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Title: Histoire Sainte ou Histoire des Israélites Author: Loeb, Henri Language: French As this book started as an ASCII text book there are no pictures available. *** Start of this LibraryBlog Digital Book "Histoire Sainte ou Histoire des Israélites" *** This book is indexed by ISYS Web Indexing system to allow the reader find any word or number within the document. DES ISRAÉLITES *** HISTOIRE SAINTE OU HISTOIRE DES ISRAÉLITES. IMP. DE BAUMAN ET Cer.—DELTOMBE, GÉRANT. Rue du Nord, 8. HISTOIRE SAINTE OU *HISTOIRE DES ISRAÉLITES* *DEPUIS LA CRÉATION,* JUSQU’A LA DERNIÈRE DESTRUCTION DE JÉRUSALEM. PAR *LE Dr HENRI LOEB,* GRAND-RABBIN DE BELGIQUE. «Je me souviens des jours anciens, je médite sur toutes vos œuvres: et j’étends mes mains vers vous!» (Ps. 143.) BRUXELLES. SOCIÉTÉ BELGE DE LIBRAIRIE BAUMAN ET Cer. — 1843 PRÉFACE. Dans un siècle comme le nôtre, où le matérialisme, ce puissant moteur de l’activité humaine, absorbe à un si haut degré la vie morale et religieuse, que souvent on serait tenté de dire avec un ancien sage: «Tout tend à un même point, tout est tiré de la terre et retourne à la terre;» dans un tel siècle, il est difficile que l’éducation ne se ressente pas de la tendance générale des esprits, et que les études de la jeunesse n’aient pour objet principal de satisfaire aux exigences d’une vie matérielle. De cet état de choses, il résulte nécessairement que les moments employés à l’instruction religieuse et morale étant fort restreints, ne suffisent plus à nos enfants pour s’occuper, comme autrefois, de toute notre littérature sacrée; et dès lors ils sont privés du seul moyen qui puisse leur donner une idée juste et parfaite de l’existence historique et religieuse du peuple israélite. En publiant cet ouvrage, je me propose de remédier, au moins en partie, à cet inconvénient, et de donner à la jeunesse israélite une notion suffisante de l’histoire de la religion révélée et du peuple, choisi par la sagesse divine pour en être le dépositaire. La religion de Moïse est non-seulement basée sur l’histoire de sa révélation, mais elle est encore intimement unie à cette histoire; il faut donc faire connaissance avec celle-ci avant que celle-là puisse trouver accès. En d’autres termes, l’histoire de la religion doit ouvrir les portes de l’âme de notre jeunesse avant que la religion elle-même puisse y entrer. L’Écriture Sainte seule nous présente, avec une noble simplicité, dans la véracité de ses traditions, cette histoire qui renferme et les plus beaux exemples de la vertu que l’homme puisse exercer sur la terre, et les preuves les plus éclatantes de l’existence d’une Providence divine: tous les devoirs qui nous incombent y puisent leurs motifs. Racontons-la donc à nos enfants, et soyons convaincus qu’elle exercera l’influence la plus salutaire sur leurs cœurs innocents. J’ai cru indispensable de faire suivre l’histoire de la Sainte Écriture d’un précis de l’histoire politique de la nation, en considérant que celle-ci est aussi inséparablement attachée à l’histoire de la révélation, que celle qui traite la partie cosmique et patriarcale. Pour les indications chronologiques, il m’a paru convenable de n’indiquer que l’ère de la création; mais une fois que les élèves savent le nombre d’années qui existent entre la création et l’ère vulgaire, ils peuvent facilement faire eux-mêmes la supputation. En ajoutant cet ouvrage à mon catéchisme, je crois remettre entre les mains de nos enfants un tout complet qui, avec l’assistance de Dieu, ne manquera pas de produire des fruits bienfaisants. CHAPITRE PREMIER. HISTOIRE GÉNÉALOGIQUE DU PEUPLE ISRAÉLITE. La Création. Mes amis, l’histoire de notre peuple, que j’ai l’intention de vous faire connaître, est une des plus anciennes de la terre; elle remonte aux premiers événements du monde, elle touche aux temps les plus reculés. C’est vers ce lointain obscur que nous devons diriger les yeux, si nous aimons à remonter à notre origine. Nous devons partir de la création du premier homme, de la formation de toute créature, qui date de près de _six mille ans_. Mais pour atteindre ce but, il n’y a pas un seul peuple, même le plus ancien sur la terre, qui ait conservé des traditions aussi symboliquement belles et en même temps aussi éternellement vraies que celles que possède le peuple d’Israël dans la Sainte Écriture laissée par Moïse, notre divin législateur. C’est donc l’histoire de la Sainte Écriture que je vais vous mettre sous les yeux. Écoutez, mes amis, de quelle manière elle nous raconte toutes ces merveilles. Au commencement Dieu créa le ciel et la terre. Et la terre était informe et en désordre, et les ténèbres étaient sur la surface de l’abîme et l’esprit de Dieu planait sur la surface des eaux. Dieu dit: Que la lumière soit, et la lumière fut. Dieu vit que la lumière était bonne, et Dieu sépara la lumière d’avec les ténèbres. Dieu nomma la lumière jour et les ténèbres nuit. Il fut soir et il fut matin, ce fut le premier jour. Dieu dit: Que le firmament soit au milieu des eaux et qu’il sépare les eaux d’avec les eaux. Dieu fit le firmament et sépara les eaux qui étaient sous le firmament d’avec les eaux qui étaient au-dessus du firmament; il en fut ainsi. Dieu nomma le firmament ciel; il fut soir, il fut matin; deuxième jour. Dieu dit: Que les eaux qui sont sous le ciel se rassemblent en un seul lieu, et que l’élément solide paraisse; il en fut ainsi. Dieu nomma l’élément solide terre, et le rassemblement d’eaux, mers. Dieu vit que c’était bien; Dieu dit: Que la terre fasse végéter toutes sortes de végétations: l’herbe portant sa semence, l’arbre fruitier formant son fruit selon son espèce, renfermant sa semence pour se reproduire sur la terre; il en fut ainsi, et Dieu vit que c’était bien: il fut soir, il fut matin, troisième jour. Dieu dit: Qu’il y ait des astres dans l’étendue du ciel pour faire distinguer le jour de la nuit; qu’ils servent de signes pour indiquer les époques, les jours et les années; qu’ils servent de luminaires dans l’étendue du ciel pour éclairer la terre; il en fut ainsi; Dieu fit les deux grands luminaires, le plus grand pour présider au jour, et le plus petit pour présider à la nuit, avec les étoiles; Dieu les plaça dans l’étendue du ciel pour éclairer la terre, pour présider au jour et à la nuit et pour séparer la lumière d’avec les ténèbres; Dieu vit que c’était bien: il fut soir, il fut matin; quatrième jour. Dieu dit: Que les eaux se peuplent d’êtres doués de vie, et que des volatiles volent sur la terre sous le firmament du ciel; Dieu créa les grands animaux de mer et tout être animé rampant, dont les eaux sont peuplées, selon leur espèce, ainsi que tous les volatiles ailés, selon leur espèce; Dieu vit que c’était bien. Dieu les bénit et dit: Soyez féconds, multipliez-vous, et remplissez les eaux de la mer, et que le volatile se multiplie sur la terre. Il fut soir, il fut matin, cinquième jour. Dieu dit: Que la terre produise des êtres animés selon leur espèce, le bétail, les reptiles et les animaux sauvages terrestres selon leur espèce; il en fut ainsi. Dieu fit les animaux sauvages terrestres selon leur espèce, le bétail selon son espèce, les reptiles terrestres selon leur espèce. Dieu vit que c’était bien. Dieu dit: Faisons l’homme à notre image et à notre ressemblance; et qu’il règne sur les poissons de la mer, sur les oiseaux du ciel, sur les animaux, sur toute la terre et sur tous les reptiles qui rampent sur la terre. Dieu créa l’homme à son image, il le créa mâle et femelle. Adam. Dieu forma l’homme de la poussière de la terre et lui souffla dans les narines le souffle de la vie; ainsi l’homme devint un être animé. Dieu vit tout ce qu’il avait fait et il vit que cela était bien: il fut soir, il fut matin; sixième jour. Ainsi furent achevés le ciel et la terre et tous leurs ordres. Le septième jour, Dieu avait fini l’œuvre qu’il avait faite, il se reposa le septième jour; il le bénit et le sanctifia, afin que pour nous aussi ce fût un jour de repos, de bénédiction et de sanctification, que ce jour nous rappelât à jamais qu’il n’y a qu’un Dieu, qui a créé le monde et qui le gouverne, et que ce n’est que conformément à la volonté divine que l’homme peut régner sur la terre. Eve (Chava). L’Éternel Dieu planta un jardin dans Éden, du côté de l’orient, il y plaça l’homme qu’il avait créé. Dieu fit sortir de la terre tous les arbres agréables à la vue et bons à manger, et l’arbre de la vie au milieu du jardin, ainsi que l’arbre de la connaissance du bien et du mal. Et un fleuve sortait d’Éden pour arroser le jardin, et de là il se divisait pour former quatre principales branches. La première se nommait _Pichon_, la seconde _Guichon_, la troisième _Hidekel_ et la quatrième _Euphrate_. L’Éternel Dieu prit l’homme et le plaça dans le jardin d’Éden pour le cultiver et pour le garder, et lui donna des ordres en ces termes: De chaque arbre du jardin vous pouvez manger. Mais vous ne mangerez pas de celui de la science du bien et du mal; car dès que vous en aurez mangé vous mourrez. Dieu dit aussi: Il n’est pas bon à l’homme d’être seul, je lui donnerai une compagne. L’Éternel Dieu fit tomber l’homme dans un grand assoupissement, et il l’endormit; il prit ensuite une de ses côtes dont il remplit la place par d’autre chair. L’Éternel Dieu forma une femme de la côte qu’il avait prise à l’homme, et l’amena à l’homme. L’homme alors dit: C’est l’os de mes os, c’est la chair de ma chair. Celle-ci s’appellera du nom qui marquera l’homme parce qu’elle a été tirée de l’homme. C’est pourquoi l’homme quittera son père et sa mère, et s’attachera à sa femme, et ils ne feront qu’une seule chair. Tous deux, l’homme et la femme étaient nus, et n’en avaient pas de honte. Péché des premiers hommes. Le serpent était le plus rusé de tous les animaux de la terre que l’Éternel Dieu avait faits; il dit à la femme: Quand même Dieu aurait dit: Ne mangez d’aucun fruit de ce jardin... La femme répondit au serpent: Nous pouvons manger du fruit des arbres du jardin; quant au fruit de l’arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit: N’en mangez pas, et n’y touchez pas, vous en mourriez. Le serpent dit à la femme: Vous n’en mourrez pas; mais Dieu sait qu’aussitôt que vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, vous serez comme des êtres divins, connaissant le bien et le mal. La femme vit que le fruit était bon à manger, beau et agréable à la vue; elle cueillit du fruit et en mangea, et en donna aussi à son mari, qui en mangea également. Les yeux de tous les deux s’ouvrirent; ils remarquèrent qu’ils étaient nus; alors ils tressèrent des feuilles de figuier et s’en firent des ceintures. Ils entendirent la voix de Dieu parcourant le jardin du côté de l’orient; Adam et sa femme cherchèrent à se cacher devant l’Éternel Dieu, au milieu des arbres du jardin. Dieu appela Adam et lui dit: Où êtes-vous? Il répondit: J’ai entendu votre voix dans le jardin, j’ai eu peur, car je suis nu, et je me suis caché. Dieu lui dit: Qui vous a dit que vous étiez nu? Avez-vous mangé du fruit dont je vous ai défendu de manger? Adam répondit: La femme que vous avez mise près de moi m’a donné du fruit de cet arbre, et j’en ai mangé. L’Éternel Dieu dit à la femme: Qu’avez-vous fait? La femme répondit: Le serpent m’a séduite, et j’en ai mangé. L’Éternel Dieu dit au serpent: Puisque tu as fait cela, tu seras maudit parmi toutes les bêtes et tous les animaux des champs; tu ramperas sur le ventre; tu mangeras de la poussière pendant tous les jours de ta vie. Je mettrai une inimitié entre toi et la femme, entre sa race et la tienne; elle te brisera la tête, et tu la mordras par le talon. Il dit à la femme: Je multiplierai les douleurs et les souffrances de votre grossesse; vous enfanterez avec douleur; vos désirs se tourneront vers votre mari, et il vous dominera. Il dit à Adam: Puisque vous avez écouté la voix de votre femme, et que vous avez mangé de l’arbre dont je vous avais défendu de manger, que la terre soit maudite à cause de vous: vous vous en nourrirez péniblement pendant toute votre vie; elle vous produira des épines et des ronces; vous mangerez l’herbe des champs; vous mangerez votre pain à la sueur de votre front jusqu’à ce que vous retourniez à la terre d’où vous avez été tiré, car vous êtes poussière et vous retournerez à la poussière. Adam nomma sa femme _Chava_ (Ève), parce qu’elle a été la mère de tous les vivants. L’Éternel Dieu fit à Adam et à sa femme des tuniques de peau, et les en revêtit. L’Éternel Dieu dit: Maintenant l’homme est comme l’un de nous, pour connaître le bien et le mal, maintenant il pourrait étendre sa main, cueillir du fruit de l’arbre de vie, en manger et vivre éternellement. L’Éternel Dieu le renvoya du jardin d’Éden, pour cultiver le sol dont il avait été tiré. Il chassa Adam, plaça vers l’orient du jardin d’Éden, les chérubins et la lame flamboyante du glaive qui tourne, pour garder le chemin de l’arbre de vie. Caïn et Abel (Hébel). Adam connut Ève, sa femme; elle conçut et enfanta Caïn. Elle dit: J’ai acquis un homme de l’Éternel. Elle enfanta de nouveau son frère Abel (Hébel). Abel fut gardien de troupeaux, et Caïn laboureur. Au bout de quelque temps, Caïn apporta un présent à l’Éternel, des fruits de la terre. Abel apporta aussi des premiers-nés de son plus beau bétail. L’Éternel fit attention à Abel et à son oblation; mais il ne fit point attention à Caïn ni à son offrande. Caïn en fut très-irrité, et son visage en fut abattu. L’Éternel dit à Caïn: Pourquoi cela vous irrite-t-il? et pourquoi êtes-vous si abattu? Certes, si vous vous conduisez bien, vous serez considéré; si vous ne vous conduisez pas bien, le péché vous assiégera à la porte; il veut vous atteindre, mais vous pouvez le maîtriser. Caïn parla à son frère Abel, et comme ils se trouvaient aux champs, Caïn s’éleva contre son frère Abel et le tua. L’Éternel dit à Caïn: Où est votre frère Abel? Il répondit: Je ne le sais pas; suis-je le gardien de mon frère? Il dit: Qu’avez-vous fait? La voix du sang de votre frère crie de la terre vers moi; maintenant soyez maudit de dessus la terre, qui a ouvert son sein pour recevoir de votre main le sang de votre frère. Lorsque vous cultiverez le sol, il ne vous prêtera plus ses forces; vous serez agité et fugitif sur la terre. Caïn dit à l’Éternel: Mon châtiment est trop grand pour être supporté; puisque vous m’expulsez aujourd’hui de cette contrée, je dois me cacher devant vous, et être errant et fugitif sur la terre; quiconque donc me trouvera, me tuera. Mais l’Éternel lui répondit: Celui qui tuera Caïn sera exposé à une septuple vengeance. Ensuite il mit sur Caïn un signe, pour que tout venant ne le tuât pas. Caïn sortit de la présence de l’Éternel, et s’établit dans le pays de Nod, vers l’orient d’Éden. Suite des patriarches vivant avant le déluge. Caïn connut sa femme qui conçut et enfanta Henoch; il bâtit ensuite une ville et nomma cette ville du nom de son fils Henoch; Henoch engendra Irad; celui-ci engendra Méhouiael; ce dernier engendra Métouchael, qui engendra Lemech. Lemech prit deux femmes: le nom de l’une fut Ada et le nom de la seconde Tzila; Ada enfanta Jabal: il fut le père des peuples habitant sous des tentes, et des pasteurs; le nom de son frère fut Joubal; celui-ci fut le père de ceux qui jouaient de la harpe et de la flûte. Tzila eut aussi un fils, Toubal Caïn, qui travaillait les instruments de cuivre et de fer, la sœur de Toubal Caïn s’appela Naéma. Lemech¹ dit à ses femmes: Ada et Tzila, écoutez ma voix, femmes de Lemech, soyez attentives à mes paroles: je tue un homme après avoir été blessé, je tue un jeune homme après avoir été meurtri, (ne craignez rien, car) si Caïn doit être vengé au septuple, Lemech le sera soixante-dix-sept fois. ¹ Le but de ce récit semble être: l’invention des instruments métalliques (le couteau, le poignard, le glaive) rendait alors le meurtre plus facile et plus fréquent, de sorte qu’on commençait à craindre d’être massacré par le premier venu. Tel est le sens de ce passage: Lemech en rassurant ses femmes s’écrie: N’ayez pas peur, quiconque voudra nous tuer je l’assommerai; et certes je n’aurai pas alors à craindre la punition de Dieu, car, si Caïn, entraîné au meurtre par l’envie, la jalousie et la fureur, ne devait cependant pas être tué impunément, à plus forte raison ne le serai-je pas moi qui n’aurai commis un meurtre qu’en défendant notre vie. Voici le livre de la généalogie de l’homme. Adam, à l’âge de cent trente ans, engendra à sa ressemblance, à son image, un fils qu’il nomma Seth. Après la naissance de Seth, Adam vécut encore huit cents ans, il eut encore des fils et des filles; Adam ayant atteint l’âge de neuf cent trente ans, mourut. Seth, à l’âge de cent cinq ans, engendra Énosch; après avoir engendré Énosch, Seth vécut encore huit cent sept ans, et il eut des fils et des filles; (930) lorsque Seth eut atteint l’âge de neuf cent douze ans, il mourut. Énosch, à l’âge de quatre-vingt-dix ans, engendra Kénan; après avoir engendré Kénan, Énosch vécut encore huit cent quinze ans, et il eut des fils et des filles; (1042) lorsque Énosch eut atteint l’âge de neuf cent cinq ans, il mourut. Kénan, à l’âge de soixante-dix ans, engendra Mahalalel; après avoir engendré Mahalalel, (1140) Kénan vécut encore huit cent quarante ans, et il eut des fils et des filles; lorsque Kénan eut atteint l’âge de neuf cent dix ans, il mourut. Mahalalel, à l’âge de soixante-cinq ans, engendra Jéred; après avoir engendré Jéred, Mahalalel vécut encore huit cent trente ans, il eut des fils et des filles; (1235) après que Mahalalel eut atteint l’âge de huit cent quatre-vingt-quinze ans, il mourut. (1290) Jéred, à l’âge de cent soixante-deux ans, engendra Hénoch; Jéred, après avoir engendré Hénoch, vécut encore huit cents ans, il eut des fils et des filles; Jéred, après avoir atteint l’âge de neuf cent soixante-deux ans, mourut. (1422) Hénoch, à l’âge de soixante-cinq ans, engendra Métouselah; Hénoch, après avoir engendré Métouselah, marcha encore dans la voie de Dieu pendant trois cents ans, il eut des fils et des filles; Hénoch atteignit l’âge de trois cent soixante-cinq ans; Hénoch marchait dans la voie de Dieu, et il ne fut plus, car Dieu l’avait pris. Métouselah, après avoir atteint l’âge de cent quatre-vingt-sept ans, engendra Lemech; Métouselah, après avoir engendré Lemech, vécut encore sept cent quatre-vingt deux ans, il eut des fils et des filles; (1656) Métouselah mourut après avoir atteint l’âge de neuf cent soixante-neuf ans. Lemech, à l’âge de cent quatre-vingt-deux ans, engendra un fils; il le nomma _Noach_, disant: Celui-ci nous consolera de nos travaux et des pénibles occupations de nos mains et dans la terre que l’Éternel a maudite. Lemech, après avoir engendré Noach, vécut encore cinq cent quatre-vingt-quinze ans; il eut des fils et des filles; après que Lemech eut atteint l’âge de sept cent soixante-dix-sept ans, il mourut. Noach, à l’âge de cinq cents ans, engendra Schem, Ham (Cham) et Japhet². ² En considérant la longue suite d’années que les patriarches ont vécu, on peut aisément conclure que dans les premiers temps, les révélations divines furent exactement communiquées et transmises de génération en génération. Noé (Noach) et le déluge. Ces dix générations passées, les hommes commencèrent à se répandre sur la terre, et les fils des grands voyant que les filles du peuple étaient belles, prirent pour femmes celles d’entre elles qui leur plurent. La corruption devint de jour en jour plus grande et plus générale; la terre était pleine de violence, chaque créature avait corrompu sa voie. Alors l’Éternel vit que la malice de l’homme était grande sur la terre, et que toutes les pensées de son cœur tendaient constamment vers le mal. L’Éternel dit: Mon esprit ne combattra pas toujours dans l’homme, car dans son erreur il est chair. Le temps de l’homme ne sera plus que de six-vingts ans. (Ce terme lui fut encore accordé, afin qu’il eût le temps de se repentir de ses péchés et de s’amender; mais après ce laps de temps l’homme étant demeuré dans son endurcissement), l’Éternel dit: Je veux exterminer de dessus la terre l’homme que j’ai créé, les animaux, les reptiles et jusqu’à l’oiseau du ciel, car je me repens de les avoir faits. _Noé_, homme droit et intègre dans son temps, et qui marcha avec Dieu, trouva seul grâce aux yeux de l’Éternel. Alors Dieu dit à Noé: La fin de toute créature est venue devant moi, car la terre est remplie de violence à cause d’eux. Je veux donc les détruire avec la terre. Faites-vous une arche de bois de gopher: vous y ferez des cases; enduisez-la de bitume en dedans et en dehors. Et voici comment vous la ferez: elle aura trois cents coudées de long, cinquante de large et trente de haut; vous ferez un transparent à l’arche, et la réduirez au faîte jusqu’à une coudée; vous placerez la porte de l’arche sur le côté, vous y pratiquerez un compartiment inférieur, un second et un troisième. Je ferai venir sur la terre une confusion d’eau pour détruire toute créature ayant un souffle de vie sous le ciel; tout ce qui est sur la terre périra. J’établirai mon pacte avec vous, vous viendrez dans l’arche, vous, vos fils, votre femme et les femmes de vos fils. Et vous ferez venir dans l’arche de tout ce qui vit, de toute chair, deux de chaque espèce pour être conservés; qu’ils soient mâle et femelle; du volatile selon son espèce, des quadrupèdes selon leur espèce, de tous les reptiles de la terre, ils doivent venir avec vous pour être conservés. Et vous, prenez pour vous de tout comestible dont on se nourrit, amassez-le, qu’il serve à vous et à eux de nourriture. Et Noé fit ainsi; il fit tout, comme Dieu le lui avait ordonné. Mais les hommes n’y firent aucune attention, ne se corrigèrent point, et continuèrent à faire le mal comme auparavant. Et l’arche fut construite. Alors Dieu dit à Noé: Entrez, vous et votre famille, dans l’arche; car vous êtes le seul que j’aie vu pur devant moi, dans ce siècle. De chaque animal pur vous prendrez sept couples, le mâle et la femelle; et de celui qui n’est pas pur, vous prendrez seulement deux, le mâle et la femelle; du volatile, sous le ciel, aussi sept, le mâle et la femelle, afin d’en conserver le germe sur la terre; car sept jours encore, et je ferai pleuvoir sur la terre pendant quarante jours et quarante nuits; je détruirai toute substance que j’ai faite sur la terre. Noé fit ainsi que Dieu le lui avait ordonné. Noé avait six cents ans, lorsque le déluge couvrit toute la surface de la terre. La six centième année de la vie de Noé, le dix-septième jour du second mois, toutes les sources du grand abîme jaillirent, et les cataractes du ciel s’ouvrirent; la pluie tomba sur la terre pendant quarante jours et quarante nuits. Ce même jour, Noé entra dans l’arche, avec Sem, Cham et Japheth ses fils, sa femme et les trois femmes de ses fils, et de chaque créature y entrèrent, mâle et femelle, selon l’ordre de Dieu; ensuite l’Éternel ferma l’arche. Le déluge durait depuis quarante jours sur la terre; les eaux s’élevant soulevaient l’arche qui se mouvait sur les eaux. L’inondation s’éleva de plus de quinze coudées au-dessus des plus hautes montagnes, en sorte que toute chair qui se meut sur la terre périt, les oiseaux, le bétail, les animaux et les reptiles rampant sur la terre, ainsi que tout le genre humain. Tout ce qui avait en ses narines un souffle de vie, tout ce qui se trouvait sur le sol, mourut. Ainsi périt tout être qui se trouvait sur la terre, il ne resta que Noé et ce qui était avec lui dans l’arche. Les eaux s’accrurent sur la terre pendant cent cinquante jours. Mais Dieu s’étant souvenu de Noé, de tous les animaux et de toutes les bêtes qui étaient avec lui dans l’arche, fit souffler un vent sur la terre, et les eaux s’abaissèrent. Les sources de l’abîme et les écluses du ciel se refermèrent, et la pluie ne tomba plus du ciel. Les eaux se retirèrent de dessus la terre, agitées de côté et d’autre, et diminuèrent au bout de cent cinquante jours. Alors l’arche se posa sur les montagnes d’Ararate (Arménie), le dix-septième jour du septième mois. Les eaux allèrent en diminuant jusqu’au dixième mois; le premier jour du dixième mois, le sommet des montagnes fut visible. Au bout de quarante jours, Noé ouvrit la fenêtre de l’arche et lâcha un corbeau, qui sortit, allant et rentrant jusqu’à l’entier desséchement du sol. Il envoya aussi une colombe afin de voir si les eaux avaient baissé sur la terre. Mais la colombe ne trouvant pas d’appui pour se reposer, revint à l’arche, car l’eau couvrait encore toute la terre; Noé étendit sa main, la prit et la rentra dans l’arche. Il attendit encore sept autres jours, et il lâcha de nouveau la colombe; la colombe revint près de lui vers le soir tenant en son bec une branche d’olivier; alors Noé comprit que les eaux avaient diminué sur la terre. Il attendit encore sept autres jours, et il lâcha la colombe, qui alors ne revint plus vers lui. Dans la six cent unième année de Noé, le premier jour du premier mois, les eaux avaient disparu de dessus la terre; Noé ôta la toiture de l’arche, et il vit que la surface de la terre était sèche. C’était le vingt-septième jour du second mois. Dieu parla a Noé et dit: Sortez de l’arche, vous, votre femme, vos fils et les femmes de vos fils avec vous; toute espèce d’animaux étant avec vous, oiseaux, bêtes et reptiles rampant sur la terre, sortez-les avec vous; qu’ils se perpétuent sur la terre, se fécondent et se multiplient sur la terre. Et Noé sortit avec ses fils, sa femme et les femmes de ses fils, tout animal, tout reptile, tout oiseau, tout ce qui rampe sur la terre sortit de l’arche, par famille. Or, Noé construisit un autel à l’Éternel, il prit de toute espèce d’animaux purs et de toute espèce d’oiseaux purs, et les lui offrit en holocauste sur cet autel. L’Éternel reçut ce sacrifice comme un encens agréable, et il dit: Je ne maudirai plus la terre, à cause de l’homme, quoique l’instinct du cœur de l’homme soit mauvais dès sa jeunesse; je ne frapperai plus tout ce qui vit, comme j’ai fait; pendant toute la durée de la terre, les semailles, la moisson, le froid, le chaud, l’été, l’hiver, le jour et la nuit ne s’arrêteront pas. Alliance de Dieu avec Noé. Dieu dit à Noé et à ses fils: je vais faire alliance avec vous et avec vos descendants après vous; avec toute créature vivante qui se trouve avec vous, les oiseaux, les bêtes, les animaux de la terre qui sont sortis avec vous de l’arche et qui vivent sur la terre. Je ferai alliance avec vous: le déluge ne détruira plus tout être; il n’y aura plus de déluge pour détruire la terre. Dieu dit: Voici le signe de l’alliance que j’établis entre moi, vous, et toutes les créatures vivantes qui sont avec vous, à perpétuité. J’ai placé mon arc dans le nuage; qu’il soit le signe entre moi et vous. Il adviendra qu’en formant un nuage au-dessus de la terre, l’arc étant apparent dans le nuage, je me rappellerai alors cette alliance entre moi et vous, et toute créature douée de vie; les eaux ne formeront plus un déluge pour tout détruire; cet arc sera dans le nuage, et je le regarderai pour me rappeler l’alliance perpétuelle entre Dieu et toute créature vivante sur la terre. Dieu dit encore à Noé: Ce sera là le signe de l’alliance que j’ai faite avec toute chair qui est sur la terre. Noé avait trois fils qui sortirent de l’arche, Sem, Cham et Japheth; et c’est d’eux qu’est sortie toute la race des hommes qui sont sur la terre. Noé vécut encore trois cent cinquante ans depuis le déluge. Et tout le temps de sa vie ayant été de neuf cent cinquante ans, il mourut. (2006) Tour de Babel et dispersion des hommes. Les hommes s’étant multipliés de nouveau sur la terre, et celle-ci n’ayant qu’une seule langue et qu’une même manière de parler, ils trouvèrent, en partant du côté de l’orient, une vallée dans le pays de Sennaar et ils y habitèrent; dans la crainte d’être un jour séparés, ils résolurent de bâtir une ville et une tour qui s’élevât jusqu’au ciel. Mais le Tout-Puissant, qui par sa sagesse souveraine jugea bon et nécessaire que la dispersion de la race humaine s’effectuât, confondit tellement leur langage, qu’ils ne s’entendaient plus les uns les autres. C’est ainsi qu’ils cessèrent de bâtir cette ville, appelée pour cette raison _Babel_, c’est-à-dire, confusion, parce que c’est là que fut confondu le langage de toute la terre. Dieu dispersa ensuite les hommes dans toutes les régions du monde. C’est ainsi que se formèrent les différents peuples et les divers langages. Les descendants de Sem peuplèrent le centre et le sud de l’Asie; les descendants de Cham, l’ouest de l’Asie et l’Afrique; et les descendants de Japheth, l’Europe. Le quatrième fils de Cham s’appela Chanaan; de lui sont sortis les Chananiens; son petit-fils s’appela Nimrod, c’était un ardent chasseur, il fut le premier roi de Babel. Parmi les descendants de Sem, il y avait un homme qui se nommait Tharé (Therach), il avait trois fils: Abram, Nachor et Haran. Haran était le père de Lot. Abram et Nachor se choisirent des femmes, le nom de la femme d’Abram était: Saraï (plus tard Sarah), et le nom de celle de Nachor était Milcha. Tharé ayant donc pris Abram son fils, Lot son petit-fils, et Saraï sa belle fille, les fit sortir d’Ur en Chaldée, pour aller avec lui dans le pays de Chanaan, et étant venus jusqu’à Haran, ils y habitèrent. Et Tharé, après avoir vécu deux cent cinq ans, mourut à Haran (Charan). CHAPITRE II. DEPUIS ABRAHAM JUSQU’A MOÏSE. (1948-2368) A cette époque la connaissance d’un seul vrai Dieu ne se retrouvait plus chez tous ces peuples, qui, comme nous l’avons vu, avaient été répandus par la volonté de Dieu de la vallée de Sennaar (Babylonie) par toutes les régions de la terre; tous étaient tombés dans l’idolâtrie, et par suite dans le péché et dans le vice. Et comme le service des faux dieux se continuait déjà depuis des siècles, l’Éternel, toute bonté, résolut enfin d’introduire au milieu des peuples un autre peuple qui, par les révélations divines dont il serait le dépositaire, serait aussi, par sa vie et par ses destinées remarquables, choisi pour conserver la vraie connaissance de Dieu et pour la répandre parmi les hommes. C’est alors que pour atteindre ce but élevé, Dieu choisit pour tige de ce peuple l’homme le plus digne de ses révélations et le plus apte à les communiquer. Cet homme pieux, qui jouissait de la confiance et de l’amour de Dieu, cet homme par qui toutes les nations de la terre devaient être bénies un jour, s’appelait alors Abram, et plus tard Abraham. Abraham. Déjà, le père d’Abraham, Tharé était sorti, comme nous l’avons vu plus haut, de la Mésopotamie, sa patrie, pour habiter le pays de Chanaan, mais il ne vint qu’à Haran (Carra en Syrie) et y resta pendant tous les jours de sa vie. Ce n’est qu’Abraham, qui, quittant pour toujours sa patrie, entra en Chanaan lorsque l’Éternel lui apparut et lui dit: Allez vous-en de votre pays, du lieu de votre naissance et de la maison de votre père au pays que je vous montrerai. Je ferai de vous une grande nation, je vous bénirai, j’agrandirai votre nom, vous serez une bénédiction. Je bénirai ceux qui vous béniront et je maudirai ceux qui vous maudiront, et toutes les familles de la terre seront bénies en vous. Abraham partit alors comme l’Éternel le lui avait dit, Lot alla avec lui. Abraham était âgé de soixante-quinze ans lorsqu’il sortit de Haran. Abraham emmena sa femme Saraï, Lot son neveu, tout le bien qu’ils avaient acquis, le personnel qu’ils avaient formé à Haran; ils sortirent pour se rendre dans le pays de Chanaan, où ils arrivèrent bientôt. Abraham traversa le pays jusqu’à la contrée de Chechem, jusqu’au bocage de Moré. Les Chananéens occupaient alors ce pays-là. Or l’Éternel apparut à Abraham et lui dit: Je donnerai ce pays à votre postérité. Abraham dressa en ce lieu un autel à l’Éternel, comme souvenir de son apparition. Étant passé de là vers une montagne qui est à l’orient de Bethel, il y tendit ses tentes, ayant Bethel à l’occident, et la ville d’Aï à l’orient. Il dressa encore en ce lieu un autel et invoqua le nom de l’Éternel. Abraham alla encore plus loin, marchant toujours et s’avançant vers le midi. Il y parcourut avec ses nombreux troupeaux les fertiles vallées et les plaines, annonçant partout le nom de Dieu unique et éternel. Une famine générale le força, quelque temps après, de se diriger vers la fertile Égypte située dans ces environs. Toutefois, après y avoir été éprouvé de Dieu à diverses reprises, il se rendit bientôt de nouveau à Chanaan et demeura d’abord à Bethel, et plus tard, au bocage de Mamré près d’Hébron, abandonnant à Lot, son neveu, les contrées de Sodome à cause d’une querelle qui s’était élevée entre leurs pasteurs. Car leurs troupeaux s’étant multipliés de jour en jour, le pays ne leur suffisait plus; de sorte qu’ils se gênaient l’un l’autre. Abraham dit donc à Lot: Qu’il n’y ait point, je vous prie, de dispute entre vous et moi, ni entre mes pasteurs et les vôtres, parce que nous sommes frères. Vous voyez devant vous tout le pays. Retirez-vous, je vous prie, d’auprès de moi. Si vous allez vers la gauche, je prendrai la droite: si vous choisissez la droite, j’irai vers la gauche. Lot choisit alors sa demeure vers le Jourdain, en se retirant du côté de l’orient. C’est ainsi qu’ils se séparèrent l’un de l’autre. Abraham demeura dans la terre de Chanaan, et Lot dans les villes qui étaient aux environs du Jourdain: et il habita Sodome. Or, les habitants de Sodome étaient devant Dieu des hommes perdus de vices; et leur corruption était montée à son comble. L’Éternel dit donc à Abraham, après que Lot se fut séparé d’avec lui: Levez les yeux et regardez de l’endroit où vous êtes, vers le nord, le midi, le levant et le couchant; car tout le pays que vous voyez, je le donnerai à vous et à votre postérité, pour toujours: je rendrai votre postérité comme la poussière de la terre: que si quelqu’un peut compter la poussière de la terre, il pourra aussi compter votre postérité; levez-vous, parcourez le pays en long et en large, car c’est à vous que je le donnerai. Abraham éleva alors un autel à l’Éternel pour le remercier de cette prédiction. A cette époque il arriva que le roi de Sodome fut vaincu dans une guerre et que les vainqueurs ayant pris toutes les richesses et les vivres de Sodome, se retirèrent, et emmenèrent aussi Lot, fils du frère d’Abraham, qui demeurait dans Sodome, et tout ce qui était à lui. Un fuyard vint en apporter la nouvelle à Abraham. Et aussitôt que celui-ci apprit que son parent avait été fait prisonnier, il arma trois cent dix-huit serviteurs choisis parmi les plus habiles de ceux qui étaient nés dans sa maison, et poursuivit les vainqueurs jusqu’à Dane. Il forma deux corps de ses gens et de ses alliés, et venant fondre sur les ennemis durant la nuit, il les défit et les poursuivit jusqu’à Hoba qui est à la gauche de Damas. Il ramena avec lui tout le butin qu’ils avaient pris, Lot, son neveu, avec tout ce qui était à lui, les femmes et tout le peuple. Et le roi de Sodome sortit au-devant de lui dans la vallée de Savé appelée aussi la vallée du Roi. Malchisedek, roi de Chalème, fit apporter du pain et du vin; il était prêtre du Dieu suprême; il bénit Abraham, en disant: Qu’Abraham soit béni du Dieu très-haut, qui a créé le ciel et la terre: et que le Dieu très-haut soit béni, lui qui par sa protection vous a mis vos ennemis entre les mains. Il lui donna la dîme de tout ce qu’il avait. Or, le roi de Sodome dit à Abraham: Donnez-moi les personnes, et prenez le reste pour vous. Abraham lui répondit: Je lève la main et je jure par l’Éternel, le Dieu très-haut, possesseur du ciel et de la terre, que je ne recevrai rien de ce qui est à vous, depuis le moindre fil jusqu’à un cordon de soulier; afin que vous ne puissiez pas dire que vous avez enrichi Abraham. Rien pour moi, seulement ce que mes gens ont pris pour leur nourriture, et ce qui est dû à ceux qui sont venus avec moi, Aner, Escol et Mamré, qui pourront prendre leur part du butin. Promesse de l’Éternel et piété d’Abraham. Ensuite l’Éternel parla à Abraham dans une vision, et lui dit: Ne craignez point, Abraham; je suis votre protecteur, votre récompense sera infiniment grande. Abraham répondit: O Éternel, mon Dieu, que me donnerez-vous? je marche sans enfants, et l’intendant de ma maison est Eliézer de Damas. Abraham continua: Voyez! vous ne m’avez pas donné d’enfants; ainsi mon serviteur sera mon héritier. Alors l’Éternel lui répondit ainsi: Non, celui-ci ne sera point votre héritier, mais celui qui sortira de vos entrailles héritera de vous. Regardez donc vers le ciel, et comptez les étoiles, si vous pouvez les compter; ainsi, ajouta-t-il, sera votre postérité. Abraham crut à Dieu, et sa foi lui fut imputée à justice. Il offrit un jour un sacrifice, selon la demande de l’Éternel qui lui confirma ses promesses par un signe sensible et continua ainsi: Sachez dès maintenant que votre postérité demeurera dans un pays étranger, et qu’elle sera réduite en servitude et accablée de maux pendant quatre cents ans. Mais j’exercerai mes jugements sur le peuple auquel ils seront assujettis, et ils sortiront ensuite de ce pays avec de grandes richesses. Quant à vous, vous irez en paix auprès de vos pères, vous serez enseveli après une vieillesse heureuse. Mais vos descendants reviendront en ce pays-ci après la quatrième génération, parce que la mesure des iniquités des Amorrhéens n’est pas encore remplie présentement. En ce jour-là l’Éternel fit alliance avec Abraham en lui disant: Je donnerai ce pays à votre postérité, depuis le fleuve d’Égypte jusqu’au grand fleuve d’Euphrate. Abraham après avoir séjourné pendant dix ans dans le pays de Chanaan, prit pour seconde femme sa servante, Hagar; elle lui enfanta un fils, qu’il nomma Ismaël. Abraham avait quatre-vingt-six ans lorsque Hagar lui enfanta Ismaël. Alliance de la circoncision. Lorsque Abraham fut âgé de quatre-vingt-dix-neuf ans, l’Éternel lui apparut et lui dit: Je suis le Dieu Tout-Puissant, marchez devant moi et soyez parfait; je ferai alliance avec vous, et je vous multiplierai jusqu’à l’infini. Voici le pacte que je fais avec vous, afin que vous l’observiez et votre postérité après vous: tous les mâles d’entre vous seront circoncis. Ce sera le signe de l’alliance entre moi et vous. L’enfant de huit jours sera circoncis parmi vous; et dans la suite de toutes les générations, tous les enfants mâles, tant les esclaves qui seront nés en votre maison, que tous ceux que vous aurez achetés, et qui ne seront point de votre race, seront circoncis. Mon alliance sera pour votre chair une alliance perpétuelle. Tout mâle dont la chair n’aura pas été circoncise, sera exterminé du milieu de son peuple, parce qu’il aura violé mon alliance. Dieu dit encore à Abraham: Je bénirai aussi votre femme Saraï, je vous donnerai aussi un fils né d’elle, que vous nommerez Isaac; et je ferai un pacte avec lui, et avec sa postérité après lui, afin que mon alliance avec eux soit éternelle. L’entretien de Dieu avec Abraham étant fini, celui-ci prit Ismaël son fils, et tous les esclaves nés dans sa maison, tous ceux qu’il avait achetés, et généralement tous les mâles qui étaient parmi ses domestiques; il les circoncit tous aussitôt en ce même jour, selon que Dieu le lui avait commandé. Abraham avait quatre-vingt-dix-neuf ans, lorsqu’il se circoncit; et Ismaël avait treize ans accomplis lorsqu’il reçut la circoncision. Abraham et son fils Ismaël furent circoncis en un même jour. En ce même jour encore furent circoncis tous les mâles de sa maison, tant les esclaves nés chez lui, que ceux qu’il avait achetés, et qui étaient nés dans des pays étrangers. C’est à cette occasion que le nom d’Abram, c’est-à-dire _père élevé_, fut changé en celui d’Abraham, c’est-à-dire, _père élevé de la multitude_, et que le nom de Saraï, c’est-à-dire _ma princesse_, fut changé en celui de Sarah, _la princesse_. Hospitalité d’Abraham. Naissance d’Isaac prédite pour la dernière fois. Intercession d’Abraham. Destruction de Sodome. L’Éternel apparut un jour à Abraham dans le bocage de Mamré, lorsqu’il était assis à la porte de sa tente dans la plus grande chaleur du jour. Abraham ayant levé les yeux, trois hommes lui apparurent près de lui. Aussitôt qu’il les eut aperçus, il courut de la porte de sa tente au-devant d’eux, et se prosterna en terre, et dit: Seigneurs, si j’ai trouvé grâce devant vos yeux, ne passez pas la maison de votre serviteur. J’apporterai de l’eau pour laver vos pieds; et alors vous vous reposerez sous cet arbre, jusqu’à ce que je vous serve un peu de pain pour reprendre vos forces; car c’est pour cela que vous êtes venus vers votre serviteur, et vous continuerez ensuite votre chemin. Ils lui répondirent: Faites ce que vous avez dit. Abraham entra promptement dans sa tente, et dit à Sarah: Pétrissez vite trois mesures de farine, et faites-en des gâteaux. Il courut en même temps à son troupeau, y prit un veau d’une chair tendre et succulente, et le donna à un serviteur, qui se hâta de le faire cuire. Ayant pris ensuite du beurre et du lait, avec le veau qu’il avait fait cuire, il le servit devant eux, et ils mangèrent, tandis qu’il se tenait debout près d’eux. Ils lui dirent: Où est Sarah votre femme? Il leur répondit: Elle est dans la tente. L’un d’eux dit à Abraham: Je vous reviendrai voir dans un an, à cette même époque: je vous trouverai tous deux en vie, et Sarah votre femme aura un fils. Ce que Sarah ayant entendu, elle se mit à rire derrière la porte de la tente. Car ils étaient tous deux vieux et fort avancés en âge. Elle rit donc secrètement, disant en elle-même: Lorsque je suis devenue vieille, et que mon seigneur est vieux aussi, aurais-je de la volupté? Mais l’Éternel dit à Abraham: Pourquoi Sarah a-t-elle ri, en disant: Serait-il bien vrai que je puisse avoir un enfant, étant vieille comme je suis? Y a-t-il rien de difficile à Dieu? Je vous reviendrai voir, comme je vous l’ai promis, dans un an en ce même temps, je vous trouverai tous deux en vie, et Sarah aura un fils. Je n’ai point ri, répondit Sarah; et elle le nia, parce qu’elle était tout épouvantée. Non, dit-il, cela n’est pas ainsi, car vous avez ri.—Ces hommes s’étant donc levés de ce lieu, tournèrent leurs pas vers Sodome, et Abraham allant avec eux les reconduisit. Dieu lui fit connaître alors qu’il punirait les villes de Sodome et d’Amora, à cause de leurs grands péchés. Abraham intercéda pour les habitants de ces villes et sollicita instamment auprès de Dieu pour qu’il voulût leur pardonner et les ménager. Abraham avait tant fait, qu’il lui fut promis que ces deux villes seraient épargnées s’il s’y trouvait seulement dix justes. Mais ce petit nombre de dix ne s’y trouva même pas; tous étaient impies, tous viciés et corrompus. C’est pourquoi dès le lendemain matin, lorsque le soleil se levait sur la terre, une punition terrible leur fut infligée. Après que Lot, neveu d’Abraham, eut été emmené avec sa famille, l’Éternel fit descendre du ciel sur Sodome et sur Amora, une pluie de soufre et de feu, et il perdit ces villes avec tous leurs habitants, tout le pays d’alentour avec ceux qui l’habitaient, et tout ce qui avait vie sur la terre. Depuis ce jour toute cette contrée n’est qu’un lac salé et plein de soufre, en signe de la malédiction du ciel que s’attirent les crimes des hommes. Naissance d’Isaac. Sacrifice d’Abraham. Après qu’Abraham eut changé de domicile, qu’il eut habité en Gerar, où il fut de nouveau éprouvé de Dieu, l’Éternel pensa à Sarah comme il avait dit; elle conçut et enfanta un fils en sa vieillesse, dans le temps que Dieu lui avait prédit. Abraham donna le nom d’Isaac (Jitzchak) à son fils né de Sarah, et il le circoncit le huitième jour, selon le commandement qu’il en avait reçu de Dieu, ayant alors cent ans; car ce fut à cet âge-là qu’il devint père d’Isaac. Et Sarah dit alors: Dieu m’a donné un sujet de ris et de joie; quiconque l’apprendra, s’en réjouira avec moi. Et elle ajouta: Qui croirait qu’on aurait jamais pu dire à Abraham, que Sarah nourrirait de son lait un fils qu’elle lui aurait enfanté lorsqu’il serait déjà vieux? Cependant l’enfant crût, et on le sevra, et Abraham fit un grand festin au jour qu’il fut sevré. Après cela Dieu tenta Abraham, et lui dit: Abraham. Abraham répondit: Me voici. Dieu ajouta: Prenez Isaac votre fils unique, que vous aimez, et allez-vous en vers le pays de Morya et là sacrifiez-le en holocauste sur une des montagnes que je vous indiquerai. Abraham se leva de bon matin, prépara son âne, et prit avec lui deux serviteurs et son fils Isaac; il fendit aussi du bois pour l’holocauste, et partit pour se rendre à l’endroit que Dieu lui avait désigné. Le troisième jour, Abraham, levant les yeux, aperçut cet endroit de loin. Abraham dit alors à ses gens: Restez ici avec l’âne, tandis que moi et mon fils nous irons jusque là-bas pour nous prosterner, et nous reviendrons près de vous. Abraham prit ensuite le bois pour l’holocauste, le chargea sur son fils Isaac, prit le feu et le couteau dans sa main, et ils marchèrent ensemble. Isaac s’adressa ensuite à son père, et dit: Mon père! celui-ci dit: Me voici, mon fils; l’autre reprit: Voici bien le feu, le bois, mais où est donc l’agneau pour l’holocauste? Abraham répondit: Mon fils, Dieu se pourvoira d’un agneau pour un holocauste; et ils marchèrent ensemble. Ils arrivèrent à l’endroit que Dieu avait désigné; Abraham y éleva un autel sur lequel il rangea le bois: ensuite il lia Isaac et le plaça sur le bois; Abraham tendit la main, prit le couteau pour immoler son fils. Alors un ange cria vers lui du ciel, et dit: Abraham, Abraham! celui-ci répondit: Me voici. L’ange reprit: Ne tendez pas la main vers votre fils, et ne lui faites rien; car je sais maintenant que vous êtes un homme pieux, puisque vous ne m’avez pas même refusé votre fils, votre fils unique. Abraham levant les yeux, vit un bélier retenu par les cornes à un buisson; Abraham y alla, prit ce bélier et le sacrifia en holocauste en place de son fils. Abraham appela cet endroit Adonaï-Jiré (l’Éternel pourvoira). Un ange appela du ciel Abraham, pour la seconde fois, et dit: J’en jure par moi, que puisque vous avez obéi, et que vous n’avez pas refusé votre fils unique, je vous bénirai certainement, et je multiplierai vos enfants en aussi grand nombre que les étoiles du ciel et le sable qui se trouve sur le bord de la mer; votre postérité possédera la porte de ses ennemis; et c’est par votre postérité que toutes les nations de la terre seront bénies, parce que vous avez obéi à ma voix. Abraham retourna vers ses gens; ils se levèrent et allèrent ensemble à Beér-Chébâ, et Abraham s’y établit. Après ces événements, il fut annoncé à Abraham, que Milca avait aussi donné des enfants à Nachor; savoir: son premier-né Outs, et son frère Bouse; ainsi que Kémouel, père d’Arame; et Késchède, Hazo, Pildach, Jidlaph et Bethouel; et Bethouel qui engendra Rebecca (Ribka); tel est le nom des huit enfants que Milca enfanta à Nachor, frère d’Abraham. Mort de Sarah.—Isaac épouse Rebecca.—Mort d’Abraham. Sarah ayant vécu cent vingt-sept ans, mourut à Kiriath-Arba, qui est Hebron, au pays de Chanaan. Abraham la pleura, en fit le deuil et l’enterra dans la caverne du champ de Machpéla, devant Mamré; laquelle terre Abraham avait achetée d’Ephron, en présence des enfants de Heth, pour quatre cents sicles d’argent. Le champ avec la caverne qui y était fut donc livré en cette manière, et assuré à Abraham par les enfants de Heth, afin qu’il le possédât comme un sépulcre qui lui appartenait légitimement.—Or Abraham était vieux et fort avancé en âge, et l’Éternel l’avait béni en toutes choses. Il dit donc au plus ancien de ses domestiques, qui avait l’intendance sur toute sa maison: Mettez votre main sous ma cuisse, afin que je vous fasse jurer par l’Éternel, le Dieu du ciel et de la terre, que vous ne prendrez aucune des filles des Chananéens parmi lesquels j’habite, pour la faire épouser à mon fils; mais que vous irez au pays où sont mes parents, afin d’y prendre une femme pour mon fils Isaac. Son serviteur lui répondit: Si la fille ne veut pas venir en ce pays-ci avec moi, voulez-vous que je remène votre fils au lieu d’où vous êtes sorti? Abraham lui répondit: Gardez-vous bien de remener mon fils en ce pays-là. L’Éternel, le Dieu du ciel, qui m’a tiré de la maison de mon père et du pays de ma naissance, qui m’a parlé et qui m’a juré en me disant: Je donnerai ce pays à votre postérité, enverra lui-même son ange devant vous, afin que vous preniez une femme de ce pays-là pour mon fils. Si la fille ne veut pas vous suivre, vous ne serez point obligé à votre serment; seulement ne ramenez jamais mon fils en ce pays-là. Ce serviteur mit donc sa main sous la cuisse d’Abraham son maître, et s’engagea par serment à faire ce qu’il lui avait ordonné. En même temps il prit dix chameaux du troupeau de son maître, porta avec lui tous ses biens, et s’étant mis en chemin, il alla droit à Arame Naharaïme en Mésopotamie, à la ville de Nachor. Étant arrivé sur le soir près d’un puits hors de la ville, au temps où les filles avaient accoutumé de sortir pour puiser de l’eau, et ayant fait reposer ses chameaux, il pria Dieu: Éternel, Dieu d’Abraham, mon maître, assistez-moi aujourd’hui, je vous prie, et faites miséricorde à Abraham mon seigneur. Et Dieu l’assista, lui fit connaître d’une manière miraculeuse _Rebecca_, fille de Béthouel, petite-fille de Nachor, frère d’Abraham. Il lui demanda s’il pouvait loger dans la maison de son père, elle lui répondit qu’il le recevrait avec plaisir. Elle courut donc l’annoncer à sa famille, et alla lui dire tout ce qu’elle avait entendu. Or Rebecca avait un frère nommé Laban, qui sortit aussitôt pour aller trouver cet homme près de la fontaine. Et ayant déjà vu aux mains de sa sœur les pendants d’oreilles et les bracelets que cet homme lui avait donnés, il vint à lui, lorsqu’il était encore près de la fontaine avec ses chameaux, et lui dit: Vous qui êtes béni de Dieu, pourquoi demeurez-vous dehors? Venez chez mon père, j’ai préparé la maison, et un lieu pour vos chameaux. Il le fit aussitôt entrer dans le logis; il déchargea ses chameaux, leur donna de la paille et du foin; et fit laver les pieds de cet homme et de ceux qui étaient venus avec lui. En même temps on lui servit à manger. Mais le serviteur lui dit: Je ne mangerai point jusqu’à ce que je vous aie proposé ce que j’ai à vous dire. Vous pouvez le faire, lui dit Laban. Et il leur parla ainsi: Je suis serviteur d’Abraham. L’Éternel a comblé mon maître de bénédictions et l’a rendu grand et riche. Il lui a donné des brebis, des bœufs, de l’argent, de l’or, des serviteurs et des servantes, des chameaux et des ânes. Sarah, la femme de mon maître, lui a enfanté un fils dans sa vieillesse, et mon maître lui a donné tout ce qu’il avait. Et il m’a fait jurer devant lui en me disant: Promettez-moi que vous ne prendrez aucune des filles des Chananéens dans le pays desquels j’habite, pour la faire épouser à mon fils, mais que vous irez à la maison de mon père, et que vous prendrez parmi ceux de ma parenté une femme pour mon fils... C’est pourquoi si vous avez véritablement dessein d’obliger mon maître, dites-le-moi. Si vous avez résolu autre chose, faites-le-moi connaître, afin que j’aille chercher une fille ailleurs. Laban et Béthouel répondirent: C’est Dieu qui parle en cette rencontre; nous ne pouvons vous dire autre chose que ce qui paraît conforme à sa volonté. Rebecca est entre vos mains, prenez-la et l’emmenez avec vous, afin qu’elle soit la femme du fils de votre maître, selon que l’Éternel s’en est déclaré. Le serviteur d’Abraham ayant entendu cette réponse, se prosterna contre terre, et adora l’Éternel. Il tira ensuite des vases d’or et d’argent, et de riches vêtements, dont il fit présent à Rebecca. Il donna aussi des présents à son frère et à sa mère. Ils firent ensuite le festin; ils mangèrent et burent, et demeurèrent ensemble ce jour-là. Le lendemain le serviteur s’étant levé le matin, leur dit: Permettez-moi de retourner vers mon maître. Le frère et la mère de Rebecca lui répondirent: Que notre enfant demeure au moins quelques jours avec nous, et après elle s’en ira. Je vous prie, dit le serviteur, de ne me point retenir davantage, puisque l’Éternel m’a conduit dans tout mon chemin. Permettez-moi d’aller retrouver mon maître. Ils lui dirent: Appelons Rebecca et sachons d’elle-même son sentiment. On l’appela donc; et elle, étant venue, ils lui demandèrent: Veux-tu bien aller avec cet homme? Je le veux bien, répondit-elle. Ils la laissèrent donc aller accompagnée de sa nourrice, avec le serviteur d’Abraham et ceux qui l’avaient suivi; et souhaitant toutes sortes de prospérités à Rebecca, ils lui dirent: Notre sœur, crois en mille et mille générations; et que ta postérité se mette en possession des villes de ses ennemis. Rebecca et ses filles montèrent donc sur les chameaux et suivirent cet homme, qui s’en retourna en grande diligence vers son maître. En ce même temps Isaac revenait du voyage au puits, appelé le puits de celui qui vit et qui voit; car il demeurait au pays du midi. Il était alors sorti dans le champ pour méditer, le jour étant sur son déclin. Et ayant levé les yeux, il vit de loin venir les chameaux. Rebecca ayant aussi aperçu Isaac, descendit de son chameau, et dit au serviteur: Qui est cette personne qui vient le long du champ au-devant de nous? C’est mon maître, lui dit-il. Elle prit aussitôt son voile et se couvrit. Le serviteur rendit compte à Isaac de tout ce qu’il avait fait. Alors Isaac fit entrer Rebecca dans la tente de Sarah sa mère, et la prit pour femme; et l’affection qu’il eut pour elle fut si grande, qu’elle tempéra la douleur que la mort de sa mère lui avait causée. Abraham épousa ensuite une autre femme nommée Kétoura, qui lui enfanta plusieurs fils. Il donna à Isaac tout ce qu’il possédait, fit des présents aux fils de ses autres femmes, et de son vivant il les sépara de son fils Isaac, les faisant aller dans le pays qui regarde l’orient. Tout le temps de la vie d’Abraham fut de cent-soixante et quinze ans, et les forces lui manquant, il mourut après une heureuse vieillesse, étant fort âgé et rassasié de jours, et il fut réuni aux siens. Isaac et Ismaël, ses fils, l’enterrèrent dans la caverne de Machpéla, située dans le champ d’Ephrone, fils de Tsohar Héthéen, vis à vis de Mamré, qu’il avait acheté des enfants de Heth. C’est là qu’il fut enterré ainsi que Sarah, sa femme. Naissance de Jacob et d’Ésaü. Après la mort de son père, Isaac continua la vie nomade, vie habituelle aux Patriarches; il s’adonna aussi avec succès à l’agriculture. Dieu l’éprouva bien des fois, ainsi que son père Abraham, par la famine et par d’autres malheurs, mais toujours reconnu pieux et juste, l’Éternel le bénit comme il l’avait promis à Abraham. Isaac avait quarante ans lorsqu’il épousa Rebecca, mais elle était stérile. Il pria donc l’Éternel, et l’Éternel l’exauça en donnant à Rebecca la vertu de concevoir. Lorsque le temps, où elle devait être délivrée, fut arrivé, elle se trouva mère de deux enfants jumeaux. L’aîné des deux était roux, et tout velu, et fut nommé Ésaü (Esave), c’est-à-dire homme fait. Le second tenait de sa main le pied de son frère, et fut nommé Jacob, c’est-à-dire supplantateur. Isaac avait soixante ans lorsqu’il eut ces deux enfants. Quand ils furent grands, Ésaü devint habile à la chasse, homme des champs: Jacob, au contraire, homme simple, demeurait à la maison. Isaac aimait Ésaü; mais Rebecca aimait Jacob. Primogéniture et bénédiction paternelle. Un jour que Jacob avait préparé des lentilles, Ésaü les vit à son retour de la chasse, qui faisait son occupation ordinaire et désira les manger. Il dit donc à Jacob: Donne-moi de ce mets roux que tu as fait cuire, parce que je suis extrêmement las. Jacob lui dit: Vends-moi ton droit d’aînesse. Ésaü répondit: Je me meurs, de quoi me servira mon droit d’aînesse? Jure-le-moi donc, lui dit Jacob; Ésaü le lui jura, et lui vendit son droit d’aînesse. Et ainsi, ayant pris du pain et ce plat de lentilles, il mangea et but, et s’en alla, se mettant peu en peine d’avoir vendu son droit d’aînesse. Depuis lors, il fut nommé Édom, c’est-à dire roux (par allusion au plat de lentilles). Or, Ésaü ayant quarante ans, épousa Judith, fille de Beeri Héthéen, et Basemath, fille d’Elon du même pays; ce qui fut une cause de contrariétés pour Isaac et Rebecca. Isaac étant devenu fort vieux, ses yeux s’obscurcirent de telle sorte, qu’il ne pouvait plus voir. Il appela donc Ésaü son fils aîné, et lui dit: Mon fils. Me voici, dit Ésaü. Son père ajouta: Tu vois que je suis fort âgé, et que j’ignore le jour de ma mort. Prends tes armes, ton carquois et ton arc, et sors; et lorsque tu auras pris quelque chose à la chasse, tu me l’apprêteras comme tu sais que je l’aime, et tu me l’apporteras afin que j’en mange, et que je te bénisse avant que je meure³. Rebecca entendit ces paroles, et Ésaü étant allé dans les champs pour faire ce que son père lui avait commandé, elle conseilla à son fils Jacob de lui apporter deux des meilleurs chevreaux. Elle les prépara comme elle savait que les aimait Isaac. Elle fit prendre ensuite à Jacob les plus beaux habits d’Ésaü, qu’elle gardait elle-même au logis. Elle lui mit autour des mains la peau de ces chevreaux, et lui en couvrit le cou, partout où il était découvert. Puis elle lui donna ce qu’elle avait préparé à manger. Jacob porta le tout devant Isaac et lui dit: Mon père! Je t’entends, dit Isaac: Qui es-tu, mon fils? Jacob lui répondit: Je suis Ésaü votre fils aîné⁴: j’ai fait ce que vous m’avez commandé. Levez-vous, asseyez-vous et mangez ma chasse, afin que vous me donniez votre bénédiction. Isaac dit encore à son fils: Mais comment as-tu pu, mon fils, en trouver sitôt? Il lui répondit: Dieu a voulu que ce que je désirais se présentât tout d’un coup à moi. Isaac dit encore: Approche-toi d’ici, mon fils, afin que je te touche, et que je reconnaisse si tu es mon fils Ésaü ou non. Jacob s’approcha de son père, et Isaac l’ayant tâté, dit: Pour la voix, c’est la voix de Jacob; mais les mains sont les mains d’Ésaü, et il ne le reconnut point, parce que ses mains étant couvertes de poils, parurent toutes semblables à celles de son aîné. Isaac le bénissant donc, lui dit: Es-tu mon fils Ésaü? Je le suis, répondit Jacob. Mon fils, ajouta Isaac, apporte-moi à manger de ta chasse, afin que je te bénisse. Jacob lui en présenta; et après qu’Isaac en eut mangé, il lui présenta aussi du vin qu’il but, Isaac lui dit ensuite: Approche-toi de moi, mon fils, et viens me baiser. Il s’approcha donc de lui et le baisa. Et aussitôt qu’Isaac eut senti la bonne odeur qui s’échappait de ses habits, il lui dit en le bénissant: L’odeur qui sort de mon fils, est semblable à celle d’un champ que l’Éternel a comblé de ses bénédictions. Que Dieu te donne une grande abondance de blé et de vin, de la rosée du ciel et de la graisse de la terre. Que les peuples te soient assujettis et que les tribus t’adorent. Sois le seigneur de tes frères, et que les enfants de ta mère s’abaissent profondément devant toi. Que celui qui te maudira soit maudit lui-même; et que celui qui te bénira, soit comblé de bénédictions. Isaac ne faisait que d’achever ces paroles, et Jacob était à peine sorti, qu’Ésaü entra; et que, présentant à son père ce qu’il avait apprêté de sa chasse, il lui dit: Levez-vous, mon père, et mangez de la chasse de votre fils, afin que vous me donniez votre bénédiction. Isaac lui dit: Qui es-tu donc? Ésaü lui répondit: Je suis Ésaü votre fils aîné. Isaac fut grandement surpris de ce qui était arrivé; il lui dit: Qui est donc celui qui m’a déjà apporté de ce qu’il avait pris à la chasse, et qui m’a fait manger de tout avant que tu vinsses? Je lui ai donné ma bénédiction, et il sera béni. Ésaü, à ces paroles de son père, jeta un cri de fureur, et dans une extrême consternation, il lui dit: Donnez-moi aussi votre bénédiction, mon père. Isaac lui répondit: «Ton frère est venu me surprendre, et il a reçu la bénédiction qui t’était due.—C’est avec raison, dit Ésaü, qu’il a été appelé Jacob, c’est-à-dire supplantateur; car voici la seconde fois qu’il m’a supplanté. Il m’a enlevé auparavant mon droit d’aînesse; et présentement il vient encore de me dérober la bénédiction qui m’était due. Mais, mon père, ajouta Ésaü, ne m’avez-vous donc point réservé aussi une bénédiction?» Isaac lui répondit: «Je l’ai établi ton seigneur, et j’ai assujetti à sa domination tous ses frères; je l’ai affermi dans la possession du blé et du vin; et après cela, mon fils, que me reste-t-il que je puisse faire pour vous?» Ésaü lui repartit: «N’avez-vous donc, mon père, qu’une seule bénédiction? Je vous conjure de me bénir aussi.» Il jeta ensuite de grands cris mêlés de larmes, et Isaac en étant touché, lui dit: «Ta demeure sera dans la graisse de la terre et dans la rosée du ciel qui vient d’en haut; tu vivras de l’épée, tu serviras ton frère, et le temps viendra que tu secoueras son joug, et que tu t’en délivreras.» ³ Car Isaac, ce tendre père, ne pouvait s’imaginer qu’Ésaü son fils bien aimé eût agi d’une manière si méprisable à l’égard du droit d’aînesse, et qu’il l’eût vendu pour un plat de lentilles. ⁴ Jacob a pu croire qu’il pouvait se permettre ce mensonge officieux pour ne pas affliger son vieux père en lui avouant la vérité et en lui disant: «Moi en effet je suis Jacob, toutefois je réclame la bénédiction comme fils aîné, parce qu’Ésaü m’a vendu le droit de primogéniture. Ésaü haïssait donc toujours Jacob à cause de cette bénédiction qu’il avait reçue de son père; et il disait en lui-même: «Les jours de deuil de mon père approcheront, et alors je tuerai mon frère Jacob.» Voyage de Jacob.—Il arrive chez Laban et y demeure. Les paroles d’Ésaü ayant été rapportées à Rebecca, elle envoya querir son fils Jacob, et lui dit: «Voilà ton frère Ésaü qui menace de te tuer. Mais, mon fils, crois-moi, hâte-toi de te retirer vers mon frère Laban qui est à Haran. Tu demeureras quelque temps avec lui, jusqu’à ce que la fureur de ton frère s’apaise, que sa colère se passe, et qu’il oublie ce que tu as fait contre lui. J’enverrai ensuite pour te faire revenir ici. Pourquoi perdrais-je mes deux enfants en un même jour?» Rebecca dit ensuite à Isaac: «La vie m’est devenue ennuyeuse à cause des filles de Heth. Si Jacob épouse une fille de ce pays-ci, je ne veux plus vivre.» Isaac ayant donc appelé Jacob, le bénit, et lui fit ce commandement: «Ne prends point, lui dit-il, de femme d’entre les filles de Chanaan; mais va en Mésopotamie qui est en Syrie, en la maison de Béthouel, père de ta mère, et épouse une des filles de Laban, ton oncle. Que le Dieu tout-puissant te bénisse, qu’il accroisse et qu’il multiplie ta postérité; afin que tu sois le chef d’une assemblée de peuples. Qu’il te donne, et à ta postérité après toi, les bénédictions qu’il a promises à Abraham, et qu’il te fasse posséder la terre où tu demeures comme étranger, et qu’il a promise à ton aïeul.» Jacob ayant pris congé d’Isaac, partit pour se rendre en Mésopotamie, chez Laban, et étant venu en un certain lieu, comme il voulut s’y reposer après le coucher du soleil, il prit une des pierres qui étaient là, et la mit sous sa tête, et s’endormit dans ce même lieu. Alors il vit en songe une échelle, dont le pied était appuyé sur la terre, et dont le haut touchait au ciel, et des anges de Dieu montaient et descendaient le long de l’échelle. L’Éternel se tenait au-dessus, et dit: «Je suis l’Éternel, le Dieu d’Abraham votre père, et le Dieu d’Isaac; je vous donnerai, ainsi qu’à votre postérité, la terre sur laquelle vous êtes couché. Votre postérité sera nombreuse comme la poussière de la terre, vous vous étendrez à l’occident, à l’orient, vers le nord et vers le midi; avec vous et votre postérité seront bénies toutes les familles de la terre. Je serai votre protecteur partout où vous irez, je vous ramènerai dans ce pays, et je ne vous quitterai point que je n’aie accompli tout ce que je vous ai dit.» Jacob s’étant éveillé après son sommeil, dit ces paroles: «L’Éternel est vraiment en ce lieu-ci, et je ne le savais pas.» Et dans la frayeur dont il se trouva saisi, il ajouta: «Que ce lieu est redoutable! C’est véritablement la maison de Dieu, et voici la porte du ciel.» Jacob se levant donc le matin, prit la pierre qu’il avait mise sous sa tête, et l’érigea comme un monument, répandant de l’huile dessus. Il donna aussi le nom de Bethel, c’est-à-dire, maison de Dieu, à la ville qui auparavant s’appelait Luze. Et il fit ce vœu en même temps, disant: «Si Dieu est avec moi, s’il me protége dans le chemin par lequel je marche, et me donne du pain pour me nourrir, et des vêtements pour me vêtir; et si je retourne heureusement en la maison de mon père, l’Eternel sera mon Dieu; et cette pierre que j’ai dressée comme un monument sera la maison de Dieu; et je vous offrirai, Eternel, la dîme de tout ce que vous m’aurez donné.» Jacob continua alors son chemin, et arriva au pays qui était vers l’orient. Il entra dans un champ où il vit un puits, et trois troupeaux de brebis qui se reposaient auprès; car c’était de ce puits qu’on abreuvait les troupeaux, et l’entrée en était fermée avec une grande pierre. C’était la coutume de ne lever la pierre que lorsque tous les troupeaux étaient assemblés; et après qu’ils avaient bu, on la remettait sur l’ouverture du puits. Jacob dit donc aux pasteurs: «Mes frères, d’où êtes-vous?» Ils lui répondirent: «De Haran.» Jacob ajouta: «Ne connaissez-vous point Laban, fils de Nachor?» Ils lui dirent: «Nous le connaissons. Se porte-t-il bien?» dit Jacob. Ils lui répondirent: «Il se porte bien, et voilà sa fille Rachel qui vient ici avec son troupeau.» Jacob leur dit: «Il reste encore beaucoup de jour, et il n’est pas temps de remener les troupeaux dans l’étable: faites donc boire présentement les brebis, et ensuite vous les remènerez paître.» Ils lui répondirent: «Nous ne pouvons le faire, jusqu’à ce que tous les troupeaux soient assemblés, et que nous ayons ôté la pierre de dessus le puits, pour leur donner à boire à tous ensemble.» Ils parlaient encore, lorsque Rachel arriva avec les brebis de son père, car elle menait paître elle-même le troupeau. Jacob l’ayant vue, et sachant qu’elle était sa cousine germaine, et que ces troupeaux étaient à Laban son oncle, ôta la pierre qui fermait le puits. Et ensuite ayant fait boire son troupeau, il l’embrassa en haussant sa voix et en pleurant; car il lui avait dit qu’il était le fils de Rebecca, la sœur de Laban. Rachel courut aussitôt le dire à son père, lequel ayant appris que Jacob, fils de sa sœur, était venu courut au-devant de lui, et l’ayant embrassé plusieurs fois, le mena en sa maison. Lorsqu’il eut appris de lui-même le sujet de son voyage, il lui dit: «Vous êtes ma chair et mon sang,» et il le traita avec hospitalité. Jacob demeura donc pendant plusieurs années dans la maison de Laban; il en épousa les deux filles, _Léa et Rachel_, après s’être obligé à servir sept ans pour chacune d’elle. Ces deux femmes, avec leurs deux servantes _Bilha_ et _Silpa_, donnèrent à Jacob douze fils et une fille. Retour de Jacob et sa rencontre avec Ésaü. Après avoir été vingt ans au service de Laban, Jacob était devenu entièrement riche, il eut de grands troupeaux, des serviteurs et des servantes, des chameaux et des ânes. Il entendit alors les enfants de Laban qui s’entre-disaient: «Jacob a enlevé tout ce qui était à notre père, et il est devenu puissant en s’enrichissant de son bien. Il remarqua aussi que Laban ne le regardait pas du même œil qu’auparavant. Et de plus Dieu lui fit connaître sa volonté de retourner au pays de ses pères et vers sa famille. Il envoya donc querir Rachel et Léa, et les fit venir dans le champ où il faisait paître ses troupeaux; et il leur dit: «Je vois que votre père ne me regarde plus du même œil dont il me regardait ci-devant; cependant le Dieu de mon père a été avec moi, et vous savez vous-mêmes que j’ai servi votre père de toutes mes forces. Il a même usé envers moi de tromperie, en changeant dix fois ce que je devais avoir pour récompense, quoique Dieu ne lui ait pas permis de me faire tort. Lorsqu’il a dit que les animaux de diverses couleurs seraient pour moi, toutes les brebis ont eu des petits de diverses couleurs. Et lorsqu’il a dit au contraire que tout ce qui serait blanc serait pour moi, tout ce qui est né des troupeaux a été blanc. Ainsi Dieu a ôté le bien de votre père pour me le donner. Et l’ange de Dieu m’a dit en songe: «Jacob, j’ai vu tout ce que Laban vous a fait. Je suis le Dieu de Bethel, où vous avez oint la pierre et où vous m’avez fait un vœu. Sortez donc promptement de cette terre, et retournez au pays de votre naissance.» Rachel et Léa lui répondirent: «Nous reste-t-il quelque chose du bien et de la part que nous devions avoir dans la maison de notre père? Ne nous a-t-il pas traitées comme des étrangères? Ne nous a-t-il pas vendues, et n’a-t-il pas mangé tout ce qui nous était dû pour notre travail? Mais Dieu a pris les richesses de notre père et nous les a données et à nos enfants: c’est pourquoi faites tout ce que Dieu vous a commandé.» Jacob fit donc monter aussitôt ses femmes et ses enfants sur des chameaux; et emmenant avec lui tout ce qu’il avait, ses troupeaux, et généralement ce qu’il avait acquis en Mésopotamie, il se mit en chemin pour s’en aller retrouver Isaac son père au pays de Chanaan. Il envoya en même temps des gens devant lui pour donner avis de sa venue à son frère Esaü en la terre de Seïr au pays d’Edom; et il leur donna cet ordre: «Voici la manière dont vous parlerez à Esaü mon seigneur: Jacob votre frère vous envoie dire ceci: J’ai demeuré comme étranger chez Laban, et j’y ai été jusqu’aujourd’hui. J’ai des bœufs, des ânes, des brebis, des serviteurs et des servantes; et j’envoie maintenant vers mon seigneur, afin que je trouve grâce devant lui.» Ceux que Jacob avait envoyés revinrent lui dire: «Nous avons été vers votre frère Esaü, et le voici qui vient lui-même en grande hâte au-devant de vous avec quatre cents hommes.» A ces mots Jacob eut une grande peur; et dans la frayeur dont il fut saisi, il divisa en deux bandes tous ceux qui étaient avec lui, et les troupeaux, les brebis, les bœufs et les chameaux, en disant: «Si Esaü vient attaquer une des troupes, l’autre qui restera sera sauvée. Jacob dit ensuite: «Dieu d’Abraham mon père, Dieu de mon père Isaac, Éternel qui m’as dit: «Retournez dans votre pays, et au lieu de votre naissance, et je vous comblerai de bienfaits;» je suis indigne de toutes vos miséricordes, et de la vérité que vous avez gardée dans toutes les promesses que vous avez faites à votre serviteur. J’ai passé ce fleuve du Jourdain, n’ayant qu’un bâton, et je retourne maintenant avec ces deux troupes. Délivrez-moi, je vous prie, de la main de mon frère Esaü, parce que je le crains extrêmement, de peur qu’à son arrivée il ne passe au fil de l’épée la mère avec les enfants. Souvenez-vous que vous m’avez promis de me combler de biens, et de multiplier ma postérité comme le sable de la mer, dont la quantité est innombrable.» Jacob prit alors de ce qu’il avait avec lui pour en faire un présent à son frère Esaü. «Car, dit-il, je veux l’apaiser par le présent qui marche devant moi, et ensuite je le verrai en face; peut-être qu’il m’accueillera favorablement.» Jacob passa la nuit en ce lieu-là, qu’il appela _Phanuel_, c’est-à-dire, la face de Dieu (c’est en ce lieu qu’il reçut le nom d’Israël). Le lendemain Jacob levant les yeux, vit Esaü qui s’avançait avec quatre cents hommes, et il partagea les enfants de Léa, de Rachel, et des deux servantes. Il mit à la tête les deux servantes avec leurs enfants; Léa et ses enfants, au second rang; Rachel et Joseph au dernier. Et lui, s’avançant vers Esaü, se prosterna sept fois en terre jusqu’à ce que son frère fût proche de lui. Alors Esaü courut au-devant de son frère, l’embrassa, le serra étroitement, en versant des larmes. Et ayant levé les yeux, il vit les femmes et leurs enfants, et il dit à Jacob: «Qui sont ceux-là? sont-ils à vous?» Jacob lui répondit: «Ce sont les petits enfants que Dieu a donnés à votre serviteur.» Et les servantes s’approchant avec leurs enfants, le saluèrent profondément. Léa s’approchant ensuite avec ses enfants, le salua aussi, Joseph et Rachel le saluèrent les derniers. Alors Esaü lui dit: «Quelles sont ces troupes que j’ai rencontrées?» Jacob lui répondit: «Je les ai envoyées pour trouver grâce devant mon seigneur.» Esaü lui répondit: «J’ai des biens en abondance, mon frère; gardez pour vous ce qui est à vous.» Jacob ajouta: «N’en usez pas ainsi, je vous prie; mais si j’ai trouvé grâce devant vous, recevez de ma main ce petit présent, car j’ai vu aujourd’hui votre face comme on voit la face de Dieu, vous m’avez accueilli avec bonté.» Esaü, après ces instances de son frère, accepta ce qu’il lui donnait. Depuis lors les deux frères furent donc de nouveau réconciliés. En se séparant l’un de l’autre Jacob se dirigea vers Hébron pour voir son père, lequel mourut bientôt après, à l’âge de cent quatre-vingts ans, ensuite il s’établit dans les environs de Bethel. Joseph vendu par ses frères. Jacob avait douze fils et une fille: les fils de Léa étaient Ruben l’aîné de tous, Siméon (Schimon), Lévi, Juda, Issachar et Zebulun. Les fils de Rachel étaient Joseph et Benjamin. Les fils de Bilha, servante de Rachel, Dan et Nephthali. Les fils de Zilpa, servante de Léa, Gad et Aser (Ascher). La fille s’appelait Dina, Léa en était la mère. Joseph, fils de Rachel, âgé de dix-sept ans, conduisait le troupeau de son père avec ses frères, et il était avec les enfants de Bilha et de Zilpa, femmes de son père. Il rapportait alors à leur père leurs mauvais discours. Jacob aimait Joseph plus que tous ses autres enfants, parce qu’il l’avait eu étant déjà vieux, et il lui avait fait faire une robe de plusieurs couleurs. Ses frères voyant donc que leur père l’aimait plus que tous ses autres enfants, le haïssaient, et ne pouvaient lui parler avec douceur. Il arriva aussi que Joseph rapporta à ses frères un songe qu’il avait eu, ce qui fut encore la source d’une plus grande haine. Car il leur dit: «Écoutez le songe que j’ai eu. Il me semblait que je liais avec vous des gerbes dans les champs; que ma gerbe se levait et se tenait debout, et que les vôtres étant autour de la mienne, se prosternaient devant elle.» Ses frères lui répondirent: «Est-ce que tu seras notre roi, et serons-nous soumis à ta puissance?» Ces songes et ces entretiens allumèrent donc encore davantage l’envie et la haine qu’ils avaient contre lui. Il eut encore un autre songe qu’il raconta à ses frères en leur disant: «J’ai cru voir en songe que le soleil et la lune et onze étoiles se prosternaient devant moi.» Lorsqu’il eut rapporté ce songe à son père et à ses frères, son père lui en fit réprimande, et lui dit: «Que voudrait dire ce songe que tu as eu? Est-ce que ta mère, tes frères et moi nous viendrons nous prosterner à terre devant toi?» Ainsi ses frères étaient transportés d’envie contre lui: mais le père considérait tout ceci avec attention et dans le silence.—Il arriva alors que les frères de Joseph s’arrêtèrent à Sichem, où ils faisaient paître les troupeaux de leur père. Et Jacob dit à Joseph: «Tes frères font paître nos brebis dans le pays de Sichem. Viens donc, et je t’enverrai vers eux.»—«Je suis tout prêt, lui dit Joseph.» Jacob ajouta: «Va voir si tes frères se portent bien, et si les troupeaux sont en bon état; et tu me rapporteras ce qui se passe.» Ayant donc été envoyé dans la vallée d’Hébron, il vint à Sichem: et un homme l’ayant trouvé errant dans la campagne, lui demanda ce qu’il cherchait. Il lui répondit: «Je cherche mes frères; je vous prie de me dire où ils font paître leurs troupeaux.» Cet homme lui répondit: «Ils se sont retirés de ce lieu, et j’ai entendu qu’ils se disaient: «Allons vers Dothain.» Joseph alla donc après ses frères; et il les trouva dans la plaine de Dothain. Lorsqu’ils l’eurent aperçu de loin, avant qu’il se fût approché d’eux ils résolurent de le tuer: et ils se dirent les uns aux autres: «Voici notre songeur qui vient. Allons, tuons-le, et le jetons dans cette vieille citerne: nous dirons qu’une bête sauvage l’a dévoré; et après cela on verra à quoi ses songes lui auront servi.» Ruben les ayant entendus parler ainsi, tâchait de le tirer d’entre leurs mains, et il leur disait: «Ne le tuez point, et ne répandez pas son sang; mais jetez-le dans cette citerne qui est dans le désert, et conservez vos mains pures.» Il disait ceci dans le dessein de le tirer de leurs mains, et de le rendre à son père. Aussitôt donc que Joseph fut arrivé près de ses frères, ils lui ôtèrent sa robe de plusieurs couleurs, qui le couvrait jusqu’en bas, et ils le jetèrent dans cette vieille citerne qui était sans eau. S’étant ensuite assis pour manger, ils virent des Ismaélites qui passaient, et qui, venant de Giléad, portaient sur leurs chameaux des parfums, de la résine et de la myrrhe, et s’en allaient en Égypte. Alors Juda dit à ses frères: «Que nous servira d’avoir tué notre frère et d’avoir caché sa mort? Il vaut mieux le vendre à ces Ismaélites, et ne point souiller nos mains de son sang; car il est notre frère et notre chair.» Ses frères consentirent à ce qu’il disait. L’ayant donc tiré de la citerne, et voyant ces marchands midianites qui passaient, ils le vendirent vingt pièces d’argent aux Ismaélites, qui le menèrent en Égypte. Ruben étant retourné à la citerne, et n’y ayant point trouvé Joseph, déchira ses vêtements, et vint dire à ses frères: «L’enfant ne paraît plus, que deviendrai-je?» Après cela ils prirent la robe de Joseph, et l’ayant trempée dans le sang d’un chevreau qu’ils avaient tué, ils l’envoyèrent à son père, lui faisant dire par ceux qui la lui portaient: «Voici une robe que nous avons trouvée, voyez si c’est celle de votre fils, ou non.» Le père l’ayant reconnue, dit: «C’est la robe de mon fils; une bête cruelle l’a dévoré, une bête a dévoré Joseph!» Et ayant déchiré ses vêtements, il se couvrit d’un cilice, pleurant son fils très-longtemps. Alors tous ses enfants s’assemblèrent, pour tâcher de soulager leur père dans sa douleur: mais il ne voulait point recevoir de consolation, et il leur dit: «Je pleurerai tous les jours jusqu’à ce que je descende avec mon fils au fond de la terre.» Ainsi il continua toujours de pleurer.—Cependant les Midianites vendirent Joseph en Égypte à Putiphar, seigneur de la cour de Pharaon, chef des gardes du corps. Joseph est mis en prison. Dieu était avec Joseph; celui-ci était un homme auquel tout réussissait dans la maison de Putiphar, son maître. Il trouva donc grâce devant son maître, se donna tout entier à son service, et ayant reçu de lui l’autorité sur toute sa maison, il la gouvernait et prenait soin de tout ce qui lui avait été mis entre les mains. Or Joseph était beau de visage, et très-agréable. Au bout de quelque temps sa maîtresse jeta les yeux sur lui, et essaya de l’entraîner à commettre une mauvaise action. Mais il n’y consentit pas, il disait: «Comment pourrai-je commettre un si grand crime, et pécher contre Dieu?» Or il arriva un jour que Joseph étant entré dans la maison et y faisant quelque chose sans que personne fût présent, sa maîtresse le prit par son manteau, et voulut le forcer à pécher. Mais il lui laissa son manteau entre les mains et s’enfuit. Cette femme se voyant le manteau entre les mains, et dans la douleur d’avoir été méprisée, appela les gens de sa maison, et leur dit en parlant de son mari: «On nous a amené ici cet Hébreu pour nous faire insulte; il est venu à moi dans le dessein de me corrompre, et m’étant mise à crier, lorsqu’il a entendu ma voix, il m’a laissé son manteau que je tenais, et s’en est enfui dehors.» Lors donc que son mari fut retourné en sa maison, elle lui montra ce manteau qu’elle avait retenu comme une preuve de sa fidélité, et lui dit: «Cet esclave hébreu que vous nous avez amené, est venu pour me corrompre.» Le maître de Joseph, trop crédule aux accusations de sa femme, entra, à ces paroles, dans une grande colère, et fit mettre Joseph en la prison où l’on gardait ceux que le roi faisait arrêter.—Il était donc renfermé en ce lieu-là. Mais Dieu fut avec Joseph: il en eut compassion, et lui fit trouver grâce devant le gouverneur de la prison, qui lui remit le soin de tous ceux qui y étaient enfermés. Il ne se faisait rien que par son ordre. Et le gouverneur lui ayant tout confié, ne prenait connaissance de quoi que ce fût, parce que Dieu était avec Joseph, et qu’il le faisait réussir en toutes choses. Joseph explique des songes. Il est délivré et élevé à la dignité de prince. Il arriva ensuite que deux grands officiers du roi d’Égypte, son grand échanson et son grand panetier, offensèrent leur seigneur. Et Pharaon étant en colère contre ces deux officiers, les fit mettre dans la prison du général de ses troupes, où Joseph était prisonnier. Le gouverneur de la prison les mit entre les mains de Joseph, qui les servait et avait soin d’eux. Quelque temps se passa pendant lequel ils demeurèrent toujours prisonniers. Il arriva qu’ils eurent, tous les deux, un songe dans une même nuit. Ce songe marquait ce qui devait arriver à chacun d’eux. Joseph étant entré le matin où ils étaient, et les ayant vus tristes, leur en demanda le sujet, et leur dit: «D’où vient que vous avez le visage plus abattu aujourd’hui qu’à l’ordinaire?» Ils lui répondirent: «Nous avons eu cette nuit un songe, et nous n’avons personne pour nous l’expliquer.» Joseph leur dit: «N’est-ce pas à Dieu qu’il appartient de donner l’interprétation des songes? Dites-moi ce que vous avez vu⁵.» Le grand échanson lui rapporta le premier son songe en ces termes: «Il me semblait que je voyais devant moi un cep de vigne, où il y avait trois provins, qui poussaient peu à peu, premièrement des boutons, ensuite des fleurs, et à la fin des raisins mûrs; et qu’ayant dans la main la coupe de Pharaon, j’ai pris ces grappes de raisin, je les ai pressées dans la coupe que je tenais et en ai donné à boire au roi.» Joseph lui dit: «Voici l’interprétation de votre songe: Les trois provins de la vigne marquent trois jours, après lesquels Pharaon se souviendra du service que vous lui avez rendu: il vous rétablira dans votre première charge, et vous lui présenterez à boire selon que vous étiez accoutumé de le faire auparavant, dans le rang que vous teniez. Seulement souvenez-vous de moi, je vous prie, quand ce bonheur vous sera arrivé, et rendez-moi ce bon office, de supplier Pharaon qu’il daigne me tirer de la prison où je suis, parce que j’ai été enlevé par fraude et par violence du pays des Hébreux et que l’on m’a renfermé ici innocent.» Le grand panetier voyant qu’il avait interprété ce songe si sagement, lui dit: «J’ai eu aussi un songe. Il me semblait que je portais sur ma tête trois corbeilles de farine, et qu’en celle qui était au-dessus des autres, il y avait de tout ce qui se peut apprêter avec la pâte pour servir sur une table, et que les oiseaux venaient en manger.» Joseph lui répondit: «Voici l’interprétation de votre songe. Les trois corbeilles signifient que vous avez encore trois jours à vivre, après lesquels Pharaon vous fera couper la tête, et vous fera ensuite attacher à une potence, où les oiseaux déchireront votre chair.» Le troisième jour suivant étant celui de la naissance de Pharaon, il fit un grand festin à ses serviteurs, pendant lequel il se souvint du grand échanson et du grand panetier. Il rétablit l’un dans sa charge, et il fit attacher l’autre à une potence, ce qui vérifia l’interprétation que Joseph avait donnée à leurs songes. Cependant le grand échanson se voyant rentré en faveur après sa disgrâce, ne se souvint plus de son interprète. ⁵ Il est impossible que les différentes manières par lesquelles Dieu annonçait autrefois sa volonté et révélait souvent à ses saints ce qu’il voulait accomplir dans les temps les plus reculés, fussent inconnues à Joseph, cet homme pieux et vertueux, élevé et grandi dans l’amour paternel sous les yeux de Jacob. Joseph, le fils bien-aimé de son père, avait sans doute appris de Jacob comment l’Éternel lui avait déjà apparu bien des fois à lui-même et à ses pères, tantôt dans une vision et tantôt dans un rêve: c’est ainsi que, dans son propre songe, Joseph reconnut à l’instant l’intention divine. Il pouvait donc, à coup sûr, distinguer assez clairement la différence essentielle qu’il y a entre les songes _naturels_ et les _surnaturels_. Les songes naturels ne sont sans doute autre chose qu’un jeu du hasard, résultat de l’agitation du sang et de ce qu’on a ordinairement et le plus souvent pensé et fait auparavant, et ce serait un péché d’y avoir confiance. Mais quant aux songes surnaturels, ils étaient, particulièrement à cette époque, de véritables inspirations divines et de circonstance. L’Éternel ne s’était-il pas, dès le commencement de la création, révélé aux hommes de la manière la plus merveilleuse et ne leur avait-il pas assuré en même temps que cette révélation émanait de lui!... C’est ainsi que Joseph, doué de cet esprit profond, interpréta les songes de ces deux officiers et celui de Pharaon. Deux ans après Pharaon eut un songe. Il lui semblait qu’il était sur le bord du fleuve du Nil, d’où sortaient sept vaches fort belles et extrêmement grasses, qui paissaient dans des marécages; qu’ensuite il en sortit sept autres toutes laides et extraordinairement maigres, qui paissaient aussi sur le bord du même fleuve, et que ces dernières dévorèrent les premières, qui étaient si grasses et si belles. Pharaon s’étant éveillé, se rendormit, et il eut un second songe. Il vit sept épis pleins de grains et très-beaux, qui sortaient d’une même tige. Il en vit aussi paraître sept autres fort maigres, qu’un vent brûlant avait desséchés, et ces derniers dévorèrent les premiers, qui étaient si beaux. Pharaon s’étant éveillé, fut saisi de frayeur; et ayant envoyé dès le matin chercher tous les magiciens et tous les sages d’Égypte, il leur raconta son songe, sans qu’il s’en trouvât un seul qui pût l’interpréter. Le grand échanson s’étant enfin souvenu de Joseph, dit au roi: «Je confesse ma faute. Lorsque le roi, étant en colère contre ses serviteurs, commanda que je fusse mis avec le grand panetier dans la prison, nous eûmes tous deux en une même nuit un songe, qui nous prédisait ce qui nous arriva ensuite. Il y avait alors en cette prison un jeune homme hébreu à qui nous racontâmes chacun notre songe. Il nous dit tout ce que l’événement confirma depuis: car je fus rétabli dans ma charge, et le grand panetier fut pendu.» Aussitôt Joseph fut tiré de la prison par ordre du roi; on le rasa, on le fit changer d’habits et on le présenta devant ce prince. Alors Pharaon lui dit: «J’ai eu des songes, et je ne trouve personne qui les interprète; mais l’on m’a dit que vous aviez une grande lumière pour les expliquer.» Joseph lui répondit: «Ce sera Dieu, et non pas moi, qui rendra au roi une réponse favorable.» Pharaon lui raconta donc ses deux songes, l’un des sept vaches grasses et des maigres, et l’autre des épis pleins et des desséchés. Et il ajouta: «J’ai dit mon songe à tous les magiciens et à tous les sages, et je n’en trouve point qui me l’explique. Joseph répondit: «Les deux songes du roi signifient la même chose: Dieu a montré à Pharaon ce qu’il fera dans la suite. Les sept vaches si belles et les sept épis si pleins de grains, que le roi a vus en songe, marquent la même chose, et signifient sept années d’abondance. Les sept vaches maigres et défaites, qui sont sorties du fleuve après les sept grasses, et les sept épis maigres et frappés d’un vent brûlant, marquent sept années d’une famine qui doit arriver. Et ceci s’accomplira de cette sorte. Il viendra premièrement sept années d’une fertilité extraordinaire dans toute l’Égypte, qui seront suivies de sept autres d’une si grande stérilité, qu’elle fera oublier toute l’abondance qui l’aura précédée, car la famine consumera tout le pays; et cette fertilité si extraordinaire sera comme absorbée par l’extrême indigence qui doit la suivre. Quant au second songe que vous avez eu, qui signifie la même chose, c’est une marque que cette parole de Dieu sera ferme et qu’elle s’accomplira infailliblement et bientôt. Il est donc de la prudence du roi de choisir un homme sage et habile, à qui il donne le commandement sur toute l’Égypte, afin qu’il établisse des officiers dans toutes les provinces, qui, pendant les sept années de fertilité qui vont venir, amassent dans les greniers publics la cinquième partie des fruits de la terre; que tout le blé ainsi amassé soit mis sous la puissance du roi, et qu’on le conserve dans les villes, afin qu’il soit tout préparé pour les sept années de la famine qui doit accabler l’Égypte, et que ce pays ne soit pas consumé par la faim.» Ce conseil plut à Pharaon et à tous ses ministres: et il leur dit: «Où pourrions-nous trouver un homme comme celui-ci, qui fût aussi rempli qu’il l’est de l’esprit de Dieu?» Il dit donc à Joseph: «Puisque Dieu vous a fait voir tout ce que vous avez dit, où pourrais-je trouver quelqu’un plus sage que vous, ou même semblable à vous? Ce sera donc vous qui aurez l’autorité sur ma maison. Quand vous ouvrirez la bouche pour commander, tout le peuple vous obéira, et je n’aurai au-dessus de vous que le trône et la qualité de roi.» Pharaon dit encore à Joseph: «Je vous établis aujourd’hui pour commander à toute l’Egypte.» En même temps il ôta son anneau de sa main et le mit en celle de Joseph: il le fit revêtir d’une robe de fin lin et lui mit au cou un collier d’or. Il le fit ensuite monter sur l’un de ses chars, qui était le premier après le sien, et fit crier par un héraut, que tout le monde eût à fléchir le genou devant lui, et que tous reconnussent qu’il avait été établi pour commander à toute l’Égypte. Le roi dit encore à Joseph: «Je suis Pharaon; nul ne remuera ni le pied ni la main dans toute l’Égypte que par votre commandement.» Il changea aussi son nom, et l’appela en langue égyptienne, _Tsaphnath Panéach_, c’est-à-dire, homme à qui les choses cachées sont découvertes. Et il lui fit ensuite épouser Aseneth, fille de Potiphéra, prêtre d’One. Après cela, Joseph alla visiter l’Égypte (il avait trente ans lorsqu’il parut devant le roi Pharaon). Les sept années de fertilité vinrent donc; et le blé ayant été mis en gerbes, fut serré ensuite dans les greniers d’Égypte. On mit aussi en réserve, dans toutes les villes, une grande abondance de grains. Car il y eut une si grande quantité de froment, qu’elle égalait le sable de la mer, et qu’elle ne pouvait pas même se mesurer. Avant que la famine vînt, Joseph eut deux enfants de sa femme Aseneth. Il nomma l’aîné Manassé (Menaché), qui signifie _oubli_, en disant: Dieu m’a fait oublier toute ma peine et toute la maison de mon père.» Il nomma le second Ephraïm, qui signifie fructification ou accroissement, en disant: «Dieu m’a fait croître et fructifier dans le pays de mon affliction et de ma pauvreté.» Ces sept années de la fertilité d’Egypte étant donc passées, les sept années de stérilité vinrent ensuite, selon la prédiction de Joseph. Une grande famine survint dans tous les pays; mais il y avait du blé dans toute l’Egypte. Le peuple étant pressé de la famine, cria à Pharaon et lui demanda de quoi vivre. Alors il leur dit: «Allez trouver Joseph et faites tout ce qu’il vous dira.» Cependant la famine croissait tous les jours dans tous le pays; et Joseph ouvrant tous les greniers, vendait du blé aux Egyptiens, parce qu’ils étaient tourmentés eux-mêmes de la famine. Et on venait de tous les pays en Egypte pour acheter de quoi vivre et pour trouver quelque soulagement dans la rigueur de cette famine. Les frères de Joseph vont en Égypte. La famine se fit aussi sentir dans le pays de Chanaan. Cependant Jacob ayant ouï dire qu’on vendait du blé en Égypte, dit à ses enfants: «Pourquoi négligez-vous ce qui regarde notre soulagement? J’ai appris qu’on vend du blé en Egypte; allez-y acheter ce qui nous est nécessaire, afin que nous puissions vivre, et que nous ne mourions pas de faim.» Les dix frères de Joseph allèrent donc en Egypte pour y acheter du blé; car Jacob retint Benjamin avec lui, ayant dit à ses enfants qu’il craignait qu’il ne lui arrivât quelque accident dans le chemin. Ils entrèrent dans l’Egypte avec les autres qui y allaient pour acheter du blé, parce que la famine était dans tous les pays. Joseph commandait dans toute l’Egypte, et le blé ne se vendait aux peuples que par son ordre. Ses frères vinrent et se prosternèrent devant lui la face contre terre. Joseph voyant ses frères les reconnut, et leur parlant assez rudement, comme à des étrangers, il leur dit: «D’où venez-vous?» Ils lui répondirent: «Nous venons du pays de Chanaan pour acheter ici de quoi vivre.» Et, quoiqu’il connût bien ses frères, il n’en était pas néanmoins reconnu. Alors se souvenant des songes qu’il avait eus autrefois, il leur dit: «Vous êtes des espions, et vous êtes venus ici pour examiner les endroits les plus faibles de l’Egypte.» Ils lui répondirent: «Seigneur, cela n’est pas ainsi; mais vos serviteurs sont venus ici seulement pour acheter du blé. Nous sommes tous enfants d’un seul homme; nous venons avec des pensées de paix, et vos serviteurs n’ont aucun mauvais dessein.» Joseph leur répondit: «Non, cela n’est pas; mais vous êtes venus pour remarquer ce qu’il y a de moins fortifié dans l’Egypte.» Ils lui dirent: «Nous sommes douze frères, tous enfants d’un même homme dans le pays de Chanaan; le dernier de tous est avec notre père, et l’autre n’y est plus.»—«Voilà, dit Joseph, ce que je disais: vous êtes des espions. Je vais éprouver si vous dites la vérité. Vive Pharaon! vous ne sortirez point d’ici jusqu’à ce que le dernier de vos frères y soit venu. Envoyez l’un de vous pour l’amener; cependant vous demeurerez en prison jusqu’à ce que j’aie reconnu si ce que vous dites est vrai ou faux, autrement, vive Pharaon! vous êtes des espions.» Il les fit donc mettre en prison pour trois jours. Et le troisième jour il les fit sortir de prison, et leur dit: «Faites ce que je vous dis, et vous vivrez; car je crains Dieu. Si vous venez ici dans un esprit de paix, que l’un de vos frères demeure lié dans la prison, et allez-vous-en vous autres; emportez en votre pays le blé que vous avez acheté, et amenez-moi le dernier de vos frères, afin que je puisse reconnaître si ce que vous dites est véritable, et que vous ne mouriez point.» Ils firent ce qu’il leur avait ordonné. Et ils se disaient les uns aux autres: «C’est justement que nous souffrons tout ceci, parce que nous avons péché contre notre frère, et que voyant la douleur de son âme, lorsqu’il nous priait d’avoir compassion de lui, nous ne l’écoutâmes point: c’est pour cela que nous sommes tombés dans cette affliction.» Ruben, l’un d’entre eux leur disait: «Ne vous dis-je point alors: Ne commettez point un si grand crime contre cet enfant? Et cependant vous ne m’avez point écouté. C’est son sang maintenant que Dieu nous redemande.» En s’entretenant ainsi, ils ne savaient pas que Joseph les entendait, parce qu’il leur parlait par un interprète. Mais il se retira pour un moment, et versa des larmes. Et étant revenu, il leur parla de nouveau. Il fit prendre Siméon et le fit lier devant eux; et il commanda à ses serviteurs d’emplir leur sac de blé et de remettre dans le sac de chacun d’eux l’argent qu’ils avaient donné, en y ajoutant encore des vivres pour se nourrir pendant le chemin: ce qui fut exécuté aussitôt. Les frères de Joseph s’en allèrent donc, emportant leur blé sur leurs ânes. Et l’un d’eux ayant ouvert son sac dans l’hôtellerie pour donner à manger à son âne, vit son argent à l’entrée du sac, et il dit à ses frères: «On m’a rendu mon argent; le voici dans mon sac.» Ils furent tous saisis d’étonnement et de trouble; et ils s’entre-disaient: «Qu’est-ce que Dieu nous a fait?» Lorsqu’ils furent arrivés chez Jacob leur père, au pays de Chanaan, ils lui racontèrent tout ce qui leur était arrivé, en disant: «Le seigneur de ce pays-là nous a parlé durement, et il nous a pris pour des espions, qui venaient observer le royaume. Nous lui avons répondu: Nous sommes gens paisibles et très-éloignés d’avoir aucun mauvais dessein. Nous étions douze frères, tous enfants d’un même père; l’un n’y est plus, et le plus jeune est avec notre père au pays de Chanaan. Il nous a répondu: Je veux éprouver s’il est vrai que vous n’ayez que des pensées de paix. Laissez-moi donc ici l’un de vos frères; prenez le blé qui vous est nécessaire pour vos maisons, et vous en allez; et amenez-moi le plus jeune de vos frères, afin que je sache que vous n’êtes point des espions; que vous puissiez ensuite ramener avec vous celui que je retiens prisonnier, et qu’il vous soit permis à l’avenir d’acheter ici ce que vous voudrez.» Après avoir ainsi parlé à leur père, comme ils jetaient leur blé hors de leurs sacs, ils trouvèrent chacun leur argent lié à l’entrée du sac, et ils en furent tous épouvantés. Alors Jacob, leur père, leur dit: «Vous me réduisez à être sans enfants; Joseph n’est plus, Siméon n’est plus, et vous voulez encore m’enlever Benjamin. Tous ces maux sont retombés sur moi.» Ruben lui répondit: «Faites mourir mes deux enfants, si je ne vous le ramène pas. Confiez-le-moi, et je vous le rendrai certainement.»—«Non, dit Jacob, mon fils n’ira point avec vous. Son frère est mort, et je n’ai plus que lui. S’il lui arrive quelque malheur au pays où vous allez, vous accablerez ma vieillesse d’une douleur qui m’emportera dans le tombeau.» Les enfants de Jacob retournent en Égypte avec Benjamin. Cependant la famine désolait extraordinairement tout le pays, et le blé que les enfants de Jacob avaient apporté d’Egypte étant consommé, Jacob leur dit: «Retournez en Egypte pour nous acheter encore un peu de blé.» Juda lui répondit: «Celui qui commande en ce pays-là nous a déclaré sa volonté avec serment, en disant: «Vous ne verrez point mon visage, à moins que vous n’ameniez avec vous le plus jeune de vos frères.» Si vous voulez donc l’envoyer avec nous, nous irons ensemble, et nous achèterons ce qui vous est nécessaire. Si vous ne voulez pas nous n’irons point: car cet homme, comme nous vous l’avons dit plusieurs fois, nous a déclaré que nous ne verrions point son visage, si nous n’avions avec nous notre jeune frère.» Israël leur dit: «C’est pour mon malheur que vous lui avez appris que vous aviez encore un autre frère.» Mais ils lui répondirent: «Il nous demanda par ordre toute la suite de notre famille: si notre père vivait; si nous avions encore un frère: et nous lui répondîmes conformément à ce qu’il nous avait demandé. Pouvions-nous deviner qu’il nous dirait: Amenez avec vous votre jeune frère?» Juda dit encore à son père: «Envoyez l’enfant avec moi, afin que nous puissions partir et avoir de quoi vivre, et que nous ne mourions pas, nous et nos petits enfants. Je me charge de cet enfant, et c’est à moi que vous en demanderez compte. Si je ne le ramène, et si je ne vous le rends pas, je consens que vous ne me pardonniez jamais cette faute. Si nous n’avions point tant différé, nous serions déjà revenus une seconde fois.» Israël leur père dit donc: «Si c’est une nécessité absolue, faites ce que vous voudrez. Prenez avec vous des meilleurs fruits de ce pays-ci, pour en faire présent à celui qui commande; un peu de résine, de miel, de storax, de myrrhe, de térébenthine et d’amandes. Portez aussi deux fois autant d’argent qu’au premier voyage, et reportez celui que vous avez trouvé dans vos sacs, de peur que ce ne soit une méprise. Enfin menez votre frère avec vous, et allez vers cet homme. Je prie mon Dieu, le Dieu tout-puissant, de vous le rendre favorable, afin qu’il renvoie avec vous votre frère qu’il tient prisonnier, et Benjamin que je vous confie. Quant à moi, si je dois être privé d’enfants, que j’en sois privé.» Ils prirent donc avec eux les présents, et le double de l’argent qu’ils avaient la première fois, avec Benjamin; et étant partis, ils arrivèrent en Égypte, où ils se présentèrent devant Joseph. Joseph les ayant vus, et Benjamin avec eux, dit à son intendant: «Faites entrer ces hommes chez moi; faites tuer quelque bête et faites-la préparer, parce qu’ils mangeront à midi avec moi.» L’intendant exécuta ce qui lui avait été commandé, et les fit entrer dans la maison. Alors étant saisis de crainte, ils s’entre-disaient: «C’est sans doute à cause de cet argent que nous avons remporté dans nos sacs, qu’il nous a fait entrer ici, pour faire retomber sur nous ce reproche, et nous opprimer en nous réduisant en servitude, et s’emparant de nos ânes.» C’est pourquoi étant encore à la porte, ils s’approchèrent de l’intendant de Joseph, ils lui dirent: «Seigneur, nous vous supplions de nous écouter. Nous sommes déjà venus une fois acheter du blé: et après l’avoir acheté, lorsque nous fûmes arrivés à l’hôtellerie, en ouvrant nos sacs, nous y trouvâmes notre argent, que nous vous rapportons maintenant au même poids. Et nous vous en rapportons encore d’autre, pour acheter ce qui nous est nécessaire: mais nous ne savons en aucune sorte qui a pu remettre cet argent dans nos sacs.» L’intendant leur répondit: «Ayez l’esprit en repos; ne craignez point. Votre Dieu, et le Dieu de votre père vous a donné des trésors dans vos sacs: car pour moi j’ai reçu l’argent que vous m’avez donné; et j’en suis content.» Il fit sortir aussi Siméon de la prison et le leur amena. Après les avoir fait entrer dans la maison, il leur apporta de l’eau, ils se lavèrent les pieds, et il donna à manger à leurs ânes. Cependant ils tinrent leurs présents tout prêts, attendant que Joseph entrât sur le midi, parce qu’on leur avait dit qu’ils devaient manger en ce lieu-là. Joseph étant donc entré dans sa maison, ils lui offrirent leurs présents qu’ils tenaient en leurs mains, et ils se prosternèrent devant lui la face contre terre. Il les salua aussi en leur faisant bon visage, et il leur demanda: «Votre père, ce bon vieillard dont vous m’aviez parlé, vit-il encore? se porte-t-il bien?» Ils lui répondirent: «Notre père votre serviteur est encore en vie, et il se porte bien.» Ils s’inclinèrent et se prosternèrent. Joseph levant les yeux, vit Benjamin son frère, fils de Rachel sa mère, et il leur dit: «Est-ce là le plus jeune de vos frères dont vous m’aviez parlé? Mon fils, ajouta-t-il, que Dieu te soit miséricordieux!» Et il se hâta de sortir, parce que ses entrailles avaient été émues en voyant son frère, et qu’il ne pouvait plus retenir ses larmes. Passant donc dans une autre chambre, il pleura. Et après s’être lavé le visage, il revint se faisant violence, et il dit à ses gens: «Servez à manger.» On servit Joseph à part, et ses frères à part, et les Égyptiens qui mangeaient avec lui furent aussi servis à part (car il n’est pas permis aux Égyptiens de manger avec les Hébreux; ils croient qu’un pareil festin serait profané). Ils s’assirent, donc en présence de Joseph, l’aîné le premier selon son rang et le plus jeune selon son âge. Et ils furent extrêmement surpris. On leur apporta des portions de sa part, et il se trouva que la part de Benjamin était cinq fois plus grande que les parts de tous les autres. Ils burent ainsi avec Joseph, et firent grande chère. Joseph fait mettre sa coupe dans le sac de Benjamin. Or Joseph donna cet ordre à l’intendant de sa maison, et lui dit: «Mettez dans le sac de ces gens autant de blé qu’ils pourront en contenir, et l’argent de chacun à l’entrée du sac; et mettez ma coupe d’argent à l’entrée du sac du plus jeune avec l’argent qu’il a donné pour le blé.» Cet ordre fut donc exécuté, et le lendemain dès le matin on les laissa aller avec leurs ânes chargés. Lorsqu’ils furent sortis de la ville, comme ils n’avaient fait encore que peu de chemin, Joseph appela l’intendant de sa maison, et lui dit: «Courez vite après ces gens, arrêtez-les, et leur dites: Pourquoi avez-vous rendu le mal pour le bien? La coupe que vous avez dérobée est celle dans laquelle mon seigneur boit, vous avez fait une très-méchante action.» L’intendant fit ce qui lui avait été commandé, et les ayant arrêtés, il leur dit tout ce qu’il lui avait été ordonné de leur dire. Ils lui répondirent: «Pourquoi notre seigneur parle-t-il ainsi à ses serviteurs, et les croit-il capables d’une action si honteuse? Nous vous avons rapporté du pays de Chanaan l’argent que nous trouvâmes à l’entrée de nos sacs. Comment donc se pourrait-il faire que nous eussions dérobé et enlevé de la maison de notre seigneur de l’or ou de l’argent? Que celui de vos serviteurs, quel qu’il puisse être, à qui l’on trouvera ce que vous cherchez, meure; et nous serons esclaves de mon seigneur.» Il leur dit: «Que ce que vous prononcez soit exécuté, ou plutôt que celui qui se trouvera avoir pris ce que je cherche, soit mon esclave; pour vous, vous en serez innocents.» Ils déchargèrent donc aussitôt leurs sacs à terre, et chacun ouvrit le sien; l’intendant les ayant fouillés en commençant depuis le plus grand jusqu’au plus petit, trouva la coupe dans le sac de Benjamin. Alors ils déchirèrent leurs vêtements, chacun rechargea son âne et ils retournèrent à la ville. Juda s’offre à demeurer esclave au lieu de Benjamin. Juda se présenta le premier avec ses frères devant Joseph qui n’était pas encore sorti du lieu où il était; et ils se prosternèrent tous ensemble à terre devant lui. Joseph leur dit: «Pourquoi avez-vous agi ainsi avec moi?» Juda lui dit: «Que répondrons-nous à mon seigneur? Que lui dirons-nous, et que pouvons-nous lui représenter avec quelque ombre de justice pour notre défense? Dieu a trouvé l’iniquité de vos serviteurs. Nous sommes tous les esclaves de mon seigneur, nous et celui sur qui on a trouvé la coupe.» Joseph répondit: «Dieu me garde d’agir de la sorte, que celui qui a pris ma coupe soit mon esclave; et pour vous autres, allez en liberté retrouver votre père.» Juda s’approchant alors plus près de Joseph, lui dit avec assurance: «Mon seigneur, permettez, je vous prie, à votre serviteur, de vous adresser la parole, et ne vous mettez pas en colère contre votre esclave, car après Pharaon, c’est vous qui êtes mon seigneur. Vous avez demandé d’abord à vos serviteurs: Avez-vous encore votre père ou quelque autre frère? Et nous avons répondu: Mon seigneur, nous avons un père qui est vieux, et un jeune frère qu’il a eu dans sa vieillesse, dont le frère, qui était né de la même mère, est mort; il ne reste plus que celui-là, et son père l’aime tendrement. Vous disiez alors à vos serviteurs: Amenez-le-moi, je serais bien aise de le voir. Mais nous vous répondîmes: Mon seigneur, cet enfant ne peut quitter son père; car s’il le quitte, il le fera mourir. Vous disiez à vos serviteurs: Si le dernier de vos frères ne vient avec vous, vous ne verrez plus mon visage. Lors donc que nous fûmes retournés vers notre père, nous lui rapportâmes tout ce que vous aviez dit; et notre père nous ayant dit quelque temps après: Retournez en Egypte pour nous acheter encore un peu de blé, nous lui répondîmes: Nous ne pouvons y aller seuls. Si notre jeune frère vient avec nous, nous irons ensemble: mais à moins qu’il ne vienne, nous n’osons nous présenter devant celui qui commande dans ce pays-là. Il nous répondit: Vous savez que j’ai eu deux fils de Rachel ma femme: l’un d’eux étant allé aux champs, vous m’avez dit qu’une bête l’avait dévoré, et il ne paraît point jusqu’à cette heure. Si vous emmenez encore celui-ci, et qu’il lui arrive quelque accident dans le chemin, vous accablerez ma vieillesse d’une affliction qui la conduira dans le tombeau. Si je me présente donc à mon père, et que l’enfant n’y soit pas, il mourra, et vos serviteurs accableront sa vieillesse d’une douleur qui le mènera au tombeau. Que ce soit donc plutôt moi qui sois votre esclave, puisque je me suis rendu caution de cet enfant, et que j’en ai répondu à mon père, en lui disant: Si je ne le ramène, je veux bien que mon père m’impute cette faute, et qu’il ne me la pardonne jamais. Ainsi je demeurerai votre esclave, et je servirai monseigneur en la place de l’enfant, afin qu’il retourne avec ses frères, car je ne puis pas retourner vers mon père sans que l’enfant soit avec nous, de peur que je ne sois moi-même témoin de l’extrême affliction qui accablera notre père.» Joseph se fait connaître à ses frères. Joseph ne pouvait plus se retenir; et parce qu’il était environné de plusieurs personnes, il commanda que l’on fît sortir tout le monde, afin que nul étranger ne fût présent lorsqu’il se ferait connaître à ses frères. Alors les larmes lui tombant des yeux, il éleva fortement la voix, qui fut entendue des Égyptiens et de toute la maison de Pharaon. Et il dit à ses frères: «Je suis Joseph. Mon père vit-il encore?» Mais ses frères ne purent lui répondre, tant ils étaient saisis de frayeur. Il leur parla donc avec douceur, et leur dit: «Approchez-vous de moi.» Et tous s’étant approchés de lui, il ajouta: «Je suis Joseph votre frère que vous avez vendu à des marchands qui m’ont amené en Égypte. Ne craignez point, et ne vous affligez point de ce que vous m’avez vendu pour être conduit en ce pays-ci: car Dieu m’a envoyé en Égypte avant vous pour votre salut. Il y a déjà deux ans que la famine a commencé sur la terre, il en reste encore cinq, pendant lesquels on ne pourra ni labourer ni recueillir. Dieu m’a fait venir ici avant vous pour vous conserver la vie, et afin que vous puissiez avoir des vivres pour subsister. Ce n’est point par votre conseil que j’ai été envoyé ici, mais par la volonté de Dieu, qui m’a rendu comme le père de Pharaon, le grand maître de sa maison, et le prince de toute l’Égypte. Hâtez-vous d’aller trouver mon père, et dites-lui: Voici ce que vous mande votre fils Joseph: Dieu m’a rendu comme le maître de toute l’Égypte: venez me trouver, ne différez point. Vous demeurerez dans la terre de Goschène, vous serez près de moi, avec tout ce que vous possédez. Et je vous nourrirai là, parce qu’il reste encore cinq années de famine; de peur qu’autrement vous ne périssiez avec toute votre famille et tout ce qui est à vous. Vous voyez de vos yeux, vous et mon frère Benjamin, que c’est moi-même qui vous parle de ma propre bouche. Annoncez à mon père quelle est la gloire dont je suis ici comblé, et tout ce que vous avez vu dans l’Égypte. Hâtez-vous de me l’amener.» Et s’étant jeté au cou de Benjamin son frère pour l’embrasser, il pleura; et Benjamin pleura aussi en le tenant embrassé. Joseph embrassa aussi tous ses frères, il pleura sur chacun d’eux; et après cela ils se rassurèrent pour lui parler. Aussitôt il se répandit un grand bruit dans toute la cour du roi, et on dit publiquement que les frères de Joseph étaient venus. Pharaon s’en réjouit avec toute sa maison. Et il dit à Joseph qu’il donnât cet ordre à ses frères: «Chargez vos ânes de blé, et retournez en Chanaan; amenez de là votre père et toute votre famille, et venez me trouver. Je vous donnerai tous les biens de l’Égypte, et vous serez nourris de tout ce qu’il y a de meilleur dans cette terre. Ordonnez-leur aussi d’emmener des chariots de l’Égypte, pour faire venir leurs femmes et leurs petits enfants, et dites-leur: «Amenez votre père, et hâtez-vous de revenir le plus tôt que vous pourrez, ne regrettez pas vos ustensiles, car toutes les richesses de l’Égypte seront à vous.» Les enfants d’Israël firent ce qui leur avait été ordonné. Et Joseph leur fit donner des chariots, selon l’ordre qu’il en avait reçu de Pharaon, et des vivres pour le chemin. Il commanda aussi que l’on donnât deux robes à chacun de ses frères; mais il donna cinq des plus belles à Benjamin, et trois cents pièces d’argent. Il envoya à son père ce qui suit: dix ânes chargés de ce qu’il y avait de mieux dans l’Égypte, et autant d’ânesses qui portaient du blé et du pain pour le chemin. Il renvoya donc ainsi ses frères, et leur dit en partant. «Ne vous mettez point en colère pendant le chemin.» Ils vinrent donc de l’Égypte au pays de Chanaan, vers Jacob leur père. Et ils lui dirent cette grande nouvelle: «Votre fils Joseph est vivant, et commande dans toute la terre de l’Égypte.» Ce que Jacob ayant entendu, il se réveilla comme d’un profond sommeil, et cependant il ne pouvait croire ce qu’ils lui disaient. Ses enfants insistaient au contraire, en lui rapportant comment toute la chose s’était passée. Enfin ayant vu les chariots, et tout ce que Joseph lui envoyait, il reprit ses esprits; et il dit: «Je n’ai plus rien à souhaiter, puisque mon fils Joseph vit encore: j’irai, et je le verrai avant que je meure.» Jacob va en Égypte et s’y établit. Israël partit donc avec tout ce qu’il avait, et vint à Beer-Scheba; et ayant immolé en ce lieu des victimes au Dieu de son père Isaac, il l’entendit dans une vision pendant la nuit, qui l’appelait et lui disait: «Jacob, Jacob.» Il répondit: «Me voici.» Et Dieu ajouta: «Je suis le Très-Fort, le Dieu de votre père, ne craignez point, allez en Égypte, car je vous y ferai devenir un grand peuple, j’irai là avec vous, et je vous en ramènerai. Joseph aussi vous fermera les yeux de ses mains.» Jacob étant donc parti de Beer-Scheba, ses enfants l’amenèrent avec ses petits-enfants et leurs femmes, dans les chariots que Pharaon avait envoyés pour faire venir ce bon vieillard, avec tout ce qu’il possédait au pays de Chanaan; et il arriva en Égypte avec toute sa race, ses enfants et petits-enfants; toutes les personnes de la maison de Jacob étaient au nombre de septante. Or Jacob envoya Juda devant lui vers Joseph pour l’avertir de sa venue, afin qu’il vînt au-devant de lui en la terre de Goschène. Quand Jacob y fut arrivé, Joseph fit mettre les chevaux à son chariot, et vint au même lieu au-devant de son père: en le voyant, il se jeta à son cou, et l’embrassa en pleurant. Jacob dit à Joseph: «Je mourrai maintenant avec joie, puisque j’ai vu ton visage, et que tu vis encore. Joseph dit à ses frères et à toute la maison de son père: «Je vais dire à Pharaon que mes frères et tous ceux de la maison de mon père sont venus me trouver de la terre de Chanaan où ils demeuraient: que ce sont des pasteurs de brebis, qui s’occupent à nourrir des troupeaux, et qu’ils ont amené avec eux leurs brebis, leurs bœufs, et tout ce qu’ils pouvaient avoir. Et lorsque Pharaon vous fera venir, et vous demandera: Quelle est votre occupation? Vous lui répondrez: Vos serviteurs sont pasteurs depuis leur enfance jusqu’à présent, et nos pères l’ont toujours été comme nous, vous direz ceci pour pouvoir demeurer dans la terre de Goschène, parce que les Égyptiens ont en abomination tous les pasteurs de brebis.» Joseph étant donc allé trouver Pharaon lui dit: «Mon père et mes frères sont venus du pays de Chanaan avec leurs brebis, leurs troupeaux et tout ce qu’ils possèdent, et ils se sont arrêtés en la terre de Goschène.» Il présenta aussi au roi cinq de ses frères. Et le roi leur ayant demandé: «A quoi vous occupez-vous?» Ils lui répondirent: «Vos serviteurs sont pasteurs de brebis, comme l’ont été nos pères. Nous sommes venus passer quelque temps dans vos terres, parce que la famine est si grande dans le pays de Chanaan, qu’il n’y a plus d’herbe pour les troupeaux de vos serviteurs. Et nous vous supplions d’agréer que vos serviteurs demeurent dans la terre de Goschène.» Le roi dit donc à Joseph: «Votre père et vos frères sont venus vous trouver. Vous pouvez choisir dans toute l’Égypte; faites-les demeurer dans l’endroit du pays qui vous paraîtra le meilleur, et donnez-leur la terre de Goschène. Si vous connaissez qu’il y ait parmi eux des hommes habiles, donnez-leur l’intendance sur mes troupeaux.» Joseph introduisit ensuite son père devant le roi, et il le lui présenta. Jacob salua Pharaon, et lui souhaita toute sorte de prospérités. Le roi lui ayant demandé quel âge il avait, il lui répondit: «Les jours des années de mes pèlerinages sont au nombre de cent trente; les jours des années de ma vie ont été peu nombreux et mauvais, et n’ont point atteint les jours des années de la vie de mes pères, du temps de leurs pèlerinages.» Et après avoir souhaité toute sorte de bonheur au roi, il se retira. Joseph, selon le commandement de Pharaon, mit son père et ses frères en possession de Ramassès dans le pays le plus fertile de l’Égypte. Et il les nourrissait avec toute la maison de son père, donnant à chacun ce qui lui était nécessaire pour vivre. Le pieux désir de Jacob. Israël demeura donc en Égypte, c’est-à-dire dans la terre de Goschène, dont il jouit comme de son bien propre, et où sa famille s’accrut et se multiplia extraordinairement. Il y vécut dix-sept ans; et tout le temps de sa vie fut de cent quarante-sept ans. Comme il vit que le jour de sa mort approchait, il appela son fils Joseph, et lui dit: «Si j’ai trouvé grâce devant toi, mets ta main sous ma cuisse, et donne-moi cette marque de la bonté que tu as pour moi, de me promettre avec vérité que tu ne m’enterreras point dans l’Égypte; mais que je reposerai avec mes pères; que tu me transporteras hors de ce pays, et me mettras dans le sépulcre de mes ancêtres.» Joseph lui répondit: «Je ferai ce que vous me commandez.»—«Jure-le-moi donc,» dit Jacob. Et pendant que Joseph jurait, Israël adora Dieu, se tournant vers le chevet de son lit. Jacob adopte les deux fils de Joseph. Un jour on vint dire à Joseph que son père était malade: alors prenant avec lui ses deux fils Manassé et Ephraïm, il alla le voir. On dit à Jacob: «Voici votre fils Joseph qui vient vous rendre visite.» Jacob reprenant ses forces, se mit sur son séant, et il dit à Joseph lorsqu’il fut entré: «Le Dieu tout-puissant m’a apparu à Luze qui est au pays de Chanaan et m’ayant béni, il m’a dit: Je ferai croître et multiplier votre race: je vous rendrai le chef d’une multitude de peuples, et vous donnerai cette terre, et à votre race après vous, afin que vous la possédiez pour jamais. C’est pourquoi tes deux fils Ephraïm et Manassé que tu as eus en Egypte avant que je vinsse ici avec toi, seront à moi; et ils seront mis au nombre de mes enfants, comme Ruben et Siméon⁶. Mais les autres que tu auras après eux, seront à toi, et ils porteront le nom de leurs frères dans les terres qu’ils posséderont.» Alors Jacob voyant les fils de Joseph, lui demanda: «Qui sont ceux-ci?» Joseph lui répondit: «Ce sont mes enfants, que Dieu m’a donnés en ce pays.» Approchez-les de moi, dit Jacob, afin que je les bénisse.» Car les yeux d’Israël s’étaient obscurcis à cause de sa grande vieillesse, et il ne pouvait bien voir. Les ayant donc fait approcher de lui, il les embrassa; et il dit à son fils: «Dieu a voulu me donner la joie de te voir, et il y ajoute encore celle de voir tes enfants.» Joseph les ayant retirés d’entre les genoux de son père, se prosterna devant lui à terre. Et ayant mis Ephraïm à sa droite, c’est-à-dire, à la gauche d’Israël, et Manassé à sa gauche, c’est-à-dire, à la droite de son père, il les approcha tous deux de Jacob: celui-ci étendant la main droite, la mit sur la tête d’Ephraïm qui était le plus jeune, et sa main gauche sur la tête de Manassé qui était l’aîné, changeant ainsi ses deux mains de place. Et bénissant les enfants de Joseph, il dit: «Que le Dieu, en présence de qui ont marché mes pères Abraham et Isaac, le Dieu qui m’a nourri depuis ma jeunesse jusqu’à ce jour; que l’ange qui m’a délivré de tous maux, bénisse ces enfants: qu’ils portent mon nom, et les noms de mes pères Abraham et Isaac, et qu’ils se multiplient de plus en plus sur la terre.» Mais Joseph voyant que son père avait mis sa main droite sur la tête d’Ephraïm, en eut de la peine; et prenant la main de son père, il tâcha de la lever de dessus la tête d’Ephraïm, pour la mettre sur la tête de Manassé, en disant à son père: «Vos mains ne sont pas bien, mon père; car celui-ci est l’aîné: mettez votre main droite sur sa tête.» Mais refusant de le faire, il lui dit: «Je le sais bien, mon fils, je le sais bien: celui-ci sera aussi chef de peuples; et sa race se multipliera; mais son frère qui est le plus jeune sera plus grand que lui, et sa postérité se multipliera dans les nations.» Jacob les bénit donc alors, et dit: «Israël sera béni en vous, et on dira: Que Dieu vous bénisse comme Ephraïm et Manassé.» Ainsi il mit Ephraïm devant Manassé. Il dit ensuite à Joseph son fils: «Vous voyez que je vais mourir: Dieu sera avec vous, et il vous ramènera au pays de vos pères. Je vous donne de plus qu’à vos frères cette part de mon bien que j’ai gagnée sur les Amorrhéens avec mon épée et mon arc.» ⁶ C’est de cette manière qu’Éphraim et Manassé prennent la place de Joseph leur père dont, par conséquent, le nom ne se trouve mentionné nulle part dans l’exposé des tribus. Il y avait donc, en réalité, treize tribus; mais on n’en comptait cependant que douze, parce que celle de Lévi (l’administrateur du culte) n’avait pas d’héritage formé d’un seul tout. Les descendants de Lévi avaient leurs habitations dans les principales villes du royaume, pour qu’il se trouvât partout des hommes en état de surveiller le culte du vrai et unique Dieu; des hommes aptes à donner l’instruction religieuse et l’enseignement dans la loi de Moïse. Mort de Jacob et de Joseph. Or Jacob appela ses enfants, et leur dit: «Assemblez-vous tous, afin que je vous annonce ce qui doit vous arriver dans les derniers temps.» Il leur parla de cette sorte, et il bénit chacun d’eux en leur donnant les bénédictions qui leur étaient propres. Enfin il leur fit ce commandement, et leur dit: «Je vais être réuni à mon peuple; ensevelissez-moi avec mes pères dans la caverne double, qui est dans le champ d’Ephron Héthéen, qui regarde Mamré au pays de Chanaan, et qu’Abraham acheta avec tout le champ où elle est, pour y avoir son sépulcre. C’est là qu’il a été enseveli avec Sara sa femme. C’est aussi là qu’Isaac a été enseveli avec Rebecca sa femme, et que Léa est encore ensevelie.» Après avoir achevé de donner ses ordres et ses instructions à ses enfants, il joignit ses pieds sur son lit et mourut; et il fut réuni avec son peuple. Joseph voyant son père expiré, se jeta sur son visage, et le baisa en pleurant. Il commanda aux médecins qu’il avait à son service d’embaumer le corps de son père. Et ils exécutèrent l’ordre qu’il leur avait donné; ce qui dura quarante jours, parce que c’était la coutume d’employer ce temps pour embaumer les corps morts. Et l’Égypte pleura Jacob soixante et dix jours. Le temps du deuil étant passé, Joseph dit aux principaux officiers de Pharaon: «Si j’ai trouvé grâce devant vous, je vous prie de représenter au roi, que mon père m’a dit en mourant: Tu vois que je meurs: promets-moi avec serment que tu m’enseveliras dans le sépulcre que je me suis préparé au pays de Chanaan. J’irai donc avec l’agrément du roi ensevelir mon père, et je reviendrai aussitôt.» Pharaon lui dit: «Allez et ensevelissez votre père selon qu’il vous y a engagé par serment. Et lorsque Joseph partit, les premiers officiers de la maison de Pharaon, et les plus grands de l’Égypte l’accompagnèrent tous, avec la maison de Joseph, et tous ses frères qui le suivirent, laissant au pays de Goschène leurs petits enfants et tous leurs troupeaux. Il y eut aussi des chariots et des cavaliers qui le suivirent; et il se trouva là une grande multitude. Les enfants de Jacob accomplirent donc ce qu’il leur avait commandé; et l’ayant porté au pays de Chanaan, ils l’ensevelirent dans la caverne double qu’Abraham avait achetée d’Ephron Héthéen, pour en faire le lieu de son sépulcre. Aussitôt que Joseph eut enseveli son père, il retourna en Égypte avec ses frères et toute sa suite. Après la mort de Jacob, les frères de Joseph eurent peur, et ils s’entre-dirent: Joseph pourrait bien présentement se souvenir de l’injure qu’il a soufferte, et nous rendre tout le mal que nous lui avons fait. Ils lui envoyèrent donc dire: Ton père avant de mourir nous a commandé de te dire de sa part: Je te conjure d’oublier le crime de tes frères, et cette noire perfidie dont ils ont usé envers toi. Nous te conjurons aussi de pardonner cette iniquité aux serviteurs du Dieu de ton père. Joseph pleura, en entendant ces paroles. Et ses frères étant venus le trouver se prosternèrent devant lui et lui dirent: Nous sommes tes serviteurs. Il leur répondit: Ne craignez point; pouvons-nous résister à la volonté de Dieu? Il est vrai que vous avez eu dessein de me faire du mal: mais Dieu a changé ce mal en bien, afin de m’élever comme vous voyez maintenant, et de sauver plusieurs peuples. Ne craignez donc point: je vous nourrirai vous et vos enfants. Et il les consola en leur parlant avec beaucoup de douceur et de tendresse. Il demeura en Égypte avec toute la maison de son père, et il vécut cent dix ans. Il vit les enfants d’Ephraïm jusqu’à la troisième génération. Joseph dit ensuite à ses frères: Dieu se souviendra de vous après ma mort, et il vous fera passer de cette terre à celle qu’il a juré de donner à Abraham, à Isaac et à Jacob. Il ajouta: Transportez mes os avec vous hors de ce lieu, et promettez-le-moi avec serment. Il mourut ensuite âgé de cent dix ans accomplis; et son corps ayant été embaumé, fut mis dans un cercueil en Égypte. CHAPITRE III. DEPUIS MOÏSE JUSQU’A L’OCCUPATION DE CHANAAN. (2368-2489) Israël en esclavage. Après la mort de Joseph et celle de tous ses frères, et de toute cette première génération, les enfants d’Israël s’accrurent et se multiplièrent extraordinairement; et étant devenus extrêmement nombreux, ils remplirent le pays où ils étaient. Cependant il s’éleva dans l’Égypte un roi nouveau, à qui Joseph était inconnu; et il dit à son peuple: Vous voyez que le peuple des enfants d’Israël est devenu très-nombreux, et il est plus fort que nous. Opprimons-le donc prudemment, de peur qu’il ne se multiplie encore davantage; et que si nous nous trouvions surpris par quelque guerre, il ne se joigne à nos ennemis, et qu’après nous avoir vaincus, il ne sorte de l’Égypte. Il établit donc des intendants des travaux, afin qu’ils accablassent les Hébreux d’ouvrages insupportables. Et ils bâtirent à Pharaon, pour servir de magasins, des villes telles que Phitom et Ramessès. Mais plus on les opprimait, plus leur nombre se multipliait et croissait visiblement. Les Égyptiens haïssaient les enfants d’Israël, ils les affligeaient, les insultaient, et leur rendaient la vie pénible, en les employant à de lourds travaux de mortier et de brique, et à toutes sortes d’ouvrages de terre dont ils étaient accablés. Le roi d’Égypte parla aussi aux sages-femmes qui accouchaient les femmes des Hébreux, l’une d’elles se nommait Sephora et une autre Phua, et il leur fit ce commandement: Quand vous accoucherez les femmes des Hébreux, au moment que l’enfant naîtra, si c’est un enfant mâle, tuez-le; si c’est une fille, laissez-la vivre. Mais les sages-femmes furent touchées de la crainte de Dieu, et ne firent point ce que le roi d’Égypte leur avait commandé; elles conservèrent les enfants mâles. Dieu récompensa ces sages-femmes; et le peuple s’accrut et se fortifia extraordinairement. Alors Pharaon fit ce commandement à tout son peuple: Jetez dans le fleuve tous les enfants mâles qui naîtront, et ne réservez que les filles. ———— Naissance de Moïse. Quelque temps après, un homme de la maison de Lévi ayant épousé une femme de sa tribu, sa femme enfanta un fils; et voyant qu’il était beau, elle le cacha pendant trois mois. Mais comme elle vit qu’elle ne pouvait plus tenir la chose secrète, elle prit un panier de jonc; et l’ayant enduit de bitume et de poix, elle mit dedans le petit enfant, l’exposa parmi les roseaux sur le bord du fleuve, et fit tenir la sœur de l’enfant loin de là, pour voir ce qui en arriverait. En ce même temps la fille de Pharaon vint au fleuve pour se baigner, accompagnée de ses filles, qui marchaient le long du bord de l’eau. Et ayant aperçu ce panier parmi les roseaux, elle envoya une de ses filles qui le lui apporta. Elle l’ouvrit; et trouvant dedans ce petit enfant qui criait, elle fut touchée de compassion, et elle dit: C’est un des enfants des Hébreux. La sœur de l’enfant s’étant approchée, lui dit: Vous plaît-il que j’aille querir une femme des Hébreux qui puisse nourrir ce petit enfant? Elle lui répondit: Allez. La fille s’en alla donc, et fit venir sa mère. La fille de Pharaon lui dit: Prenez cet enfant et me le nourrissez, et je vous en récompenserai. La mère prit l’enfant et le nourrit; et lorsqu’il fut assez fort, elle le donna à la fille de Pharaon, qui l’adopta pour son fils, et le nomma Moïse (Mosché), c’est-à-dire, tiré de l’eau, parce que, disait-elle, je l’ai tiré de l’eau. ———— La fuite de Moïse. Lorsque Moïse fut devenu grand, il sortait pour aller voir ses frères, et voyait l’affliction où ils étaient. Un jour, trouvant que l’un d’eux était outragé par un Egyptien, il regarda de tous côtés, et ne voyant personne près de lui, il tua l’Egyptien, et le cacha dans le sable. Le lendemain il trouva deux Hébreux qui se querellaient, et il dit à celui qui outrageait l’autre: Pourquoi frappez-vous votre frère? Cet homme lui répondit: Qui vous a établi sur nous pour prince et pour juge? Est-ce que vous voulez me tuer comme vous tuâtes hier un Egyptien? Moïse eut peur, et il dit: Comment cela s’est-il découvert? Pharaon, en ayant été averti, cherchait à faire mourir Moïse. Mais il s’enfuit de devant lui, et se retira au pays de Midian, où il s’assit près d’un puits. Or le prêtre de Midian, nommé Jéthro, avait sept filles, qui étant venues pour puiser de l’eau, et en ayant rempli les canaux, voulaient faire boire les troupeaux de leur père. Mais les pasteurs étant survenus, les chassèrent. Alors Moïse se levant, et prenant la défense de ces filles, fit boire leurs brebis. Lorsqu’elles furent retournées chez leur père, il leur dit: Pourquoi êtes-vous revenues plus tôt qu’à l’ordinaire? Elles lui répondirent: Un Egyptien nous a délivrées de la violence des pasteurs; et il a même tiré de l’eau avec nous, et a donné à boire à nos brebis. Où est-il? dit leur père: pourquoi avez-vous laissé aller cet homme? Appelez-le, afin que nous le fassions manger. Moïse résolut alors de demeurer avec lui. Il épousa ensuite sa fille, qui s’appelait Sephora. Et elle lui enfanta un fils qu’il nomma Gerscham, car, disait-il: J’ai été étranger dans une terre étrangère. Sephora lui enfanta un second fils qu’il nomma Eliezer, c’est-à-dire, Dieu est mon secours. Cependant les enfants d’Israël gémissant sous le poids des ouvrages qui les accablaient, crièrent vers le ciel, et les cris que tirait d’eux l’excès de leurs travaux, s’élevèrent jusqu’à Dieu. Il entendit leurs gémissements, il se souvint de l’alliance qu’il avait faite avec Abraham, Isaac et Jacob, et il les reçut en grâce. ———— Moïse est appelé de Dieu pour délivrer les Israélites. Cependant Moïse conduisait les brebis de Jéthro son beau-père, et ayant mené son troupeau au fond du désert, il vint à la montagne de Dieu, nommée Horeb. Alors un ange de l’Eternel lui apparut dans une flamme de feu qui sortait du milieu d’un buisson; et il voyait brûler le buisson sans qu’il se consumât. Moïse dit donc: Il faut que j’aille reconnaître quelle est cette merveille que je vois, et pourquoi ce buisson ne se consume point. Mais l’Eternel le voyant venir pour considérer ce qu’il voyait, l’appela du milieu du buisson, et lui dit: Moïse, Moïse. Il lui répondit: Me voici: Et l’Eternel ajouta: N’approchez pas d’ici: ôtez les souliers de vos pieds, parce que le lieu où vous êtes, est une terre sainte. Il dit encore: Je suis le Dieu de votre père, le Dieu d’Abraham, le Dieu d’Isaac et le Dieu de Jacob. Moïse se cacha le visage, parce qu’il n’osait regarder la face de Dieu. L’Eternel lui dit: J’ai vu l’affliction de mon peuple qui est en Egypte, j’ai entendu le cri qu’il jette à cause de la dureté de ceux qui ont l’intendance des travaux. Et sachant quelle est sa douleur, je suis venu pour le délivrer des mains des Egyptiens, et pour les faire passer de cette terre en une terre bonne et spacieuse, en une terre où coulent des ruisseaux de lait et de miel, au pays des Chananéens, des Amorrhéens, des Phérézéens, des Gergésiens, des Héthéens, des Hévéens et des Jébuséens. Le cri des enfants d’Israël est donc venu jusqu’à moi; j’ai vu leur affliction et de quelle manière ils sont opprimés par les Egyptiens. Mais venez, et je vous enverrai vers Pharaon, afin que vous fassiez sortir de l’Egypte les enfants d’Israël, qui sont mon peuple... Moïse obéit au commandement de l’Eternel. Mais ce n’étaient que l’obéissance et l’humilité dues à une volonté suprême, qui pussent l’engager à se charger de cette haute et sainte mission. Il fit alors ses adieux chez Jéthro, son beau-père, quitta le pays de Midian et se dirigea vers l’Egypte. Il rencontra dans le désert Aaron, son frère. Il lui fit part de sa mission; et, étant venus en Egypte, ils firent rassembler tous les anciens d’entre les enfants d’Israël. Aaron rapporta tout ce que l’Eternel avait dit à Moïse, il fit des miracles devant le peuple, le peuple le crut et comprit que l’Eternel regardait leur affliction, et se prosternant en terre, ils l’adorèrent. ———— Moïse et Aaron déclarent à Pharaon les ordres de Dieu. Moïse et Aaron allèrent ensuite trouver Pharaon et lui parlèrent en ces termes: Voici ce que dit l’Eternel, le Dieu d’Israël: Laissez aller mon peuple, afin qu’il me sacrifie dans le désert. Mais Pharaon répondit: Qui est l’Eternel, pour que je sois obligé d’écouter sa voix et de laisser sortir Israël? Je ne connais point l’Eternel, et je ne laisserai point sortir Israël. Moïse, pour faire voir que c’était au nom de l’Eternel qu’il parlait, fit alors plusieurs miracles en présence de Pharaon. Il jeta sa verge par terre, et elle fut changée en serpent. Mais le roi n’en tint pas grand compte, et tourmentait le peuple encore plus qu’auparavant. Moïse élevant sa verge, frappa l’eau du fleuve devant Pharaon et ses serviteurs, et l’eau fut changée en sang. Les poissons qui étaient dans le fleuve moururent, le fleuve se corrompit, et les Egyptiens ne pouvaient boire de ses eaux. Cependant le roi se retira et ne se laissa point fléchir le cœur pour cette fois. Toutes sortes de plaies couvrirent alors, par une punition du ciel, la terre d’Egypte, il y avait des grenouilles, des moucherons et des mouches partout, à la campagne, dans les maisons, et même le palais du roi en était rempli. Une peste terrible dévasta le pays; des ulcères et des tumeurs se formèrent sur les hommes et sur les animaux par toute l’Egypte. Un orage épouvantable, mêlé de grêle et de feu, éclata sur l’Egypte; la grêle frappa de mort tout ce qui se trouvait dans les champs, depuis les hommes jusqu’aux bêtes, elle fit mourir toute l’herbe de la campagne, et rompit tous les arbres. C’est ainsi que des plaies de différentes sortes se succédèrent jusqu’au nombre de neuf et devinrent toujours plus grandes et plus terribles. Toutefois le cœur de Pharaon s’endurcit, il n’écouta point Moïse et Aaron, et quoiqu’il promît, à diverses reprises dans les moments de détresse, d’accorder la liberté au peuple israélite, il ne tenait jamais parole, lorsque la plaie avait cessé. C’est alors que Moïse et Aaron se présentèrent pour la dernière fois devant Pharaon et le menacèrent d’une dixième plaie en disant: Voici ce que dit l’Eternel: Sur le minuit tous les premiers-nés mourront dans les terres des Egyptiens. Mais parmi tous les enfants d’Israël, depuis les hommes jusqu’aux bêtes, on n’entendra pas seulement le cri d’un chien. Alors tous vos serviteurs viendront à moi, et ils se prosterneront devant moi en disant: Sortez, vous et tout le peuple qui vous est soumis. Et après cela nous sortirons. Moïse et Aaron se retirèrent de devant Pharaon dont le cœur s’endurcit néanmoins, et ne permit point aux Israélites de sortir de ses terres. ———— Préceptes touchant la fête de la Pâque. L’Eternel dit alors à Moïse et à Aaron: Ce mois-ci sera pour vous le premier des mois: ce sera le premier des mois de l’année. Parlez à toute l’assemblée des enfants d’Israël, et dites-leur: Qu’au dixième jour de ce mois chacun prenne un agneau pour sa famille et pour sa maison. Vous le garderez jusqu’au quatorzième jour de ce mois; et voici comment vous le mangerez; vous vous ceindrez les reins, vous aurez des souliers aux pieds, et un bâton à la main, et vous mangerez à la hâte: car c’est la Pâque (c’est-à-dire, le passage) de l’Eternel. Je passerai cette nuit-là par l’Egypte; je frapperai dans les terres des Egyptiens tous les premiers-nés depuis l’homme jusqu’aux bêtes, moi qui suis l’Eternel. Je passerai alors au delà de vos maisons, et la plaie de mort ne vous touchera point lorsque j’en frapperai toute l’Egypte. Ce jour vous sera un monument éternel; et vous le célébrerez dans vos générations futures par une fête à l’Eternel. Vous mangerez des pains sans levain pendant sept jours. Dès le premier jour il ne se trouvera point de levain dans vos maisons. Quiconque mangera du pain avec du levain depuis le premier jour jusqu’au septième, sera retranché d’Israël. Le premier jour sera saint et solennel, et le septième une fête également vénérable. Vous ne ferez aucune œuvre servile durant ces deux jours, excepté ce qui regarde le manger. Vous garderez donc cette fête du pain sans levain; car en ce même jour je ferai sortir toute votre armée de l’Egypte, et vous observerez ce jour à l’avenir comme _statut perpétuel_. Depuis le quatorzième jour du premier mois, sur le soir, vous mangerez du pain sans levain jusqu’au soir du vingt et unième jour de ce mois. ———— Sortie de l’Égypte. Vers le milieu de la nuit, l’Éternel frappa tous les premiers-nés de l’Egypte, depuis le premier-né de Pharaon qui était assis sur son trône, jusqu’au premier-né de la femme esclave qui était en prison, et jusqu’au premier-né de toutes les bêtes. Pharaon s’étant donc levé la nuit, aussi bien que tous ses serviteurs et tous les Egyptiens, un grand cri se fit entendre dans toute l’Egypte, parce qu’il n’y avait aucune maison où il n’y eût un mort. Et Pharaon ayant fait venir cette même nuit Moïse et Aaron, il leur dit: Retirez-vous promptement d’avec mon peuple, vous et les enfants d’Israël; allez adorer l’Eternel, comme vous le dites. Menez avec vous vos brebis et vos troupeaux, selon que vous l’avez demandé, et en vous en allant priez pour moi. Les Egyptiens pressaient aussi le peuple de sortir promptement de leur pays, en disant: Nous mourrons tous. Le peuple prit donc la farine qu’il avait pétrie avant qu’elle fût levée; et la liant en des manteaux, la mit sur ses épaules. (Moïse emporta aussi avec lui les os de Joseph, selon que Joseph l’avait fait promettre avec serment aux enfants d’Israël, en leur disant: Dieu se souviendra de vous, alors vous emporterez d’ici mes os avec vous.) Les enfants d’Israël partirent donc de Ramessès et vinrent à Sucoth, au nombre de près de six cent mille hommes de pied, sans les enfants. Ils furent suivis d’une multitude innombrable de petit peuple, et ils avaient avec eux une infinité de brebis, de troupeaux, et de bêtes de toutes sortes. Ils firent cuire la pâte qu’ils avaient emportée d’Egypte, en gâteaux non levés, car ils ne l’avaient point fait lever, parce que, chassés par les Egyptiens, ils n’avaient pu se retarder, ni faire de provisions. Le séjour que les enfants d’Israël avaient fait en Egypte était de quatre cent trente ans. La nuit dans laquelle l’Eternel les tira de l’Egypte, fut consacrée en l’honneur de l’Eternel, et tous les enfants d’Israël doivent l’observer et l’honorer dans la suite de tous les âges. ———— Passage de la mer Rouge. L’Eternel parla à Moïse, et lui dit: Dites aux enfants d’Israël, qu’ils se détournent, et qu’ils campent devant Phihahiroth, qui est entre Migdal et la mer, vis-à-vis de Baalsephon. Vous camperez vis-à-vis de ce lieu sur le bord de la mer. Car Pharaon va dire des enfants d’Israël: Ils sont embarrassés en des lieux étroits, et renfermés par le désert. Je lui endurcirai le cœur, et il vous poursuivra: je serai glorifié dans Pharaon et dans toute son armée, et les Egyptiens sauront que je suis l’Eternel. Les enfants d’Israël firent donc ce que l’Eternel avait ordonné. Et l’on vint dire au roi des Egyptiens, que le peuple avait pris la fuite. En même temps le cœur de Pharaon et de ses serviteurs fut changé à l’égard de ce peuple, et ils dirent: A quoi avons-nous pensé, de laisser ainsi aller les Israélites, pour qu’ils ne nous fussent plus assujettis? Il fit donc préparer son chariot de guerre, et prit avec lui tout son peuple. Il emmena aussi six cents chariots choisis, et tout ce qui se trouva de chariots de guerre dans l’Egypte, avec les chefs de toute l’armée. L’Eternel endurcit le cœur de Pharaon, roi d’Egypte, et il se mit à poursuivre les enfants d’Israël; mais ils étaient sortis sous la conduite d’une main puissante. Les Egyptiens poursuivant donc les Israélites qui étaient devant, et marchant sur leurs traces, les trouvèrent dans leur camp sur le bord de la mer. Toute la cavalerie et les chariots de Pharaon, avec toute son armée, étaient à Phihahiroth, vis-à-vis de Baalsephon. Lorsque Pharaon était déjà proche, les enfants d’Israël levant les yeux, et ayant aperçu les Egyptiens derrière eux, furent saisis d’une grande crainte. Ils crièrent à l’Eternel, et ils dirent à Moïse: Est-ce parce qu’il n’y a pas de sépulcres en Egypte que vous nous avez pris pour mourir dans le désert? Que nous avez-vous fait en nous faisant sortir de l’Egypte? N’est-ce pas ce que nous vous avons dit en Egypte: Laissez-nous, nous voulons servir l’Egypte; car il vaut mieux pour nous servir l’Egypte que de mourir dans le désert. Moïse dit au peuple: Ne craignez rien, restez tranquilles, et voyez le secours que l’Eternel vous donnera aujourd’hui; car tels que vous avez vu les Egyptiens aujourd’hui, vous ne les verrez plus jamais. L’Eternel combattra pour vous, et vous, taisez-vous! Et Moïse implora Dieu, le pria de l’assister dans cette détresse. L’Eternel lui dit: Pourquoi criez-vous vers moi? parlez aux enfants d’Israël; qu’ils marchent. Et vous, élevez votre verge, et étendez votre main sur la mer, fendez-la, et que les enfants d’Israël marchent à sec au milieu de la mer. Les Egyptiens vous poursuivront, et je serai glorifié dans Pharaon et dans toute son armée, dans ses chariots et dans sa cavalerie. Toute la nuit se passa sans que les deux armées s’approchassent. Moïse étendit sa main sur la mer; l’Eternel poussa la mer toute la nuit par un violent vent de l’orient, et il mit la mer à sec; ainsi les eaux furent séparées. Les enfants d’Israël marchèrent à sec au milieu de la mer, ayant l’eau à droite et à gauche, qui leur servait comme de mur. Et les Egyptiens marchant après eux, se mirent à les poursuivre au milieu de la mer avec toute la cavalerie de Pharaon, ses chariots et ses chevaux. Mais lorsque la _veille du matin_ fut venue, l’Eternel jeta un regard sur le camp des Egyptiens à travers une colonne de feu et de nuées et mit en désordre le camp des Egyptiens; il renversa les roues des chariots, et ils furent entraînés dans le fond de la mer. Alors les Egyptiens s’entre-dirent: Fuyons les Israélites, parce que l’Eternel combat pour eux contre nous. En même temps l’Eternel dit à Moïse: Etendez votre main sur la mer, afin que les eaux retournent sur les Egyptiens, sur leurs chariots et sur leur cavalerie. Moïse étendit donc la main sur la mer; et aussitôt la mer reprit la place qu’elle avait auparavant. Ainsi lorsque les Egyptiens s’enfuyaient, les eaux vinrent au-devant d’eux, les couvrirent, et il n’en échappa pas un seul. Mais les enfants d’Israël passèrent à sec au milieu de la mer, ayant les eaux à droite et à gauche, qui leur tenaient lieu de mur. En ce jour-là l’Eternel délivra Israël de la main des Egyptiens. Et ils virent les corps morts des Egyptiens sur le bord de la mer, et les effets de la main puissante qui s’était appesantie sur eux. Alors le peuple craignit l’Eternel, il crut à l’Eternel, et à Moïse son serviteur. Moïse alors et les enfants d’Israël chantèrent un cantique à l’Eternel. Miriame (Marie) la prophétesse, sœur de Moïse et d’Aaron prit en main le tambour, et toutes les femmes la suivirent avec des tambourins en formant des danses et des chœurs de musique; elles mêlaient leur voix au chant de victoire: «Chantez des hymnes à l’Eternel, parce qu’il a signalé sa grandeur et sa gloire!» ———— Voyage vers le mont Sinaï. Murmures des Israélites. La manne. Après donc que Moïse eût fait sortir les Israélites de la mer Rouge, ils entrèrent dans le désert de Sur; et ayant marché trois jours dans la solitude, ils ne trouvaient point d’eau. Ils arrivèrent à Mara, et ils ne pouvaient boire des eaux de Mara, parce qu’elles étaient amères. C’est pourquoi on lui donna un nom qui lui était propre, en l’appelant Mara, c’est-à-dire, amertume. Alors le peuple murmura contre Moïse, en disant: Que boirons-nous? Mais Moïse pria Dieu, qui lui montra un certain bois qu’il jeta dans les eaux; et les eaux, d’amères qu’elles étaient, devinrent douces. Dieu leur donna en ces lieux des préceptes et des ordonnances, et il y éprouva son peuple, en disant: Si vous écoutez la voix de l’Eternel, votre Dieu, et que vous fassiez ce qui est juste devant ses yeux, si vous obéissez à ses commandements, si vous gardez tous ses préceptes, je ne vous frapperai point de toutes les langueurs dont j’ai frappé l’Egypte: parce que je suis l’Eternel qui vous guéris. Les enfants d’Israël vinrent ensuite à Elim, où il y avait douze fontaines et soixante et dix palmiers; et ils campèrent auprès des eaux. Etant partis d’Elim, ils vinrent au désert de Sin, qui est entre Elim et Sinaï, le quinzième jour du second mois depuis leur sortie d’Egypte. Et les enfants d’Israël étant dans ce désert, murmurèrent tous contre Moïse et Aaron, en leur disant: Plût à Dieu que nous fussions morts dans l’Egypte par la main de l’Eternel, où nous étions assis près de marmites pleines de viande, et où nous mangions du pain tant que nous voulions! Pourquoi nous avez-vous amenés dans ce désert, pour y faire mourir de faim tout le peuple? Alors l’Eternel dit à Moïse: Je vais vous faire pleuvoir des pains du ciel: que le peuple en aille amasser ce qui lui suffira pour chaque jour, afin que j’éprouve s’il marche, ou non, dans ma loi. Qu’ils en ramassent le sixième jour pour le garder chez eux, et qu’ils en recueillent deux fois autant qu’en un autre jour. Alors Moïse et Aaron dirent à tous les enfants d’Israël: Vous saurez ce soir que c’est l’Eternel qui vous a tirés de l’Egypte; et vous verrez demain matin éclater la gloire de l’Eternel, parce qu’il a entendu vos murmures contre lui. Car qui sommes-nous nous autres, pour que vous murmuriez contre nous? Moïse ajouta: L’Eternel vous donnera ce soir de la chair à manger, et le matin il vous rassasiera de pain; parce qu’il a entendu les paroles de murmures que vous avez fait éclater contre lui. Car pour nous, qui sommes-nous? ce n’est point nous que vos murmures attaquent, c’est l’Eternel. Il vint donc le soir un grand nombre de cailles qui couvrirent tout le camp, et le matin il se trouva aussi une rosée qui l’environnait, la surface de la terre en étant couverte; on vit paraître dans le désert quelque chose de menu et comme pilé au mortier, qui ressemblait à ces petits grains de gelée blanche, qui pendant l’hiver tombent sur la terre. Ce que les enfants d’Israël ayant vu, ils se dirent les uns aux autres: Manhu? c’est-à-dire: Qu’est-ce que cela? Car ils ne savaient ce que c’était. Moïse leur dit: C’est là le pain que l’Eternel vous donne à manger. Et voici ce que l’Eternel ordonne: Que chacun en ramasse ce qu’il lui en faut pour manger; prenez-en un omor (mesure) pour chaque personne, selon le nombre de ceux qui demeurent dans chaque tente. Moïse leur dit encore: Que personne n’en garde jusqu’au lendemain matin. Mais ils ne l’écoutèrent point; et quelques-uns en ayant gardé jusqu’au matin, ce qu’ils avaient réservé se trouva plein de vers et tout corrompu. Chacun donc en recueillait le matin autant qu’il lui en fallait pour se nourrir; et lorsque la chaleur du soleil était venue, elle se fondait. Le sixième jour ils en recueillirent une fois plus qu’à l’ordinaire, c’est-à-dire, deux omors pour chaque personne. Or, tous les princes du peuple vinrent en donner avis à Moïse, qui leur dit: C’est ce que l’Eternel a déclaré: Demain sera le jour du sabbat, dont le repos est consacré à l’Eternel. Faites donc aujourd’hui tout ce que vous avez à faire. Faites cuire tout ce que vous aurez à cuire, et gardez pour demain matin ce que vous aurez réservé d’aujourd’hui. Et étant fait ce que Moïse avait commandé, la manne ne se corrompit point, et l’on n’y trouva aucun ver. Moïse leur dit ensuite: Mangez aujourd’hui ce que vous avez gardé; parce que c’est le sabbat de l’Éternel, et que vous n’en trouverez point aujourd’hui dans les champs. Recueillez donc pendant les six jours la manne; car le septième jour, c’est le sabbat de l’Eternel, c’est pourquoi vous n’en trouverez point. Le septième jour étant venu, quelques-uns du peuple allèrent pour recueillir de la manne; ils n’en trouvèrent point. Alors l’Eternel dit à Moïse: Dites ceci aux enfants d’Israël: Jusqu’à quand refuserez-vous de garder mes commandements et ma loi? Considérez que l’Eternel a établi le sabbat parmi vous, et qu’il vous donne pour cela le sixième jour une double nourriture. Que chacun donc demeure chez soi, et que nul ne quitte sa place au septième jour. Ainsi le peuple garda le sabbat au septième jour. Et les enfants d’Israël donnèrent à cette nourriture le nom de manne. Elle ressemblait à la graine de coriandre; elle était blanche, et elle avait le goût qu’aurait la plus pure farine mêlée avec du miel. Moïse dit encore: Voici ce qu’a ordonné l’Eternel: Emplissez de manne un omor, et qu’on la garde pour les générations à venir; afin qu’elles sachent quel a été le pain dont je vous ai nourris dans le désert, après que vous avez été tirés de l’Egypte. Aaron mit alors un vase, empli d’un omor de manne, en réserve dans le tabernacle. Or, les enfants d’Israël mangèrent de la manne pendant quarante ans, jusqu’à ce qu’ils vinssent dans la terre où ils devaient habiter. C’est ainsi qu’ils furent nourris jusqu’à ce qu’ils entrassent sur les premières terres du pays de Chanaan. ———— Continuation. Tous les enfants d’Israël étant partis du désert de Sin, campèrent à Raphidim, où il ne se trouva point d’eau à boire pour le peuple. Alors ils murmurèrent contre Moïse et lui dirent: Donnez-nous de l’eau pour boire! Pourquoi nous avez-vous fait sortir de l’Egypte, pour nous faire mourir de soif, nous et nos enfants, et nos troupeaux? Moïse leur répondit: Pourquoi murmurez-vous contre moi? pourquoi tentez-vous l’Eternel? Il pria l’Eternel et lui dit: Que ferai-je à ce peuple? il s’en faut peu qu’il ne me lapide. L’Eternel dit à Moïse: Marchez devant le peuple: menez avec vous des anciens d’Israël; prenez en votre main la verge dont vous avez frappé le fleuve, et allez jusqu’à la pierre d’Horeb. Je serai avec vous; vous frapperez la pierre, et il en sortira de l’eau, afin que le peuple ait à boire. Moïse fit devant les anciens d’Israël ce que l’Eternel lui avait ordonné. Et il appela ce lieu Massah, c’est-à-dire _tentation_, et Méribah, c’est-à-dire _murmure_, à cause du murmure des enfants d’Israël, et parce qu’ils tentèrent là l’Eternel, en disant: L’Eternel est-il au milieu de nous, ou n’y est-il pas? C’est en ce lieu qu’Israël fut attaqué avec acharnement par la tribu des Amalécites et que Josué remporta une victoire signalée. Il fut alors statué en Israël que l’on regarderait désormais comme ennemi implacable toute la tribu d’Amalec qui avait violé le droit des gens en attaquant un peuple sans armes. Il arriva aussi en ce même lieu que Moïse d’après le conseil de son beau-père Jéthro, choisit d’entre tout le peuple, des hommes fermes et courageux craignant Dieu, aimant la vérité et ennemis de l’avarice. Il leur donna la conduite, aux uns de mille hommes, à d’autres de cent, à ceux-ci de cinquante, aux autres enfin de dix, afin qu’ils fussent occupés à rendre la justice au peuple en tout temps, qu’ils jugeassent eux-mêmes les petites affaires et qu’ils ne réservassent à Moïse que les choses difficiles. Ainsi le fardeau des affaires qui l’accablait devint plus léger, partagé avec d’autres. ———— Révélation de l’Éternel sur le mont Sinaï. La délivrance miraculeuse du pays d’Egypte ne rendit aux enfants d’Israël que liberté d’action et indépendance matérielle. Cependant, Dieu, dans sa toute-bonté, voulut aussi qu’ils recouvrassent liberté d’esprit, indépendance morale et spirituelle. Le peuple israélite sorti de l’esclavage devait entrer en possession de la terre promise aux patriarches; mais aussi devait-il avant tout s’assurer du royaume céleste prédit à Abraham, afin _que toutes les familles de la terre fussent bénies en lui_. C’est pourquoi l’Eternel, Dieu, se révéla d’une manière si merveilleuse aux yeux de tout le peuple, afin que tout Israël le vît et en fût témoin; que chacun en Israël fût pour ainsi dire _prêtre à son Dieu_. A cet effet, il arriva que le troisième mois depuis la sortie de l’Egypte, Moïse se rendit sur le mont Sinaï au pied duquel les Israélites étaient campés, et que Dieu lui fit entendre ces paroles: Voici ce que vous direz à la maison de Jacob et ce que vous annoncerez aux enfants d’Israël: Vous avez vu vous-mêmes ce que j’ai fait aux Egyptiens et de quelle manière je vous ai portés comme l’aigle porte ses aiglons sur ses ailes, et comment je vous ai pris pour être à moi. Si donc vous écoutez ma voix et si vous gardez mon alliance, vous serez à moi, par prédilection au-dessus de tous les peuples, car toute la terre est à moi. Vous serez pour moi un royaume sacerdotal, un peuple saint... Moïse étant donc venu vers le peuple, fit assembler les anciens et leur exposa tout ce que l’Eternel lui avait commandé de leur dire. Le peuple répondit tout d’une voix: Nous ferons tout ce que l’Eternel a dit. Moïse fut alors chargé de préparer et de sanctifier le peuple pour le troisième jour. Le troisième jour étant arrivé sur le matin, on commença à entendre les éclats du tonnerre, et à voir briller les éclairs; une nuée très-épaisse couvrit la montagne, la trompette se fit entendre avec un grand bruit, et le peuple qui était dans le camp fut saisi de frayeur. Alors Moïse le fit sortir du camp pour aller au-devant de l’apparition divine, et ils demeurèrent au pied de la montagne. Tout le mont Sinaï était couvert de fumée, la fumée s’en élevait dans les airs comme d’une fournaise, et toute la montagne en fut fortement ébranlée. C’est au milieu de ces phénomènes effroyables et majestueux qu’Israël reçut la révélation des _dix commandements_, qui qui nous indiquent les devoirs envers Dieu et envers les hommes. Du reste, Moïse, au nom de l’Éternel, ajouta encore beaucoup d’autres lois et d’autres préceptes que tout Israélite se regarde comme obligé d’observer tant dans la vie morale que dans la vie religieuse⁷. ⁷ _La fête de la législation ou la Pentecôte._—En mémoire de ce grand évènement, il est d’usage en Israël de célébrer le sixième et le septième jour du troisième mois (Siwan) par des fêtes solennelles. Ces fêtes s’appellent encore celles des semaines (Schebouoth) par rapport aux temps où le peuple israélite représentait encore une nation et habitait le pays de ses pères. Alors à la fin de la récolte du froment, qui avait lieu pendant les sept semaines de Pâque à Pentecôte, les prémices des blés étaient apportées le cinquantième jour, au temple à Jérusalem, et une fête de moisson était célébrée en l’honneur de l’Éternel. ———— Le veau d’or. Les dix commandements étant promulgués, Moïse remonta le mont Sinaï pour recevoir les autres lois; il y resta quarante jours et quarante nuits. Le peuple voyant que Moïse différait longtemps à descendre de la montagne et croyant qu’il était mort, s’assembla en s’élevant contre Aaron et lui dit: Venez et faites-nous des dieux qui marchent devant nous; car pour ce qui est de Moïse, cet homme qui nous a tirés de l’Egypte, nous ne savons pas ce qui lui est arrivé. Aaron leur répondit: Otez les pendants d’oreilles de vos femmes, de vos fils et de vos filles et apportez-les-moi. Le peuple fit ce qu’Aaron lui avait commandé, et lui apporta les pendants d’oreilles. Aaron les ayant pris, les jeta au feu et en forma un veau d’or. Alors les Israélites dirent: Voici vos dieux, ô Israël, qui vous ont tirés de l’Egypte. Ce qu’Aaron ayant vu, il dressa un autel devant le veau, et cria: Demain sera la fête solennelle de l’Eternel. S’étant levés matin, ils offrirent des holocaustes et des sacrifices. Tout le peuple s’assit pour manger et pour boire, et se leva ensuite pour se divertir. Pendant ces pratiques criminelles, Moïse descendit de la montagne, portant en sa main les deux tables du témoignage. Les dix commandements étaient gravés sur ces tables. S’étant approché du camp, il vit le veau d’or et les danses; alors saisi d’indignation, il brisa les tables de la loi au pied de la montagne; et après avoir prié l’Eternel d’avoir pitié de son peuple et de lui pardonner cette grande aberration, il prit le veau d’or qu’ils avaient fait, le mit dans le feu, le réduisit en poudre et punit très-sévèrement les coupables. Ensuite Moïse se rendit de nouveau sur le mont Sinaï où, d’après l’ordre de Dieu il fit de nouvelles tables de pierre semblables aux premières qu’il avait brisées, et il y grava de nouveau les mêmes lois. ———— Le séjour du peuple israélite près du mont Sinaï. Le peuple israélite ne demeura qu’une année environ près du mont Sinaï. Moïse, cependant, fit beaucoup en ce peu de temps. Il y régla bien des choses, au nom de l’Eternel, et différentes lois et ordonnances y furent proclamées, telles que: les lois touchant les esclaves, la propriété, l’homicide et les sévices; les lois concernant le larcin, les dommages, la subornation et l’idolâtrie; les défenses d’opprimer l’étranger; la charité envers le pauvre; les lois concernant les dîmes et les prémices; les devoirs des juges; le repos de la septième année; les lois sur les sacrifices et les prêtres, etc., et enfin les ordonnances touchant la construction d’un _tabernacle_, les lois pour le _sabbat_ et pour _toutes les fêtes_. ———— Le tabernacle. Moïse pour la construction du tabernacle demanda au nom de l’Eternel, le concours de tous ceux qui voulaient y contribuer de leur pleine volonté. Tout le monde vint alors, les hommes avec leurs femmes donnèrent leurs chaînes, leurs pendants d’oreilles, leurs bagues et leurs bracelets; tous les vases d’or furent mis à part pour être présentés à l’Eternel. On apporta des bois rares, de belles étoffes et des pierres précieuses. Moïse fit alors venir Bezaléel et Oholiab et tous les hommes habiles à qui Dieu avait donné la sagesse et l’intelligence pour faire tout ce qui concernait le sanctuaire. Moïse leur mit entre les mains toutes les oblations des enfants d’Israël. Et pendant qu’ils s’appliquaient à avancer cet ouvrage, le peuple offrait tous les jours de nouveaux dons. C’est pourquoi les ouvriers furent obligés de dire à Moïse: Le peuple offre plus de dons qu’il n’est nécessaire. Moïse commanda donc qu’on fît cette déclaration publiquement par la voix d’un héraut: Que nul homme et nulle femme n’offrît plus rien à l’avenir pour les ouvrages du sanctuaire. Ainsi l’on cessa d’offrir des présents à Dieu. Et lorsque tous les ouvrages furent achevés, Moïse les consacra et les bénit⁸. ⁸ Le tabernacle était destiné à des assemblées religieuses jusqu’au temps où il y aurait un temple dans un lieu déterminé à cet effet. Il était construit en tente portative de la forme d’un carré oblong, ayant trente coudées de longueur et dix de largeur. Le tout était divisé en deux parties: _le saint_, accessible seulement aux prêtres; _le saint des saints_, où le pontife seul pouvait pénétrer le jour des expiations, le dixième du septième mois (Tischri). Le tabernacle était entouré d’une enceinte qui avait cent coudées de longueur et cinquante de largeur, destiné à tout le peuple. C’est là qu’étaient placés l’autel des holocaustes et le bassin pour les prêtres. Dans _le saint_ du côté du septentrion se trouvaient la table avec le pain de proposition et différents vases; du côté du midi le chandelier d’or avec ses lampes; et au milieu l’autel des parfums. L’arche d’alliance se trouvait placée dans _le saint des saints_. Ce n’est que devant le tabernacle qu’il était permis de sacrifier. ———— Le sabbat et les fêtes. Moïse indiqua les solennités de l’Eternel aux enfants d’Israël, en disant: _Sabbat._ Vous travaillerez pendant six jours: le septième jour s’appellera saint, parce que c’est le repos du sabbat. Vous ne ferez ce jour-là aucun ouvrage; car c’est le _sabbat_ de l’Eternel, qui doit être observé partout où vous demeurerez. _Pâque._ Au premier mois (Nisan), le soir du quatorzième jour, c’est la pâque de l’Eternel, et le quinzième jour du même mois, c’est la fête solennelle des azymes de l’Eternel. Vous mangerez des pains sans levain pendant sept jours. Le premier jour il y aura une convocation sainte pour vous, vous ne ferez aucune œuvre servile; le septième jour sera aussi une convocation sainte; vous ne ferez aucune œuvre servile. Moïse dit encore aux enfants d’Israël: Lorsque vous serez entrés dans la terre que Dieu vous donnera, et que vous aurez coupé les grains, vous porterez au prêtre une gerbe d’épis (un omer), comme prémices de votre moisson: et le lendemain de ce sabbat, qui est la pâque⁹, le prêtre élèvera devant l’Éternel cette gerbe, et il la consacrera à l’Eternel, afin que l’Eternel vous soit favorable en la recevant. Vous ne mangerez ni pain ni bouillie, ni farine desséchée des grains nouveaux, jusqu’au jour où vous en offrirez les prémices à votre Dieu. Vous compterez donc depuis le second jour du sabbat, auquel vous avez offert la gerbe des prémices (l’omer), sept semaines pleines jusqu’au jour d’après que la septième semaine sera accomplie, c’est-à-dire, cinquante jours: et alors vous offrirez à l’Eternel pour un sacrifice nouveau. ⁹ C’est le seizième du mois de Nisan, le deuxième jour de la Pâque. _Fête des semaines, ou Pentecôte_¹⁰. Vous vous assemblerez en ce même jour (la fête); ce sera pour vous une convocation sainte; vous ne ferez aucun ouvrage servile. Cette ordonnance sera observée éternellement dans tous les lieux où vous demeurerez, et dans toute votre postérité. Quand vous moissonnerez la moisson de votre pays, vous laisserez inachevé le bout de votre champ en moissonnant: et vous ne ramasserez point les épis qui seront restés, mais les laisserez pour les pauvres et les étrangers. ¹⁰ Voyez plus haut: fête de la législation. _Nouvel an._ Moïse parla encore aux enfants d’Israël, au nom de l’Eternel: Au septième mois (Tischri), le premier du mois sera pour vous un sabbat, un souvenir de jubilation, une convocation sainte, vous ne ferez aucun ouvrage servile¹¹. ¹¹ Cette fête est appelée celle du nouvel an parce que d’après l’ère ordinaire, qui commence par la création, le mois de Tischri est le premier de l’année. C’est par cette même raison que ce mois est quelquefois appelé _le mois des anciens_, c’est-à-dire, le premier mois de ceux qui ont vécu avant Moïse. Les deux premiers jours de ce mois sont célébrés d’une manière très-solennelle; beaucoup de prières ont lieu dans la synagogue et des hymnes sacrées y sont chantées. Cette fête se distingue encore de toute autre par le _Schofar_ (trompette) qui est sonné dans la synagogue. La signification de cet usage est: 1º hommage de fidélité au Créateur notre Dieu dont nous reconnaissons le règne éternel, et auquel nous promettons notre soumission, par une marque de joie (selon Ps. 98, 6); 2º _rappel de la révélation divine_ sur le mont Sinaï, où le son du Schofar se fit également entendre et où nos pères firent cette promesse: «Tout ce que l’Éternel a dit, nous le ferons» (II livre de Moïse 19); 3º _exhortation à la repentance et à l’amendement_, selon l’expression du prophète (Amos 3, 6). _Jour d’expiation (Jom Kipour)._ Toutefois le dixième jour de ce septième mois est un jour d’expiation; ce sera pour vous une convocation sainte; vous vous mortifierez, vous ne ferez aucun ouvrage en ce même jour-là, car c’est un jour d’expiation pour attirer sur vous la clémence de l’Eternel votre Dieu. Car toute personne qui n’aurait pas été mortifiée en ce même jour-là, sera retranchée de ses tribus, et toute personne qui ferait un ouvrage quelconque en ce même jour-là Dieu la fera périr du milieu de son peuple. Vous ne ferez aucun ouvrage en ce jour-là; et cette ordonnance sera éternellement observée dans toute votre postérité, et dans tous les lieux où vous demeurerez. Ce jour-là vous sera un repos de sabbat. Vous vous mortifierez le neuvième du même mois vers le soir; du soir au soir, vous célébrerez votre sabbat (fête)¹². ¹² Ce jour est célébré dans tout Israël comme le jour le plus saint de toute l’année. Il est entièrement consacré à la dévotion et à l’amendement. L’indulgence divine et sa miséricorde sont annoncées à tous ceux qui, en ce jour, reconnaissent d’un cœur repentant leurs péchés devant Dieu, lui promettent amendement sincère, renoncent à tout sentiment de haine envers le prochain et tâchent de réparer les injustices exercées à son égard. (Voyez Isaïe, 58, qui est lu en ce jour dans la synagogue.) Le but de cette fête solennelle est donc: réconciliation de l’homme avec Dieu, et réconciliation de l’homme avec l’homme. _Fête des tabernacles._ Moïse parla encore au nom de l’Eternel, en disant: Le quinzième jour de ce septième mois, fête des tentes¹³, sept jours à l’Eternel. Le premier jour est une convocation sainte, vous ne ferez aucun ouvrage servile; le huitième jour (Schemini-azereth) sera aussi pour vous un jour sanctifié, vous ne ferez aucun ouvrage servile. (Cette fête devait être en même temps, pour la Palestine, une _fête de récolte_.) Le quinzième jour du septième mois, continue Moïse, quand vous récolterez les produits de la terre, vous célébrerez la fête de l’Eternel pendant sept jours; le premier jour, repos, et le huitième jour, repos. Vous prendrez, le premier jour, le fruit de l’arbre hadar, les spathes des dattiers, une branche de l’arbre aboth et des saules de rivière¹⁴, et vous vous réjouirez pendant sept jours devant l’Eternel votre Dieu. Vous célébrerez la fête de l’Eternel pendant sept jours; c’est une loi qui sera transmise à vos générations; vous la célébrerez dans le septième mois, et alors vous demeurerez dans des tentes pendant sept jours. Que chaque indigène, en Israël, demeure sous des tentes, afin que vos générations sachent que j’ai fait demeurer les enfants d’Israël dans des tentes lorsque je les fis sortir de l’Egypte, moi l’Eternel, votre Dieu. ¹³ Les pratiques de cette fête ont pour but principal de nous rappeler l’obligation de ne pas trop nous attacher aux biens de la terre, fragiles et inconstants qu’ils sont; mais de mettre toute notre confiance en Dieu notre protecteur. L’Israélite doit, pour ainsi dire, quitter sa maison remplie alors de tous les fruits de la récolte; il doit prendre pour demeure une chétive cabane, pour déclarer par cet acte qu’il est pénétré de reconnaissance envers son bienfaiteur céleste et qu’il est prêt, si Dieu l’exige, à abandonner tout ce qu’il possède sur la terre, en se souvenant de ces jours où nos pères ont tous demeuré dans des tentes, comblés des bienfaits de Dieu. «Vous vous souviendrez de tout le chemin par où l’Éternel votre Dieu vous a conduits dans le désert pendant quarante ans; il vous a donné pour nourriture la manne qui était inconnue à vous et à vos pères, pour vous faire voir que l’homme ne vit pas _seulement de pain_, mais de toute parole qui sort de la bouche de Dieu.» (5. M. chap. 8.) ¹⁴ Quelques-uns de nos sages voient dans les quatre différents fruits, le symbole de la concorde et de la bonne intelligence. Selon d’autres ces sortes de fruits sont des symboles pour nous indiquer les principaux membres du corps humain: le cœur, l’épine du dos avec les côtes, les yeux et les lèvres qui tous doivent célébrer la gloire de Dieu. Le neuvième et dernier jour de cette fête est appelé _Simchath-torah_, c’est-à-dire la joie de la loi, parce qu’on finit annuellement, en ce jour, la lecture du Pentateuque. ———— Départ de Sinaï et marche jusqu’aux confins de la terre promise. Le vingtième jour du second mois de la seconde année après la sortie de l’Egypte, les enfants d’Israël partirent du désert de Sinaï, arrivèrent en un lieu appelé _Tabera_, c’est-à-dire incendie, à cause d’une maladie inflammatoire qui éclata au milieu du peuple, comme une juste punition de Dieu, parce qu’ils avaient murmuré contre l’Eternel. C’est aussi en ce lieu que le menu peuple qui était venu de l’Egypte avec les Israélites, désirant manger de la _chair_, s’assit en pleurant, et que les enfants d’Israël s’étant joints à eux, ils commencèrent à dire: Qui nous donnera de la chair à manger? Nous nous souvenons des poissons que nous mangions en Egypte, presque pour rien: les concombres, les melons, les poireaux, les oignons et l’ail nous reviennent dans l’esprit. Notre vie est languissante; nous ne voyons que manne sous nos yeux. Un vent excité alors par le Tout-Puissant, poussa des nuées de cailles d’au delà de la mer Rouge, et les fit tomber dans le camp et autour du camp. Le peuple se levant donc ramassa durant tout ce jour, la nuit suivante et le lendemain, une si grande quantité de cailles, que ceux qui en avaient le moins, en avaient dix mesures. Ils avaient encore la chair entre les dents, et ils n’avaient pas achevé de manger cette viande, qu’une maladie affreuse se répandit parmi le peuple et en dévora un très-grand nombre. C’est pourquoi ce lieu fut appelé _Kibroth-hattavah_, c’est-à-dire les Sépulcres de concupiscence, parce qu’ils y ensevelirent le peuple qui avait désiré de la chair. Etant sortis des Sépulcres de la concupiscence, ils vinrent à Haseroth et de là dans le désert de Pharan, situé entre Sinaï, la Palestine et le pays d’Edom. De ce lieu Moïse envoya, au nom de l’Eternel, douze hommes pour examiner le pays de Chanaan et il leur dit: Montez du côté du midi; et lorsque vous serez arrivés aux montagnes, considérez quelle est cette terre, et quel est le peuple qui l’habite; s’il est fort ou faible; s’il y a peu ou beaucoup d’habitants. Considérez aussi quelle est la terre, si elle est bonne ou mauvaise; quelles sont les villes, si elles ont des murs ou si elles n’en ont point; si le terroir est gras ou stérile; s’il est planté de bois ou s’il est sans arbres. Soyez fermes et résolus, et apportez-nous des fruits de la terre. Ces hommes étant donc partis, considérèrent le pays de Chanaan et revinrent quarante jours après. En faisant leur rapport, ces envoyés (Josué et Caleb exceptés) excitèrent le peuple à la révolte contre Moïse, en disant: Nous ne pouvons point aller combattre ce peuple chananéen, parce qu’il est plus fort que nous. Et ils décrièrent devant les enfants d’Israël le pays qu’ils avaient vu. Tout le peuple se mit donc à crier, et pleura toute la nuit, et tous les enfants d’Israël murmurèrent contre Moïse et Aaron, en disant: Plût à Dieu que nous fussions morts dans l’Egypte! et puissions-nous périr dans cette vaste solitude, plutôt que l’Eternel nous fasse entrer dans ce pays! de peur que nous ne mourions par l’épée, et que nos femmes et nos enfants ne soient emmenés captifs. Ne vaut-il pas mieux que nous retournions en Egypte? Ils commencèrent donc à dire les uns aux autres: Etablissons-nous un chef, et retournons en Egypte. Moïse et Aaron rapportèrent alors, au nom de l’Eternel, ces paroles au peuple d’Israël: Je jure par moi-même, dit l’Eternel, que je vous traiterai selon le souhait que je vous ai entendu faire. Vos corps seront étendus morts dans ce désert. Vous tous qui avez été comptés depuis l’âge de vingt ans et au-dessus, et qui avez murmuré contre moi, vous n’entrerez point dans cette terre dans laquelle j’avais juré que je vous ferais habiter, excepté Caleb fils de Jophoné, et Josué fils de Nun. Mais j’y ferai entrer vos petits-enfants, dont vous avez dit qu’ils seraient la proie de vos ennemis, afin qu’ils voient cette terre qui vous a déplu. Vos enfants seront errants dans ce désert pendant quarante ans, selon le nombre de quarante jours pendant lesquels vous avez considéré cette terre, en comptant une année pour chaque jour. Vous recevrez donc pendant quarante ans la peine de vos iniquités. Pendant ces trente-huit ans qui restaient encore à passer dans le désert, il n’arriva que peu d’événements remarquables. La révolte de Coré (Corach) fut punie par l’Eternel d’une manière tout à fait inattendue: la terre s’entr’ouvrit, et les méchants furent engloutis. Arrivé dans le désert de Sin, le peuple manquant d’eau s’assembla de nouveau autour de Moïse et d’Aaron et se révolta. Dieu leur fit alors sortir de l’eau d’un rocher, en sorte que le peuple eut à boire. C’est à cette occasion que Moïse et Aaron, n’ayant pas suivi exactement la volonté de l’Eternel, furent punis, eux aussi, comme les autres: l’entrée dans la terre promise leur fut interdite, et la mort prête à les frapper tous les deux, leur fut annoncée. A la quarantième année après la sortie d’Egypte, le peuple d’Israël demeura à Cades où Marie (Miriam) la sœur de Moïse et d’Aaron vint à mourir. Le roi des Iduméens refusant de laisser passer Israël par son pays, Moïse se tourna vers l’Est pour pénétrer dans le pays de Chanaan par la rive gauche du Jourdain, au delà de la mer Morte. Ayant décampé de Cades, les Israélites vinrent à la montagne de Hor, située sur les confins du pays d’Edom. Aaron y vint à mourir et fut remplacé dans le pontificat par _Éléazar_ son fils. Moïse forcé de faire la guerre à _Sihan_, roi des Amorrhéens, de même qu’à _Og_, roi de Basan, les vainquit tous les deux, et donna leur pays aux enfants de Ruben et de Gad et à la moitié de la tribu de Manassé qui le sollicitèrent pour y laisser leurs troupeaux. _Balac_, roi de Moab, effrayé de l’approche de ce peuple, fit venir un mage, nommé _Bileam_, pour maudire les Israélites. Voyant que la malédiction prononcée contre eux ne s’accomplissait point, Bileam conseilla aux filles de Moab et de Midian de séduire Israël en l’appelant à leurs sacrifices (dans l’intention peut-être d’obtenir une alliance) et de l’engager à se consacrer au culte de Baal-Peor. Effectivement elles réussirent dans leur dessein: le peuple succomba à leur séduction, et sacrifia au Baal-Peor (idole moabite dont le culte consistait en actions immorales et impudiques). Moïse fit alors punir les coupables, et _Phinéas_, fils d’Eléazar, à la tête de douze mille hommes, marcha contre ces peuples idolâtres et les vainquit. ———— Mort de Moïse. Moïse parvenu à l’âge de cent vingt ans, sentant approcher l’heure de sa mort, prit les mesures nécessaires au bien de son peuple: il choisit, au nom de l’Eternel, Josué, fils de Nun, pour son successeur, lui remit devant tout Israël le commandement sur le peuple et lui dit: Soyez ferme et courageux; car c’est vous qui ferez entrer ce peuple dans le pays que l’Eternel a promis à ses pères, c’est vous aussi qui le partagerez au sort entre les tribus. L’Eternel sera avec vous, ne craignez point et ne vous laissez point intimider. Moïse écrivit donc la loi et la donna aux prêtres, enfants de Lévi, qui portaient l’arche de l’alliance, et à tous les anciens d’Israël. Il leur donna cet ordre: Tous les sept ans, lorsque l’année de la remise sera venue, et au temps de la fête des tabernacles, quand tous les enfants d’Israël s’assembleront pour paraître devant l’Eternel votre Dieu, au lieu que l’Eternel aura choisi, vous lirez les paroles de cette loi devant tout Israël attentif. Tout le peuple sera assemblé, tant les hommes que les femmes, les petits enfants et les étrangers qui se trouveront dans vos villes, afin qu’en écoutant la loi ils l’apprennent; qu’ils craignent l’Eternel votre Dieu; qu’ils observent et accomplissent toutes les ordonnances de cette loi; et que leurs enfants mêmes qui n’en ont encore aucune connaissance, puissent les entendre, et craignent l’Eternel leur Dieu, pendant tout le temps qu’ils demeureront dans la terre que vous aller posséder au delà du Jourdain. Après avoir exhorté pour la dernière fois son peuple à l’amour de la vertu, à la crainte de Dieu et à la fidélité de son alliance, Moïse bénit tous les enfants d’Israël selon leurs tribus, et termina par ces paroles si expressives: Tu es heureux, ô Israël; qui est semblable à toi, ô peuple, qui trouves ton salut dans l’Eternel, l’Eternel qui te sert de bouclier pour te défendre et d’épée pour te procurer une glorieuse victoire!... Moïse monta ensuite sur la montagne de _Nebo_, et du haut de cette montagne il jeta un dernier regard sur le pays promis à son peuple et mourut dans le pays de Moab selon l’ordre de l’Eternel. Nul homme jusqu’aujourd’hui n’a connu le lieu où il a été enseveli. Sa vue ne baissa point et ses forces ne furent point affaiblies jusqu’au dernier moment de sa vie. Les enfants d’Israël le pleurèrent dans la plaine de Moab pendant trente jours. Il ne s’éleva plus dans Israël de prophète semblable à qui l’Eternel se révélât d’une manière si merveilleuse; ni qui ait fait des miracles et des prodiges comme ceux que l’Eternel fit faire par Moïse en Egypte aux yeux de Pharaon, de ses serviteurs et de tout son royaume; ni qui ait agi avec un bras si puissant, et qui ait fait des œuvres aussi grandes et aussi merveilleuses que celles que Moïse a faites devant tout Israël. CHAPITRE IV. DEPUIS LA CONQUÊTE DE CHANAAN JUSQU’A SAUL. (2489-2882.) ———— Entrée du peuple israélite dans la terre promise. Après la mort de Moïse, Josué fils de Nun, rempli de l’esprit de sagesse, fut reconnu pour chef, comme Moïse l’avait ordonné. Josué fit alors ce commandement aux préposés du peuple, et leur dit: Passez par le milieu du camp, et donnez cet ordre au peuple, et dites-leur: Faites provision de vivres; car dans trois jours vous passerez le Jourdain, et vous irez prendre possession de la terre que l’Eternel votre Dieu doit vous donner. Il dit aussi à ceux de la tribu de Ruben, à ceux de la tribu de Gad, et à la demi-tribu de Manassé: Souvenez-vous de ce que vous a ordonné Moïse. (Moïse en leur donnant le pays de _Sihon_ et d’_Og_ les avait engagés formellement à ne pas quitter les autres tribus, mais à les secourir pour la conquête du pays de Chanaan.) Ils lui répondirent: Nous ferons tout ce que vous nous ordonnerez, et nous irons partout où vous nous enverrez. Comme nous avons obéi à Moïse en toutes choses, nous vous obéirons aussi. Seulement que l’Eternel votre Dieu soit avec vous, comme il a été avec Moïse. Que celui qui contredira les paroles qui sortiront de votre bouche, et qui n’obéira pas à tout ce que vous lui ordonnerez, soit puni de mort. Soyez ferme seulement, et agissez avec un grand courage. Josué envoya donc secrètement de Schitim deux espions: il leur dit: Allez et examinez bien le pays et particulièrement la ville de Jéricho. Ils partirent aussitôt, examinèrent le pays comme Josué le leur avait ordonné et revinrent en faisant le rapport demandé. Josué, s’étant donc levé avant le jour, décampa; et étant sorti de Schitim, lui et tous les enfants d’Israël, ils vinrent jusqu’au Jourdain, où ils demeurèrent trois jours. Ce temps expiré, les hérauts passèrent par le milieu du camp, et commencèrent à crier: Quand vous verrez l’arche de l’alliance, les prêtres et les lévites qui la porteront, levez-vous aussi vous autres, et marchez après eux; et qu’il y ait entre vous et l’arche un espace de deux mille coudées, afin que vous puissiez la voir de loin, et connaître le chemin par où vous irez; parce que vous n’y avez jamais passé; et prenez garde de ne vous point approcher de l’arche. Josué dit aussi au peuple: Sanctifiez-vous; car l’Eternel fera demain des choses merveilleuses parmi vous. Et il dit aux prêtres: Prenez l’arche de l’alliance, et marchez devant le peuple. Ils firent ce qu’il leur avait commandé; et ayant pris l’arche, ils marchèrent devant le peuple. Et Josué dit encore au peuple: Vous reconnaîtrez à ceci que l’Eternel, le Dieu vivant, est au milieu de vous, et qu’il expulsera à vos yeux les Chananéens et les autres habitants idolâtres de ce pays. L’arche de l’alliance du Seigneur de toute la terre marchera devant vous au travers du Jourdain. Tenez prêts douze hommes des douze tribus d’Israël, un de chaque tribu. Et lorsque les prêtres qui portent l’arche auront mis les pieds dans les eaux du Jourdain, les eaux d’en bas s’écouleront et laisseront le fleuve à sec; mais celles qui viennent d’en haut s’arrêteront et demeureront suspendues. Le peuple sortit donc de ses tentes pour passer le Jourdain; et les prêtres qui portaient l’arche de l’alliance marchaient devant lui. Et aussitôt que ces prêtres furent entrés dans le Jourdain, et que l’eau commença à mouiller leurs pieds (c’était au temps de la moisson, où le Jourdain regorgeait par-dessus ses bords), les eaux qui venaient d’en haut s’arrêtèrent en un même lieu; et s’élevant comme une montagne, elles paraissaient de bien loin, depuis la ville qui s’appelle Adom jusqu’au lieu appelé Sarthan; mais les eaux d’en bas s’écoulèrent dans la mer du désert, qui est appelée maintenant la mer Morte, jusqu’à ce qu’il n’en restât point du tout. Cependant le peuple marchait vis-à-vis de Jéricho, et les prêtres qui portaient l’arche de l’alliance, se tenaient toujours au même état sur la terre sèche au milieu du Jourdain, et tout le peuple passait au travers du canal qui était à sec. Josué dit alors aux douze hommes choisis par les douze tribus: Allez devant l’arche au milieu du Jourdain, et que chacun de vous emporte de là une pierre, selon le nombre des tribus des enfants d’Israël; afin qu’elles servent de signe et de monument parmi vous; et à l’avenir quand vos enfants vous demanderont: Que veulent dire ces pierres? vous leur répondrez: Les eaux du Jourdain se sont séparées devant l’arche de l’alliance, lorsqu’elle passait au travers de ce fleuve. C’est pourquoi ces pierres ont été mises en ce lieu, pour servir aux enfants d’Israël de monument éternel. Le peuple fit donc ce que Josué avait ordonné. Ils prirent du milieu du lit du Jourdain douze pierres; et les portant jusqu’au lieu où ils campèrent, ils les y posèrent. Josué mit aussi douze autres pierres au milieu du lit du Jourdain, où les prêtres qui portaient l’arche s’étaient arrêtés, et elles y sont demeurées jusqu’aujourd’hui. Or le peuple sortit du Jourdain le dixième jour du premier mois (Nisan), et ils campèrent à Gilgal vers le côté de l’orient de la ville de Jéricho. Josué posa aussi à Gilgal les douze pierres qui avaient été prises du fond du Jourdain. Les enfants d’Israël demeurant à Gilgal y firent la Pâque le quatorzième jour du mois sur le soir, dans la plaine de Jéricho. Le lendemain ils mangèrent les fruits de la terre et des pains sans levain. Et après qu’ils eurent mangé des fruits de la terre, la manne cessa, et les enfants d’Israël n’usèrent plus de cette nourriture. Josué se disposa donc à s’emparer d’une grande partie de la Palestine méridionale, du centre de ce pays et en outre de quelques parties de la Palestine septentrionale. Il commença par la conquête de Jéricho, ville dont il se rendit maître d’une manière tout à fait merveilleuse. Il fit alors attaquer la ville d’Aï située dans les environs de Beth-El, et fit alliance avec les Gibaonites. Il vainquit ensuite les cinq rois de Jérusalem, d’Hébron, de Jarmoth, de Lachis et d’Eglon, qui s’étaient tous réunis pour faire la guerre aux Gibaonites à cause de leur alliance avec Israël, et il finit par assujettir les peuples alliés habitant le nord de la Palestine. Mais alors un des premiers préceptes de la loi de Moïse fut violé. La loi recommandait d’expulser tous les habitants du pays pour qu’ils ne pussent engager les Israélites à quitter l’Éternel et à servir les faux dieux. Cette ordonnance ne fut point suivie, et beaucoup de Chananéens, peuples idolâtres, restèrent dans le pays et demeurèrent au milieu des Israélites.—Sept ans après l’entrée des Israélites en Palestine, le pays conquis fut partagé entre les tribus. Le partage des terres se fit par le sort, eu égard toutefois au nombre des personnes de chaque tribu et à la qualité du terrain. Chaque tribu occupa ce qui lui était échu en partage et s’empara de ce qui restait encore à conquérir. Quarante-huit villes du pays furent assignées pour demeure aux Lévites qui n’entrèrent point dans le partage.—Le pays étant ainsi conquis et divisé, Josué fit venir ceux des tribus de Ruben et de Gad, et la demi-tribu de Manassé, et il leur dit: Vous avez fait tout ce que Moïse serviteur de l’Éternel vous avait ordonné: vous m’avez aussi obéi en toutes choses; et dans un si long temps vous n’avez point abandonné vos frères jusqu’à ce jour. Puisque l’Eternel votre Dieu a donné la paix et le repos à vos frères, selon qu’il avait promis, allez-vous-en, et retournez dans vos tentes et dans le pays qui est à vous, que Moïse vous a donné au delà du Jourdain. Ayez soin seulement d’observer exactement et de garder avec soin les commandements et la loi que Moïse serviteur de l’Eternel vous a prescrite, qui est d’aimer l’Eternel votre Dieu, de marcher dans toutes ses voies, de vous attacher à lui, et de le servir de tout votre cœur et de toute votre âme. Josué les bénit ensuite et les renvoya de Silo (Schilo), endroit où était depuis lors le siége du sanctuaire, et ils retournèrent à leurs tentes. Josué exhorte les Israélites à observer la loi. Or, longtemps après que l’Eternel eut donné la paix à Israël, et qu’il lui eut assujetti toutes les nations qui l’environnaient, Josué étant déjà vieux et fort avancé en âge, fit assembler tout Israël, les anciens, les chefs et les magistrats, et il leur dit: Je suis vieux, et mon âge est fort avancé. Vous voyez tout ce que l’Eternel votre Dieu a fait à toutes les nations qui vous environnent, de quelle sorte il a lui-même combattu pour vous. Fortifiez-vous donc de plus en plus, et gardez avec grand soin tout ce qui est écrit dans le livre de la loi de Moïse, sans vous en détourner ni à droite ni à gauche; de peur que vous mêlant parmi ces peuples qui demeureront parmi vous, vous ne juriez au nom de leurs dieux, et que vous ne les serviez, et ne les adoriez. Mais attachez-vous à l’Eternel votre Dieu, selon que vous l’avez fait jusqu’à ce jour. Alors un seul d’entre vous poursuivra mille de vos ennemis, parce que Dieu combattra pour vous, comme il l’a promis. Prenez garde seulement, et ayez soin sur toutes choses d’aimer l’Eternel votre Dieu. Si vous voulez vous attacher aux erreurs de ces peuples qui demeurent parmi vous, et vous mêler avec eux par le lien du mariage, et par une union d’amitié, sachez dès maintenant que l’Eternel ne les expulsera point devant vous, mais qu’ils deviendront à votre égard comme un piége et comme un filet, comme des pointes qui vous perceront les côtés, et comme des épines dans vos yeux jusqu’à ce qu’il vous enlève et vous extermine de cette terre excellente qu’il vous a donnée. Pour moi, je suis aujourd’hui sur le point d’entrer dans la voie de toute la terre; et vous devez considérer avec une parfaite reconnaissance que tout ce que l’Eternel avait promis de vous donner, est arrivé sans qu’aucune de ses paroles soit tombée à terre. Comme donc Dieu a accompli tout ce qu’il vous avait promis et que tout vous a réussi très-heureusement, ainsi il fera tomber sur vous tous les maux dont il vous a menacés, si vous violez l’alliance que l’Eternel a faite avec vous; si vous servez et adorez des dieux étrangers, vous serez alors promptement enlevés de cette excellente terre que Dieu vous a donnée. Josué fait assembler le peuple pour la dernière fois. Josué ayant ensuite assemblé toutes les tribus d’Israël à Sichem, fit venir les anciens, les juges, les magistrats et les préposés du peuple. Et lorsqu’ils furent tous présentés devant l’Eternel, Josué leur raconta l’histoire de leurs pères en disant: Vos pères jusqu’à Tharé, père d’Abraham, ont habité dans les premiers temps au delà du fleuve d’Euphrate, et ils ont servi des dieux étrangers. Mais l’Eternel tira Abraham votre père de la Mésopotamie et l’amena au pays de Chanaan. Il multiplia sa race.—Et Josué continua à leur raconter tout ce qu’ils ont fait et tout ce qui leur est arrivé jusqu’à ce jour. Maintenant donc, dit-il, craignez l’Eternel, et servez-le avec un cœur parfait et sincère. Si vous croyez que ce soit un malheur pour vous de servir l’Eternel, vous êtes dans la liberté de prendre tel parti que vous voudrez. Choisissez aujourd’hui ce qu’il vous plaira; et voyez qui vous devez plutôt adorer, ou les dieux que vos pères ont servis dans la Mésopotamie, ou les dieux des Amorrhéens au pays desquels vous habitez; mais pour ce qui est de moi et de ma maison, nous servirons l’Eternel. Le peuple lui répondit: A Dieu ne plaise que nous abandonnions l’Eternel et que nous servions les dieux étrangers. C’est l’Eternel notre Dieu qui nous a tirés, lui-même, nous et nos pères du pays d’Egypte, de la maison de servitude; qui a fait de très-grands prodiges devant nos yeux, qui nous a gardés dans tout le chemin par où nous avons marché, et parmi tous les peuples par où nous avons passé. C’est lui qui a chassé toutes ces nations, et les Amorrhéens qui habitaient le pays où nous sommes entrés. Nous servirons donc l’Eternel, parce que c’est lui-même qui est notre Dieu. Josué répondit alors au peuple: Vous êtes témoins que vous avez choisi vous-mêmes l’Eternel pour le servir. Ils lui répondirent: Nous en sommes témoins. Josué fit donc alliance de la part de l’Eternel en ce jour-là avec le peuple, et il lui présenta les préceptes et les ordonnances de l’Eternel _à Sichem_¹⁵. Il écrivit aussi toutes ces choses dans le livre de la loi de l’Eternel, et il prit une très-grande pierre qu’il mit sous un chêne placé dans le sanctuaire de l’Eternel, et il dit à tout le peuple: Cette pierre que vous voyez vous servira de monument et de témoignage qu’elle a entendu toutes vos promesses de peur qu’à l’avenir vous ne vouliez le nier, et mentir à l’Eternel votre Dieu.—Il renvoya ensuite le peuple chacun dans ses terres. ¹⁵ Sichem, l’endroit où Josué avait assemblé le peuple, se trouve près de Silo où le sanctuaire était alors déposé. Mort de Josué et d’Éléazar. Après cela Josué fils de Nun, serviteur de l’Eternel, mourut étant âgé de cent dix ans; et ils l’ensevelirent dans la terre qui lui appartenait à Thamnath-Saré, sur la montagne d’Ephraïm, vers le septentrion du mont Gaas. Israël servit l’Éternel pendant toute la vie de Josué et des anciens qui vécurent longtemps après Josué, et qui savaient toutes les choses merveilleuses que l’Eternel avait faites dans Israël. Ils prirent aussi les os de Joseph, que les enfants d’Israël avaient emportés d’Égypte, et ils les ensevelirent à Sichem, dans cet endroit du champ que Jacob avait acheté des enfants d’Hemor père de Sichem, pour cent Kesitah, et qui fut depuis aux enfants de Joseph. Eléazar fils d’Aaron mourut aussi, et ils l’ensevelirent sur une colline qui était à Phinées son fils, et qui lui avait été donnée en la montagne d’Ephraïm. Les juges. Lorsque Josué et toute sa génération et les anciens qui avaient été témoins des œuvres merveilleuses que l’Eternel avait faites dans Israël, furent réunis à leurs pères, il s’en éleva d’autres en leur place qui ne connaissaient ni l’Eternel, ni les merveilles qu’il avait faites en faveur d’Israël. Les enfants d’Israël firent donc le mal à la vue de l’Eternel, et ils servirent Baal. Ils abandonnèrent le Dieu de leurs pères, qui les avait tirés du pays de l’Egypte, et ils servirent des dieux étrangers, les dieux des peuples qui demeuraient autour d’eux. Ayant ainsi abandonné l’Éternel, la juste punition ne tarda pas à venir; Dieu les livra entre les mains de leurs ennemis, il les vendit aux nations ennemies qui demeuraient autour d’eux, et ils ne purent résister à ceux qui les attaquaient. Cependant lorsqu’ils furent réduits à la plus extrême misère, Dieu leur suscita des juges, pour les délivrer des mains de ceux qui les opprimaient; car Dieu écoutait les soupirs des affligés, et les délivrait de ceux qui les avaient pillés et qui en avaient fait un grand carnage. Mais après la mort de ces juges, ils retombaient aussitôt dans leurs péchés, suivaient des dieux étrangers, les servaient et les adoraient. Demeurant ainsi au milieu des peuples idolâtres, qu’ils avaient laissés dans les pays, ils épousèrent leurs filles, et leur donnèrent les leurs en mariage, et ils adorèrent leurs dieux. Ils firent le mal aux yeux de l’Eternel et ils oublièrent leur Dieu, adorant Baalim et Astaroth. L’Éternel les livra donc entre les mains de Chusan-Rasathaïm roi de Mésopotamie, auquel ils furent assujettis pendant huit ans. Mais ayant fait pénitence l’Éternel eut compassion de leurs maux, et il leur suscita un sauveur qui les délivra, ce fut: JUGE 1er. _Othoniel_ fils de Kenaz, frère puîné de Caleb. L’esprit de l’Éternel fut en lui, et il jugea Israël. Et s’étant mis en campagne pour combattre Chusan-Rasathaïm roi de Syrie, l’Eternel le livra entre les mains d’Othoniel qui le défit. Le pays demeura en paix durant quarante ans, et Othoniel fils de Kenaz mourut ensuite. Alors les enfants d’Israël commencèrent encore à faire le mal aux yeux de l’Eternel, qui fortifia contre eux Eglon roi de Moab, parce qu’ils avaient péché devant lui. Ce roi se joignit à Ammon et Amalec, et s’étant avancé sur eux il défit Israël, et se rendit maître de la ville des Palmes. Les enfants d’Israël furent assujettis à Eglon roi de Moab pendant dix-huit ans. Après cela ils prièrent l’Éternel, et il leur suscita un sauveur nommé JUGE 2e. _Ehud_ fils de Gera. Celui-ci vainquit les Moabites, après avoir tué leur roi. Moab fut alors humilié sous la main d’Israël, et le pays demeura en paix pendant quatre-vingts ans. Après Ehud, JUGE 3e. _Samgar_ fils d’Anath fut en sa place. Celui-ci fut aussi le défenseur et le libérateur d’Israël. Les enfants d’Israël recommencèrent cependant encore à faire le mal aux yeux de l’Éternel et furent livrés entre les mains de Jabin, roi des Chananéens, qui régna dans Chazor (ville située dans le district appartenant à la tribu de Naphthali). Jabin, roi très-puissant, les opprima cruellement pendant vingt ans. Il avait pour général de son armée un nommé Sisara. Les enfants d’Israël prièrent donc l’Éternel, et il les secourut de nouveau. La femme de Lapidoth, prophétesse nommée JUGE 4e. _Debora_, jugeait en ce temps-là le peuple d’Israël. Elle s’asseyait sous un palmier qu’on avait appelé de son nom, entre Rama et Bethel, sur la montagne d’Ephraïm, et les enfants d’Israël venaient à elle, pour faire juger tous leurs différends. Elle envoya donc vers Barac fils d’Abinoëm de Cedès de Naphthali et l’ayant fait venir, elle lui dit: Allez, et menez l’armée sur la montagne de Thabor. Prenez avec vous dix mille combattants des enfants de Naphthali et des enfants de Zabulon. Quand vous serez au torrent de Cison, Dieu vous amènera Sisara général de l’armée de Jabin avec ses chariots et toutes ses troupes, et il vous les livrera entre les mains. Barac lui répondit: Si vous venez avec moi, j’irai; si vous ne voulez point venir, je n’irai point. Debora lui dit: Je veux bien aller avec vous; mais la victoire pour cette fois ne vous sera point attribuée, parce que Sisara sera livré entre les mains d’une femme. Debora partit donc aussitôt, et s’en alla à Cedés avec Barac; lequel ayant fait venir ceux de Zabulon et de Naphthali, marcha avec dix mille combattants, étant accompagné de Debora. En même temps Sisara fut averti que Barac fils d’Abinoëm s’était avancé sur la montagne de Thabor. Et il fit assembler ses neuf cents chariots armés de faux, et fit marcher toute son armée au torrent de Cison. Alors Debora dit à Barac: Courage; car voici le jour où l’Éternel a livré Sisara entre vos mains; c’est l’Eternel qui vous conduit. Barac descendit donc de la montagne de Thabor, et dix mille combattants avec lui. En même temps l’Eternel frappa de terreur Sisara, tous ses chariots et toutes ses troupes aux yeux de Barac; de sorte que Sisara sautant de son chariot en bas, s’enfuit à pied. Barac poursuivit les chariots qui s’enfuyaient et toutes les troupes et les battit complétement. Sisara voulant se sauver dans une maison y fut tué par une femme. Dieu confondit donc en ce jour-là Jabin roi de Chanaan devant les enfants d’Israël, qui devenant chaque jour plus puissants, se fortifièrent de plus en plus contre Jabin roi de Chanaan, et l’accablèrent jusqu’à ce qu’il fût ruiné entièrement. En ce jour-là Debora et Barac, fils d’Abinoëm, chantèrent un cantique en l’honneur de l’Eternel, sauveur d’Israël. Le pays demeura ensuite en paix pendant quarante ans. Les enfants d’Israël commencèrent de nouveau à faire mal aux yeux de l’Éternel, et il les livra pendant sept ans entre les mains des Midianites. Ces peuples les tinrent dans une si grande oppression, qu’ils furent obligés de se retirer dans les antres et dans les cavernes des montagnes, et dans les lieux les plus fortifiés pour pouvoir résister aux Midianites. Lorsque les Israélites avaient semé, les Midianites, les Amalécites et les autres peuples de l’Orient venaient sur leurs terres, dressaient leurs tentes, ruinaient tous les grains et ne laissaient aux Israélites rien de tout ce qui était nécessaire à la vie. Israël fut donc extrêmement humilié sous Midian. Et il pria l’Éternel, lui demandant secours contre les Midianites. Alors l’Eternel leur envoya un prophète qui leur dit: «Voici ce que dit l’Eternel le Dieu d’Israël: Je vous ai fait sortir d’Egypte, et je vous ai tirés d’un séjour de servitude: je vous ai délivrés de la main des Egyptiens, et de tous les ennemis qui vous affligeaient: j’ai chassé les Amorrhéens de cette terre à votre entrée, je vous ai donné le pays qui était à eux. Et je vous ai dit: Je suis l’Eternel votre Dieu, ne craignez point les dieux des Amorrhéens dans le pays duquel vous habitez: cependant vous n’avez point voulu écouter ma voix.—Or l’Eternel ayant pitié d’Israël lui envoya encore une fois un sauveur, nommé: JUGE 5e. _Gidéon_ fils de Joas. C’est aussi à ce libérateur que Dieu révéla d’une manière merveilleuse sa volonté céleste. Cet homme commença par détruire l’autel de Baal (c’est pourquoi il fut aussi appelé _Jerobaal_), et construisit un autel à l’Eternel, Dieu d’Israël. Or tous les Midianites, les Amalécites et les peuples d’Orient se joignirent ensemble; et ayant passé le Jourdain, ils vinrent se camper dans la vallée de Jezraël. En même temps l’esprit de l’Éternel remplit Gidéon, qui sonnant de la trompette assembla toute la maison d’Abiezer, sa famille, afin qu’elle le suivît. Il envoya aussi des gens dans toute la tribu de Manassé qui le suivit aussi, et il en envoya d’autres dans la tribu d’Aser, de Zabulon et de Naphthali: et ceux de ces tribus vinrent au-devant de lui. Gidéon se leva donc et vint accompagné de tout le peuple se camper à une fontaine nommée Charod. Quant aux Midianites, ils étaient campés dans la vallée, vers le côté septentrional de la colline appelée Moreh. C’est en ce lieu que Gidéon congédia une grande partie de son armée, de sorte qu’il ne lui resta que trois cents hommes. Gidéon en agissant ainsi se conforma à la volonté divine, pour montrer aux Israélites que ce n’est que la main de Dieu qui les secourt. La nuit suivante, Gidéon accompagné de son serviteur Phura, s’en alla secrètement à l’endroit du camp où étaient les sentinelles de l’ennemi. Et lorsqu’il se fut approché du camp, il entendit un soldat qui contait son songe à un autre, et qui lui rapportait ainsi ce qu’il avait vu: J’ai eu un songe, disait-il, et il me semblait que je voyais comme un pain d’orge cuit dans la cendre, qui roulait en bas et descendait dans le camp des Midianites; et y ayant rencontré une tente, il l’ébranla, la renversa par terre. Celui à qui il parlait lui répondit: Tout cela n’est autre chose que l’épée de Gidéon fils de Joas Israélite; parce que l’Éternel lui a livré entre les mains les Midianites avec toute leur armée. Gidéon ayant entendu ce songe et l’interprétation qui en avait été donnée, adora Dieu. Et étant retourné au camp d’Israël, il dit aux siens: Allons promptement; car l’Eternel a livré entre nos mains le camp de Midian. Et ayant divisé ses trois cents hommes en trois bandes, il leur donna des trompettes à la main et des pots de terre vides avec des lampes au milieu des pots, et il leur dit: Faites ce que vous me verrez faire. J’entrerai par un endroit du camp: faites tout ce que je ferai. Quand vous me verrez sonner de la trompette que j’ai en main, sonnez de même de la trompette tout autour du camp, et criez tous ensemble: Pour l’Éternel et pour Gidéon! Gidéon suivi de ses hommes entra donc par un endroit du camp au commencement de la veille du milieu de la nuit. Et les gardes s’étant réveillés, Gidéon et ses gens commencèrent à sonner de la trompette, et à heurter leurs pots de terre les uns contre les autres. Faisant donc autour du camp en trois endroits différents un bruit terrible, et ayant rompu leurs pots de terre, ils tinrent leurs lampes de la main gauche, et de la droite les trompettes dont ils sonnaient, et crièrent tous ensemble: Pour l’Eternel et pour Gidéon! Chacun resta à son poste autour du camp des ennemis. Aussitôt le camp des Midianites se trouva tout en désordre; ils jetèrent de grands cris, et ils s’enfuirent tous. Les trois cents hommes continuèrent à sonner de la trompette, et les ennemis tournèrent leurs épées les uns contre les autres, et ils s’entre-tuèrent. Ils s’enfuirent jusqu’à Bethsetta et jusqu’au bord d’Abelmehula en Tebbath. Mais les enfants d’Israël des tribus de Naphthali et d’Aser, et tous ceux de la tribu de Manassé se rassemblèrent et poursuivirent les Midianites. Et Gidéon envoya des gens sur toute la montagne d’Ephraïm, pour dire au peuple: Marchez au-devant des Midianites, et saisissez-vous des eaux jusqu’à Bethbera et de tous les passages du Jourdain. C’est par suite de cet avis que l’ennemi fut complétement battu. Gidéon ne se reposa qu’après avoir rejoint les princes des armées ennemies et les avoir faits prisonniers. Les Midianites furent donc humiliés devant les enfants d’Israël, et ils ne purent plus lever la tête. Le pays demeura en paix pendant quarante ans du temps de Gidéon. Après cette victoire remportée sur Midian, tous les enfants d’Israël dirent à Gidéon: Soyez notre prince, et commandez-nous, vous, votre fils et le fils de votre fils, parce que vous nous avez délivrés des mains des Midianites. Gidéon leur répondit: Je ne serai point votre prince, et je ne vous commanderai point, ni moi, ni mon fils, mais ce sera l’Éternel qui sera votre prince et qui vous commandera. Gidéon avait soixante et dix fils, parce qu’il avait plusieurs femmes: et une autre femme qu’il avait à Sichem, eut de lui un fils nommé Abimelech. Gidéon fils de Joas mourut enfin dans une heureuse vieillesse, et il fut enseveli dans le sépulcre de Joas son père à Ephra. Après la mort de Gidéon, les enfants d’Israël se détournèrent du culte de Dieu, et se prostituèrent à l’idolâtrie de Baal. Ils oublièrent l’Éternel leur Dieu, qui les avait délivrés des mains de tous leurs ennemis, dont ils étaient environnés. Ils n’usèrent point de miséricorde envers la maison de Gidéon, pour reconnaître tout le bien qu’il avait fait à Israël. JUGE 6e. Alors _Abimelech_, fils de Gidéon, s’en alla à Sichem trouver les frères de sa mère, et tous ceux de sa famille, et il leur parla à tous en ces termes: Représentez ceci, leur dit-il, à tous les habitants de Sichem: Lequel est le meilleur pour vous, ou d’être dominés par soixante et dix hommes, tous enfants de Jerabaal, ou de n’avoir qu’un seul homme qui vous commande? Et de plus, considérez que je suis votre chair et votre sang. Tous les parents de sa mère ayant donc parlé de lui en cette manière à tous les habitans, ils gagnèrent leur cœur et leur affection pour Abimelech. Ils lui donnèrent alors soixante et dix sicles d’argent, qu’ils prirent du temple de Baal-berith. Abimelech avec cet argent leva une troupe de gens misérables et vagabonds qui le suivirent; et, étant venu en la maison de son père, à Ephra, il tua sur une même pierre les soixante-neuf fils de Jerobaal, ses frères: et de tous les enfans de Jerobaal il ne resta que Joatham, le plus jeune de tous, que l’on cacha. Alors tous les habitans de Sichem s’étant assemblés avec toutes les familles de la ville de Millo, allèrent établir roi Abimelech près du chêne qui est à Sichem. Joatham en ayant reçu la nouvelle, s’en alla au haut de la montagne de Garizim, où, se tenant debout, il cria à haute voix, et parla de cette sorte (voici une des plus belles et des plus anciennes paraboles): Écoutez-moi, habitants de Sichem, comme vous voulez que Dieu vous écoute. Les arbres s’assemblèrent un jour pour s’élire un roi, et ils dirent à l’olivier: Soyez notre roi. L’olivier leur répondit: Puis-je abandonner mon suc et mon huile par laquelle on honore Dieu et les hommes, pour venir m’établir au-dessus des arbres? Les arbres dirent ensuite au figuier: Venez régner sur nous. Le figuier leur répondit: Puis-je abandonner la douceur de mon suc et l’excellence de mes fruits, pour venir m’établir au-dessus des arbres? Les arbres s’adressèrent encore à la vigne, et lui dirent: Venez prendre le commandement sur nous. La vigne leur répondit: Puis-je abandonner mon vin qui est la joie de Dieu et des hommes, pour venir m’établir au-dessus des arbres? Enfin tous les arbres dirent au buisson: Venez, vous serez notre roi. Le buisson leur répondit: Si vous m’établissez véritablement pour votre roi, venez vous reposer sous mon ombre; si vous ne le voulez pas, que le feu sorte du buisson et qu’il dévore les cèdres du Liban. Considérez donc maintenant si vous avez agi avec justice et innocence en établissant ainsi Abimelech pour votre prince; si vous avez bien traité Jerobaal et sa maison; si vous avez reconnu, comme vous le deviez, les grands services de celui qui a combattu pour vous, et qui a exposé sa vie à tant de périls pour vous délivrer des mains des Midianites; et si vous avez dû vous élever, comme vous l’avez fait, contre la maison de mon père, en tuant ses soixante-neuf fils, et en établissant Abimelech, fils de sa servante, pour prince des habitants de Sichem, parce qu’il est votre frère. Si donc vous avez traité comme vous deviez Jerobaal et sa maison, et que vous ne lui ayez point fait d’injustice, qu’Abimelech soit votre bonheur, et puissiez-vous être aussi le bonheur d’Abimelech. Mais si vous avez agi contre toute justice, que le feu sorte d’Abimelech, qu’il consume les habitans de Sichem et la ville de Millo; et que le feu sorte des habitants de Sichem et de la ville de Millo, et qu’il dévore Abimelech... Ayant dit ces paroles, il s’enfuit, et s’en alla à Bera, où il demeura, parce qu’il craignait Abimelech, son frère. Abimelech fut donc prince d’Israël pendant trois ans. Mais Dieu envoya un esprit de haine et d’aversion entre Abimelech et les habitants de Sichem, qui commencèrent bientôt à le détester. Ils lui dressèrent des embûches; un homme qui s’appelait Gaal, se mit à la tête de la révolte, Abimelech le vainquit, attaqua la ville, et l’ayant prise, il en tua tous les habitants, et la détruisit d’une telle sorte, qu’il sema du sel au lieu où elle avait été. Abimelech marcha de là vers la ville de Thèbes, située à trois lieues de distance, l’investit et l’assiégea avec son armée, et la prit. Il y avait au milieu de la ville, une haute tour, où tous les principaux de la ville, hommes et femmes, s’étaient réfugiés: ils en avaient fermé et barricadé la porte et étaient montés sur le haut de la tour pour se défendre par les créneaux. Abimelech était au pied de la tour combattant vaillamment; et, s’approchant de la porte, il tâchait d’y mettre le feu. En même temps, une femme jetant d’en haut un morceau d’une meule de moulin, cassa la tête à Abimelech, et lui en fit sortir la cervelle. Aussitôt il appela son écuyer, et lui dit: Tirez votre épée, et tuez-moi, de peur qu’on ne dise que j’ai été tué par une femme. L’écuyer, faisant ce qu’il lui avait commandé, le tua. Abimelech étant mort, tous ceux d’Israël qui étaient avec lui retournèrent chacun en sa maison. Ainsi Dieu rendit à Abimelech le mal qu’il avait commis contre son père, en tuant ses soixante-neuf frères. Les Sichimites aussi reçurent la punition de ce qu’ils avaient fait; et la malédiction que Joatham, fils de Jerobaal, avait prononcée, tomba sur eux. JUGE 7e. Après Abimelech, _Thola_, fils de Phua, de la tribu d’Issachar, et qui demeurait à Schamir, en la montagne d’Ephraïm, fut établi chef d’Israël; et après avoir jugé Israël pendant vingt-trois ans, il mourut, et fut enseveli dans Schamir. JUGE 8e. _Jaïr_ de Galaad lui succéda, et il fut juge dans Israël pendant vingt-deux ans. Jaïr mourut depuis, et fut enseveli au lieu appelé Camon. Alors les enfants d’Israël recommencèrent à commettre des crimes, firent le mal aux yeux de l’Eternel, et adorèrent les idoles de Baal et d’Astaroth, et les dieux de Syrie et de Sidon, de Moab, des enfants d’Ammon et des Philistins; ils abandonnèrent l’Eternel et cessèrent de l’adorer. La juste punition de Dieu ne tarda donc pas à venir, l’Eternel les livra entre les mains des Philistins et des enfants d’Ammon, qui les affligèrent en les opprimant pendant dix-huit ans. Et lorsque les enfants d’Israël reconnurent leurs péchés, abandonnèrent la mauvaise voie et retournèrent à l’Eternel, le seul vrai Dieu, l’Eternel fut de nouveau avec eux et leur suscita un sauveur qui les délivra des mains de leurs oppresseurs. JUGE 9e. Cet homme s’appelait _Jephté_ (Jiphtach). Comme les enfants d’Ammon combattaient contre Israël et le pressaient vivement, les anciens de Galaad allèrent trouver Jephté au pays de Tob, pour le faire venir à leur secours. Il commença par envoyer des ambassadeurs au roi des enfants d’Ammon en lui faisant remarquer l’injustice de ses prétentions et des guerres qu’il ne cessait de faire aux enfants d’Israël. Mais, voyant que ce roi ne voulait point se rendre à ces représentations amicales, Jephté s’avança à la tête de son armée, passant de Mispha en Galaad jusqu’aux enfants d’Ammon, et fit à l’Eternel ce vœu inconsidéré: Dieu, si vous livrez entre mes mains les enfants d’Ammon, je vous consacrerai le premier qui sortira de la porte de ma maison, et qui viendra au-devant de moi, lorsque je retournerai victorieux du pays des enfants d’Ammon, et je vous offrirai un holocauste. Jephté passa ensuite dans les terres des enfants d’Ammon pour les combattre; et l’Eternel les livra entre ses mains. Il prit et ravagea vingt villes depuis Aroër jusqu’à Mennith. Les enfants d’Ammon perdirent dans cette défaite un grand nombre d’hommes, et ils furent désolés par les enfants d’Israël. Mais lorsque Jephté revenait dans sa maison, sa fille unique, vint au-devant de lui en dansant au son des tambours. Jephté l’ayant vue, déchira ses vêtements, et dit: Ah! malheureux que je suis! ma fille, vous m’avez affligé, vous êtes au nombre de ceux qui me ruinent; car j’ai fait vœu à l’Eternel de lui offrir ce qui se présenterait à moi, et je ne puis faire autre chose que ce que j’ai promis. Sa fille lui répondit: Mon père, si vous avez fait un vœu à l’Eternel, faites de moi tout ce que vous avez promis, après la grâce que vous avez reçue de vous défaire de vos ennemis, et de remporter sur eux une si grande victoire. Accordez-moi seulement, ajouta-t-elle, la prière que je vous fais: Laissez-moi aller sur les montagnes pendant deux mois, afin que je pleure ma virginité avec mes compagnes. Jephté lui répondit: Allez; et il la laissa libre pendant ces deux mois. Elle alla donc avec ses compagnes et ses amies, et pleura sa virginité sur les montagnes. Après les deux mois elle revint trouver son père, et il accomplit le vœu qu’il avait fait à l’égard de sa fille. En effet, elle ne connut point d’homme (il lui fut défendu de se marier). De là vint la coutume qui s’est toujours depuis observée en Israël, que toutes les filles d’Israël s’assemblent une fois l’année, pour pleurer la fille de Jephté de Galaad pendant quatre jours.—Jephté jugea le peuple d’Israël pendant six ans, et il mourut ensuite, et fut enseveli dans une des villes de Galaad. JUGE 10e. _Abezan_ (Ibzan) de Beth-lehem fut après lui juge d’Israël; et après avoir jugé Israël pendant sept ans, il mourut et fut enseveli dans Beth-lehem. JUGE 11e. _Ahialon_ (Elon) de Zabulon lui succéda, et il jugea Israël pendant dix ans; et, étant mort, il fut enseveli à Ahialon, dans le pays de Zabulon. JUGE 12e. _Abdon_, fils d’Illel de Pharathon, fut après lui juge d’Israël pendant huit ans; et étant mort, il fut enseveli à Pharathon, au pays d’Ephraïm, sur la montagne d’Amalec. Les enfants d’Israël commirent encore le mal aux yeux de l’Éternel, qui les livra aux mains des Philistins pendant quarante ans. Alors il appela cette fois encore un héros à leur secours pour les affranchir du joug accablant des Philistins. JUGE 13e. _Samson_ (Schimschon) était le nom de ce héros. Cet homme était doué d’une force si prodigieuse qu’un jour il mit en pièces un jeune lion furieux qui venait à lui. Il causa beaucoup de pertes aux Philistins en leur faisant continuellement la guerre. Un jour il prit trois cents renards qu’il lia deux à deux par la queue en y attachant des flambeaux, et, les ayant allumés, il chassa les renards, afin qu’ils courussent de tous côtés. Ils allèrent courir au travers des blés des Philistins, et y ayant mis le feu, les blés qui étaient déjà en gerbes, et ceux qui étaient encore sur pied, furent brûlés; et le feu même se mettant dans les vignes et dans les plants d’oliviers, consuma tout. Une autre fois il tua mille hommes, armé seulement d’une mâchoire d’âne. Il prit, un jour, les deux portes de la ville d’Aza, les mit sur ses épaules, et les porta sur le haut d’une montagne voisine. Après avoir ainsi vengé son peuple des Philistins, il se laissa entraîner par une femme des Philistins, nommée Délila, qui le trompa en lui arrachant le secret de sa force surnaturelle. Comme cette femme l’importunait sans cesse, il ne put lui résister, et lui découvrant son secret, il lui dit: Le rasoir n’a jamais passé sur ma tête, parce que je suis nazaréen, c’est-à-dire, consacré à Dieu dès le ventre de ma mère. Si l’on me rase la tête, toute ma force m’abandonnera, et je deviendrai faible comme les autres hommes. Elle attendit donc qu’il se fût endormi, fit alors raser les sept touffes de ses cheveux et le livra de cette manière aux mains des Philistins ses ennemis. Ceux-ci l’ayant pris, lui arrachèrent aussitôt les yeux; et, l’ayant mené à Aza chargé de chaînes, ils l’enfermèrent dans une prison, où ils lui firent tourner la meule d’un moulin. Or, ses cheveux commençaient déjà à revenir, Samson ayant alors prié l’Éternel de lui rendre sa première force, il prit les deux colonnes d’une maison dans laquelle beaucoup de Philistins s’étaient assemblés pour faire des festins de réjouissance à leur dieu Dagon, et s’étant emparé de ces deux colonnes sur lesquelles la maison était appuyée, il les ébranla fortement et la maison tomba sur tous ces Philistins et sur Samson lui-même. Ses frères et tous ses parents étant venus en ce lieu, prirent son corps, et l’ensevelirent entre Saraa et Esthaol, dans le sépulcre de son père Manué (Manoach), après qu’il eut été juge d’Israël pendant vingt ans. REMARQUE GÉNERALE. ———— État du peuple israélite à l’époque des juges. Dans ce temps-là, comme nous venons de le voir, il n’y avait pas encore de rois en Israël; chacun faisait ce que bon lui semblait. Or partout où la religion et la justice ne sont protégées par aucun pouvoir, le méchant fait ce qu’il veut, et toute la société humaine tombe dans l’iniquité et la honte. La nation manquait d’unité; des tribus, des villes même agissaient de leur propre autorité. L’arche d’alliance déposée par Josué à Silo, n’était pas en état seule de maintenir le peuple dans son ensemble. Il y en avait très-peu qui se rendissent à Silo avec leurs offrandes; on préférait sacrifier dans la localité sans l’assistance des prêtres. Il en résulta que ceux-ci s’appauvrirent, l’enseignement de la loi de Dieu ne se donna plus, la plus grande ignorance et l’oubli de Dieu se répandirent partout, et ce qui avait particulièrement contribué à ce résultat, c’était la faiblesse qu’on avait montrée à l’égard des peuples idolâtres en ne les dépossédant pas du pays, d’après la volonté de l’Éternel dans la loi de Moïse. Il est donc évident par tout cela, qu’Israël devait nécessairement se trouver dans un triste état, et c’est en nous rappelant seulement quelques événements arrivés à cette époque, que nous en reconnaissons la profonde dépravation. Ainsi le _simulacre de Micha_; _l’abomination des Benjaminites_. Il fut donc déterminé par la sagesse divine que cette condition devait cesser, et en effet elle ne se prolongea que pendant la vie du juge suivant, l’avant-dernier et dont le nom était _Éli_, pontife. JUGE 14e. C’était un homme pieux, mais sans énergie, hors d’état d’arrêter l’impiété et la méchanceté de ses propres fils; il était insensible à leur conduite, et quand le peuple s’en plaignait, ils en étaient quittes pour une légère réprimande. Aussi Dieu fit annoncer de grands malheurs à Éli et à sa maison. Ces malheurs arrivèrent en effet; car lorsque, peu de temps après, la guerre eut éclaté entre les Philistins et les Israélites, ceux-ci furent vaincus, l’arche d’alliance, qu’ils avaient fait chercher à Silo pour les accompagner dans la guerre, prise par l’ennemi, et les deux fils d’Éli tués au milieu du combat. Le jour même un homme de la tribu de Benjamin, échappé du combat, vint en courant à Silo. Il avait ses habits déchirés et sa tête couverte de poussière. Au moment que cet homme arrivait, Éli était assis sur son siége et tourné vers le chemin: car son cœur tremblait de crainte pour l’arche de Dieu. Cet homme étant donc entré dans la ville, et ayant dit les nouvelles du combat, il s’éleva des cris lamentables parmi tout le peuple. Éli, à ces nouvelles, tomba de son siége à la renverse et mourut. Il avait alors quatre-vingt-dix-huit ans: ses yeux s’étaient obscurcis, et il ne pouvait plus voir. Éli avait jugé Israël pendant quarante ans. Les Philistins ayant donc pris l’arche de Dieu, la déposèrent dans le temple de Dagon. Or la main de l’Éternel s’appesantit sur eux, et les réduisit à une extrême désolation. Dieu les frappa de différentes maladies. Les Philistins attribuant ces malheurs à une punition divine, à l’arche d’alliance qui se trouvait parmi eux, la renvoyèrent aux enfants d’Israël, à Cariath-iarim. Les habitants de Cariath-iarim la mirent dans la maison d’Abinadab à Gabaa, et consacrèrent son fils Eléazar, afin qu’il gardât l’arche de l’Éternel. Il s’était passé beaucoup de temps depuis que l’arche de Dieu demeurait à Cariath-iarim; il y avait déjà vingt ans, lorsque toute la maison d’Israël commença à chercher son repos dans l’Éternel. _Samuël, quinzième et dernier juge d’Israël._ Samuël, ce vrai serviteur de l’Éternel, fut dès son enfance consacré par ses parents au service de Dieu. Il fut élevé dans la maison d’Éli, et quoique jeune encore, l’Éternel daigna lui faire connaître par une vision qu’il devait annoncer à Éli la ruine de sa maison. Il se distingua dans l’accomplissement de ses fonctions plus qu’aucun des juges ses prédécesseurs. Il inspira aux Israélites un saint amour et de la confiance en Dieu, rétablit le culte dans sa pureté primitive, instruisit le peuple dans les préceptes de la loi et, ce qui est peut-être le premier de ses mérites, il institua des _écoles de prophètes_ dans lesquelles des jeunes gens capables étaient instruits dans la doctrine de la religion et dans d’autres connaissances utiles, mais principalement dans la poésie et dans l’art de chanter des hymnes religieuses. En ces jours qu’Israël avait commencé à chercher son repos dans l’Éternel, Samuël, connu par tout Israël comme étant le fidèle prophète de l’Éternel, dit à toute la maison d’Israël: «Si vous revenez à l’Éternel de tout votre cœur, ôtez du milieu de vous les dieux étrangers Baal et Astaroth: tenez vos cœurs prêts à obéir à l’Éternel, et ne servez que lui seul; et il vous délivrera de la main des Philistins. Les enfants d’Israël rejetèrent donc Baal et Astaroth, et ne servirent que l’Éternel. Et Samuël leur dit: Assemblez tout Israël à Masphath (Mizpah), afin que je prie l’Eternel pour vous. Et ils s’assemblèrent à Masphath, ils se purifièrent de leur idolâtrie, jeûnèrent ce jour-là et se repentirent de leurs péchés devant Dieu. Or Samuël jugea les enfants d’Israël à Masphath. Les Philistins ayant appris que les enfants d’Israël s’étaient assemblés à Masphath, leurs princes marchèrent contre Israël; ce que les enfants d’Israël ayant appris, ils eurent peur des Philistins. Et ils dirent à Samuël: Ne cessez point d’invoquer pour nous l’Eternel notre Dieu, afin qu’il nous sauve de la main des Philistins. Samuël offrit alors un sacrifice à l’Eternel, le pria pour Israël, et l’Éternel l’exauça. Lorsque Samuël offrait son holocauste, les Philistins commencèrent le combat contre Israël, et l’Éternel fit éclater en ce jour-là son tonnerre avec un bruit épouvantable sur les Philistins, et les frappa de terreur. Ainsi ils furent défaits par Israël. Les Israélites étant sortis de Masphath, poursuivirent les Philistins jusqu’au lieu qui est au-dessous de Bethchar. Et Samuël prit une pierre qu’il mit entre Masphath et Sen; et il appela ce lieu la Pierre de secours, en disant: L’Eternel est venu jusqu’ici à notre secours. Les Philistins furent alors humiliés, et ils n’osèrent plus venir sur les terres d’Israël. Car la main de l’Eternel fut sur les Philistins tant que Samuël gouverna le peuple. Samuël jugea Israël pendant tous les jours de sa vie. Il alla tous les ans à Bethel, à Galgala et à Masphath, et il y rendait la justice à Israël. Il retournait de là à Ramatha, qui était le lieu de sa demeure, et où il jugeait aussi le peuple. Il y bâtit même un autel à l’Eternel. CHAPITRE V. HISTOIRE DU PEUPLE ISRAÉLITE SOUS LES ROIS SAUL, DAVID ET SALOMON. (2882-2964.) Samuël étant devenu vieux, établit ses enfants pour juges sur Israël. Son fils aîné s’appelait Joël, et le second Abia. Ils exerçaient les fonctions de juges dans Bersabée. Mais ils ne marchèrent point dans les voies de leur père; ils se laissèrent corrompre par l’avarice, reçurent des présents, et rendirent des jugements injustes. Tous les anciens d’Israël s’étant donc assemblés, vinrent trouver Samuël à Ramatha, et lui dirent: Vous voilà devenu vieux, et vos enfants ne marchent point dans vos voies. Établissez donc sur nous un roi, comme en ont toutes les nations, afin qu’il nous juge. Cette proposition déplut à Samuël, mais obéissant à la voix de Dieu, il céda à leur demande, et _Saül_, fils de Cis (Kisch), de la tribu de Benjamin, campagnard, fut élu roi d’Israël. Le prophète Samuël ayant fait la connaissance de cet homme d’une manière tout à fait extraordinaire, assembla le peuple, jeta le sort sur toutes les tribus d’Israël et le sort tomba sur la tribu de Benjamin, sur la personne de Saül, fils de Cis. On le chercha donc, mais il ne se trouva point. Sa modestie était si grande, qu’à la nouvelle de son élection il se cacha dans sa maison. On y courut donc, on le prit et on l’emmena; et lorsqu’il fut au milieu du peuple, il parut plus grand que tous les autres de toute la tête. Samuël dit alors au peuple: Vous voyez quel est celui que Dieu a choisi, et qu’il n’y en a point dans tout le peuple qui lui soit semblable. Et tout le peuple s’écria: Vive le roi. Samuël prononça ensuite devant le peuple la loi du royaume, qu’il écrivit dans un livre et il la mit en dépôt devant l’Eternel. Après cela Samuël renvoya tout le peuple, chacun chez soi. Saül s’en retourna aussi chez lui à Gabaa, accompagné d’une partie de l’armée, ceux dont Dieu avait touché le cœur. Mais il y avait aussi parmi eux des gens d’une basse condition qui commencèrent à dire: Comment celui-ci pourrait-il nous sauver? Et ils le méprisèrent, et ne lui firent point de présents; mais Saül feignait de ne pas les entendre. Quelque temps après, Naas (Nachasch) roi des Ammonites se mit en campagne et attaqua Jabès en Galaad. Les habitants de cette ville dirent à Naas: Recevez-nous à composition, et nous vous serons assujettis. Mais Naas leur répondit: La composition que je ferai avec vous, sera de vous arracher à tous l’œil droit, et de vous rendre l’opprobre de tout Israël. Saül entendit ce rapport lorsqu’il retournait de la campagne en suivant ses bœufs. Or, l’esprit de l’Eternel se saisit de lui, il prit ses deux bœufs, les coupa en morceaux, et les envoya par les courriers de Jabès dans toutes les terres d’Israël, en disant: C’est ainsi qu’on traitera les bœufs de tous ceux qui ne se mettront point en campagne pour suivre Saül et Samuël. Alors le peuple fut frappé de la crainte de l’Eternel, et ils sortirent tous en armes, comme s’ils n’eussent été qu’un seul homme. Saül en ayant fait la revue à Bezech, il se trouva dans son armée trois cent mille hommes des enfants d’Israël, et trente mille de la tribu de Juda. Saül s’avança à leur tête, marcha contre les Ammonites, les vainquit et détruisit toute leur armée. Alors le peuple dit à Samuël: Qui sont ceux qui ont dit: Saül sera-t-il notre roi? Donnez-nous ces gens-là, et nous les ferons mourir présentement. Mais Saül leur dit: On ne fera mourir personne en ce jour, parce que c’est le jour dans lequel l’Eternel a sauvé Israël. Après cela Samuël dit au peuple: Venez, allons à Galgala, et y renouvelons l’élection du roi. Tout le peuple alla donc à Galgala, et y reconnut de nouveau Saül pour roi en la présence de l’Eternel. Ils y offrirent des sacrifices à l’Eternel, et Saül et tous les Israélites firent en ce lieu-là une très-grande réjouissance.—Alors Samuël dit à tout le peuple d’Israël: Vous voyez que je me suis rendu à tout ce que vous m’avez demandé, et que je vous ai donné un roi. Votre roi maintenant marche à votre tête. Pour moi je suis vieux et déjà tout blanc, et mes enfants sont avec vous. Ayant donc vécu parmi vous depuis ma jeunesse jusqu’à ce jour, me voici prêt à répondre de toute ma vie. Déclarez devant l’Eternel et devant son oint si j’ai pris le bœuf ou l’âne de personne; si j’ai imputé à quelqu’un de faux crimes; si j’ai opprimé quelqu’un par violence; si j’ai reçu des présents de qui que ce soit; et je vous ferai connaître le peu d’attache que je lui porte en vous le rendant présentement. Ils lui répondirent: Vous ne nous avez point opprimés ni par de fausses accusations, ni par violence, et vous n’avez rien pris de personne. Samuël ajouta: L’Eternel m’est donc témoin aujourd’hui contre vous, et son oint m’est aussi témoin, que vous n’avez rien trouvé en moi qu’on puisse me reprocher. Le peuple lui répondit: Oui, ils en sont témoins. Alors Samuël donna des exhortations au peuple, il lui parla avec énergie, il leur retraça en peu de mots l’histoire du passé, leur rappela tout le mal qu’ils avaient fait aux yeux de l’Eternel et finit par ces mots: Ne quittez plus l’Éternel votre Dieu, servez-le de tout votre cœur. Et l’Eternel n’abandonnera point son peuple à cause de son grand nom; parce qu’il a juré qu’il vous rendra son peuple. Craignez donc l’Eternel, et servez-le dans la vérité et de tout votre cœur; car vous avez vu les merveilles qu’il a faites parmi vous. Si vous persévérez à faire le mal, vous périrez tous ensemble, vous et votre roi. Saül agit contre la volonté de l’Éternel, il est rejeté. Saül régnait depuis un an sur Israël, lorsqu’il choisit trois mille hommes du peuple d’Israël. Il en prit deux mille avec lui à Michmas, et sur la montagne de Bethel, et en donna mille à Jonathan à Gabaa dans la tribu de Benjamin. Jonathan avec ses mille hommes battit la garnison des Philistins qui était à Gabaa. Les Philistins en ayant été aussitôt avertis, s’assemblèrent pour combattre Israël. Ils avaient trente mille chariots, six mille chevaux, et une multitude de gens de pied aussi nombreuse que le sable qui est sur le rivage de la mer. Et ils vinrent se camper à Michmas. Les Israélites se voyant ainsi réduits à l’extrémité, le peuple fut tout abattu, et ils allèrent se cacher dans les cavernes, dans les lieux les plus secrets, dans les rochers, dans les antres et dans les citernes. Les autres Hébreux passèrent le Jourdain, et vinrent au pays de Gad et de Galaad. Saül était encore à Galgala où le reste du peuple alla le suivre. Il attendit sept jours, comme Samuël lui avait ordonné. Cependant Samuël ne venait point à Galgala, et peu à peu le peuple l’abandonnait. Saül dit donc: Apportez-moi l’holocauste et les sacrifices. Et il offrit l’holocauste. Lorsqu’il achevait d’offrir l’holocauste, Samuël arriva. Et Saül alla au-devant de lui pour le saluer. Samuël lui dit: Qu’avez-vous fait? Saül lui répondit: Voyant que le peuple me quittait; que vous n’étiez point venu au jour que vous aviez dit; et que les Philistins s’étaient assemblés à Michmas; j’ai dit en moi-même: Les Philistins vont venir m’attaquer à Galgala, et je n’ai point encore prié l’Eternel. Étant donc contraint par cette nécessité, j’ai offert l’holocauste. Samuël dit à Saül: Vous avez commis une faute, et vous n’avez point gardé les ordres que l’Éternel vous avait donnés. Si vous n’aviez point fait cette faute, l’Éternel aurait maintenant affermi pour jamais votre règne sur Israël. Mais votre règne ne subsistera point à l’avenir. L’Éternel s’est pourvu d’un homme selon son désir, et il a ordonné qu’il fût le chef de son peuple: parce que vous n’avez point observé les ordres qu’il vous a donnés. Action héroïque de Jonathan. Il sortit alors trois partis du camp des Philistins pour aller piller. Or il ne se trouvait point de forgeron dans toutes les terres d’Israël. Car les Philistins avaient pris cette précaution, pour empêcher que les Hébreux ne forgeassent ni épées ni lances. Et lorsque le jour du combat fut venu, hors Saül et Jonathan son fils, il ne se trouva personne de tous ceux qui les avaient suivis, qui eût une lance ou une épée à la main. Et la garde avancée des Philistins étant sortie de Michmas, s’avança vers Gabaa. Un jour il arriva que Jonathan fils de Saül, dit à un jeune homme, qui était son écuyer: Viens avec moi, et passons jusqu’à cette garde avancée des Philistins; peut-être que l’Eternel combattra pour nous; car il lui est également aisé de donner la victoire avec un grand ou avec un petit nombre. Lors donc que la garde des Philistins les eut aperçus tous deux, les Philistins dirent: Voilà les Hébreux qui sortent des cavernes où ils s’étaient cachés. Et les plus avancés de leur camp, s’adressant à Jonathan et à son écuyer, leur dirent: Montez ici, et nous vous ferons voir quelque chose. Car le lieu par où Jonathan tâchait de monter au poste que les Philistins occupaient, était bordé de côté et d’autre de deux rochers fort hauts et fort escarpés. Jonathan monta donc, grimpant avec les mains et les pieds, et son écuyer derrière lui: aussitôt on vit les uns tomber sous la main de Jonathan, et son écuyer qui le suivait tuait les autres. L’effroi se répandit aussitôt dans la campagne, par toute l’armée des Philistins. Tous les gens de leur camp qui étaient allés pour piller, furent frappés d’étonnement, tout le pays fut en trouble, et il parut que c’était Dieu qui avait fait ce miracle. Les sentinelles de Saül jetant les yeux de ce côté-là, virent un grand nombre de gens étendus sur la place, et d’autres qui fuyaient en désordre çà et là. Saül s’avança donc à la tête d’un grand nombre d’Israélites, poursuivit les ennemis qui s’enfuirent bien loin. C’est en ce jour-là que l’Eternel sauva Israël. Or le peuple étant extrêmement las, se jeta sur le butin, prit des brebis, des bœufs et des veaux, et les tua sur la place; et le peuple mangea de la chair avec le sang. Saül en fut averti, et on lui dit que le peuple avait péché contre l’Eternel en mangeant des viandes avec le sang. Saül leur dit: Vous avez violé la loi: qu’on me roule ici une grande pierre, égorgez ici vos bœufs et vos béliers, et après cela vous en mangerez, afin que vous ne péchiez plus contre l’Eternel en mangeant de la chair avec le sang. Alors Saül bâtit un autel à l’Eternel: et ce fut donc là la première fois qu’il lui éleva un autel. Saül ayant ainsi affermi son règne sur Israël, combattait de tous côtés contre tous ses ennemis; contre Moab, contre les enfants d’Ammon, contre Edom, contre les rois de Soba et contre les Philistins. Et de quelque côté qu’il tournât ses armes, il en revenait victorieux. Ayant assemblé son armée, il défit les Amalécites, et délivra Israël de la main de ceux qui pillaient toutes ses terres. Or, Saül eut trois fils, Jonathan, Jischvi et Malchisua, et deux filles, dont l’aînée s’appelait Merab et la plus jeune Michol. La femme de Saül se nommait Achinoam, et était fille d’Achimaas. Le général de son armée était Abner, fils de Ner, cousin germain de Saül. Car Cis, père de Saül, et Ner, père d’Abner, étaient tous deux fils d’Abiel. Pendant tout le règne de Saül il y eut une forte guerre contre les Philistins. Et aussitôt que Saül avait reconnu qu’un homme était vaillant et propre à la guerre, il le prenait auprès de lui. Saül ne remplit pas exactement la volonté de Dieu, en est sévèrement blâmé. Après cela Samuël vint dire à Saül: C’est moi que l’Eternel a envoyé pour vous sacrer roi sur Israël son peuple. Écoutez donc maintenant ce que l’Éternel vous commande: Marchez contre Amalec, détruisez tout ce qui est à lui, et ne désirez rien de ce qui lui appartient. Saül commanda donc au peuple de prendre les armes; et en ayant fait la revue, il se trouva deux cent mille hommes de pied, et dix mille hommes de la tribu de Juda. Il marcha ensuite jusqu’à la ville d’Amalec, et dressa des embuscades le long du torrent. Et il dit aux Cinéens: Allez, retirez-vous, séparez-vous des Amalécites, de peur que je ne vous enveloppe avec eux. Car vous avez usé de miséricorde envers tous les enfans d’Israël lorsqu’ils revenaient de l’Égypte. Les Cinéens se retirèrent donc du milieu des Amalécites. Saül attaqua alors les Amalécites, les vainquit et les détruisit. Il prit vif Agag, roi des Amalécites, l’épargna et réserva aussi ce qu’il y avait de meilleur dans les troupeaux de brebis et de bœufs, dans les béliers, dans les meubles et les habits, et généralement tout ce qui était le plus beau; et Saül et le peuple ne voulurent point le perdre, ils détruisirent seulement tout ce qui se trouva de vil et de méprisable. L’Éternel adressa alors sa parole à Samuël, et lui dit: Je me repens d’avoir fait Saül roi, parce qu’il m’a abandonné, et qu’il n’a point exécuté mes ordres. Samuël en fut attristé, et il pria l’Éternel toute la nuit. Et s’étant levé avant le jour pour aller trouver Saül le matin, on vint lui dire que Saül était venu sur le Carmel, où il s’était dressé un arc de triomphe, et qu’au sortir de là il était descendu à Galgala. Samuël s’étant approché de Saül, Saül lui dit: Béni soyez-vous de l’Éternel. J’ai accompli la parole de l’Éternel. Samuel lui dit: D’où vient donc ce bruit de troupeaux de brebis et de bœufs que j’entends ici, et qui retentit à mes oreilles? Saül lui dit: On les a amenés d’Amalec; car le peuple a épargné ce qu’il y avait de meilleur parmi les brebis et les bœufs pour les offrir à l’Éternel votre Dieu. Samuël dit à Saül: Permettez-moi de vous dire ce que l’Eternel m’a dit cette nuit. Dites, répondit Saül. Samuël ajouta: Si vous vous croyez petit à vos yeux, n’êtes-vous pas devenu le chef de toutes les tribus d’Israël? L’Éternel vous a sacré roi sur Israël; il vous a envoyé à cette guerre, pourquoi donc n’avez-vous point écouté la voix de l’Eternel? Pourquoi vous êtes-vous laissé aller au désir du butin, et pourquoi avez vous péché aux yeux de l’Éternel? Sont-ce des holocaustes et des victimes que l’Éternel demande? et ne demande-t-il pas plutôt que l’on obéisse à sa voix? L’obéissance est meilleure que les victimes, et il vaut mieux se rendre à sa voix que de lui offrir les béliers les plus gras. Car la désobéissance aux ordres de l’Éternel est un péché égal à celui de la magie; et la résistance à sa volonté est un crime égal à l’idolâtrie. Donc puisque vous avez rejeté la parole de l’Eternel, l’Éternel vous a rejeté, et il ne veut plus que vous soyez roi. Saül dit alors à Samuël: J’ai péché, mais honorez-moi maintenant devant les anciens de mon peuple et devant Israël, et revenez avec moi, afin que j’adore l’Eternel notre Dieu. Samuël retourna donc, suivit Saül, et Saül adora l’Eternel. Alors Samuël fit exécuter Agag, roi d’Amalec, et lui dit: Comme votre épée a ravi les enfants à tant de mères; ainsi votre mère parmi les femmes sera sans enfants. Samuël s’en retourna ensuite à Ramatha, et Saül s’en alla en sa maison à Gabaa. Depuis ce jour-là Samuël ne vit plus Saül jusqu’au jour de sa mort, mais il le pleurait sans cesse. David est sacré roi d’Israël. Enfin Dieu se révéla à Samuël, et lui dit: Jusqu’à quand pleurerez-vous Saül, puisque je l’ai rejeté, et que je ne veux plus qu’il règne sur Israël? Emplissez d’huile la corne que vous avez, et venez, afin que je vous envoie à Isaï de Beth-lehem; car je me suis choisi un roi entre ses enfants. Et lorsque Samuël craignit que Saül ne l’apprît et ne le fît mourir, il lui fut conseillé de prendre un veau en prétextant de vouloir sacrifier à l’Eternel, d’appeler Isaï avec ses fils au festin du sacrifice et de sacrer celui que Dieu lui montrerait. Samuël fit donc tout ce que lui fut ordonné; il sacra le plus jeune d’entre les fils d’Isaï, nommé _David_, berger, d’une mine avantageuse, qui s’entendait parfaitement dans la musique et dans la poésie, et se distinguait particulièrement par son courage et sa bravoure. Or, depuis le moment qu’il fut sacré, l’esprit de l’Eternel fut toujours en David; mais en même temps l’esprit de l’Eternel se retira de Saül, qui était agité du malin esprit (de la mélancolie). Alors les officiers de Saül lui dirent: Vous voyez que le malin esprit vous inquiète. S’il plaît au roi notre seigneur de l’ordonner, vos serviteurs chercheront un homme qui sache toucher la harpe, afin qu’il en joue lorsque le malin esprit vous agitera, et que vous en receviez du soulagement. Saül dit à ses officiers: Cherchez-moi donc quelqu’un qui sache bien jouer de la harpe, et amenez-le-moi. L’un d’entre eux lui répondit: J’ai vu l’un des fils d’Isaï de Beth-lehem, qui sait fort bien jouer de la harpe. C’est un jeune homme très-fort, propre à la guerre, sage dans ses paroles, d’une mine avantageuse, et l’Eternel est avec lui. Saül fit donc dire à Isaï: Envoyez-moi votre fils David, qui est avec les troupeaux. Isaï aussitôt prit un âne qu’il chargea de pain, d’une bouteille de vin et d’un chevreau, et il les envoya à Saül par son fils David. David vint donc trouver Saül, et se présenta devant lui. Saül l’aima fort et le fit son écuyer. Il envoya ensuite dire à Isaï: Que David demeure auprès de ma personne; car il a trouvé grâce devant mes yeux. Ainsi toutes les fois que l’esprit malin se saisissait de Saül, David prenait sa harpe et en jouait, et Saül en était soulagé et se trouvait mieux. David triomphe du géant Goliath. Les Philistins s’assemblèrent de nouveau pour combattre Israël, ils se rendirent tous à Socho, dans la tribu de Juda. Saül d’autre part et les enfants d’Israël s’étant aussi assemblés, vinrent en la vallée du Térébinthe, et mirent leur armée en bataille pour combattre les Philistins. Les Philistins étaient d’un côté sur une montagne, Israël était de l’autre sur une autre montagne; et il y avait une vallée entre eux. Or, il arriva qu’un géant sortit du camp des Philistins. Il s’appelait Goliath, il avait six coudées et un palme de haut. Il avait en tête un casque d’airain et était revêtu d’une cuirasse à écailles, qui pesait cinq mille sicles d’airain. Il avait sur les cuisses des cuissards d’airain, et un bouclier d’airain lui couvrait les épaules. La hampe de sa lance était comme ces grands bois dont se servent les tisserands, et le fer de sa lance pesait six cents sicles de fer; et son écuyer marchait devant lui. Cet homme vint se présenter devant les bataillons d’Israël, et leur criait: Pourquoi venez-vous donner bataille? Ne suis-je pas Philistin, et vous serviteurs de Saül? Choisissez un homme d’entre vous, et qu’il vienne se battre seul à seul. S’il ose se battre contre moi et qu’il m’ôte la vie, nous serons vos esclaves; mais si j’ai l’avantage sur lui, et que je le tue, vous serez nos esclaves, et vous nous serez assujettis. C’est ainsi que ce Philistin se présentait au combat le matin et le soir, et cela dura pendant quarante jours.—Saül et tous les Israélites entendant ce Philistin parler de la sorte, étaient frappés d’étonnement, et tremblaient de peur. Or David, fils d’Isaï, avait quitté Saül et s’en était retourné à Beth-lehem pour mener paître les troupeaux de son père. Trois de ses frères, les plus grands, avaient suivi Saül à l’armée. Il arriva qu’au même temps Isaï dit à David son fils: Prends pour tes frères une mesure de farine d’orge et ces dix pains, et cours à eux jusqu’au camp. Porte aussi ces dix fromages pour leur mestre de camp: vois comment tes frères se portent. David s’étant donc levé dès la pointe du jour, laissa à un homme le soin de son troupeau, et s’en alla, chargé, au camp, selon l’ordre qu’Isaï lui avait donné. Il courut au lieu du combat et s’enquit de l’état de ses frères. Lorsqu’il leur parlait encore, ce Philistin, appelé Goliath, sortit du camp des Philistins, et David lui entendit répéter ses provocations habituelles. Tous les Israélites ayant vu Goliath, fuirent devant lui tremblants de peur. Mais David dit à ceux qui étaient auprès de lui: Que donnera-t-on à celui qui tuera ce Philistin et qui ôtera l’opprobre d’Israël? Car, qui est ce Philistin pour insulter ainsi l’armée du Dieu vivant? Et le peuple lui répondit: S’il se trouve un homme qui puisse le vaincre, le roi le comblera de richesses, lui donnera sa fille en mariage, et rendra la maison de son père exempte de tribut dans Israël. Or, ces paroles de David ayant été entendues, elles furent rapportées à Saül. Et Saül l’ayant fait venir devant lui, David lui parla de cette sorte: Que personne ne s’épouvante de ce Philistin; votre serviteur est prêt à aller le combattre. Saül lui dit: Vous ne sauriez résister à ce Philistin, ni combattre contre lui; parce que vous êtes encore tout jeune, et que celui-ci est un homme nourri à la guerre depuis sa jeunesse. David répondit à Saül: Lorsque votre serviteur menait paître le troupeau de son père, il venait quelquefois un lion ou un ours qui emportait un bélier du milieu du troupeau. Alors je courais après eux, je les battais et je leur arrachais le bélier d’entre les dents; et lorsqu’ils se jetaient sur moi, je les prenais à la gorge, je les étranglais et je les tuais. C’est ainsi que votre serviteur a tué un lion et un ours, et il en sera autant de ce Philistin; l’Eternel, qui m’a délivré des griffes du lion et de la gueule de l’ours, me délivrera encore de la main de ce Philistin. Saül dit donc à David: Allez, et que l’Eternel soit avec vous. Il le revêtit ensuite de ses armes, lui mit sur la tête un casque d’airain, et l’arma d’une cuirasse. Et David s’étant mis une épée au côté, commença à essayer s’il pourrait marcher avec ses armes, ne l’ayant point fait jusqu’alors. Et il dit à Saül: Je ne saurais marcher ainsi, parce que je n’y suis pas accoutumé. Ayant donc quitté ses armes, il prit le bâton qu’il avait toujours à la main, choisit dans le torrent cinq pierres très-polies, et les mit dans sa panetière qu’il avait sur lui; et tenant à la main sa fronde, il marcha contre le Philistin. Le Philistin s’avança aussi et s’approchant de David, il le méprisa et lui dit: Suis-je un chien, pour que tu viennes à moi avec un bâton? Et ayant maudit David en jurant par ses dieux, il ajouta: Viens à moi, et je donnerai ta chair à manger aux oiseaux du ciel et aux bêtes de la terre. Mais David dit au Philistin: Tu viens à moi avec l’épée, la lance et le bouclier; mais moi je viens à toi au nom de l’Eternel, du Dieu des troupes d’Israël, auxquelles tu as insulté aujourd’hui. L’Eternel te livrera entre mes mains; je te tuerai, afin que toute la terre sache qu’il y a un Dieu dans Israël, et que toute multitude d’homme reconnaisse que ce n’est point par l’épée ni par la lance que l’Eternel sauve; parce qu’il est l’arbitre de la guerre, et ce sera lui qui vous livrera entre nos mains. Le Philistin s’avança donc, et marcha contre David. Et lorsqu’il en fut proche, David se hâta et courut contre lui pour le combattre. Il mit la main dans sa panetière, il en prit une pierre, la lança avec sa fronde, et en frappa le Philistin dans le front. La pierre s’enfonça dans le front du Philistin, et il tomba le visage contre terre. Ainsi David remporta la victoire sur le Philistin avec une fronde et une pierre seule, il le renversa par terre, et le tua. Et comme il n’avait point d’épée à la main, il courut, et se jeta sur le Philistin: il prit son épée, la tira du fourreau, et acheva de lui ôter la vie.—Les Philistins voyant que le plus vaillant d’entre eux était mort, s’enfuirent. Et les Israélites s’élevant avec un grand cri, les poursuivirent jusqu’à la vallée et aux portes d’Accaron, et pillèrent le camp de leurs ennemis. David et Saül: bravoure et droiture d’un côté, jalousie et ruse de l’autre. Depuis ce moment Jonathan fils de Saül devint l’ami de David; car Jonathan l’aimait comme lui-même, et l’âme de Jonathan s’attacha étroitement à celle de David. Or quand David revint après avoir vaincu le Philistin, les femmes sortirent de toutes les villes d’Israël au-devant du roi Saül en chantant et en dansant, témoignant leur réjouissance avec des tambours et des timbales. Et les femmes dans leurs danses et dans leurs chansons se répondaient l’une à l’autre, et disaient: Saül en a tué mille, et David en a tué dix mille. Cette parole irrita Saül et le mit dans une grande colère. Ils ont donné, dit-il, dix mille hommes à David, et à moi mille: que lui reste-t-il après cela que d’être roi? Depuis ce jour-là Saül ne regarda plus David de bon œil. Le lendemain il arriva que l’esprit malin se saisit de Saül, et il était agité au milieu de sa maison, comme un homme qui a perdu le sens. David jouait de la harpe devant lui, comme il avait accoutumé de faire; et Saül ayant la lance à la main, la poussa contre David, dans le dessein de le percer d’outre en outre contre la muraille: mais David se détourna, et évita le coup par deux fois. Saül commença donc à craindre David, voyant que l’Eternel était avec David, et qu’il s’était retiré de lui. C’est pourquoi il l’éloigna d’auprès de sa personne, et lui donna le commandement de mille hommes. Ainsi David menait le peuple à la guerre et le ramenait. David aussi se conduisait dans toutes ses actions avec une grande prudence, et l’Eternel était avec lui. Saül voyant donc qu’il était très-prudent, commença à s’en défier davantage. Mais tout Israël et tout Juda aimait David, parce que c’était lui qui allait en campagne avec eux, et qui marchait à leur tête. Alors Saül dit à David: Vous voyez Merob ma fille aînée; c’est elle que je vous donnerai en mariage: soyez seulement courageux, et combattez pour le service de l’Eternel. Et en même temps il disait en lui-même: Je ne veux point le tuer de ma main; mais je veux qu’il meure par la main des Philistins. David répondit à Saül: Qui suis-je moi? quelle est la vie que j’ai menée, et quelle est dans Israël la famille de mon père, pour que je devienne gendre du roi? Mais le temps étant venu que Merob fille de Saül devait être donnée à David, elle fut donnée en mariage à Hadriel Molathite. Michal seconde fille de Saül avait de l’affection pour David: ce qui ayant été rapporté à Saül, il en fut bien aise, et fit dire à David qu’il était prêt à lui donner celle-ci en mariage, pourvu qu’il frappât seulement cent Philistins. (Le dessein de Saül était de faire tomber David entre les mains des Philistins.) Les serviteurs de Saül ayant rapporté à David ce que Saül leur avait dit, il agréa la proposition qu’ils lui faisaient, pour devenir gendre du roi. Peu de jours après il marcha avec les gens qu’il commandait et vainquit deux cents Philistins. Saül lui donna donc en mariage sa fille Michal. Et il comprit clairement que l’Eternel était avec David. Quant à Michal sa fille, elle avait beaucoup d’affection pour David. Saül commença à le craindre de plus en plus; et son aversion pour lui croissait tous les jours. Les princes des Philistins se mirent de nouveau en campagne. Et dès qu’ils se présentèrent, David fit paraître plus de prudence que tous les officiers de Saül; de sorte que son nom devint très-célèbre. Jonathan avertit David de la colère de Saül. David se sauve, et se retire auprès de Samuel. Or Saül parla à Jonathan son fils et à tous ses officiers pour les porter à tuer David: mais Jonathan, qui aimait extrêmement David, vint lui en donner avis; et étant avec Saül son père, il lui dit: Seigneur roi, ne faites point de mal à David votre serviteur, parce qu’il ne vous en a point fait, et qu’il vous a rendu au contraire des services très-importants. Il a exposé sa vie à un grand péril; il a vaincu le Philistin, et l’Eternel a sauvé tout Israël d’une manière pleine de merveilles. Vous l’avez vu, et vous en avez eu de la joie. Pourquoi donc voulez-vous maintenant faire une faute en répandant le sang innocent, et en tuant David qui n’est point coupable? Saül ayant entendu ce discours de Jonathan, fut apaisé par ses raisons, et lui répondit: Je vous promets qu’il ne mourra point. Jonathan ensuite fit venir David, lui rapporta tout ce qui s’était passé, le présenta de nouveau à Saül; et David demeura auprès de Saül comme il avait été auparavant. La guerre ensuite recommença, et David marcha contre les Philistins, les combattit, les vainquit et les mit en fuite. Alors le malin esprit se saisit encore de Saül: il était assis dans sa maison une lance à la main. Et comme David jouait de la harpe, Saül tâcha de le percer de sa lance; mais David qui s’en aperçut, se détourna, et la lance sans l’avoir blessé donna dans la muraille. Il s’enfuit aussitôt, et se sauva ainsi pour cette nuit-là. Saül envoya donc ses gardes en la maison de David pour s’assurer de lui, et pour le tuer le lendemain dès le matin. Michal femme de David lui rapporta tout ceci, et lui dit: Si tu ne te sauves cette nuit, tu es mort demain matin. Elle le descendit aussitôt en bas par une fenêtre. David s’échappa, s’enfuit et se sauva auprès de Samuel à Ramatha. David rapporta à Samuel la manière dont Saül l’avait traité, et ils s’en allèrent ensemble à Naïoth (ville libre des prophètes), où ils demeurèrent quelque temps. Sainte inspiration. Quelques gens vinrent en donner avis à Saül. Il envoya alors des archers pour prendre David: mais les archers ayant vu une troupe de prophètes qui prophétisaient, et Samuel qui présidait parmi eux, ils furent saisis eux-mêmes de l’esprit de Dieu, et ils commencèrent à prophétiser comme les autres. Saül en ayant été averti, envoya d’autres gens, qui prophétisèrent aussi comme les premiers. Il en envoya pour la troisième fois, et ils prophétisèrent encore. Alors il s’en alla lui-même à Ramatha, y demanda en quel lieu étaient Samuel et David; on lui répondit: Ils sont à Naïoth de Ramatha. Aussitôt il s’y en alla, et fut saisi lui-même de l’esprit de Dieu, et il prophétisait durant tout le chemin, jusqu’à ce qu’il fût arrivé à Naïoth près de Ramatha. Il se dépouilla de ses vêtements royaux, prophétisa avec les autres devant Samuel, et demeura nu par terre tout le jour et toute la nuit: ce qui donna lieu à ce proverbe: Saül est-il donc aussi devenu prophète? Or David s’enfuit de Naïoth. David et Jonathan renouvellent leur union. David en s’enfuyant rencontra Jonathan. Jonathan se lia de nouveau à David par serment, tâcha de le consoler en lui disant: Non vous ne mourrez point; car mon père ne fait aucune chose, ni grande ni petite, sans m’en parler. Mais David lui dit: Votre père sait très-bien que je suis honoré de vos bonnes grâces. C’est pourquoi il aura dit en lui-même: Il ne faut point que Jonathan sache ceci, afin qu’il ne s’en afflige point; car je vous jure qu’il n’y a pour ainsi dire qu’un point entre ma vie et ma mort. Jonathan lui répondit: Je ferai pour vous tout ce que vous me direz. David l’engagea alors à retourner auprès de Saül son père, à tâcher de le réconcilier avec lui. Jonathan retourna; et David se cacha en attendant dans la campagne. Cependant le projet de réconciliation échoua, Jonathan avait à peine commencé à en parler à son père, que celui-ci se mit en colère contre Jonathan et peu s’en fallut qu’il ne le perçât de sa lance. Jonathan reconnut donc que son père était résolu à faire mourir David. Le lendemain dès la pointe du jour Jonathan vint dans le champ, selon qu’il en était demeuré d’accord avec David et à un signal, donné d’avance, David sortit de sa retraite, fit par trois fois une profonde révérence à Jonathan, et s’étant salués en s’embrassant, ils pleurèrent tous deux. Jonathan dit donc à David: Allez en paix; que ce que nous avons juré tous deux au nom de l’Eternel (l’amitié) demeure ferme; et que l’Eternel, comme nous l’avons dit, soit témoin entre vous et moi, et entre votre race et ma race pour jamais. David en même temps se retira, et Jonathan rentra dans la ville. David se retire à Nobé vers Achimelech et de là chez Achis. Après cela David alla à Nobé chez le prêtre Achimelech. Achimelech fut surpris de sa venue, et lui dit: D’où vient que vous venez seul, et qu’il n’y a personne avec vous? David répondit au prêtre: Le roi m’a donné un ordre, et m’a dit: Que personne ne sache pourquoi je vous envoie, ni ce que je vous ai commandé. J’ai même donné ordre à mes gens de se trouver en tel et tel lieu. Si donc vous avez quelque chose à manger, quand ce ne serait que cinq pains, ou quoi que ce soit, donnez-le-moi. Le prêtre répondit à David: Je n’ai point ici de pain pour le peuple; je n’ai que du pain qui est saint, pourvu que vos gens soient purs. David lui répondit qu’ils étaient purs. Alors le prêtre lui donna du pain sanctifié; car il n’y en avait point là d’autre que les pains exposés devant l’Eternel. Or un certain homme des officiers de Saül se trouva alors au-dedans du tabernacle de l’Eternel. C’était un Iduméen nommé Doëg, et le plus puissant d’entre les bergers de Saül. David dit encore à Achimelech: N’avez-vous point ici une lance ou une épée? Car je n’ai apporté avec moi ni mon épée ni mes armes, parce que l’ordre du roi pressait fort. Le prêtre lui répondit: Voilà l’épée de Goliath le Philistin, que vous avez vaincu dans la vallée de Térébinthe. Elle est enveloppée dans un drap derrière l’éphod. Si vous la voulez, prenez-la; parce qu’il n’y en a point d’autre ici. David lui dit: Il n’y en a point qui vaille celle-là, donnez-la-moi. David partit donc alors; et s’enfuyant de devant Saül, il se réfugia vers Achisch roi des Philistins. Les officiers d’Achisch ayant vu David, dirent au roi: N’est-ce pas là ce David qui est célèbre comme roi dans son pays? N’est-ce pas de lui qu’on a chanté dans les danses publiques: Saül en a vaincu mille, et David dix mille? David fut frappé de ces paroles jusqu’au cœur; et il commença à craindre extrêmement Achisch roi des Philistins. C’est pourquoi il se contrefit le visage devant les Philistins, il se laissait tomber entre leurs mains, il se heurtait contre les poteaux de la porte, et sa salive découlait sur sa barbe. Achisch dit donc à ses officiers: Vous voyez bien que cet homme est fou; pourquoi me l’avez-vous amené? Est-ce que nous n’avons pas assez de fous sans nous amener celui-ci, pour qu’il fasse des folies en ma présence? Doit-on laisser entrer un tel homme dans ma maison? David se cache en différents lieux. Saül fait tuer Achimelech. David sortit donc ainsi de la présence du roi des Philistins, et se retira dans la caverne d’Odollam. Ses frères et toute la maison de son père l’ayant appris, vinrent l’y trouver. Et tous ceux qui avaient de méchantes affaires, et ceux qui étaient accablés de dettes ou mécontents s’assemblèrent près de lui. Il devint leur chef, et il se trouva avec lui environ quatre cents hommes. Il s’en alla de là à Maspha, qui est au pays de Moab; et il dit au roi de Moab: Je vous prie de permettre que mon père et ma mère demeurent avec vous, jusqu’à ce que je sache ce que Dieu ordonnera de moi. Il les laissa auprès du roi de Moab, et ils y demeurèrent tout le temps que David fut dans cette forteresse. Ensuite le prophète Gad dit à David: Ne demeurez point dans ce fort; sortez-en, et allez en la terre de Juda. David partit donc de ce lieu-là, et vint dans le bois de Haret. Or cet Iduméen appelé Doëg, qui se trouvait à Nobé lorsque David vint voir Achimelech, alla rapporter à Saül tout ce qu’il avait vu, en lui disant: J’ai vu le fils d’Isaï à Nobé, chez le prêtre Achimelech, qui lui a donné des vivres, et l’épée même de Goliath le Philistin. Saül croyant alors qu’Achimelech était d’intelligence avec David, le fit tuer, lui et toute la maison de son père, quatre-vingt-cinq prêtres, tous en ce même jour, et fit détruire en même temps tout ce qui se trouvait à Nobé, ville des prêtres. Seulement l’un des fils d’Achimelech, qui s’appelait Abiathar, s’échappa de ce carnage, s’enfuit vers David et vint lui dire que Saül avait tué les prêtres de l’Eternel. David répondit à Abiathar: Je savais bien que Doëg l’Iduméen s’étant trouvé là lorsque j’y étais, ne manquerait pas d’avertir Saül. Je suis cause de la mort de toute la maison de votre père. Demeurez avec moi, et ne craignez rien. Il faudra entreprendre sur ma vie, pour entreprendre sur la vôtre; et si je suis en sûreté, vous y serez aussi. David est persécuté par Saül, mais Dieu le protége et le sauve de tous dangers. Un jour on vint dire à David: Voilà les Philistins qui attaquent Këila (ville voisine de l’endroit où David s’était établi et qui lui fournissait ses vivres) et qui pillent les granges. Il entra alors en conseil avec le prêtre Abiathar pour savoir si c’était la volonté de Dieu d’aller faire la guerre aux Philistins. Le prêtre lui répondit au nom de l’Eternel: Allez, vous déferez les Philistins, et vous sauverez Këila. David s’en alla donc avec ses gens à Këila; il combattit contre les Philistins, les défit, emmena leurs troupeaux, et sauva les habitants de Këila. Lorsque Saül eut appris que David était venu à Këila, il dit: Dieu me l’a livré entre les mains. Il est pris, puisqu’il est entré dans une ville où il y a des portes et des serrures (forteresse). Il commanda donc à tout le peuple de marcher contre Këila, et d’y assiéger David et ses gens. David fut averti que Saül se préparait secrètement à le perdre; il entra alors de nouveau en conseil avec le prêtre Abiathar, consulta l’Eternel, pria Dieu d’être avec lui, et s’en alla aussitôt avec ses gens, qui étaient environ six cents; et étant partis de Këila, ils erraient çà et là, sans savoir où s’arrêter. Saül ayant appris que David s’était retiré de Këila et s’était sauvé, il ne parla plus d’y aller. Or David demeurait dans le désert, en des lieux presque inaccessibles; et il se retira sur la montagne du désert de Ziph, qui était toute couverte d’arbres. Saül le cherchait sans cesse, mais Dieu ne le livra point entre ses mains. David sut que Saül s’était mis en campagne pour trouver moyen de le perdre: c’est pourquoi il demeura toujours au désert de Ziph dans la forêt. Jonathan fils de Saül vint l’y trouver, et le fortifia en Dieu, en lui disant: Ne craignez point; car Saül mon père, quoi qu’il fasse, ne vous trouvera point. Vous serez roi d’Israël, et je serai le second après vous; et mon père le sait bien lui-même. Ils firent donc tous deux alliance devant l’Eternel. Et David demeura dans la forêt, et Jonathan retourna en sa maison. Cependant ceux de Ziph vinrent trouver Saül, et lui dirent: Ne savez-vous pas que David est caché parmi nous, dans l’endroit le plus fort de la forêt? Puis donc que vous désirez de le trouver, vous n’avez qu’à venir, et ce sera à nous à le livrer entre les mains du roi. Saül les remercia et leur dit: Allez donc, je vous prie; faites grande diligence; cherchez avec tous les soins possibles; considérez bien où il peut être: car il se doute bien que je l’observe, et que je l’épie pour le surprendre. Examinez et remarquez tous les lieux où il a accoutumé de se cacher: et lorsque vous vous serez bien assurés de tout, revenez me trouver, afin que j’aille avec vous. Quand il se serait caché au fond de la terre, j’irai l’y chercher avec tout ce qu’il y a d’hommes dans Juda. Ceux de Ziph s’en retournèrent ensuite chez eux avant Saül. Or David et ses gens étaient alors dans le désert de Maon. Saül accompagné de tous ses gens alla donc l’y chercher. David en ayant eu avis, se retira aussitôt au rocher du désert de Maon dans lequel il demeurait. Saül en fut averti, et il entra dans le désert de Maon pour l’y poursuivre. Saül côtoyait la montagne d’un côté et David avec ses gens la côtoyait de l’autre. David désespérait de pouvoir échapper des mains de Saül; car Saül et ses gens tenaient David et ceux qui étaient avec lui, environnés comme dans un cercle pour les prendre. Mais en même temps un courrier vint dire à Saül: Hâtez-vous de venir, car les Philistins sont entrés en grand nombre sur les terres d’Israël. Saül cessa donc de poursuivre David, pour aller tenir tête aux Philistins. David caché dans une caverne empêche qu’on ne tue Saül. David étant sorti de ce lieu-là, se retira vers le nord et demeura à Engaddi dans des lieux très-sûrs. Et Saül étant revenu après avoir poursuivi les Philistins, on vint lui dire que David était dans le désert d’Engaddi. Il prit donc avec lui trois mille hommes choisis de tout Israël, et il se mit en campagne, résolu d’aller chercher David et ses gens jusque sur les rochers les plus escarpés, où il n’y a que les chèvres sauvages qui puissent monter. Et étant venu à des parcs de brebis qu’il rencontra dans son chemin, il se trouva là une caverne, où il entra par suite d’une nécessité naturelle. Or David et ses gens s’étaient cachés dans le fond de la même caverne. Les gens de David lui dirent: Voici le jour dont l’Eternel vous a dit: Je vous livrerai votre ennemi, afin que vous le traitiez comme il vous plaira. David s’étant donc avancé, coupa doucement le bord de la casaque de Saül. Et aussitôt il se repentit en lui-même de ce qu’il lui avait coupé le bord de son vêtement. Et il dit à ses gens: Dieu me garde de commettre cet excès à l’égard de celui qui est mon maître, que de mettre la main sur lui, puisqu’il est l’oint de l’Eternel. David par ces paroles arrêta la violence de ses gens, et les empêcha de se jeter sur Saül. Saül étant sorti de la caverne continua son chemin. David le suivit; et étant sorti de la caverne il cria après lui, et lui dit: Mon seigneur et mon roi. Saül regarda derrière lui, et David fit une profonde révérence en se baissant jusqu’à terre, et lui dit: Pourquoi écoutez-vous les paroles de ceux qui vous disent: David ne cherche qu’une occasion de vous perdre? Vous voyez aujourd’hui de vos yeux que l’Eternel vous a livré entre mes mains dans la caverne. On a voulu me porter à vous ôter la vie, mais je n’ai point voulu le faire. Car j’ai dit: Je ne porterai point la main sur mon maître, parce que c’est l’oint de l’Eternel. Voyez vous-même, mon père, et reconnaissez si ce n’est pas là le bord de votre casaque que je tiens dans ma main, et qu’en coupant l’extrémité de votre vêtement, je n’ai point voulu porter la main sur vous. Après cela considérez, et voyez vous-même que je ne suis coupable d’aucun mal ni d’aucune injustice, et que je n’ai point péché contre vous. Et cependant vous cherchez tous les moyens de m’ôter la vie. Que l’Eternel soit le juge entre vous et moi. Que l’Eternel me rende justice lui-même de vous: mais pour moi je ne porterai jamais la main sur vous. C’est aux impies à faire des actions impies, selon l’ancien proverbe. Que l’Eternel considère ce qui se passe entre vous et moi, qu’il prenne la défense de ma cause, et me délivre de vos mains. Après que David eut parlé de cette sorte à Saül, Saül lui dit: N’est-ce pas là votre voix que j’entends, ô mon fils David? En même temps il jeta un grand soupir, et versa des larmes; et il ajouta: Vous êtes plus juste que moi; car vous ne m’avez fait que du bien, et je ne vous ai rendu que du mal. Et vous m’avez fait connaître aujourd’hui la bonté de votre cœur à mon égard, lorsque l’Eternel m’ayant livré entre vos mains, vous m’avez conservé la vie. Saül continua en disant: Comme je sais que vous régnerez très-certainement, et que vous posséderez le royaume d’Israël, jurez-moi par l’Eternel que vous ne détruirez point ma race après moi, et que vous n’exterminerez point mon nom de la maison de mon père. David le jura à Saül. Ainsi Saül retourna en sa maison; et David et ses gens se retirèrent en des lieux plus sûrs. Conduite de David à l’égard de Nabal. Or il y avait dans le désert de Maon un homme qui avait son bien sur le Carmel. Cet homme était extrêmement riche. Il s’appelait Nabal et sa femme Abigaïl, très-prudente et fort belle. Nabal était un homme dur, brutal et très-méchant. David ayant donc appris dans le désert que Nabal faisait tondre ses brebis, lui envoya dix jeunes hommes auxquels il dit: Allez-vous-en sur le Carmel trouver Nabal, saluez-le de ma part civilement, et dites-lui: J’ai su que vos pasteurs qui étaient avec nous dans le désert, tondent vos brebis; nous ne leur avons jamais fait aucune peine; et ils n’ont rien perdu de leur troupeau pendant tout le temps qu’ils ont été avec nous sur le Carmel. Demandez-le à vos gens, et ils vous le diront. Maintenant donc que vos serviteurs trouvent grâce devant vos yeux: car nous venons à vous dans un jour de joie. Donnez à vos serviteurs et à David votre fils tout ce qu’il vous plaira. Les gens de David étant venus trouver Nabal, lui dirent toutes ces mêmes paroles de la part de David, et attendirent sa réponse. Mais Nabal leur répondit: Qui est David, et qui est le fils d’Isaï? On ne voit autre chose aujourd’hui que des serviteurs qui fuient leurs maîtres. Quoi donc! J’irai prendre mon pain et mon eau et la chair des bêtes que j’ai fait tuer pour ceux qui tondent mes brebis, et je les donnerai à des gens que je ne connais point! Les gens de David étant retournés sur leurs pas, vinrent le retrouver, et lui rapportèrent tout ce que Nabal leur avait dit. Alors David se mit en marche à la tête de quatre cents hommes, résolu de punir sévèrement Nabal. Cependant la prudente Abigaïl, n’en disant rien à son mari, prit en grande hâte deux cents pains, deux vaisseaux pleins de vin, cinq moutons tout cuits, cinq boisseaux de farine d’orge, cent paquets de raisins secs, et deux cents cabas de figues sèches. Elle mit tout cela sur des ânes, et elle dit à ses gens: Allez devant moi, je vais vous suivre. Étant donc montée sur un âne, comme elle descendait au pied de la montagne, elle rencontra David et ses gens, qui venaient dans le même chemin. David disait alors: C’est bien en vain que j’ai conservé dans le désert tout ce qui était à cet homme, sans qu’il s’en soit rien perdu, puisque après cela il me rend le mal pour le bien. Que Dieu traite les ennemis de David dans toute sa sévérité. Or Abigaïl n’eut pas plus tôt aperçu David, qu’elle descendit de son âne. Elle lui fit une profonde révérence, et se jetant à ses pieds, elle lui dit: Que cette iniquité, mon seigneur, tombe sur moi. Permettez seulement, je vous prie, à votre servante de vous parler, et ne refusez pas d’entendre les paroles de votre servante. Que le cœur de mon seigneur ne soit point sensible à l’injustice de Nabal. Car pour moi, mon seigneur, je n’ai point vu les gens que vous avez envoyés. Maintenant donc, je vous prie, recevez ce présent que votre servante vous apporte à vous, et faites-en part aux gens qui vous suivent. Remettez l’iniquité de votre servante: car l’Eternel très-certainement établira votre maison, parce que vous combattez pour lui. Lors donc que l’Eternel vous aura fait tous les grands biens qu’il a prédits de vous, et qu’il vous aura établi chef sur Israël, le cœur de mon seigneur n’aura point ce scrupule ni ce remords, d’avoir répandu le sang innocent, et de s’être vengé lui-même. Et quand Dieu vous aura comblé de biens, vous vous souviendrez, mon seigneur, de votre servante. David répondit à Abigaïl: Que l’Eternel le Dieu d’Israël soit béni de vous avoir envoyée aujourd’hui au-devant de moi. Que votre parole soit bénie, et soyez bénie vous-même de ce que vous m’avez empêché de répandre le sang et de me venger de ma propre main. David reçut donc de la main d’Abigaïl tout ce qu’elle avait apporté, et lui dit: Allez en paix en votre maison; j’ai fait ce que vous m’avez demandé, et j’ai eu de la considération pour votre personne. Abigaïl ensuite vint à Nabal, et elle trouva qu’il faisait dans sa maison un festin de roi. Son cœur nageait dans la joie; car il avait tant bu qu’il était tout ivre. Abigaïl ne lui parla de rien jusqu’au matin. Mais le lendemain, lorsqu’il eut un peu dissipé les vapeurs du vin, sa femme lui rapporta tout ce qui s’était passé; et son cœur fut comme frappé de mort en lui-même, et demeura insensible comme une pierre. Dix jours s’étant passés, l’Eternel frappa Nabal, et il mourut. Plus tard David fit demander Abigaïl en mariage, elle consentit et devint son épouse. David épousa aussi Achinoam qui était de Jezrahel. Mais Saül de son côté donna Michal sa fille, femme de David, à Phalti fils de Laïs, qui était de Gallim. David a de nouveau l’occasion de pouvoir tuer son ennemi et ne le tue pas. Cependant ceux de Ziph vinrent trouver Saül à Gabaa, et lui dirent: David est caché dans nos environs. Saül aussitôt prit avec lui trois mille hommes choisis de tout Israël, et alla chercher David dans le désert de Ziph. Il campa sur la colline d’Hachila, qui est vis-à-vis du désert sur le chemin. David demeurait alors dans ce désert. Comme on lui dit que Saül venait l’y chercher, il envoya des gens pour le reconnaître, et il apprit qu’il était venu en effet. Il partit donc sans bruit, et s’en vint au lieu où était Saül; il remarqua l’endroit où était la tente de Saül, et d’Abner fils de Ner, général de son armée. Et voyant que Saül dormait dans sa tente, et tous ses gens autour de lui, il alla donc la nuit, accompagné d’Abisaï, parmi les gens de Saül, et ils trouvèrent Saül couché et dormant dans sa tente: sa lance était à son chevet fichée en terre, et Abner avec tous ses gens dormaient autour de lui. Alors Abisaï dit à David: Dieu vous livre aujourd’hui votre ennemi entre les mains, je vais donc avec ma lance le percer jusqu’en terre d’un seul coup, et il n’en faudra pas un second. David répondit à Abisaï: Ne le tuez point; car qui lèvera la main sur l’oint de l’Eternel, et sera innocent? Et il ajouta: A moins que l’Éternel ne frappe lui-même Saül, ou que le jour de sa mort n’arrive, ou qu’il ne soit tué dans une bataille, il ne mourra point. Dieu m’a défendu de porter la main sur l’oint de l’Éternel. Prenez seulement sa lance qui est à son chevet, et sa coupe; et allons-nous-en. David prit donc la lance et la coupe, et ils s’en allèrent. Il n’y eut personne qui les vît, ni qui sût ce qui se passait, ou qui s’éveillât; mais tous dormaient, parce que l’Eternel les avait assoupis d’un profond sommeil. David étant passé de l’autre côté, s’arrêta sur le haut d’une montagne qui était fort éloignée du camp. Il appela de là à haute voix les gens de Saül, et Abner fils de Ner, et lui cria: Abner ne répondrez-vous donc point? Abner répondit: Qui êtes-vous qui criez de la sorte, et qui troublez le repos du roi? David dit à Abner: N’êtes-vous pas un homme de cœur? et y a-t-il quelqu’un dans Israël qui vous soit égal? Pourquoi donc n’avez-vous pas gardé le roi votre seigneur? car il est venu quelqu’un d’entre le peuple pour tuer le roi votre seigneur. Ce n’est pas là bien faire votre devoir. Vous méritez tous la mort, pour avoir si mal gardé votre maître, qui est l’oint de l’Eternel. Voyez donc maintenant où est la lance du roi, et la coupe qui était à son chevet. Saül reconnut la voix de David, et lui dit: N’est-ce pas là votre voix que j’entends, mon fils David? David lui dit: C’est ma voix, mon seigneur et mon roi. Et il ajouta: Pourquoi mon seigneur persécute-t-il son serviteur? Qu’ai-je fait? de quel mal ma main est-elle souillée? Que mon sang ne soit donc point répandu sur la terre. Saül lui répondit: J’ai péché; revenez, mon fils David, je ne vous ferai plus de mal à l’avenir, puisque ma vie a été aujourd’hui précieuse devant vos yeux. Car il paraît que j’ai agi comme un insensé, et que j’ai été mal informé de beaucoup de choses. David dit ensuite: Voici la lance du roi; que l’un de vos gens passe ici, et qu’il l’emporte. Au reste l’Éternel rendra à chacun selon sa justice et selon sa fidélité; car l’Éternel vous a livré aujourd’hui entre mes mains, et je n’ai point voulu porter la main sur l’oint de l’Éternel. Comme donc votre âme a été aujourd’hui précieuse devant mes yeux, qu’ainsi mon âme soit précieuse devant les yeux de l’Éternel, et qu’il me délivre de tous les maux. Saül répondit à David: Béni soyez-vous, mon fils David; vous réussirez certainement dans vos entreprises, et votre puissance sera grande. David ensuite s’en alla, et Saül s’en retourna chez lui. La pythonisse d’Endor. Or Samuel était mort; tout Israël l’avait pleuré, et il avait été enterré dans la ville de Ramatha, lieu de sa naissance. En ce temps-là les Philistins assemblèrent de nouveau leurs troupes et se préparèrent à combattre contre Israël. Saül de son côté assembla toutes les troupes d’Israël. Et ayant vu l’armée des Philistins, il fut frappé d’étonnement, et la crainte le saisit jusqu’au fond du cœur. Alors il dit à ses officiers: Cherchez-moi une femme qui ait un esprit de python, afin que j’aille la trouver, et que par son moyen je puisse le consulter. Ses serviteurs lui dirent: Il y a à Endor une telle femme (or Saül avait antérieurement chassé, lui-même, les magiciens et les devins de son royaume). Saül se déguisa donc, prit d’autres habits, et s’en alla accompagné de deux hommes seulement. Il vint la nuit chez cette femme, et lui dit: Découvrez-moi l’avenir par l’esprit de python, qui est en vous, et faites-moi venir celui que je vous dirai. Cette femme lui répondit: Vous savez tout ce qu’a fait Saül, et de quelle manière il a exterminé les magiciens et les devins de toutes ses terres: pourquoi donc me tendez-vous un piége pour me faire perdre la vie? Saül lui jura et lui dit: Il ne vous arrivera de ceci aucun mal. La femme lui dit: Qui voulez-vous que je fasse venir? Il lui répondit: Faites-moi venir Samuel. La pythonisse, rusée qu’elle était, fit alors croire à Saül, par différentes fascinations qu’elle pratiquait devant ses yeux, que Samuël sortait effectivement de la tombe, et lui annonçait toutes sortes de malheurs. Saül tomba aussitôt, et demeura étendu sur la terre: car les paroles qu’il croyait avoir entendues par la bouche de Samuel l’avaient épouvanté; et les forces lui manquèrent, parce qu’il n’avait point mangé de tout ce jour-là. La magicienne vint trouver Saül dans le grand trouble où il était, et lui dit: Permettez que je vous serve un peu de pain, afin qu’ayant mangé vous repreniez vos forces, et que vous puissiez vous mettre en chemin. Saül le refusa, et lui dit: Je ne mangerai point. Mais ses serviteurs et cette femme le contraignirent de manger. Après donc que Saül et ses serviteurs eurent mangé, ils s’en allèrent, et marchèrent toute la nuit. Mort de Saül et de ses fils. Cependant la bataille se donna entre les Philistins et les Israélites. Les Israélites furent mis en fuite devant les Philistins, et il en fut tué un grand nombre sur la montagne de Gilboa. Les Philistins vinrent fondre sur Saül et sur ses fils; ils tuèrent Jonathan, Abinadab et Malchisua fils de Saül, et tout l’effort du combat tomba sur Saül. Les archers le joignirent, et il les craignait excessivement. Alors Saül dit à son écuyer: Tirez votre épée et tuez-moi, de peur que ces Philistins ne m’insultent encore en m’ôtant la vie. Mais son écuyer, tout épouvanté de ces paroles, ne voulut point le faire. Saül prit donc son épée, et se jeta dessus. Et son écuyer voyant qu’il était mort, se jeta lui-même sur son épée, et mourut auprès de lui. Ainsi Saül mourut en ce jour-là, et avec lui trois de ses fils, son écuyer et tous ceux qui se trouvèrent auprès de sa personne. Charité des habitants de Jabès. Le lendemain les Philistins vinrent dépouiller ceux qui avaient été tués à la bataille, et ils trouvèrent Saül avec ses trois fils étendus morts sur la montagne de Gilboa. Ils coupèrent la tête de Saül, et lui ôtèrent ses armes; et ils envoyèrent des courriers par tout le pays des Philistins, pour publier cette nouvelle dans le temple de leurs idoles, et la répandre parmi tous les peuples. Ils mirent les armes de Saül dans le temple d’Astaroth, et ils pendirent son corps sur la muraille de Bethsan. Les habitants de Jabès de Galaad ayant appris le traitement que les Philistins avaient fait à Saül, tous les plus vaillants d’entre eux sortirent, marchèrent toute la nuit; et ayant enlevé le corps de Saül et de ses fils qui étaient sur la muraille de Bethsan, ils revinrent à Jabès, où ils les brûlèrent. Ils prirent leurs os, les ensevelirent dans le bois de Jabès, et jeûnèrent pendant sept jours. David aussi, lorsqu’on vint lui apporter la nouvelle de la mort de Saül et de ses fils, s’abandonna au deuil et aux larmes, et tous ceux qui étaient auprès de lui firent la même chose; ils jeûnèrent jusqu’au soir, à cause de la mort de Saül et de Jonathan son fils, et du malheur du peuple, dont un si grand nombre avait été passé au fil de l’épée. Or David fit une touchante complainte sur la mort de Saül et de Jonathan: Saül et Jonathan, s’écria-t-il, ces princes qui pendant leur vie étaient si aimables, et d’une si grande majesté, n’ont point été divisés dans leur mort même... Votre mort me perce de douleur, Jonathan mon frère, le plus beau des princes. Comment les forts sont-ils tombés? Comment la gloire des armes a-t-elle été anéantie? David règne sur Juda, et Isboseth sur Israël. Combat entre les deux armées. Après cela David consulta l’Éternel, s’il devait aller dans quelqu’une des villes de Juda, et, d’après la volonté de Dieu, il alla à Hebron, avec ses deux femmes, Achinoam et Abigaïl, et il y mena aussi tous ses gens. Alors ceux de la tribu de Juda étant venus à Hebron, y sacrèrent David, afin qu’il régnât sur la maison de Juda. D’un autre côté, Abner fils de Ner, général de l’armée de Saül, prit Isboseth fils de Saül, et l’ayant fait mener dans tout le camp, l’établit roi sur Galaad, sur Ephraïm, sur Benjamin et sur tout Israël. Une guerre acharnée s’ensuivit. Abner sortit de son camp avec les gens d’Isboseth; Joab marcha contre lui avec les troupes de David. Ils se rencontrèrent près de la piscine de Gabaon. Les armées s’étant approchées, s’arrêtèrent l’une devant l’autre: l’une était d’un côté de la piscine, et l’autre de l’autre. Alors Abner dit à Joab: Que quelques jeunes gens s’avancent, et qu’ils s’exercent devant nous. Joab répondit: Qu’ils s’avancent. Aussitôt douze hommes de Benjamin du côté d’Isboseth parurent et se présentèrent; il en vint aussi douze du côté de David. Et chacun d’eux ayant pris par la tête celui qui se présenta devant lui, ils se passèrent tous l’épée au travers du corps, et tombèrent morts tous ensemble. Il se donna aussitôt un rude combat, et Abner fut défait avec ceux d’Israël par les troupes de David. Asaël frère de Joab, ayant poursuivi Abner avec acharnement, fut tué par ce dernier. Au bout de quelque temps une querelle éclata entre Isboseth et Abner, ils se séparèrent, et Abner envoya des courriers à David pour lui dire de sa part: Si vous voulez me donner part à votre amitié, je prendrai votre parti, et je ferai que tout Israël se réunira à vous. David lui répondit: Je le veux bien; je ferai amitié avec vous; mais je vous demande une chose: Vous ne me verrez point que vous ne m’ayez ramené auparavant Michal fille de Saül; à cette condition vous pouvez venir et me voir. David ensuite envoya des courriers à Isboseth fils de Saül, et lui fit dire: Rendez-moi Michal ma femme que j’ai épousée pour cent Philistins. Isboseth envoya querir aussitôt Michal et l’enleva à son mari Phalti fils de Laïs. Après cela Abner parla aux anciens d’Israël, et leur dit: Il y a déjà longtemps que vous souhaitiez avoir David pour roi. Faites-le donc maintenant; puisque l’Éternel a parlé à David, et a dit de lui: Je sauverai par David mon serviteur Israël mon peuple de la main des Philistins et de tous ses ennemis. Abner parla aussi à ceux de Benjamin, et il alla trouver David à Hebron, pour lui dire tout ce qu’Israël et tous ceux de la tribu de Benjamin avaient résolu. Il y arriva accompagné de vingt hommes. David lui fit un festin et à ceux qui étaient venus avec lui. Alors Abner dit à David: Je vous rassemblerai tout Israël afin qu’il vous reconnaisse, ainsi que moi, pour seigneur et pour roi; qu’ils fassent tous alliance avec vous, et que vous régniez sur eux tous comme vous le désirez. David ayant donc reconduit Abner, et Abner s’en étant allé en paix, les gens de David survinrent aussitôt avec Joab, revenant d’un combat entrepris contre des brigands, et rapportant un très-grand butin. Joab apprit donc qu’Abner fils de Ner était venu parler au roi; que le roi l’avait renvoyé, et qu’il s’en était retourné en paix. Joab aussitôt alla trouver le roi, et lui dit: Qu’avez-vous fait? Abner vient de venir vers vous, pourquoi l’avez-vous renvoyé, et l’avez-vous laissé aller? Ignorez-vous quel est Abner, et qu’il n’est venu ici que pour vous tromper, pour reconnaître toutes vos démarches, et pour savoir tout ce que vous faites? Joab étant donc sorti d’avec David, envoya des courriers après Abner, et le fit revenir, sans que David le sût. Et lorsqu’il fut arrivé à Hebron, Joab le tira à part au milieu de la porte pour lui parler, et il le frappa dans le côté, et le tua pour venger la mort de son frère Asaël. David ayant su ce qui s’était passé, dit: Je suis innocent pour jamais devant l’Éternel, moi et mon royaume, du sang d’Abner fils de Ner. Que son sang retombe sur Joab. Alors David dit à Joab et à tout le peuple qui était avec lui: Déchirez vos vêtements, couvrez-vous de sacs, et pleurez aux funérailles d’Abner. Et le roi David marchait après le cercueil. Après qu’Abner eut été enseveli à Hebron, le roi David éleva sa voix, et pleura sur son tombeau, tout le peuple pleurant aussi avec lui. Et le roi témoignant son deuil par ses larmes, dit ces paroles: Abner, vous n’êtes point mort comme les lâches ont coutume de mourir. Vos mains n’ont point été liées et vos pieds n’ont point été chargés de fers; mais vous êtes mort comme les hommes de cœur, qui tombent devant les enfants d’iniquité. Tout le peuple à ces mots redoubla ses larmes. Et tous étant revenus pour manger avec David, lorsqu’il était encore grand jour, David jura et dit: Que Dieu me traite avec toute sa sévérité, si je prends une bouchée de pain, ou quoi que ce soit, avant que le soleil soit couché. Tout le peuple entendit ces paroles; et tout ce que le roi avait fait, lui plut extrêmement. Et le peuple et tout Israël fut persuadé ce jour-là que le roi n’avait aucune part à l’assassinat d’Abner. Le roi dit aussi à ses serviteurs: Ignorez-vous que c’est un prince et un grand prince qui est mort aujourd’hui dans Israël. Pour moi je ne suis roi que par l’onction, et encore peu affermi; et ces gens-ci, ces enfants de Zeruïa, (Joab et les siens) sont trop violents pour moi. Que l’Éternel traite celui qui fait le mal selon sa malice. Isboseth est tué. David venge sa mort. Isboseth fils de Saül ayant appris qu’Abner avait été tué à Hebron, perdit courage, et tout Israël se trouva dans un grand trouble. Isboseth avait à son service deux chefs de troupes dont l’un s’appelait Baana, l’autre Rechab, ils étaient fils de Rimmon de Beroth, de la tribu de Benjamin. Ces deux hommes entrèrent dans la maison d’Isboseth, lorsqu’il dormait sur son lit vers le midi en la plus grande chaleur du jour, le tuèrent, prirent sa tête, et ayant marché toute la nuit par le chemin du désert, ils la présentèrent à David dans Hebron, et lui dirent: Voici la tête d’Isboseth fils de Saül votre ennemi, qui cherchait à vous ôter la vie. David répondit à Rechab et Baana: Vive l’Éternel qui a délivré mon âme, de tous les maux dont elle était pressée. Vous êtes des méchants. Vous avez tué un homme innocent dans sa maison, sur son lit; je vengerai son sang sur vous qui l’avez répandu de vos mains, et je vous exterminerai de dessus la terre. David commanda donc à ses gens de les tuer; ils prirent aussi la tête d’Isboseth, et l’ensevelirent dans le sépulcre d’Abner à Hebron. David est reconnu roi par tout Israël. Il prend la forteresse de Sion. Alors toutes les tribus d’Israël vinrent trouver David à Hebron, et lui dirent: Nous sommes vos os et votre chair. Il y a déjà longtemps que lorsque Saül était notre roi, vous meniez Israël au combat, et vous l’en rameniez: et l’Éternel vous a dit: C’est vous qui serez le pasteur d’Israël mon peuple, c’est vous qui serez le chef d’Israël. Les anciens d’Israël vinrent aussi trouver David à Hebron. David y fit alliance avec eux devant l’Éternel; et ils le sacrèrent roi sur Israël. David avait trente ans lorsqu’il commença à régner, et il régna quarante ans. Il régna sept ans et demi à Hebron sur Juda, et trente-trois ans dans Jérusalem sur Juda et sur Israël. Alors le roi, accompagné de tous ceux qui étaient avec lui, marcha vers Jérusalem contre les Jébuséens qui y habitaient, les assiégea, prit la forteresse de Sion et l’appela la ville de David; il la fit environner, et fit bâtir au dedans. David s’avançait toujours et croissait de plus en plus, et l’Éternel était avec lui. Hiram roi de Tyr envoya aussi des ambassadeurs à David, avec du bois de cèdre, des charpentiers et des tailleurs de pierres; et ils bâtirent la maison de David. Les Philistins ayant appris que David avait été sacré roi sur Israël, s’assemblèrent tous pour lui faire la guerre. Cependant, David les défit. Les Philistins revinrent encore une autre fois, et ils se répandirent dans la vallée de Raphaïm; mais David, secouru par l’Éternel, les battit et les poursuivit depuis Gabaa jusqu’à Gezer. Jérusalem devient la capitale et le siége du temple national. David assembla encore toute l’élite d’Israël au nombre de trente mille hommes, et s’en alla accompagné de tous ceux qui se trouvèrent avec lui, pour amener l’arche de Dieu en présence de laquelle est invoqué le nom de l’Eternel. Ils mirent l’arche de Dieu sur un chariot tout neuf, et l’emmenèrent de la maison d’Abinadab habitant de Gabaa. Oza et Ahio fils d’Abinadab conduisaient le chariot. Cependant David et tout Israël jouaient devant l’Eternel de toutes sortes d’instruments de musique, de la harpe, de la lyre, du tambour, des sistres et des timbales. Mais lorsqu’on fut arrivé près de l’aire de Nachon, les bœufs regimbant, faisaient pencher l’arche, Oza y porta la main, la retint et tomba mort sur la place devant l’arche de Dieu. David en fut affligé et fit entrer l’arche dans la maison d’Obededom de Geth. L’arche de Dieu demeura donc trois mois dans cette maison qui fut bénie de l’Eternel. Alors David en amena l’arche de Dieu en la ville de David avec une grande joie. Il offrit beaucoup de sacrifices à l’Éternel, revêtu d’un éphod de lin, il dansait devant l’arche. Lorsque l’arche fut entrée dans la ville de David, Michal fille de Saül regardant par la fenêtre, vit le roi David qui dansait et qui sautait: et elle s’en moqua en elle-même. Ils firent donc entrer l’arche dans la tente que David avait fait dresser, et la posèrent en la place qui lui avait été destinée: et David bénit le peuple au nom de l’Éternel, donna à chacun du pain, de la viande et du vin. Ensuite il se retira en son palais pour faire part à sa maison de la bénédiction de ce jour. Et Michal fille de Saül étant venue au-devant de David, lui dit: Que le roi d’Israël a eu de gloire aujourd’hui, en se découvrant devant les servantes de ses sujets, et paraissant nu comme ferait un bouffon! David répondit à Michal: Oui, devant l’Éternel qui m’a choisi plutôt que votre père et que toute sa maison, et qui m’a commandé d’être chef de son peuple dans Israël, je danserai et je paraîtrai vil encore plus que je n’ai paru; je serai méprisable à mes yeux, et par là, j’aurai plus de gloire devant les servantes dont vous parlez.—Or Michal fille de Saül n’eut point d’enfants jusqu’à sa mort. David veut bâtir un temple. Dieu lui fait déclarer que ce sera son fils qui le bâtira. Le roi s’étant établi dans sa maison, et l’Éternel lui ayant donné la paix de tous côtés avec tous ses ennemis, il dit au prophète Nathan: Ne voyez-vous pas que je demeure dans une maison de cèdre, et que l’arche de Dieu ne loge que sous des peaux? Nathan dit au roi: Allez, faites tout ce que vous avez dans le cœur, parce que l’Éternel est avec vous. Mais la nuit le prophète Nathan eut une vision pendant laquelle Dieu lui dit: Allez vers mon serviteur David, et dites-lui: Vous ne me bâtirez pas de maison; mais lorsque vous vous serez endormi avec vos pères, je mettrai sur votre trône après vous votre fils, ce sera lui qui bâtira une maison à mon nom; et j’établirai pour jamais le trône de son royaume. Je serai son père, et il sera mon fils; et s’il commet quelque chose d’injuste, je le châtierai avec la verge dont on châtie les hommes. Mais je ne retirerai point ma miséricorde de lui, comme je l’ai retirée de Saül. Votre maison sera stable, vous verrez votre royaume subsister éternellement, et votre trône s’affermira pour jamais. Nathan parla donc à David, et lui rapporta tout ce que Dieu lui avait révélé. Alors le roi David alla se présenter devant l’Eternel et dit: Qui suis-je, ô Éternel mon Dieu, et quelle est ma maison, pour que vous m’ayez élevé à l’état où je me trouve aujourd’hui? Mais cela même a paru peu de chose à vos yeux, ô Eternel mon Dieu, si vous n’assuriez encore votre serviteur de l’établissement de sa maison pour les siècles à venir: car c’est là la loi des enfants d’Adam, ô Eternel mon Dieu. Maintenant donc accomplissez pour jamais la parole que vous avez prononcée sur votre serviteur et sur sa maison, et exécutez ce que vous avez dit; afin que votre nom soit éternellement glorifié, et que l’on dise: L’Eternel est le Dieu d’Israël; et que la maison de votre serviteur David demeure stable devant l’Eternel; car puisque vous la bénissez, Eternel, elle sera bénie pour jamais. Victoires de David. Noms de ses officiers supérieurs. Après cela David battit les Philistins, les humilia, et s’empara d’une de leurs places appelée Meteg-Amah. Il défit aussi les Moabites, les assujettit et les força à lui payer tribut. Il vainquit ensuite beaucoup de rois qui faisaient alliance contre lui; et l’Éternel le conserva dans toutes les guerres qu’il entreprit. Il mit des garnisons dans la Syrie à Damas: la Syrie lui fut assujettie, et lui paya tribut. Il mit de plus des officiers et des garnisons dans l’Idumée; et toute l’Idumée lui fut assujettie. Toutes les armes et les vases d’or, d’argent et d’airain qu’il enleva dans ces guerres furent consacrées à l’Eternel.—David régna donc sur tout Israël, et dans les jugements qu’il rendait, il faisait justice à tout son peuple. Joab fils de Zeruïa était général de ses armées; et Josaphat fils d’Ahilud avait la charge des requêtes. Zadoc fils d’Achitob et Achimelech fils d’Abiathar étaient prêtres; Saraïa était secrétaire. Banaïa fils de Joïada commandait les Cerethiens et les Phelethiens; et les fils de David étaient les officiers les plus puissants. David honore le souvenir de son ami Jonathan en Miphiboseth, fils de ce dernier. David dit alors: N’est-il point resté quelqu’un de la maison de Saül, à qui je puisse faire du bien, à cause de Jonathan? Or il y avait un serviteur de la maison de Saül, qui s’appelait Ziba. Le roi l’ayant fait venir, lui dit: Est-il resté quelqu’un de la maison de Saül, que je puisse combler de grâces? Ziba répondit au roi: Il reste encore un fils de Jonathan, qui est incommodé des jambes. Où est-il? dit David. Il est, dit Ziba, à Lodabar dans la maison de Machir fils d’Ammiel. Le roi David envoya donc des gens, et le fit venir de Lodabar. Miphiboseth fils de Jonathan étant venu devant David, lui fit une profonde révérence en se prosternant en terre. David lui dit: Miphiboseth, ne craignez point, parce que je suis résolu de vous traiter avec toute sorte d’affection, à cause de Jonathan votre père. Je vous rendrai toutes les terres de Saül votre aïeul, et vous mangerez toujours à ma table. Miphiboseth se prosterna devant lui et le remercia. Le roi fit donc venir Ziba serviteur de Saül et lui dit: J’ai donné au fils de votre maître tout ce qui était à Saül. Faites donc valoir ses terres pour lui, afin que le fils de votre maître ait de quoi subsister; or, Miphiboseth mangera toujours à ma table. Hanon outrage les ambassadeurs de David. Défaites des Syriens et des Ammonites. Il arriva que quelque temps après le roi des Ammonites vint à mourir; et Hanon son fils régna en sa place. Alors David dit: Je veux témoigner de l’affection envers Hanon fils de Naas, comme son père m’en a témoigné. Il lui envoya donc des ambassadeurs pour le consoler de la mort de son père. Mais lorsqu’ils furent arrivés sur les terres des Ammonites, les plus grands du pays dirent à Hanon leur maître: Croyez-vous que ce soit pour honorer votre père et pour vous consoler, que David vous ait envoyé ici des ambassadeurs? et ne voyez-vous pas qu’il ne l’a fait que pour reconnaître la principale ville de vos Etats, pour y remarquer toutes choses, et pour la détruire un jour? Hanon fit donc prendre les serviteurs de David, leur fit raser la moitié de la barbe, et leur fit couper la moitié de leurs habits, et les renvoya. David ayant reçu la nouvelle qu’ils avaient été outragés si honteusement, envoya au-devant d’eux, et leur donna cet ordre: Demeurez à Jéricho jusqu’à ce que votre barbe soit crue; et après cela vous reviendrez. Or les Ammonites voyant qu’ils avaient offensé David, envoyèrent vers les Syriens qui firent lever à leurs dépens trente-trois mille hommes. David en ayant été averti, envoya contre eux Joab avec toutes ses troupes. Les Ammonites s’étant mis en campagne, rangèrent leur armée en bataille à l’entrée de la porte de la ville, appelée Midba; et les Syriens étaient dans un corps séparé dans la plaine. Joab voyant donc les ennemis préparés à le combattre de front et par derrière, choisit des gens de toutes les meilleures troupes d’Israël, et marcha en bataille contre les Syriens. Il donna le reste de l’armée à Abisaï, son frère, qui marcha pour combattre les Ammonites. Et Joab dit à Abisaï: Si les Syriens ont de l’avantage sur moi, vous viendrez à mon secours; et si les Ammonites en ont sur vous, je viendrai aussi vous secourir. Agissez en homme de cœur, et combattons pour notre peuple et pour la cité de notre Dieu; et l’Eternel ordonnera de tout comme il lui plaira. Joab attaqua donc les Syriens avec les troupes qu’il commandait; et aussitôt les Syriens fuirent devant lui. Les Ammonites voyant la fuite des Syriens, s’enfuirent aussi eux-mêmes devant Abisaï, et se retirèrent dans la ville. Joab après avoir battu les Ammonites, s’en retourna, et revint à Jérusalem. Les Syriens voyant qu’ils avaient été défaits par Israël, s’assemblèrent tous, et donnèrent à un général nommé Sobach le commandement de leurs armées. David en ayant reçu nouvelle, assembla toutes les troupes d’Israël, passa le Jourdain, et vint à Helam. Les Syriens marchèrent contre David, et lui donnèrent bataille. Mais ils s’enfuirent dès qu’ils furent en présence de l’armée d’Israël, et David tailla en pièces sept cents chariots de leurs troupes, et quarante mille chevaux, et blessa tellement Sobach, général de l’armée, qu’il mourut sur-le-champ. Les Syriens se voyant vaincus par les Israélites, firent la paix avec eux, et leur furent assujettis. Depuis ce temps-là les Syriens appréhendèrent de donner secours aux Ammonites. Péché de David avec Bathseba. L’année suivante, David envoya Joab avec ses officiers et toutes les troupes d’Israël, qui ravagèrent le pays des Ammonites, et assiégèrent Rabba. Mais David demeura à Jérusalem. Pendant que ces choses se passaient, il arriva que David se promenant sur la terrasse de son palais, vit une femme vis-à-vis de lui, sur la terrasse de sa maison; et cette femme était fort belle. Le roi envoya donc savoir qui elle était. On vint lui dire que c’était Bathseba, femme d’Urie Hethéen, un de ses officiers. David ayant envoyé des gens, la fit venir. Il envoya à Joab, par Urie même, une lettre écrite en ces termes: Mettez Urie à la tête de vos gens où le combat sera le plus rude; et faites en sorte qu’il soit abandonné, et qu’il y périsse. Joab exécuta cet ordre, et Urie fut tué dans le combat. La femme d’Urie ayant appris que son mari était mort, le pleura. Et après que le temps du deuil fut passé, David la fit venir en sa maison, et l’épousa. Elle lui enfanta un fils. Et cette action qu’avait faite David déplut à l’Éternel. Or Joab continua à battre Rabbath, ville des Ammonites; et étant près de prendre cette ville royale, il envoya des courriers à David avec ordre de lui dire: J’ai battu jusqu’ici Rabbath; et cette ville environnée d’eau va être prise. Faites assembler le reste du peuple, et venez au siége de la ville, et la prenez; de peur que lorsque je l’aurai détruite, on ne m’attribue l’honneur de cette victoire. David assembla donc tout le peuple, et marcha contre Rabbath; et après quelques combats, il la prit. Il ôta de dessus la tête du roi des Ammonites le diadème qui pesait un talent d’or, et était enrichi de pierreries très-précieuses; et il fut mis sur la tête de David. Il remporta aussi de la ville un fort grand butin et revint ensuite à Jérusalem avec toute son armée. David est repris de son péché, et marque son repentir. Naissance de Salomon. Alors le prophète Nathan vint trouver David au nom de l’Eternel, et lui dit: Il y avait deux hommes dans une ville, dont l’un était riche et l’autre pauvre. Le riche avait un grand nombre de brebis et de bœufs. Le pauvre n’avait rien du tout qu’une petite brebis, qu’il avait achetée et avait nourrie; qui était crue parmi ses enfants en mangeant de son pain, buvant de sa coupe, et dormant dans son sein; et il la chérissait comme sa fille. Un étranger étant venu voir le riche, celui-ci ne voulut point toucher à ses brebis ni à ses bœufs pour lui faire festin; mais il prit la brebis de ce pauvre homme, et la donna à manger à son hôte. David entra dans une grande indignation contre cet homme, et dit à Nathan: Vive l’Eternel, celui qui a fait cette action est digne de mort. Il rendra la brebis au quadruple, pour en avoir usé de la sorte, et pour n’avoir point épargné ce pauvre. Alors Nathan dit à David: C’est vous-même qui êtes cet homme. Voici ce que dit l’Eternel le Dieu d’Israël: Je vous ai sacré roi sur Israël, et vous ai délivré de la main de Saül. Je vous ai mis entre les mains la maison de votre seigneur, et vous ai rendu maître de toute la maison d’Israël et de Juda. Pourquoi donc avez-vous méprisé ma parole, jusqu’à commettre le mal devant mes yeux? Vous avez fait perdre la vie à Urie Hethéen; vous lui avez ôté sa femme, et l’avez prise pour vous; et vous l’avez tué par l’épée des enfants d’Ammon. C’est pourquoi elle ne sortira jamais de votre maison; parce que vous m’avez méprisé et que vous avez pris pour vous la femme d’Urie Hethéen. Voici ce que dit l’Eternel: Je vais vous susciter des maux qui naîtront de votre propre maison; vous avez fait cette action en secret, mais moi je ferai accomplir ce malheur à la vue de tout Israël, et à la vue du soleil. David dit à Nathan: J’ai péché contre l’Eternel! Ayez pitié de moi, ô Dieu, selon votre grande miséricorde: et effacez mon iniquité selon la multitude de vos bontés. Lavez-moi de plus en plus de mon iniquité; et purifiez-moi de mon péché. Car je reconnais mon iniquité; et j’ai toujours mon péché devant les yeux. Nathan lui dit alors: L’Eternel aussi a transféré votre péché; et vous ne mourrez point. Mais néanmoins parce que vous avez été cause par votre péché que les ennemis de l’Eternel ont blasphémé contre lui, le fils qui vous est né va certainement perdre la vie. Nathan retourna ensuite en sa maison. En même temps l’Eternel frappa l’enfant que la femme d’Urie avait eu de David, et le roi fut désespéré. David pria l’Eternel pour l’enfant; il jeûna; il resta dans la solitude, et demeura couché sur la terre. Les principaux de sa maison vinrent le trouver et lui firent de grandes instances pour l’obliger à se lever de terre; mais il le refusa, et ne mangea point avec eux. Le septième jour l’enfant mourut et les serviteurs de David n’osaient lui dire qu’il était mort; car ils s’entre-disaient: Lorsque l’enfant vivait encore et que nous lui parlions, il ne voulait pas nous écouter: combien donc s’affligera-t-il encore davantage, si nous lui disons qu’il est mort? David voyant que ses officiers parlaient tout bas entre eux, reconnut que l’enfant était mort; et le leur ayant demandé, ils lui répondirent qu’il était mort. Aussitôt il se leva de terre, alla au bain, prit de l’huile de parfum; et ayant changé d’habit, il entra dans la maison de l’Éternel, et l’adora: il revint ensuite en sa maison, il demanda qu’on lui servît à manger et il prit de la nourriture. Alors ses officiers lui dirent: D’où vient cette conduite si extraordinaire? Vous jeûniez et vous pleuriez pour l’enfant lorsqu’il vivait encore; et après qu’il est mort, vous vous êtes levé, et vous avez mangé. David leur répondit: J’ai jeûné et j’ai pleuré pour l’enfant tant qu’il a vécu; parce que je disais: Qui sait si l’Éternel ne me le donnera point, et s’il ne lui sauvera point la vie? Mais maintenant qu’il est mort, pourquoi jeûnerais-je? Est-ce que je puis encore le faire revivre? C’est moi plutôt qui irai à lui; et il ne reviendra jamais à moi. David ensuite consola sa femme Bathseba. Bathseba eut ensuite un fils, qu’on appela Salomon; David le remit entre les mains du prophète Nathan, qui lui donna le nom Jedidja, c’est-à-dire, aimable à l’Éternel, parce que l’Éternel l’aimait. Inceste d’Amnon. Vengeance d’Absalom. David avait beaucoup de femmes et beaucoup d’enfants. L’aîné fut Amnon, qu’il eut d’Achinoam de Jezrahel. Le second Cheleab qu’il eut d’Abigaïl veuve de Nabal du Carmel. Le troisième, Absalom qu’il eut de Moacha fille de Tholmaï roi de Gessur. Le quatrième, Adonia fils d’Haggith. Le cinquième, Saphatia fils d’Abital. Le sixième, Jethraam fils d’Egla; et le septième, Salomon fils de Bathseba.—Or il n’y avait point d’homme dans tout Israël qui fût si bien fait ni si beau qu’était Absalom: depuis la pointe des pieds jusqu’à la tête, il n’y avait pas en lui le moindre défaut. Il avait aussi une très-belle sœur qui s’appelait Thamar. Amnon aimait Thamar, et son amour se déclara d’une manière qui n’est pas permise dans Israël. Dès lors Absalom conçut une grande haine contre Amnon. Deux ans après il arriva qu’Absalom fit tondre ses brebis à Baalhasor, qui est près de la tribu d’Éphraïm; et il invita tous les enfants du roi à venir chez lui. Absalom fit préparer un festin de roi. En même temps il donna cet ordre à ses officiers: Prenez garde quand Amnon commencera à être troublé par le vin, et que je vous ferai signe: frappez-le, et le tuez. Ne craignez point, car c’est moi qui vous le commande. Les officiers d’Absalom exécutèrent donc à l’égard d’Amnon le commandement que leur maître leur avait fait; et aussitôt tous les enfants du roi se levant de table, montèrent chacun sur leur mule, et s’enfuirent. Absalom ayant pris la fuite, se retira chez Thalmaï, roi de Gessur, et y demeura trois ans. David cessa alors de le poursuivre, et cédant aux instances de Joab qui demanda la grâce pour Absalom, David lui accorda la permission de retourner à Jérusalem. (La femme de Thecua.) Révolte d’Absalom: David s’enfuit de Jérusalem. Après cela Absalom se fit faire des chariots, prit avec lui des cavaliers, et cinquante hommes qui marchaient devant lui. Et se levant dès le matin, il se tenait à l’entrée du palais; il appelait tous ceux qui avaient des affaires, et qui venaient demander justice au roi. Et il disait à chacun d’eux: D’où êtes-vous? Chacun lui répondait: Votre serviteur est d’une telle tribu d’Israël. Et Absalom lui disait: Votre affaire me paraît bien juste. Mais il n’y a personne qui ait ordre du roi de vous écouter. Et il ajoutait: Oh! qui m’établira juge dans le pays, afin que tous ceux qui ont des affaires viennent à moi, et que je les juge selon la justice! Et lorsque quelqu’un venait lui faire la révérence, il lui tendait la main, le prenait et le baisait. Il traitait ainsi ceux qui venaient de toutes les villes d’Israël demander justice au roi: et il s’insinuait par là dans l’affection de tout Israël.—Un jour Absalom dit au roi David: Permettez-moi d’aller à Hebron, pour y accomplir les vœux que j’ai faits en l’honneur de l’Éternel. Car lorsque j’étais à Gessur en Syrie, j’ai fait ce vœu à Dieu: Si l’Éternel me ramène à Jérusalem, je lui offrirai un sacrifice. Le roi David lui dit: Allez en paix. Et aussitôt il partit, et il s’en alla à Hebron. En même temps Absalom envoya dans toutes les tribus d’Israël des gens qu’il avait gagnés, avec cet ordre: Aussitôt* que vous entendrez sonner la trompette, publiez qu’Absalom règne dans Hebron. Absalom emmena avec lui deux cents hommes de Jérusalem, qui le suivirent simplement sans savoir en aucune sorte le dessein de ce voyage. Absalom fit venir aussi de la ville de Gilo Achitophel conseiller de David. Et lorsqu’on offrait des victimes, il se forma une puissante conspiration; et la foule du peuple qui accourait de toutes parts pour suivre Absalom, croissait de plus en plus. Il vint aussitôt un courrier à David, qui lui dit: Tout Israël suit Absalom de tout son cœur. David dit à ses officiers: Allons-nous-en, fuyons d’ici: car nous ne pourrions éviter de tomber entre les mains d’Absalom. Hâtons-nous de sortir, de peur qu’il ne nous prévienne, qu’il ne nous accable de maux, et qu’il ne fasse passer toute la ville au fil de l’épée. Le roi sortit donc avec toute sa maison; et laissa dix de ses femmes pour garder son palais. Il passa le torrent de Gédron, et tout le peuple allait le long du chemin qui regarde le désert. En même temps le prêtre Zadoc vint accompagné de tous les lévites, qui portaient l’arche de Dieu, et ils la posèrent sur un lieu élevé. Abiathar monta, en attendant que tout le peuple qui sortait de la ville fût passé. Alors le roi dit à Zadoc: Reportez à la ville l’arche de Dieu. Si je trouve grâce devant l’Éternel, il me ramènera, et il me fera voir son arche et son tabernacle. S’il me dit: Vous ne m’agréez point; je suis tout prêt; qu’il fasse de moi ce qu’il lui plaira. Le roi dit encore en parlant à Zadoc: Si vous le jugez convenable, retournez aussi à la ville avec Achimaas votre fils, et Jonathan fils d’Abiathar; retournez l’un et l’autre avec vos deux fils. Pour moi je vais me cacher dans les plaines du désert, jusqu’à ce que vous m’envoyiez des nouvelles de l’état des choses. Zadoc et Abiathar reportèrent donc à Jérusalem l’arche de Dieu, et y demeurèrent. Cependant David montait la colline des Oliviers, et pleurait en montant. Il allait nu-pieds et la tête couverte: et tout le peuple qui était avec lui montait la tête couverte et en pleurant. Or David reçut nouvelles qu’Achitophel même était aussi dans la conjuration d’Absalom; et il dit à Dieu: O Eternel, renversez les conseils d’Achitophel. Car les conseils que donnait Achitophel étaient regardés alors comme des oracles de Dieu même. Lorsque David arrivait au haut de la montagne où il devait adorer l’Eternel, Chusaï d’Arach vint au-devant de lui, ayant ses vêtements déchirés, et la tête couverte de terre. David lui dit: Si vous venez avec moi, vous me serez à charge; mais si vous retournez à la ville, vous pouvez contribuer à dissiper le conseil d’Achitophel. Chusaï ami de David retourna donc à Jérusalem, et Absalom y entrait en même temps. Ziba, Simeï. C’est dans l’adversité que l’on reconnaît les hommes. A peine David avait-il dépassé le haut de la montagne, que Ziba, serviteur de Miphiboseth, vint au-devant de lui avec deux ânes chargés de deux cents pains, de cent paquets de raisins secs, de cent cabas de figues, d’un vaisseau plein de vin. Le roi lui dit: Que voulez-vous faire de cela? Ziba lui répondit: Les ânes sont pour servir de monture à la famille royale, les pains et les figues pour donner à ceux qui vous suivent; et le vin, afin que si quelqu’un se trouve faible dans le désert, il puisse en boire; le roi lui dit: Où est le fils de votre maître? Il est demeuré, dit Ziba, dans Jérusalem, en disant: La maison d’Israël me rendra aujourd’hui le royaume de mon père. Le roi dit à Ziba: Je vous donne tout ce qui était à Miphiboseth. Ziba lui répondit: Ce que je souhaite, mon seigneur et mon roi, c’est d’avoir quelque part à vos bonnes grâces. Le roi David étant venu jusqu’auprès de Bahurim, il en sortit un homme de la maison de Saül, appelé Semeï fils de Gera, qui s’avançant dans son chemin maudissait David, lui jetait des pierres et à tous ses gens. Il maudissait le roi en ces termes: Sors, sors, homme de sang, homme bas. Dieu a fait retomber sur toi tout le sang de la maison de Saül, à la place de laquelle tu as régné. Et maintenant Dieu fait passer le royaume entre les mains d’Absalom ton fils; et tu te vois accablé des maux que tu as faits, parce que tu es un homme de sang. Alors Abisaï fils de Zeruïa dit au roi: Faut-il que celui-ci maudisse le roi mon seigneur? Je vais le tuer. Mais le roi dit à Abisaï: Laissez-le faire; car l’Eternel lui a ordonné de maudire David; et qui osera lui demander pourquoi il l’a fait? Le roi dit encore à Abisaï, et à tous ses serviteurs: Vous voyez que si mon fils cherche à m’ôter la vie, combien plus un fils de Jemini peut-il me traiter de cette sorte! Laissez-le faire, laissez-le me maudire, selon l’ordre qu’il en a reçu de l’Eternel; et peut-être que l’Eternel regardera mon affliction, et qu’il me fera quelque bien pour ces malédictions que je reçois aujourd’hui. David continua donc son chemin accompagné de ses gens et arriva enfin à Bahurim très-fatigué, et ils prirent là un peu de repos. Cependant Absalom entra dans Jérusalem suivi de tous ceux de son parti, et accompagné d’Achitophel. Chusaï d’Arach ami de David vint lui faire la révérence, et lui dit: Mon roi, Dieu vous conserve! Dieu vous conserve, mon roi! Absalom lui répondit: Est-ce donc là la reconnaissance que vous avez pour votre ami? D’où vient que vous n’êtes pas allé avec votre ami? Dieu m’en garde, dit Chusaï; car je serai à celui qui a été élu par l’Éternel, par tout ce peuple et par tout Israël, et je demeurerai avec lui. Et de plus, qui est celui que je viens servir? n’est-ce pas le fils du roi? Je vous obéirai comme j’ai obéi à votre père. Absalom dit alors à Achitophel: Consultons pour voir ce que nous avons à faire. Achitophel dit à Absalom: Abusez des femmes de votre père, qu’il a laissées pour garder son palais; afin que lorsque tout Israël saura que vous avez déshonoré votre père, ils s’attachent plus fortement à votre parti. On fit donc dresser une tente pour Absalom sur la terrasse du palais du roi; et il abusa devant tout Israël des femmes de son père. Achitophel: orgueil, projets manqués, désespoir, suicide. Achitophel dit donc à Absalom: Si vous l’agréez, je vais prendre deux mille hommes choisis; j’irai poursuivre David cette nuit même; et fondant sur lui et sur ses gens qui sont tous las et hors de défense, je les battrai sans peine. Tout le monde fuira, et le roi se trouvant seul, je m’en déferai. Je ramènerai tout ce peuple comme si ce n’était qu’un seul homme; car vous ne cherchez qu’une personne; et après cela tout sera en paix. Cet avis plut à Absalom, et à tous les anciens d’Israël. Néanmoins Absalom dit: Faites venir Chusaï d’Arach, afin que nous sachions aussi son avis. Chusaï étant venu devant Absalom, Absalom lui dit: Voici le conseil qu’Achitophel vient de nous donner; devons-nous le suivre? que nous conseillez-vous? Chusaï répondit à Absalom: Le conseil qu’a donné Achitophel ne me paraît pas bon pour cette fois. Vous n’ignorez pas, ajouta-t-il, quel est votre père; que les gens qui sont avec lui sont très-vaillants, et que maintenant ils ont le cœur irrité. Votre père aussi, qui sait parfaitement la guerre, ne s’arrêtera point avec ses gens. Il est peut-être maintenant caché dans une caverne, ou dans quelque autre lieu qu’il aura choisi. Si quelqu’un de vos gens est tué d’abord, on publiera aussitôt partout que le parti d’Absalom a été battu. Et en même temps les plus hardis de ceux qui vous suivent, seront saisis d’effroi; car tout le peuple d’Israël sait que votre père et tous ceux qui sont avec lui sont très-vaillants. Voici donc, ce me semble, le meilleur conseil que vous puissiez suivre: Faites assembler tout Israël depuis Dan jusqu’à Bersabée, marchez à la tête de votre armée. Et en quelque lieu que puisse être David, nous irons nous jeter sur lui; nous l’accablerons par notre grand nombre, et nous ne laisserons pas un seul de tous les gens qui sont avec lui. Alors Absalom et tous les principaux d’Israël dirent: L’avis de Chusaï est meilleur que celui d’Achitophel. Mais ce fut par la volonté de l’Eternel que le conseil d’Achitophel, qui était le plus sage, fut ainsi détruit, afin que l’Eternel fît tomber Absalom dans le malheur dont il était digne. Achitophel, voyant qu’on n’avait point suivi le conseil qu’il avait donné, s’en alla à la maison qu’il avait en sa ville de Gilo; et ayant mis ordre à toutes ses affaires, il se pendit, et fut enseveli dans le sépulcre de son père. Absalom est tué. Cependant, David instruit de tout ce qui se passait auprès d’Absalom, passa le Jourdain avec tous ses gens et arriva dans la ville de Mahanaïm. Absalom de son côté passa aussi le Jourdain, et se campa avec son armée dans le pays de Galaad. David ayant fait la revue de ses gens, leur dit: Je veux me trouver au combat avec vous. Mais ses gens lui répondirent: Vous ne viendrez point avec nous; car quand les ennemis nous auraient fait fuir, ils ne croiraient pas avoir fait grand’chose; et quand ils auraient taillé en pièces la moitié de nos troupes, ils n’en seraient pas fort satisfaits; parce que vous êtes considéré vous seul comme dix mille hommes. Il vaut donc mieux que vous demeuriez dans la ville, afin que vous soyez en état de nous secourir. Le roi leur dit: Je ferai ce que vous voudrez. Il se tint donc à la porte de la ville, pendant que toute l’armée en sortait en diverses troupes de cent hommes et de mille hommes. En même temps il donna cet ordre aux chefs de l’armée: Conservez-moi mon fils Absalom. Et tout le peuple entendit le roi qui recommandait Absalom à tous ses généraux. L’armée marcha donc en bataille contre Israël, et la bataille fut donnée dans la forêt d’Ephraïm. L’armée de David tailla en pièces celle d’Israël. La défaite fut grande, et vingt mille hommes demeurèrent sur la place. Les gens d’Absalom fuyant après le combat, furent dispersés de tous côtés; et il y en eut beaucoup plus qui périrent dans la forêt, qu’il n’y en eut qui moururent par l’épée en ce jour-là. Absalom même fut rencontré par les gens de David: car lorsqu’il était sur sa mule, et qu’il passait sous un grand chêne fort touffu, sa chevelure s’embarrassa dans les branches du chêne; et sa mule continuant sa course, il demeura suspendu entre le ciel et la terre. Un soldat le vit en cet état, et vint dire à Joab: J’ai vu Absalom pendu à un chêne. Joab dit à celui qui lui avait apporté cette nouvelle: Si tu l’as vu, pourquoi ne lui as-tu pas passé ton épée au travers du corps? je l’aurais donné dix sicles d’argent et un baudrier. Il répondit à Joab: Quand vous me donneriez présentement mille pièces d’argent, je me garderais bien de porter la main sur la personne du fils du roi; car nous avons tous entendu l’ordre que le roi vous a donné, lorsqu’il vous a dit: Conservez-moi mon fils Absalom. Et si je m’étais hasardé à faire une action si téméraire, elle n’aurait pu être cachée au roi; et vous seriez-vous opposé à lui? Joab lui dit: Je ne m’en rapporterai pas à toi; mais je l’attaquerai moi-même en ta présence. Il prit donc en sa main trois dards, dont il perça le cœur d’Absalom. Et lorsqu’il respirait encore, toujours pendu au chêne, dix jeunes écuyers de Joab accoururent, le percèrent de coups et l’achevèrent. Aussitôt Joab fit sonner la retraite; et voulant épargner le peuple, il empêcha ses gens de poursuivre davantage les Israélites qui fuyaient. Ainsi les Israélites se retirèrent chacun chez soi. On emporta Absalom, et on le jeta dans une grande fosse qui était dans le bois, sur laquelle on éleva un grand monceau de pierres. David pleure la mort d’Absalom; il se montre gracieux après sa réintégration. Cependant David était assis entre les deux portes de la ville; et la sentinelle qui était sur la muraille au haut de la porte levant les yeux, vit un homme qui courait, il en avertit le roi. Arrivé près du roi, celui-ci lui demanda: Mon fils Absalom est-il en vie? Cet homme lui répondit: Lorsque Joab m’a envoyé vers vous, j’ai vu s’élever un grand tumulte: c’est tout ce que je sais. Passez, lui dit le roi, et tenez-vous là. Lorsqu’il fut passé, un autre parut, et il dit en arrivant: Mon seigneur et mon roi, je vous apporte une bonne nouvelle; car l’Eternel a jugé aujourd’hui en votre faveur, et vous a délivré de la main de tous ceux qui s’étaient soulevés contre vous. Le roi lui dit: Mon fils Absalom est-il en vie? L’homme lui répondit: Que les ennemis de mon roi, et tous ceux qui se soulèvent contre lui pour le perdre, soient traités comme il l’a été. Le roi étant donc saisi de douleur, se retira dans son appartement et se mit à pleurer. Il s’écriait: Mon fils Absalom, Absalom mon fils! que ne puis-je donner ma vie pour la tienne! mon fils Absalom, Absalom mon fils! En même temps on avertit Joab que le roi était dans les larmes, et qu’il pleurait son fils. Joab vint le consoler. Or toutes les tribus reconnurent de nouveau David comme leur roi; et il gagna le cœur de tous ceux de Juda, qui tous unanimement lui envoyèrent dire: Revenez, vous, et tous ceux qui sont demeurés attachés à votre service. Le roi retourna donc, et s’avança jusqu’au Jourdain; et tout Juda vint au-devant de lui jusqu’à Galgala, pour lui faire passer le fleuve. Lorsque le roi eut passé le Jourdain, Semeï fils de Gera se prosternant devant lui, lui dit: Ne me traitez point selon mon iniquité, mon seigneur, oubliez les injures que vous avez reçues de votre serviteur le jour que vous sortîtes de Jérusalem; et que votre cœur, ô mon seigneur et mon roi, n’en conserve point de ressentiment. Abisaï fils de Zeruïa dit alors: Ces paroles suffiront-elles donc pour sauver la vie de Semeï, après qu’il a maudit l’oint de l’Eternel? Mais David répondit à Abisaï: Pourquoi me devenez-vous aujourd’hui des tentateurs? Est-ce ici un jour à faire mourir un homme d’entre Israël? et puis-je ignorer que je deviens aujourd’hui roi d’Israël? Alors il dit à Semeï: Vous ne mourrez point; et il le lui jura. Miphiboseth fils de Jonathan vint aussi au-devant du roi. Le roi lui dit: Miphiboseth, pourquoi n’êtes-vous point venu avec moi? Miphiboseth lui répondit: Mon seigneur et mon roi, mon serviteur n’a point voulu m’obéir; car étant incommodé des jambes, comme je le suis, je lui avais dit de me préparer un âne pour vous suivre. Et au lieu de le faire, il est venu m’accuser devant mon seigneur. Le roi lui répondit: Ce que j’ai ordonné subsistera. Vous et Ziba vous partagerez vos biens. Miphiboseth répondit au roi: Je consens volontiers qu’il ait tout, puisque je vois mon seigneur et mon roi revenu heureusement en sa maison. Murmure d’Israël contre Juda. Lorsque le roi passa le Jourdain, il fut accompagné de toute la tribu de Juda; et il ne s’y trouva que la moitié du peuple d’Israël. Tous ceux d’Israël s’adressèrent donc en foule au roi, et lui dirent: Pourquoi nos frères de Juda nous ont-ils enlevé le roi sans nous attendre, avant de lui faire passer le Jourdain avec sa maison et toute sa suite? Tous ceux de Juda leur répondirent: C’est que le roi nous touche de plus près; quel sujet avez-vous de vous fâcher? Avons-nous vécu aux dépens du roi; ou nous a-t-on fait quelques présents? Ceux d’Israël leur répondirent: Le roi nous considère comme étant dix fois plus que vous; et ainsi David nous appartient plus qu’à vous. Pourquoi nous avez-vous fait cette injure; et pourquoi n’avons-nous pas été avertis les premiers pour ramener notre roi? Mais ceux de Juda répondirent un peu durement à ceux d’Israël. Un méchant qui s’appelait Seba, Benjamite, excita alors à la révolte, en disant: Nous n’avons que faire de David, et nous n’attendons rien du fils d’Isaï: Israël, retournez chacun dans votre maison. Tous les hommes choisis d’Israël s’étaient ralliés auprès de ce traître. Joab et ses gens vinrent donc l’assiéger dans une ville appelée Abela-Beth-Maacha. Une femme habitant cette ville fit tuer Seba, et tout rentra dans l’ordre. Salomon est établi successeur de David. Le roi David qui, pendant tout son règne, fut forcé de faire la guerre à tant d’ennemis, dut encore, dans les derniers jours de sa vie, marcher à différentes reprises contre les Philistins et leur donner bataille. Cependant l’Éternel son Dieu venait toujours à son secours, et toujours et partout David remportait la victoire. Aussi remercia-t-il l’Éternel; et après que l’Éternel l’eut délivré de la main de tous ses ennemis, ainsi que de la main de Saül, il composa un grand nombre de cantiques en actions de grâces. Or David étant vieux et dans un âge fort avancé, son fils Adonia vint à lui en disant: Ce sera moi qui régnerai. Et il se fit construire des chariots, il avait cinquante hommes pour courir devant lui. Jamais son père ne l’en reprit. (David avait cependant juré, antérieurement déjà, que Salomon, fils de Bethseba, régnerait après lui.) Adonia s’était lié avec Joab, chef de l’armée, et avec le prêtre Abiathar, qui soutenait son parti. Mais le prêtre Zadoc, Banaïa, fils de Joïada, le prophète Nathan, Semeï et Reï, ni les plus vaillants de l’armée de David n’étaient point pour Adonia. Adonia convia donc à un festin tous ses frères, les fils du roi, et tous ceux de Juda qui étaient au service de David. Mais il n’y convia point le prophète Nathan ni Banaïa, ni tous les plus vaillants de l’armée, ni Salomon son frère. Alors Nathan dit à Bethseba, mère de Salomon: Savez-vous qu’Adonia, fils d’Haggith, s’est fait roi, sans que David notre seigneur le sache? Venez donc, et suivez le conseil que je vous donne; sauvez votre vie et celle de votre fils Salomon. Allez vous présenter au roi David, et dites-lui: O roi mon seigneur, ne m’avez-vous pas juré en me disant: Salomon votre fils régnera après moi; et c’est lui qui sera assis sur mon trône? Pourquoi donc Adonia règne-t-il? Pendant que vous parlerez encore au roi, je surviendrai et j’appuierai tout ce que vous aurez dit. Bethseba alla donc trouver le roi. Le roi lui dit: Que désirez-vous? Elle lui répondit: Monseigneur, vous avez juré à votre servante, et vous m’avez dit: Salomon votre fils régnera après moi. Cependant voilà Adonia qui s’est fait roi, sans que vous le sachiez. Or tout Israël a maintenant les yeux sur vous, afin que vous leur déclariez, vous qui êtes mon seigneur et mon roi, qui est celui qui doit être assis après vous sur le trône. Car après que le roi mon seigneur se sera endormi avec ses pères, nous serons traités comme criminels, moi et mon fils Salomon. Elle parlait encore au roi, lorsque le prophète Nathan arriva. Et l’on dit au roi: Voilà le prophète Nathan. Nathan s’étant présenté devant le roi se baissa profondément en terre, et lui dit: O roi mon seigneur, avez-vous dit: Qu’Adonia règne après moi, et que ce soit lui qui soit assis sur mon trône? Car il a convié aujourd’hui tous les fils du roi, les généraux de l’armée et le prêtre Abiathar, qui ont mangé et bu avec lui, en disant: Vive le roi Adonia. Mais pour moi, il ne m’a point convié, ni le prêtre Zadoc, ni Banaïa fils de Joïada, non plus que Salomon votre serviteur. Cet ordre est-il venu de la part du roi mon seigneur? et ne m’avez-vous point déclaré, à moi votre serviteur, qui était celui qui devait être assis après le roi mon seigneur, sur son trône? Le roi David dit: Vive l’Eternel qui a délivré mon âme de toute sorte de périls, ainsi que je vous ai juré, Bethseba, en vous disant: Salomon votre fils régnera après moi; je le ferai aussi, et je l’exécuterai dès aujourd’hui. Bethseba baissant le visage jusqu’en terre, remercia le roi, et lui dit: Que David mon seigneur, vive à jamais. Le roi David dit encore: Faites-moi venir le prêtre Zadoc, et Banaïa fils de Joïada. Lorsqu’ils se furent présentés devant le roi, il leur dit: Prenez avec vous les serviteurs de votre maître; faites monter sur ma mule mon fils Salomon, et menez-le à la fontaine de Gihon, et que Zadoc le prêtre, et Nathan le prophète le sacrent en ce lieu, pour être roi d’Israël; et vous sonnerez aussi de la trompette, et vous crierez: Vive le roi Salomon! Vous retournerez en le suivant, et il viendra s’asseoir sur mon trône; il régnera en ma place, et je lui ordonnerai de gouverner Israël et Juda. Les ordres du roi furent ainsi exécutés; et tout le peuple s’assembla autour de Salomon, plusieurs jouaient de la flûte, et donnaient toutes les marques d’une grande joie. Adonia, et tous ceux qu’il avait conviés, entendirent ce bruit lorsque le festin était déjà achevé; et Joab ayant ouï sonner de la trompette, dit: Que veulent dire ces cris et ce tumulte de la ville? Et lorsqu’on vint leur apporter la nouvelle, ils se levèrent tous saisis de frayeur, et chacun s’en alla de son côté. Adonia craignant Salomon, se leva de même, sortit au plus tôt, et s’en alla embrasser la corne de l’autel. Alors on vint dire à Salomon: Voilà Adonia qui, craignant le roi Salomon, se tient attaché à la corne de l’autel, et qui dit: Que le roi Salomon me jure aujourd’hui qu’il ne fera point mourir son serviteur par l’épée. Salomon répondit: S’il se conduit en homme de bien, il ne tombera pas en terre un seul cheveu de sa tête; mais s’il se conduit mal, il mourra. Le roi Salomon envoya donc vers Adonia, et le fit tirer de l’autel; et Adonia s’étant présenté devant le roi Salomon, le remercia; et Salomon lui dit: Allez-vous-en en votre maison. Avis de David à Salomon et à Israël. Sa mort. Or le jour de la mort de David étant proche, il donna ces avis à Salomon son fils, et lui dit: Me voici près du terme où tous les hommes doivent arriver. Armez-vous de fermeté, et conduisez-vous en homme de cœur. Vous savez de quelle manière m’a traité Joab fils de Zeruïa, et ce qu’il a fait à deux généraux de l’armée d’Israël, à Abner fils de Ner, et à Amasa fils de Jether, qu’il a assassinés, ayant répandu leur sang durant la paix comme il aurait fait durant la guerre. Vous ferez donc selon votre sagesse. Vous témoignerez aussi votre reconnaissance aux fils de Barzellaï de Galaad, et ils mangeront à votre table, parce qu’ils sont venus au-devant de moi lorsque je fuyais devant Absalom votre frère. Vous avez de plus auprès de vous Semeï fils de Gera, qui prononça des malédictions contre moi, et me dit les outrages les plus sanglants; mais parce qu’il vint au-devant de moi quand je passai le Jourdain, je lui jurai que je ne le ferais pas mourir par l’épée. Vous êtes assez sage pour savoir comment vous devez le traiter. Or David assembla à Jérusalem tous les princes d’Israël, les chefs des tribus, les généraux des troupes et les officiers du domaine du roi. Il leur présenta Salomon comme roi destiné à régner sur Israël d’après la volonté de Dieu. Et s’étant levé, il leur dit: Mes frères et mon peuple, je vous conjure maintenant, en présence de toute l’assemblée du peuple d’Israël et devant notre Dieu qui nous entend, de garder avec fidélité tous les commandements de l’Eternel notre Dieu, et de chercher à les connaître, afin que vous possédiez cette terre qui est remplie de biens, et que vous la laissiez pour jamais à vos enfants après vous. Et vous, mon fils Salomon, appliquez-vous à reconnaître le Dieu de votre père, et servez-le avec un cœur parfait et une pleine volonté; car l’Eternel sonde tous les cœurs, et il pénètre toutes les pensées de l’esprit. Si vous le cherchez, vous le trouverez; mais si vous l’abandonnez, il vous rejettera. Le roi David dit ensuite: J’avais eu la pensée de bâtir un temple pour y faire reposer l’arche de l’alliance de l’Eternel, et j’ai préparé tout ce qui était nécessaire pour la construction de cet édifice; mais Dieu m’a dit: Vous ne bâtirez point une maison à mon nom, parce que vous êtes un homme de guerre, et que vous avez répandu le sang. Donc puisque l’Eternel vous a choisi pour bâtir la maison de son sanctuaire, armez-vous de force et accomplissez son ouvrage. Or David donna à son fils Salomon le plan du temple et de toutes les choses consacrées au temple. Il lui remit aussi l’ordre et la distribution des prêtres et des lévites destinés à remplir toutes les fonctions de la maison de l’Eternel. Il lui remit aussi un grand nombre d’objets nécessaires à la construction du temple: de l’or, de l’argent, du cuivre, du fer, du bois, du marbre et toutes sortes de pierres précieuses. Et les plus considérables parmi le peuple offrirent aussi leurs présents en grande quantité. Et tout le monde témoigna une grande joie en faisant ses offrandes volontaires, parce qu’ils les offraient de tout leur cœur à l’Eternel. Le roi David était aussi tout transporté de joie. C’est pourquoi il commença à louer Dieu devant toute cette multitude, et il dit: Eternel, qui êtes le Dieu d’Israël notre père, vous êtes béni dans tous les siècles. C’est à vous, Eternel, qu’appartient la grandeur, la puissance, la gloire et la victoire, et c’est à vous que sont dues les louanges. Car tout ce qui est dans le ciel et sur la terre est à vous. C’est pourquoi nous vous rendons maintenant nos hommages à vous qui êtes notre Dieu, et nous donnons à votre saint nom les louanges qui lui sont dues. Je sais, mon Dieu, que vous sondez les cœurs, et que vous aimez la simplicité. C’est pourquoi je vous ai aussi offert toutes ces choses dans la simplicité de mon cœur et avec joie; et j’ai été ravi de voir aussi tout ce peuple rassemblé en ce lieu vous offrir de même ses présents. Eternel, qui êtes le Dieu de nos pères, Abraham, Isaac et Israël, conservez éternellement cette volonté dans leur cœur, et faites qu’ils demeurent toujours fermes dans cette résolution de vous rendre toute la vénération et tout le culte qu’ils vous doivent. Donnez aussi à mon fils Salomon un cœur parfait, afin qu’il garde vos commandements et vos paroles, qu’il observe et accomplisse tous vos ordres; qu’il bâtisse votre maison, pour laquelle j’ai préparé toutes les choses nécessaires. David dit ensuite à toute l’assemblée: Bénissez l’Eternel notre Dieu; et toute l’assemblée bénit l’Eternel le Dieu de leurs pères; et se prosternant ils adorèrent Dieu, et rendirent ensuite leurs hommages au roi. Et le lendemain ils offrirent de nombreux sacrifices en l’honneur de l’Éternel; ils firent de grandes réjouissances, et sacrèrent une seconde fois Salomon fils de David pour être roi sur Israël. David s’endormit donc avec ses pères, et il fut enseveli dans la ville de David. Le temps du règne de David sur Israël fut de quarante ans. Il régna sept ans à Hebron, et trente-trois dans Jérusalem. Salomon demande à Dieu la sagesse. Dans ce temps le peuple sacrifiait toujours sur les hauteurs, parce que jusqu’alors on n’avait point encore bâti de temple au nom de l’Eternel. Salomon s’en alla donc à Gabaon pour y sacrifier, parce que c’était là le plus considérable de tous les hauts lieux. L’Eternel lui apparut alors en songe pendant la nuit, et lui dit: Demandez-moi ce que vous voulez que je vous donne. Salomon lui répondit: Vous avez usé d’une grande miséricorde envers David mon père, selon qu’il a marché devant vous dans la vérité et dans la justice, et que son cœur a été droit à vos yeux; vous lui avez conservé votre grande miséricorde, et vous lui avez donné un fils qui est assis sur son trône. Maintenant donc, ô Eternel mon Dieu, vous m’avez fait régner, moi qui suis votre serviteur, en la place de David mon père; mais je ne suis encore qu’un enfant qui ne sait de quelle manière il doit se conduire. Et votre serviteur se trouve au milieu de votre peuple que vous avez choisi, d’un peuple infini qui est innombrable à cause de sa multitude. Je vous supplie donc de donner à votre serviteur un cœur docile, afin qu’il puisse juger votre peuple, et discerner entre le bien et le mal: car qui pourra rendre la justice à votre peuple, à ce peuple qui est si nombreux? L’Eternel fut donc satisfait que Salomon lui eût fait cette demande. Et il dit à Salomon: Parce que vous m’avez fait cette demande, et que vous n’avez point désiré que je vous donnasse un grand nombre d’années, ou de grandes richesses, ou la vie de vos ennemis: mais que vous m’avez demandé la sagesse pour discerner ce qui est juste, je fais ce que vous m’avez demandé, et je vous donne un cœur si plein de sagesse et d’intelligence, qu’il n’y a jamais eu d’homme avant vous qui vous ait égalé, et qu’il n’y en aura point après vous qui vous égalera. Mais de plus je vous donne ce que vous ne m’avez point demandé, savoir les richesses et la gloire, de sorte qu’aucun roi ne vous aura jamais égalé en cela dans tous les siècles passés. Si vous marchez dans mes voies, et que vous gardiez mes préceptes et mes ordonnances, comme votre père les a gardés, je vous donnerai aussi une longue vie. Salomon s’étant éveillé, réfléchit au songe qu’il avait eu: et étant venu à Jérusalem, il se présenta devant l’arche de l’alliance et offrit des sacrifices en l’honneur de l’Eternel. Jugement rendu par Salomon. Deux femmes de mauvaise vie vinrent trouver le roi, et se présentant devant lui, l’une d’elles dit: Je vous prie, mon seigneur, faites-moi justice. Nous demeurions, cette femme et moi, dans une même maison, et je suis accouchée dans cette maison. Elle est accouchée aussi trois jours après moi; nous étions ensemble, et il n’y avait personne dans la maison, que nous deux. L’enfant de cette femme est mort pendant la nuit, parce qu’elle l’a étouffé en dormant; et se levant dans le silence de la nuit pendant que je dormais, elle m’a pris mon fils que j’avais à mon côté; et l’ayant placé auprès d’elle, elle a mis auprès de moi son fils qui était mort. M’étant levée le matin pour donner à teter à mon fils, j’ai reconnu qu’il était mort; et le considérant avec plus d’attention au grand jour, j’ai reconnu que ce n’était point le mien, celui que j’avais enfanté. L’autre femme lui répondit: Ce que vous dites n’est point vrai; mais c’est votre fils qui est mort, et le mien est vivant. La première au contraire répliquait: Vous mentez; car c’est mon fils qui est vivant, et le vôtre est mort: et elles se disputaient ainsi devant le roi. Alors le roi dit: Celle-ci dit: Mon fils est vivant, et le vôtre est mort. Et l’autre répond: Non; mais c’est votre fils qui est mort, et le mien est vivant. Apportez-moi une épée. Lorsqu’on eut apporté une épée devant le roi, il dit à ses gardes: Coupez en deux cet enfant qui est vivant, et donnez-en la moitié à l’une et la moitié à l’autre. Alors la femme dont le fils était vivant dit au roi (car ses entrailles furent émues de tendresse pour son fils): Seigneur, donnez-lui, je vous supplie, l’enfant vivant, et ne le tuez point. L’autre disait au contraire: Qu’il ne soit ni à moi ni à vous; mais qu’on le divise. Alors le roi prononça cette sentence: Donnez à celle-là l’enfant vivant, et qu’on ne le tue point; car c’est elle qui est sa mère.—Tout Israël ayant donc su la manière dont le roi avait jugé cette affaire, ils eurent tous de la crainte et du respect pour lui, voyant que la sagesse de Dieu était en lui pour rendre la justice. Le roi Salomon vivait en paix avec tous les peuples qui l’environnaient, il n’y avait plus d’ennemi qui s’élevât contre lui, ni qui l’attaquât. Dans Juda et dans Israël tout homme vécut sans aucune crainte, chacun sous sa vigne et sous son figuier, depuis Dan jusqu’à Bersabée, pendant tout le règne de Salomon. Dieu donna de plus à Salomon une sagesse et une prudence prodigieuses, et des connaissances étendues. Et la sagesse de Salomon surpassait la sagesse de tous les Orientaux et de tous les Égyptiens. Il était plus sage que tous les hommes, plus sage que les poëtes lyriques Ethan, Ezrahite, Heman, Chalcol et Darda; et sa réputation était répandue dans toutes les nations voisines. Salomon composa aussi trois mille paraboles, et fit mille et cinq cantiques. Il venait des gens de tous les pays pour entendre la sagesse de Salomon; et tous les rois envoyaient vers lui, pour être instruits par sa sagesse. Salomon avait sous sa domination tous les royaumes depuis le fleuve d’Euphrate jusqu’au pays des Philistins, et jusqu’à la frontière d’Égypte. Ils lui offrirent tous des présents, et lui demeurèrent assujettis pendant tout le cours de sa vie. Salomon pense à bâtir le temple. Hiram, roi de Tyr, envoya aussi ses serviteurs vers Salomon, ayant appris qu’il avait été sacré roi en la place de son père; car Hiram avait toujours été ami de David. Or Salomon envoya vers Hiram, et lui fit dire: Vous savez quel a été le désir de David mon père, et qu’il n’a pu bâtir une maison au nom de l’Eternel, à cause des guerres et des ennemis qui le menaçaient de toutes parts, jusqu’à ce que l’Eternel les eût tous mis sous ses pieds. Mais maintenant Dieu m’a donné la paix avec tous les peuples qui m’environnent. C’est pourquoi j’ai dessein maintenant de bâtir un temple au nom de l’Eternel, selon qu’il l’a ordonné à David mon père, en lui disant: Votre fils que je ferai asseoir en votre place sur votre trône, sera celui qui bâtira une maison à la gloire de mon nom. Donnez donc ordre à vos serviteurs qu’ils taillent pour moi des cèdres du Liban, et mes serviteurs seront avec les vôtres, et je donnerai à vos serviteurs telle récompense que vous me demanderez; car vous savez qu’il n’y a personne parmi mon peuple qui sache tailler le bois comme les Sidoniens. Hiram ayant entendu ces paroles de Salomon, en eut une grande joie, et dit: Béni soit aujourd’hui l’Eternel Dieu qui a donné à David un fils si sage pour gouverner un si grand peuple. Et il envoya dire à Salomon: J’ai entendu tout ce que vous m’avez fait dire; j’exécuterai tout ce que vous désirez pour les bois de cèdre et de sapin. Mes serviteurs les porteront du Liban sur le bord de la mer; et je les ferai mettre sur mer en radeaux pour les transporter jusqu’au lieu que vous m’aurez marqué; je les y ferai débarquer, et vous aurez soin de les faire prendre; et pour cela vous me ferez donner tout ce qui me sera nécessaire pour nourrir ma maison. Hiram donna donc à Salomon des bois de cèdre et de sapin autant qu’il en désirait. Et Salomon donnait à Hiram pour l’entretien de sa maison vingt mille mesures de froment et vingt mille mesures d’huile très-pure: ce sont là les provisions que Salomon envoyait chaque année à Hiram. Le roi Salomon choisit aussi des ouvriers dans tout Israël, et il ordonna que l’on prendrait pour cet ouvrage trente mille hommes. Il les envoyait au Liban tour à tour, dix mille chaque mois, de sorte qu’ils demeuraient deux mois dans leurs maisons. Adoniram avait l’intendance sur tous ces gens-là. Salomon avait soixante et dix mille manœuvres qui portaient les fardeaux, et quatre-vingt mille qui taillaient les pierres sur la montagne; sans compter ceux qui avaient l’intendance sur chaque ouvrage, qui étaient au nombre de trois mille trois cents, et qui donnaient les ordres au peuple et à ceux qui travaillaient. Et le roi leur commanda aussi de prendre de grandes pierres, des pierres d’un grand prix, pour les fondements du temple, et de les préparer pour cet effet; et les ouvriers de Salomon, de Hiram et les Giblims eurent soin de les tailler et ils apprêtèrent les bois et les pierres pour bâtir la maison de l’Eternel. Description du temple bâti par Salomon. La quatrième année du règne de Salomon et la quatre cent quatre vingtième après la sortie de l’Egypte, on commença à bâtir un temple à l’Eternel. Ce fut sur la montagne Moria, colline orientale du mont Sion qu’il fut construit. Il était entouré de deux murs, un mur extérieur et un mur intérieur; cette dernière enceinte était aussi appelée l’enceinte des prêtres. L’intérieur du temple, décoré avec la plus grande magnificence, avait la même distribution que le tabernacle: le _saint_ et le _saint des saints_. Toutes les murailles étaient parées de feuillage en bois de cèdre, et de fleurons en or. L’autel, les candélabres et les différents vases pour le service étaient d’un or très-pur. Le plancher même et les portes étaient revêtus d’or. C’était le temple le plus splendide qu’il y eût jamais eu sur la terre. On employa à la construction du temple dans toutes ses parties et dans tout ce qui devait servir au culte de Dieu, sept années entières. Dédicace du temple. Prière de Salomon. Alors tous les anciens d’Israël avec les princes des tribus, et tous les chefs des familles des enfants d’Israël s’assemblèrent, et vinrent trouver le roi Salomon dans Jérusalem, pour transporter l’arche de l’alliance de l’Eternel de la ville de David, c’est-à-dire, de Sion. On s’assembla en un jour solennel, lors de la fête des tabernacles, qui a lieu dans le septième mois. Tous les anciens d’Israël étant venus, les prêtres prirent l’arche de l’Eternel et la portèrent avec le tabernacle de l’alliance, et tous les vases du sanctuaire qui étaient dans le tabernacle, et les prêtres et les lévites les portèrent. L’arche de l’alliance fut placée au lieu qui lui était destiné, dans le saint des saints, sous les ailes des chérubins. Or il n’y avait dans l’arche que les deux tables de pierre que Moïse y avait mises à Horeb, lorsque l’Eternel fit alliance avec les enfants d’Israël, aussitôt après leur sortie d’Egypte. Salomon se plaça ensuite devant l’autel de l’Eternel, à la vue de toute l’assemblée d’Israël; et tenant ses mains étendues vers le ciel, il dit: Eternel Dieu d’Israël, il n’y a point de Dieu qui vous soit semblable, ni au plus haut du ciel, ni sur toute la face de la terre. O Dieu! j’ai bâti cette maison, afin qu’elle vous tienne lieu de demeure, et que votre trône y soit établi pour jamais. Est-il donc croyable que Dieu habite véritablement sur la terre? Car si les cieux et le ciel des cieux ne peuvent vous comprendre, combien moins cette maison que j’ai bâtie! Mais soyez propice, ô Eternel mon Dieu, aux vœux de votre serviteur et à ses prières; écoutez l’hymne et l’oraison que votre serviteur vous offre aujourd’hui, afin que vos yeux soient ouverts jour et nuit sur cette maison, de laquelle vous avez dit: C’est là que sera mon nom; afin que vous exauciez la prière que votre serviteur vous offre en ce lieu; que vous l’exauciez du lieu de votre demeure dans le ciel, et que l’ayant exaucée vous fassiez miséricorde. Lorsqu’un homme aura péché contre son prochain; lorsqu’Israël votre peuple péchera contre vous; lorsqu’il viendra sur la terre, ou famine, ou peste, ou corruption de l’air, et que faisant pénitence et rendant gloire à votre nom, on étendra les mains vers vous dans cette maison: vous l’exaucerez du ciel, du lieu de votre demeure, vous vous rendrez de nouveau propice, et vous ferez miséricorde, selon que vous verrez la disposition du cœur, rendant à chacun selon toutes ses œuvres et ses désirs, parce qu’il n’y a que vous seul qui connaissiez le fond du cœur de tous les hommes. Lorsqu’un étranger, qui ne sera point d’Israël votre peuple, viendra d’un pays fort éloigné, attiré par votre nom, parce que la grandeur de votre nom, la force de votre main et la puissance de votre bras se feront connaître de tous côtés; lorsqu’un étranger, dis-je, sera venu prier en ce lieu, vous l’exaucerez du ciel, du firmament où vous demeurez, et vous ferez ce que l’étranger vous aura prié de faire; afin que tous les peuples de la terre apprennent à craindre votre nom, comme fait Israël votre peuple, et qu’ils éprouvent eux-mêmes que votre nom a été invoqué sur cette maison que j’ai bâtie. Salomon ayant achevé d’offrir à l’Eternel cette oraison et cette prière, se leva de devant l’autel de l’Eternel, car il avait mis les deux genoux en terre, et il tenait les mains étendues vers le ciel. Etant donc debout devant le peuple, il bénit toute l’assemblée d’Israël, en disant à haute voix: Béni soit l’Eternel, qui a donné la paix à Israël son peuple, selon toutes les promesses qu’il avait faites. Tous les biens qu’il nous avait promis par Moïse son serviteur, nous sont arrivés, sans qu’il soit tombé une seule de ses paroles à terre. Que l’Eternel notre Dieu soit avec nous, comme il a été avec nos pères; qu’il ne nous abandonne et ne nous rejette point: mais qu’il incline nos cœurs vers lui, afin que nous marchions dans toutes ses voies, et que nous gardions ses préceptes et toutes les ordonnances qu’il a prescrites à nos pères. Que les paroles de cette prière que j’ai faite devant l’Eternel, soient présentes jour et nuit à l’Eternel notre Dieu, afin que chaque jour il fasse justice à son serviteur et à Israël son peuple, en sorte que tous les peuples de la terre sachent que c’est l’Eternel qui est le vrai Dieu, et qu’après lui il n’y en a point d’autre. Le roi et tout Israël offrirent une grande quantité de sacrifices en l’honneur de l’Eternel, et le roi avec les enfants d’Israël consacrèrent ainsi le temple à l’Eternel. Salomon fit de ce jour une grande solennité et tout Israël se réunit à lui pendant quatorze jours. Les jours de fêtes étant passés, Salomon renvoya le peuple, qui bénissant le roi s’en retournaient en leurs maisons avec une allégresse publique, ayant le cœur plein de joie pour tous les biens que l’Eternel avait faits à David son serviteur, et à Israël son peuple. Dieu se révèle une seconde fois à Salomon. Salomon ayant achevé de bâtir la maison de l’Eternel et tout ce qu’il avait souhaité, et qu’il avait voulu faire, Dieu se révéla une seconde fois, comme il s’était révélé à Gabaon, et lui dit: J’ai exaucé votre prière et la supplication que vous m’avez faite. J’ai sanctifié cette maison que vous avez bâtie pour y établir mon nom à jamais, et mes yeux et mon cœur y seront toujours attentifs. Si vous marchez en ma présence comme votre père y a marché, dans la simplicité et la droiture de votre cœur; si vous faites tout ce que je vous ai commandé, et que vous gardiez mes lois et mes ordonnances, j’établirai votre trône et votre règne sur Israël pour jamais, selon que je l’ai promis à David votre père, en lui disant: Vous aurez toujours de votre race des successeurs qui seront assis sur le trône d’Israël. Mais si vous vous détournez de moi, vous et vos enfants, si vous cessez de me suivre et de garder mes préceptes et les lois que je vous ai prescrites, et que vous alliez servir et adorer les dieux étrangers, j’exterminerai les Israélites de la terre que je leur ai donnée, et je rejetterai loin de moi ce temple que j’ai consacré à mon nom. Salomon bâtit encore un grand palais, fortifia plusieurs villes et se fit construire des maisons de campagne. Quant à tout ce qui était demeuré de ces peuples que les enfants d’Israël n’avaient pu exterminer, Salomon rendit tributaires leurs enfants et les assujettit. Il équipa aussi une flotte à Esiongaber sur le rivage de la mer Rouge au pays d’Idumée: et Hiram envoya avec cette flotte quelques-uns de ses gens, gens de mer qui entendaient fort bien la navigation, qui se joignirent aux gens de Salomon; et étant allés en Ophir (dans l’Afrique?), ils y prirent quatre cent vingt talents d’or qu’ils apportèrent au roi Salomon. L’argent était en abondance sous le règne de Salomon et l’on ne faisait presque aucun cas de ce métal. La reine de Saba vient trouver Salomon et admire sa sagesse. La reine de Saba (dans l’Arabie) ayant entendu parler de la grande réputation que Salomon s’était acquise par tout ce qu’il faisait au nom de l’Eternel, vint en faire expérience en lui proposant des questions obscures et des énigmes; et étant entrée dans Jérusalem avec une grande suite et un riche équipage, elle se présenta devant le roi Salomon, et lui découvrit tout ce qu’elle avait dans le cœur. Salomon l’instruisit sur toutes les choses qu’elle lui avait proposées; et il n’y en eut aucune que le roi ignorât, et sur laquelle il ne la satisfît par ses réponses. Or la reine de Saba voyant toute la sagesse de Salomon, admirant les édifices qu’il avait construits, la somptuosité de sa table, les logements de ses officiers, le bel ordre avec lequel ils le servaient, la magnificence de leurs habits, les sacrifices qu’ils offraient dans la maison de l’Eternel, était toute hors d’elle-même; et elle dit au roi: Ce qu’on m’avait rapporté dans mon royaume de vos entretiens et de votre sagesse est véritable; et je n’ai pas cru néanmoins ce qu’on m’en disait, jusqu’à ce que je sois venue moi-même, et que je l’aie vu de mes propres yeux; et j’ai reconnu qu’on ne m’avait pas dit la moitié de la vérité. Votre sagesse et votre conduite passent tout ce que la renommée m’en avait appris. Heureux ceux qui sont à vous; heureux vos serviteurs qui jouissent toujours de votre présence, et qui écoutent votre sagesse! Béni soit l’Eternel votre Dieu qui a mis son affection en vous, qui vous a fait asseoir sur le trône d’Israël, et qui vous a établi roi pour régner avec équité, et pour rendre la justice. La reine de Saba donna ensuite au roi beaucoup d’or, une quantité infinie de parfums, et de pierres précieuses. On n’a jamais apporté depuis à Jérusalem autant de parfums que la reine de Saba en donna au roi Salomon. Or le roi Salomon donna à la reine de Saba tout ce qu’elle désira et ce qu’elle lui demanda, outre les présents qu’il lui fit de lui-même avec une magnificence royale; et la reine s’en retourna en son royaume avec ses serviteurs. Les femmes étrangères font tomber Salomon dans l’idolâtrie. Mort de ce prince. Or le roi Salomon aima passionnément plusieurs femmes étrangères, il se maria à la fille de Pharaon, aux femmes de Moab et d’Ammon, aux femmes d’Idumée, de Sidon et du pays des Hethéens, qui étaient toutes des nations dont l’Eternel avait dit aux enfants d’Israël: Vous ne prendrez point pour vous des femmes de ces pays-là, et vos filles n’en épouseront point les hommes; car ils vous pervertiront le cœur très-certainement, pour vous faire suivre leurs dieux. Salomon s’attacha donc à ces femmes avec une passion ardente. Il était déjà vieux, lorsque les femmes lui corrompirent le cœur pour lui faire suivre des dieux étrangers: et son cœur n’était point parfait devant l’Eternel son Dieu, comme avait été le cœur de David son père. Mais Salomon servait Astarté déesse des Sidoniens, et Molach l’idole des Ammonites. L’Eternel dit donc à Salomon: Puisque vous vous comportez ainsi, et que vous n’avez point gardé mon alliance, ni les commandements que je vous avais faits, je déchirerai et diviserai votre royaume, et je le donnerai à l’un de vos serviteurs. Je ne ferai point néanmoins cette division pendant votre vie, à cause de David votre père; mais je la ferai lorsque le royaume sera entre les mains de votre fils. Je ne lui ôterai pas néanmoins le royaume tout entier; mais j’en donnerai une tribu à votre fils, à cause de David mon serviteur, et de Jérusalem que j’ai choisie. Or l’Eternel suscita pour ennemis à Salomon, Adad Iduméen de la race royale, qui était dans Edom, Razon fils d’Eliada, roi à Damas, et ensuite _Jeroboam_ fils de Nabat Ephrathéen, serviteur de Salomon, jeune homme intelligent et très-capable en affaires. Il arriva en ce même temps que Jeroboam sortit de Jérusalem, et qu’Ahia Silonite, prophète, ayant sur lui un manteau tout neuf, rencontra Jeroboam dans le chemin. Ils n’étaient qu’eux deux dans le champ. Et Ahia prenant le manteau neuf qu’il avait sur lui, le coupa en douze parts, et dit à Jeroboam: Prenez dix parts pour vous; car voici ce que dit l’Eternel le Dieu d’Israël: Je diviserai et arracherai le royaume des mains de Salomon, et je vous en donnerai dix tribus; j’en donnerai une tribu à son fils, afin que mon serviteur David règne toujours devant moi dans la ville de Jérusalem, que j’ai choisie afin que mon nom y soit honoré. Mais pour vous, je vous prendrai, et vous régnerez sur tout ce que votre âme désire, et vous serez roi dans Israël. Si vous écoutez donc tout ce que je vous ordonne; si vous marchez dans mes voies, et que vous fassiez ce qui est juste et droit devant mes yeux en gardant mes ordonnances et mes préceptes, comme a fait David mon serviteur, je serai avec vous, je vous ferai une maison qui sera stable et fidèle, comme j’en ai fait une à mon serviteur David, et je vous mettrai en possession du royaume d’Israël. Et j’affligerai en ce point la race de David, mais non pour toujours. Salomon voulut donc faire mourir Jeroboam; mais il s’enfuit en Egypte vers Sesac roi d’Egypte, et y demeura jusqu’à la mort de Salomon. Tout le reste des actions de Salomon, tout ce qu’il a fait et tout ce qui regarde sa sagesse, est écrit dans le livre du règne de Salomon. Le temps pendant lequel il régna dans Jérusalem sur tout Israël fut de quarante ans: et Salomon s’endormit avec ses pères et il fut enseveli en la ville de David son père; et Roboam (_Rechabeam_) son fils régna en sa place. Division du royaume. Jusqu’à cette époque tout Israël ne forma qu’un seul peuple, toutes les douze tribus furent libres et unies. On avait l’habitude, comme il avait été ordonné par la loi de Dieu, de se voir rassemblé à Jérusalem trois fois par an, pendant les jours des trois grandes fêtes publiques, de Pâque, de Pentecôte et des Tabernacles. Ces occasions resserraient toujours plus étroitement les liens religieux, fortifiaient l’esprit général de la nation et facilitaient les relations intérieures. Et bien que ce ne fussent pas tous les Israélites qui prissent part à ces saintes assemblées, cependant ils ne laissaient pas que d’être fidèles à leur alliance avec Dieu et de se distinguer ostensiblement de tout autre peuple, et par leurs maximes, et par certaines lois concernant la pureté extérieure et la pudeur (défense de plusieurs aliments, lois de purification, défenses touchant le mariage, etc.). Mais cet état de choses devait changer, et la vie nationale se modifier après la mort de Salomon. Car il arriva lorsque Roboam vint à Sichem, où tout Israël s’était assemblé pour l’établir roi, que Jeroboam y vint avec tout le peuple d’Israël trouver Roboam, et lui dit: Votre père nous avait chargés d’un joug très-dur. Diminuez donc maintenant quelque chose de l’extrême dureté du gouvernement de votre père, et de ce joug très-pesant qu’il nous avait imposé, et nous vous servirons. Roboam leur répondit: Allez-vous-en maintenant et dans trois jours revenez me trouver. Le peuple s’étant retiré, le roi Roboam tint conseil avec les vieillards, qui étaient auprès de Salomon son père, lorsqu’il vivait encore; et il leur dit: Quelle réponse me conseillez-vous de faire à ce peuple? Ils lui répondirent: Si vous obéissez maintenant à ce peuple, et que vous leur cédiez en vous rendant à leur demande, et en leur parlant avec douceur, ils s’attacheront pour toujours à votre service. Mais Roboam n’approuvant point le conseil que les vieillards lui avaient donné, voulut consulter les jeunes gens qui avaient été élevés avec lui, et qui étaient toujours auprès de sa personne, il leur dit: Quelle réponse me conseillez-vous de faire à ce peuple? Ils lui répondirent: Vous lui direz: Mon père, à ce que vous dites, vous a imposé un joug pesant, et moi je le rendrai encore plus pesant; mon père vous a battus avec des verges, et moi je vous châtierai avec des verges de fer. Jeroboam vint donc avec tout le peuple trouver Roboam le troisième jour, et le roi répondit durement au peuple, et abandonnant le conseil que les vieillards lui avaient donné, il leur parla selon que les jeunes gens lui avaient conseillé. Le roi ne se rendit donc point à la volonté du peuple, parce que l’Eternel s’était détourné de lui, pour vérifier la parole qu’il avait dite à Jeroboam fils de Nabat par Ahia Silonite. Or le peuple voyant que le roi n’avait point voulu les écouter, commença à dire: Qu’avons-nous de commun avec David? Quel héritage avons-nous à espérer du fils d’Isaï? Israël retirez-vous dans vos tentes; et vous, David, pourvoyez maintenant à votre maison. C’est ainsi qu’Israël se sépara de Roboam, ils choisirent alors Jeroboam pour leur roi. Il n’y eut que deux tribus, celles de Juda et de Benjamin qui restèrent fidèles à la maison de David. Israël forma depuis ce jour deux royaumes séparés, celui d’_Israël_ ou d’Ephraïm, et celui de _Juda_; celui-ci beaucoup plus petit, l’emportait cependant sur le premier par la possession de Jérusalem, du temple et de l’institution des prêtres. CHAPITRE VI. HISTOIRE DES DEUX ROYAUMES JUSQU’A LEUR RUINE. (2964-3338.) Les deux rois. Après cet événement Roboam revint à Jérusalem, assembla toute la tribu de Juda et la tribu de Benjamin, et vint avec cent quatre-vingt mille hommes de guerre choisis, pour combattre la maison d’Israël, et pour réduire le royaume sous son obéissance. Mais Seméia homme de Dieu lui adressa la parole de l’Eternel et lui dit: Voici ce que dit l’Eternel: Vous ne vous mettrez point en campagne, et vous ne ferez point la guerre contre les enfants d’Israël qui sont vos frères. Que chacun retourne en sa maison; car c’est moi qui ai fait ceci. Ils écoutèrent la parole de l’Eternel, et ils s’en retournèrent selon que l’Eternel le leur avait commandé. Or Jéroboam rebâtit Sichem sur la montagne d’Ephraïm, et il y établit sa demeure; et étant sorti de là, il bâtit Phanuel. Mais Jéroboam dit en lui-même: Le royaume retournera bientôt à la maison de David, si ce peuple va à Jérusalem pour y offrir des sacrifices en la maison de l’Eternel; le cœur de ce peuple se tournera alors vers Roboam roi de Juda; et ils me tueront et retourneront à lui. Et après y avoir bien pensé, il fit deux veaux d’or, les mit, l’un à Bethel (le sud du pays), et l’autre à Dan (le nord du pays), et dit au peuple: N’allez plus à l’avenir à Jérusalem. Israël, voici vos dieux qui vous ont tirés de l’Egypte. Il fit aussi des temples dans les hauts lieux, et il établit pour prêtres les derniers du peuple, qui n’étaient point enfants de Lévi. Il ordonna aussi qu’on célébrerait un jour solennel dans le huitième mois, qui serait le quinzième du même mois, pour répondre à la fête des Tabernacles qui se célébrait dans le septième mois en Juda. Ce culte devint un sujet de scandale et de péché; car le peuple allait jusqu’à Dan pour y adorer ce veau d’or. L’Eternel Dieu fit alors sévèrement reprimander le roi Jeroboam, et lui fit annoncer par ses prophètes des punitions et des malheurs épouvantables; cependant le méchant ne se corrigea point et ne quitta point le service des faux dieux. Sa maison fut alors tellement corrompue, qu’à la deuxième génération déjà toute la race de Jeroboam fut entièrement exterminée de la terre.—Cependant Roboam fils de Salomon régnait sur Juda; il avait quarante et un ans lorsqu’il commença à régner, et il régna dix-sept ans en la ville de Jérusalem. Et Juda fit aussi le mal devant l’Eternel, ils commirent encore plus de péchés que leurs pères. Eux aussi, ils élevèrent des autels, et se firent des statues sur toutes les collines élevées et sur tous les arbres touffus; ils commirent en général toutes les abominations de ces peuples que l’Eternel avait détruits à la vue des enfants d’Israël. Ce fut dans la cinquième année du règne de Roboam, que Sesac roi d’Egypte vint à Jérusalem, enleva les trésors du roi, et pilla tout. Il prit aussi les boucliers d’or que Salomon avait faits. Or il y eut toujours guerre entre Roboam et Jeroboam. Et Roboam s’endormit avec ses pères; il fut enseveli avec eux dans la ville de David, et Abiam son fils régna en sa place. Il régna trois ans dans Jérusalem, marcha dans tous les péchés de son père, et son cœur n’était point parfait avec l’Eternel son Dieu comme l’avait été le cœur de David son père. La guerre qui avait éclaté entre Roboam et Jéroboam continua encore. Mais Israël fut enfin vaincu par Juda. Jeroboam, roi d’Israël, mourut ensuite dans la vingt-deuxième année de son règne, et Nadab son fils régna en sa place. Les deux royaumes. (_Juda._) La vingtième année de Jeroboam roi d’Israël, _Asa_ roi de Juda commença son règne. Asa fils d’Abiam régna quarante et un ans dans Jérusalem. Et Asa fit ce qui était droit et juste aux yeux de l’Eternel, comme avait fait David son père. Il purgea Jérusalem de toutes les infamies des idoles que ses pères y avaient dressées, et il commanda à Juda de chercher l’Eternel le Dieu de leurs pères, et d’observer la loi et tout ce qui était ordonné. Il ôta aussi les autels et les temples de toutes les villes de Juda, et il régna en paix.—Un jour Zara, roi d’Éthiopie, vint l’attaquer avec une armée d’un million d’hommes et trois cents chariots de guerre, et s’avança jusqu’à Maresa. Asa marcha au-devant de lui, et rangea son armée en bataille dans la vallée de Sephata, près de Maresa; et il invoqua Dieu, et dit: Eternel, quand vous voulez secourir, le petit nombre et le grand nombre sont la même chose devant vous. Secourez-nous donc, Eternel; car c’est parce que nous nous confions en vous et en votre nom, que nous sommes venus contre cette multitude. Eternel, vous êtes notre Dieu, ne permettez pas que l’homme l’emporte sur vous. Ainsi l’Eternel jeta l’épouvante parmi les Ethiopiens qui étaient en présence d’Asa et de Juda; et les Ethiopiens prirent la fuite et furent défaits.—Alors Azaria fils d’Oded fut rempli de l’esprit de Dieu. Il alla au-devant d’Asa, et lui dit: Ecoutez-moi, Asa, et vous tous, peuples de Juda et de Benjamin. L’Eternel vous a assisté, parce que vous vous êtes tenus attachés à lui. Si vous le cherchez, vous le trouverez; mais si vous le quittez, il vous abandonnera. Alors Asa assembla tous ses sujets de la tribu de Juda et de Benjamin, et avec eux plusieurs étrangers des tribus d’Ephraïm, de Manassé et de Siméon; car beaucoup d’Israélites étaient venus se rendre à lui, voyant que l’Eternel son Dieu était avec lui. Et lorsqu’ils se furent rendus à Jérusalem le troisième mois, et l’an quinzième du règne d’Asa, ils offrirent des sacrifices à l’Eternel et promirent de nouveau de chercher le Dieu de leurs pères de tout leur cœur et de toute leur âme. Et il n’y eut point de guerre jusqu’à la trente-cinquième année du règne d’Asa. Mais l’an trente-sixième, Baasa roi d’Israël vint en Juda, et fortifia Rama, afin que nul du royaume d’Asa ne pût sûrement ni entrer ni sortir. Alors Asa prit l’or et l’argent qui étaient dans les trésors de la maison de l’Eternel, et dans les trésors du roi, et les envoya à Benadad roi de Syrie pour l’engager de rompre l’alliance faite avec Baasa roi d’Israël, et de l’obliger de se retirer des états de Juda. En ce même temps le prophète Hanani vint trouver le roi Asa, et lui dit: Les yeux de l’Eternel sont ouverts sur toute la terre, et ils inspirent de la force à ceux qui se confient en lui d’un cœur parfait. Vous avez donc agi follement en mettant votre confiance dans le roi de Syrie, et non dans l’Eternel votre Dieu; et pour cela même, il va s’allumer des guerres contre vous. Asa, s’emportant contre le prophète, commanda qu’on le mît en prison; car la remontrance de ce prophète l’avait irrité au dernier point: il opprima aussi plusieurs d’entre le peuple. Ensuite Asa tomba malade la trente-neuvième année de son règne, d’une très-violente douleur aux pieds, et cependant il n’eut point recours à l’Eternel dans son mal; mais il mit plutôt sa confiance dans la science des médecins. Et il mourut la quarante et unième année de son règne, fut enterré dans la sépulture qu’il s’était fait faire en la ville de David, et on le mit sur son lit tout rempli d’odeurs et de parfums exquis, où les parfumeurs avaient employé toute leur science; et ils les brûlèrent sur lui avec beaucoup d’appareil et de pompe.—_Josaphat_ son fils régna en sa place, et il eut toujours l’avantage sur Israël. L’Eternel fut avec Josaphat, parce qu’il marcha dans les premières voies de David son père, et qu’il ne mit point sa confiance dans les idoles. Comme son cœur était plein de force et de zèle pour l’observation des préceptes de l’Eternel, il fit abattre dans Juda les hauts lieux et les bois consacrés aux idoles. La troisième année de son règne il envoya plusieurs hommes des premiers seigneurs de la cour, pour instruire les villes de Juda. Il joignit à ces hommes plusieurs lévites et les prêtres Elisama et Joram: et ils instruisaient tout le peuple de Juda, et portaient avec eux le livre de la loi de Dieu; ils allaient dans toutes les villes de Juda, et y enseignaient le peuple. Ainsi Dieu affermit le royaume dans la main de ce roi, de sorte que tous les royaumes qui étaient aux environs de Juda, n’osaient prendre les armes contre Josaphat. Les Philistins même venaient faire des présents à Josaphat, et ils lui payaient un tribut d’argent. Les Arabes lui amenaient des troupeaux de menu bétail. Et Josaphat devint puissant, et s’éleva jusqu’à un très-haut point de grandeur. Il bâtit des forteresses dans Juda en forme de tours, et fit de grandes choses dans toutes les villes de Juda. (Israël.) _Nadab_, fils de Jeroboam, régna deux ans sur Israël. Il fit le mal devant l’Eternel, et il marcha dans les voies de son père, et dans les péchés qu’il avait fait commettre à Israël. Mais Baasa, de la tribu d’Issachar, fit une entreprise secrète contre sa personne, et le tua. _Baasa_ étant devenu roi, tua tous ceux de la maison de Jeroboam. Il n’en laissa pas vivre un seul de sa race, jusqu’à ce qu’il l’eût exterminée entièrement, selon que l’Eternel l’avait fait prédire par Ahia Silonite son serviteur. Baasa fit aussi le mal devant l’Eternel, il marcha dans les voies de Jeroboam, et dans les péchés qu’il avait fait commettre à Israël. Or l’Eternel adressa sa parole à Jehu fils d’Hanani, contre Baasa, et lui fit dire: Parce que vous avez marché dans la voie de Jeroboam et vous avez fait pécher Israël mon peuple, je retrancherai de dessus la terre la postérité de Baasa, et je ferai de votre maison ce que j’ai fait de la maison de Jeroboam. Et Baasa mourut, fut enseveli à Thersa et _Éla_ son fils régna en sa place, dans la vingt-sixième année d’Asa roi de Juda.—Ela régna sur Israël à Thersa, et son règne ne dura que deux ans; car _Simri_ son serviteur, qui commandait la moitié de sa cavalerie, se révolta contre lui, et se jetant sur lui tout d’un coup, il le frappa et le tua. Et lorsqu’il fut établi roi, il extermina toute la maison de Baasa, sans épargner aucun de ses proches ou de ses amis. C’est ainsi que la maison de Baasa fut détruite, selon la parole que l’Eternel avait fait dire à Baasa par le prophète Jehu. Cependant, _Simri_ ne régna à Thersa que pendant sept jours. L’armée d’Israël qui assiégeait alors Gebbethon ville des Philistins, ayant appris que lui, Simri, s’était révolté et avait tué le roi, établit roi _Amri_, général de l’armée, qui était alors dans le camp. Amri, quittant donc Gebbethon, marcha avec l’armée d’Israël, et vint assiéger Thersa. Simri, voyant que la ville allait être prise, entra dans le palais, où il fit mettre le feu et périt dans les flammes avec la maison royale. Alors le peuple d’Israël se divisa en deux partis. La moitié du peuple suivit Thebni fils de Gineth pour l’établir roi, et l’autre suivait Amri. Mais le parti d’Amri eut l’avantage sur celui de Thebni; et Thebni étant mort, _Amri_ régna seul. La trente et unième année d’Asa roi de Juda, Amri régna sur Israël. Son règne dura douze ans, dont il régna six à Thersa. Il acheta alors la montagne de Samarie de Somer, et y bâtit une ville qu’il appela Samarie, du nom de Somer à qui avait été la montagne. Amri fit le mal devant l’Eternel, et les crimes qu’il commit surpassèrent encore ceux de tous ses prédécesseurs. Il marcha entièrement dans la voie de Jeroboam fils de Nabat, et dans les péchés par lesquels il avait fait pécher Israël. Et Amri mourut, fut enseveli à Samarie, et _Achab_ son fils régna en sa place.—Ce roi fit aussi le mal devant l’Eternel, et surpassa même en impiété tous ceux qui avaient été avant lui. Il ne se contenta pas de marcher dans les péchés de Jeroboam; mais il épousa Jezabel fille du roi des Sidoniens, et il alla servir Baal, et l’adora, lui bâtit un temple à Samarie, et ajouta toujours crime sur crime. Jezabel son épouse fit tuer tous les prophètes de l’Eternel, il n’en resta que cent, qui furent cachés par Obadiahu, intendant de la maison d’Achab, et nourris par lui. Or l’Eternel Dieu fit annoncer au roi Achab toutes sortes de malheurs, lui envoya à différentes reprises le prophète Elie, homme plein d’amour et de ferveur pour la vérité et le culte du seul vrai Dieu. Achab fut exhorté et averti par des merveilles et des présages: cependant tout cela fut inutile. Un jour qu’il marchait accompagné de Josaphat roi de Juda, contre le roi de Syrie, Achab fut frappé par une flèche qui vint le percer entre le poumon et l’estomac et il mourut. On le porta à Samarie, où il fut enseveli.—_Achasiahu_ son fils lui succéda sur le trône. Celui-ci marcha dans la voie de son père et de sa mère, et ne régna que deux ans sur Israël. Il mourut des suites d’une chute qu’il avait faite de la fenêtre d’une chambre haute qu’il avait à Samarie. Et, comme il n’avait point de fils, _Joram_ son frère régna en sa place. Ce roi secouru par Josaphat roi de Juda, et par le roi d’Edom, vainquit les Moabites qui avaient refusé de lui payer leur tribut, consistant en cent mille agneaux et cent mille moutons avec leur toison.—Les Syriens étaient alors en guerre contre Israël, cependant, ils ne réussirent point, Elisée le prophète ayant toujours dénoncé leurs projets d’attaque au roi d’Israël. Un jour que les Syriens s’étaient avancés jusqu’à Samarie et assiégeaient cette ville, le bruit de l’approche des troupes auxiliaires venant de l’Egypte au secours d’Israël, les effraya tellement qu’ils s’enfuirent pendant la nuit, abandonnant leur camp et tout ce qu’ils y avaient, ne pensant qu’à sauver leur vie. Or, Joram ayant assiégé Ramoth de Galaad, qui était alors dans les mains des Syriens, y fut blessé, et bientôt après il fut tué par Jehu, son général, qui déjà avait été sacré secrètement roi d’Israël par Elisée le prophète. Jehu fit mourir ensuite tout ce qui restait de la maison d’Achab, tous les grands de sa cour, ses amis et les prêtres qui étaient à lui, sans qu’il restât rien de ce qui avait appartenu de près ou de loin à sa personne. Ainsi fut accompli tout ce que l’Eternel avait fait prédire par Elie son serviteur. Jehu fit aussi tuer Achasia roi de Juda, qui se trouvait en ce moment auprès de Joram roi d’Israël. Ensuite il fit exterminer par ses serviteurs tous les prêtres et les prophètes de Baal, et fit détruire le temple et la statue de Baal. Ainsi Jehu extermina Baal d’Israël; mais il ne se retira point des péchés de Jeroboam; il ne quitta point les veaux d’or qui étaient à Bethel et à Dan. Et parce qu’il n’eut pas soin de marcher de tout son cœur dans la loi de l’Eternel, le Dieu d’Israël, l’Eternel n’était pas toujours avec lui: et il arriva que déjà pendant son règne les Syriens, sous le commandement de Hazaël, se rendirent maîtres de tout le pays de Galaad.—Joachaz, qui succéda à Jehu son père, n’eut pas moins à souffrir des attaques des Syriens ses ennemis; ceux-ci lui détruisirent presque tout son royaume. _Joas_ son fils fut plus heureux que lui: il vainquit Amasias roi de Juda, s’empara de la ville de Jérusalem et en remporta un riche butin. Encouragé par le prophète Elisée, il fit la guerre aux Syriens, les battit par trois fois, et rendit à Israël les villes qui lui avaient été prises. Joas régna pendant seize ans sur Israël, il ne se détourna point de tous les péchés de Jeroboam fils de Nabat, et fit le mal devant l’Eternel. Israël en captivité dans l’Assyrie. Sous le règne de tous ces rois que nous venons de voir, ainsi que sous les rois qui se succédèrent depuis, Israël fut toujours entraîné vers le mal. Suivant les exemples de leurs princes idolâtres ils quittèrent tous la voie de Dieu. Ils adoraient des abominations, contre la défense expresse que l’Eternel leur en avait faite par tous ses prophètes. Ils avaient abandonné toutes les ordonnances, toutes les lois de l’Eternel leur Dieu. Ils sacrifiaient leurs fils et leurs filles et les faisaient passer par le feu (Moloch, idole des Ammonites). Ils s’attachaient aux divinations et aux augures, et s’abandonnaient à des actions criminelles, qu’ils commettaient devant l’Eternel. C’est pourquoi à peine quelques rois se furent-ils succédé que le moment de la juste punition de l’Eternel arriva. _Jeroboam II_, fils de Joas, succéda à son père, et régna quarante et un ans à Samarie. Il fit le mal devant l’Eternel, et s’endormit avec les rois d’Israël ses pères. _Zacharias_ son fils régna en sa place. Il fit le mal, comme avaient fait ses pères. Dans le sixième mois de son règne _Sallum_ fils de Jabès forma une conspiration contre lui, le tua publiquement et régna en sa place. Sallum régna un mois seulement à Samarie; car _Manahem_ fils de Gadi étant venu de Thersa à Samarie, attaqua Sallum, le tua dans la même ville, et régna en sa place. Manahem fit le mal devant l’Eternel, et pendant tout son règne il ne se retira point des péchés de Jeroboam fils de Nabat, qui avait fait pécher Israël. Phul roi des Assyriens étant venu dans la terre d’Israël, Manahem lui donna mille talents d’argent, afin qu’il le secourût, et qu’il affermît son règne. Manahem leva cet argent dans Israël sur toutes les personnes puissantes et riches, qu’il taxa à cinquante sicles d’argent par tête. Le roi d’Assyrie retourna alors dans son pays. Manahem mourut après avoir régné dix ans sur Israël, et _Phaceïa_ (Pekachia) son fils régna en sa place. Il régna deux ans sur Israël, fit le mal devant l’Eternel, et ne se retira point des péchés de Jeroboam fils de Nabat. Alors _Phacée_ (Pekach) fils de Romelie, général de ses troupes, fit une conspiration contre lui; il l’attaqua à Samarie dans la tour de la maison royale, le tua et régna en sa place. Phacée régna dans Israël à Samarie pendant vingt ans, et fit le mal devant l’Eternel. Theglath-Phalasar, roi des Assyriens, vint alors en Israël, et prit Aion, Abel-Beth-Maacha, Janoé, Cedès, Asor, Galaad, la Galilée, et tout le pays de Nephthali, et _en transporta tous les habitants en Assyrie_. Or Osée (Hoschéa) fils d’Ela, forma une conspiration contre Phacée pour le surprendre; il l’attaqua, le tua, et régna en sa place. Il fit le mal devant l’Eternel, mais non comme les rois d’Israël qui avaient été avant lui. _Salmanasar_, roi des Assyriens, marcha contre lui, et Osée fut asservi à Salmanasar et lui payait tribut. Mais le roi des Assyriens ayant découvert qu’Osée pensait à se révolter contre lui, et que pour s’affranchir du tribut qu’il lui payait tous les ans, il avait envoyé des ambassadeurs à Sua roi d’Egypte, il l’assiégea; et l’ayant pris, il le chargea de chaînes et l’envoya en prison. Salmanasar fit d’abord des courses par tout le pays; et étant venu ensuite à Samarie, il la tint assiégée pendant trois ans. La neuvième année d’Osée, le roi des Assyriens prit Samarie, _transféra les Israélites au pays des Assyriens_, et les fit demeurer dans Hala et dans Habor près du fleuve de Gozan et dans les villes des Mèdes (l’an 3205). Or le roi des Assyriens fit venir des habitants de Babylone, de Cutha, d’Avah, d’Emath et de Sepharvaïm, et les établit dans les villes de Samarie en la place des enfants d’Israël. Ces peuples possédèrent Samarie, et habitèrent dans ses villes. Origine de la secte des Samaritains. Ces nations étrangères s’étant établies peu à peu dans le pays dépeuplé de Samarie, furent souvent inquiétées par des lions qui dévoraient beaucoup de monde. Ces nations en attribuaient la cause à ce qu’on avait déplacé le culte du pays, et firent dire au roi des Assyriens: Les peuples que vous avez transférés en Samarie, ignorent la manière dont le dieu de ce pays-là veut être adoré; et ce dieu a envoyé contre eux des lions qui les tuent, parce qu’ils ne savent pas la manière dont le dieu de cette terre veut être adoré. Alors le roi des Assyriens donna cet ordre: Envoyez en Samarie l’un des prêtres que vous en avez emmenés captifs, qu’il y retourne, et demeure avec ces peuples, afin qu’il leur apprenne le culte qui doit être rendu au dieu du pays. Ainsi l’un des prêtres qui avaient été emmenés captifs de la province de Samarie, y étant revenu, demeura à Bethel, et il leur apprenait la manière dont ils devaient honorer l’Eternel. Ensuite chacun de ces peuples, quoiqu’il adorât l’Eternel, servait en même temps ses dieux, selon la coutume des nations du milieu desquelles ils avaient été transférés en Samarie. La religion de ces nouveaux habitants du pays ne cessait donc pas d’être celle de l’idolâtrie. Les sectateurs en sont ordinairement appelés _Samaritains_, quelquefois aussi _Cuthéens_. Le royaume de Juda. Ce royaume aussi tombe de plus en plus dans les péchés et les crimes, et la fin en est la même. Captivité de Babylone. Après la mort de Josaphat, _Joram_ son fils monta sur le trône, et régna huit ans dans Jérusalem. Il marcha dans les voies des rois d’Israël, comme la maison d’Achab y avait marché, parce que sa femme était fille d’Achab; et il fit le mal devant l’Eternel. Pendant le temps de son règne, Edom secoua le joug de Juda pour ne lui être plus assujetti, et il s’établit un roi. En ce même temps Lobna se retira aussi de la domination de Juda. Joram s’endormit, fut enseveli dans la ville de David, et son fils Ochozias (Achasia) régna en sa place, dans la douzième année de Joram fils d’Achab, roi d’Israël. Ochozias régna un an dans Jérusalem; il marcha dans les voies de la maison d’Achab et fit le mal devant l’Eternel, comme la maison d’Achab, parce qu’il en était parent. Il marcha aussi avec Joram fils d’Achab, pour combattre contre Hazaël roi de Syrie. Joram fut alors blessé par les Syriens, et revint à Jezrahel pour se faire traiter de sa blessure. Et lorsque Ochozias roi de Juda y vint pour voir Joram, qui était malade, il fut frappé par les serviteurs de Jehu et mourut. Il fut porté à Jérusalem et enseveli avec ses pères dans la ville de David.—Athalie fille d’Amri roi d’Israël, mère d’Ochozias, voyant son fils mort, s’éleva contre les princes de la race royale, et les fit tous tuer. Mais Josaba fille du roi Joram, sœur d’Ochozias, prit _Joas_ fils d’Ochozias avec sa nourrice, qu’elle fit sortir de sa chambre, et le déroba du milieu des enfants du roi lorsqu’on les tuait, et lui sauva la vie, le tenant caché sans qu’Athalie pût le savoir. Il fut six ans caché avec sa nourrice dans la maison de l’Eternel. Et Athalie cependant régnait sur la terre de Juda. La septième année le prêtre Joïada envoya querir les centeniers et les soldats. Il les fit entrer dans le temple de l’Eternel, et fit un traité avec eux, leur fit prêter le serment de fidélité en leur montrant le fils du roi. Il leur donna ensuite les lances et les armes du roi David, qui étaient dans la maison de l’Eternel. Ils se tinrent donc tous rangés auprès du roi, les armes à la main. Joïada leur présenta le fils du roi, mit sur sa tête le diadème et le livre de la loi. Ils l’établirent roi, le sacrèrent, et ils crièrent: Vive le roi! Athalie entendit ce bruit, et entrant parmi la foule dans le temple de l’Eternel, elle vit le roi assis sur son trône. Alors elle déchira ses vêtements, et s’écria: Trahison, trahison! En même temps Joïada la fit emmener hors du temple, afin qu’on ne la tuât pas dans le temple de l’Eternel, et les soldats la tuèrent auprès du palais. Joïada fit alors une alliance entre l’Eternel, le roi et le peuple, afin qu’il fût désormais le peuple de l’Eternel. Tout le peuple entra ensuite dans le temple de Baal, ils renversèrent ses autels, brisèrent ses images et tuèrent Mathan prêtre de Baal devant l’autel.—Joas avait sept ans lorsqu’il commença à régner, et il fit ce qui était juste devant l’Eternel tant qu’il fut conduit par le prêtre Joïada. Il ne supprima pas néanmoins les hauts lieux, et le peuple y offrait ses offrandes. Or, c’est sous son règne, et par ses ordres qu’il fut statué: que les prêtres prendraient tout l’argent consacré et apporté dans le temple pour l’employer aux réparations de la maison de l’Eternel. Cependant, les prêtres n’ayant point fait ces réparations du temple jusqu’à la vingt-troisième année du règne de Joas, le roi les fit venir, et leur dit: Pourquoi ne faites-vous point les réparations du temple? N’en recevez donc plus l’argent selon l’ordre de votre ministère; mais rendez celui que vous avez reçu, afin qu’on l’emploie aux réparations du temple. Alors le prêtre Joïada prit un tronc, le mit auprès de l’autel, et les prêtres qui gardaient les portes, y mettaient tout l’argent qui s’apportait au temple de l’Eternel. Et cet argent était employé pour tout ce qui était nécessaire aux réparations et au rétablissement du temple.—Alors Hazaël roi de Syrie vint mettre le siége devant Geth, la prit, puis se détourna pour marcher vers Jérusalem. C’est pourquoi Joas roi de Juda prit tout l’argent consacré, que Josaphat, Joram et Ochozias ses pères, et lui-même, avaient offert au temple, et tout ce qui put se trouver d’argent dans les trésors du temple et dans le palais du roi, et il l’envoya à Hazaël roi de Syrie, qui se retira de Jérusalem. Dans la quarantième année du règne de Joas, ses officiers firent une conspiration entre eux, se soulevèrent contre lui et le tuèrent en Beth-Mello. Il fut enseveli dans la ville de David, et _Amasias_ son fils régna en sa place. Ce roi fit ce qui était juste devant l’Éternel, mais non comme David; il se conduisit en tout comme Joas son père s’était conduit. Lorsqu’il eut affermi son règne, il fit mourir ceux de ses officiers qui avaient tué le roi son père; mais il ne fit point mourir les enfants de ces meurtriers, selon ce qui est écrit au livre de la loi de Moïse, et selon cette ordonnance de l’Eternel: Les pères ne mourront pas pour les fils, et les fils ne mourront point pour les pères, mais chacun mourra dans son péché. Ce fut lui qui battit dix mille Iduméens dans la vallée des Salines, et qui prit d’assaut une forteresse qu’il appela Jectehel.—Alors Amasias envoya des ambassadeurs vers Joas roi d’Israël, et lui fit dire: Venez, et voyons-nous l’un l’autre (c’est-à-dire combattons-nous). Mais Joas lui fit répondre: Le chardon du Liban envoya vers le cèdre qui est au Liban, et lui fit dire: Donnez votre fille pour épouse à mon fils. Mais les bêtes de la forêt du Liban passèrent et foulèrent aux pieds le chardon... Parce que vous avez eu l’avantage sur les Iduméens et que vous les avez battus, votre cœur s’est gonflé d’orgueil. Soyez content de votre gloire, et demeurez en repos dans votre maison. Pourquoi cherchez-vous votre malheur, pour périr vous-même et faire périr Juda avec vous? Mais Amasias ne voulut point écouter cette remontrance, et Joas roi d’Israël marcha contre lui; l’armée de Juda fut taillée en pièces par celle d’Israël, Amasias fut pris par Joas qui l’emmena à Jérusalem. Joas fit une brèche à la muraille de Jérusalem de quatre cents coudées de long. Il emporta tout l’or et l’argent, et tous les vases qui se trouvèrent dans la maison de l’Eternel et dans tous les trésors du roi; il prit des otages, et retourna à Samarie. Amasias régna encore quinze ans après la mort de Joas roi d’Israël, et dans la vingt-neuvième année de son règne, il se fit une conjuration contre lui à Jérusalem, qui l’obligea de s’enfuir à Lachis. Mais ils envoyèrent après lui à Lachis, et ils le tuèrent en ce même lieu. Son corps fut alors transporté à Jérusalem et enseveli en la ville de David. Tout le peuple de Juda prit ensuite Azarias (nommé aussi Ozias) âgé de seize ans, qui fut établi roi en la place de son père Amasias.—Azarias régna cinquante-deux ans dans Jérusalem, il fit ce qui était agréable à l’Eternel, et se conduisit en tout comme Amasias son père. Il ne ruina pas néanmoins les hauts lieux, et le peuple y sacrifiait ses offrandes. Dieu frappa ce roi, qui demeura lépreux jusqu’au jour de sa mort. Il vivait à part dans une maison écartée; cependant Joatham son fils était grand maître du palais, et jugeait le peuple. Et Azarias s’endormit avec ses pères, il fut enseveli dans la ville de David, et _Joatham_ son fils régna en sa place. Ce roi fit ce qui était agréable à l’Éternel, et se conduisit en tout comme avait fait Ozias son père. Il ne détruisit pas néanmoins les hauts lieux; car le peuple y sacrifiait encore. Ce fut lui qui bâtit la plus haute porte de la maison de l’Éternel. En ce même temps l’Éternel commença à envoyer en Juda Rasin roi de Syrie, et Phacée roi d’Israël. Joatham, après avoir régné pendant seize ans dans Jérusalem, s’endormit avec ses pères, fut enseveli avec eux dans la ville de David, et _Achaz_ son fils régna en sa place.—Achaz régna aussi seize ans à Jérusalem; mais il ne fit point ce qui était agréable à l’Éternel, comme David son père; il marcha dans la voie des rois d’Israël, et consacra même son fils, le faisant passer par le feu, suivant l’idolâtrie des nations que l’Éternel avait détruites à l’entrée des enfants d’Israël. Alors Rasin roi de Syrie, et Phacée roi d’Israël, vinrent mettre le siége devant Jérusalem, et tenant Achaz assiégé, ils ne purent néanmoins le prendre. En ce même temps Rasin roi de Syrie reconquit _Elath_ et en chassa les Judéens. Phacée roi d’Israël tua cent vingt mille hommes de Juda en un seul jour, et en emmena captifs deux cent mille, tant femmes que garçons et filles, avec un butin infini. D’après le conseil du prophète _Oded_, on renvoya ensuite les captifs et on leur rendit tout ce dont ils avaient besoin. Alors Achaz amassa l’or et l’argent qui se trouva dans le temple et dans les trésors du roi, il en fit des présents au roi des Assyriens, qui se nommait _Theglath-Phalasar_, et lui fit dire: Venez me sauver des mains du roi de Syrie et des mains du roi d’Israël, qui se sont ligués contre moi. Le roi des Assyriens s’étant rendu à ce qu’il désirait de lui, vint à Damas, ruina la ville, en transféra les habitants à Cyrène, et tua Rasin. Alors le roi Achaz alla à Damas au-devant de Theglath-Phalasar, et ayant vu l’autel qui était à Damas, il en envoya au prêtre Urie un modèle qui en présentait exactement tout l’ouvrage. Urie reçut l’ordre de faire bâtir le même autel à Jérusalem, et Achaz, revenu de Damas, y offrit des sacrifices. Il transféra l’autel d’airain consacré à l’Eternel, et ordonna au prêtre de sacrifier sur le nouvel autel. Le roi Achaz fit en outre beaucoup de ravages dans l’intérieur du temple, et fit dresser des autels dans toutes les places de Jérusalem et dans toutes les villes de Juda. Enfin il mourut et fut enseveli dans la ville de Jérusalem; mais on ne le mit pas dans les tombeaux des rois d’Israël. _Ézéchias_ son fils régna en sa place.—Ezéchias régna vingt-neuf ans dans Jérusalem, fit ce qui était bon et agréable à l’Eternel, selon tout ce qu’avait fait David son père. Il détruisit les hauts lieux, brisa les statues et fit mettre en pièces le serpent d’airain (que Moïse avait fait en mémoire d’un malheureux événement), parce que le peuple lui avait offert des sacrifices jusqu’alors, et il rétablit le culte de l’Eternel. C’est pourquoi l’Eternel était avec lui, et ce prince se conduisait avec sagesse dans toutes ses entreprises. Il secoua aussi le joug du roi des Assyriens, battit les Philistins et ruina leurs terres. La quatorzième année du roi Ezéchias (huit ans après qu’Israël eut été transféré en Assyrie), _Sennacherib_ roi des Assyriens vint attaquer toutes les villes fortes de Juda et les prit. Alors Ezéchias lui envoya des ambassadeurs à Lachis, et lui fit dire: Si vous vous retirez de dessus mes terres, je souffrirai tout ce que vous m’imposerez. Le roi des Assyriens ordonna à Ezéchias de lui donner trois cents talents d’argent et trente talents d’or. Ezéchias amassa donc tout l’argent qui se trouva dans le temple et dans les trésors du roi, détacha même les lames d’or des battants des portes du temple, et les donna au roi des Assyriens. Le roi des Assyriens revint néanmoins avec une grande armée et fit assiéger Jérusalem. Le roi Ezéchias en fut alarmé, et pria l’Eternel de le sauver des mains de Sennacherib. Le prophète Isaïe le consola, lui inspira de la confiance et ranima son esprit en Dieu. Et en effet, bientôt après l’armée ennemie fut forcée de se retirer: la peste se déclara dans ses rangs, et en consuma une très-grande partie. Sennacherib retourna alors avec le reste de son armée, et se retira en son pays.—Quelque temps après Merodach-Baladan, roi des Babyloniens, envoya des ambassadeurs à Ezéchias pour le féliciter de son rétablissement d’une grave maladie (et peut-être dans l’intention de se lier avec lui contre les attaques des Assyriens). Ezéchias eut la vanité et l’imprévoyance de montrer aux ambassadeurs du roi de Babylone tous ses trésors et toutes ses richesses. Le prophète Isaïe lui en fit alors de vifs reproches, en lui disant: Il viendra un temps où tout ce qui est dans votre maison, et tout ce que vos pères y ont amassé jusqu’à ce jour, sera transporté à Babylone, sans qu’il en demeure rien. Le prophète ajouta: Vos enfants même que vous aurez engendrés, seront pris alors pour être serviteurs dans le palais du roi de Babylone. Prédiction qui fut bientôt accomplie. Après la mort d’Ezéchias, son fils _Manassé_ monta sur le trône de Juda. Manassé avait alors douze ans. Il régna cinquante-cinq ans dans Jérusalem, fit le mal devant l’Eternel, et adora des idoles. Il rebâtit les hauts lieux que son père Ezéchias avait détruits, il dressa des autels à Baal, fit passer son fils par le feu, aima les divinations, observa les augures, institua ceux qu’on appelle pythons, et séduisit ainsi le peuple, de sorte qu’il commit le mal aux yeux de l’Eternel. Les prophètes de l’Eternel dirent alors en son nom: Parce que Manassé roi de Juda a commis ces abominations, et qu’il a fait pécher Juda par ses infamies, je vais faire fondre de tels maux sur Jérusalem et sur Juda, que les oreilles en seront étourdies à quiconque les entendra. J’étendrai sur Jérusalem le cordeau de Samarie et le poids de la maison d’Achab. J’abandonnerai les restes de mon héritage, et je les livrerai entre les mains de leurs ennemis; et tous ceux qui les haïssent les pilleront et les ravageront. Manassé répandit des ruisseaux de sang innocent, jusqu’à en remplir toute la ville de Jérusalem. C’est pourquoi Dieu fit venir sur lui les généraux de l’armée du roi des Assyriens, qui après avoir pris Manassé, lui mirent les fers aux pieds et aux mains, et l’emmenèrent à Babylone. Manassé réduit à cette grande extrémité pria l’Eternel son Dieu, et il conçut un très-vif repentir en la présence du Dieu de ses pères. Il lui adressa ses gémissements et ses instantes supplications: et l’Éternel exauça sa prière, et le ramena à Jérusalem dans son royaume. Manassé reconnut alors que l’Éternel était le vrai Dieu, il ôta les dieux étrangers et l’idole de la maison de l’Eternel, détruisit les autels, et fit jeter tout hors de la ville. Il rétablit aussi l’autel de l’Eternel, et il ordonna à tout le peuple de Juda de servir l’Eternel le Dieu d’Israël. Cependant le peuple sacrifiait encore sur les hauts lieux. Manassé mourut ensuite, fut enseveli dans le jardin de sa maison; et _Amon_ son fils régna en sa place.—Amon fit le mal devant l’Eternel, abandonna le Dieu de ses pères, et ne marcha point dans la voie de l’Eternel. Il ne régna que deux ans dans Jérusalem. Ses serviteurs lui dressèrent alors des embûches, le tuèrent dans sa maison, et le peuple établit _Josias_ son fils pour régner en sa place.—Josias avait huit ans lorsqu’il commença à régner, et il régna trente et un ans à Jérusalem. Il fit ce qui était agréable à l’Eternel, et marcha dans toutes les voies de David son père, sans se détourner ni à droite ni à gauche. La dix-huitième année de son règne il envoya Saphan, le secrétaire du temple, vers le prêtre Helcias avec l’ordre d’amasser tout l’argent qui avait été porté au temple, et d’y faire toutes les réparations et tout ce qui était nécessaire pour rétablir la maison de l’Eternel. Alors le prêtre Helcias dit à Saphan: J’ai trouvé un livre de la loi dans le temple de l’Eternel. Et il donna ce livre à Saphan qui le lut. Saphan revint ensuite trouver le roi pour lui rendre compte de ce qu’il lui avait commandé, et lui dit encore: Le prêtre Helcias m’a donné un livre. Et il le lut devant le roi. Le roi ayant entendu ces paroles du livre de la loi de l’Eternel, déchira ses vêtements, et dit à Helcias, à Saphan et à ses serviteurs: Allez, consultez sur les paroles de ce livre. Ils allèrent alors trouver _Holda_ la prophétesse, femme de Sellum, et lui parlèrent selon l’ordre du roi. Holda leur répondit: Dites à l’homme qui vous a envoyé vers moi: Voici ce que dit l’Eternel: Je vais faire tomber sur ce lieu et sur ses habitants tous les maux que le roi de Juda a lus dans ce livre de la loi; parce qu’ils m’ont abandonné et qu’ils ont sacrifié à des dieux étrangers. Mais pour le roi de Juda, qui vous a envoyé me consulter, vous lui direz: Parce que vous avez écouté les paroles de ce livre, que votre cœur en a été épouvanté, que vous vous êtes humilié devant l’Eternel, après avoir appris les maux dont il menace cette ville et ses habitants, j’ai écouté votre prière, dit l’Eternel. C’est pourquoi je vous ferai reposer avec vos pères, et vous serez enseveli en paix, afin que vos yeux ne voient point les maux que je dois faire tomber sur cet endroit. Alors le roi fit assembler tout le peuple de Juda, alla avec lui au temple, et on lut devant lui toutes les paroles de ce livre de l’alliance, qui avait été trouvé dans la maison de l’Eternel. Le roi se tint debout sur un lieu élevé, et fit alliance avec l’Eternel, afin que ses sujets marchassent dans la voie de l’Eternel, qu’ils observassent ses préceptes et ses ordonnances de tout leur cœur et de toute leur âme, et qu’ils accomplissent toutes les paroles de l’alliance qui étaient écrites dans ce livre. Et le peuple consentit à cet accord. Le roi ordonna alors au pontife Helcias, aux prêtres du second ordre et aux portiers, de jeter hors du temple tous les vaisseaux qui avaient servi à Baal, et il les brûla hors de Jérusalem dans la vallée de Cedron, et en emporta la poussière à Bethel. Il extermina aussi tous les prêtres qui sacrifiaient à Baal, au soleil, à la lune, aux douze signes et à toutes les étoiles du ciel. Le roi souilla et profana pareillement le lieu de Topheth, qui est dans la vallée des fils d’Ennom, afin que personne ne sacrifiât son fils ou sa fille à Moloch, en les faisant passer par le feu. Outre tout cela Josias détruisit tous les temples des hauts lieux qui étaient dans les villes de Samarie, et que les rois d’Israël avaient bâtis pour le service des faux dieux. Josias dit ensuite à tout le peuple: Célébrez la Pâque en l’honneur de l’Eternel votre Dieu, en la manière qui est écrite dans ce livre de l’alliance. Josias extermina aussi les pythons, les devins et les figures des idoles, les impuretés et les abominations des pays de Juda et de Jérusalem, pour accomplir les paroles de la loi qui étaient écrites dans ce livre que Helcias pontife avait trouvé dans le temple de l’Eternel. Il n’y avait point eu avant Josias de roi qui lui fût semblable, et qui fût retourné comme lui à l’Eternel de tout son cœur et de toute son âme, selon tout ce qui est écrit dans la loi de Moïse, et il n’y en a point eu non plus après lui.—Cependant la ruine de Juda était décidée par l’Eternel, et bientôt cette parole de l’Eternel fut accomplie: Je rejetterai aussi Juda de devant ma face, comme j’ai rejeté Israël, et j’abandonnerai Jérusalem.—En ce temps-là Pharaon Nechao roi d’Egypte marcha contre le roi des Assyriens vers le fleuve d’Euphrate; et Josias marcha pour s’opposer à lui. Pharaon lui fit dire: Qu’avez-vous à démêler avec moi, roi de Juda? Ce n’est pas contre vous que je viens aujourd’hui. Cependant Josias ne voulut point s’en retourner; mais il continua sa marche pour lui livrer bataille dans le champ de Magedo; il y fut blessé et mourut. Ses serviteurs le rapportèrent mort à Jérusalem, et l’ensevelirent dans son sépulcre; et tout Juda et Jérusalem le pleurèrent, particulièrement le prophète Jérémie, dont les lamentations sur la mort de Josias se chantèrent bien longtemps dans le pays, car cette coutume était comme une espèce de loi établie dans Israël. Le peuple fit alors sacrer _Joachaz_ fils de Josias, et l’établit roi en la place de son père. Il fit le mal devant l’Eternel et commit tous les mêmes crimes que ses pères. Il ne régna que pendant trois mois dans Jérusalem, lorsque Pharaon Nechao y étant venu, le déposa, et condamna le pays à lui donner cent talents d’argent et un talent d’or. Nechao établis en même temps _Joakim_ l’autre fils de Josias, roi sur Juda, et emmena Joachaz avec lui en Egypte où il mourut.—Joakim régna onze ans à Jérusalem, mais il fit le mal devant l’Eternel son Dieu. _Nabuchodonosor_ (Nebukadnezar) roi de Babylone marcha alors contre Juda, et Joakim lui fut assujetti pendant trois ans; et après cela il ne voulut plus lui obéir. Nabuchodonosor revint donc, le chargea de chaînes et l’emmena à Babylone, où il transporta aussi les vases du temple de l’Eternel, et les mit dans son temple.—_Joachin_ fils de Joakim monta sur le trône de Juda. Il régna trois mois et dix jours dans Jérusalem, et il commit le mal en présence de l’Eternel. En ce temps-là Nabuchodonosor revint assiéger Jérusalem. Joachin sortit de la ville, et vint se rendre au roi de Babylone, qui le transporta à Babylone avec les principaux de Jérusalem, tous les princes et tous les vaillants de l’armée, au nombre de dix mille captifs: il emmena aussi tous les artisans, et ne laissa que les plus pauvres d’entre le peuple. (Au nombre de ces captifs se trouva aussi le prophète _Ezéchiel_.) Or Nabuchodonosor roi de Babylone établit roi en la place de Joachin, _Mathanias_ son oncle; et il l’appela _Sedecias_ (c’est-à-dire justice divine). Celui-ci régna onze ans à Jérusalem, et fit le mal devant l’Éternel. C’est pourquoi l’Eternel Dieu rejeta enfin Juda et Jérusalem de devant sa face et tout le royaume fut détruit: Sedecias se révolta contre le roi Nabuchodonosor, et méprisa les remontrances du prophète Jérémie, qui lui parlait de la part de l’Eternel. Le roi Nabuchodonosor revint donc en Juda, marcha avec toute son armée contre Jérusalem, mit le siége devant la ville, le dixième jour du dixième mois (Tebath¹⁶), y fit la brèche le neuvième jour du quatrième mois (Tamus¹⁶), et, après avoir assiégé la ville si longtemps, il y pénétra enfin le septième jour du cinquième mois (Ab¹⁶). Sedecias s’enfuit, mais l’ennemi le poursuivit et le prit. Les enfants de Sedecias furent tués aux yeux de leur père; et quant à lui, on lui creva les yeux, le chargea de chaînes, et l’emmena à Babylone. Or _Nabuzardan_, général du roi de Babylone, vint à Jérusalem, brûla le temple de l’Eternel et le palais du roi, consuma tout ce qu’il y avait de maisons dans Jérusalem et en abattit les murailles (l’an 3338). Ensuite il transporta à Babylone tout le reste du peuple, qui était demeuré dans la ville, les transfuges qui étaient allés se rendre au roi de Babylone, et le reste de la populace. Il laissa seulement les plus pauvres du pays pour labourer les vignes et pour cultiver les champs. Après cela Nabuchodonosor donna le commandement du peuple qui était demeuré au pays de Juda, à _Godolias_ fils d’Achicam. Or Ismahel fils de Nathanie de la race royale, (jaloux de cette préférence que le roi de Babylone avait accordée à Godolias), vint quelque temps après (le septième mois, appelé Tischri¹⁶) accompagné de dix hommes, attaqua Godolias, le tua avec ses gens et les Chaldéens qui étaient avec lui. Et tout le peuple depuis le plus grand jusqu’au plus petit, avec les officiers de guerre, appréhendant les Chaldéens, sortirent de Juda, s’en allèrent en Egypte et forcèrent le prophète Jérémie d’aller avec eux. ¹⁶ Ce sont les quatre jours de jeûne qu’Israël a établis en mémoire de ces malheureux événements. Ainsi qu’il est écrit dans le prophète Zacharie: «Voici ce que dit l’Éternel: Les jeûnes du _quatrième_, du _cinquième_, du _septième_ et du _dixième_ mois, seront changés, pour la maison de Juda, en des jours de joie et d’allégresse, et en des fêtes éclatantes et solennelles, si vous aimez la vérité et la paix.» Remarque. Le jour de jeûne du quatrième mois est observé le dix-septième jour de ce mois, parce que c’est le jour où les Romains se sont emparés de Jérusalem, au temps du second temple. Le jour de jeûne du cinquième mois est observé le neuvième jour de ce mois, parce que c’est le jour où le premier et le second temple ont été détruits et réduits en cendres. Le jeûne en mémoire de _Godolias_, est observé le troisième jour du septième mois (Tischri). Les _Prophètes_, leur _Vocation_, en quel _lieu_ ils ont vécu et à quelle _époque_. Dieu voulant conserver la vraie croyance et la répandre parmi toutes les nations de la terre, par l’entremise du peuple israélite, quoiqu’il retombât si souvent dans l’idolâtrie, dut faire paraître des hommes saints, nommés _Prophètes_ qui, dans ces temps de superstition et de corruption générale, fussent des gardiens fidèles de la vraie croyance. Ces hommes qu’on nommait aussi _Voyants_, à cause de leur habitude de prédire l’avenir, s’élevaient par le zèle le plus sain, par la ferveur la plus pure contre l’idolâtrie et le vice. Le but de leurs efforts tendait à présenter la croyance d’un seul et unique Dieu de la manière la plus pure et la plus claire; ils prêchaient la pénitence et l’amendement en public et en particulier; ils annonçaient la bénédiction et la malédiction à raison de la fidélité ou de l’infidélité envers Dieu; et ils encourageaient les affligés par la prédiction d’un temps plus heureux. C’est sous le règne d’Achab et d’Ochozias que s’éleva le prophète _Élie_ de Thesbé. Il blâma avec une hardiesse peu commune, à la cour même, la défection du vrai Dieu d’Israël. _Élisée_ son disciple, son compagnon, et son successeur, fut moins sévère et par cela même eut plus d’influence; il vivait sous le règne de Joram, Jehu, Joachaz et Joas, rois d’Israël.—Parmi les prophètes qui se distinguèrent pendant les règnes d’Azarias, roi de Juda, et de Jeroboam II roi d’Israël, nous connaissons principalement _Amos_, _Joël_ et _Osée_ (Hochea). Le premier était pasteur; dans sa sainte inspiration il se rendit à Bethel, endroit où les Israélites qui voulaient sacrifier avaient coutume de s’assembler. C’était là qu’il prêchait avec énergie contre la corruption et l’injustice alors si générales en Juda et en Israël, à Damas et à Gaza, à Tyr et dans le pays d’Edom, de Moab et d’Ammon; or en faisant comprendre que la décadence de tous ces peuples étrangers était la suite de leur démoralisation et de l’abjection des mœurs, il annonçait le même sort à sa patrie, dont les crimes étaient d’autant plus impardonnables qu’ils avaient des prophètes inspirés de Dieu, pour leur montrer continuellement la bonne voie.—_Joël_ prêchait encore avec plus d’éloquence et d’élévation d’esprit. La grande affliction provoquée par un fléau de sauterelles et par une sécheresse universelle lui fournit l’occasion d’exhorter son peuple à la pénitence. Cette pénitence aura non-seulement pour effet de ramener l’ancienne affluence de biens, mais encore d’accélérer le siècle d’or, où tous les peuples limitrophes respecteront de nouveau le nom du peuple israélite.—_Osée_ s’éleva avec énergie contre l’idolâtrie, contre le luxe des princes, l’immoralité du peuple et contre quelques autres vices et fautes particulières. Il prévit déjà que l’alliance avec l’Egypte et l’Assyrie finirait par la ruine du règne d’Israël.—Le prophète _Isaïe_ l’emportait encore sur tous ces hommes éclairés. Il exerça l’influence la plus salutaire pendant les règnes des rois Ozias, Joatham, Achaz et Ézéchias; tantôt il blâmait la démoralisation du peuple, tantôt il exhortait à la pénitence qui devait se manifester non pas dans la pratique des usages inutiles et insensés, mais dans l’exercise de la vérité, de la vertu et de la justice; tantôt il critiquait les voies et moyens, les mesures pernicieuses des princes. Il annonçait aux méchants des punitions sévères, et par contre il annonçait des temps heureux et pleins de salut aux hommes justes.—Le prophète _Michée_ était contemporain d’Isaïe. Il prédisait de grands événements qui étaient sur le point d’arriver en Israël et en Juda. Il parlait des exactions des grands, de la bassesse des faux prophètes, de l’injustice des juges et des mauvais prêtres. Il prophétisait la ruine de la patrie, la destruction de Jérusalem et du temple comme la juste punition de leurs crimes et de leurs forfaits: mais ces jours d’adversité et de malheur étant passés, il leur présentait l’avenir sous l’aspect le plus heureux.—Le prophète _Nahum_ (Nachum) vivait quelque temps après la captivité des dix tribus d’Israël. Cet homme menaçait d’une ruine complète et la ville de Ninive, résidence des rois de l’Assyrie, et l’Assyrie tout entière, dont les habitants maltraitaient impitoyablement le peuple israélite.—C’était au commencement du règne de Josias, fils d’Amon, que le prophète _Sophonie_ (Zephania) annonçait la ruine de la ville de Jérusalem, et prédisait en même temps le rétablissement de la patrie après que le peuple se serait corrigé.—_Habacuc_ vivait peu de temps avant la captivité de Babylone. Dans son esprit élevé, il prévoyait déjà les horreurs que les Chaldéens exerceraient plus tard par leur force brutale dans le pays de Juda, et il pressentait en même temps le châtiment que s’attirerait cet ennemi.—Le prophète Jérémie fut témoin de la destruction de Jérusalem. Dans son zèle il ne se laissait arrêter ni par les dérisions les plus grandes, ni par les mauvais traitements. Il déplorait avec amertume l’iniquité du peuple, la défection de la loi de Dieu et la fausse politique des princes. Il annonçait la destruction de Jérusalem et la ruine de l’État à moins que le peuple ne se corrigeât et ne changeât totalement de vie. Cependant ses discours ne produisant pas d’effet salutaire, le malheur qu’il prédit arriva.—_Ézéchiel_, qui se trouvait au nombre des captifs emmenés pour la Chaldée avec le roi Joachin, débuta la septième année avant la destruction de Jérusalem. Il faisait des prédictions à ses frères en Chaldée, vers la même époque que Jérémie prophétisait en Palestine. C’est aussi à Ézéchiel que Dieu a révélé figurativement, dans une vision, la résurrection des morts.—Plus tard lors du retour dans la patrie, c’étaient les prophètes _Aggée_ (Chaggai), _Zacharie_ et _Malachie_ qui instruisaient le peuple dans la loi. Le premier prophétisait lors de la deuxième année de Darius roi de Perse. Il encourageait à la reconstruction du temple en annonçant que le second temple serait encore plus illustre que le premier.—_Zacharie_ était le contemporain d’Aggée. Ses prophéties sont tantôt des discours instructifs et exhortatifs, tantôt des descriptions sur la position future et heureuse du peuple israélite.—_Malachie_, qui fut le dernier prophète d’Israël, était contemporain de Néhémias. Il prophétisait après la reconstruction du temple. Ses discours sont des exhortations au peuple pour l’engager à se contenter de sa position; ils renferment et des réprimandes au peuple, et des instructions pour les prêtres. Voici quelques-unes de ses exhortations: «Que le fils honore son père et le serviteur révère son seigneur; si je suis votre père, où est l’honneur que vous me rendez? Et si je suis votre seigneur, où est la crainte respectueuse que vous me rendez? dit l’Eternel. Je m’adresse à vous, ô prêtres, qui méprisez mon nom! Les lèvres du prêtre doivent être les dépositaires de la science; et c’est de sa bouche que l’on cherche la connaissance de la loi, car il est l’ange de l’Eternel.» En parlant au nom de Dieu il finit en ces termes: «Souvenez-vous de la loi que j’ai donnée à Moïse mon serviteur, sur la montagne d’Horeb, afin qu’il portât à tout le peuple d’Israël mes préceptes et mes ordonnances. Je vous enverrai le prophète Elie, avant que le grand et épouvantable jour de l’Eternel arrive: et il réunira le cœur des pères à celui de leurs enfants, et le cœur des enfants à celui de leurs pères; de peur qu’en venant je ne frappe la terre d’anathème.» État du peuple pendant le temps de l’exil. La plus grande partie des habitants de Juda qui allèrent alors en captivité, s’établirent dans les environs de l’Euphrate, où se trouvaient déjà en exil un grand nombre d’Israëlites. Les restes de Juda et d’Israël formèrent de nouveau un seul peuple. C’est là que Jérémie adressa aux Israélites, au nom de l’Eternel, ces paroles remarquables: «Voici ce que dit l’Eternel, le Dieu d’Israël, à tous les captifs que j’ai transférés de Jérusalem à Babylone: Bâtissez-vous des maisons, et habitez-les; plantez des jardins, et nourrissez-vous de leurs fruits. Recherchez la paix de la ville dans laquelle je vous ai transférés, et priez l’Eternel pour elle parce que votre paix se trouve dans la sienne.» Les Israélites obéissaient à ces paroles, et beaucoup d’entre eux se distinguèrent par l’observance religieuse des lois de Moïse. Il y avait parmi les exilés quatre jeunes gens d’une éducation distinguée qui se nommaient _Daniel_, _Ananias_, _Misaël_ et _Azarias_. Le roi leur fit donner l’instruction dans toutes les sciences et dans tous les arts, et ordonna qu’on leur servît chaque jour des viandes qu’on servait devant lui, et du vin dont il buvait lui-même; mais ne voulant pas prendre de nourriture défendue par la loi de Moïse, ils se contentaient de légumes, et quoique ces aliments ne fussent guère nourrissants, ils s’en trouvaient toujours très-bien; du reste ils remplissaient leurs devoirs avec fidélité. Ces hommes se distinguèrent autant par leur savoir que par leur beauté et furent élevés aux charges les plus éminentes de l’État. Mais dans leur position distinguée ils purent sans préjudice pour leurs devoirs envers le souverain, rester toujours fidèlement et sincèrement attachés à la religion de leurs pères. L’insolent Nabuchodonosor se fit un jour dresser une statue d’or et ordonna que chacun se prosternât devant lui et l’adorât, et que celui qui s’y refuserait fût jeté au milieu des flammes d’une fournaise. Ces trois hommes, Ananias, Misaël et Azarias fidèles à leurs croyances ne voulurent point rendre les honneurs divins à une idole et furent jetés par l’ordre du roi dans les flammes de la fournaise. Mais Dieu le Tout-Puissant protégea ses serviteurs, ils restèrent intacts au milieu des flammes et le feu ne les dévora point. Nabuchodonosor reconnut alors la puissance de l’Eternel et défendit, sous peine de mort, de diffamer la religion des Israélites.—Aussi Daniel observait-il toujours les préceptes de sa croyance, au risque même de ses jours. Il était le favori de Darius, roi des Mèdes et conquérant de Babylone. Les courtisans en devinrent jaloux, lui portèrent envie et tâchèrent de le perdre. Comme il leur était impossible de découvrir quelque faute dans les affaires de son administration, ils cherchèrent les moyens de le conduire à sa perte. Son attachement à la religion de ses pères les favorisa dans leur dessein. D’après leurs instigations le roi ordonna que tout homme qui, durant l’espace de trente jours, demanderait quoi que ce fût à quelque dieu ou à quelque homme que ce put être sinon au roi seul, fût jeté dans la fosse aux lions. Or, Daniel ayant appris la promulgation de cette loi, entra dans sa maison, et ouvrant les fenêtres de sa chambre du côté de Jérusalem, il fléchit les genoux et adora son Dieu, lui rendit ses actions de grâces, comme il le faisait auparavant, et continua d’agir ainsi pendant quelques jours à trois différentes heures de la journée. Ces hommes donc, qui épiaient avec grand soin toutes les actions de Daniel, le trouvèrent priant et adorant son Dieu, et en firent rapport au roi. Le roi ne pouvant révoquer en faveur de Daniel l’édit publié, se vit forcé de faire exécuter l’arrêt, et Daniel fut jeté dans la fosse aux lions. Le lendemain matin lorsque le roi se rendit à la fosse, il le trouva encore sain et sauf et ordonna qu’on le retirât. Il commanda en même temps qu’on fît venir ceux qui l’avaient accusé, et qu’on les jetât dans la même fosse. Depuis cet événement Daniel fut toujours en dignité et élevé successivement aux plus grands honneurs. Il mourut enfin après une vie longue et heureuse. (Daniel était prophète; il explique le songe du roi, et prouve en différentes circonstances qu’il est inspiré par l’esprit de l’Eternel.) La position du peuple israélite en Babylonie, à en juger par ces faits, n’était donc nullement triste et malheureuse. Il y en avait même, parmi les exilés, qui vivaient dans l’aisance et possédaient des biens-fonds. Les Israélites y exerçaient leur culte en toute liberté, ils conservaient leur constitution primitive et, comme nous venons de le voir, les esprits capables parmi eux pouvaient même parvenir aux plus grandes dignités de l’Etat.—C’est là, dans la captivité, qu’Israël commença par réfléchir mûrement sur sa destinée et qu’il reconnut l’absurdité de l’idolâtrie. Il regretta alors sa défection, qu’il devait regarder comme l’unique cause de son exil. La connaissance de Dieu et l’idée de le servir d’une manière plus digne ne tardèrent pas à se faire jour et à se développer de plus en plus. Des assemblées générales, ayant pour but d’adorer l’Eternel par des _prières ferventes_, se multipliaient. _Nabuchodonosor_ vint enfin à mourir dans la quarante-troisième année de son règne. _Évilmerodach_, son successeur, mit en liberté le roi Joachin et lui rendit les honneurs dus à son rang.—La Babylonie devint alors la proie de _Darius_ le Mède. Sous son règne et pendant la durée du royaume Médo-Perse les Israélites en général ne subissaient pas plus de vexations particulières. Cependant c’est sous le règne de _Cyaxares_, père d’Astyages (selon d’autres, dans les temps de Xercès) que l’événement raconté dans le livre d’Esther se passa: tout Israël se trouvait alors en danger d’être massacré. Un des ministres du roi nommé Aman (Haman), alors irrité contre un Israélite appelé Mardochée dont il se croyait insulté, résolut de se venger non-seulement de cet homme, mais même de tout le peuple israélite. Il se procura, à cet effet, une ordonnance royale qui fut envoyée dans toutes les provinces du royaume, afin qu’on tuât et qu’on exterminât tous les Israélites depuis les plus jeunes jusqu’aux plus vieux, jusqu’aux femmes et aux petits enfants, en un même jour, c’est-à-dire, le treizième jour du douzième mois appelé Adar, et qu’on pillât tous leurs biens. Mais la reine nommée _Esther_, qui était elle-même israélite et parente de Mardochée, faisait de son côté des instances près du roi, son époux, et le peuple israélite fut sauvé d’une mort imminente. Le tyran Aman fut attaché à la même potence qu’il avait préparée à Mardochée. En mémoire de cet événement tous les Israélites s’obligèrent, eux et leurs enfants d’en faire chaque année dans toute la postérité une fête solennelle appelée _Purim_ (c’est-à-dire, les sorts)¹⁷. ¹⁷ La célébration de cette fête se fait de la manière suivante: le treizième jour du mois d’Adar est un jour de jeûne; le but en est de nous rappeler le jeûne de la reine Esther et des Israélites qui se trouvaient alors à Suse, capitale de l’empire. Le jour suivant (le quatorzième) est consacré à la joie. Le livre d’Esther est lu dans la synagogue le soir et le matin. Des festins de famille et d’autres réjouissances ont ordinairement lieu; mais c’est principalement dans la distribution des aumônes et dans d’autres œuvres de charité que consiste la solennité du jour. CHAPITRE VII. LES ISRAÉLITES VIVENT SOUS LA DOMINATION ÉTRANGÈRE JUSQU’A LA GUERRE DE LA DÉLIVRANCE. (3408-3610.) Retour de la captivité de Babylone. Les soixante et dix ans de l’exil prédits par le prophète Jérémie, étant passés, Dieu toucha le cœur de Cyrus roi de Perse (la Babylonie faisait alors partie de son empire) de manière que dès la première année de son règne, il fit publier dans tout son empire cette ordonnance: Voici ce que dit Cyrus, roi de Perse: L’Eternel, le Dieu du ciel, m’a donné tous les royaumes de ce pays, et m’a commandé de lui bâtir une maison dans la ville de Jérusalem, qui est en Judée. Que celui d’entre vous qui est de son peuple, aille à Jérusalem. Que son Dieu soit avec lui, et qu’il rebâtisse la maison de l’Éternel, le Dieu d’Israël. Que tous les autres, en quelques lieux qu’ils habitent, les assistent du lieu où ils sont, soit en argent et en or, soit de tous leurs autres biens, outre ce qu’ils offriront volontairement pour le temple de Dieu qui est à Jérusalem. Alors les chefs de famille de Juda et de Benjamin, les prêtres et les lévites, et tous ceux dont Dieu toucha le cœur, se préparèrent à s’en retourner. Les autres, qui demeuraient aux environs, les assistèrent de leurs biens. Le roi Cyrus leur remit aussi entre les mains les vases du temple que Nabuchodonosor avait emportés de Jérusalem: trente bassins d’or, mille bassins d’argent et beaucoup d’autres vases sacrés. Il y avait cinq mille quatre cents vases tant d’or que d’argent. C’est ainsi qu’ils se rétablirent de nouveau dans leur pays, et tout le peuple d’Israël demeura chacun dans sa ville. Ils étaient pour le moment, tout compté, environ cinquante mille et parmi eux il y avait deux cents chantres, hommes et femmes. Leurs chefs étaient _Zorababel_ prince de Juda, gouverneur du roi de Perse, _Josué_ pontife et dix princes de tribu.—Le septième mois étant venu, les enfants d’Israël qui étaient dans leurs villes, s’assemblèrent tous comme un seul homme dans Jérusalem, et commencèrent à bâtir un autel pour y offrir à l’Eternel des holocaustes le matin et le soir. Ils posèrent l’autel de Dieu sur ses bases, pendant que tous les peuples voisins s’efforçaient de les en empêcher. Ils célébrèrent la fête des Tabernacles, en la manière qu’il est commandé dans la loi de Moïse. Ce n’est que dans la seconde année de leur arrivée qu’ils jetèrent les fondements du temple de l’Eternel. Les prêtres revêtus de leurs ornements se présentèrent alors accompagnés des lévites, pour louer Dieu avec les paroles de David, roi d’Israël. Ils chantaient tous ensemble des hymnes, et publiaient la gloire de l’Eternel, en disant: Louez l’Eternel parce qu’il est bon, et que sa miséricorde s’est répandue pour jamais sur Israël. Et plusieurs des prêtres et des lévites, des chefs de famille, et des anciens, qui avaient vu le premier temple, considérant les fondements de celui-ci, qui était devant leurs yeux, jetaient de grands cris mêlés de larmes, et plusieurs aussi élevant leur voix poussaient des cris de réjouissance: et l’on ne pouvait discerner les cris de joie d’avec les plaintes de ceux qui pleuraient, parce que tout était confus dans cette grande clameur de peuple, et le bruit en retentissait au loin.—Or leurs ennemis (les Samaritains) apprenant que les Israélites revenus de leur captivité bâtissaient un temple à l’Eternel, le Dieu d’Israël, vinrent trouver Zorobabel et les chefs des familles, et leur dirent: Laissez-nous bâtir avec vous; parce que nous cherchons votre Dieu comme vous, depuis qu’Asor-Haddan roi d’Assyrie nous a envoyés en ce lieu. Zorobabel, Josué et les autres chefs des familles d’Israël leur répondirent: Nous ne pouvons bâtir avec vous une maison à notre Dieu; nous bâtirons seuls un temple à l’Eternel notre Dieu, comme Cyrus roi des Perses, nous l’a ordonné. Alors les ennemis mécontents de cette réponse empêchèrent les Israélites autant qu’ils le purent de bâtir le temple. Ils gagnèrent par argent les ministres du roi, et pendant le règne de Cyrus, roi des Perses, ils purent s’opposer au dessein du peuple israélite. Ce n’est que sous le gouvernement de _Darius Hystaspe_ que les Israélites continuèrent de bâtir, et le temple de Dieu fut achevé le troisième jour du mois d’Adar la sixième année du règne du roi Darius. Les enfants d’Israël, les prêtres et les lévites firent alors la dédicace du temple avec de grandes réjouissances. Les prêtres furent rétablis dans leurs ordres et les lévites en leur rang pour faire l’œuvre de Dieu dans Jérusalem selon qu’il est écrit dans le livre de Moïse. Les Israélites demeuraient donc de nouveau à Jérusalem et dans les villes du pays d’Israël. Ils étaient gouvernés par les pontifes et par les gouverneurs des rois de Perse. L’Eternel leur envoya encore des prophètes et des hommes inspirés de l’amour de la vérité: des hommes qui, sans cesse, montraient au peuple la bonne voie, lui donnaient l’instruction dans la loi de Moïse et le rendaient de plus en plus capable de se pénétrer de l’esprit de la parole de Dieu. Au nombre de ces grands hommes se trouvait le savant _Esdras_ (Esra) descendant d’Aaron. Cet homme était fort habile dans la loi, zélé et très-pieux; il partit de Babylone et arriva à Jérusalem avec une grande colonie, forte de plus de dix-sept cents hommes, sans compter les femmes et les enfants; il apporta en même temps avec lui de l’argent, de l’or et des vases pour le service du temple à Jérusalem. _Néhémie_, l’échanson du roi, dévoué à son Dieu, désirait aussi retourner dans le pays de ses pères. Et lorsqu’on lui en apporta des nouvelles, et qu’il apprit que les murailles de Jérusalem étaient encore en ruine, il se mit à pleurer, jeûna et pria l’Eternel d’exaucer ses vœux. Or, il s’adressa ainsi au roi son maître: Si ma demande ne déplaît pas au roi, et si votre serviteur vous est agréable, envoyez-moi, je vous prie, en Judée, à la ville des sépulcres de mes pères, afin que je la fasse rebâtir. Le roi lui accorda sa demande; Néhémie partit pour Jérusalem et y rendit beaucoup de services à ses frères. Les ennemis ayant appris qu’on rebâtissait les murailles, en devinrent jaloux et tâchèrent, par tous les moyens possibles, d’en empêcher l’exécution. Mais les Israélites ne perdaient pas confiance en Dieu; ils priaient l’Eternel et mettaient en même temps des gardes jour et nuit sur la muraille pour s’opposer aux efforts de leurs ennemis: ils travaillaient d’une main et tenaient l’épée de l’autre. C’est de cette manière que les murailles furent rebâties et achevées en peu de temps. Le premier jour du septième mois (Tischri) tous les pères de famille s’assemblèrent avec leurs femmes, leurs fils et leurs filles dans une des grandes places de Jérusalem. Esdras apporta la loi devant l’assemblée, lut dans ce livre clairement et distinctement, au milieu de la place, depuis le matin jusqu’au midi. Les lévites et beaucoup d’autres personnes instruites, interprétaient la loi à tout le peuple et lui expliquaient les paroles de Dieu. On célébra ensuite la fête des Tabernacles, et pendant la durée de cette fête Esdras lisait journellement dans le livre de la loi. Cette solennité dura sept jours, et le huitième jour ils firent l’assemblée du peuple selon la coutume (Schemini-Azereth). Le vingt-quatrième jour de ce même mois, ils s’assemblèrent, jeûnèrent, firent pénitence et s’engagèrent de la manière la plus solennelle à observer religieusement toutes les lois de Dieu, données par Moïse, son serviteur. FIN DE L’ECRITURE SAINTE. SUITE DU CHAPITRE VII. Le peuple israélite vécut en ces jours, et pendant quelque temps encore, paisible et tranquille. Quoiqu’il se trouvât sous la dépendance des rois de Perse, cependant l’administration immédiate en était confiée à ses grands prêtres, aux anciens et aux hommes les plus distingués du peuple. L’état des choses resta dès lors le même et aucun changement n’y fut introduit sous les dominations différentes qui vinrent bientôt succéder à celle des rois de Perse. Les _Macédoniens_, les _Égyptiens_ et les _Syriens_, tous consentirent à laisser au peuple israélite son administration antérieure.—Jérusalem était généralement regardée comme la patrie commune, même par ceux d’entre les Israélites qui demeuraient en grand nombre dans d’autres pays. Le temple reconstruit semblait à tous être le centre de l’assemblée nationale, le symbole de l’unité, et ils y faisaient parvenir leurs offrandes et leurs dons des pays même les plus éloignés.—Tout cela ne manquait pas d’exercer l’influence la plus salutaire à l’égard de leur vie religieuse. Bien qu’il n’y eût plus de prophètes après la mort de _Malachie_, le penchant à l’idolâtrie avait cependant complétement disparu; heureux effet de la bonne instruction que le peuple recevait alors. L’ordre et la majesté qui régnaient dans leur temple et partout dans le service divin; leur union et leur fidélité envers leurs souverains; leur zèle et leur activité, tout cela les relevait aux yeux des nations étrangères et rendait la dignité à leur religion qui les obligeait à tous ces devoirs. Partout où ils demeuraient, ils trouvaient l’occasion de montrer que l’obéissance et la fidélité envers le souverain passaient à leurs yeux pour les premiers devoirs, et ils s’appliquaient en outre à répandre la connaissance de Dieu parmi tous ces peuples païens. Un témoignage honorable d’estime leur fut accordé par _Alexandre le Grand_, roi de Macédoine. Ce grand conquérant, lors de son invasion dans la Phénicie, enjoignit au pontife de Judée de lui fournir des vivres pour son armée et de lui faire parvenir en même temps tous les impôts que les Israélites avaient à payer à _Darius Kodomanus_, roi de Perse. Mais le pontife lui répondit au nom du peuple israélite, qu’ayant prêté serment de fidélité à Darius son souverain, il devait être fidèle à ce prince. Cette réponse inattendue irrita tellement le roi Alexandre qu’il s’avança vers Jérusalem, résolu à punir les Israélites et à les forcer à lui obéir. Cependant, lorsque le pontife, accompagné du peuple, alla à sa rencontre, Alexandre lui fit un bon accueil, entra en paix dans la ville de Jérusalem, visita le temple, en examina les trésors sans y toucher, approuva la constitution israélite et garantit à tous ceux qui voudraient prendre du service dans son armée, la pleine liberté d’exercer leur culte. Beaucoup d’entre les Israélites se confiant à cette promesse se présentèrent alors à Alexandre et lui demandèrent l’admission dans son armée. Émigration pour l’Égypte. Après la mort d’Alexandre, ses généraux, ainsi que les gouverneurs placés à la tête des provinces qu’il avait conquises, s’érigèrent en rois de ces provinces. Il en résulta des guerres nombreuses, qui firent aussi beaucoup de mal à la Palestine. _Ptolomâus Lagi_, gouverneur d’Egypte, fut le premier qui s’empara de la Palestine. Ptolomâus s’étant convaincu de la fidélité des Israélites, qui avaient observé si fidèlement le serment autrefois prêté aux rois de Perse, les obligea à lui prêter le même serment. Il en emmena un grand nombre avec lui en Egypte, et beaucoup d’autres l’y suivirent volontairement. Il les mit, en partie, dans les forteresses comme garnison, les autres s’établirent à Alexandrie, jouissant des mêmes droits que les Egyptiens et les Grecs. _Seleucus Nicator_, roi de l’Asie Mineure, aimait aussi les Israélites à cause de leur fidélité, et il parvint à en attirer un grand nombre en leur accordant les mêmes droits qu’aux Grecs et en les élevant au rang des premiers citoyens. C’est principalement à Antiochie, la capitale, que beaucoup d’Israélites s’établirent. Ils se répandirent en général à cette époque bien avant dans l’Asie Mineure, dans la Syrie et dans la Grèce. _Ptolomâus Philadelphus_, protecteur des sciences, possédait à Alexandrie une bibliothèque de plus de deux cent mille ouvrages. Il fit prier le pontife à Jérusalem de lui remettre une copie des saintes Ecritures et de lui envoyer en même temps quelques savants pour en faire la traduction en grec. _Éliésar_, alors pontife, lui envoya une magnifique copie accompagnée de soixante-douze hommes savants, qui en accomplirent la traduction, ordinairement appelée _traduction des septante_ ou des _soixante-dix interprètes_. Cette traduction était très-considérée par les Israélites qui demeuraient hors de la Palestine. Ils s’en servaient pour expliquer la loi et pour en faire la lecture dans les synagogues, tandis que les Israélites en Palestine se servaient, pour le même usage, d’une traduction chaldéenne. Le peuple israélite jouit de la paix pendant le long règne de Ptolomâus, il s’adonna alors en grande partie aux sciences, se familiarisa avec la littérature grecque et embrassa les usages et les coutumes de cette nation. _Antigonus_, président du grand conseil, enseignait entre autres préceptes, qu’on ne peut servir Dieu, comme le serviteur sert son maître, en espérant d’être récompensé; mais qu’il faut le servir par l’amour le plus pur. Cette doctrine fut mal comprise par deux de ses élèves qui se nommaient _Sadoc_ et _Baithos_. Ils en répandirent la maxime erronée, qu’il n’y a, après la mort, ni récompense ni punition. Les partisans de cette doctrine fausse, funeste et hérétique, étaient appelés la secte des _Saducéens_. CHAPITRE VIII. DEPUIS LA GUERRE DE LA DÉLIVRANCE JUSQU’AUX TEMPS DE L’INDÉPENDANCE. (3610-3634) ———— Cruautés d’Antiochus Épiphanes. Le règne d’Antiochus Epiphanes, roi de Syrie, rejeta de nouveau les Israélites au milieu des souffrances et des persécutions. Il y avait déjà un assez grand nombre d’années que la Palestine était assujettie à la Syrie, lorsque ce roi monta sur le trône. Dans la fausse idée de maintenir plus sûrement les Israélites dans son obéissance, Antiochus se proposa d’anéantir leur religion et de les forcer à embrasser celle des païens. Il y avait alors deux grands prêtres à Jérusalem, l’un se nommait _Jason_ et l’autre _Ménélaus_. Ces hommes, ainsi qu’une grande partie du peuple, étaient entièrement portés à embrasser les mœurs des Grecs. Ils établirent à Jérusalem des jeux gymniques et dépouillèrent le temple pour payer les contributions promises au roi Antiochus. Peu de temps après cette spoliation, Antiochus envahit l’Egypte, et le faux bruit de sa mort se répandit. Alors le peuple irrité de la spoliation du sanctuaire, se révolta contre les deux prêtres sacriléges. A ces nouvelles, Antiochus se dirigea vers Jérusalem. Arrivé en cette ville, il tua une grande partie du peuple, en vendit quatre mille comme esclaves, enleva tous les vases d’or et d’argent consacrés au temple, et pour insulter au peuple, il profana le temple en y faisant égorger un porc sur l’autel. Quelque temps après, ce même roi, forcé par les Romains à quitter l’Egypte, exerça de nouveau toute sa rage contre la Palestine; il envoya à Jérusalem une armée qui pilla la ville et en massacra sans pitié les malheureux habitants. Il défendit, sous peine de mort, d’exercer la religion de quelque manière que ce fût; il fit déchirer les livres de la loi et dressa partout des temples d’idoles. Il envoya à cet effet un prêtre grec à Jérusalem pour instruire le peuple dans la religion païenne. Ce prêtre viola le temple de Jérusalem en le consacrant à Jupiter et en y plaçant la statue de cette idole, puis il sacrifia sur l’autel de Dieu à la manière grecque. Beaucoup d’Israélites abandonnèrent alors leur religion; mais aussi il y en eut beaucoup qui s’enfuirent ou moururent de la mort des martyrs. Au nombre de ces derniers se trouva un vieillard qui se nommait _Eliasar_. Celui-ci préféra mourir que de transgresser les commandements de Dieu lors même que le tyran ne lui demandait qu’une transgression apparente. Il y eut aussi une femme, nommée _Hanna_, qui se montra tellement attachée aux devoirs de sa religion, qu’elle ne chancela pas un instant dans la foi en voyant même de ses propres yeux, qu’on égorgeait ses sept fils les uns après les autres, qui se refusèrent tous à sacrifier aux faux dieux. Le dernier de ses fils, très-jeune encore, fut même encouragé à l’idolâtrie par le tyran, qui lui promit de le sauver, s’il fléchissait seulement le genou devant l’idole, ne fût-ce que pour l’apparence. Mais ce jeune homme qui avait vu mourir courageusement ses six frères n’hésita point et, rendant le dernier soupir sous la main de son bourreau, il s’écria: «Ecoute Israël! l’Eternel est notre Dieu, l’Eternel est unique!» Cette mère ayant ainsi vu mourir tous ses enfants de la mort des martyrs, mort à laquelle elle les avait encouragés elle-même, ne se sentit plus de douleur; elle se précipita du haut d’une maison et mourut. Les Machabées. Il y avait alors un prêtre, nommé _Mathatias_, qui avait cinq fils: Jochanan Gadi, Simon Thassi, Juda Machabée, Eleasar Havran et Jonathan Haphus. Cet homme, témoin des maux de son peuple, s’enfuit avec ses fils pour aller demeurer dans la petite ville appelée _Modin_. Cependant les agents syriens y vinrent aussi. Ils lui parlèrent et lui firent les plus grandes promesses s’il voulait renoncer aux croyances de ses pères. Voyez, lui dirent-ils, vous êtes l’homme le plus distingué dans cette ville et père d’une famille nombreuse, soyez donc aussi le premier en faisant tout ce que le roi ordonne; suivez l’exemple de toutes les nations et d’une foule d’Israélites. Le roi vous regardera alors comme son ami, et vous et vos fils seront largement récompensés, vous aurez de l’or et de l’argent et de riches présents. Or Mathatias répondit: Quand même tout le monde abandonnerait la loi de Dieu, moi et mes fils nous lui resterons fidèles. Que Dieu nous préserve de jamais consentir à l’exigence d’Antiochus, jamais nous ne servirons les faux dieux. Pendant que Mathatias parlait ainsi, un Israélite s’avança aux yeux de tout le peuple pour sacrifier aux idoles dans la ville de Modin. Mathatias en voyant cet acte d’idolâtrie fut entraîné par son ardeur: il se précipita sur cet homme, le terrassa près de l’autel, tua l’agent du roi, détruisit l’autel et s’écria de toutes ses forces: Que quiconque brûle d’amour pour Dieu et la loi, me suive! Ses fils et tous ceux qui aimaient la justice et la vérité le suivirent alors avec leurs femmes et leurs enfants et tout ce qu’ils possédaient, ils s’enfuirent dans le désert et s’y établirent, car la misère les entourait de tous côtés et la tyrannie était à son comble. Cependant, à mesure que la cruauté d’Antiochus s’augmentait, le parti de Mathatias devenait plus fort et plus nombreux. Ce digne prêtre parcourut le pays, renversa les autels des faux dieux, punit les apostats et souvent fit essuyer des pertes nombreuses aux généraux d’Antiochus. Cet homme courageux venant à mourir, Juda son fils, obéissant à la dernière volonté de son père, se mit à la tête du peuple et remporta les plus grandes victoires. Antiochus en devint furieux et jura la ruine complète du peuple israélite. Cependant, étant sur le point de se charger lui-même du commandement de ses troupes, il tomba de son char et mourut dans les douleurs les plus atroces. Déchiré par la souffrance et tourmenté par la crainte de la mort, il promit de faire pénitence, fit même le vœu de se faire israélite dès qu’il serait rétabli; tout fut vain. _Eupator_ son fils, et _Démétrius Soter_ successeur de ce dernier, continuèrent à faire la guerre aux Israélites, et tous les deux, ils furent vaincus par Juda Machabée qui défit leurs armées, les expulsa de Jérusalem, purifia le temple, réorganisa le culte, et ordonna en mémoire de ces grands événements, la célébration de la fête ordinairement appelée _Chanouka_, c’est-à-dire, consécration du temple¹⁸. ¹⁸ Cette fête commence le vingt-cinquième du neuvième mois (Chislow.) Elle est célébrée pendant huit jours par une espèce d’illumination qui a lieu chaque soir dans la synagogue et dans les maisons et qui est accompagnée de cantiques en actions de grâces et à la louange de Dieu. Juda Machabée¹⁹ est le premier chef du peuple israélite qui fit alliance avec les Romains. Il succomba dans la guerre, entreprise contre Bacchides, général de Démétrius. Jonathan, le plus jeune de ses frères lui succéda dans le commandement de l’armée. C’était un homme sage et vaillant comme Juda son frère. Les Romains le reçurent dans leur alliance et les rois d’Egypte et de Syrie ambitionnèrent son amitié. Cependant, un homme rusé appelé Tryphon, tuteur du jeune prince Antiochus Theos, invita Jonathan avec ses fils à se rendre à Ptolomâus, prétextant vouloir lui donner cette ville comme gage de son amitié. Mais il l’y retint prisonnier et le tua avec ses fils. ¹⁹ C’est par ses vertus et ses exploits que _Juda Machabée_ a mérité de donner son nom à toute cette famille, à laquelle le peuple d’Israël dut ses derniers jours de gloire et de prospérité. Construction du temple égyptien. Pendant ces victoires remportées par les Machabées, Ménélaus, ce prêtre sacrilége, se réfugiait en Syrie où il mourut d’une mort honteuse. Un autre prêtre nommé _Onias_, croyant avoir des titres au pontificat, se retira en Egypte lorsqu’il vit qu’un autre lui était préféré. Arrivé dans ce pays, il s’y lia intimement avec un autre Israélite appelé _Dositheus_, et tous les deux, ils surent, par leurs talents et par leurs artifices, s’attirer tellement les égards et la considération du roi d’Egypte, Ptolomäus Philometer, qu’ils furent nommés par ce prince chefs de toute l’armée égyptienne. C’est sur leur proposition qu’un temple fut construit à _Léontopolis_, où s’exerçait le même culte qu’à Jérusalem. Ce temple se conserva pendant de longues années; il existait encore lorsque celui de Jérusalem était déjà détruit. Ce n’est que sous le règne de Trajan, l’empereur romain, qu’il fut ruiné. Simon investi par la nation du pontificat et du trône. Après la mort de Jonathan, Simon son frère fut chargé du commandement de l’armée tout en remplissant les fonctions de pontife. Il renouvela l’alliance avec les Romains et fit la paix avec Démétrius roi de Syrie. Ce fut alors que le peuple israélite, voulant témoigner toute sa reconnaissance envers cette noble famille des Machabées, résolut, dans une assemblée générale, que toutes les dignités, dont Simon était revêtu temporairement, lui restassent héréditaires. Les Romains, ainsi que le roi de Syrie, adhérèrent à cet arrêté et le peuple israélite fut de nouveau reconnu comme nation indépendante. Les Israélites, en mémoire de cet événement glorieux, frappèrent une nouvelle monnaie et établirent une nouvelle ère à dater de l’époque de la délivrance. Simon fut assassiné avec deux de ses fils au milieu d’un festin par Ptolomäus son gendre, gouverneur de Jéricho. _Jean Hyrcan_, son fils, lui succéda. Ce prince s’empara de beaucoup de villes, qui avaient appartenu aux Israélites avant d’être enlevées par les Syriens et les Grecs. Il assujettit les Samaritains et détruisit leur temple, établi sur le mont Garizim. Il vainquit les Iduméens, qui embrassèrent alors la religion des Israélites et se confondirent avec cette nation. État de la religion. Les cruelles persécutions religieuses d’une part et les relations fréquentes avec les païens de l’autre, devaient nécessairement exercer une grande influence sur les opinions religieuses du peuple. Aussi, vers cette époque, différentes sectes se firent-elles remarquer: les _Hellènes_, ou Israélites qui demeuraient en Egypte et exerçaient leur culte dans le temple de Léontopolis. Les _Saducéens_ (_voyez_ plus haut). Les _Esséniens_ qui pour la plupart, habitaient dans la solitude, menant une vie retirée tout en admettant la communauté des biens. Ils croyaient à une récompense et à une punition future; mais ils expliquaient l’Ecriture sainte dans un sens figuré. Les _Pharisiens_ prétendaient que Dieu, en se révélant à Moïse, lui avait communiqué _la Loi écrite_ et lui en avait donné en même temps _une explication orale_; ils supposaient, par conséquent, que ces deux parties ne formaient qu’un seul tout. Cette _explication_, ou _Loi orale_, pour qu’elle ne fût pas un jour exposée à des exégèses erronées et à des interprétations arbitraires, ne pouvait être communiquée qu’à quelques hommes, les plus distingués de la nation, afin qu’ils conservassent ces doctrines pures et intactes. Ce n’est que plus tard, dans les temps d’oppression et de persécution, lorsqu’il était à craindre que ces traditions orales ne tombassent dans l’oubli, qu’un homme remarquable par sa piété et sa science, _Rabbi Jéhuda Hanasi_, se chargea enfin de les écrire. Cet ouvrage, formant six parties, s’appelle _Mischna_. Ce ne fut que trois cents ans après, que le commentaire de la Mischna fut recueilli (les cinq cent vingt-neuf chapitres de la Mischna s’y étendent en douze volumes in-folio) et conservé par écrit. L’ensemble de la Mischna et de son commentaire est ordinairement appelé _Talmud_ ou _Gamara_. CHAPITRE IX. DEPUIS LA CONQUÊTE DE L’INDÉPENDANCE JUSQU’A LA DESTRUCTION DE JÉRUSALEM. (3634-3828.) ———— Aristobule, Alexandre Janäus, Alexandra. Après la mort d’Hyrcan, _Aristobule_ son fils s’empara du trône. Il traita sa mère et sa famille d’une manière très-cruelle et retint en prison trois de ses frères. Mais son règne fut de courte durée, il ne se prolongea pas au delà d’une année. Lorsque Aristobule vint à mourir, ses frères furent mis en liberté par son épouse, et _Alexandre Janäus_, l’aîné d’entre eux, monta sur le trône. Il étendit les bornes de son royaume; mais d’un caractère violent et emporté et professant les doctrines pernicieuses des Saducéens, il persécuta les Pharisiens qui lui suscitaient des embarras, et en fit massacrer un grand nombre. Il mourut enfin dans la vingt-septième année de son règne, des suites de son intempérance. Il remit lui-même avant sa mort les rênes de l’Etat à _Alexandra_ son épouse, en lui conseillant la réconciliation avec les Pharisiens. Hyrcan II, ou le royaume sous l’influence des Romains. Alexandra, suivant le conseil de son époux, se réconcilia avec les Pharisiens et régna pendant neuf ans, soutenue par cette secte puissante. Elle chargea Hyrcan son fils du pontificat. C’était un homme d’un caractère doux et souple, dévoué à la secte des Pharisiens. Lorsque Alexandra vint à mourir, _Hyrcan II_ fut élu à Jérusalem roi d’Israël. Mais Aristobule son frère, attaché à la secte des Saducéens, fut poussé par ces derniers à s’emparer du trône. Ces deux princes à la tête de leur parti se firent bientôt la guerre. Hyrcan fut vaincu et forcé de céder au vainqueur le pontificat et le trône. Aristobule s’était à peine emparé du royaume qu’il commença à persécuter ceux qui avaient été partisans d’Hyrcan. C’est alors, qu’un de ces derniers, nommé _Antipater_ (Iduméen de naissance qui avait embrassé la religion israélite) persuada Hyrcan de recommencer la guerre et de ressaisir le gouvernement. Les deux frères ennemis cherchèrent, chacun de leur côté, le secours des princes étrangers. Hyrcan s’adressa à _Pompée_, général romain, qui se trouvait en ce moment dans l’Arabie à la tête d’une armée. Pompée vint à son aide, vainquit Aristobule, l’emmena avec lui à Rome pour relever son entrée triomphale par la présence de ce captif, et remit à Hyrcan les dignités de l’Etat et du pontificat en lui enjoignant que le gouvernement israélite fût dorénavant soumis au peuple romain et qu’il eût à lui payer un tribut annuel. Hérodes. Après son avénement au pouvoir, Hyrcan ne se chargea que des fonctions de pontife, laissant les soins de l’Etat à Antipater son ami. Ce dernier, pour se mettre dans les bonnes grâces des Romains, ne songea qu’à se signaler par quelque service. Le peuple mécontent d’Hyrcan, de la négligence de son gouvernement, et fatigué des troubles continuels excités par Aristobule, sollicita le Romain Gabynius, proconsul de Syrie, de changer la constitution du pays. Cet homme, cédant volontiers à cette demande, confirma Hyrcan dans le pontificat, mais lui retira les dignités royales, divisa le pays en cinq districts et remit le gouvernement de chacun à un haut conseil, composé d’hommes les plus distingués du pays. C’est de cette manière que la _constitution monarchique_ fut changée en _constitution aristocratique_. _Antigonus_, fils d’Aristobule, recouvra le trône quelques années plus tard; cependant, son règne ne fut que de courte durée, il en fut privé par _Hérodes_ fils d’Antipater (l’Iduméen nommé plus haut), qui secouru par les Romains, le vainquit et le tua. C’est ainsi que finit le règne des Machabées après une durée de cent vingt ans. Hérodes, homme rusé et intrépide, était allé à Rome se présenter devant le sénat et solliciter le trône. Sa demande lui fut accordée; et, secondé par Antoine et Octave, il réussit à se faire nommer roi d’Israël. Arrivé de cette manière au pouvoir et voyant le peuple mécontent de son règne, il exerça beaucoup de cruautés pour s’assurer du trône. Il fit tuer l’ex-roi Hyrcan quoiqu’il en eût épousé une des parentes nommée Mariane, et fit massacrer sans pitié tous les descendants de cette célèbre famille des Machabées. Pour gagner les bonnes grâces du peuple, il fit restaurer le temple de Jérusalem et ajouta à son ancienne magnificence. Or, toute la vie de ce roi ne fut qu’une série d’adversités et d’infortunes; souvent accablé par le malheur, il fut sur le point de se donner la mort. La cause première de ses afflictions fut la discorde et la division qui régnaient dans sa famille. Entraîné par la défiance, et sur les rapports calomnieux de sa sœur, l’infâme Salomé, il fit tuer son épouse Mariane et plusieurs de ses fils. Cinq jours seulement avant sa mort, il fit massacrer son fils aîné, Antipater, désigné dans son testament comme héritier du trône. Il mourut enfin d’une maladie chronique des plus douloureuses, à l’âge de soixante-dix ans, dans la trentième année de son règne. La postérité lui donna le nom d’_Hérodes le Grand_. Cependant sa grandeur ne fut qu’une profonde misère cachée sous les apparences d’une splendeur extérieure; car toutes ses actions n’eurent pour but que celui de satisfaire à son faux honneur. Remarques générales. On ne doit pas douter que l’établissement des synagogues pour l’exercice régulier du culte, ne soit une institution qui date d’une époque très-ancienne. L’usage de réciter dans ces lieux de prières, à certains jours de la semaine, quelques chapitres des livres de Moïse, est attribué à Esdras, cet infatigable restaurateur de la loi de Moïse. La grande assemblée, ordinairement appelée _la grande synagogue_, florissait dans le temps des derniers prophètes. C’est de cette assemblée que sont émanées nos prières journalières: principalement le _Schema_, une partie de la Tephila, les dix-huit bénédictions et, en outre, les grâces avant et après le repas. Sous le règne de Simon Machabée, fut institué à Jérusalem le _Sanhédrin_, à qui l’on confia l’administration de la justice et l’interprétation de la loi. Le chef de cette assemblée s’appelait _Nasi_. L’état des savants se divisait en trois classes. 1º Les _Sopherim_, qui s’occupaient de copier et de commenter l’Ecriture sainte. En leur qualité de membres de l’assemblée législative, on les appelait _Chachamim_ (sages). 2º Les _Rabbanim_, qui instruisaient le peuple et prononçaient des discours publics. 3º Les _Talmidim_ (élèves) qui, parvenus à un certain degré de science, étaient appelés _Chaberim_, c’est-à-dire, collègues de la société des savants. La grande partie de la nation en Palestine et dans les environs de l’Euphrate s’occupait de l’agriculture et de l’industrie; ceux qui demeuraient dans l’Egypte, dans l’Asie Mineure et dans la Grèce faisaient pour la plupart le commerce. C’est du temps d’Hérodes que nous trouvons les affaires intérieures du pays dans l’état le plus déplorable, première conséquence des cruautés de ce prince. Bien qu’il fît embellir le sanctuaire, il ne le fit pas administrer comme la religion l’exigeait: il disposa du pontificat à son bon plaisir, ne porta pas l’attention requise à cette grande institution des Sanhédrins, seul il fit les lois, et établit, selon sa volonté, des cours de justice. Pendant ce malheureux état des choses, le peuple se divisait en _trois partis_. 1º Les Zélateurs, ou les défenseurs de la liberté, qui s’opposaient à tout ce qui était étranger soit à la religion, soit aux habitudes de la nation. Croyant à une restauration complète du royaume israélite, ils excitèrent la révolte et contribuèrent à la ruine du pays. 2º Ceux d’entre le peuple qui prétendaient que le Messie, tel qu’il était prédit par les prophètes, était près de venir. Ces hommes croyaient voir dès cette époque l’accomplissement d’une prophétie, qui, de nos jours encore, est loin de s’accomplir: car le temps où le _royaume de Dieu sera établi sur la terre_ est encore bien reculé; ce temps où tous les hommes connaîtront et adoreront le seul vrai Dieu, où tous vivront entre eux en paix et en concorde. 3º La grande partie de la nation, qui était sincèrement attachée aux préceptes de la religion, se joignit aux savants interprètes de l’Ecriture sainte en professant leurs doctrines.—A la tête des écoles où étaient enseignées ces doctrines, se trouvaient deux grands hommes _Hillel_ et _Schammai_, qui contribuèrent de tout leur pouvoir à développer la Loi et à relever le Rabbinisme. Cette école continua de travailler pendant quelques siècles à l’édifice du culte israélite. La mission du Rabbinisme consistait à donner aux principes fondamentaux de la loi divine une enveloppe telle que cette vérité éternelle, révélée à Israël, pût braver les siècles et tous les orages qui attendaient la nation. Archelaus. Agrippa. Après la mort d’Hérodes, Archelaus son fils lui succéda sur le trône. Ce prince mécontenta le peuple par ses actes arbitraires et par ses empiètements sur la religion. Des plaintes nombreuses ayant été portées à sa charge, il fut exilé à Vienne dans la Gaule par l’empereur Auguste. La Palestine fut alors réunie à la Syrie et administrée par des gouverneurs romains. Quoique le petit-fils d’Hérodes le Grand, _Agrippa_ parvînt au trône quelque temps après, l’état des choses ne changea presque plus. Car le règne de ce dernier roi ne fut que de courte durée: Agrippa vint bientôt à mourir et, comme son fils était alors trop jeune pour monter sur le trône, le pays retomba de nouveau sous la domination immédiate des Romains et son administration fut confiée à leurs représentants. Ces gouverneurs étaient, pour la plupart, des hommes barbares qui opprimaient le peuple, le volaient et le traitaient tyranniquement. Il y en eut un du temps de l’empereur Néron, nommé Gesius Florus, dont la rapacité et la cruauté excitèrent le peuple à la révolte, malgré les efforts des plus sages qui voulaient arrêter l’insurrection en faisant entrevoir au peuple les tristes conséquences auxquelles ils allaient s’exposer. Ces hommes échouèrent dans leurs efforts devant les intrigants qui, placés à la tête de la révolte, savaient remuer adroitement les passions et forcer même les plus pacifiques à se ranger de leur parti. C’est ainsi que le soulèvement se répandant dans le pays fit des progrès rapides et devint enfin des plus menaçants. L’empereur Néron, pour étouffer la révolte, envoya alors une armée nombreuse sous les ordres de _Vespasien_ et de _Tite_ fils de ce dernier. Ce général rencontra souvent une résistance vigoureuse, dont il fut tellement exaspéré qu’il tua beaucoup d’Israélites, en vendit un plus grand nombre encore comme esclaves, et ravagea presque toutes les villes et tous les villages. Etant sur le point de marcher sur Jérusalem, Vespasien reçut la nouvelle de la mort de Néron et fut rappelé à Rome pour monter sur le trône. En quittant la Palestine, il remit le commandement des troupes à Tite son fils, lui enjoignant de s’emparer de Jérusalem et de ce qui restait encore à soumettre dans le pays. Lorsque Tite mit le siége devant Jérusalem, il y avait dans cette ville une grande affluence de peuple; les uns s’y étaient rendus pour chercher un refuge, les autres pour assister aux fêtes qui se célébraient à cette époque. Les Israélites se défendirent avec une grande bravoure et opposèrent aux Romains une si terrible résistance que Tite lui-même commençait à désespérer de la conquête de cette ville. Mais la dissension qui régnait parmi les différents chefs des partis, fit bientôt éclater la guerre civile dans l’intérieur de la ville. Les partis ne songèrent qu’à se nuire. Les crimes les plus atroces et les plus horribles forfaits s’y commirent alors. Les hommes les plus distingués et les plus nobles furent tués ou massacrés, toutes les munitions et provisions de bouche furent brûlées ou détruites et la famine commença à se déclarer d’une manière affreuse. Quoique épuisés par la guerre civile, exténués par la famine et par de nombreuses maladies, les Israélites ne cessèrent de se défendre avec une grande bravoure et une grande adresse; mais les Romains parvinrent enfin à escalader les murs de Jérusalem et à pénétrer dans l’intérieur de la ville où ils firent un carnage horrible. Le nombre de ceux qui périrent pendant le siége et lors de la prise de la ville, est porté à _un million cent mille hommes_, et ceux qui furent pris et vendus comme esclaves à quatre-vingt-dix-sept mille. Le temple fut réduit en cendres, le pays entièrement dépeuplé et les habitants dispersés dans toutes les parties du monde. C’est depuis lors qu’Israël a perdu toute nationalité, qu’il a cessé d’être un seul peuple. Dix-huit siècles presque se sont écoulés, et pendant ce long espace de temps, Israël vit encore dispersé parmi les différentes nations de la terre, participant à leur histoire et partageant avec elles un sort commun. Bien qu’il eût beaucoup à souffrir au milieu de toutes ces nations; que la tyrannie, l’ignorance et le fanatisme lui attirassent beaucoup de maux; que l’injustice prolongeât son règne pendant de longues années et se soutînt de siècle en siècle: grâce à la providence divine, cette oppression honteuse, ce mépris des droits de l’homme a cessé à l’approche de la vraie connaissance de Dieu, aux approches d’une civilisation éclairée. C’est au dernier siècle surtout, qu’il fut réservé de faire triompher la raison sur la prévention, et la justice sur l’aveugle arbitraire. A l’heure qu’il est, une grande partie des nations ont commencé à avouer leurs torts et se hâtent de réparer leurs fautes. Confondu et assimilé à la société humaine, Israël n’a donc plus qu’une seule tâche à remplir sur la terre, savoir: de conserver _son indépendance religieuse_; de ne jamais cesser d’entretenir la pureté de sa croyance révélée à Sinaï; de la nourrir au sein de ses familles, afin qu’il continue d’être le dépositaire de la Loi divine, un prêtre de Dieu, placé à tous les coins de la terre pour enseigner et pour répandre la connaissance de l’Eternel, du vrai, seul et unique Dieu, et alors seront accomplies ces paroles divines à Abraham: «Toutes les familles de la terre seront bénies en toi.» Qu’Israël continue à remplir cette mission sainte et glorieuse, jusqu’à l’entier accomplissement de la parole du prophète et alors arrivera le jour dont il est dit: «Dans les derniers temps, la montagne de la maison de l’Eternel sera fondée sur le haut des monts, et s’élèvera au-dessus des collines: les peuples y accourront, et les nations se hâteront d’y venir en foule, en disant: Allons à la montagne de l’Eternel, à la maison du Dieu de Jacob; il nous enseignera ses voies, et nous marcherons dans ses sentiers; parce que la Loi sortira de Sion; et la parole de l’Eternel de Jérusalem.» FIN. TABLE DES MATIÈRES. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Pages. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── _Préface_. I ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. Ier.— Histoire généalogique du peuple israélite. 5 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── La Création. _ib._ ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Adam. 7 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Eve (Chava). 8 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Péché des premiers hommes. 9 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Caïn et Abel (Hébel). 11 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Suite des patriarches vivant avant le 12 déluge. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Noé (Noach) et le déluge. 15 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Alliance de Dieu avec Noé. 19 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Tour de Babel et dispersion des hommes. 20 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. II.— Depuis Abraham jusqu’à Moïse. (1948-2368). 22 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Abraham. 23 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Promesse de l’Éternel et piété d’Abraham. 26 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Alliance de la circoncision. 27 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Hospitalité d’Abraham. Naissance d’Isaac 29 prédite pour la dernière fois. Intercession d’Abraham. Destruction de Sodome. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Naissance d’Isaac. Sacrifice d’Abraham. 31 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Mort de Sarah.—Isaac épouse Rebecca.—Mort 33 d’Abraham. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Naissance de Jacob et d’Ésaü. 37 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Primogéniture et bénédiction paternelle. 38 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Voyage de Jacob.—Il arrive chez Laban et y 41 demeure. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Retour de Jacob et sa rencontre avec Ésaü. 44 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Joseph vendu par ses frères. 48 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Joseph est mis en prison. 51 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Joseph explique des songes. Il est délivré 52 et élevé à la dignité de prince. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Les frères de Joseph vont en Égypte. 58 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Les enfants de Jacob retournent en Égypte 62 avec Benjamin. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Joseph fait mettre sa coupe dans le sac de 65 Benjamin. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Juda s’offre à demeurer esclave au lieu de 66 Benjamin. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Joseph se fait connaître à ses frères. 68 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Jacob va en Égypte et s’y établit. 70 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Le pieux désir de Jacob. 73 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Jacob adopte les deux fils de Joseph. _ib._ ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Mort de Jacob et de Joseph. 75 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. III.— Depuis Moïse jusqu’à l’occupation de 78 Chanaan. (2368-2489). ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Israël en esclavage. _ib._ ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Naissance de Moïse. 79 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── La fuite de Moïse. 80 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Moïse est appelé de Dieu pour délivrer les 82 Israélites. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Moïse et Aaron déclarent à Pharaon les 83 ordres de Dieu. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Préceptes touchant la fête de la Pâque. 85 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Sortie de l’Égypte. 86 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Passage de la mer Rouge. 87 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Voyage vers le mont Sinaï. Murmures des 90 Israélites. La manne. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Continuation. 93 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Révélation de l’Éternel sur le mont Sinaï. 94 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Le veau d’or. 96 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Le séjour du peuple israélite près du mont 97 Sinaï. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Le tabernacle. 98 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Le sabbat et les fêtes. 99 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Départ de Sinaï et marche jusqu’aux 103 confins de la terre promise. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Mort de Moïse. 106 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. IV.— Depuis la Conquête de Chanaan jusqu’à 109 Saül. (2489-2882). ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Entrée du peuple israélite dans la terre _ib._ promise. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Josué exhorte les Israélites à observer la 114 loi. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Josué fait assembler le peuple pour la 115 dernière fois. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Mort de Josué et d’Éléazar. 117 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Les juges. _ib._ ─────────────────────────────────────────────────────────────────── _Remarque générale._—État du peuple 131 israélite à l’époque des juges ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. V.— Histoire du peuple Israélite sous les rois 135 Saül, David et Salomon. (2882-2964). ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Saül agit contre la volonté de l’Éternel, 138 il est rejeté. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Action héroïque de Jonathan. 140 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Saül ne remplit pas exactement la volonté 142 de Dieu, en est sévèrement blâmé. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David est sacré roi d’Israël. 144 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David triomphe du géant Goliath. 145 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David et Saül: bravoure et droiture d’un 149 côté, jalousie et ruse de l’autre. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Jonathan avertit David de la colère de 151 Saül. David se sauve, et se retire auprès de Samuel. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Sainte inspiration. 152 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David et Jonathan renouvellent leur union. 153 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David se retire à Nobé vers Achimelech et 154 de là chez Achis. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David se cache en différents lieux. Saül 155 fait tuer Achimelech. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David est persécuté par Saül, mais Dieu le 157 protége et le sauve de tous dangers. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David caché dans une caverne empêche qu’on 159 ne tue Saül. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Conduite de David à l’égard de Nabal. 161 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David a de nouveau l’occasion de pouvoir 164 tuer son ennemi et ne le tue pas. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── La pythonisse d’Endor. 166 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Mort de Saül et de ses fils. 167 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Charité des habitants de Jabès. 168 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David règne sur Juda, et Isboseth sur 169 Israël. Combat entre les deux armées. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Isboseth est tué. David venge sa mort. 172 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David est reconnu roi par tout Israël. Il 173 prend la forteresse de Sion. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Jérusalem devient la capitale et le siége 174 du temple national. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David veut bâtir un temple. Dieu lui fait 175 déclarer que ce sera son fils qui le bâtira. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Victoires de David. Noms de ses officiers 177 supérieurs. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David honore le souvenir de son ami _ib._ Jonathan en Miphiboseth, fils de ce dernier. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Hanon outrage les ambassadeurs de David. 178 Défaites des Syriens et des Ammonites. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Péché de David avec Bathseba. 180 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David est repris de son péché, et marque 181 son repentir. Naissance de Salomon. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Inceste d’Amnon. Vengeance d’Absalom. 184 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Révolte d’Absalom: David s’enfuit de 185 Jérusalem. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Ziba, Simeï. C’est dans l’adversité que 187 l’on reconnaît les hommes. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Achitophel: orgueil, projets manqués, 189 désespoir, suicide. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Absalom est tué. 191 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── David pleure la mort d’Absalom; il se 193 montre gracieux après sa réintégration. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Murmure d’Israël contre Juda. 194 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Salomon est établi successeur de David. 195 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Avis de David à Salomon et à Israël. Sa 198 mort. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Salomon demande à Dieu la sagesse. 201 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Jugement rendu par Salomon. 203 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Salomon pense à bâtir le temple. 205 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Description du temple bâti par Salomon. 206 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Dédicace du temple. Prière de Salomon. 207 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Dieu se révèle une seconde fois à Salomon. 210 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── La reine de Saba vient trouver Salomon et 211 admire sa sagesse. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Les femmes étrangères font tomber Salomon 212 dans l’idolâtrie. Mort de ce prince. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Division du royaume. 214 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. VI.— Histoire des deux royaumes jusqu’à leur 217 ruine. (2964-3338). ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Les deux rois. _ib._ ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Les deux royaumes. 219 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Israël en captivité dans l’Assyrie. 226 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Origine de la secte des Samaritains. 228 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Le royaume de Juda. 229 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Captivité de Babylone. _ib._ ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Les _Prophètes_, leur _Vocation_, en quel 242 _lieu_ ils ont vécu et à quelle _époque_. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── État du peuple pendant le temps de l’exil. 246 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. VII.— Les Israélites vivent sous la domination 251 étrangère jusqu’à la guerre de la délivrance. (3408-3610). ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Retour de la captivité de Babylone. _ib._ ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. VII.— (Suite.) 257 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Émigration pour l’Égypte. 259 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. VIII.— Depuis la guerre de la délivrance 261 jusqu’aux temps de l’indépendance. (3610-3634) ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Cruautés d’Antiochus Épiphanes. _ib._ ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Les Machabées. 263 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Construction du temple égyptien. 265 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Simon investi par la nation du pontificat 266 et du trône. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── État de la religion. 267 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── CHAP. IX.— Depuis la conquête de l’indépendance 269 jusqu’à la Destruction de Jérusalem. (3634-3828). ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Aristobule, Alexandre Janäus, Alexandra. _ib._ ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Hyrcan II, ou le royaume sous l’influence 270 des Romains. ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Hérodes. 271 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Remarques générales. 272 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── Archelaus. Agrippa. 275 ─────────────────────────────────────────────────────────────────── FIN DE LA TABLE. Note de Transcription Cette livre présente plusieurs variantes orthographiques, qui ont été fidèlement reproduites. Les accents sur la lettre _E_ sont souvent omis, en particulier dans les noms. Il’y’a _l’Eternel_ a côté de _l’Éternel_, ainsi que _Esaü/Ésaü_, _Hébron/Hebron_, _Égypte/Egypte_, _Samuël/Samuel_, _Jéroboam/Jeroboam_, _Éla/Ela_ (page 222), _Ézéchias/Ezéchias_ (page 234), _Élie/Elie_. Il’y’a aussi autres variantes dans les noms propres: _Bathseba/Bethseba_, _Jerabaal/Jerobaal_ (page 124), _Simeï/Semeï_ (page 187-188). Dans la plupart des cases, l’une ou l’autre transcription peut être acceptable comme reddition de l’hébreu, et l’écriture originelle a été préservé. On trouve aussi parfois _habitans_, _enfans_, et autrefois _habitants_, _enfants_. Les notes de bas de page ont été renumérotés consécutivement au long du livre. Les erreurs d’imprimeur suivants ont été corrigés: - *p.14 l.10*: dans la voix de Dieu —> dans la voie de Dieu - *p.38 l.8*: demeurait à la maison, —> demeurait à la maison. - *p.99 l.15*: guillelmets superflues apres aussi une convocation sainte; - *p.101, derniere ligne de la note*: j’obligation —> l’obligation - *p.117 l.2*: serviteur de l’Eternel; —> serviteur de l’Eternel, - *p.119, commentaire a marge a côté du l.4*: puncte manquant apres JUGE 2e - *p.120 l.19*: y fût tué —> y fut tué - *p.131 l.13*: sans l’assistance. des prêtres. —> sans l’assistance des prêtres. - *p.134 l.8*: que les enfants d’·sraël —> que les enfants d’Israël - *p.143 l.15*: Samuël dit à Saul —> Samuël dit à Saül: - *p.147 l.8*: Et le peuple lui répondit. —> Et le peuple lui répondit: - *p.157 l.-8*: quiétaient environ —> qui étaient environ - *p.162 l.11*: cent paquet de raisins secs —> cent paquets de raisins secs - *p.163 l.-8*: et son c_œ_ur [_œ_ en italique] —> et son cœur - *p.181 l.-2*: ne voulut point toucherà —> ne voulut point toucher à - *p.194 l.8*: fils de Zeruia —> fils de Zeruïa - *p.214 l.-3:* rencontra Joroboam —> rencontra Jeroboam - *p.216 l.13-14*: la parole qu’il avait avait dite —> la parole qu’il avait dite - *p.240 l.17*: avec les pricipaux de Jérusalem —> avec les principaux de Jérusalem - *p.250, note, l.-2*: la distribution des aumômes —> la distribution des aumônes - *p.255 l.13*: selon le coutume —> selon la coutume - *p.279 l.9 (Table des Matières)*: Suite de patriarches —> Suite des patriarches - *p.283 l.2 (Table des Matières)*: Israël en cativité —> Israël en captivité - *p.283 l.15 (Table des Matières)*: CHAP. VIII.—...(3610-3624) —> CHAP. VIII.—... (3610-3634) - *p.283 l.23 (Table des Matières)*: CHAP. IX.—... (3634-3830.)... 169 —> CHAP. IX.—... (3634-3828) ... 269 - *p.283 l.24 (Table des Matières)*: Alexandre Jansaüs —> Alexandre Janäus *** End of this LibraryBlog Digital Book "Histoire Sainte ou Histoire des Israélites" *** Copyright 2023 LibraryBlog. All rights reserved.