en ligne est un succès. Dès le premier
mois, le GDT est consulté par 1,3 million de personnes, avec des
pointes de 60.000 requêtes quotidiennes. La gestion de la base est
ensuite assurée par Convera Canada. En février 2003, les requêtes sont
au nombre de 3,5 millions par mois. Une nouvelle version du GDT est
mise en ligne en mars 2003. Sa gestion est désormais assurée par l'OQLF
lui-même, et non plus par une société prestataire.


= Eurodicautom et IATE

Géré par le service de traduction de la Commission européenne,
Eurodicautom est une base terminologique multilingue de termes
économiques, scientifiques, techniques et juridiques permettant de
combiner entre elles les onze langues officielles de l’Union européenne
(allemand, anglais, danois, espagnol, finnois, français, grec,
hollandais, italien, portugais, suédois), ainsi que le latin, avec une
moyenne de 120.000 consultations par jour en 2003.

Fin 2003, Eurodicautom annonce son intégration dans une base
terminologique plus vaste regroupant les bases terminologiques de
plusieurs institutions de l’Union européenne, notamment EUTERPE, la
base du Parlement européen, et TIS, la base du Conseil de l'Union
européenne. Cette nouvelle base traiterait non plus douze langues  mais
une vingtaine, du fait de l'élargissement de l’Union européenne prévu
l'année suivante pour intégrer plusieurs pays d'Europe de l'Est.

Un projet de base terminologique commune est évoqué dès 1999 afin de
renforcer la coopération inter-institutionnelle. Les partenaires de ce
projet sont le Parlement européen, le Conseil de l'Union européenne, la
Commission européenne, la Cour de justice, la Cour des comptes
européenne, le Comité économique et social européen, le Comité des
régions, la Banque européenne d'investissement, la Banque centrale
européenne et enfin le Centre de traduction des organes de l'Union
européenne.

La nouvelle base terminologique voit le jour au printemps 2004 sous le
nom de IATE (Inter-Active Terminology for Europe), d'abord pour un
usage interne dans les institutions de l'Union européenne avant de
migrer sur le web en juin 2007 en tant que service public, avec 1,4
million d’entrées dans les 23 langues officielles de l'Union
européenne, plus le latin. L'Union européenne est en effet passée de 15
à 25 pays membres en mai 2004, pour atteindre 27 pays membres en
janvier 2007, d'où la nécessité de 23 langues officielles au lieu des
11 langues officielles présentes dans Eurodicautom.

Le site web de IATE est administré par le Centre de traduction des
organes de l'Union européenne à Luxembourg (capitale du pays du même
nom), pour le compte des partenaires du projet. Comme expliqué dans la
brochure de IATE, elle-même disponible en 23 langues, «les termes sont
introduits dans la base de données par les terminologues et les
traducteurs de l'Union européenne sur la base des informations fournies
par les traducteurs, les administrateurs, les juristes-linguistes, les
experts et d'autres sources fiables.» En 2009, IATE comprend 8,4
millions de termes, dont  540.000 abréviations et 130.000 expressions.


= WordReference.com

Le site WordReference.com est lancé en 1999 par Michael Kellogg pour
offrir des dictionnaires bilingues gratuits en ligne. En mars 2010,
Michael relate sur son site: «L'internet a été un incroyable outil ces
dernières années pour rassembler des gens du monde entier. L'un des
principaux obstacles à cela reste bien entendu la langue. Le contenu de
l'internet est pour une grande part en anglais et de très nombreux
usagers lisent ces pages alors que l'anglais est leur deuxième langue
et non leur langue maternelle. De par mes propres expériences avec la
langue espagnole, je sais que de nombreux lecteurs comprennent une
grande partie de ce qu'ils lisent, mais pas la totalité.

J'ai débuté ce site en 1999 pour procurer des dictionnaires bilingues
gratuits en ligne et d'autres outils pour tous sur l'internet. Depuis,
le site s'est progressivement développé pour devenir l'un des sites de
dictionnaires en ligne les plus utilisés, et le principal dictionnaire
en ligne pour les paires de langues anglais-espagnol, anglais-français,
anglais-italien, espagnol-français et espagnol-portugais. Ce site est
toujours classé sans interruption parmi les 500 sites les plus visités
du web. Aujourd'hui, je suis heureux de continuer à améliorer ces
dictionnaires, les autres outils linguistiques du site et les forums de
langues. J'ai vraiment plaisir à créer de nouvelles fonctionnalités
pour rendre ce site de plus en plus utile.»

Les dictionnaires les plus populaires sont le dictionnaire espagnol
(espagnol-anglais et anglais-espagnol), le dictionnaire français et le
dictionnaire italien. On trouve aussi un dictionnaire allemand, un
dictionnaire russe et un dictionnaire monolingue anglais. Des tableaux
de conjugaison sont disponibles pour l'espagnol, le français et
l'italien.

Pour l'anglais, on trouve également des dictionnaires de l'anglais vers
les langues suivantes: arabe, chinois, coréen, grec, japonais,
polonais, portugais, roumain, tchèque et turc, et vice versa.

Pour l'espagnol, en plus des deux dictionnaires d'Espasa Calpe et
d'Oxford complétés par le supplément propre à WordReference.com, on
peut consulter un dictionnaire monolingue espagnol, un dictionnaire
espagnol de synonymes, un dictionnaire espagnol-français et un
dictionnaire espagnol-portugais.

Pour le français et l'italien, outre les dictionnaires d'Oxford,
WordReference.com propose deux dictionnaires qui lui sont propres, à
savoir un dictionnaire français-anglais de 250.000 termes et un
dictionnaire italien-anglais de 200.000 termes.

WordReference.com offre également des forums linguistiques très actifs
et de qualité. Si les usagers ont une question sur un problème
linguistique donné, ils peuvent faire une recherche dans les centaines
de milliers de questions précédentes, avant de poser leur propre
question dans l'un des forums si nécessaire, pour être aidés par des
gens des quatre coins du monde.

WordReference Mini est une version miniature du site qui permet son
intégration dans d'autres sites, par exemple des sites d'apprentissage
de langues.

Une version pour appareil mobile est également disponible pour
plusieurs dictionnaires: anglais-espagnol, espagnol-anglais, anglais-
français, français-anglais, anglais-italien, italien-anglais, avec
d'autres paires de langues à venir.



L'APPRENTISSAGE DES LANGUES


= Quelques expériences

Maria Victoria Marinetti, de nationalité mexicaine, est titulaire d'un
doctorat en ingénierie. Depuis son installation en France, elle est
professeur d'espagnol dans plusieurs entreprises du bassin annécien, en
Haute-Savoie, et également traductrice.

Elle raconte en août 1999: «J'ai accès à un nombre important
d'informations au niveau mondial, ce qui est très intéressant pour moi.
J'ai également la possibilité de transmettre ou de recevoir des
fichiers, dans un va-et-vient d'information constant. L'internet me
permet de recevoir ou d'envoyer des traductions générales ou techniques
du français vers l'espagnol et vice versa, ainsi que des textes
espagnols corrigés. Dans le domaine technique ou chimique, je propose
une aide technique, ainsi que des informations sur l'exportation
d'équipes de haute technologie vers le Mexique ou d'autres pays
d'Amérique latine.»

Elle ajoute en août 2001: «Depuis notre premier entretien, j'utilise
beaucoup l'internet pour des échanges avec ma famille au Mexique et
avec mes amis un peu partout dans le monde. C'est un outil de
communication rapide, agréable et fantastique pour moi. Par contre,
pour l'utilisation d'internet comme outil de télétravail, très peu
d'entreprises ont le matériel et l'expérience nécessaires pour échanger
des données dans le travail quotidien, notamment par la voix et l'image
(par exemple pour la formation ou les conférences par l'internet). Pour
ma part, je rencontre ce problème car je souhaite proposer une
téléformation en langue espagnole, en utilisant la voix et l'image.
Mais mes entreprises clientes ne sont pas habituées à utiliser ces
moyens de communication malgré leur caractère pratique (pas de
déplacements à faire) et malgré la fiabilité accrue de ces nouveaux
moyens de communication par l'internet. En conclusion, les sociétés de
conseil informatique ont encore beaucoup à faire pour familiariser les
entreprises à l'utilisation des nouvelles technologies liées aux
transferts de données par l'internet.»

Robert Beard, professeur de langues et créateur du portail
yourDictionary.com, écrit en septembre 1998: «En tant que professeur de
langues, je pense que le web présente une pléthore de nouvelles
ressources disponibles dans la langue étudiée, de nouveaux instruments
d'apprentissage (exercices interactifs Java et Shockwave) et de test,
qui sont à la disposition des étudiants quand ceux-ci en ont le temps
ou l'envie, 24 heures par jour et 7 jours par semaine. Aussi bien pour
mes collègues que pour moi, et bien sûr pour notre établissement,
l'internet nous permet aussi de publier pratiquement sans limitation.»

Comment voit-il l'avenir? «L'internet nous offrira tout le matériel
pédagogique dont nous pouvons rêver, y compris des notes de lecture,
exercices, tests, évaluations et exercices interactifs plus efficaces
que par le passé, parce que reposant davantage sur la notion de
communication.»

Une autre expérience est celle de Russon Wooldridge, professeur au
département des études françaises de l'Université de Toronto (Canada),
qui relate en février 2001: «Tout mon enseignement exploite au maximum
les ressources d'internet (le web et le courriel): les deux lieux
communs d'un cours sont la salle de classe et le site du cours, sur
lequel je mets tous les matériaux des cours. Je mets toutes les données
de mes recherches des vingt dernières années sur le web (réédition de
livres, articles, textes intégraux de dictionnaires anciens en bases de
données interactives, de traités du 16e siècle, etc.). Je publie des
actes de colloques, j'édite un journal, je collabore avec des collègues
français, mettant en ligne à Toronto ce qu'ils ne peuvent pas publier
en ligne chez eux. En mai 2000 j'ai organisé à Toronto un colloque
international sur "Les études françaises valorisées par les nouvelles
technologies". (…) Je me rends compte que sans internet mes activités
seraient bien moindres, ou du moins très différentes de ce qu'elles
sont actuellement. Donc je ne vois pas l'avenir sans.»


= Des outils pour les enseignants

Depuis ses débuts en 1989, le Computer in Teaching Initiative (CTI)
Centre for Modern Languages est un centre inclus dans l'Institut des
langues de l'Université d'Hull (Royaume-Uni) et vise à promouvoir
l'utilisation des ordinateurs dans l'apprentissage et l'enseignement
des langues. Connu sous le nom de CTI Centre, il procure des
informations sur la manière dont l'apprentissage des langues assisté
par ordinateur peut être effectivement intégré à des cours existants,
et il offre un soutien aux professeurs qui utilisent - ou souhaitent
utiliser - l'informatique dans l'enseignement qu'ils dispensent.

June Thompson, responsable du CTI Centre, écrit en décembre 1998: «Avec
l'internet, on a la possibilité de favoriser l'utilisation des langues
étrangères, et notre organisation ne soutient absolument pas la
suprématie de l'anglais en tant que langue de l'internet. L'utilisation
de l'internet a apporté une nouvelle dimension à notre tâche qui
consiste à soutenir les professeurs de langue dans l'utilisation de la
technologie correspondante. Je pense que, dans un avenir proche,
l'utilisation de supports linguistiques sur l'internet va continuer à
se développer en même temps que d'autres activités liées aux
technologies, par exemple l'utilisation de CD-ROM - certains
établissements n'ont pas suffisamment de matériel informatique en
réseau. A l'avenir, il me semble que l'utilisation de l'internet jouera
un rôle plus grand, mais seulement si ces activités sont à caractère
pédagogique. Notre organisme travaille étroitement avec le WELL, qui se
consacre à ces problèmes.»

Le WELL (Web Enhanced Language Learning) est un projet britannique mené
à bien entre 1997 et 2000 pour donner accès à des ressources en ligne
de qualité dans douze langues différentes. Sélectionnées et décrites
par des experts, ces ressources sont complétées par des informations et
des exemples sur la manière de les utiliser pour l'enseignement ou
l'apprentissage d'une langue.

Ce projet est l'œuvre de l'association EUROCALL (European Association
for Computer-Assisted Language Learning), qui regroupe des
professionnels de l'enseignement des langues exerçant en Europe et dans
le monde entier. Ses objectifs sont de favoriser l'utilisation des
langues étrangères en Europe, encourager une vision européenne de
l'utilisation des technologies pour l'apprentissage des langues, et
enfin promouvoir la création et la diffusion d'un matériel de qualité.

Un autre projet d'EUROCALL est CAPITAL (Computer-Assisted Pronunciation
Investigation Teaching and Learning), qui regroupe des chercheurs et
praticiens souhaitant utiliser l'informatique dans ce domaine.


= La LINGUIST List

Gérée par l'Eastern Michigan University et la Wayne State University,
deux universités des États-Unis, la LINGUIST List est une liste de
diffusion à destination des linguistes. Les messages reçus sont classés
dans diverses rubriques: profession (conférences, associations
linguistiques, programmes, etc.), recherche et soutien à la recherche
(articles, résumés de mémoires, projets, bibliographies, dossiers,
textes), publications, pédagogie, ressources linguistiques (langues,
familles linguistiques, dictionnaires, informations régionales) et
soutien informatique (polices de caractères et logiciels). La LINGUIST
List propose aussi un centre de documentation virtuel, dénommé Virtual
Library.

Helen Dry, modératrice de la LINGUIST List, explique en août 1998: «La
LINGUIST List, que je modère, a pour politique d'accepter les
informations dans toutes les langues, puisque c'est une liste pour
linguistes. Nous ne souhaitons cependant pas que le message soit publié
dans plusieurs langues, tout simplement à cause de la charge de travail
que cela représenterait pour notre personnel de rédaction (nous ne
sommes pas une liste fourre-tout, mais une liste modérée: avant d'être
publié, chaque message est classé par nos étudiants-rédacteurs dans une
section comprenant des messages du même type). Notre expérience nous
montre que pratiquement tout le monde choisit de publier en anglais.
Mais nous relions ces informations à un système de traduction qui
présente nos pages dans cinq langues différentes. Ainsi un abonné ne
lit LINGUIST en anglais que s'il le souhaite. Nous essayons aussi
d'avoir au moins un étudiant-éditeur qui soit réellement multilingue,
afin que les lecteurs puissent correspondre avec nous dans d'autres
langues que l'anglais.»



LES LANGUES MINORITAIRES


= La liste de Caoimhín

Contrairement aux clichés véhiculés dans les médias, l’internet ne
favorise pas forcément l'hégémonie de l'anglais et n'entraîne pas la
disparition des langues minoritaires. L'internet peut au contraire
contribuer à protéger ces langues, s'il existe une volonté politique et
culturelle dans ce sens. En témoigne l'expérience de Caoimhín.

Caoimhín Ó Donnaíle est professeur d’informatique à l’Institut Sabhal
Mór Ostaig, situé sur l’île de Skye, en Écosse. Il dispense ses cours
en gaélique écossais. Il est également le webmestre du site de
l’institut, qui est bilingue anglais-gaélique et qui se trouve être la
principale source d’information mondiale sur le gaélique écossais. Sur
ce site, il tient à jour la page European Minority Languages, une liste
elle aussi bilingue anglais-gaélique, avec classement par ordre
alphabétique de langues et par famille linguistique.

Interviewé en août 1998, Caoimhín raconte: «L'internet a contribué et
contribuera au développement fulgurant de l'anglais comme langue
mondiale. L'internet peut aussi grandement aider les langues
minoritaires. Ceci ne se fera pas tout seul, mais seulement si les gens
choisissent de défendre une langue. Le web est très utile pour
dispenser des cours de langues, et la demande est grande.»

Près de trois ans plus tard, en mai 2001, il ajoute: «Nos étudiants
utilisent un correcteur d’orthographe en gaélique et une base
terminologique en ligne en gaélique. (...) Il est maintenant possible
d’écouter la radio en gaélique (écossais et irlandais) en continu sur
l’internet partout dans le monde. Une réalisation particulièrement
importante a été la traduction en gaélique du navigateur Opera. C’est
la première fois qu’un logiciel de cette taille est disponible en
gaélique.»

La langue gaélique est promue par toute une communauté linguistique.
Mais qu'en est-il des langues menacées? «En ce qui concerne l’avenir
des langues menacées, l’internet accélère les choses dans les deux
sens. Si les gens ne se soucient pas de préserver les langues,
l’internet et la mondialisation qui l’accompagne accéléreront
considérablement la disparition de ces langues. Si les gens se soucient
vraiment de les préserver, l’internet constituera une aide
irremplaçable.»


= Le site Windows on Haiti

Guy Antoine, créateur de Windows on Haiti, site de référence sur la
langue haïtienne, relate en novembre 1999: «J’ai fait de la promotion
du kreyòl (créole haïtien) une cause personnelle, puisque cette langue
est le principal lien unissant tous les Haïtiens, malgré l’attitude
dédaigneuse d’une petite élite haïtienne - à l’influence
disproportionnée - vis-à-vis de l’adoption de normes pour l’écriture du
kreyòl et le soutien de la publication de livres et d’informations
officielles dans cette langue. A titre d’exemple, il y avait récemment
dans la capitale d’Haïti un Salon du livre de deux semaines, à qui on
avait donné le nom de "Livres en folie". Sur les 500 ouvrages d’auteurs
haïtiens présentés lors du salon, il y en avait une vingtaine en
kreyòl, ceci dans le cadre de la campagne insistante que mène la France
pour célébrer la Francophonie dans ses anciennes colonies. A Haïti cela
se passe relativement bien, mais au détriment direct de la
Créolophonie.

En réponse à l’attitude de cette minorité haïtienne, j’ai créé sur mon
site Windows on Haiti deux forums de discussion exclusivement en
kreyòl. Le premier forum regroupe des discussions générales sur toutes
sortes de sujets, mais en fait ces discussions concernent
principalement les problèmes socio-politiques qui agitent Haïti. Le
deuxième forum est uniquement réservé aux débats sur les normes
d’écriture du kreyòl. Ces débats sont assez animés, et un certain
nombre d’experts linguistiques y participent. Le caractère exceptionnel
de ces forums est qu’ils ne sont pas académiques. Je n’ai trouvé nulle
part ailleurs sur l’internet un échange aussi spontané et aussi libre
entre des experts et le grand public pour débattre dans une langue
donnée des attributs et des normes de la même langue.»

En juin 2001, Guy Antoine rejoint l’équipe dirigeante de Mason
Integrated Technologies, une société dont l’objectif est de créer des
outils permettant l’accessibilité des documents publiés dans des
langues dites minoritaires. «Étant donné l’expérience de l’équipe en la
matière, nous travaillons d’abord sur le créole haïtien (kreyòl), qui
est la seule langue nationale d’Haïti, et l’une des deux langues
officielles (l’autre étant le français). Cette langue ne peut guère
être considérée comme une langue minoritaire dans les Caraïbes
puisqu’elle est parlée par huit à dix millions de personnes.»



DES ENCYCLOPÉDIES MULTILINGUES


= Des projets précurseurs

Robert Beard, professeur de langues et co-fondateur du portail
yourDictionary.com, écrit en septembre 1998: «Le web sera une
encyclopédie du monde faite par le monde pour le monde. Il n'y aura
plus d'informations ni de connaissances utiles qui ne soient pas
disponibles, si bien que l'obstacle principal à la compréhension
internationale et interpersonnelle et au développement personnel et
institutionnel sera levé. Il faudrait une imagination plus débordante
que la mienne pour prédire l'effet de ce développement sur l'humanité.»

Les premières grandes encyclopédies en ligne apparaissent en décembre
1999 avec WebEncyclo et l’Encyclopaedia Universalis en langue française
et Britannica.com en langue anglaise.

WebEncyclo, publié par les éditions Atlas, est la première grande
encyclopédie francophone en accès libre. La recherche est possible par
mots-clés, thèmes, médias (à savoir les cartes, liens internet, photos
ou illustrations) et idées. Un appel à contribution incite les
spécialistes d’un sujet donné à envoyer des articles, qui sont
regroupés dans la section WebEncyclo contributif. Après avoir été
libre, l’accès est ensuite soumis à une inscription préalable gratuite.

La version web de l’Encyclopaedia Universalis est mise en ligne à la
même date, soit un ensemble de 28.000 articles signés par 4.000
auteurs. Si la consultation est payante sur la base d’un abonnement
annuel, de nombreux articles sont en accès libre.

Le site Britannica.com est la première grande encyclopédie anglophone
en accès libre. Le site web propose l’équivalent numérique des 32
volumes de la 15e édition de l’Encyclopaedia Britannica, parallèlement
à la version imprimée et à la version CD-ROM, toutes deux payantes. Le
site offre aussi une sélection d’articles issus de 70 magazines, un
guide des meilleurs sites, un choix de livres, etc., le tout étant
accessible à partir d’un moteur de recherche unique. En septembre 2000,
le site fait partie des cent sites les plus visités au monde. En
juillet 2001, la consultation devient payante sur la base d’un
abonnement annuel ou mensuel. Fin 2008, Britannica.com annonce
l'ouverture prochaine de son site à des contributeurs extérieurs, avec
inscription obligatoire pour écrire et modifier des articles.


= Wikipédia

Issu du terme hawaïen «wiki» (qui signifie: vite, rapide), un wiki est
un site web permettant à plusieurs utilisateurs de collaborer en ligne
sur un même projet. A tout moment, ces utilisateurs peuvent contribuer
à la rédaction du contenu, modifier ce contenu et l'enrichir en
permanence. Le wiki est utilisé par exemple pour créer et gérer des
dictionnaires, des encyclopédies ou encore des sites d'information sur
un sujet donné. Le programme présent derrière l'interface d'un wiki est
plus ou moins élaboré. Un programme simple gère du texte et des
hyperliens. Un programme élaboré permet d'inclure des images, des
graphiques, des tableaux, etc. L’encyclopédie wiki la plus connue est
Wikipédia.

Fondée en janvier 2001 à l’initiative de Jimmy Wales et de Larry Sanger
(Larry quitte ensuite l'équipe), Wikipédia est une encyclopédie
gratuite écrite collectivement et dont le contenu est librement
réutilisable. Elle est immédiatement très populaire. Sans publicité et
financée par des dons, cette encyclopédie coopérative est rédigée par
des milliers de volontaires - appelés Wikipédiens, et qui s'inscrivent
sous un pseudonyme - avec possibilité de corriger et compléter les
articles, aussi bien les leurs que ceux d'autres contributeurs. Les
articles restent la propriété de leurs auteurs, et leur libre
utilisation est régie par la licence GFDL (GNU free documentation
license).

En décembre 2004, Wikipédia compte 1,3 million d'articles rédigés dans
une centaine de langues par 13.000 contributeurs. En décembre 2006,
Wikipédia compte 6 millions d'articles dans 250 langues, et devient
l'un de dix sites les plus visités du web. En mai 2007, Wikipédia
compte 7 millions d'articles dans 192 langues, dont 1,8 million en
anglais, 589.000 en allemand, 500.000 en français, 260.000 en portugais
et 236.000 en espagnol. En 2009, Wikipédia fait partie des cinq sites
les plus visités du web.

Fondée en juin 2003, la Wikimedia Foundation gère non seulement
Wikipédia mais aussi Wiktionary, un dictionnaire et thésaurus
multilingue lancé en décembre 2002, puis Wikibooks (livres et manuels
en cours de rédaction) lancé en juin 2003, auxquels s'ajoutent ensuite
Wikiquote (répertoire de citations), Wikisource (textes appartenant au
domaine public), Wikimedia Commons (sources multimédia), Wikispecies
(répertoire d'espèces animales et végétales), Wikinews (site
d'actualités) et enfin Wikiversity (matériel d'enseignement), lancé en
août 2006.



LOCALISATION ET INTERNATIONALISATION


Peter Raggett, sous-directeur (puis directeur) du Centre de
documentation et d'information (CDI) de l'OCDE (Organisation de
coopération et de développement économiques), écrit en août 1999: «Je
pense qu'il appartient aux organisations et sociétés européennes
d'offrir des sites web si possible en trois ou quatre langues. À
l'heure de la mondialisation et du commerce électronique, les sociétés
ont un marché potentiel sur plusieurs pays à la fois. Permettre aux
usagers francophones, germanophones ou nippons de consulter un site web
aussi facilement que les usagers anglophones donnera une plus grande
compétitivité à une firme donnée.»

«Vers la communication sur internet dans toutes les langues...», tel
est le sous-titre de la page d'accueil de Babel, un projet conjoint
d'Alis Technologies et de l'Internet Society lancé en 1997 dans
l'optique d'une internationalisation de l'internet. À cette date, le
site multilingue de Babel (en anglais, allemand, espagnol, français,
italien, portugais et suédois) propose deux grands secteurs: (a) un
secteur langues, avec trois sections: langues du monde, glossaire
typographique et linguistique, Francophonie; (b) un secteur internet et
multilinguisme, avec deux sections: développer votre site web
multilingue, et codage des écritures du monde. Babel propose aussi la
page Palmarès des langues de la toile, qui est la première à donner la
répartition réelle des langues sur le réseau.

Bill Dunlap est le fondateur de Euro-Marketing Associates, une société
de conseil en marketing qu'il lance en 1985 à Paris et San Francisco.
En 1995, il restructure cette société en service de conseil en ligne
dénommé Global Reach, le but étant de promouvoir les sites web des
entreprises dans d'autres pays, afin d'attirer plus de visiteurs, et
donc d'augmenter les ventes. Cette méthode comprend la traduction d'un
site web dans plusieurs langues, la promotion active du site, et enfin
l'accroissement de la fréquentation locale au moyen de bandeaux
publicitaires ciblés.

Bill Dunlap explique en décembre 1998: «Il y a très peu de gens aux
États-Unis qui sont intéressés de communiquer dans plusieurs langues.
Pour la plupart, ils pensent encore que le monde entier parle anglais.
Par contre, en Europe, les pays sont petits, si bien que, depuis des
siècles, une perspective internationale est nécessaire. Depuis 1981,
début de mon activité professionnelle, j'ai été impliqué dans la venue
de sociétés américaines en Europe. Ceci est pour beaucoup un problème
de langue, puisque leurs informations commerciales doivent être
disponibles dans les langues européennes pour être prises en compte en
Europe. Comme le web est devenu populaire en 1995, j'ai donné à ces
activités une dimension "en ligne", et j'en suis venu à promouvoir le
cybercommerce européen auprès de mes compatriotes américains. (...)

Promouvoir un site est aussi important que le créer, sinon plus. On
doit être préparé à utiliser au moins autant de temps et d'argent à
promouvoir son site qu'on en a passé à l'origine à le créer. Le
programme Global Reach permet de promouvoir un site dans des pays non
anglophones, afin d'atteindre une clientèle plus large... et davantage
de ventes. Une société a de nombreuses bonnes raisons de considérer
sérieusement le marché international. Global Reach est pour elle le
moyen d'étendre son site web à de nombreux pays, de le présenter à des
visiteurs en ligne dans leur propre langue, et de pénétrer le réseau de
commerce en ligne présent dans ces pays.»

Bill Dunlap ajoute en juillet 1999: «Une fois que la page d'accueil
d'un site est disponible en plusieurs langues, l'étape suivante est le
développement du contenu dans chaque langue. Un webmestre notera
quelles langues attirent plus de visiteurs (et donc plus de ventes) que
d'autres. Ce seront donc dans ces langues que débutera une campagne de
promotion multilingue sur le web. Parallèlement, il est toujours bon de
continuer à augmenter le nombre de langues dans lesquelles un site web
est disponible. Au début, seule la page d'accueil traduite en plusieurs
langues suffit, mais ensuite il est souhaitable de développer un
véritable secteur pour chaque langue.»

Le World Wide Web Consortium (W3C) est un consortium industriel
international fondé en 1994 pour développer les protocoles communs du
web. Le site du W3C propose notamment une section
Internationalization/Localization, qui donne une définition des
protocoles utilisés: HTML (hypertext markup language), jeux (de base)
de caractères, nouveaux attributs, HTTP (hypertext transfer protocol),
négociation de la langue, URL (uniform resource locator) et autres
identificateurs incluant des caractères non ASCII (American standard
code for information interchange). Le site propose aussi des conseils
pour créer un site multilingue.



LA TRADUCTION ASSISTÉE PAR ORDINATEUR


L'internet étant une source d'information à vocation mondiale, il
semble indispensable d'augmenter fortement les activités de traduction.
Auteur des Chroniques de Cybérie, une chronique hebdomadaire en ligne
des actualités du réseau, Jean-Pierre Cloutier déplore en août 1999
«qu’il se fasse très peu de traductions des textes et essais importants
qui sont publiés sur le web, tant de l’anglais vers d’autres langues
que l’inverse. (...) La nouveauté d’internet dans les régions où il se
déploie présentement y suscite des réflexions qu’il nous serait utile
de lire. À quand la traduction des penseurs hispanophones et autres de
la communication?»

Créé à Amsterdam (Pays-Bas) par la firme Vorontsoff, Wesseling &
Partners, Aquarius est le premier répertoire non commercial de
traducteurs et interprètes. En novembre 1998, il comprend 6.100
traducteurs, 800 sociétés de traduction, 91 domaines d'expertise et 369
combinaisons de langues. Le site permet de localiser particuliers et
sociétés et de les contacter directement, sans intermédiaire. La
recherche est possible par lieu, par combinaison de langues et par
spécialité.

De plus, depuis décembre 1997, des logiciels de traduction automatique
sont en accès libre sur le web - à commencer par ceux de SYSTRAN sur
AltaVista - et permettent de traduire en quelques secondes une page web
ou un texte court, avec plusieurs combinaisons de langues possibles. Il
va sans dire que la traduction automatique n’offre pas la qualité de
travail des professionnels de la traduction, et qu’il est préférable de
faire appel à ces derniers lorsqu'on a le temps et l’argent
nécessaires. Ces logiciels sont toutefois très pratiques pour obtenir
une traduction approximative en quelques secondes.

De plus en plus utilisée, la traduction assistée par ordinateur permet
de coupler traduction automatique et travail du traducteur
professionnel. Elle est une branche de l'ingénierie du langage, tout
comme le traitement de la langue naturelle et la traduction automatique
(traitée dans le chapitre suivant).

Lancé en janvier 1999 par la Commission européenne, le site HLTCentral
(HLT: Human Languages Technologies) propose une courte définition de
l'ingénierie du langage: «L'ingénierie du langage permet de vivre en
toute convivialité avec la technologie. Nous pouvons utiliser notre
connaissance du langage pour développer des systèmes capables de
reconnaître à la fois la parole et l'écrit, de comprendre un texte
suffisamment en profondeur pour être capable de sélectionner des
informations, de le traduire dans différentes langues et de générer
aussi bien un discours oral qu'un texte imprimé. L'application de ces
technologies nous permet de repousser les limites actuelles de notre
utilisation du langage. Les systèmes à commande vocale sont appelés à
jouer un rôle prépondérant et à faire partie intégrante de notre vie
quotidienne.»

Contrairement à la traduction automatique (TA) qui analyse le texte
dans la langue source et génère automatiquement le texte correspondant
dans la langue cible, sans intervention humaine pendant ce processus,
la traduction assistée par ordinateur (TAO) est basée sur l'interaction
entre l'homme et la machine pendant le processus de traduction.

La TAO est par exemple adoptée dès le milieu des années 1990 par le
Bureau des services linguistiques de l'Organisation mondiale de la
santé (OMS) à Genève (Suisse). Ce bureau travaille dans les six langues
officielles de l'organisation: anglais, arabe, chinois, espagnol,
français et russe.

Des expériences de traduction automatique (TA) sont également tentées,
à plusieurs reprises, mais les traductions obtenues demandent un
travail de révision trop important, si bien que, compte-tenu du type de
documents à traduire, la TAO semble bien préférable.

Au sein de l'OMS, l'Unité de traduction assistée par ordinateur et de
terminologie (CTT) explore les possibilités techniques offertes par les
systèmes les plus récents de TAO, qui reposent sur la notion de
«mémoire de traduction».

Comme expliqué sur le site web, «ces systèmes permettent au traducteur
d'avoir immédiatement accès au patrimoine du "déjà traduit" dans lequel
il peut puiser, quitte à rejeter ou modifier les solutions retenues par
ses prédécesseurs, son choix définitif venant ensuite enrichir la
mémoire. Ainsi, en archivant la production quotidienne, le traducteur
aurait vite à sa disposition une "mémoire" colossale de solutions
toutes faites à un nombre important de problèmes de traduction.»

En complément, le CTT utilise aussi plusieurs applications pour
l'archivage électronique et la recherche en texte intégral,
l'alignement de textes bilingues et multilingues, la gestion de
mémoires de traduction et de bases de données terminologiques, et enfin
la reconnaissance vocale.

Basé à Washington, D.C., au sein de l'Organisation panaméricaine de la
santé (OPS), le Bureau régional de l'OMS pour les Amériques utilise par
contre un système de traduction automatique développé par les
linguistes computationnels, traducteurs et programmeurs de l'OPS.

Le service de traduction utilise SPANAM (de l'espagnol vers l'anglais)
depuis 1980 et ENGSPAN (de l'anglais vers l'espagnol) depuis 1985, ce
qui lui a permis de traiter plus de 25 millions de mots entre 1980 et
1998 dans les deux langues officielles de l'OPS. Le personnel et les
traducteurs extérieurs post-éditent ensuite l'information brute avec un
gain de productivité de 30 à 50%. Le système est installé sur le réseau
local du siège de l'organisation et dans plusieurs bureaux régionaux
pour pouvoir être utilisé par le personnel des services techniques et
administratifs. Il est également diffusé auprès d'organismes publics et
d'organismes à but non lucratif aux États-Unis, en Amérique latine et
en Espagne. Ce système est plus tard renommé PAHOMTS, avec
l'introduction de nouvelles paires de langues pour le portugais.

Autre expérience, celle de Wordfast. Lancé en 1999 par Yves
Champollion, Wordfast est un logiciel de traduction avec terminologie
disponible en temps réel et contrôle typographique. Il est compatible
avec d'autres logiciels très utilisés comme le WebSphere Translation
Server d’IBM et les logiciels de TMX ou de Trados. Une version
simplifiée de Wordfast est téléchargeable gratuitement, avec un manuel
d’utilisation disponible en seize langues.

Wordfast devient au fil des ans le numéro un mondial des logiciels de
traduction utilisables sous toute plateforme (Windows, Mac, Linux), et
le numéro deux mondial en nombre de ventes (après SDL Trados), avec
20.000 clients dans le monde en 2009, dont les Nations Unies, Nomura
Securities, la NASA (National Aeronautics and Space Administration) et
McGraw-Hill.



LA TRADUCTION AUTOMATIQUE


= Définition

Un logiciel de traduction automatique (TA) analyse le texte dans la
langue à traduire (langue source) et génère automatiquement le texte
dans la langue désirée (langue cible), en utilisant des règles précises
pour le transfert de la structure grammaticale. L'être humain
n'intervient pas au cours du processus, contrairement à la traduction
assistée par ordinateur (TAO), qui implique une interaction entre
l'homme et la machine.

Si la traduction automatique reste très approximative, les logiciels de
traduction sont toutefois très pratiques pour fournir un résultat
immédiat et à moindres frais sinon gratuit. Ces logiciels n'ont cessé
de s'améliorer au fil des ans, sans toutefois avoir la prétention
d'égaler le travail du cerveau humain. De plus, depuis décembre 1997,
des logiciels en accès libre sur le web permettent de traduire en
quelques secondes une page web ou un texte court, avec plusieurs
combinaisons de langues possibles.

SYSTRAN, société franco-américaine pionnière dans le traitement
automatique des langues, explique sur son site web: «Un logiciel de
traduction automatique traduit une langue naturelle dans une autre
langue naturelle. La traduction automatique prend en compte la
structure grammaticale de chaque langue et elle utilise des règles pour
transférer la structure grammaticale de la langue source (texte à
traduire) vers la langue cible (texte traduit). La traduction
automatique ne remplace pas et n'est pas destinée à remplacer le
traducteur humain.»

L'EAMT (European Association for Machine Translation) donne pour sa
part la définition suivante: «La traduction automatique (TA) est
l'utilisation de l'ordinateur pour la traduction de textes d'une langue
naturelle à une autre. Elle fut un des premiers domaines de recherche
en informatique. Il s'est avéré que cet objectif était difficile à
atteindre. Cependant il existe aujourd'hui un certain nombre de
systèmes produisant un résultat qui, s'il n'est pas parfait, est de
qualité suffisante pour être utile dans certaines applications
spécifiques, en général dans le domaine de la documentation technique.
De plus, les logiciels de traduction, qui sont essentiellement destinés
à aider le traducteur humain à produire des traductions, jouissent
d'une popularité croissante auprès d'organisations de traduction
professionnelles.»


= Historique

L'intéressant historique donné sur le site de Globalink, une société
spécialisée dans les logiciels et services de traduction (disparue
depuis), est résumé dans les paragraphes suivants.

Dès leurs débuts, la traduction automatique et le traitement de la
langue naturelle progressent de pair avec l'évolution de l'informatique
quantitative. Pendant la Seconde guerre mondiale, le développement des
premiers ordinateurs programmables est accéléré par les premiers
efforts cryptographiques pour tenter de fissurer les codes secrets
allemands et autres codes de guerre. Suite à la guerre, la traduction
et l'analyse du texte en langue naturelle procurent une base de travail
au secteur émergent de la théorie de l'information.

Pendant les années 1950, la recherche sur la traduction automatique
prend forme au sens de traduction littérale (mot à mot) sans utiliser
de règles linguistiques. Le projet débuté à l'Université de Georgetown
au début des années 1950 représente la première tentative systématique
pour créer un système de traduction automatique utilisable pour le
russe.

Jusqu'au milieu des années 1960, plusieurs projets de recherche aussi
bien universitaires que gouvernementaux sont menés aux États-Unis et en
Europe. Au même moment, les progrès rapides dans le domaine de la
linguistique théorique culminent en 1965 avec la publication du livre
Aspects de la théorie syntaxique de Noam Chomsky, et transforment
radicalement les concepts permettant de comprendre la phonologie, la
morphologie, la syntaxe et la sémantique du langage humain.

En 1966, le rapport ALPAC (Automatic Language Processing Advisory
Committee) remis au gouvernement des États-Unis fait une estimation
prématurément négative de la valeur des systèmes de traduction
automatique et des perspectives sur leurs applications pratiques,
mettant ainsi fin au financement et à l'expérimentation dans ce domaine
pour la décennie suivante.

Il faut attendre la fin des années 1970 pour que des expériences
sérieuses soient à nouveau entreprises, parallèlement aux progrès de
l’informatique et des technologies des langues. Cette période voit le
développement de systèmes de transfert d’une langue à l’autre et le
lancement des premières tentatives commerciales. Des sociétés comme
SYSTRAN et METAL sont persuadées de l'utilité et de la viabilité d’un
tel marché. Elles mettent sur pied des produits et services de
traduction automatique reliés à un serveur central.

Mais les problèmes restent nombreux, par exemple des coûts élevés de
développement, un énorme travail lexicographique, la difficulté de
proposer de nouvelles combinaisons de langues, l’inaccessibilité de
tels systèmes pour l’utilisateur moyen, et enfin la difficulté de
passer à de nouveaux stades de développement.


= Quelques avis

Contrairement aux prévisions optimistes des années 1950 annonçant
l'apparition imminente de la machine à traduire universelle, les
systèmes de traduction automatique ne produisent pas encore de
traductions de bonne qualité. Pourquoi? Pierre Isabelle et Patrick
Andries, du laboratoire RALI (Laboratoire de recherche appliquée en
linguistique informatique) à Montréal (Québec), expliquent ce échec
dans La traduction automatique, 50 ans après, un article publié en 1998
dans les dossiers du magazine en ligne Multimédium.

Ils écrivent: «L'objectif ultime de construire une machine capable de
rivaliser avec le traducteur humain n'a cessé de fuir par devant les
lentes avancées de la recherche. Les approches traditionnelles à base
de règles ont conduit à des systèmes qui tendent à s'effondrer sous
leur propre poids bien avant de s'élever au-dessus des nuages de
l'ambiguïté sémantique. Les approches récentes à base de gros ensembles
de textes, appelés corpus - qu'elles soient fondées sur les méthodes
statistiques ou les méthodes analogiques - promettent bien de réduire
la quantité de travail manuel requise pour construire un système de TA
[traduction automatique], mais il est moins sûr qu'elles promettent des
améliorations substantielles de la qualité des traductions machine.»

Reprenant les idées de Yehochua Bar-Hillel exprimées dans The State of
Machine Translation, un article publié en 1951, Pierre Isabelle et
Patrick Andries définissent trois stratégies d'application de la
traduction automatique: (a) une aide pour «balayer» la production
écrite et fournir des traductions approximatives; (b) des situations de
«sous-langues naturelles simples», comme l'implantation réussie en 1977
du système METEO qui traduit les prévisions météorologiques du
ministère de l'Environnement canadien; (c) et enfin, pour de bonnes
traductions de textes complexes, le couplage de l'humain et de la
machine avant, pendant et après le processus de traduction automatique,
un couplage qui n'est pas forcément économique comparé à la traduction
traditionnelle.

Les auteurs penchent plus pour «un poste de travail pour le traducteur
humain» que pour un «traducteur robot». Ils expliquent: «Les recherches
récentes sur les méthodes probabilistes ont permis de démontrer qu'il
était possible de modéliser d'une manière extrêmement efficace certains
aspects simples du rapport traductionnel entre deux textes. Par
exemple, on a mis au point des méthodes qui permettent de calculer le
bon "appariement" entre les phrases d'un texte et de sa traduction,
c'est-à-dire d'identifier à quelle(s) phrase(s) du texte d'origine
correspond chaque phrase de la traduction. Appliquées à grande échelle,
ces techniques permettent de constituer, à partir des archives d'un
service de traduction, un mémoire de traduction qui permettra souvent
de recycler des fragments de traductions antérieures. Des systèmes de
ce genre ont déjà commencé à apparaître sur le marché (Translation
Manager II de IBM, Translator's Workbench de Trados, TransSearch du
RALI, etc.). Les recherches les plus récentes se concentrent sur des
modèles capables d'établir automatiquement les correspondances à un
niveau plus fin que celui de la phrase: syntagmes et mots. Les
résultats obtenus laissent entrevoir toute une famille de nouveaux
outils pour le traducteur humain, dont les aides au dépouillement
terminologique, les aides à la dictée et à la frappe des traductions
ainsi que les détecteurs de fautes de traduction.»

Fondé en 1990, Globalink est une société spécialisée dans les logiciels
et services de traduction. Elle offre des solutions sur mesure à partir
d'une gamme de logiciels, options en ligne et services de traduction
professionnelle. La société diffuse ses logiciels de traduction en
allemand, anglais, espagnol, français, italien et portugais, et propose
des solutions aux problèmes de traduction des particuliers, petites
sociétés, multinationales et gouvernements, que ce soit pour un produit
individuel donnant une traduction préliminaire rapide ou un système
complet permettant de gérer des traductions de documents
professionnels.

Le site web donne les informations suivantes en 1998: «Avec les
logiciels d'application de Globalink, l'ordinateur utilise trois
ensembles de données: le texte à traiter, le programme de traduction et
un dictionnaire de mots et d'expressions dans la langue-source, ainsi
que des informations sur les concepts évoqués par le dictionnaire et
les règles applicables à la phrase: règles de syntaxe et de grammaire,
y compris des algorithmes gouvernant la conjugaison des verbes,
l'adaptation de la syntaxe, les accords de genre et de nombre et la
mise en ordre des mots. Une fois que l'utilisateur a sélectionné le
texte et lancé le processus de traduction, le programme commence à
comparer les mots du texte à traiter avec ceux qui sont stockés dans le
dictionnaire. Une fois l'adéquation trouvée, l'application prépare une
notice complète qui inclut des informations sur les significations
possibles du mot et, d'après le contexte, ses relations avec les autres
mots dans la même phrase. Le temps requis pour la traduction dépend de
la longueur du texte. Un document de trois pages et 750 mots demande un
traitement de trois minutes environ pour une première traduction.»

En septembre 1998, Randy Hobler, consultant en marketing internet
auprès de Globalink, est résolument optimiste: «Nous arriverons
rapidement au point où une traduction très fidèle du texte et de la
parole sera si commune qu'elle pourra faire partie des plateformes ou
même des puces. A ce stade, lorsque le développement de l'internet aura
atteint sa vitesse de croisière, lorsque la fidélité de la traduction
atteindra plus de 98% et lorsque les différentes combinaisons de
langues possibles auront couvert la grande majorité du marché, la
transparence de la langue - à savoir toute communication d'une langue à
une autre - sera une vision trop restrictive pour ceux qui vendent
cette technologie. Le développement suivant sera la "transparence
transculturelle et transnationale" dans laquelle les autres aspects de
la communication humaine, du commerce et des transactions au-delà du
seul langage entreront en scène. Par exemple, les gestes ont un sens,
les mouvements faciaux ont un sens, et ceci varie en fonction des
normes sociales d'un pays à l'autre. La lettre O réalisée avec le pouce
et l'index signifie "OK" aux États-Unis alors qu'en Argentine c'est un
geste obscène.

Quand se produira l'inévitable développement de la vidéoconférence
multilingue multimédia, il sera nécessaire de corriger visuellement les
gestes. Le Media Lab du MIT [Massachusetts Institute of Technology],
Microsoft et bien d'autres travaillent à la reconnaissance informatique
des expressions faciales, l'identification des caractéristiques
biométriques par le biais du visage, etc. Il ne servira à rien à un
homme d'affaires américain de faire une excellente présentation à un
Argentin lors d'une vidéoconférence multilingue sur le web, avec son
discours traduit dans un espagnol argentin parfait, s'il fait en même
temps le geste O avec le pouce et l'index. Les ordinateurs pourront
intercepter ces gestes et les corriger visuellement. Les cultures
diffèrent de milliers de façons, et la plupart de leurs codes peuvent
être modifiés par voie informatique lorsqu'on passe de l'un à l'autre.
Ceci inclut les lois, les coutumes, les habitudes de travail,
l'éthique, le change monétaire, les différences de taille dans les
vêtements, les différences entre le système métrique et le système de
mesure anglophone, etc. Les firmes dynamiques répertorieront et
programmeront ces différences, et elles vendront des produits et
services afin d'aider les habitants de la planète à mieux communiquer
entre eux. Une fois que ces produits et services seront largement
répandus, ils contribueront réellement à une meilleure compréhension à
l'échelle internationale.»

D'autres sont moins enthousiastes.

François Vadrot, directeur de FTPress (French Touch Press), société de
presse en ligne, écrit en mai 2000: «Peut-on réellement penser que
toute la population du monde va communiquer dans tous les sens? Peut-
être? Via des systèmes de traduction instantanée, par écrit ou par
oral? J'ai du mal à imaginer qu'on verra de sitôt des outils capables
de translater les subtilités des modes de pensée propres à un pays: il
faudrait pour lors traduire, non plus du langage, mais établir des
passerelles de sensibilité. A moins que la mondialisation n'uniformise
tout cela?»

Alex Andrachmes, producteur audiovisuel, écrivain et explorateur
d'hypertexte, est tout aussi dubitatif. Il écrit en décembre 2000:
«J'attends les fameuses traductions simultanées en direct-live... On
nous les annonce avec les nouveaux processeurs ultra-puissants, mais on
nous les annonçait déjà pour cette génération-ci de processeurs. Alors,
le genre: vous/réservé/avion/de le/november 17-2000... Non merci. Plus
tard peut-être.»

Les progrès sont toutefois rapides et permettent de rêver à des
applications simples et universelles. Tel est le souhait de Tim
McKenna, écrivain et philosophe, qui écrit en octobre 2000: «Quand la
qualité des logiciels sera suffisante pour que les gens puissent
converser sur le web par écrit ou par oral en temps réel dans
différentes langues, nous verrons tout un monde s'ouvrir à nous. Les
scientifiques, les hommes politiques, les hommes d'affaires et bien
d'autres groupes seront à même de communiquer immédiatement entre eux
sans l'intermédiaire de médiateurs ou traducteurs.»


= Un marché en 2000

En 2000, la généralisation de l’internet et du commerce électronique
entraîne le développement d’un véritable marché, avec les produits et
services des sociétés SYSTRAN, Alis Technologies, Lernout & Hauspie,
Globalink et Softissimo, etc., avec des  gammes de produits ciblant le
grand public, les professionnels et les industriels.

SYSTRAN (acronyme de: System Translation), pionnier dans le traitement
automatique des langues, est l’auteur du premier logiciel de traduction
gratuit du web, lancé en décembre 1997. AltaVista Translation, appelé
aussi Babel Fish, traduit les pages web de l'anglais vers les langues
suivantes : allemand, français, espagnol, italien et portugais, et vice
versa. Le siège de SYSTRAN est situé à Soisy-sous-Montmorency (France).
Sa succursale, située à La Jolla (Californie), assure les ventes et le
marketing, ainsi qu'une partie de la R&D (recherche et développement).

Basée à Montréal (Québec), Alis Technologies développe et commercialise
des solutions et services de traitement linguistique au moyen de
logiciels de traduction qui transforment des systèmes informatiques
unilingues en outils multilingues.

Basé à Ypres (Belgique) et Burlington (Massachusetts, États-Unis),
Lernout & Hauspie (racheté ensuite par ScanSoft) propose des produits
et services en dictée, traduction, compression vocale, synthèse vocale
et documentation industrielle. Les technologies couvertes incluent la
reconnaissance automatique de la langue, la compression numérique de la
parole, le passage du texte à la parole, et la traduction. Les produits
émanant des trois premières technologies sont vendus aux grandes
sociétés des industries suivantes: télécommunications, informatique,
multimédia, électronique grand public et électronique automotrice. Les
services de traduction sont à destination des sociétés en technologies
de l'information, des marchés verticaux et des marchés
d'automatisation.

De plus, le Machine Translation Group formé par Lernout & Hauspie
comprend des entreprises qui développent, produisent et vendent des
systèmes de traduction: L&H Language Technology, AppTek, AILogic,
NeocorTech et Globalink.

La société Softissimo commercialise la série de logiciels de traduction
Reverso, à côté de produits d’écriture multilingue, de dictionnaires
électroniques et de méthodes de langues. Reverso est utilisé par
exemple par Voilà, le moteur de recherche de France Télécom. Softissimo
diffuse aussi des logiciels d'apprentissage des langues, ainsi que des
dictionnaires, notamment l'Eurodico, le Grand Collins bilingue et le
Collins English Dictionary.

En mars 2001, IBM se lance dans un marché en pleine expansion avec un
produit professionnel haut de gamme, le WebSphere Translation Server.
Ce logiciel traduit instantanément en plusieurs langues (allemand,
anglais, chinois, coréen, espagnol, français, italien, japonais) les
pages web, courriels et chats (dialogues en direct). Il interprète 500
mots à la seconde et permet l’ajout de vocabulaires spécifiques.


= L'UNL, métalangage numérique

Développé à Tokyo (Japon) sous l'égide de l'Institute of Advanced
Studies (IAS) de l'Université des Nations Unies (UNU), l'UNL (universal
networking language) est un projet de métalangage numérique pour
l'encodage, le stockage, la recherche et la communication
d'informations multilingues. Il s'agirait d'une interlangue formant une
passerelle entre une langue source et une langue cible et offrant ainsi
une solution au problème de communication posé par la barrière des
langues.

Ce métalangage est développé à partir de janvier 1997 au sein de l'UNL
Program, un programme international impliquant de nombreux partenaires
dans toutes les communautés linguistiques. En 1998, 120 chercheurs de
par le monde travaillent sur un projet multilingue comportant seize
langues (allemand, anglais, arabe, brésilien, chinois, espagnol,
français, hindou, indonésien, italien, japonais, letton, mongolien,
russe, swahili et thaï).

Ce programme se poursuit ensuite sous l'égide de la Fondation UNDL
(Universal Networking Digital Language), créée en janvier 2001 pour
développer et promouvoir le projet UNL, avec un siège social à Genève
(Suisse). En 2004, la Fondation UNDL est accréditée par les Nations
Unies en tant qu'organisation non gouvernementale (ONG).

Comme expliqué dans un des wikis du projet en 2010, «l'UNL est une
langue artificielle créée pour prendre en compte les informations et
connaissances véhiculées par les langues humaines. Elle est dotée de
composantes lexicales, grammaticales et sémantiques, comme les langues
naturelles. Couplée à l’intelligence artificielle, l’UNL facilite la
communication entre l’homme et la machine, et par le biais de la
machine, entre tous les peuples dans la langue maternelle de chacun.
Notre première tâche est de compléter le système UNL. Ensuite, le
mettre au service des toutes les nations.»



CHRONOLOGIE


Cette chronologie ne prétend pas à l'exhaustivité. Subjective, elle
vise seulement à souligner quelques grandes étapes. Chaque ligne débute
par l'année ou bien l'année/mois. Par exemple, 1971/07 signifie juillet
1971.

  1968: Le code ASCII est le premier système d'encodage informatique.
  1971/07: Le Projet Gutenberg est la première bibliothèque numérique.
  1974: L'internet fait ses débuts.
  1990: Le web est inventé par Tim Berners-Lee.
  1991/01: L'Unicode est un système d'encodage pour toutes les langues.
  1993/11: Mosaic est le premier logiciel de navigation sur le web.
  1994: Travlang est un site consacré aux langues et aux voyages.
  1994/04: La Human-Languages Page est un catalogue de ressources
linguistiques.
  1994/10: Le World Wide Web Consortium offre des outils pour un web
multilingue.
  1995: L'Internet Dictionary Project lance des dictionnaires de
traduction gratuits.
  1995: NetGlos est un glossaire multilingue pour la terminologie de
l'internet.
  1995: Global Reach est une société de conseil pour la localisation
des sites.
  1995: L'Ethnologue est disponible gratuitement sur le web.
  1995/12: La Kotoba Home Page explique comment afficher plusieurs
langues.
  1996/04: OneLook Dictionaries offre un point commun pour consulter
des dictionnaires.
  1997/01: L'UNL (universal networking language) est un projet de
métalangage numérique.
  1997: Le Logos Dictionary est mis en ligne gratuitement.
  1997/12: AltaVista lance AltaVista Translation, appelé aussi Babel
Fish.
  1999: WordReference.com propose des dictionnaires bilingues gratuits.
  1999: Wordfast propose son premier logiciel de traduction.
  1999/12: WebEncyclo est la première grande encyclopédie francophone
en ligne.
  1999/12: Britannica.com est la première grande encyclopédie
anglophone en ligne.
  2000/02: yourDictionary.com est un portail pour les dictionnaires.
  2000/07: La moitié des usagers de l'internet est non anglophone.
  2000/09: Le Grand dictionnaire terminologique (GDT) est bilingue
français-anglais.
  2001/01: Wikipédia est la première grande encyclopédie collaborative
multilingue.
  2001/01: L'UNL est désormais développé au sein de la Fondation UNDL.
  2001/04: La Human-Languages Page devient le portail iLoveLanguages.
  2004/01: Le Projet Gutenberg Europe propose une interface
multilingue.
  2007/03: IATE est la base terminologique multilingue européenne.
  2009: La nouvelle édition (16e) de l'Ethnologue recense 6.909
langues.



REMERCIEMENTS


Ce livre doit beaucoup à toutes les personnes ayant accepté de répondre
à mes questions au fil des ans. Certains entretiens sont disponibles en
ligne sur le NEF (Net des études françaises), Université de Toronto
. D'autres entretiens ont été
directement inclus dans ce livre ou alors ils ont inspiré des idées
développées dans ces pages.

Merci à Nicolas Ancion, Alex Andrachmes, Guy Antoine, Silvaine Arabo,
Arlette Attali, Marc Autret, Isabelle Aveline, Jean-Pierre Balpe,
Emmanuel Barthe, Robert Beard, Michael Behrens, Michel Benoît, Guy
Bertrand, Olivier Bogros, Christian Boitet, Bernard Boudic, Bakayoko
Bourahima, Marie-Aude Bourson, Lucie de Boutiny, Anne-Cécile
Brandenbourger, Alain Bron, Patrice Cailleaud, Tyler Chambers, Pascal
Chartier, Richard Chotin, Alain Clavet, Jean-Pierre Cloutier, Jacques
Coubard, Luc Dall’Armellina, Kushal Dave, Cynthia Delisle, Émilie
Devriendt, Bruno Didier, Catherine Domain, Helen Dry, Bill Dunlap,
Pierre-Noël Favennec, Gérard Fourestier, Pierre François Gagnon,
Olivier Gainon, Jacques Gauchey, Raymond Godefroy, Muriel Goiran,
Marcel Grangier, Barbara Grimes, Michael Hart, Michael Kellogg, Roberto
Hernández Montoya, Randy Hobler, Eduard Hovy, Christiane Jadelot,
Gérard Jean-François, Jean-Paul, Anne-Bénédicte Joly, Michael Kellogg,
Brian King, Geoffrey Kingscott, Steven Krauwer, Gaëlle Lacaze, Michel
Landaret, Hélène Larroche, Pierre Le Loarer, Claire Le Parco, Annie Le
Saux, Fabrice Lhomme, Philippe Loubière, Pierre Magnenat, Xavier
Malbreil, Alain Marchiset, Maria Victoria Marinetti, Michael Martin,
Tim McKenna, Emmanuel Ménard, Yoshi Mikami, Jacky Minier, Jean-Philippe
Mouton, John Mark Ockerbloom, Caoimhín Ó Donnaíle, Jacques Pataillot,
Alain Patez, Nicolas Pewny, Marie-Joseph Pierre, Hervé Ponsot, Olivier
Pujol, Anissa Rachef, Peter Raggett, Patrick Rebollar, Philippe Renaut,
Jean-Baptiste Rey, Philippe Rivière, Blaise Rosnay, Bruno de Sa
Moreira, Pierre Schweitzer, Henk Slettenhaar, Murray Suid, June
Thompson, Zina Tucsnak, François Vadrot, Christian Vandendorpe, Robert
Ware, Russon Wooldridge et Denis Zwirn.


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