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Title: Le ménagier de Paris (v. 1 & 2)
Author: Anonymous
Language: French
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*** Start of this LibraryBlog Digital Book "Le ménagier de Paris (v. 1 & 2)" ***


produced from images available at Bibliothèque nationale
de France (BnF/Gallica) at http://gallica.bnf.fr)



Notes de transcription: Les erreurs clairement introduites par le
typographe ont été corrigées. L'orthographe d'origine a été conservée et
n'a pas été harmonisée.



                                   LE

                           MÉNAGIER DE PARIS.



                                   LE

                           MÉNAGIER DE PARIS,

                                 TRAITÉ

                   DE MORALE ET D’ÉCONOMIE DOMESTIQUE

                           COMPOSÉ VERS 1393,

                       PAR UN BOURGEOIS PARISIEN,

                               CONTENANT

   Des préceptes moraux, quelques faits historiques, des instructions
 sur l’art de diriger une maison, des renseignemens sur la consommation
du Roi, des Princes et de la ville de Paris, à la fin du quatorzième siècle,
                          des conseils sur le
jardinage et sur le choix des chevaux; un traité de cuisine fort étendu,
       et un autre non moins complet sur la chasse à l’épervier.

                               ENSEMBLE:

L’histoire de Grisélidis, Mellibée et Prudence par Albertan de Brescia (1246),
traduit par frère Renault de Louens; et le chemin de Povreté et de Richesse,
poëme composé, en 1342, par Jean Bruyant, notaire au Châtelet de Paris;

                      PUBLIÉ POUR LA PREMIÈRE FOIS

               PAR LA SOCIÉTÉ DES BIBLIOPHILES FRANÇOIS.

                             TOME PREMIER.

           [Illustration: colohpon LITTERIS PATRIÆQUE CARUS.]

                                A PARIS,
                      DE L’IMPRIMERIE DE CRAPELET,
                          RUE DE VAUGIRARD, 9.

                            M. D. CCC. XLVI.

Le _Ménagier de Paris_ a été imprimé aux frais et par les soins de
la Société des Bibliophiles françois. Il en a été tiré vingt-quatre
exemplaires sur _grand papier impérial de Hollande_, de la fabrique de
C. Honig, destinés aux membres résidens de la Société, plus trois cents
exemplaires en petit papier. Et étoient membres de la Société quand cet
ouvrage fut imprimé:

     M. BÉRARD, receveur général des finances à Bourges.

     M. le Comte ÉDOUARD DE CHABROL, ancien maître des
     requêtes au Conseil d’État.

     M. le Duc DE POIX[1], ancien ambassadeur de France en
     Russie.

     M. le Marquis DU ROURE, maréchal de camp, membre de la
     Chambre des députés.

     M. DE LA PORTE.

     M. le Comte DE LA BÉDOYÈRE, ancien colonel de cavalerie.

     M. le Comte DE SAINT-MAURIS, introducteur des
     ambassadeurs.

     M. COSTE, conseiller honoraire à la Cour royale de Lyon.

     M. JÉRÔME PICHON, _Président_.

     M. ARMAND CIGONGNE, ancien agent de change, _Trésorier_.

     M. YEMENIZ, négociant à Lyon.

     M. le Baron DU NOYER DE NOIRMONT, auditeur au Conseil
     d’État.

     M. LÉON TRIPIER, garde des Archives du domaine privé du
     Roi.

     M. le Marquis DE COISLIN.

     M. le Comte DE CHARPIN-FOUGEROLLES.

     M. le Comte LANJUINAIS, pair de France.

     M. ERNEST DE SERMIZELLES.

     M. LE ROUX DE LINCY, pensionnaire de l’Ecole des Chartes,
     secrétaire.

     M. BENJAMIN DELESSERT.

     MADAME la Vicomtesse DE NOAILLES.

     MADAME GABRIEL DELESSERT.

     M. le Baron ERNOUF.

     M. le Comte DE LABORDE, de l’Académie des inscriptions,
     membre de la Chambre des députés.

     M. PROSPER MÉRIMÉE, de l’Académie française, inspecteur
     des monuments historiques.

     M. AUGUSTE LE PRÉVOST, de l’Académie des inscriptions,
     membre de la Chambre des députés.


MEMBRE HONORAIRE.

     M. le Marquis DE CHATEAUGIRON, consul de France à Nice.


ASSOCIÉS ÉTRANGERS.

     M. le Prince ALEXANDRE LABANOFF, aide de camp de S. M.
     l’Empereur de Russie.

     M. le Baron DE REIFFEMBERG, professeur de l’Université de
     Louvain, etc.

     M. l’Abbé COSTANZO GAZZERA, membre de l’Académie de
     Turin.

[Illustration]



TABLE

DES PIÈCES PRÉLIMINAIRES, DISTINCTIONS, ARTICLES ET CHAPITRES

DU

MÉNAGIER DE PARIS.


TOME PREMIER.

PRÉLIMINAIRES.

LISTE DE LA SOCIÉTÉ DES BIBLIOPHILES.

TABLE DES PIÈCES PRÉLIMINAIRES, DISTINCTIONS, etc.

NOTICE SUR M. LE DUC DE POIX, par M. L. V. D. N., membre
de la Société                                                     Page I

INTRODUCTION au _Ménagier_                                          XVII

INDICATION DÉTAILLÉE de quelques ouvrages ou documens
manuscrits et imprimés cités en abrégé dans l’Introduction
et les notes                                                         LXV

CORRECTIONS ET ADDITIONS                                          LXXVII

TEXTE.

PROLOGUE DE L’AUTEUR                                                   1

PREMIÈRE DISTINCTION.

ARTICLE PREMIER.

Saluer et regracier Dieu à son esveiller et à son lever, et
s’atourner convenablement                                              9

ARTICLE II.

S’accompagner convenablement                                          15

ARTICLE III.

Aimer Dieu, le servir et se tenir en sa grâce      Page 16

De la messe, 17.--Contrition, 21.--Confession, 23.--Des
péchés mortels, 28.--Des sept vertus, 53.

ARTICLE IV.

Garder continence et vivre chastement                                 62

De Susanne, 64.--De Raymonde, 68.--De Lucrèce, 70.--Des
reines de France, 75, 76.

ARTICLE V.

Être amoureuse de son mari                                            76

D’Ève, 77.--De Sara, 78.--De Rachel, 84.--Du chien
Maquaire, 92.--Du chien de Niort, 93.

ARTICLE VI.

Être humble et obéissante à son mari                                  96

Histoire de Griselidis, 99.--Femme laissant noyer son mari,
126.--D’Ève, 128.--De Lucifer, 129.--D’une bourgeoise,
135.--Du bailly de Tournay, 139.--Des abbés et
des mariés, 145.--De madame d’Andresel, 148.--Des
maris de Bar-sur-Aube, 153.--D’une cousine de la femme
de l’auteur, 156.--De la Romaine, 158.

ARTICLE VII.

Être curieuse et soigneuse de la personne de son mari                168

Bons traitemens, 168.--Des puces, 171.--Des mouches, 173.

ARTICLE VIII.

Être discrète                                                        177

De Papirius, 179.--De la femme qui pond un œuf, 180.--Des
mariés de Venise, 182.--D’un sage homme parisien
trompé par sa femme, 183.--D’un notable avocat, 185.

ARTICLE IX.

Reprendre doucement son mari dans ses erreurs                        185

Histoire de Mellibée, 186.--De Jehanne la Quentine, 237.


TOME II.

SECONDE DISTINCTION.

ARTICLE PREMIER.

Avoir soin de son mesnage, diligence et persévérance                   1

LE CHEMIN DE PAUVRETÉ ET DE RICHESSE, par Jean Bruyant                 4

ARTICLE II.

Du jardinage                                                          43

ARTICLE III.

Choisir varlets, aides et chambrières, et les mettre en œuvre         53

Jeune femme parlant grossièrement, 60.--Soins de la maison,
61.--Vie à la campagne, 62.--Recettes diverses, 65.--Des
domestiques, 70.--Des chevaux, 72.

ARTICLE IV.

Savoir ordonner dîner et soupers                                      80

Le fait des bouchiers et poulaillers, _ib._--Termes généraux de
cuisine, 87.--Dîners et soupers, 91.--Aucuns incidens servans
à ce propos (repas de l’abbé de Lagny, noces, etc.), 103.

ARTICLE V.

Commander, deviser et faire faire toutes manières de potaiges,
etc., et autres viandes                                              124

Termes généraux de cuisine, _ib._--Potages communs sans
espices et non lians, 134.--Potages qui sont à espices et non
lians, 147.--Potages lians de char, 158.--Potages lians
sans char, 171.--Rost de char, 177.--Pastés, 185.--Poisson
d’eaue doulce, 187.--Poisson de mer ront, 194.--Poisson
de mer plat, 201.--Œufs de divers appareils, 206.--Entremès,
fritures et dorures, 210.--Autres entremès, 224.--Saulces
non boulies, 229.--Saulces boulies, 232.--Buvrages
pour malades, 237.--Potages pour malades, 241.--Autres
menues choses qui ne sont de nécessité, 243.--Autres
menues choses diverses qui ne désirent point de chappitre,
262.

APPENDICE A L’ARTICLE V                                              273

Recettes d’Hotin, cuisinier de monseigneur de Roubais                275

TROISIÈME DISTINCTION.

ARTICLE II (ET UNIQUE).

Savoir nourrir et faire voler l’esprevier                            279

Chiens espaignols, 281.--Éperviers niais, 285.--Plumage de
l’épervier, 292.--Affaitement de l’épervier, 295.--Vol des
champs, 301.--Chasse en août, 305.--Chasse en septembre,
310.--Épervier en mue, 311.--Épervier branchier et mué
de haie, 314.--Mué et hagart, 317.--Maladies de l’épervier,
319.--De l’autour, 321.--Autres oiseaux de proie,
323.--Maladies des oiseaux, 325.

TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES                                      327

SUPPLÉMENT AUX CORRECTIONS                                           380



NOTICE

SUR

M. JUSTE DE NOAILLES

PRINCE-DUC DE POIX

CHEVALIER DES ORDRES DU ROI, GRAND D’ESPAGNE DE PREMIÈRE CLASSE

ANCIEN AMBASSADEUR DE FRANCE EN RUSSIE

ANCIEN DÉPUTÉ, ETC.

MEMBRE DE LA SOCIÉTÉ DES BIBLIOPHILES FRANÇAIS



NOTICE

SUR

M. LE DUC DE POIX[2].

    Multis ille quidem flebilis occidit,
    Nulli flebilior quam _mihi_.....
        Horat., od. XXIV, l. I.


Il est des hommes que le monde ignore et qui passeraient inaperçus
grâce à l’excès de leur modestie, si leur mérite ne se révélait à
leur insu par l’utilité de leur vertu. Ces sortes de caractères ne se
manifestent que malgré eux au grand jour, leur sagesse les retient
dans la retraite, et beaucoup finissent, comme l’a dit quelque part
Montesquieu, _sans avoir déballé_. Ceux que les liens du sang ou
de l’amitié ont rapprochés d’eux, doivent au monde de les faire
connaître; c’est à la fois un encouragement pour la jeunesse et une
consolation pour l’âge avancé qu’un hommage rendu à ces existences à
la fois élevées et modestes, placées ainsi à la portée de toutes les
émulations. M. le duc de Poix était un modèle de ce genre de caractère.
L’auteur de cette notice lui tenait par les liens du devoir et de
l’affection: ayant eu le bonheur de jouir de son mérite dans l’intimité
la plus resserrée, il ose espérer que cet avantage lui vaudra celui de
le faire connaître avec plus de vérité que personne: c’est son seul
titre à l’indulgence de ceux qui le liront.

Juste-Antonin-Claude-Dominique de Noailles, prince-duc de Poix, naquit
à Paris le 8 août 1777, de parents tendres et chéris dont il était le
second fils. Son père le prince de Poix, fils aîné du vertueux maréchal
duc de Mouchy, mort sur l’échafaud en 1794, avait épousé la fille du
maréchal de Beauvau. Les vertus et les charmes de la princesse de Poix
ont enchanté tous ceux qui l’ont rencontrée et laissé une sorte de
culte dans les cœurs admis à son intimité. Elle s’occupa de l’éducation
de son second fils d’une façon toute particulière, et l’influence de
cette première partie de la vie du jeune Juste de Noailles s’étendit
sur le reste de son existence de manière à le modifier fortement:
elle le préserva de la gâterie presque inévitable à laquelle il était
condamné par position. Il ouvrit les yeux au milieu des dernières
prospérités de sa famille; lui et son frère, plus âgé que lui de six
ans, semblaient alors destinés aux plus hautes situations du pays.
Ces beaux jours durèrent peu: Juste de Noailles en connut pourtant
assez pour garder de précieux souvenirs de ces derniers moments de la
société française dont le salon de sa mère était peut-être le plus
parfait modèle. La princesse de Poix rassemblait autour d’elle un petit
cercle d’amis presque tous remarquables par des mérites divers, que sa
supériorité avait distingués dès son entrée dans le monde; quelques
femmes, ses amies de jeunesse, modèles d’esprit et de grâce, des hommes
attachés à la cour ou mêlés aux affaires et à la littérature, tous
réunis par le charme de son commerce, l’entouraient de soins que sa
mauvaise santé rendait consolants pour elle et doux pour ses amis. Le
prince de Poix, marié très-jeune et dans la plus haute faveur à la
cour, n’était pas un mari aussi sédentaire que son vénérable père, mais
il eut toujours le bon goût de préférer à tout la société de sa femme
et de ses amis.

Cette société, au début de notre terrible révolution, était de celles
qui non-seulement ne s’en effrayaient pas, mais dont les vœux et
les opinions favorisaient les premières manifestations du mouvement
réformateur. M. de La Fayette et la brillante jeunesse qui l’avait
suivi en Amérique, bien des grands seigneurs amis de Voltaire et
enthousiastes de Rousseau, beaucoup de courtisans dévoués à M. Necker,
tous ces esprits enflammés d’ardeur pour le bien, de désir des
réformes utiles, animés des plus généreux sentiments, se livraient
alors à de bien douces espérances et rêvaient la régénération de leur
pays, dût-elle se réaliser aux dépens de ces priviléges dont ils furent
les premiers à se dépouiller au profit de ceux qui devaient être leurs
bourreaux.

C’était là l’esprit du salon où le duc de Poix passa ces premières
années de la vie qui en décident presque toujours la tendance. La
princesse de Poix avait été nourrie par son père, le maréchal prince
de Beauvau[3], homme aussi vertueux qu’éclairé, dans le goût de la
littérature et les doctrines de la philanthrophie. Ses amis, MM. de
Lally-Tollendal, de Montesquiou, de La Fayette, Mmes d’Hénin,
de Tessé, de Lauzun prenaient comme elle le plus vif intérêt aux
débats politiques du moment. Le prince de Poix était des plus chauds
partisans de M. Necker; son frère le vicomte de Noailles prit une part
célèbre aux généreuses imprudences du 4 août. Enfin le jeune Juste
de Noailles fut entouré dès le berceau de sentiments et de principes
dont l’impression ne s’effaça jamais chez lui. Il les conserva au
travers de toutes les vicissitudes de nos cinquante dernières années;
tous ceux qui l’ont connu peuvent se rappeler que les enivrements de
l’empire, les illusions de la restauration et les agitations de 1830
le trouvèrent le même, c’est-à-dire un ami impartial de l’ordre et de
la liberté.

Les horreurs de la révolution le saisirent dans sa première jeunesse;
elles furent pour lui une précoce expérience et l’occasion de devoirs
touchants. Son père ayant eu le courageux instinct de rester jusqu’au
dernier moment près de son infortuné souverain, fut forcé après le 10
août de se cacher et bientôt après de s’enfuir: sa tête était mise à
prix. Le maréchal duc de Mouchy périt sur l’échafaud avec sa femme,
sa belle-fille et la mère et la grand’mère de cette dernière; le
reste de la famille avait réussi à quitter la France. La princesse
de Poix infirme avant l’âge et n’ayant pas voulu émigrer, resta donc
seule à Paris avec son fils cadet, dont la tendresse et les vertus
surent lui adoucir tant de maux. Leur vie était affreuse. Chaque
matin le journal leur annonçait la mort d’un parent ou d’un ami, et
chaque jour tous deux se préparaient à de derniers adieux. Juste de
Noailles, en présence de ces atrocités journalières, était soutenu
par des sentiments religieux déjà puissants, et qui prirent depuis
une teinte d’exaltation naturelle à son âge et dans sa situation. Un
vertueux prêtre bien connu avant la révolution par ses bonnes œuvres,
le respectable abbé de Fénélon, célébrait les saints mystères dans une
cave pour la consolation de quelques âmes fidèles. Le jeune Juste de
Noailles s’y rendit toujours exactement, plus d’une fois au péril de
sa liberté et presque de sa vie, jusqu’à ce que son vénérable directeur
eût payé ses vertus de sa tête. Au milieu de tant de maux, un goût
qui se développa en lui et qui ne le quitta plus, fut, si on peut le
dire, son délassement. C’était le goût des livres qui devint bientôt
une passion. Pouvant à peine disposer de l’argent nécessaire à son
entretien, il s’imposait de pénibles privations pour le satisfaire. Un
estimable libraire resté son ami jusqu’à sa mort, aimait à raconter
comment leur connaissance s’était faite en 1793, à une vente de livres
précieux. M. de Bure (c’était son nom) remarqua avec surprise et
intérêt un beau jeune homme de dix-sept ans, vêtu plus que modestement,
qui montrait des connaissances et une ardeur pour les livres que sa
situation ne lui permettait pas évidemment de satisfaire. Attiré par
ces apparences et sans savoir le nom du jeune amateur, M. de Bure lui
procura à un prix modéré les précieuses éditions qu’il désirait. Il
s’ensuivit un échange de bons procédés qui les attacha à jamais l’un à
l’autre. Mais comme les bonnes actions passaient pour M. de Poix avant
les beaux livres, il vendit sa chère collection sous le Directoire pour
payer une dette contractée par sa mère pendant la terreur.

Lorsque peu après ces horribles temps la France commença à respirer, la
jeunesse retrouva quelque mouvement et même de la gaieté, parce qu’elle
ne saurait s’en passer. Juste de Noailles se livra comme les autres
aux amusements qui réunissaient les lambeaux épars de la société dans
des associations souvent bizarres, mais curieuses à observer. Du milieu
de ce chaos sortaient quelques existences miraculeusement conservées,
et qui commençaient déjà à se faire remarquer; Juste de Noailles eut
le bonheur, dès cette première entrée dans le monde, de former des
liens d’amitié qui ne varièrent plus. Le plus intime fut avec Adrien de
Mun dont la famille de tout temps liée avec la sienne, s’y était plus
étroitement attachée depuis la révolution. L’esprit délicat et cultivé
de M. de Mun, son aimable caractère, ses mœurs élégantes l’eussent
fait remarquer en tout temps, mais quel n’était pas son charme dans ce
moment de désordre et de licence! Ces deux jeunes gens élevés dans des
goûts et des sentiments proscrits comme leurs familles, se serrèrent
étroitement l’un à l’autre, s’accordèrent une confiance sans bornes
et se suivirent dans toutes les phases de leur existence pendant
près de cinquante ans avec une persistance et une affection dont il
y a bien peu d’exemple chez les hommes. Leurs caractères différaient
tout juste assez pour les rendre le complément l’un de l’autre. M.
de Mun, aussi sage, mais moins grave que son ami, savait allier au
goût le plus délicat la plus folle gaieté. Un ami moins intime, mais
toujours cher et précieux à Juste de Noailles, ce fut le comte Molé,
dont la jeunesse à la fois aimable et sérieuse faisait prévoir son
brillant avenir. Ce peu de Français émigrés à l’intérieur y vivaient
modestement, contents seulement de ne plus souffrir, de pouvoir
espérer et de s’amuser n’importe comment ni avec qui. Les échappés de
la terreur se retrouvaient tout joyeux d’avoir survécu; les émigrés
rentraient progressivement; chacun arrangeait l’avenir à son gré. Enfin
le 18 brumaire vint absorber les espérances de tout le monde dans une
admiration générale bientôt accompagnée d’une soumission craintive qui
coupa court aux chimères, en réveillant les ambitions.

La princesse de Poix restait et fut toute sa vie un centre pour les
esprits distingués que le besoin de communication rassemble, quel que
soit l’état du pays. Les opinions libérales de Mme de Poix s’étaient
bien modifiées par la vue des crimes de la terreur; rien ne pouvait
la consoler de ce qu’elle appelait ses erreurs. La pensée qu’elle
avait pu applaudir aux premiers actes d’une révolution ensanglantée
par tant d’horreurs, lui laissait sinon des remords, du moins un
besoin d’ordre qui la soumettait plus aisément que ses autres amis au
despotisme qui pesa bientôt sur le pays. Le prince de Poix, toujours
dévoué au souvenir de ses rois, resta, comme son fils aîné, étranger
au nouvel ordre de choses. Son second fils ayant fait, en 1804, un
beau et noble mariage (il avait épousé Mélanie de Talleyrand-Périgord,
nièce du célèbre prince de Talleyrand), désira, dans l’intérêt de
sa descendance, rattacher son existence à celle d’un gouvernement
dont le chef lui avait inspiré un vif enthousiasme. Il obtint de
l’empereur la faculté de créer un majorat de comte; bientôt il fut
nommé chambellan, et sa femme fut dame du palais de l’impératrice
Marie-Louise. Ces diversités d’opinions n’altérèrent jamais l’union du
comte de Noailles et de ses parents. Mme de Poix, fidèle aux mêmes
sentiments que son époux et son fils aîné, mais avant tout mère sage
et tendre, réunissait autour d’elle tous les objets de son affection
dans les relations les plus douces. D’ailleurs les esprits justes
et les bons cœurs s’entendent toujours dans le désir du bien, sous
quelque forme qu’il se produise. La restauration eut les mêmes effets
dans cet intérieur uni et éclairé. Le comte de Noailles, heureux de
pouvoir servir à la fois son pays et les bienfaiteurs de sa famille,
dut à la bonté de Louis XVIII l’ambassade de Saint-Pétersbourg. Il fut
chevalier de l’ordre du Saint-Esprit, et la comtesse de Noailles dame
d’atour de Mme la duchesse de Berry. Le comte de Noailles porta dans
sa nouvelle carrière la droiture et la raison qui le caractérisaient.
Mais son goût le rappelait vers la vie de famille, et il saisit la
première occasion d’y rentrer, en se retirant des affaires presqu’en
même temps que le duc de Richelieu, dont il représentait la couleur
politique. Le roi permit alors au prince de Poix, élevé à la pairie
en 1814, de faire passer à son fils cadet la grandesse d’Espagne.
Depuis ce temps, l’éducation de ses enfants, le soin de ses affaires,
ceux qu’il rendait à une mère adorable et de plus en plus infirme,
remplirent presque exclusivement l’existence du comte de Noailles. Ses
seules distractions étaient son goût pour les livres et les devoirs de
la charité, seuls emplois qu’il se permît de son superflu. Il n’en fut
distrait qu’en 1827, où le département de la Meurthe le choisit pour un
de ses députés. Les sentiments qui l’avaient animé dès sa jeunesse le
suivirent sur les bancs de la chambre. Il y porta cet amour d’une sage
liberté, ce besoin de morale dans les institutions, qui caractérise
les honnêtes gens et les esprits éclairés de notre temps, et qui eût
soutenu tous les gouvernements qui se sont écroulés depuis cinquante
ans, si ces gouvernements les eussent sincèrement consultés. Plus tard,
la manière de voir du comte de Noailles le détourna de chercher une
nouvelle élection. Dévoué par reconnaissance à la maison de Bourbon,
mais se sentant en opposition avec la politique qu’elle adoptait, il en
attendait avec anxiété le fatal résultat. Les grâces dont sa famille
et lui-même avaient été comblés, lui firent un devoir de s’éloigner
de la cour après la révolution de 1830. Il rentra dans la retraite
en déplorant les malheurs de ses bienfaiteurs et en formant des vœux
pour la prospérité de son pays. Depuis ce temps, consacré plus que
jamais à ses liens intimes, il ne chercha plus de délassements que
dans les épanchements de sa tendre amitié pour le marquis de Mun,
et ses relations avec un petit cercle de connaissances anciennes,
choisies avec ce goût délicat et sûr qui était un des attributs de
son esprit. Ses livres devinrent plus que jamais sa jouissance et sa
consolation. Sa bibliothèque, une des plus célèbres de France, s’était
progressivement augmentée de précieuses acquisitions. Les heures qu’il
y passait lui semblaient des moments. Peu de semaines s’écoulaient sans
qu’il allât chez ses anciens amis, MM. de Bure, se tenir au courant des
nouvelles de la librairie. La Société des Bibliophiles, dont il fit
partie dès son origine, ne comptait pas de membre plus intéressé à ses
travaux; ceux dont il était chargé se faisaient reconnaître à un goût
aussi scrupuleux qu’éclairé.

Le duc de Poix[4] eut en 1834 le malheur de perdre sa mère; ce fut
un grand événement dans sa vie. Trouvant en elle, avec un sentiment
passionné pour lui, un mérite et des agréments restés sans rivaux, il
s’était livré, si on peut le dire, avec imprudence, à son affection
pour elle. Cette mère chérie était son amie intime, l’objet de ses plus
tendres soins, d’un goût qui tenait de l’admiration, et son conseil
dans toutes les choses de la vie. Comme elle avait conservé jusqu’à
son dernier jour ses facultés morales dans leur entier, elle trompait
sur son âge tout ce qui l’entourait; on jouissait avec imprévoyance du
charme de sa société, sans songer au vide profond que devaient laisser
des communications si charmantes. Tous ceux qui l’ont approchée l’ont
plus ou moins senti après elle. Qui dut en souffrir plus que ce fils
chéri, le bien-aimé de son cœur, la source des plus douces jouissances
de sa longue vie! La douleur du duc de Poix dura autant que son
existence; le souvenir de sa mère resta un culte caché qu’il ne sépara
plus d’aucune de ses impressions. Il voulut changer de vie après cette
irréparable perte, et faire désormais à la campagne sa principale
résidence. Ses beaux livres lui parurent alors une magnifique fantaisie
dont la valeur serait mieux employée en travaux utiles. Il s’en
défit en 1835. La vente eut lieu avec succès en Angleterre[5]. (Les
amateurs français ont eu depuis ce temps la consolation de s’assurer
que beaucoup des ouvrages rares qui s’y trouvaient sont rentrés dans
notre pays.) M. de Poix aimait pourtant trop l’étude et la littérature
pour se passer d’une bibliothèque. Il acquit celle de feu M. Duviquet
et l’augmenta successivement d’acquisitions moins brillantes que par
le passé, mais qui font cependant de cette seconde bibliothèque une
collection excellente dans tous les genres[6].

Tout faisait espérer à la famille et aux amis de M. le duc de Poix
qu’il leur serait, ainsi que l’avait été sa mère, conservé au delà du
terme ordinaire de la vie. Sa santé florissante, sa vie régulière,
cette paix de l’âme que la piété entretient chez ceux qui l’associent à
toutes leurs impressions, semblaient lui assurer une longue carrière.
Dieu en décida autrement: une courte et pénible maladie l’enleva le
1er août 1846, à l’âge de soixante-neuf ans. Ce fut une douleur et
une surprise pour tous ceux qui l’aimaient. Le chagrin en fut épargné
au marquis de Mun, mort deux ans avant son ami; sa famille resta seule
à le pleurer. Elle perdait en lui un chef respectable dont les aimables
qualités faisaient aimer la vertu. Malgré une modestie qui allait
peut-être jusqu’à l’excès, le respect s’attachait à lui et se répandait
sur ses entours, qu’il protégeait ainsi à son insu. Son influence
les dirigeait du fond de sa retraite, comme le lest d’un navire en
assure invisiblement la marche. Cette religieuse modestie était le
trait dominant du caractère de M. de Poix. Il ne lui arrivait de la
dominer que lorsque sa conscience lui faisait un devoir de professer
des sentiments honorables ou des opinions utiles; alors on trouvait
en lui la chaleur d’un homme de bien, sans respect humain comme sans
préjugés. Mais habituellement son plaisir favori était l’étude et les
communications qu’elle procure avec des esprits distingués. Nul ne
rendait une justice plus aimable au mérite d’autrui que M. de Poix; son
approbation flattait d’autant plus qu’il était doué d’un goût exquis,
peut-être trop développé par l’éducation, car les raffinements du goût
procurent plus de mécomptes que de jouissances; mais il ne dépend pas
de certains esprits choisis de se contenter de la médiocrité en rien,
et M. de Poix était de ceux qui cherchent sans relâche le mieux en
toute chose. Il était ingénieux dans sa bienfaisance, délicat dans ses
moindres attentions: ses manières à la fois douces et dignes étaient le
modèle d’une noble et sage élégance. Ses confrères, les bibliophiles,
n’en perdront pas plus le souvenir que des aimables procédés que tous
ont rencontrés en lui, et ils joindront de sincères regrets à la juste
douleur de sa famille et de ses amis.

V. D. N.

Membre de la Société des Bibliophiles français.

[Illustration]



LE MÉNAGIER DE PARIS.



INTRODUCTION.


Quand on étudie l’histoire de la régence et du règne de Charles V, de
ce beau règne si tristement précédé et si tristement suivi, on ne sait
lequel admirer davantage ou des succès politiques et militaires de ce
grand prince, ou du mouvement imprimé aux lettres et aux arts par son
intelligente et constante protection. Jeté au milieu d’un pays désuni
et factieux, attaqué victorieusement par un ennemi formidable, sans
argent, sans soldats, Charles s’entourant avec un discernement presque
surnaturel des hommes les plus habiles dans toutes les branches de
l’administration, se crée bientôt des ressources suffisantes; il trace
lui-même aux chefs de ses armées un plan de campagne qui doit ranimer
des troupes découragées et rendre impossibles à l’avenir les désastres
de Crécy et de Poitiers. Il sait trouver partout des alliés pour la
France et des ennemis pour l’Angleterre, et combat successivement et
heureusement son redoutable adversaire sur tous les points où il a un
intérêt ou un ami. Mais les combinaisons si variées et si complexes de
sa politique ne suffisent pas à l’activité de ce puissant génie. Après
avoir rendu à la France sa confiance en elle-même et son territoire, il
veut encore lui donner la supériorité de l’intelligence et des lettres,
et commence dans sa _librairie_ de la Tour du Louvre la réunion des
meilleures productions historiques et littéraires. Là encore il veut
être entouré d’esprits d’élite: il veut avoir Cicéron, Tite Live, saint
Augustin dans sa bibliothèque, comme il a du Guesclin, Sancerre et
Clisson dans ses armées, Bureau de La Rivière et Jean Le Mercier dans
son conseil, Arnault de Corbie et Pierre d’Orgemont dans son parlement.
Non content de recueillir les meilleurs ouvrages déjà connus, le Roi,
par sa munificence et souvent même par ses ordres exprès, oblige à
écrire tous ceux qui lui semblent capables de donner les meilleurs
traités d’une science ou d’un art quelconque. Aucun sujet, si humble
qu’il soit en apparence, n’échappe à son attention: sa sollicitude
paternelle descend dans tous les détails. Pendant que le chancelier
Pierre d’Orgemont écrit sous son inspiration une chronique modèle
de fidélité et d’exactitude historique[7], Charles ne dédaigne pas
d’engager lui-même le serviteur[8] d’un de ses maîtres des requêtes à
consigner dans un ouvrage spécial le fruit de son expérience sur l’art
d’élever et de diriger les troupeaux, et son _queux_ Taillevent[9],
comblé de ses bienfaits, donne sur la cuisine un traité imprimé et
consulté encore sous le règne de Henri IV.

Le _Ménagier de Paris_ est évidemment un des résultats du mouvement
littéraire du règne de Charles V et de la tendance qu’avoit alors
éprouvée chacun, par suite des encouragemens du roi, à écrire sur le
sujet qui lui plaisoit le plus et qu’il connoissoit le mieux. L’auteur
avoit vu tout le règne de ce grand prince, puisqu’il étoit à Melun en
1358[10], à Niort en 1373[11], et qu’il avoit connu Aubriot[12] dans sa
puissance, mais il n’écrivit que plusieurs années après l’avènement
de Charles VI. Il parle en effet du duc d’Orléans, qui ne peut être
Philippe de France, frère du roi Jean: 1º parce que ce prince, mort en
1372, ne seroit pas cité comme vivant dans un livre écrit après la
prise de Niort; 2º parce que l’auteur qui nomme[13] les ducs de Berry,
de Bourgogne et de Bourbon dans l’ordre de leur parenté avec le roi,
n’auroit pas, s’il eût écrit sous le règne de Charles V, placé l’oncle
du roi avant ses frères; 3º le duc d’Anjou, frère puîné de Charles V,
mort en 1384, auroit sans doute été nommé comme ses frères dans cette
énumération si elle eût été écrite avant l’année de sa mort; 4º il est
fait allusion dans le livre à une sédition que je crois avoir prouvé
être celle de 1382[14]. Si on admet donc (et il me semble impossible
de le nier) que le duc d’Orléans dont il est parlé dans le _Ménagier_
n’est pas Philippe frère du roi Jean, il ne peut être que Louis frère
de Charles VI, et comme ce prince, d’abord duc de Touraine, n’eut le
titre de duc d’Orléans que le 4 Juin 1392[15], il en résultera que le
_Ménagier_ ne peut avoir été écrit avant Juin 1392. Mais il ne sauroit
non plus être postérieur à Septembre 1394, car l’auteur parle des
juifs _qui sont en France_[16]: or les juifs furent chassés par une
ordonnance en date du 17 de ce mois qui fut promptement exécutée, mais
à laquelle il eût certainement fait quelque allusion en cet endroit de
son livre si elle eût même seulement été rendue lorsqu’il écrivoit.

Le _Ménagier de Paris_ fut donc écrit entre Juin 1392 et Septembre
1394, et rien dans le texte ne contredit cette date qui me semble
établie d’ailleurs sur des bases certaines. Ainsi l’auteur parle de
la maison de la reine et _des enfans_, et en effet Isabeau de Bavière
avoit en 1392 trois enfans[17]; ainsi encore il pourroit résulter d’un
passage du livre[18] que l’année où il fut écrit commençoit en Avril,
et les années 1392, 1393 et 1394 commencèrent toutes trois en Avril.

L’auteur étant assez âgé en 1358 pour avoir été admis dans la société
du seigneur d’Andresel, et ayant écrit de 1392 à 1394, devoit alors
toucher à la vieillesse. Il avoit cependant épousé depuis peu de temps
une jeune femme de quinze ans qui étoit de meilleure maison que lui,
d’une province différente et orpheline[19]. Elle lui avoit demandé
peu de jours après son mariage de ne pas la reprendre publiquement de
ses _décontenances et simplesses_, mais de réserver ses réprimandes
pour le soir ou tout autre moment dans lequel ils seroient seuls[20].
L’auteur, heureux des bonnes intentions de sa femme, pensa qu’il
valoit mieux prévenir ses fautes que d’avoir à les lui reprocher, et
fit à son usage un traité général des devoirs d’une femme mariée, avec
l’idée que cet ouvrage pourrait aussi être utile à ses filles et à ses
amies[21]. Il n’écrivit pas sans doute immédiatement après son mariage,
mais cependant il étoit assez nouvellement marié pour parler à diverses
reprises à sa femme de sa très-grande jeunesse[22] qui l’obligeoit
encore à tenir auprès d’elle une sorte de duègne ou gouvernante chargée
de l’aider et de la diriger dans l’administration de sa maison[23].

Cette différence d’âge a pu donner à ses conseils ce caractère de
tendresse paternelle et mélancolique qui s’y fait remarquer. Arrivé
au déclin de la vie, prévoyant avec une sage résignation que sa femme
doit lui survivre, et désirant qu’elle trouve après lui l’appui d’un
second époux, il veut qu’elle apporte à son successeur toute la vertu,
toute la douceur qu’il lui connoît, et aussi toute sa sensibilité,
toute sa délicatesse de jeune fille. «Une femme sage, lui dit-il,
doit avoir horreur du sang. Ne voyez jamais couler même celui d’un
agneau ou d’un pigeon; défendez à vos suivantes de prononcer jamais
devant vous les mots de _sang_ et de _sanglant_[24].» Il adopte avec
une sorte d’empressement cette idée d’un second mariage de sa femme,
parce que cette idée lui permet d’ôter à ses préceptes toute couleur de
défiance ou d’égoïsme, et il lui parle en toute occasion de _son mari
qui sera_. Quant à lui, il ne mérite que l’attention, que les égards
les plus ordinaires[25]. Raconte-t-il cette histoire de Grisélidis,
modèle touchant d’obéissance et de résignation excessive, il se hâte
de dire que cette histoire est trop cruelle et ne peut être vraie;
qu’il est loin de demander un dévouement, une abnégation qui ne sont
dus qu’à Dieu: «Aussi bien, dit-il avec un bonheur d’expression qu’on
remarque plus d’une fois dans son livre, _je ne suis pas marquis et
je ne vous ai pas prise bergère_[26].» Ailleurs, il prévoit le cas où
sa femme épouseroit après lui un homme dur et cruel, l’engage à ne
pas se plaindre des mauvais traitements qu’elle en recevroit: «Allez
en votre chambre, lui dit-il, pleurez à voix basse et plaignez-vous à
Dieu![27].»

De pareils sentimens font aimer l’auteur d’un livre, et on voudroit
pouvoir nommer l’homme qui réunissoit de si nobles et de si aimables
qualités. La profonde piété, l’extrême modestie de l’auteur du
_Ménagier_ l’ont sans doute empêché de se faire connoître. Il a bien
parlé de lui-même en plusieurs endroits de son livre, mais nous ne
pouvons tirer d’inductions solides de ces passages qu’à l’égard de sa
position: aucune n’est assez précise pour conduire à découvrir son nom.

On ne trouve dans le _Ménagier_ aucun trait qui indique le gentilhomme,
l’homme de guerre: on voit, au contraire, qu’il engage sa femme à ne
pas fréquenter les grands seigneurs dont la société _n’est afférente
ni convenable_ pour elle ni pour lui: ailleurs, il parle légèrement,
et seulement en passant, d’un plat compliqué et dispendieux, parce
que, dit-il, _ce n’est pas ouvrage pour le queux d’un bourgeois,
non mie d’un chevalier simple_[28]. Il est donc évident qu’il
appartenoit par sa naissance à la bourgeoisie, à cette bourgeoisie
éclairée, intelligente et riche dans laquelle se recrutoient l’Église,
le parlement et les finances; Charles V sut y trouver bien des
magistrats savans et intègres, bien des administrateurs habiles élevés
ultérieurement par lui à la noblesse et même à la dignité de chevalier:
nous rencontrerions probablement l’auteur du _Ménagier_ parmi ces
hommes éminens, si son nom ne nous étoit pas resté inconnu[29].

Il me paroît en effet certain que notre auteur fut mêlé d’une manière
active aux affaires politiques de son temps. Outre qu’il semble peu
croyable qu’un simple bourgeois occupé seulement d’affaires de commerce
ou de gestion de propriétés, ait pu avoir l’instruction littéraire
que prouvent les citations de l’auteur et le nombre des volumes de
sa bibliothèque[30], et qu’une sagesse reconnue de son temps[31],
qu’un mérite signalé à chaque page de son livre par l’élévation et la
justesse de ses idées, par la clarté et l’expression de son style,
aient pu échapper à l’attention de Charles V, il seroit assez étonnant
qu’un bourgeois étranger au gouvernement eût eu occasion de citer
Bureau de la Rivière, et surtout si souvent le duc de Berry[32].
Comment se seroit-il trouvé à Niort avec ce prince? Comment auroit-il
eu sur la cour, et notamment sur l’étiquette intime imposée par
d’importans scrupules aux reines de France, les renseignemens curieux,
uniques, qu’il nous a transmis[33]?

Mais à quelle partie du gouvernement l’auteur a-t-il pu appartenir?
Il étoit évidemment Parisien et habitoit ordinairement Paris; c’est
ce qui résulte de l’ensemble de son livre, et notamment des nombreux
passages relatifs au commerce d’approvisionnement de la capitale.
Enfin il parle de la punition de Paris en 1383, en homme qui avoit
vu par lui-même ces tristes circonstances. D’un autre côté, il avoit
voyagé; il avoit été en Beauce, en Picardie, à Niort, à Bar-sur-Aube,
à Chaumont, en Gascogne, à Beziers, en Flandres, et probablement à
Tournay qu’il cite plusieurs fois. On peut présumer de ces diverses
indications qu’il avoit été employé, à une époque antérieure, dans
les finances militaires (il me semble difficile qu’il se soit trouvé
à Melun en 1358, et surtout à Niort, en 1373, avec un autre emploi),
et qu’il avoit ensuite appartenu ou appartenoit encore lorsqu’il
écrivoit, à un corps judiciaire résidant à Paris et mêlé à la police,
au gouvernement de la ville, tel que le parlement et le Châtelet, dont
les membres étoient fréquemment envoyés comme commissaires dans les
provinces. Il me paroît d’ailleurs impossible d’attribuer à un homme
étranger à la magistrature le récit du repas donné par l’abbé de Lagny,
et surtout l’attention avec laquelle est remarquée l’étiquette qui y
fut observée entre le président, le procureur général et les avocats
du roi. Le chapitre si détaillé des noces de Jean Duchesne, procureur
au Châtelet[34]: la recommandation de porter l’épervier aux _plaids_
ou plaidoiries: le mélange de mots latins à certaines parties du
texte françois, mélange fréquemment usité dans les réquisitoires et
plaidoiries de ce temps: enfin les mots _et pour cause_ qui terminent
souvent des délibérations[35] du parlement et qui se trouvent placés à
la fin de quelques recettes du _Ménagier_, me semblent confirmer cette
opinion et lui donner un degré de probabilité qui, à mes yeux du moins,
approche de la certitude.

J’ajouterai que ce style gracieux, précis et énergique, que quelques
personnes pourraient regarder comme peu compatible avec la sécheresse
de la pratique, seroit plutôt une sorte de nouvelle preuve de la
profession que j’attribue à l’auteur. Les registres des plaidoiries
du parlement faits par les greffiers sur les discours, probablement
même sur des mémoires remis par les avocats, sont écrits, quand le
sujet le permet, avec une clarté, une grâce et un esprit tout à fait
remarquables[36] et qui me semblent rappeler le style du _Ménagier_
bien mieux que certains ouvrages écrits à la même époque par des savans
de profession. Ce doit être là le langage simple et expressif de la
bonne société parisienne à l’époque où vivoit l’auteur; on y reconnoît
déjà la précision et la clarté qui caractérisent notre langue. Ce style
si doux dans la belle prière à la Vierge et quand l’auteur n’est animé
que de sentimens tendres, si simple et si vrai lorsqu’il raconte des
scènes de la vie commune, prend une teinte énergique et sombre quand
il veut exprimer la douleur ou l’indignation. Tels sont les passages
où il raconte l’histoire de la bourgeoise qui sauva son mari[37], et
celui où il parle de ces exécuteurs testamentaires qui, choisis par les
morts comme leurs meilleurs amis, _mordent en leur char comme tirans,
et s’engraissent de leur sang et de leur substance_[38]; tel est dans
un autre genre le récit de sa conversation avec une cousine de sa
femme[39], et celui des récriminations des porte-faix[40]. Plusieurs
fois sa pensée est si nettement, si heureusement exprimée, qu’on se
demande si l’on auroit pu mieux dire, aux temps où notre langue avoit
atteint toute sa perfection[41].

Ce mérite de style qui existe aussi chez quelques autres écrivains
du XIVe siècle (rarement peut-être au même degré) est un témoignage
remarquable en faveur des lumières de cette époque, et c’est encore
là une des indications historiques intéressantes que renferme le
_Ménagier de Paris_. Ces indications n’y sont pas rares: on y trouve
à chaque page de ces traits caractéristiques qui peignent le siècle
et la nation; on y rencontre aussi fréquemment des renseignemens
historiques directs ou anecdotiques. La mention des cartes à jouer, la
plus ancienne que l’on connoisse avec celle du compte de l’argentier
Poupart[42], l’histoire du chien de Niort, celles du mari parisien
trompé, de la bourgeoise qui sauve son mari, du sire d’Andresel, de
l’avocat, de Jeanne la Quentine: les renseignemens sur l’étiquette
suivie par les reines, sur les occupations des femmes: l’article
relatif aux domestiques, les documens statistiques sur les boucheries
de Paris, documens dont je discuterai plus loin la valeur: les
descriptions de repas et fêtes nuptiales, dans lesquelles se trouvent
tant de détails sur les prix des objets nécessaires à la vie[43],
répandent dans l’ouvrage autant d’intérêt que de variété.

Cette diversité des sujets traités dans le _Ménagier_ semble même
extraordinaire, et l’on a peine à concevoir qu’un même homme ait réuni
des connoissances si différentes: mais s’il est certain que notre
auteur connoissoit à fond toutes les matières dont il a parlé, il n’est
pas moins vrai qu’il n’a pas écrit seul et sans le secours d’autres
livres toutes les parties de son ouvrage. Plusieurs fois il en prévient
le lecteur comme pour Grisélidis, l’histoire de Mellibée, le chemin
de Pauvreté et de Richesse[44], mais d’autres fois aussi ces emprunts
à des ouvrages étrangers se manifestent par des indications moins
précises. Ainsi, il me paroît évident que les parties du _Ménagier_ où
le texte est brusquement interrompu par une remarque critique, ne sont
pas de l’auteur, et que ces remarques qu’on ne sauroit attribuer à des
copistes attendu l’accord des trois manuscrits, se présentoient à son
esprit pendant qu’il transcrivoit certains ouvrages utiles au but qu’il
se proposoit. Telles sont sans doute plusieurs des recettes contenues
dans les articles II et III de la seconde distinction relatives au
jardinage, à l’enlèvement des taches[45] etc.

Cette observation s’applique surtout à la partie culinaire ou
_Viandier_ (articles IV et V de la seconde distinction), et il
me paroît impossible d’attribuer à l’auteur la composition première
du fond de ces articles. Assurément il connoissoit le sujet, et
la multiplicité des objections qu’il fait à son texte prouve
sa _compétence_, mais elle prouve en même temps sa position de
transcripteur et d’annotateur[46].

Quels sont les ouvrages ou les documens dont s’est servi l’auteur du
_Ménagier_ pour écrire cette partie de son livre[47]? On ne s’étonnera
pas que quelques-uns aient pu disparoître, mais il nous est permis
d’en reconnoître deux qu’il a certainement mis à contribution. Le
premier est le livre du célèbre Taillevent, écrit à une époque un
peu antérieure, et qu’il a dû nécessairement connoître; outre les
similitudes forcément existantes entre deux ouvrages écrits à la même
époque et sur le même sujet, similitudes que j’ai tâché de ne pas
confondre avec des emprunts et que je me suis dispensé de signaler,
le traité de Taillevent contient quelques recettes évidemment copiées
par l’auteur du _Ménagier_. Mais un beaucoup plus grand nombre de
ses recettes a été emprunté à un ouvrage dont la plus ancienne
édition connue, imprimée à Lyon en 1542, in-8º gothique, pour Olivier
Arnoullet, est intitulée _le Livre fort excellent de cuisine_, et
dont on connoît une réimpression faite à Paris pour la veuve de Jean
Bonfons, sans date (mais après 1566 et avant 1574)[48], de format
in-16, sous le titre de _Grand cuisinier de toutes cuisines_. C’est au
reste à l’auteur de ce dernier volume qu’il faut attribuer la rédaction
originale des recettes communes aux deux ouvrages, car on ne rencontre
dans le _Grand Cuisinier_ aucune des remarques critiques du _Ménagier_,
et l’ordre des recettes classées méthodiquement ici, n’est pas le même
dans le _Grand Cuisinier_. Or on ne sauroit croire que le premier
éditeur de cet ouvrage se soit donné la peine d’établir un système ou
un ordre quelconque, bon ou mauvais, dans son édition. Il est visible
qu’il imprimoit sans attention, sans soin, un manuscrit ancien tel
qu’il l’avoit sous les yeux, et le reproduisoit sans modification, sauf
les mots ou les phrases entières échappées à son incurie.

Les reproches que je fais ici au _Grand Cuisinier_ ne surprendront pas
les personnes versées dans la connoissance de nos anciens livres. Elles
savent que les anciennes éditions des textes classiques et religieux,
destinées aux hommes studieux et graves, étoient faites avec un soin
extrême, tandis que les romans, les poésies et tous autres ouvrages
françois moins sérieux (surtout ceux qu’on imprimoit après la mort
de leurs auteurs), destinés aux gens du monde ou au public vulgaire,
étoient édités avec une négligence excessive, au moins quant à la
correction du texte. Cette négligence est poussée à l’extrême dans
les éditions imprimées des deux ouvrages culinaires que je viens de
citer; aussi, quoiqu’ils m’aient été fort utiles pour éditer cette
partie du _Ménagier_, j’aurois bien désiré avoir à ma disposition un
manuscrit du _Grand Cuisinier_ ou _Livre fort excellent de cuisine_,
exempt des fautes de l’imprimé, mais il n’en existe pas, et je n’ai
eu cette facilité qu’à l’égard du Taillevent[49] dont on connoît deux
manuscrits, l’un à la Bibliothèque royale, l’autre à la Bibliothèque
Mazarine, présentant entre eux de très-grandes différences et différant
aussi tous deux, le second surtout, des imprimés.

Malgré la futilité apparente du sujet, je regarde la partie culinaire
du _Ménagier_ comme une des plus importantes du livre. La partie morale
est, il est vrai, très-bien écrite et très-riche en renseignemens
historiques, mais il existe quelques ouvrages analogues qu’on peut
placer à côté d’elle (le plus important est assurément celui de
Geoffroy de La Tour-Landry[50]). La partie matérielle du _Ménagier_ et
notamment _le Viandier_, beaucoup plus étendu et plus détaillé que
l’ouvrage de Taillevent, est absolument sans équivalent. Aussi ai-je
cru devoir apporter les soins les plus scrupuleux au travail assez
difficile et tout à fait nouveau qu’exigeoit de moi cette partie de
l’ouvrage.

La première impression qu’on éprouve en lisant _le Viandier_ est
l’étonnement de voir presque tous les mets assaisonnés de quantité
d’épices et d’herbes aromatiques. Une pareille complication
d’assaisonnemens, si opposée à la simplicité primitive de la nourriture
naturelle de l’homme, est-elle contemporaine de l’établissement des
monarchies modernes, ou faut-il la faire remonter au moins à ces
époques malheureuses où les Romains poussoient le luxe et la recherche
de leurs tables jusqu’aux raffinemens décrits par Pétrone? La réponse
à cette question n’est pas douteuse si l’ouvrage curieux qui porte le
nom d’Apicius Cœlius a été en effet écrit peu d’années après le règne
d’Héliogabale, comme le savant Lister me paroît l’avoir établi dans la
dissertation placée en tête de son édition de cet ouvrage[51]. S’il
en est ainsi, nous devons croire que la cuisine du moyen âge est la
même que celle de l’empire romain. Les Francs l’auront trouvée en
usage dans les Gaules devenues romaines de mœurs et d’habitudes, et
ils l’auront adoptée comme ils adoptèrent tant d’autres coutumes de
cette population soumise par eux, mais dans laquelle ils ne formoient
qu’une foible minorité. Si Lister eût connu l’ouvrage de Taillevent ou
la partie culinaire du _Ménagier_, il ne se seroit pas demandé comment
la cuisine moderne (celle qu’il voyoit de son temps) étoit devenue
si différente de l’antique, si simple en comparaison de celle-ci, et
surtout il n’auroit pas conclu qu’elle avoit été ainsi simplifiée
par suite de l’invasion des barbares qui auroient importé leurs
habitudes domestiques dans les pays conquis par eux. Taillevent et _le
Ménagier_ offrent tant de similitudes avec le traité d’Apicius en ce
qui concerne l’emploi des épices, qu’on pourrait croire l’_Apicius_
écrit au moyen âge, si des recettes de plats inconnus à nos ancêtres et
indiqués (non décrits) dans d’autres auteurs anciens, si les noms des
inventeurs de certains mets, qu’un faussaire n’eût pu, à l’époque où
remontent les manuscrits d’Apicius, appliquer avec sagacité, si enfin
l’opinion unanime des savans éditeurs de ce livre ne sembloient établir
suffisamment son antiquité.

L’usage immodéré des épices s’est prolongé jusqu’au règne de Henri
IV, sans que le système de la cuisine françoise ait beaucoup
varié[52]; c’est du moins ce qu’on peut conclure de la réimpression
de Taillevent en 1602, d’où il résulte qu’alors ses recettes étoient
encore employées. Mais la simplicité paroît s’être introduite dans
la préparation des alimens sous le règne de Louis XIII[53]. Entre
le Taillevent réimprimé en 1602, et le _Cuisinier françois_ de
François Pierre dit la Varenne[54], imprimé en 1651, il n’y a aucune
analogie[55]. Cette profonde modification ne peut-elle être attribuée
en partie à la baisse du prix des épices, amenée par la multiplication
des relations commerciales? Pour beaucoup d’hommes, le plus grand
plaisir de la possession est d’avoir ce que les autres désirent
inutilement. Quand les épices ont pu paroître sur toutes les tables, et
quand leur emploi n’a plus été une preuve de luxe et de richesse, on a
peut-être cessé de les estimer autant, et leur usage a été de plus en
plus restreint.

Outre l’intérêt général que la partie culinaire du _Ménagier_ a de
commun avec l’Apicius et le Taillevent, cette partie présente en outre,
sur l’ordre et le service des repas, des détails bien curieux, propres
à éclaircir divers passages de nos historiens et aussi de quelques
ouvrages littéraires[56]. Ces détails ont manqué à Legrand d’Aussy qui,
faute de les connoître, a donné peu de renseignemens sur cette partie
importante du sujet qu’il traitoit. On peut suppléer à cette omission
et se figurer le cérémonial et l’ordre d’un grand repas en examinant
et rapprochant entre eux certains passages de l’article IV (p. 114 et
suiv.).

L’auteur nous apprend d’abord que les différentes provisions
nécessaires à l’alimentation, confiées habituellement à la surveillance
des _écuyers de cuisine_, étoient choisies, marchandées et payées
par un ou plusieurs de ces officiers assistés des _queux_ ou
cuisiniers[57]. Les mets préparés par les queux étoient, en attendant
le moment du service, posés par les aides des écuyers sur un dressoir
placé dans la cuisine. C’est de là qu’ils étoient portés sur les tables.

Représentons-nous maintenant une vaste salle tendue de tapisseries ou
d’autres étoffes brillantes. Les tables sont recouvertes de nappes
à franges, jonchées d’herbes (odoriférantes?); une d’entre elles,
dite _grande table_, est destinée aux personnes les plus notables.
Les convives sont conduits à leurs places par deux maîtres d’hôtel
qui leur apportent à laver[58]. La grande table est garnie par un
maître d’hôtel, de salières d’argent, de gobelets couverts dorés pour
les plus grands personnages, de cuillers et de quartes[59] d’argent.
Les convives mangent (au moins certains mets) sur des tranchoirs
ou grandes tartines de gros pain[60] jetés ensuite dans des vases
dits _couloueres_[61]. Pour les autres tables, le sel est placé dans
des morceaux de pain[62] creusés à cet effet par des officiers dits
_porte-chappes_[63]. Dans la salle est un dressoir garni de vaisselle
et de différentes espèces de vins; deux écuyers placés auprès de ce
dressoir donnent aux convives des cuillers propres, leur versent le
vin qu’ils demandent, et retirent de la table la vaisselle salie;
deux autres écuyers font porter les vins au dressoir de salle: un
valet placé sous leurs ordres est uniquement occupé à tirer le vin
des tonneaux[64]. Les plats formant trois, quatre, cinq ou même six
services dits mets[65] ou assiettes, sont apportés par des valets et
deux écuyers _des plus honnêtes_. (Dans certains repas de noces, le
marié marchoit devant,[66] avec eux.) Les plats sont posés sur les
tables par un _asséeur_[67] assisté de deux serviteurs. Ces derniers
enlèvent les restes et les remettent aux écuyers de cuisine qui doivent
les mettre à part et les conserver. Après les mets ou assiettes, les
tables sont couvertes de nouvelles nappes, et l’entremets est alors
apporté. Ce service, le plus brillant du repas[68], se compose de plats
sucrés, de gelées de couleur avec armoiries, etc., puis d’un cigne, de
paons ou de faisans revêtus de leurs plumes, ayant le bec et les pattes
dorés, et placés au milieu de la table sur une sorte d’estrade[69]. A
l’entremets qui ne figure pas dans tous les menus, et à son défaut,
au dernier mets ou service, succède la _desserte_ (compotes, fruits,
_dessert_[70]); _l’issue_[71] ou sortie de table, composée le plus
souvent d’ypocras et d’une sorte d’oublie dite _mestier_, ou, en été,
l’ypocras étant hors de saison à cause de sa force, de pommes, de
fromages, et quelquefois encore d’autres pâtisseries et sucreries[72].
Le _boute-hors_ (vin et épices) termine le repas; on se lave les
mains, on dit les grâces, puis on passe dans la _chambre de parement_
ou salon. Les domestiques succèdent alors aux maîtres et dînent après
eux. On apporte ensuite aux convives du vin et les _épices de chambre_
(dragées, sucre rosat, écorces d’oranges confites, etc. V. p. 122, 265
et 274), et chacun se retire alors chez lui.

Il existe encore dans cette partie du _Ménagier de Paris_ un passage
dont l’importance seroit bien grande si l’on pouvoit être assuré
de son exactitude. Je veux parler du commencement de l’article
IV, dans lequel se trouve le relevé statistique de la consommation
de Paris. Selon l’auteur, cette consommation, en y comprenant les
animaux tués pour les maisons du roi et des princes, s’élevoit à
l’époque où il écrivoit à 30,316 bœufs; 188,552 moutons; 30,794 porcs,
et 19,604 veaux[73]. Ce passage sembleroit pouvoir fournir un nouvel
élément propre à déterminer le chiffre de la population parisienne à
la fin du XIVe siècle, mais les renseignemens donnés en cet endroit
du _Ménagier_ sont-ils exacts? Je ne m’arrêterai pas à une première
difficulté, celle que je remarque au sujet du nombre des bouchers de
la grande boucherie que l’auteur fixe à dix-neuf. Quoiqu’un boucher
pût tenir et tînt quelquefois, mais assez rarement, plusieurs étaux,
il me paroît difficile que les 32 étaux de la grande boucherie fussent
tenus par 19 bouchers seulement. Mais, en outre, est-il croyable que la
boucherie de Saint-Germain, composée de 19 étaux (13 bouchers, suivant
l’auteur), ne fournît par semaine à la consommation de Paris que 6
bœufs, 2 veaux et 18 porcs de plus que la boucherie du Temple, composée
de deux étaux seulement? On peut concevoir que l’auteur ne nomme
pas la boucherie de Saint-Benoît, destinée peut-être exclusivement
au chapitre[74]; mais comment ne cite-t-il pas celle de Saint-Éloi,
établie en 1358, et qui approvisionnant le riche quartier Saint-Paul,
devoit nécessairement avoir un important débit? Comment a-t-il négligé
celle de Saint-Marcel, ou s’il l’a confondue à dessein avec celle de
Sainte-Geneviève, pourquoi n’en prévient-il pas le lecteur[75]? Comment
enfin, est-il en désaccord avec lui-même, à deux lignes de distance,
sur la consommation du duc de Berry[76]? (_douze_ puis _seize_ bœufs,
80 puis 160 moutons). Cette variation est d’autant plus surprenante
qu’un doute, puis une vérification annoncés par l’auteur font compter
le lecteur sur des chiffres exacts et certains.

Je crois que les observations précédentes sont des présomptions graves
contre la fidélité de ces renseignemens statistiques[77], mais il est
encore des difficultés d’un autre genre qui s’opposeroient à ce qu’ils
pussent être consultés sûrement pour la fixation du chiffre de la
population parisienne. Il est certain qu’à la fin du xive siècle
l’abstinence de viande aux jours maigres étoit plus généralement et
plus strictement observée qu’aux époques où la population de Paris
nous est connue, et qui pourroient servir de termes de comparaison.
Nous ignorons si les bœufs amenés alors à Paris étoient plus ou
moins pesans qu’aujourd’hui; nous ignorons en outre combien de
livres de viande pouvoit consommer annuellement chaque habitant de
Paris, car la consommation individuelle augmente ou diminue d’une
manière très-sensible en raison inverse du prix des denrées[78],
et le chiffre actuel de cette consommation, fort inférieur à celui
qu’elle atteignoit en 1789, ne sauroit servir de base pour la fin
du XIVe siècle[79]. Enfin l’extrait d’un arrêt du
Parlement (t. II, p. 82 dans la note), dans lequel il
est dit que Guillaume de Saint-Yon vendoit vers 1380 dans trois étaux
pour 200 livres parisis de viande par semaine est loin de concorder
avec les calculs de l’auteur, et réduiroit de beaucoup le nombre des
animaux abattus par semaine à la grande boucherie, même en tenant
compte du produit de la vente des peaux, du suif, etc.

La partie culinaire du _Ménagier_ termine l’ouvrage dans les trois
manuscrits qui nous sont connus. Cependant l’auteur avoit annoncé dans
son prologue une troisième et dernière distinction devant contenir: 1º
des demandes d’ébatement répondues par le sort des dés, par _rocs_ et
par _rois_[80]; 2º un traité de la chasse à l’épervier; 3º des demandes
subtiles à trouver ou à deviner, et fondées sur l’arithmétique. De ces
trois articles nous n’avons que celui qui est relatif à la chasse,
encore est-il placé dans la seconde distinction, à la fin de l’article
III et après le traité des chevaux. Il semble étonnant que l’auteur qui
dans tout son livre suit avec une exactitude scrupuleuse la division
qu’il a annoncée dans son prologue, l’ait négligée aussi complétement
pour cet article. Est-ce donc à lui qu’il faut attribuer cette sorte de
transposition? Cet article est-il le seul de la troisième distinction
qu’il ait écrit? Les événemens ou la mort ont pu l’interrompre dans
son travail et l’empêcher d’écrire les deux autres articles de la
IIIe distinction, et le traité de la chasse ainsi isolé a pu être
placé par les personnes qui recueillirent le _Ménagier_ après le
traité des chevaux auquel il se lioit assez naturellement. Il seroit
encore possible que l’auteur eût renoncé, depuis qu’il avoit écrit son
prologue, à traiter les deux autres articles comme moins utiles à son
but, et qu’il eût lui-même interverti l’ordre annoncé, ou enfin que ces
deux articles, terminés par lui comme le deuxième, eussent été perdus;
j’avoue que ces deux dernières hypothèses me paroissent moins probables
que la première. J’ai cru, à tout hasard, devoir suivre dans cette
édition l’ordre annoncé dans le prologue, et j’ai renvoyé à la fin du
livre cet article unique de la troisième distinction.

Il est certain que les deux autres articles, relatifs à des sujets
plus intimes et peu connus jusqu’ici, auroient été plus curieux pour
nous que le traité de la chasse, mais on comprend que l’auteur ait
pu s’occuper de préférence de ce dernier sujet. A l’époque où il
écrivoit, la chasse à l’épervier (et même celle au faucon, quoique
plus dispendieuse), n’exigeant pas la quantité d’hommes et de chevaux
nécessaires à la vénerie, étoit un des divertissemens favoris de la
société moyenne[81] et passoit pour être particulièrement convenable
aux femmes. Cette chasse se faisoit souvent par une nombreuse société
de chasseurs et de chasseresses rangés en ligne, et jouissant avec
orgueil des succès de leurs oiseaux. L’auteur du _Roi Modus_ qui
écrivoit vers 1360 parle à deux reprises avec enthousiasme des plaisirs
que procuroit cette chasse. _C’est un déduit_, dit-il, _que chascun
puet faire de soy avecques dames et damoiselles.... et doit avoir la
dame aucun qui lui puisse baillier son esprevier quand il aura prins
l’aloé ou la pertrix.... Dieux! comme c’est beau déduit, c’est plaisant
déduit que de veoir prendre une aloé à l’estourse à bon esprevier!_[82]
Gaces de La Bugne, premier chapelain des rois Philippe de Valois, Jean
II, Charles V et Charles VI, que j’ai eu plus d’une fois occasion de
citer dans ce livre[83], après avoir déterminé le train nécessaire à
un _épreveteur_, l’engage à chercher un bon pays et des compagnons,
car il auroit été regrettable, selon lui, de chasser seul. Il lui
fait donc trouver belle et bonne compagnie de chevaliers et d’écuyers
_qui n’ont pas à sommes deniers_ (qui ne sont pas très-riches), de
dames et de damoiselles, et lui fait faire avec eux une chasse dont le
détail a beaucoup de rapports avec certains endroits de cet article du
_Ménagier_. Il regarde ce divertissement comme bien plus convenable
pour les femmes que la vénerie. «Le déduit de chiens, s’écrie-t-il,
peut-il donner de tels plaisirs aux dames qu’aussitôt on ne médise
d’elles? Une grande dame qui voudroit conserver sa réputation ne
piqueroit pas des éperons au travers des bois, des buissons et des
haies, et n’iroit pas avec plaisir tuer cerfs, loups ou sangliers. Aux
hommes appartiennent tels faits![84]»

Au reste, à cette époque où la distinction des rangs très-marquée
dans la législation et aussi, en général, dans les alliances de
familles, l’étoit peut-être moins que de nos jours dans les relations
de la vie privée, la chasse à l’épervier n’étoit pas la seule usitée
par les bourgeois. La chasse à l’oiseau en général, fauconnerie ou
autourserie, étoit une des occasions qui réunissoient le plus souvent
des personnes de conditions différentes. Gaces de La Bugne en donne
un exemple intéressant. Il raconte fort agréablement comment des gens
qu’il appelle _de moyen état_, mais parmi lesquels il se compte lui,
chapelain du roi, ainsi que des chevaliers (il y avoit en outre des
chanoines, des écuyers ou simples gentilshommes et des bourgeois),
firent ensemble une partie de chasse à l’oiseau qui dura une semaine.
Ils avoient vingt oiseaux et voloient tous les jours au moins jusqu’à
midi. Alors ils venoient dîner ensemble à une hôtellerie, et le repas
se passoit joyeusement, sans médire du prochain et sans convoiter les
richesses d’autrui. Après dîner, la chasse recommençoit jusqu’au souper
qui étoit plantureusement servi[85].

L’auteur du _Ménagier_ avoit sans doute sur la convenance et l’agrément
de la chasse à l’épervier la même opinion que Gaces de La Bugne,
et c’est là ce qui l’aura déterminé à parler avec détail de cette
chasse. Son traité est très-complet et au moins égal en mérite à la
partie du _Modus et Ratio_ relative au même sujet. Il ne me paroît pas
s’être servi[86] de ce dernier livre, trop répandu cependant à la fin
du XVIe siècle pour qu’il ne l’ait pas rencontré.
Cependant les deux ouvrages étant presque contemporains et traitant
le même sujet, plusieurs passages du _Modus_ m’ont été utiles pour
éclaircir ou compléter cette partie du _Ménagier_. J’ai aussi mis
à contribution, dans ce double but, les autres anciens ouvrages de
fauconnerie, pensant que cet article, à cause de l’obscurité d’un art
aujourd’hui si peu connu[87], demandoit à être éclairci avec plus de
détail que les autres.

       *       *       *       *       *

Quand on a lu le _Ménagier de Paris_, on se demande comment un pareil
ouvrage a pu rester quatre cent cinquante ans sans avoir été connu, ou
plutôt sans avoir été cité. Quant à moi, l’existence de ce précieux
monument historique m’a été révélée seulement par la vente des livres
de M. Huzard[88]. Un manuscrit sur papier du _Ménagier_ figuroit au nº
662 de la première partie du catalogue de cette remarquable collection.
L’examen rapide que j’en fis à l’exposition me fit pressentir le mérite
du livre, et me donna un vif désir d’en devenir possesseur. Le volume
m’ayant été adjugé, je me convainquis en le lisant de l’utilité qu’il
y avoit à le publier. Je crus, à cet effet, nécessaire de rechercher
s’il en existoit d’autres manuscrits. Je n’en trouvai de mentionnés
que sur les catalogues des ducs de Bourgogne, publiés par M. Barrois
dans sa _Bibliothèque protypographique_[89]. Les catalogues des
Bibliothèques du Roi et de l’Arsenal ne portent aucune indication du
_Ménagier_: je pensai donc que l’un des manuscrits de Bourgogne, sinon
les deux, pouvoit se trouver à la Bibliothèque royale de Bruxelles,
et je demandai à M. le baron de Reiffenberg, auteur de tant de
savantes publications historiques et associé étranger de la Société
des Bibliophiles françois, de vouloir bien m’éclairer sur ce point.
Sa réponse, par suite de diverses circonstances, ne m’étant parvenue
qu’après plusieurs mois, je crus pendant quelque temps qu’il falloit
renoncer à l’espoir de découvrir un autre manuscrit du _Ménagier_, et
quoique le mien présentât d’assez notables défectuosités, la Société
des Bibliophiles décida sur ma proposition, dans sa séance du 14 mai
1845, qu’elle donneroit une édition de ce livre, et me chargea de
préparer cette édition sur mon manuscrit, le seul que nous pussions
alors nous procurer. Mais quelques jours plus tard un de mes amis,
connu par quantité de savans travaux historiques, me communiqua un
manuscrit sur vélin du _Ménagier_, contenant 173 feuillets in-folio,
paroissant écrit dans la première moitié du XVe siècle et orné au
commencement d’une miniature reproduite dans cette édition[90]. Je
reconnus bientôt que ce volume, qui ne porte pas les armoiries des
ducs de Bourgogne étoit cependant, sans aucun doute, le premier des
deux portés aux inventaires de 1467 et 1487, et indiqué sous les nos
836 et 1758 de la _Bibliothèque protypographique_[91], et qu’il avoit
certainement servi de modèle au copiste du mien. Ce manuscrit, le plus
ancien des trois que j’ai eus à ma disposition, est désigné dans le
cours de mon travail sous le nom de Ms. A.

Peu de temps après, M. le baron de Reiffenberg m’écrivoit de son
côté qu’un des manuscrits des ducs de Bourgogne existoit en effet à
Bruxelles, et m’envoyoit en même temps un exemplaire de _l’Annuaire
de la Bibliothèque royale de Belgique pour 1843_[92], dans lequel
se trouve, p. 33, un excellent article de lui sur cet exemplaire
du _Ménagier de Paris_. La Société des Bibliophiles fit alors des
démarches actives pour obtenir la communication de ce précieux volume
que M. de Theux, ministre de l’intérieur de Belgique, voulut bien lui
accorder, sous la garantie de M. le marquis de Rumigny, ambassadeur de
France à Bruxelles.

Ce manuscrit sur vélin, que j’ai désigné sous la lettre B, paroît
postérieur de quelques années au précédent. Le premier feuillet est
orné d’un C initial en or et en couleur, au centre duquel on voit,
comme dans la miniature du Ms. A, l’auteur donnant ses instructions
à sa femme. Ce feuillet est entouré de trois côtés (en tête, au fond
et en queue) d’une bordure d’arabesques en or et en couleur dans
laquelle se trouve au bas de la page l’écusson de Philippe dit le
Bon ou de Charles le Téméraire, ducs de Bourgogne. Il contient 193
feuillets de format in-folio. La description donnée du second manuscrit
de Bourgogne dans les inventaires de 1467 et 1487 établit que le
manuscrit de Bruxelles est le même que celui porté aux nos 1202 et
1759 de la _Bibliothèque protypographique_. Il a été fait avec soin
par un écrivain intelligent mais peut-être trop disposé à corriger les
endroits qui lui sembloient défectueux; plusieurs corrections ont en
outre été faites après coup. Il n’a pas été copié sur le manuscrit A
et en reproduit un autre: il fournit en effet trop de variantes pour
qu’on puisse les attribuer seulement au copiste. Il a probablement
été exécuté pour Philippe le Bon, mais le Ms. A qui ne porte pas
d’armoiries a pu appartenir à d’autres propriétaires avant d’entrer
dans la bibliothèque de Bruges.

L’auteur du _Ménagier_ étoit trop connu du duc de Berry[93] pour avoir
appartenu au parti bourguignon à Paris, et pour qu’on suppose qu’un
des manuscrits de Bourgogne soit la copie de quelque autre plus ancien
offert par l’auteur au duc Philippe le Hardi ou à son fils Jean sans
Peur. Un semblable hommage auroit plutôt été fait au duc de Berry, mais
on ne voit pas figurer _le Ménagier_ sur l’inventaire des livres et
autres objets mobiliers de ce prince dressé après son décès. On peut
raisonnablement croire qu’un exemplaire de cet ouvrage aura été trouvé
chez un de ces bourgeois riches et considérés qui perdirent la vie ou
au moins leurs biens lors de l’entrée des Bourguignons à Paris en 1418,
et qu’il aura été apporté alors au duc de Bourgogne par un de ses agens
ou partisans.

       *       *       *       *       *

J’ai dit plus haut que le manuscrit de M. Huzard, qui m’appartient
aujourd’hui et que j’ai désigné sous la lettre C, avoit été copié sur
le Ms. A. Outre la conformité presque parfaite des deux textes, j’en
ai une preuve bien manifeste. Il existe et il existoit évidemment
dans le Ms. A avant qu’il eût été revêtu de sa reliure actuelle, une
transposition de deux feuillets par suite de laquelle le traité de
l’épervier et le passage relatif aux boucheries de Paris se trouvent
mêlés l’un à l’autre et se coupent réciproquement. L’écrivain du Ms. C
a copié ce qu’il avoit sous les yeux, sans voir quelle étoit la cause
du désordre de son texte, et le même mélange existe dans sa copie,
mais sans transposition, c’est-à-dire que le sens est interrompu au
milieu de deux pages et non entre la fin d’un verso et le commencement
d’un recto, comme dans le Ms. A. Pour rendre ce désordre un peu moins
choquant, il a ajouté dans un endroit deux mots qui ne me semblent
cependant pas atteindre ce résultat. Cet écrivain, évidemment Flamand,
a en outre laissé dans sa copie de nombreuses traces du dialecte qu’il
parloit, écrivant souvent _commenche_ pour _commence_, _cousant_ pour
_couchant_, _franchois_ pour _françois_, _cheulx_ pour _ceulx_, etc. On
peut aussi lui reprocher d’avoir oublié quelques membres de phrases; il
a cependant fait au texte cinq ou six corrections assez heureuses et
tout à fait nécessaires au sens.

Le manuscrit C contient 280 feuillets de papier _in-folio parvo_
assez négligemment mais lisiblement écrits, et semble remonter au
commencement du règne de Louis XI. La première lettre renferme un
écusson parti, au premier de gueules au chevron d’hermines, et au
second d’hermines au chef de gueules; ces armoiries sont celles des
maisons de Ghistelles[94] et de Roubais[95]. D’après les règles de
l’art héraldique, les femmes doivent porter un écu parti, au premier
des armes de leur mari, et au second des leurs[96]; cet écusson devroit
donc être celui d’une demoiselle de Roubais mariée à un Ghistelles;
mais malgré les recherches les plus attentives, je n’ai pas trouvé
qu’une semblable alliance ait eu lieu à l’époque où mon manuscrit
fut écrit, tandis que Pierre (ou Réné)[97] seigneur de Roubais,
fils de Jean mort en 1449, et d’Agnès de Lannoy, né à Herzelles le
1er août 1415 et mort le 7 juin 1498, avoit épousé Marguerite de
Ghistelles, fille de Jean sieur de Bockède, Lauderburg, etc., et de
Charyte de Gand-Vilain, née le 14 octobre 1415 et morte le 17 octobre
1498[98]. Suivant le dossier de Roubais au Cabinet généalogique, ils
n’eurent qu’une fille nommée Isabelle, dame de Roubais et d’Herzelles,
femme de Jacques de Luxembourg, sieur de Richebourg[99], et morte
en 1502. Si l’on admet que l’écrivain a pu commettre une erreur
(erreur très-rare mais qui n’est cependant pas sans exemple[100]), et
placer les premières celles de ces armoiries qu’il devoit mettre les
secondes, l’attribution du volume à Marguerite de Ghistelles paroîtra
bien fondée. M. de Roubais, fils d’un premier chambellan des ducs
de Bourgogne, et attaché lui-même à leur service[101], avoit toute
facilité pour faire copier un manuscrit de la bibliothèque de ces
princes. Une autre circonstance vient encore ajouter à la probabilité
de cette conjecture: dans une espèce d’appendice[102] qui est propre à
mon manuscrit, on trouve des recettes qui sont dites avoir été envoyées
par un certain Hotin, cuisinier _qui fut à Monseigneur de Roubais_.
Ces mots indiquent des rapports intimes, à l’époque où ils ont été
tracés, entre la famille de Roubais et le propriétaire de ce volume
écrit d’ailleurs par un Flamand et d’après un manuscrit des ducs de
Bourgogne; il ne me paroît donc pas possible d’attribuer l’écusson
de la lettre initiale du Ms. C à d’autres familles qu’à celles de
Ghistelles et de Roubais, et par suite, attendu les renseignemens
fournis par les généalogies de ces deux familles, à une autre personne
qu’à Marguerite de Ghistelles, dame de Roubais.

Ce dernier exemplaire n’étant qu’une reproduction du Ms. A, n’a eu
qu’une très-médiocre importance pour mon travail d’éditeur. J’ai pris
les variantes qu’il offroit, seulement lorsque le sens les justifioit
complétement, et j’ai toujours en ce cas indiqué en note leur origine;
mais lorsque l’un des Mss. A et B, presque également beaux et soignés,
contenoit une faute évidente corrigée dans l’autre, j’ai pris la
meilleure leçon, et je n’ai en général donné la variante en note que
quand la leçon adoptée pouvoit laisser quelque doute dans l’esprit
du lecteur. Plus d’une fois j’ai trouvé dans ces deux manuscrits des
fautes qui me sembloient faciles à reconnoître et même à corriger,
mais ces deux volumes ayant été écrits hors de la présence et même
sans doute après la mort de l’auteur, j’ai cru qu’un ou plusieurs
mots propres à changer le sens apparent de la phrase pouvoient avoir
été omis, et je n’ai fait que proposer en note la correction, sans
l’insérer dans le texte. Au reste, la copie faite sur le Ms. C, a été
collationnée sur les Mss. A et B, et les premières épreuves de chaque
feuille l’ont été de nouveau sur le Ms. B comparé au Ms. A toutes les
fois qu’il étoit en désaccord avec l’épreuve. J’ose donc espérer que le
texte du _Ménagier_ contiendra peu de fautes graves et sera au moins
sans omissions.

Le lecteur remarquera sans doute que l’orthographe employée dans le
_Ménagier_ varie; par exemple, qu’on y voit successivement _pongnée_ et
_poignée_, _aultre_ et _autre_, _tartre_ et _tarte_, etc. Je le prie
de ne pas attribuer ces différences à ma négligence. L’orthographe
étant variable dans chacun des manuscrits que j’avois sous les yeux,
je n’ai pas cru devoir la rendre uniforme et donner une régularité de
mon fait à un livre qui pourra être consulté par quelques personnes
sous le rapport linguistique. Quant à la ponctuation qui ne figure que
d’une manière très-incomplète et souvent fautive (surtout quant aux
barres représentant les virgules) dans les anciens manuscrits, j’en ai
sobrement usé, dans la pensée qu’on lui ôte souvent de sa valeur et
même toute signification en la multipliant à l’excès.

Cet ouvrage ne devant pas être lu seulement par des personnes
versées dans notre histoire et notre ancienne littérature, j’ai cru
nécessaire de donner, à la suite de cette introduction, une indication
détaillée des ouvrages ou documens cités en abrégé dans le cours
de mes notes, avec une notice succincte de leur contenu quand ils
étoient généralement peu ou mal connus. La table des matières qui
termine l’ouvrage sera, je l’espère, d’une utilité plus générale. Je
dois prévenir le lecteur que je ne l’ai pas faite aussi détaillée
pour la partie morale du _Ménagier_ que pour la partie matérielle. Je
l’ai surtout abrégée pour l’_Histoire de Mellibée_ et _le Chemin de
pauvreté_, qui ne sont pas de l’auteur du livre et y figurent comme
épisodes. _Le Viandier_ m’a fourni un très-grand nombre de mots; je
n’ai cependant porté à la table les noms des animaux, des végétaux et
des mets que lorsque l’endroit indiqué donnoit sur eux quelques détails
susceptibles d’être consultés, ou offroit quelque intérêt. J’ai donné
aussi dans cette table au moins deux fois chacun des plats cités dans
les _menus_ parce qu’il pouvoit être utile de faire connoître à quel
moment du repas se servoit tel ou tel mets, et aussi parce que certains
plats ne sont nommés que là.

Il me reste maintenant à remercier les personnes qui m’ont aidé de
leurs conseils, et surtout par la communication ou l’indication
des pièces utiles à consulter. Je dois d’abord citer M. Paris, de
l’Académie des inscriptions, dont l’amitié m’est si précieuse, et M.
Dessalles, des Archives du royaume. Je nommerai aussi M. Léon Tripier
qui a collationné avec moi la plus grande partie du premier volume;
M. d’Arcy que j’ai eu occasion de mentionner dans une de mes notes,
et qui m’a en outre rendu le service de collationner _le Chemin de
pauvreté_ sur le manuscrit du Roi nº 7201; je citerai encore M. Duclos,
de la section judiciaire des Archives du royaume. Enfin, l’_Histoire de
Mellibée_ a été collationnée par M. Borel d’Hauterive sur le manuscrit
du Roi nº 7072^{3.3}.

JÉRÔME PICHON.

Paris, 27 mai 1847.


INDICATION DÉTAILLÉE

DE QUELQUES OUVRAGES OU DOCUMENS,

MANUSCRITS OU IMPRIMÉS,

Cités en abrégé dans l’Introduction et les notes du _Ménagier de
Paris_[103].


Albéric de Trois-Fontaines.

     Chronique attribuée à Albéric, moine de l’abbaye de
     Trois-Fontaines au XIIIe siècle, et imprimée
     dans les _Accessiones historicæ_ de Leibnitz. Leipsick, 1698, et
     Hanovre, 1700, in-4º. Voir sur cette chronique l’excellent article
     de la Bibliothèque historique de la France, T. II, nº 16,803.

Anselme (le Père).

     C’est le premier auteur de l’Histoire généalogique des grands
     officiers de la couronne, revue et augmentée par les Pères Ange
     et Simplicien. Je cite la dernière et la plus complète édition de
     Paris, 1726, en 9 vol. in-folio.

Arch. du Roy., reg. K. 220, 1.

     Registre déposé à la section historique des Archives du Royaume,
     contenant les comptes du duc de Berry pour les années 1370, 1373,
     etc.

Arcussia (d’).

     La fauconnerie de Charles d’Arcussia de Capre, seigneur
     d’Esparron, divisée en dix parties. Paris, Jean Houzé, 1627,
     in-4º, fig.

     C’est la meilleure édition de cet excellent ouvrage.

     La _Fauconnerie du roi_ forme la VIe partie.

     La _Conférence des fauconniers_ en est la VIIe.

     Le _Discours de chasse_ (ou _Convy pour l’assemblée des
     fauconniers_), précédé d’un titre spécial daté de 1627, forme la
     VIIIe partie.

     La Xe et dernière partie se compose des _Lettres de Philoïerax
     à Philofalco_, avec titre daté de 1626.

     Ce livre, formé de parties imprimées en différentes années et
     souvent mal reliées, est difficile à collationner.

Ayala (Pedro Lopez de).

     De la Caça de las Aves et de sus plumajes et dolencias et
     medecinamientos (por Pedro Lopez de Ayala). Ms.

     Ce Traité de fauconnerie, dédié à Gonzalo de Meña, évêque de
     Burgos, fut écrit vers 1386 par Pedro Lopez de Ayala, grand
     chancelier de Castille, alors prisonnier en Portugal par suite de
     la bataille d’Aljubarota. L’auteur avoit été en France; il parle
     de Charles V, du duc de Bourgogne, du comte de Tancarville, de
     Bureau de la Rivière; il cite aussi beaucoup de grands personnages
     espagnols.

     Je parlerai ailleurs avec plus de détail de ce Traité instructif
     et curieux. Il n’a jamais été imprimé: on en trouve d’assez
     copieuses citations (mais non textuelles) dans la _Caça
     d’Altaneria_ de Diogo Fernandez Ferreira; Lisboa, 1616, in-4º,
     volume écrit en portugais, qui n’est au reste guère plus facile à
     trouver que les manuscrits d’Ayala.

     Il y a à la Bibliothèque royale un manuscrit de l’ouvrage d’Ayala
     (nº 8166, in-4º), bien écrit, mais incomplet de la fin. Je possède
     celui qui étoit, en 1803, à la vente de Laserna-Santander, et, en
     1843, à celle de M. Huzard. Il est complet et un peu plus ancien
     que celui du Roi.

Bibliothèque des Théreuticographes, 1763.

     Cette _Bibliothèque_, qui n’est pas un ouvrage sans mérite, est
     des frères Lallemant, libraires de Rouen, et forme le premier
     volume de l’École de la chasse aux chiens courans de Le Verrier de
     la Conterie. Rouen, 1763, 2 vol. in-8º.

Bouchet(G.).

     Recueil de tous les oiseaux de proye qui servent à la vollerie
     et fauconnerie, par G. B.; à Poitiers, par Eng. de Marnef et les
     Bouchetz frères.

     Ce Recueil est le dernier des trois ajoutés par de Marnef et les
     Bouchet à leur édition de 1567 de la Fauconnerie de Franchières.
     Guillaume Bouchet s’en avoue l’auteur dans une dédicace qui
     se lit en tête de quelques exemplaires de cette édition. Le
     plus grand nombre des exemplaires contient une dédicace toute
     différente, et signée d’Enguilbert de Marnef.

Breuil (Du).

     Théâtre des antiquités de Paris. 1612, in-4º, fig.

     Le nom de l’auteur doit être écrit _du Breul_.

Bruyère Champier.

     De Re cibaria libri XXII, Jo. Bruyerino Campegio Lugdun authore.
     Lugduni, 1560, in-8º.

Calendrier des bergers.

     L’édition de ce livre curieux et bizarre que je cite, et dont je
     possède un exemplaire provenant de M. Huzard, est celle imprimée
     par Guiot Marchant le 18 avril 1493, qui est très-certainement la
     même que celle décrite dans le Manuel du libraire comme pouvant
     être du 18 avril 1488, et encore certainement la même que celle
     dont un magnifique exemplaire sur vélin existe à la Bibliothèque
     du Roi. J’en ai acquis la preuve en comparant mon exemplaire à
     celui de la Bibliothèque royale. La marque de Guiot Marchant a été
     recouverte par une miniature, et la souscription supprimée.

Champollion, II, 254.

     Louis et Charles, ducs d’Orléans. Paris, 1844. 2 vol. in-8º.

Chevaleureux, comte d’Artois.

     Le livre du très-chevalereux comte d’Artois et de sa femme. Paris,
     Techener, 1837, in-4º, figures.

Chevalier de La Tour.

     Voy. l’introduction, et sur les éditions imprimées de ce livre, le
     Manuel du libraire, T. I, p. 649.

     J’ai cité cet ouvrage d’après une copie que j’ai fait faire du
     manuscrit du Roi nº 7403.

Christine de Pisan.

     Le Livre des fais et bonnes meurs du sage roy Charles V.

     Imprimé dans les tomes I et II de la collection des Mémoires pour
     servir à l’histoire de France, par Michaud et Poujoulat.

Chroniques de saint Denis, CXII.

     Les grandes chroniques de France, selon qu’elles sont conservées
     en l’église de Saint-Denis, publiées par M. Paulin Paris. Paris,
     Techener, 1838. 6 vol. in-12 ou 1 vol. in-fol. (CXII est
     le chiffre du chapitre.)

Collect. Leber, XIX, 35.

     Collection des meilleures dissertations, notices, etc., relatifs
     à l’histoire de France, par MM. Leber, J.-B. Salgues et J. Cohen.
     Paris, 1826-42. 20 vol. in-8º.

Corrozet, éd. de 1543.

     La Fleur des antiquités, singularitez et excellences de Paris.
     Paris, Pierre Sergent, 1543. in-16.

     J’ai publié l’année dernière, dans le Bulletin du bibliophile
     de Techener, une notice sur cette édition de Corrozet; elle est
     précieuse à cause d’une liste des rues de Paris par tenans et
     aboutissans qu’elle contient; on y a ajouté, en outre, presque
     tout l’opuscule intitulé _les Rues et Églises de Paris_.

Crescens.

     _Le Livre des prouffits champestres_, par Pierre de Crescens, de
     Boulogne-la-Grasse, traduit du latin par ordre de Charles V. Je
     me suis servi de l’édition de Galliot du Pré, de 1533, et aussi
     d’un manuscrit sur papier que je possède de cet ouvrage, et qui
     appartenoit en 1486 à Jean Budé, audiencier de France.

Dit des Pays.

     Voir le Manuel du libraire. J’ai consulté l’édition de cet ouvrage
     imprimée à la suite du _Dialogue du mondain et du célestin_.
     In-16, gothique.

Duchesne Montmorency.

     Histoire généalogique de la maison de Montmorency et de Laval, par
     André Duchesne. Paris, 1624, in-fol.

     Pr. signifie _Preuves_.

Entretiens de Colbert avec Bouin.

     Entretiens de M. Colbert avec Bouin, fameux partisan, sur
     plusieurs affaires curieuses. Cologne, 1701, 3 parties en un vol.
     in-12.

     Ouvrage de Sandras de Courtilz. Ce Bouin, dont le nom s’écrivoit
     _Bauyn_, étoit de la famille des Bauyn d’Angervilliers et de
     Pereuse.

Félibien.

     Histoire de la ville de Paris, composée par D. Michel Félibien,
     reveue, augmentée, mise au jour par D. G. A. Lobineau. Paris,
     Desprez, 1725. 5 vol. in-fol.

Frédéric II (l’empereur).

     Reliqua librorum Friderici II imperatoris de arte venandi cum
     avibus; annotationes addidit suas Jo. Gott. Schneider. Lipsiæ,
     1788-9. 2 vol. in-4º, fig.

     Outre le manuscrit dont je vais parler, je me suis servi de cette
     édition, qui ne contient rien de plus, quant au texte, que celle
     de 1596, mais qui est préférable à cause des excellentes notes
     de Schneider. Il est fâcheux que ce savant n’ait pas pu donner
     le texte entier de l’ouvrage. On en connoît maintenant deux
     manuscrits complets, l’un donné à la Bibliothèque Mazarine par M.
     Leblond; l’autre (du XVe siècle), que j’ai fait
     venir d’Italie en 1837, m’appartient depuis cette époque.

     Ce Traité est le plus étendu et le plus curieux que nous ayions
     sur les oiseaux de proie. Il seroit à désirer qu’on en donnât une
     édition complète.

G. C.

     Ces lettres désignent l’ouvrage intitulé: _le Grand Cuisinier de
     toutes cuisines_.

Gaces de la Bugne.

     C’est le poëme connu sous le titre de _Livre des déduits_,
     commencé en 1359 à Redefort en Angleterre, et achevé à Paris
     entre 1373 et 1377 (après la promotion de Pierre d’Orgemont à
     la dignité de chancelier, et avant la mort du roi Édouard III
     d’Angleterre), par Gaces de la Bugne, premier chapelain des rois
     Philippe de Valois, Jean II, Charles V et Charles VI, trésorier
     de Saint-Francbourg de Senlis, et curé de Molissent, au diocèse
     de Chartres (où il ne résidoit pas). Il paroît être mort au
     commencement de 1384, d’après des renseignemens contenus dans les
     registres du parlement, et que je développerai ailleurs.

     Je le nomme _de la Bugne_, et non _de la Bigne_ ou _de la Vigne_,
     comme on le fait habituellement, parce que son nom est constamment
     écrit ainsi dans les registres du parlement où il figure six ou
     sept fois.

     Gaces de la Bugne est cité dans le Père Anselme (T. VIII, p. 227)
     sous le nom de _Gaces de Chantepie_; mais il n’a jamais été nommé
     ainsi. Il dit lui-même dans son poëme qu’il sortoit des familles
     de la Bugne, d’Aigneaux, de Clinchamp et de Buron, et ne fait
     aucune mention de celle de Chantepie.

     Le Père Anselme ou ses continuateurs auront cru sur parole la
     personne qui disoit _conserver_ son livre.

     J’ai travaillé sur l’édition de son ouvrage imprimée à Paris à la
     suite de Gaston Phébus, par Antoine Vérard, in-fol. gothique, sans
     date. Les lettres indiquent les cahiers ou feuilles d’impression,
     et les chiffres le rang que tient dans le cahier le feuillet cité.

Godefroy (Denis).

     Histoire de Charles VI, roi de France, par Jean Juvénal des
     Ursins, archevesque de Rheims, augmentée de plusieurs mémoires,
     etc., par Denis Godefroy. Paris, de l’Imprimerie royale, 1653,
     in-fol.

Grand cuisinier de toutes cuisines.

     Voy. l’Introduction, p. XXXIII.

Hist. des grands officiers de la Couronne.

     Voy. Anselme (le P.).

Inventaire de R. Picque, archevêque de Rheims en 1389. Reims, 1842,
in-12.

     Ce curieux document fait partie des Mélanges publiés par la
     Société des Bibliophiles de Reims. Malheureusement il n’a pas été
     édité très-correctement.

J. Reg. 147, 36 (ou autres chiffres).

     Registres du Trésor des Chartes. Le premier chiffre est celui du
     registre; le second celui de la pièce.

     La lettre J. avec un seul numéro (note sur le sire d’Andresel)
     indique un carton du Trésor des Chartes.

     Section historique des Archives du Royaume.

Jugés, XXXII, 94.

     Arrêts rendus au civil par le parlement de Paris. Le chiffre
     romain indique le registre; le chiffre arabe est le numéro de
     l’arrêt dans l’année indiquée.

     Section judiciaire des Archives du royaume.

Juv. des Ursins, in-fol.

     Voyez Godefroy (Denis).

K. 52, 3.

     Registre ou plutôt cahier contenant des comptes de la maison du
     duc d’Anjou.

     Section historique des Archives du royaume.

K. reg. 55.

     Comptes de la reine Marie d’Anjou, femme de Charles VII.

     Section historique des Archives du royaume.

Lebeuf, X, 260.

     C’est l’Histoire du diocèse de Paris par ce savant abbé. Paris,
     1754-8. 15 vol. in-12. Tome X, page 260.

Legrand d’Aussy.

     Histoire de la vie privée des François; nouvelle édit., avec des
     notes par J.-B.-B. de Roquefort. Paris, 1815. 3 vol. in-8º.

Maison réglée d’Audiger, 1692.

     La Maison réglée et l’Art de diriger la maison d’un grand seigneur
     et autres. Paris, Legras, 1692. In-12.

     Le sieur Audiger, auteur de cet ouvrage rare qui est resté
     inconnu à Legrand d’Aussy, avoit servi la comtesse de Soissons,
     le président de Maisons, Colbert, le duc de Saint-Aignan, etc.
     Son livre contient beaucoup de particularités curieuses, et on
     y trouve, entre autres choses, le détail des attributions des
     différens domestiques, et le relevé de la dépense annuelle d’une
     grande, puis d’une médiocre maison. Louis XIV est même en scène
     dans ce livre, et on ne voit pas sans étonnement la facilité avec
     laquelle on abordoit ce prince. Un des endroits les plus curieux
     de _la Maison réglée_ est celui où l’auteur raconte avec grands
     détails qu’il présenta au roi, le 18 janvier 1660, une caisse de
     petits pois.

Matinées.

     Plaidoieries civiles prononcées aux audiences du matin du
     parlement de Paris. Le plus ancien registre est de l’année 1395.

     Section judiciaire des Archives du royaume.

Modus.

     Le Livre du roy Modus et de la royne Racio. Nouvelle édition, avec
     une préface par Elzéar Blaze. Paris, 1839. Grand in-8, fig.

     J’ai cité cette édition, parce qu’elle est la meilleure de ce
     livre précieux. Elle laisse néanmoins beaucoup à désirer, attendu
     qu’elle est imprimée dans un caractère soi-disant gothique tout
     à fait de fantaisie et à peu près illisible, qu’elle contient
     beaucoup de fautes, et est absolument sans notes. Mais elle vaut
     encore mieux que les anciennes éditions si rares et si chères, et
     elle est d’ailleurs la seule qu’on puisse se procurer à un prix
     modéré.

     Il est fâcheux que l’éditeur n’ait pas donné en même temps _le
     Songe de Pestilence_, espèce de suite mystique du Modus, composée
     vers 1372, et imprimée très-incorrectement en 1506 sous le titre
     de _Modus et Ratio de divine contemplation_. J’ai cité le _Songe
     de Pestilence_ d’après une copie que j’en ai faite sur le beau
     manuscrit du Roi 632^{13}, lequel devra servir de base à toute
     nouvelle édition du Roi Modus.

Morais.

     Le véritable Fauconnier, par messire C. de Morais, chevalier,
     seigneur de Fortille, cy-devant chef du héron de la grande
     fauconnerie. Paris, Quinet, 1683. In-12.

Plaidoieries civiles;--Plaidoieries criminelles du parlement.

     Registres contenans les plaidoieries prononcées au civil (ou au
     criminel) devant le parlement.

     Les plus anciens remontent à 1364 pour les plaidoiries civiles, et
     à 1387 pour les plaidoiries criminelles.

     Section judiciaire des Archives du royaume.

Plan de tapisserie.

     Plan en perspective de la ville de Paris (au commencement du
     XVIe siècle), gravé par Dheulland en 1756,
     d’après un autre gravé plus anciennement, qui appartenoit alors
     à l’abbaye de Saint-Victor. Ce dernier plan étoit le même qu’un
     autre représenté sur une tapisserie provenant de la maison de
     Guise, et acquise par la ville de Paris, sous la prévôté de M.
     Turgot.

Plan de Turgot.

     Plan de Paris commencé l’année 1734, dessiné et gravé sous les
     ordres de messire Michel Étienne Turgot, prévôt des marchands,
     achevé en 1739, levé par L. Bretez, gravé par Cl. Lucas, et écrit
     par Aubin. 1 vol. in-folio-atlantico de 21 feuilles.

Quadragésimal spirituel.

     Voir, sur les éditions de ce livre bizarre, le Manuel du libraire,
     T. III, p. 881. Je me suis servi de l’édition de Jehan Janot,
     in-4º gothique.

R. 122 (ou 123).

     Je cite ainsi, dans ma note sur la punition de Paris en 1383,
     les registres du Trésor des Chartes portant les nos 122 et
     123, etc., dont j’ai parlé au commencement de cette même note. Le
     second chiffre est celui de la pièce.

Recueil manuscrit des épitaphes de Paris.

     Il y a plusieurs copies manuscrites de ce Recueil (fait
     au XVIIe siècle) dans les bibliothèques
     particulières. Le plus beau et le plus complet est à la
     Bibliothèque du Roi (Cabinet généalogique). Je me suis servi d’un
     exemplaire en 3 vol. in-4º, qui fait partie de mon cabinet. J’ai
     vu plusieurs exemplaires de ce Recueil où manquoient les épitaphes
     de l’église Saint-Séverin.

Reg. du parlement, plaid. civ.

     Voy. _Plaidoieries civiles_.

Rues et églises de Paris.

     Les rues et églises de Paris, avec la dépense qui se fait chacun
     jour, etc., In-4º gothique. Voy. _Corrozet_.

Sainte-Aulaire.

     La fauconnerie de François de Saincte-Aulaire, sieur de La Renodie
     en Périgort, gentilhomme Lymosin. Paris, 1619. In-4º.

     L’auteur de ce livre très-rare dit que son ouvrage a été revu en
     manuscrit par le connétable de Luynes.

Sauval.

     Antiquités de Paris. Paris, 1724. 3 vol. in-fol.

Secousse.

     Mémoires pour servir à l’histoire de Charles II, roi de Navarre.
     Paris, Durand, 1758.--Recueil de pièces servant de preuves aux
     mémoires, etc. Paris, 1755. 2 vol. in-4º.

Songe de Pestilence.

     Voy. _Modus_.

Table des Mémoriaux de la chambre des comptes.

     Ces tables sont déposées aux Archives du royaume, et renvoient aux
     mémoriaux qui n’existent plus depuis les incendies du Palais. Il
     reste cependant quelques pièces recopiées sur des expéditions ou
     sur des copies _vidimées_ prêtées par des particuliers depuis les
     incendies, et aussi différens exemplaires d’extraits des mémoriaux
     faits à diverses époques pour des magistrats.

Taillevent.

     Voir, sur les manuscrits connus de cet ouvrage, l’introduction, p.
     XXXV.

     Quand je cite le Taillevent imprimé, je parle de la première des
     éditions du XVe siècle décrite par M. Brunet,
     dont je possède le seul exemplaire connu (celui de MM. Baron et
     Huzard).

Trésor de dom Villevieille.

     Extraits de chartes, cartulaires et autres documens historiques
     recueillis par dom Villevieille, et classés par noms de famille.
     Ce précieux recueil est aujourd’hui au Cabinet généalogique
     (partie de la Bibliothèque royale confiée à la surveillance si
     compétente et si éclairée de M. Léon Lacabane).

Trésor de santé.

     Le Thrésor de Santé, ou Message de la vie humaine, divisé en
     dix livres, lesquels traictent de toutes sortes de viandes et
     breuvages; faict par un des plus célèbres et fameux médecins de ce
     siècle. Lyon, J. A. Huguetan, 1616, in-8º.

     Il doit exister des exemplaires de cette édition avec la date de
     1607, car le dernier feuillet porte: _A Lyon, de l’imprimerie
     d’Estienne Servain_, 1607.

     Il résulte des termes de la dédicace de cet ouvrage, adressée
     par le libraire à M. de Villars, premier président au parlement
     de Dombes, que l’auteur avoit dans ces matières une longue
     expérience _qui l’avoit approché_ (comme médecin?) _de la première
     et plus chère personne de ce royaume_ (du roi?), et n’avoit
     pas voulu être nommé dans l’édition qu’il supposoit devoir
     être faite de son livre. Il semble qu’il étoit mort lorsque le
     libraire écrivoit sa dédicace, et je crois cet ouvrage composé au
     XVIe siècle. Il est curieux et rare, et n’a pas
     été connu de Legrand d’Aussy.

Trésor des chartes, 90, 131.

     Ces mots signifient: Registre 90 du Trésor des Chartes, pièce 131.

Trésor de Vénerie.

     Poëme écrit en 1394 par messire Hardouin de Fontaines, chevalier,
     seigneur de Fontaines-Guérin en Anjou. Je compte donner
     incessamment une édition avec notes très-détaillées de cet ouvrage
     intéressant pour l’histoire de la fin du XIVe
     siècle, et aussi pour la province d’Anjou.

     Plusieurs feuilles sont déjà imprimées.

Variétés historiques.

     Variétés historiques, physiques et littéraires, ou recherches d’un
     savant, etc. Paris, Nyon, 1752. 6 parties en 3 tomes in-12.

     Recueil de dissertations déjà imprimées dans des journaux du
     temps, et qui ne sont pas toutes du même auteur, comme le titre
     précédent pourroit le faire croire, mais bien de Lebeuf, Boucher
     d’Argis et autres.

Venette (le carme Jean de), continuateur de Nangis.

     M. Géraud, dans l’édition qu’il a donnée, pour la Société de
     l’Histoire de France, des _Chroniques de G. de Nangis et ses
     continuateurs jusqu’en 1368_, Paris, 1843-5, 2 vol. in-8º, me
     semble avoir bien prouvé que le carme Jean de Venette étoit
     l’auteur de la dernière continuation de Nangis.

Viandier.

     Je cite sous ce nom les articles 4 et 5 de la troisième
     distinction, excepté quand je parle du _Viandier de Taillevent_;
     dans ce cas, c’est l’ouvrage de Guillaume Tirel. Voy. _Taillevent_
     dans cette liste, et l’Introduction, p. XXXII.



CORRECTIONS ET ADDITIONS.


Tome I, page 3, ligne 1, au lieu de _au tel_, lisez _autel_ (pareil).

Page 4, note, au lieu de _dix-huit_, lisez _dix-sept_.

Page 71, note sur les jeux.

     Suivant l’auteur d’un article fort intéressant et bien fait,
     inséré dans le _Magasin pittoresque_ de février 1847, p. 67, sur
     un volume très-rare (intitulé: _les trente-six Tableaux contenant
     tous les jeux qui se peurent jamais inventer..._ Paris, Nicolas
     Prévost, 1589, in-4º oblong, aujourd’hui en ma possession), le jeu
     de _pince-mérille_ étoit analogue à celui de _Je te pince sans
     rire_. On pinçoit le bras en disant: _Mérille_ ou _Morille_. La
     partie de l’estampe du volume original qui me paroît représenter
     le jeu de _pince-mérille_, est ainsi composée: trois jeunes filles
     sont assises: un garçon les regarde, et penché vers elles, a la
     main gauche sur leurs genoux ou au moins tout près. Sa main droite
     est étendue comme pour repousser ou éloigner quelqu’un. Il tourne
     le dos à un cinquième joueur placé à distance, qui, le poing
     gauche sur la hanche et la main droite en avant, montre un ou
     plusieurs doigts, comme pour indiquer un nombre aux jeunes filles.

Tome I, page 76, _Item_ l’en dit aussi que les roynes.... jamais ne
baiseront hommes.

     Cependant la noblesse, qui s’est en général toujours rapprochée
     le plus possible des mœurs de la cour, avoit des principes tout
     différens. En 1395, Jeanne de Champflory, femme de Pierre de
     Couveignon, écuyer, plaidant contre son mari, dont elle étoit
     séparée de fait, disoit qu’il étoit devenu jaloux d’elle, _pour
     ce que, par manière des nobles, elle baisoit ses parens_ (_Plaid.
     civiles_, X, 500 et 604, vº). Henri Estienne cite encore, dans son
     _Apologie pour Hérodote_ (1735, I, 81), un passage des sermons
     de Menot, relatif au même usage: «Si madamoiselle, dit-il, est
     en l’église, et arrive quelque gentillastre, il faut (_pour
     entretenir les coustumes de noblesse_), encore que ce soit à
     l’heure qu’on est en la plus grande dévotion, qu’elle se lève
     parmi tout le peuple, et qu’elle le baise bec à bec. _Ad omnes
     diabolos talis modus faciendi!_» Cette mode ne fut cependant pas
     toujours universelle. Sauval raconte (II, 465), qu’une dame de
     Blois, faisant hommage d’un fief, refusa de baiser son suzerain
     à la bouche, comme c’étoit la coutume entre le seigneur et le
     vassal. Il en résulta un procès que le suzerain perdit, et il fut
     décidé que l’hommage étoit valable.

Tome I, page 131, ligne 1, au lieu de _serait_, lisez _seroit_.

Page 137, note sur Gilles Labat.

     Gilles Labat est dit procureur _général_ au parlement dans les
     lettres de rémission qu’il obtint en 1383: j’ai remarqué, t. II,
     p. 104, qu’il ne pouvoit avoir eu cette qualité et qu’il n’étoit
     très-probablement alors que procureur au parlement, comme il
     l’étoit encore en 1385 (et en 1397). Je crois pouvoir expliquer
     maintenant comment Gilles Labat, qui n’étoit évidemment que
     _procureur_ au parlement, est qualifié de procureur _général_
     dans un acte émané de la chancellerie, et qu’il est difficile
     de supposer fautif. Autrefois le mot _procureur_ signifioit
     simplement _fondé de pouvoirs_, et on trouve à chaque instant
     des gens de toutes qualités comparoissant, signant, etc., comme
     _procureurs_ de leurs amis. La qualité de _général_ ajouté au
     mot procureur signifioit, dans certains cas, que le mandataire
     étoit chargé de toutes les affaires du mandant; mais elle
     pouvoit signifier aussi, quand elle s’appliquoit à un procureur
     au parlement ou au Châtelet, qu’il étoit par état et non par
     occasion procureur ou mandataire _en général_. Cette assertion me
     paroît justifiée par le passage suivant d’une plaidoirie de 1394,
     qui s’applique, il est vrai, aux procureurs au Châtelet, mais
     qui permet de supposer que les procureurs au parlement, placés
     dans une position supérieure, pouvoient bien aussi recevoir,
     dans quelques occasions, l’épithète de _général_. Leur nombre
     étant d’ailleurs illimité, on conçoit que cette épithète leur
     ait été encore plus utile qu’aux procureurs au Châtelet (limités
     à quarante), pour se distinguer des procureurs ou mandataires
     spéciaux:

     «Toutes les cours qui ressortissent (au Châtelet) se gouvernent
     selon le stille de chastelet, et pour ce les procureurs qui sont
     _procureurs générals_ léans, qui ne font que fait de procuration
     devant le prévost, sont advocas ès cours subjetes... En 1378
     ou environ, en Chastelet n’avoit point de nombre (_limité_) de
     procureurs, et pour ce que plusieurs inconvéniens s’ensuivoient
     pour la multiplication, par le roy fu ordené qu’il n’y aroit en
     Chastelet que quarante _procureurs généraulx_. Ce fit messire
     Hugues Aubriot, et a duré quinze ans.»

     Au reste, les procureurs au Châtelet et au Parlement étoient plus
     habituellement dits _procureurs_ que procureurs généraux (voir
     ci-après remarque sur la page 116, nº 3). Le procureur général est
     ordinairement nommé le _procureur général du Roi_, et, le plus
     souvent, le _procureur du Roi_.

Page 140, note sur le bailli de Tournay, au lieu de _Il est assez
difficile_, etc., lisez:

     Il me semble que le bailli de Tournay, dont parle ici l’auteur du
     _Ménagier_, doit être messire Tristan du Bos, personnage assez
     important au XIVe siècle, et premier bailli
     de Tournay. Il avoit d’abord été bailli de Lille, mais il fut
     rappelé lors du mariage du duc de Bourgogne, et fait bailli de
     Vermandois. En 1383, il fut envoyé par le Roi à Tournay avec le
     comte de Sancerre et autres réformateurs, et nommé alors bailli
     de cette ville. Il est dit dans une plaidoierie de novembre 1385
     que «le bailli de Tournay étoit du conseil du roi et _sages homs_,
     et avoit gouverné plusieurs bailliages,» ce qui s’applique bien
     à messire Tristan du Bos, bailli de Lille, puis de Vermandois,
     et mentionné plusieurs fois (le 6 novembre 1392, etc.) comme
     assistant aux séances du Parlement, où viennent les princes et
     le grand conseil. Je crois que c’est bien lui qui figure en
     qualité de maître des requêtes dans l’ordonnance de Vernon en date
     de février 1388-9 sur l’organisation de la maison du roi. Les
     requêtes de l’hôtel suivant partout le roi, il semble difficile
     qu’il ait pu cumuler l’emploi de maître des requêtes avec celui
     de bailli de Tournay, et il y a lieu de croire qu’il fut nommé
     maître des requêtes en même temps qu’Henry Le Mazier (voy. p. 140)
     fut nommé bailli de Tournay. Il paroît au reste avoir plus marqué
     comme magistrat que comme militaire, car les habitans de Tournay,
     pour prouver qu’ils pouvoient bien se défendre sans bailli royal,
     disoient en février 1394-5 que messire Tristan ayant voulu arrêter
     un certain Louis Despiés hors de Tournay, avoit vu massacrer
     les Tournisiens qui l’accompagnoient, et avoit été obligé de
     se réfugier dans le clocher de Wertaing. Dix mille habitans de
     Tournay avoient été, en armes, le tirer de là pour l’honneur
     du roi, puis arrêter Louis Despiés, et brûler la ville qui lui
     avoit donné asile. En 1395, il étoit prévôt de l’église d’Arras
     (_Plaid. civiles_, X, 483, 515). Messire Tristan du Bos ayant été
     longtemps bailli de Tournay et étant souvent venu à Paris, avoit
     nécessairement eu occasion de se rencontrer avec l’auteur du
     _Ménagier_, magistrat comme lui, ainsi que je crois l’avoir prouvé
     dans l’introduction. Il étoit encore maître des requêtes le 12
     novembre 1400 (_Matinées_ III), et plaidoit, en mars 1400-1, pour
     la terre de Beaucamp, mouvante du seigneur de Heilly, qu’il avoit
     achetée en 1398.

Page 149, note sur le Sire d’Andresel.

     Des lettres de rémission, accordées en avril 1361 à Jean de Melun
     seigneur de la Borde le Vicomte, lettres qui se trouvent dans le
     registre LXXXIX du _Trésor des Chartes_ (pièce nº
     755) et qui m’ont été signalées par M. Grésy, font connoître la
     nature de la rémission accordée à Jean d’Andresel, et donnent en
     même temps de nouveaux détails sur sa position et sa conduite en
     1359. Il est dit dans ces lettres que Jean d’Andresel, capitaine
     général de Brie, avoit soudoyé un certain nombre de gens d’armes,
     pour résister aux Anglois et Navarrois; mais que la supériorité
     des forces ennemies, et les grands frais qu’entraînoit la réunion
     d’un corps aussi considérable l’avoient décidé à le dissoudre,
     et à renvoyer les gens d’armes dans leurs garnisons. Il avoit
     ordonné, du consentement des habitans du pays, que les gens
     d’armes seroient payés de leurs gages au moyen d’un subside levé
     par feu dans le pays de Brie, l’impôt payé par chaque localité
     étant spécialement et directement affecté au payement d’un corps
     désigné d’avance; chaque garnison devoit se tenir prête à marcher
     au premier ordre. On conçoit qu’un pareil arrangement ait donné
     lieu à plusieurs désordres, à plusieurs violences de la part des
     gens d’armes quand l’imposition ne leur étoit pas régulièrement
     payée; c’est ce qui étoit arrivé à Jean de Melun pour les
     troupes sous ses ordres, et il me paroît évident que la lettre
     de rémission accordée à Jean d’Andresel devoit avoir (comme je
     l’avois pressenti) un semblable motif.

     On trouve dans Rymer (éd. de 1830 T. III), plusieurs pièces
     intéressantes sur le séjour de Jean d’Andresel en Angleterre. Il
     promit d’abord, avec les autres otages, le 20 février 1361-2, sur
     son honneur et état de chevalerie, d’être loyal otage au roi
     d’Angleterre, de taire ses secrets, de demeurer dans une ville ou
     cité quelconque, et de n’en sortir qu’avec la permission du roi,
     sauf qu’il lui étoit permis d’en sortir le matin pour s’ébattre,
     et d’y rentrer au soleil couchant.

     Le 13 mai 1363, Jean d’Andresel, étant aux Jacobins de Londres,
     reçut licence et congé d’aller en France _pour aucunes grosses
     besognes touchant la paix_. Il promit à cette occasion de ne
     pas s’armer contre l’Angleterre pendant le séjour qu’il alloit
     faire en France, _et de remettre son corps en otage en la cité de
     Londres_ au plus tard le jour de la Toussaint. Ce fut au reste
     malgré le roi Jean qu’il obtint cette mission. Ce prince avoit
     écrit le 26 janvier au roi d’Angleterre, de Villeneuve-lès-Avignon
     où il étoit alors, qu’il avoit vu le traité fait entre
     l’Angleterre d’une part, et le duc d’Orléans, ses enfans et son
     conseil de l’autre, et qu’il le confirmoit, sauf qu’il désiroit
     voir délivrer Pierre d’Alençon, le comte Dauphin d’Auvergne
     et le sire de Coucy, au lieu du comte de Grantpré, du sire de
     Clere et du _sire d’Andresel_. Le roi d’Angleterre ayant refusé
     cet échange, le roi lui écrivoit encore, le 13 mars[104], qu’il
     confirmoit le traité malgré son refus, mais qu’il n’auroit pas cru
     _que de si petit de chose il lui dût faillir_.

     Froissart a dit que plusieurs des otages du roi Jean n’exécutèrent
     pas loyalement leurs promesses. Je ne sais si ce reproche est
     fondé pour quelques-uns, mais il ne sauroit, en tout cas,
     s’appliquer au sire d’Andresel. C’est ce que prouve la pièce
     suivante en date du 16 juin 1365, qui prononce la mise en liberté
     définitive de Jean d’Andresel dans des termes bien honorables pour
     sa loyauté:

     «Le Roy, au noble homme Johan sire d’Andresel, salutz. Par
     contemplation de nostre très-cher et très-amé frère le duc
     d’Orliens, veuilliantz faire à vous faveur, desport, et grace
     espécial, de nostre certeine science nous confessons que vous avez
     bien et loialment tenuz par devers nous hostage depuis le temps
     que vous nous estoiez baillée parmy la paix.

     «Et des ore nous vous délivrons pleinement dudit hostage, et vous
     quitons et absolvons par ces présentes lettres de toutes promesse,
     foits, seremens, obligations et convenances que fait nous avez à
     cause dudit hostage.

     «Et volons et consentons et nous pleist que vous soietz des ore en
     avant francs de vostre persone comme quites et délivres à plein
     dudit ostage.

     «Promettans par nostre foy et serement les choses dessusdites
     et chascune d’icelles tenir et garder, et noun venir encontre:
     toutes autres obligations, promesses, convenances... faites à
     nous et à nos heirs par ladite paix et quantque est compris ès
     lettres sur ceo faites demourants toutdis en leur effect, force et
     vertu; asqueles, quant as choses qui ne touchent vostre présente
     délivrance, nous ne volons que aucun préjudice se puisse faire en
     temps à venir à cause de cestes nos letres.

     «Qui furent faites et donnés à nostre chastel de Wyndesore, le
     16e jour de juyn, l’an de grâce mil trois cent soixante et
     quint, et de nostre règne le trente neofisme.» (_Rymer_, _éd.
     1830_, t. III, p. 604, 685, 694, 700 et 774.)

Tome I, page 171. Supprimez la note 1.

     Voir sur les tranchoirs les nombreux passages indiqués à la table.

Tome I, pages 173 et 174, note sur les verrières.

     Quoique le verre fût relativement d’un assez haut prix à la fin du
     XIVe siècle, il me paroît étonnant que l’auteur
     du _Ménagier_, évidemment riche, n’ait pas eu de fenêtres vitrées.
     M. Champollion a cité dans ses _d’Orléans_ (IIIe partie, p.
     13), divers documens desquels il résulte qu’un panneau de verre
     neuf coûtoit 4 sols le pied (quarré?) quand il étoit peint
     simplement (portant une devise), et 3 sols 6 deniers quand il
     étoit sans aucun ornement. En tenant compte de la dépréciation de
     l’argent, 3 sols six deniers ne peuvent pas représenter plus de 7
     francs de notre monnoie. Il semble donc que c’étoit une dépense
     abordable pour les fortunes moyennes. En 1395, Idete des Marès,
     femme en premières noces de maître Jean de Fontaines (voir T. II,
     p. 119), et, en secondes, de Jean Thomas, et fille du célèbre
     Jean des Marès décapité en 1383, louoit 20 francs par an une
     maison dans laquelle il y avoit des fenêtres vitrées (voir mon
     _Mémoire sur les Maillotins_). Comment donc l’auteur du _Ménagier_
     se contentoit-il de parchemin?

Tome I, page 174, ligne 1, Table dréciées.

     Les tables étoient donc alors seulement posées sur des tréteaux.

Tome I, page 221, note 1re, sans doute l’auteur du _Liber de amore_.

     Je n’ai cependant pas trouvé ces passages dans le _Livre d’amours
     auquel est relatée la grant amour et façon par laquelle Pamphille
     peut jouyr de Galathée, et le moyen qu’en fist la maquerelle_.
     Paris, Vérard, 1494, in-fol.--Les passages cités dans le
     _Ménagier_ doivent donc être tirés d’un des autres auteurs cités
     dans le Manuel du Libraire au mot _Pamphile_.

Tome II, page 32, vers 1, Et de ceulx qui vestent les rois.

     On lit dans Christine de Pisan, p. 93 de l’édition Poujoulat:

     «Il rencontra un de ces ribaulz _vestus d’une roiz_ qui par chemin
     souloyent aler.»

     L’auteur de la traduction qui est au bas de la page a rendu ce mot
     par _blouse_. Je ne sais sur quoi il a fondé cette interprétation.

Tome II, page 38, colonne 1, vers 22,.... en el.

     Dans ce lieu, là dedans.

Tome II, page 59, ligne 20,.... de males sanglantes fièvres.

     L’épithète de sanglant étoit fréquemment employée dans les
     invectives, sans qu’on puisse bien s’en expliquer le motif.
     C’est ainsi qu’on voit dans le récit d’une querelle de Pierre de
     Lesclat, célèbre conseiller au parlement et confident du duc de
     Berry, avec Raoul Drobille, procureur au parlement, ce dernier
     dire à Pierre: _Je ne doubte toy ne ton povoir! un sanglant é....
     en ta gorge!_ Je crois que c’est de là qu’est restée l’expression
     d’_injure sanglante_.

Tome II, page 64, ligne 12, Par engins d’aisselles.

     Ce doit être sans doute le piége connu sous le nom de
     _quatre-de-chiffre_.

Tome II, page 73, ligne 6, Ne bube ne malen.

     Peut-être faut-il lire _mal en_ (mal dedans, _malum intùs_).

Tome II, page 89, ligne 7, D’autre part, de l’eaue.

     Mettez deux points après _l’eaue_.

Tome II, page 90, ligne 21, La saison des truites commence en....

     Suppléez _mars ou mai_, suivant ce qui est dit p. 190.

Tome II, pages 94 et 97.

     Les menus VI et XII sont les mêmes, à quelques variantes près.

Tome II, page 96, menu X.

     C’est un dîner de poisson et non de chair, et ce menu est, à
     très-peu de chose près, le même que le XXIVe.

Tome II, page 99, menu XV, Brouet lardé.

     Peut-être est-ce une faute pour _bouli lardé_.

_Ib._ Cine (cygne).

     Ce pourroit être civé.

Tome II, page 100, menu XVI, Drois au persil.

     On appeloit _droits_, en fait de venaison, certains morceaux
     recherchés qu’on mettoit à part pour le seigneur ou maître
     d’équipage quand on défaisoit le cerf.

Tome II, page 103, n. 1.

     Au lieu de _gros poisson salé_, lisez: marsouin, dit encore en
     anglois _purpoise_. Voy. p. 198.

Tome II, pages 104 et 105, note sur l’abbé de Lagny.

     J’ai encore vu un abbé de Lagny assistant à l’ouverture du
     parlement le 2 janvier 1387-8.

     L’abbé nommé dans le _Ménagier_ ne peut être le second (Pierre
     II) cité dans la _Gallia christiana_. Il est parlé en effet,
     dans une plaidoierie du 18 mai 1391, du prieur de Saint-Thibaut,
     _à présent_ abbé de Lagny. Ces mots indiquent que ce prieur étoit
     devenu abbé en 1390 ou 91. L’abbé de Lagny vivant en 1379 n’étoit
     donc plus à la tête de cette abbaye en 1396.

Tome II, page 113, note sur la Pierre-au-Lait.

     La position que j’ai assignée à ce lieu est confirmée par deux
     passages des comptes de la prévôté de Paris donnés par Sauval
     (III, 279 et 348), dans lesquels cet emplacement est dit tenir à
     la ruelle Jean Lecomte (rue Trognon, comme l’a dit Jaillot,--voir
     Corrozet, 1543,--et non rue d’Avignon, comme l’a cru M. Géraud),
     et faire face à la ruelle du porche Saint-Jacques. Remarquons
     encore que cette position est encore la même que celle indiquée
     par Jaillot pour la fin du XVIIIe siècle (Voy.
     Paris sous Philippe le Bel, p. 257).

     Il est parlé à plusieurs reprises de la Pierre-au-Lait dans les
     contes d’Eutrapel. Noël du Fail, auteur de ce curieux ouvrage,
     dit que c’étoit de son temps un lieu mal hanté et habité par des
     escrocs (fº 42 de l’éd. de 1585). Il appelle aussi échevins de la
     _Pierre-au-Lait_ des gens habiles à tricher au jeu.

Tome II, page 116, hôtel de Beauvais.

     Sauval a dit, t. II, p. 109, qu’il ignoroit où étoit l’hôtel des
     évêques de Beauvais. Il paroît qu’il le découvrit depuis, car
     on lit au tome III de ses _Antiquités de Paris_, p. 260, dans
     les comptes de la prévôté de Paris que cet hôtel étoit rue du
     _Meurier_ (du franc mûrier). Cette rue étant parallèle et à peu de
     distance de celle des Billettes, il y a lieu de croire que l’hôtel
     de Beauvais avoit des portes sur chacune de ces rues.

Tome II, page 116, note 3.

     Ce Jean Duchesne est qualifié procureur général (et ailleurs
     _procureur_; voy. p. LXXVIII) au Châtelet, dans un
     arrêt du 5 février 1400-1, qui confirma une sentence du prévôt
     de Paris dont il avoit appelé. Il avoit demandé à rembourser,
     moyennant 42 florins à l’écu, 60 sous ou 3 livres de rente qu’il
     payoit annuellement à Louis Blanchet, seigneur de la Queue en Brie
     et premier secrétaire du roi, sur une maison avec dépendances
     qu’il avoit à Romainville.

Tome II, p. 118, note 3.

     Ajoutez: Le Ms. du roi, fonds latin, 4641 B, contient la
     bénédiction et le formulaire du cérémonial usités en cette
     occasion; je les donne ici, quoiqu’ils puissent se trouver dans
     d’anciens ouvrages liturgiques.

     «_Bénédictio thalami ad nuptias et als._ (aliàs?)

     «Benedic, Domine, thalamum hunc et omnes habitantes in eo, ut
     in tua voluntate permaneant, requiescant et multiplicentur in
     longitudinem dierum. Per Christum, etc.

     «_Tunc thurificet thalamum in matrimonio, postea sponsum et
     sponsam sedentes vel jacentes in lecto suo. Benedicentur dicendo_:

     «Benedic, Domine, adolescentulos istos; sicut benedixisti Thobiam
     et Sarram filiam Raguelis, ita benedicere eos digneris, Domine,
     ut in nomine tuî vivant et senescant, et multiplicentur in
     longitudinem dierum. Per Christum, etc.

     «Benedictio Dei omnipotentis, Patris et Filii et Spiritus sancti
     descendat super vos et maneat semper vobiscum. In nomine Patris,
     etc.»

Tome II, p. 119, l. 20, Maître Jean de Fontaines.

     C’est sans doute le gendre du célèbre Jean des Marès. (Voir
     ci-dessus remarque sur la page 173 du tome I.)

Tome II, p. 129, l. 10.

     Supprimez la virgule après _Nota_.

Tome II, page 134, note 1.

     _Élire_ ne peut signifier ici _écosser_, puisqu’il s’agit de vieux
     pois, mais bien _choisir_, _éplucher_.

Tome II, page 139, ligne 9, L’en connoît les fèves des marais.... et
les fèves des champs, etc.

     Je pense que les fèves des champs sont les _haricots_
     d’aujourd’hui, désignés encore quelquefois sous le nom de _fèves_.

Tome II, p. 154, note 3.

     Lisez _feuillet_ d IV vº, au lieu de _feuille_, etc.

Tome II, p. 181, l. 26, le Saupiquet.

     Il y avoit en 1401, à Melun, une prison dite _Saupiquet_, (sans
     doute par une allusion facétieuse à cette sauce) _dans laquelle on
     ne se pouvoit tourner_ (Matinées III, 68).

Tome II, page 181, note 2.

     Ajoutez: Ou jaunie par la cuisson? L’acception la plus ordinaire
     du mot tanné est celle de _couleur de tan_ (feuille morte).

Tome II, p. 202, note 3, sur le mot _auques_, au lieu de _presque_
lisez _aussi_.

Tome II, page 251, n. 5, Et des poales à Villedieu.

     Ce bourg de Normandie est encore nommé sur les cartes
     _Villèdieu-les-poëles_. Il y a à la Bibliothèque royale
     (Manuscrits) d’anciens statuts des poëliers de Villedieu.

Tome II, p. 253, n. 5, Dans une curieuse chanson....

     Voici le dernier couplet qui paroît avoir été omis par une méprise
     de l’imprimeur dans les _Chroniques de Saint-Denis_:

    L’an mil CCC IIIxx,
    La veille de la Chandeleur,
    Par les clers et maistres divins
    Fus emprisonnés à douleur.
    Je croy souvent mues couleur
    Quant ne pues aler çà ne là;
    _Envis muert qui apris ne l’a_.

     On trouve à la suite de cette pièce deux rondeaux relatifs à
     l’infortuné prévôt.

     _Rondel à responce H. Aubriot._

    Cent mil fois je vous mercy
    De vostre vraie escripture.
    Semblant me monstrez d’amer, cy:
    Cent mil, etc.
    Mais je ne puis trouver mercy,
    L’université m’est trop dure:
    Cent mil, etc.

     _Autre Rondel._

    Je croy bien que c’est par mon vice
    Que Dieu cy durement m’acule.
    Oncques-mais d’homme ne vy ce;
    Je crois bien, etc.
    Car je ressemble à l’escrevisse:
    Quand je cuide aler je recule.
    Je crois bien, etc.

Tome II, page 318, note 4, ligne 9, Suivoient en volant les chiens
pendant la quête.

     Cette remarque ne s’applique qu’au vol des champs, ou chasse de la
     perdrix, car, pour d’autres chasses, celles au héron ou au milan
     par exemple, cela se passoit différemment. On en peut voir le
     détail dans d’Arcussia.

Tome II, page 322, note 4.

     Ajoutez: Ou peut-être comme on l’a expliqué au commencement de ce
     traité.

Tome II, TABLE.

     A l’article: _Additions faites au_, etc., ajoutez: _b_, 245.--Aux
     articles AUBRIOT, _Sa maison_ et AYALA,
     ajoutez: _b_, 380.--Ajoutez: _b_, 381, aux articles BOS
     (Tristan du), _Flandres_ et FROISSART, et _b_, 382, à
     _Estampes et à Gingembre_.--Après BOILEAU, etc., ajoutez:
     BONAMY, cité, _b_, 380.


(Voir page 380 du tome II, un _supplément aux corrections_).

[Illustration]



LE MÉNAGIER DE PARIS.



PROLOGUE.


Chère seur, pour ce que vous estant en l’aage de quinze ans et
la sepmaine que vous et moy feusmes espousés, me priastes que je
espargnasse à vostre jeunesse et à vostre petit et ygnorant service
jusques à ce que vous eussiez plus veu et apris; à laquelle appresure
vous me promectiez de entendre songneusement et mectre toute vostre
cure et diligence pour ma paix et amour garder, si comme vous disiez
bien saigement par plus sage conseil, ce croy-je bien, que le vostre,
en moy priant humblement en nostre lit, comme en suis recors, que pour
l’amour de Dieu je ne vous voulsisse mie laidement corrigier devant
la gent estrange ne devant nostre gent aussy, mais vous corrigasse
chascune nuit ou de jour en jour en nostre chambre et vous ramentéusse
les descontenances ou simplesses de la journée ou journées passées et
vous chastiasse se il me plaisoit, et lors vous ne fauldriez point à
vous amender selon ma doctrine et correction et feriez tout vostre
povoir selon ma voulenté, si comme vous disiez. Si ay tenu à grant
bien et vous loe et sçay bon gré de ce que vous m’en avez dit et m’en
est depuis souventes fois souvenu. Et sachez sur ce, chère seur,
que tout quanques je sçay que vous aiez fait puis que nous fusmes
mariés jusques cy et tout quanques vous ferez en bonne intention m’a
esté et est bon et me plaist et m’a bien pleu et plaira. Car vostre
jeunesse vous excuse d’estre bien saige et vous excusera encores en
toutes choses que vous ferez en intention de faire bien et sans mon
desplaisir. Et sachiez que je ne pren pas desplaisir, mais plaisir,
en ce que vous aurez à labourer rosiers, à garder violettes, faire
chappeaulx, et aussi en vostre dancer et en vostre chanter et vueil
bien que le continuez entre nos amis et nos pareilz et n’est que bien
et onnesteté de ainsi passer l’aage de vostre adolescence féminine,
toutesvoies sans désirer ne vous offrir à repairier en festes ne dances
de trop grans seigneurs, car ce ne vous est mie convenable, ne afférant
à vostre estat, ne au mien. Et quant au service que vous dictes que
vous me feriez voulentiers plus grant que vous ne faictes se vous le
sceussiez faire et que je le vous apreigne, sachez, chère seur, qu’il
me souffist bien que vous me faciez au tel service comme vos bonnes
voisines font à leurs mariz qui sont pareilz à nous et de nostre estat
et comme vos parentes font à leurs mariz de pareil estat que nous
sommes. Si vous en conseillez privéement à elles et après leur conseil
si en faictes ou plus ou moins selon vostre vouloir. Car je ne suis
point si oultrecuidé à ce que je sens de vous et de vostre bien que
ce que vous en ferez ne me souffise assez et de tous autres services
aussi, mais que il n’y ait barat, mesprisement ou desdaing, mais de ce
vous gaittiez. Car jasoit-ce, belle seur, que je congnoisse bien que
vous soiez de greigneur lignaige que je ne suis, toutesvoies ce ne vous
garantiroit mie, car, par Dieu, les femmes de vostre lignaige sont si
bonnes que sans moy et par elles mesmes seriez-vous asprement corrigée
se elles le savoient par moi ou autrement; mais en vous ne fais-je
point de doubte; je suis tout asseuré de vostre bien. Et toutesvoies,
jasoit-ce, comme j’ay dit, que à moy ne appartiengne fors un petit de
service, si vouldroie-je bien que vous sceussiez du bien et de l’onneur
et de service à grant planté et foison et plus que à moy n’appartient,
ou pour servir autre mary se vous l’avez après moy, ou pour donner
plus grant doctrine à vos filles, amies ou autres, se il vous plaist
et en ont besoing. Et tant plus saurez, tant plus d’onneur y aurez et
plus loés en seront vos parens et moy aussi et autres entour qui vous
aurez esté nourrie. Et pour vostre onneur et amour, et non mie pour
moy servir, (car à moy ne convient mie service fors le commun, encores
sur le moins) ayant piteuse et charitable compassion de vous qui
n’avez, de long temps a, père ne mère, ne icy aucunes de vos parentes
près de vous, ne à qui de vos privées nécessités vous puissiez avoir
conseil ne recours fors à moy seul pour qui vous avez esté traicte de
vostre parenté et du païs de vostre nativité, ay pensé plusieurs fois
et intervalles se je peusse ou sceusse trouver de moy mesmes aucune
généralle introduction légière pour vous aprendre et par laquelle,
sans moy donner telle charge comme dessus est dit, par vous mesmes
vous peussiez introduire parmy vostre paine et labour. Et à la fin me
semble que se vostre affection y est telle comme vous m’avez monstré le
semblant par vos bonnes paroles, il se peut acomplir en ceste manière,
c’est assavoir que une leçon générale vous sera par moy escripte, et à
vous baillée sur trois distinctions contenans dix-neuf[105] articles
principalment.


LA PREMIÈRE DISTINCTION.

La première distinction d’icelles trois est nécessaire pour acquérir
l’amour de Dieu et la salvacion de vostre âme et aussi nécessaire pour
acquérir l’amour de vostre mary et donner à vous en ce monde la paix
que l’en doit avoir en mariaige. Et pour ce que ces deux choses, c’est
assavoir la salvacion de l’âme et la paix du mary, sont les deux choses
plus principalment nécessaires qui soient, pour ce sont-elles mises cy
premièrement. Et contient icelle première distinction neuf articles.

Le premier article parle de saluer et regracier Nostre Seigneur et sa
benoite mère à vostre esveillier et à vostre lever et de vous atourner
convenablement.

Le second article est de vous accompaigner convenablement, aler à
l’église, eslire place, vous saigement contenir, oïr messe et vous
confesser.

Le tiers article est que vous amez Dieu et sa benoite mère et
continuellement les servez et vous mectez et tenez en leur grâce.

Le quart article est que vous gardez continence et vivez chastement à
l’exemple Susanne, Lucresse et autres.

Le quint article que vous soiez amoureuse de vostre mary (soit moy ou
autre) à l’exemple de Sarre, Rébecque, Rachel.

Le sixiesme article que vous soiez à lui humble et obéissant à
l’exemple de Grisilidis, de celle qui ne voult rescourre son mary de
noyer, et la mère Dieu qui respondit _fiat_, etc., de Lucifer, du
puys, du bailly de Tournay, des religieux et des mariés, de madame
d’Andresel, de Chaumont, de la Romaine.

Le septiesme que vous soiez curieuse et songneuse de sa personne.

Le huitiesme que vous soiez taisant pour celer ses secrets à l’exemple
de Papire, de celle qui pont huit eufz, de celle de Venise, de celle
qui revint de Saint Jaques et de l’advocat.

Le neuviesme et derrenier article est que se vostre mary s’essoie
de foloyer ou foloye, que sans rigueur mais doulcement, saigement
et humblement vous l’en retrayez comme Mellibée et dame Jehanne la
Quintine.


LA SECONDE DISTINCTION.

La seconde distinction est nécessaire pour le prouffit du mesnage
acroistre, acquérir amis et sauver le sien; pour secourir soy et aider
contre les males fortunes de la vieillesse à venir, et contient six
articles.

Le premier article est que vous aiez soing de vostre mesnaige,
diligence et persévérance et regard au labour: mectez peine à y prendre
plaisir et je feray ainsi d’autre part afin d’advenir au chastel dont
il est parlé.

Le second article est que au moins vous prenez vostre esbatement et
vous sachiez aucun peu congnoistre en curtilliage et jardinaige, enter
en la saison et garder roses l’iver.

Le tiers article est que vous sachiez choisir varlets, portefais,
aides ou autres fortes gens pour faire les dures besongnes qui d’eure
en autre se pevent achever et aussi laboureurs, etc. Et en oultre
cousturiers, cordouaniers, boulengiers, pasticiers, etc. Et par
espécial varlets et chambrières d’ostel embesongner à grains tribler
et remuer, robes nectier, éventer et essorer, commander à vos gens de
penser des brebis, des chevaulx: garder et garir vins.

Le quart article est que vous, comme souverain maistre de vostre
hostel, sachiez ordonner disners, soupers, mès et assietes, congnoistre
le fait du bouchier, du poullaillier et savoir congnoistre les espices.

Le quint article que vous sachiez commander, ordonner, deviser et faire
faire toutes manières de potaiges, civés, saulses et toutes autres
viandes; idem pour malades.


LA TROISIÈME DISTINCTION.

La troisiesme distinction est de jeux et esbatemens aucunement plaisans
pour avoir contenance et manière de parler et tenir compaignie à gens
et contient trois articles.

Le premier article est tout de demandes d’esbatemens qui par le sort
des dez, par rocs et par roys sont avérées et respondues par estrange
manière.

Le deuxiesme article est de savoir nourrir et faire voler l’esprivier.

Le tiers article est d’aucunes autres demandes qui regardent compte et
nombre et sont subtilz à trouver ou à deviner[106].

[Illustration]



LE MÉNAGIER DE PARIS.



PREMIÈRE DISTINCTION.



ARTICLE PREMIER.


Le commencement et premier article de la première distinction parle de
adourer et du lever; lequel vostre lever doit estre entendu matin. Et
matin, en l’entendement que l’en peut prendre selon la matière dont
nous avons à traictier, est dit de matines. Car ainsi comme entre nous
gens ruraulx disons le jour depuis l’aube du jour jusques à la nuit, ou
du soleil levant jusques à soleil couchant, les clercs qui prennent
plus subtillement dient que c’est le jour artificiel; mais le jour
naturel qui tousjours a vint quatre heures se commence à mienuit et
fine à la mienuit ensuivant. Et pour ce que j’ay dit que matin est dit
de matines, je l’entens avoir dit pour ce que adonc sonnent les matines
pour faire relever les religieux pour dire matines et loenges à Dieu,
et non mie pour ce que je vueille dire que vous, belle seur, ne les
femmes qui sont mariées, vous doiez lever à celle heure. Mais je le
vueille bien avoir dit pour ce que se à ycelle heure vous oez sonner
matines vous louez adont et saluez Nostre Seigneur d’aucun salut,
prière ou oroison avant ce que vous vous rendormez; car à ce propos
sont cy après propres oroisons ou prières. Car, soit à celle heure de
matin ou au matin du jour, j’ay cy escript deux oroisons pour vous
à dire à Nostre Seigneur, et deux autres à Nostre Dame propres pour
esveiller ou lever. Et premier s’ensuit celle de mienuit par laquelle,
en ycelle disant, vous regraciez Nostre Seigneur de ce que de sa grâce
il vous a donné venir jusques à celle heure. Et direz ainsi:

    Gracias ago tibi, Domine, etc.

C’est à dire en françois: Beau sire Dieu tout puissant qui es un seul
en Trinité, qui estois, es et seras en toutes choses Dieu benoist par
les siècles, je te rens grâce de ce que tu m’as daigné trespasser
dès le commencement de ceste nuit jusques aux heures matinaulx, et
maintenant je te requiers que tu me daignes, par ta sainte miséricorde,
ce jour trespasser sans peschié, tellement que au vespre je te puisse
comme à mon Dieu et à mon Seigneur regracier, adourer et donner salut.

Item s’ensuit l’autre oroison à Nostre Seigneur en disant:

    Domine, sancte pater, etc.

C’est à dire en françois: Beau sire Dieu tout puissant et père
pardurable qui m’as donné parvenir au commencement de ceste journée par
ta saincte vertu, garde moy d’encourir en aucun péril, si que je ne
puisse décliner à aucun mortel péchié, et que par ton doulx atrempement
ma pensée soit adrécée à ta saincte justice et voulenté faire.

Item s’ensuit les deux oroisons à Nostre Dame, et premièrement:

    Sancta Maria, mater Domini, etc.

C’est à dire en françois: Marie, sainte mère de Nostre Seigneur
Jhesu-Crist, ès mains de ton benoit filz et de toy commandé-je huy et
tout temps mon âme, mon corps et mon sens. Sire, garde moy de tous
vices, de tous péchiés et de toute temptacion d’ennemy et me délivre
de tous périlz. Sire doulx Jhesu-Crist, aide moy et me donne santé
d’âme et de corps, donne moy voulenté de bien faire, en ce siècle
vivre justement et bien persévérer. Octroie moy rémission de tous mes
péchiés. Sire, sauve moy en veillant, garde moy en dormant afin que je
dorme en paix et veille en toy en la gloire de paradis.

Item s’ensuit l’autre oroison à Nostre Dame qui est toute en françois:

O très certaine espérance, dame deffenderesse de tous ceulx qui s’y
attendent! Glorieuse vierge Marie, je te prie maintenant, que en icelle
heure que mes yeulx seront si aggravés de l’obscureté de la mort que
je ne pourray veoir la clarté de ce siècle, ne me pourray mouvoir la
langue pour toy prier ne pour toy appeller et que mon chiétif cuer qui
est si foible tremblera pour la paour des ennemis d’enfer et sera si
angoisseusement esbahis que tous les membres de mon corps defondront en
sueur pour la peine de l’angoisse de la mort, lors, dame très doulce et
très piteuse, me daignes regarder en pitié et moy aidier à voir avec
toy la compaignie des anges et aussi la chevalerie de paradis, et que
les ennemis troublés et espoventés de ton secours ne puissent avoir
aucun regart, présumpcion ou souspeçon de mal à l’encontre de moy,
ne aucune espérance ou puissance de moy traire ou mettre hors de ta
compaignie. Mais, très débonnaire dame, te plaise lors à souvenir de
la prière que je te fais orendroit, et reçoy m’âme en ta benoite foy,
en ta garde et en ta deffense, et la présente à ton glorieux filz pour
estre vestue de la robe de gloire et accompaignée à la joieuse feste
des anges et de tous les sains. O dame des anges! O porte de paradis!
O dame des patriarches, des prophètes, des apostres, des martirs, des
confesseurs, des vierges et de tous les sains et sainctes! O estoille
de matin plus resplendissant que le soleil et plus blanche que la noif!
Je joing mes mains et eslieve mes yeulx et fléchis mes genoulz devant
toy! Dame très débonnaire, pour icelle joie que tu eus quant ta sainte
âme se parti de ton corps sans doubte et sans paour et fut portée
présens les anges et archanges et en chantant présentée à ton glorieux
filz et receue et hébergée en la joie pardurable, je te prie que tu
me secoures et me viengnes au devant en icelle heure qui tant fait à
doubter. Quant la mort me sera si près, dame, soies à m’âme confort
et refuge et entens curieusement à la garder, si que les ennemis très
crueux d’enfer qui tant sont horribles à veoir ne me puissent mettre
au devant les péchiés que j’ay fais, mais iceulx soient premièrement à
ta prière à moy pardonnés et effaciés par ton benoit enfant, et soit
mon âme par toy, très doulce dame, présentée à ton benoit fils et à
ta prière mise à la possession du repos pardurable et de la joie qui
jamais ne fauldra! Amen.

Ces oroisons povez-vous dire à matines, ou à vostre esveillier du
matin, ou à l’un et à l’autre, en vous levant et vestant, et après
vostre vestir, tout est bien, et que ce soit à jeun et avant toute
autre besongne. Mais pour ce que j’ay dit en vous vestant, je vueil
en cest endroit un petit parler de vestemens. Sur quoy, chère
seur, sachiez que se vous voulez ouvrer de mon conseil, vous aurez
grant regard et grant advis aux facultés et puissances de vous et
de moy selon l’estat de vos parens et des miens entour qui vous
aurez à fréquenter et repairier chascun jour. Gardez que vous soiez
honnestement vestue, sans induire nouvelles devises et sans trop ou pou
de bouban. Et avant que vous partiez de vostre chambre ou ostel aiez
paravant avisé que le colet de vostre chemise, de vostre blanchet ou
de vostre coste ou surcot[107] ne saillent l’un sur l’autre, comme il
est d’aucunes yvrongnes, foles ou non sachans qui ne tiennent compte de
leur honneur ne de l’onnesteté de leur estat ne de leurs maris, et vont
les yeulx ouvers, la teste espoventablement levée comme un lyon, leurs
cheveulx saillans hors de leurs coiffes, et les colez de leurs chemises
et cottes l’un sur l’autre et marchent hommassement et se maintiennent
laidement devant la gent sans en avoir honte. Et quant l’en leur en
parle, elles s’excusent sur diligence et humilité et dient qu’ils
sont si diligens, labourieuses et si humaines qu’elles ne tiennent
compte d’elles, mais elles mentent: elles tiennent bien si grant
compte d’elles que s’elles estoient en une compaignie d’onneur, elles
ne vouldroient mie estre moins servies que les sages leurs pareilles
en lignaige, ne avoir moins des salutacions, des inclinacions, des
réverences et du hault parler que les autres, mais plus, et si n’en
sont pas dignes quant elles ne scevent garder l’onnesteté de l’estat,
non mie seulement d’elles, mais au moins de leurs maris et de leur
lignaige à qui elles font vergongne. Gardez donc, belle seur, que vos
cheveulx, vostre coiffe, vostre cueuvrechief et vostre chapperon[108]
et le surplus de vos atours soient bien arengéement et simplement
ordenés et telement que aucuns de ceulx qui vous verront ne s’en
puissent rire ne moquer, mais doit-l’en faire de vous exemple de bon
arroy, de simplesse et de honnesteté à toutes les autres; et ce vous
doit souffire quant à ce premier article.



LE SECOND ARTICLE.


Le second article dit que à l’aler en ville ou au moustier vous
accompaigniez convenablement selon vostre estat et par espécial avec
preudes femmes et fuiez compaignie souspeçonneuse et jamais femme
souspeçonneuse ne approchiez, ne ne souffrez en vostre compaignie; et
en alant ayant la teste droite, les paupières basses et arrestées et
la veue droit devant vous quatre toises et bas à terre, sans regarder
ou espandre vostre regard à homme ne à femme qui soit à destre ou à
senestre, ne regarder hault, ne vostre regard changer en divers lieux
muablement, ne rire, ne arrester à parler à aucun sur les rues. Et
se vous estes venue à l’église, eslisez un lieu secret et solitaire
devant un bel autel ou bel ymaige, et illec prenez place et vous y
arrestez sans changer divers lieux, ne aler çà ne là[109], et aiez la
teste droite et les bolièvres tousjours mouvans en disant oroisons ou
prières. Aiez aussi continuellement vostre regart sur vostre livre ou
au visaige de l’imaige sans regarder homme ne femme, peinture ne autre
chose, et sans papelardie ou fiction, ayez le cuer au ciel et aourez
de tout vostre cuer; et en faisant ainsi oyez messe chascun jour et
vous confessez souvent; et s’ainsi le faites et persévérez, honneur
vous sourdra et tout bien vous vendra. Et ce que dit est dessus doit
souffire quant à ce commencement, car les bonnes preudes femmes entour
qui vous repairerez, les bons exemples que vous prendrez à elles tant
par leurs fais comme par leur doctrine, les bons vieulz prestres saiges
et preudomes à qui vous vous confesserez et le bon sens naturel que
Dieu vous a donné vous attraira et donra le remenant quant à ce second
article.



LE TIERS ARTICLE.


Le tiers article dit que vous devez amer Dieu et vous tenir en sa
grâce. Sur quoy je vous conseille que incontinent et toutes oeuvres
laissées, vous vous désistez de boire ou mangier à nuit ou vespre, se
très petit non, et vous ostez de toutes pensées terriennes et mondaines
et vous mettez et tenez alant et venant en un lieu secret, solitaire
et loing de gens et ne pensez à riens fors à demain bien matin oïr
vostre messe, et après ce rendre compte à vostre confesseur de tous vos
péchiés par bonne, meure et attrempée confession. Et pour ce que ces
deux choses d’oïr messe et de confession sont aucunement différans,
nous parlerons premièrement de la messe et secondement de la confession.

Et quant est de la messe, chère seur, sachiez que la messe a plusieurs
dignités en drois estas ou degrés dont il nous convient parler et vous
esclarcir. Et premièrement, après ce que le prestre est revestu et
dit son _Confiteor_ et mis en bon estat, il commence sa messe: et ce
appelle-l’en _l’Introite_ de la messe; c’est le commencement ou entrée
de la messe, ouquel endroit doit lors chascun homs et chascune femme
refraindre ses pensées endroit lui et qu’il ne pense à chose mondaine
qu’il ait oncques mais veue ne oye, car quant li homs ou la femme est
au moustier pour oïr le service divin, son cuer ne doit mie estre en
sa maison ne ès champs, ne ès autres choses mondaines et si ne doit
mie penser ès choses temporelles, mais à Dieu proprement, seulement
et nuement, et à lui prier dévotement. Après _l’Introïte_ chantée ou
dicte, l’en dit par neuf fois: _Kirie eleison, Christe eleison_, en
signifiance qu’il y a en paradis neuf paires d’anges que l’en dit
_gérarchies_, et de chascune paire ou gérarchie viennent à celle messe
une quantité et non mie toute l’ordre, mais de chascune une partie. Si
doit chascun prier à ces sains anges qu’ils prient pour lui à Nostre
Seigneur, en disant: O vous, sains anges, qui descendez de la gloire
au Sauveur, pour lui ministrer et servir en terre, priez lui qu’il nous
pardonne nos péchiés et nous envoie sa grâce.

Après, dit-on _Gloria in excelsis Deo_; lors doit-on louer doulcement
Nostre Seigneur en disant: Très doulx Dieu, glorieux et honnourés
soiez-vous, loés soiez-vous, benoit soiez-vous, adourés soiez-vous,
etc. Après dit-on les oroisons des Sains et de Nostre Dame. Si doit-on
prier à la très doulce mère Dieu et aux Sains qu’ils prient pour
nous, en disant: Très glorieuse mère Dieu qui estes moienne entre
vostre doulz fils et les pécheurs repentans, priez pour moy à vostre
enfant, et vous, benois Sains de qui on fait mémoire, aidiez moy et
priez avec la dame des anges que Dieu par sa grâce me pardoint mes
forfais et enlumine mon cuer de sa grâce. Après ce, dit-on l’_Épitre_
qui est ainsi comme donner remembrance que un messaige vient qui
apporte lettres faisans mencion que le sire de tout le monde viendra
prouchainement. Après ce chante-l’en le _grée_[110] ou l’_alléluye_
ou le _traict_ en karesme et dit-on la _séquence_: c’est démonstrance
que ce sont les ménestriers qui viennent devant et monstrent que le
Seigneur est jà sur le chemin, et qui cornent pour resjoïr les cuers de
ceulx qui attendent et ont espérance en la venue du souverain Seigneur.
Après lit-on l’_Euvangille_; c’est adonc la plus vraie et prouchaine
messaigerie: car ce sont les bannières, les pannons et l’estendart qui
monstrent certainement que adoncques le Seigneur est près, et lors
se doit chascun taire et soy tenir droit, mettre s’entente à oïr et
retenir ce que l’Euvangille dit, car ce sont les propres paroles que
Nostre Seigneur dist de sa bouche et lesquelles paroles nous enseignent
à vivre, se nous voulons estre de la mesnie à icellui souverain
Seigneur. Et pour ce doit estre chascun curieux et ententif à oïr
icelles paroles de l’Euvangille et à icelles retenir. Après fait-on
l’offrande en laquelle on doit offrir en la main du prestre aucune
chose en signifiance que l’en offre son cuer à Dieu, en disant: Sainte
Trinité, recevez mon cuer que je vous offre: si le faites riche de
vostre grâce. Et en ce disant doit-l’en bailler son offrande. Après ce,
quant le prestre se retourne de l’autel il dit que l’en prie pour lui:
si en doit-l’en diligemment prier, car il entre en nos besongnes et
fait oroisons pour nous.

Après ce, dit le prestre: _Per omnia secula seculorum_: Et puis:
_Sursum corda_. C’est à dire: levez vos cuers à Dieu. Et le clerc et
les autres respondent: _Habemus ad Dominum_: nous les avons à Nostre
Seigneur. Dont doit-l’en appareillier et avoir son oeil au prestre.
Après ce, chante-l’en la louenge des anges, c’est assavoir: _Sanctus,
sanctus, sanctus_. Dont descendent les anges pour appareillier,
avironner et garder la table sur laquelle Dieu descendra et par
son seul regard repaistra ses amis et adonc entend-l’en à veoir
sa venue et se doit-l’en appareillier ainsi comme bons amoureux
subgiez s’appareillent quant le Roy entre en sa cité, et le doit-l’en
amoureusement et en grant joie de cuer regarder et recevoir, et en le
regardant regracier sa venue et luy donner louenges et salus, et en
pensée et à basse voix lui faire ses requestes pour obtenir rémissions
et pardons des meffais passés; car il vient çà bas pour trois choses:
l’une, pour tout pardonner, se nous en sommes dignes; la deuxiesme pour
nous donner sa grâce, se nous le savons requérir; la tierce pour nous
retraire du chemin d’enfer.

Après est la _Paternostre_ qui nous enseigne que nous le devons
appeller père et lui prier qu’il nous pardonne nos meffais ainsi comme
nous pardonnons à nos malfaiteurs les leurs, et aussi lui prions qu’il
ne nous laisse point péchier ne estre temptés, mais nous délivre de
mal; _amen_. Après on dit _Agnus Dei_ par trois fois et prie-l’en à
Dieu qu’il ait mercy de nous et qu’il nous donne paix; qui peut estre
entendu paix entre le corps et l’âme, que le corps soit obéissant à
l’âme: ou paix entre nous et nos adversaires; et pour ce prent-l’en
la paix. Après chante-l’en le _post-communion_ et alors on doit dire
et déprier Nostre Seigneur qu’il ne se vueille mie retraire de nous,
ne nous laissier comme orphelins et sans père. Après dit-l’en les
derrenières oroisons et adonc se doit-on retraire et recommander à
la benoite vierge Marie et à elle requerre qu’elle vueille déprier
son benoit chier enfant qu’il vueille demourer avec nous. Et quant
tout est dit et achevé et le prestre dévestu, adonc doit-l’en icellui
Seigneur remercier de ce qu’il nous a donné sens et entendement d’avoir
oy sa benoite messe et veu son benoit sacrement qui donne remembrance
de sa benoite nativité et de sa benoite passion et de sa benoite
résurrection, et luy requérir qu’en persévérant au surplus, il nous
doint vraye et parfaicte rémission. Et adoncques, chère seur, vous
mettez toute seule, les yeux enclins à la terre, le cuer au ciel,
pensez de tout vostre cuer très ententivement et cordialment à tous
vos péchiés pour vous en deschargier et délivrer à celle heure. Mais
pour vous adviser dès maintenant comment ce sera fait adonc, je vous en
traicteray un petit selon se que j’en sçay et croy.

Chère seur, veulliez de par moy sur ce savoir que quiconques soit
homme ou femme qui vueille à droit ses péchiés confesser au sauvement
de l’âme de lui ou d’elle, il doit savoir que trois choses lui sont
nécessaires; c’est assavoir, contriction, confession et satisfacion;
et doit-il ou elle savoir que contriction requiert douleur de cuer en
grans gémissemens et repentances et convient que en grant contriction
et très humblement le pécheur requière pardon et mercy et déprie
très affectueusement nostre créateur et souverain Seigneur qu’il lui
vueille pardonner ce en quoy il l’a peu courroucier et offendre. Et
sache le pécheur que sans contriction sa prière ne vault riens, puis
qu’il ait sa pensée et son cuer ailleurs. Et, chère seur, vous en povez
prendre exemple par un à qui l’en promist donner un cheval pour dire
une _paternostre_, mais qu’il ne pensast autre part, et en disant la
_paternostre_, il se pensa se cellui qui lui donnoit le cheval lui
laisseroit la selle, et ainsi le maleureux perdit tout. Ainsi est-il
de celui qui déprie Nostre Seigneur et ne pense point à sa prière ne à
cellui qu’il déprie, et si a jà, par aventure, fait telle chose dont il
a desservi à estre pendu au gibet d’enfer et si s’endort en ce péchié
et n’en tient compte, et s’il estoit jugié en ce chétif monde par un
petit prévost à estre pendu au gibet de fust ou de pierre, ou à paier
une grosse amende qui est moins, et il cuidoit reschapper pour avoir
contriction, pour plourer et pour prier le prévost ou juge, comment
il le prieroit de bon cuer, en grans pleurs, en gémissemens et grans
contrictions de cuer sans penser autre part, et il ne peut mie plourer
ne prier du cuer le grant seigneur, son souverain et son créateur qui
des haultes fenestres de sa pourvéance où il est lassus voit toute
l’affection du cuer d’icellui pécheur! Et si scet bien le pécheur que
icellui Seigneur est si piteux et si miséricors que pour très petite
prière, mais qu’elle fust de cuer contrict et repentant, il aroit
tout pardonné; voire mesmes se la sentence estoit jà donnée contre le
pécheur, et fust ores icellui pécheur condempné à mort, or puet icellui
souverain tout rappeller et quicter, et il n’est prévost ne juge par
deçà qui pour plourer ne pour prière que le condempné sceust faire,
peust rappeller le jugement qu’il auroit fait contre lui. Or regardez
doncques, belle seur, quelle comparoison est cy! Et encores est-ce pis,
car quant un homs est condempné à mort par le souverain juge, puis
qu’il ne rappelle sa sentence, c’est à entendre que la peine de sa
mort est perpétuelle et pardurable, et quant il est condempné par un
prévost, la peine de sa mort ne dure que un moment; dont, belle seur,
n’est-il point de comparoison ne entre la puissance des juges, ne entre
la peine des jugemens. Et pour ce vault-il mieulx, belle seur, plourer
et avoir contriction et adrécier sa prière à cellui qui a puissance
souveraine et absolue que à cellui qui n’a puissance fors que ordonnée
et sur certaine forme qu’il ne peut passer. Car icellui juge souverain
est cellui qui à la fin nous examinera et jugera. Et adonc, belle seur,
quel compte lui rendrons-nous des biens de fortune et de nature qu’il
nous a bailliés en garde et nous avons tout folement despendu et mis à
nostre usaige et à nostre délit, sans en avoir riens baillié ne aumosné
à lui ne aux souffreteux honteux et paciens qui pour l’amour et ou nom
de lui nous en ont demandé? Se en ce cas il nous argue de larrecin, que
nous l’avons en ce desrobé, que respondrons-nous? Item de nostre âme
sa fille qu’il nous bailla saine et nette, sans tache et sans ordure,
laquelle nous avons empoisonnée par les buvraiges du péché mortel, se
il nous argue de murtre, en disant que nous avons tué sa fille que il
nous avoit baillié en garde, quelle deffence arons-nous? Item de nostre
cuer, nostre corps qui est le chastel dont il nous avoit baillié la
garde et nous l’avons livré à son ennemy, c’est le Déable d’enfer,
quelle excusacion arons-nous? Certes, belle seur, je ne voy mie que,
se la benoite vierge Marie sa mère ne nous sequeurt comme advocate,
que par le bon jugement d’icelui souverain juge nous ne soions pugnis
et enchaînés au gibet d’enfer pardurablement comme larrons, comme
murtriers et comme traictres, se les chaudes larmes de la contriction
de nostre cuer ne chassent l’ennemy hors de nous en nostre présente
vie; mais ce se puet ainsi légièrement faire comme l’eaue chaude chasse
le chien de la cuisine.

Après la contriction vient la confession qui a six condicions, ou
elle ne vault riens. La première condicion de confession est que
la confession soit faicte sagement: c’est à dire sagement en deux
manières, qui est à entendre que le pécheur ou pécheresse eslise
confesseur saige et preudomme. Et donc le pécheur doit avoir exemple
et regart à ce que toute créature malade convoite sa santé, et pour sa
santé recouvrer et avoir, désire plus à trouver le meilleur phisicien
que le moins bon. Et doit icellui pécheur avoir regard que, puis que
créature doit désirer la santé du corps qui est estour lourgable[111]
et trespassable, par plus forte raison doit-il curer[112] de la noble
âme qui est ordonnée à recevoir le bien perpétuel ou le mal pardurable.
Et pour ce doit eslire très bon, très saige et très excellent phisicien
pour recouvrer tantost la santé de l’âme qui est bléciée et malade,
car s’il en prent un à l’aventure qui ne lui sache donner le remède de
sa garison, il s’ensuit mort. Et vous le véez par exemple, car quant
un aveugle maine l’autre, ce n’est pas de merveille se ils chéent tous
deux en une fosse; dont doit le pécheur ou pécheresse faire pourvéance
d’un très saige et très clervoyant conseillier qui de tous ses péchiés
lui sache donner remède et conseil et qui sache discerner entre l’un
péchié et l’autre pour remède donner et que icellui confesseur ait
toute sa pensée et son entente à oyr et concevoir ce que le pécheur
lui dira, et aussi qu’il ait puissance d’absoldre. Et lors doit
icellui pécheur estre avisé et avoir pensé par avant longuement et
ententivement à tous ses péchiés, comme j’ay devant dit, pour savoir
les tous dire et compter par ordre, et par membres et par poins les
deviser à son confesseur et conseillier, et doit avoir douleur au cuer
de ce qu’il fist le péchié et grant paour de la vengence de Nostre
Seigneur, grant honte et grant repentence d’iceulx péchiés et avoir
ferme espérance et voulenté certaine de soy amender et de jamais au
péchié non retourner, mais les haïr comme venin, et avoir désir de
voulentiers recevoir pour sa garison et santé recouvrer et faire
joyeusement la pénitence que le confesseur lui vouldra enchargier.

La seconde condicion de confession est que si tost que l’en est cheu
en péchié l’en s’en doit hastivement et tost confesser. Car tu ne scez
quant Dieu te touldra la parole et la santé, et pour ce est-il bon que
on s’en confesse souvent. Les truans le preuvent assez qui de jour en
jour et de heure en heure monstrent leurs plaies aux bonnes gens pour
avoir nouvelle aumosne; les bléciés monstrent de jour en jour leurs
navreures aux mires pour avoir chascun jour hastif et nouveau remède
de garison; aussi doit le pécheur tantost monstrer et descouvrir son
péchié pour avoir nouveau remède et plus plénière miséricorde.

La tierce condicion de confession est que on se doit du tout
entièrement confesser et tout descouvrir à une fois et convient
monstrer et ouvrir au mire toute la plaie; il convient tout dire en
très grant humilité et repentence et n’en riens oublier ne laissier
derrière, et quelque gros morcel qui y soit, il convient qu’il passe
oultre le neu de la gorge. Et se l’orgueilleux cuer du pécheur ne le
veult endurer, face le signe de la croix devant sa bouche afin que
l’ennemy qui lui estoupe les conduis de la parolle s’en aille; et
adonc le pécheur se contraigne à dire l’ort péchié qui tue son âme,
car s’il atent plus, il l’oubliera par son attente, et ainsi ne s’en
confessera jamais et par ce demourra en tel péril que pour cause de ce
péchié où il sera demouré et dont il ne luy aura souvenu il ne fera
jamais bien qui ne lui soit estaint vers Dieu, s’il n’y met sa grâce.
Regardez doncques quel pardon il pourra jamais impétrer par jeûnes, par
aumosnes, ne par travail de pèlerinaiges qu’il face, quand il n’est
confès entièrement? Regardez comment il qui n’est vray confès, comment
osera-il recevoir son créateur, et s’il ne le reçoit, comment il se
déçoit et en quel péril il se met? Par aventure il cele à celle fois
icellui péchié cuidant s’en confesser une autre fois bien brief, et
il ne regarde mie qu’il est en la puissance de Dieu de lui tollir la
parole quant il lui plaira, ou de le faire morir soudainement quant il
vouldra. Ores s’ainsi est, il sera dampné par sa négligence et au jour
du jugement il ne sara sur ce que respondre.

La quarte condicion de confession est que l’en se doit ordonnéement
confesser et dire ses péchiés par ordre et selon ce que la théologie
les met, et doivent estre mis l’un après l’autre sans trehoigner[113]
ne entreveschier[114], ne mettre le derrière devant, sans riens polir
ne farder, sans lui deffendre et sans autruy accuser. Et doit le
pécheur dire la condicion du péchié, comment il le pensa, quelle fut la
cause et le mouvement de son penser, comment depuis il a pourchacié,
fait, dit, ou fait faire, le temps, le lieu, pourquoy et comment il le
fist: se le péchié qu’il fist est selon nature ou s’il est fait contre
nature, s’il le fist sachamment ou ygnorament, et doit icellui pécheur
dire tout ce qui par icellui, les circonstances et dépendances peut
grever son âme.

La quinte condicion est que on doit confesser tous ses péchiés à une
fois, et à un confesseur et non pas à plusieurs confesseurs. L’en ne
doit pas partir ses péchiés en deux parties pour dire l’une partie à
un confesseur et l’autre partie à un autre, car la confession ainsi
malicieusement faite ne seroit pas valable, mais seriez plus grant
pécheur en tant comme vous mectriez paine de enginier vostre confesseur
qui représente la personne de Nostre Seigneur Jhesu-Crist.

La sixiesme condicion est que on se doit confesser dévotement, et
très humblement avoir les yeulx vers la terre en signe de honte et
de vergongne que l’en a de son péchié, et la pensée et le regart du
cuer au ciel, car vous devez penser que vous parlez à Dieu et devez
adrécier vostre cuer et vos parolles à lui, et à lui requérir pardon et
miséricorde. Car c’est cellui qui voit tout le parfont de la voulenté
de vostre cuer, ne le prestre n’y a fors que l’oreille.

Or avez-vous oy, chère seur, comment on se doit confesser; mais sachiez
qu’il y a cinq choses qui empeschent confession; c’est assavoir: honte
de confesser le péchié, mauvaise paour de faire grant pénitance,
espérance de longuement vivre, et despérance de ce que l’en a si grant
plaisir au péchié qu’on ne s’en puet partir ne repentir, et se pense-on
que pour riens se confesseroit-on pour tantost rencheoir; et de ce
c’est la mort.

Après la confession vient satisfacion que on doit faire selon
l’arbitrage et le conseil du sage confesseur, qui se fait en trois
manières; c’est assavoir en jeûne, en aumosne ou en oroison selon ce
que vous orrez cy après.

Je avoie ci-devant dit que à vous confesser vous estoient nécessaires
trois choses: c’est assavoir contriction, confession et satisfaction,
ores vous ay-je monstré et enseigné de mon povoir qu’est contricion,
et en après qu’est confession et comment elle se doit faire, et vous
ay un petit touchié des cinq choses qui l’empeschent moult, auxquelles
vous aurez regart et en aurez souvenance s’il vous plaist, quant temps
et lieu sera; et au derrain vous ay monstré qu’est satisfacion. Or
vous monstreray-je pour prendre vostre advis[115] en quoy vous povez
avoir péchié; et prendrons premièrement les noms et les condicions
des sept péchiés mortels qui sont telement mauvais que auques[116]
tous les péchiés qui sont s’en dépendent, et les appelle-l’en mortels
pour la mort à quoy l’âme est traicte quant l’ennemi peut le cuer
embesongnier à l’ouvraige d’iceulx. Et aussi, pour vous d’ores-en-avant
contregarder d’iceulx péchiés, vous monstreray et enseigneray les noms
et la puissance des sept vertus qui sont contraires aux sept péchiés
dessusdis et sont propres médicine et remède contre iceulx péchiés
quant le péchié est jà advenu, et si contraires à iceulx péchiés que
tantost que la vertu vient, le péchié s’enfuit du tout.

Et premièrement s’ensuivent les noms des vices desquels vous vous povez
confesser se vous y avez erré, et les noms des vertus sont après, pour
icelles vertus continuer par vous d’ores-en-avant:

  Orgueil     est le péchié, la vertu contraire est     Humilité.
  Envie       est le péchié, la vertu contraire est     Amitié.
  Ire         est le péchié, la vertu contraire est     Débonnaireté.
  Paresse     est le péchié, la vertu contraire est     Diligence.
  Avarice     est le péchié, la vertu contraire est     Largesse.
  Gloutonnie  est le péchié, la vertu contraire est     Sobriété.
  Luxure      est le péchié, la vertu contraire est     Chasteté[117].

Or avez-vous oy cydessus les noms des sept péchiés mortels et aussi des
sept vertus qui donnent remède, or orrez-vous la condicion d’iceulx
péchiés de l’un après l’autre et premièrement des sept péchiés, et à la
fin d’iceulx trouverez les vertus qui aux péchiés sont contraires et
les condicions d’icelles vertus.

Orgueil est la racine et commencement de tous autres péchiés. Le péchié
d’orgueil a cinq branches. C’est assavoir: inobédience, jactence,
ypocrisie, discorde et singularité.

Inobédience est la première branche, et par celle la personne pert
Dieu et laisse ses commandemens et en désobéissant à Dieu elle fait la
voulenté de la char, et acomplist ce que son cuer désire contre Dieu et
contre raison; et tout ce vient d’orgueil.

La seconde branche qui vient d’orgueil est jactence; c’est quant la
personne est haulsée et eslevée par orgueil ou des biens ou des maulx
qu’elle a fais ou fait ou pourroit faire. Mais bien et mal, ces deux
choses ne viennent pas de nous. Car le bien que créature fait vient
de Dieu qui est bon et de sa grâce, et le mal vient de la mauvaise
condicion de créature et de sa mauvaise nature, pour ce que elle se
trait à la condicion de l’ennemy qui est mauvais. Et certes quant
personne fait bien, pour ce qu’il vient de la bonne pourvéance de Dieu
qui est bon, il en doit avoir l’onneur et la gloire, et la personne
faisant bien en doit avoir le prouffit; et du mal nous devons haïr
l’ennemy qui nous attrait et maine à ce par orgueil.

La tierce branche qui vient d’orgueil est ypocrisie; ypocrisie est
quant la personne fait semblant par dehors qu’elle est pleine de vertus
par dedens et qu’elle fait et dit plus de biens qu’elle ne fait. Et
quant elle voit que l’en cuide qu’elle soit bonne, elle y prent grant
plaisir et vaine gloire. Vaine gloire est le denier au Déable dont il
achète toutes les belles denrées en la foire de ce monde et les denrées
sont les biens que Dieu a donné à homme et à femme, c’est assavoir
les biens de nature, les biens de fortune et les biens de grâce. Les
biens de nature viennent du corps et sont beauté, bonté, bon langaige,
bon sens pour entendre, bon engin pour retenir. Les biens de fortune
sont richesses, haultesses, honneurs et prospérités; et les biens de
grâce sont vertus et bonnes oeuvres. Tous ces biens vend l’orgueilleux
au Déable pour le faulx denier de vaine gloire. Tous ces biens abat
le vent de vaine gloire. Et dois savoir que en ces biens de grâce qui
sont vertus et bonnes oeuvres, comme dit est, est l’omme ou femme par
le Déable tempté en trois manières. L’une quant la créature s’esjoïst
des biens qu’elle fait; l’autre quant la créature aime à estre loée
de ses oeuvres, et la tierce quant la créature fait les biens en
intencion d’avoir le los et d’estre tenu pour preudomme. Et teles
personnes ypocrites ressemblent l’ort fumier lait et puant que l’en
cuevre de drap d’or et de soie pour ressembler estre plus honnoré et
mieulx prisié. Ainsi se cuevrent tels ypocrites qui mettent la bonne
couverture dehors en intencion d’acquérir amis pour avoir plus grant
bien ou plus grant office qu’ils n’ont et dont ils ne sont dignes, et
tel bien que autruy posside qui plus en est digne que eulx. Et de ce
advient souvent qu’ils désirent et pourchassent la mort de cellui qui
tient l’office à quoy ils béent et ainsi deviennent mauvais murtriers.
Quant il advient qu’ils vivent longuement en telle espérance et n’en
pevent venir à chief, ains meurent en celle folle bée[118] où ils
frisent[119] et ardent tous en tel convoiteux espoir, ils chéent tout
droit ou font de la paelle[120] ou le Déable fait les fritures d’enfer.
Ainsi leur bienfait est perdu et ne leur vault pour ce qu’ils le font
en male intencion. Hélas! faulse monnoie dont vient ceste[121] Et ceste
troisième branche d’ipocrisie vient d’orgueil.

La quarte branche qui vient d’orgueil si est discorde ou contencion.
C’est à dire quant une personne ne se veult acorder au fait et au dit
des autres personnes et si veult que ce qu’il dit ou fait soit tenu
pour ferme et vray, soit voir[122] ou mensonge, et ce que autre et plus
sage de luy dira soit de nulle value; et tout ce fait vient d’orgueil.

La quinte branche qui vient d’orgueil si est singularité; c’est à
dire quant la personne fait ou dit ce que nul autre ne saroit dire
ou faire et veult surmonter et estre singulier en dis et en fais
excellentement en tout, dont il se fait haïr et pour ce dit-l’en que
orgueilleux ne sera jà sans plait[123], et non est-il. Et tout ce vient
d’orgueil, c’est assavoir inobédience, jactence, ypocrisie, discorde,
et singularité.

Le pécheur ou pécheresse doit commencer sa confession en ceste manière:
Sire qui estes vicaire et lieutenant de Dieu, je me confesse à Dieu
le tout puissant et à la benoite vierge Marie et à tous les Sains de
paradis, et à vous, chier père, de tous mes péchiés lesquels j’ay fais
en moult de manières. Premièrement d’orgueil: j’ay esté orgueilleux ou
orgueilleuse et ay eu vaine gloire de ma beauté, de ma force, de ma
louenge, de mon excellent aournement, et de l’abilité de mes membres
et en ay donné matière et exemple de péchier à moult de hommes et de
femmes qui me regardoient si orgueilleusement et quant je véoie que on
me regardoit je considéroie la puissance que mes successeurs auroient
en leur temps, et aussi ma puissance, ma richesse, mon estat, mes amis
et mon lignaige, et comme il me sembloit que nul ne povoit à moy de
toutes ces choses que j’ay cy devant dictes[124], et par ce péchié
d’orgueil je suis cheu ou cheue ès branches[125].

La première branche d’orgueil si est inobédience; car par orgueil
j’ay désobéy à Dieu et ne luy ay pas porté honneur ne révérence comme
à mon créateur qui m’a fait ou faicte et ma donné les biens de grâce
de nature et de fortune dont j’ay méserré[126] et mal usé et les ay
mis et despendus en mauvais usaiges comme en vanités et honneurs du
monde, sans lui recongnoistre ou mercier, ne pour luy aux povres riens
donner, ains les ay eu en desdaing et en despit et pour ce qu’ils me
sembloient tous deffigurés et tous puans je ne les laissoie aprouchier
de moy, ains me tournoie de l’autre part, afin que je ne les véisse.
Je n’ay pas porté honneur ne révérence à mes amis qui sont de mon sang
et de ma char, espécialment à mes père et mère et les prédécesseurs
dont je suis venu, à mes frères et seurs naturels, à mon mary et autres
bienfaicteurs et souverains, ne à mes autres frères et seurs d’Ève
et d’Adam, car je n’ay nul autre prisié fors moy tant seulement. Et
quant on m’a voulu monstrer mon bien et corrigier de mon mal quant je
l’ay eu fait, je ne l’ay voulu souffrir, ains ay eu en indignacion et
en despit ceulx qui m’ont ce monstré et leur ay esté pire après et
plus fel que devant, et leur en ay mis sus blasme et vilenie grande en
derrière d’eulx; j’ay sur eulx parlé vilainement, et tout ce m’est venu
d’orgueil et de sa branche de inobédience.

Par jactence, qui est la seconde branche d’orgueil, j’ay diligemment
escouté le maldire d’autruy et si l’ay creu et voulentiers raconté
ou plus vilain entendement[127]. Et aucune fois, pour vengence ou
pour mal, ay-je dit sur autruy ce dont je ne sçavoie riens. Je me
suis eslevé ou eslevée et vanté de mes maulx que j’avoie fais et dis
et y prenoie grant gloire. Et se on disoit aucune chose de moy qui
appartenist à sens, à bon los, ou beauté et on le deist en ma présence
et à mon ouie et que ce ne fust à moy, je ne me excusoie pas, qu’il ne
feust en moy, ains me taisoie pour moy accorder et m’y délictoie et
prenoie grant plaisance. Je me suis eslevé ou eslevée et ay eu orgueil
des grans despens que j’ay aucune fois fais et des grans oultraiges et
superfluités, comme de viandes grandes et oultrageuses, comme à donner
grans mengiers et belles chambres, assembler grans compaignies, donner
joyaulx aux dames et aux seigneurs et à leurs officiers ou ménestriers
pour estre alosé[128] d’eulx et pour dire de moy que je fusse noble et
vaillant et large; certes de povres créatures ne me chaloit-il[129]
rien. Certes, Sire, j’ay affermé aucunes choses estre vrayes de quoy je
n’estoie mie certain et ce faisoie-je pour plaire aux gens présens qui
devant moy estoient et en parloient et tout ce ay-je fait par jactence.

Par ypocrisie, je me suis faint le saint home ou sainte femme et
monstré grant semblant de l’estre et mis grant peine de en acquérir le
nom devant les gens, et toutesvoies ne me suis-je point tenu de péchier
et d’en faire assez quant j’ay veu que je l’ay peu faire couvertement
et en repostaille[130], et certes aussy ay-je fait du bien aux povres
et des pénitences devant les gens plus pour en avoir leur nom[131] et
leur louenge que pour la grâce de Dieu. Et aussi par plusieurs fois
monstroie-je par dehors d’estre en voulenté de tel bien faire dont mon
cuer n’avoit voulenté, et ce faisoie-je pour avoir le nom du peuple,
jasoit-ce que je sceusse bien que c’estoit fait au desplaisir de mon
créateur. Et aussi me suis-je offert à moult de gens de faire telle
chose pour eulx dont je n’avoie nul talent ne nul corage, et oultre je
tenoie[132] de moy mesmes moult de biens qui n’y estoient mie, et se
aucun peu en y avoit, il ne me souvenoit ne me vouloit souvenir qu’il
venist de Dieu, si comme j’ay dit devant, ne à Dieu n’en savoie-je nul
gré; et tout ce faisoie-je par ypocrisie avec grant orgueil.

J’ay esté ferme en discorde et en contencion, qui est la quarte branche
d’orgueil. Car se je commençasse à soustenir aucune chose ou le fait
d’aucune personne, pour soustenir son bien ou pour destruire un autre,
où je me mectoie en grant peine de la défendre ou confondre, feust
droit ou tort, j’ay en injuriant autruy raconté aucune fois aucunes
choses mensongières et les ay affermées estre vraies pour faire à
aucunes gens leur gré et leur faire plaisir; j’ay par despit esmeu
aucunes fois aucunes personnes à ire, à courroux et à discorde dont
moult de maulx venoient aucunes fois depuis; et d’autres ay-je fait
jurer, parjurer et fait mentir, et par les discordes que j’ay mues et
les mensongières paroles que j’ay dictes estre vraies et affermées et
fait jurer et affermer, j’en ay plusieurs personnes moult scandalisées
et courroucées par ma désordonnance. Quant je me suis aucune fois
confessé, en ma confession je me suis excusé et mectoie mon excusation
premièrement, et après coulouroie en ma faveur la cause de mon péchié,
ou je mectoie ma deffaulte sur une autre personne et disoie qu’elle
avoit fait la faulte de laquelle j’estoie le plus coulpable, ne je
ne m’encusoie pas, ains disoie: _tel me le fist faire et je ne m’en
donnoie garde_, et en celle manière disoie-je pour moy excuser de mes
péchiés lesquels me sembloient trop griefs, et oultre je laissoie
et taisoie les grans et orribles péchiés, et encores des petis et
des légiers que je disoie ne disoie-je mie les circonstances qui
estoient appartenans à iceulx péchiés, si comme les personnes, le
temps et le lieu, etc. J’ay longuement demouré en mon péchié et par
longue demeure je suis cheue ès autres mortels péchiés. A l’un de mes
confesseurs[133], et à l’autre qui par aventure me plaisoit mieulx, je
disoie les autres plus grans péchiés en intencion d’estre de luy moins
corrigié et avoir maindre pénitence pour la familiarité que j’avoie
avec luy ou qu’il povoit avoir en moy. J’ay désiré vaine gloire en
quérant les honneurs et estre pareil aux plus grans ès vestemens, ès
autres choses aussi, et ay eu gloire d’estre des haultes personnes
honnoré, d’avoir leur grâce, estre haultement saluée et que honneur et
grant révérence me fust portée pour ma beauté, pour ma richesse, pour
ma noblesse, pour mon lignaige, pour estre joliement acesmée[134], pour
moult bien chanter, dancer et doulcement rire, jouer et parler. J’ay
voulu et souffert estre la plus honnorée partout: j’ai esté preste
à oïr divers instrumens et mélodies, enchantemens, as parties[135]
et autres plusieurs jeux qui sont gouliardois[136], désordonnés et
lesquels n’estoient pas de Dieu ne de raison, car je rioie et me tenoie
moult orgueilleusement et en grant esbatement. J’ay voulu avoir et
user de vengence et avoir punicion de ceulx que j’ay seulement pensé
qu’ils m’avoient voulu mal ou mal fait et en ay voulu avoir haultement
et estroitement mon désir acompli, feust tort ou droit, sans les
espargner, ne avoir d’eulx aucune mercy, et ce, chier père, ay-je fait
par mon orgueil et m’en repens; si vous en requier pardon et pénitence.

Après s’ensuit le péchié d’envie, lequel descent d’orgueil. En envie
a cinq branches. C’est assavoir: haine, machinacion, murmuracion,
détraction et estre lié[137] du mal d’autruy et courroucié du bien
d’autruy. Envie est née du péchié d’orgueil, car quant une personne
est orgueilleuse elle ne veult avoir nul pareil semblable à lui, ains
a envie se aucun autre est le plus hault ou aussi hault que lui en
aucune chose, ou en aucuns biens, ou grâces, ou en sciences, ou qu’elle
vaille mieulx que lui, et pour ce elle l’a en grant haine et la het et
s’efforce tousjours de impétrer[138] la louenge et le bien d’autruy
par sa parole et par son blasme: et c’est la première branche d’envie.

La seconde branche d’envie si est machinacion: c’est à dire quant une
personne porte mauvaises paroles d’aucunes personnes par envie et
recorde mal de l’une personne à l’autre par mauvaises acoustumances en
apetissant le bien d’autruy et en accroissant le mal.

La tierce branche est murmuracion: c’est à dire que le cuer murmure de
ce que plus grant maistre de lui lui commande, ou que on ne lui dit ou
de ce que on ne lui fait pas ainsi comme aux autres, ou elle n’en ose
parler.

La quarte branche d’envie si est détraction: c’est à dire quant une
personne dit mal et parle en derrière et dit ce qu’il scet de lui et ce
qu’il ne scet pas, et qu’il contreuve et pense comment il pourra dire
chose par quoy il pourra nuire et grever celluy de qui il parle, et
quant il oit mal dire de cellui, il aide à son povoir de le accroistre
et exaulcer, et de ce parle moult griefment quant il voit son point,
pour ce qu’il scet qu’il ne le peut en nulle manière plus dommagier et
scet qu’il ne lui peut restituer sa bonne renommée qu’il luy oste, et
ainsi lui mesmes se met à mort.

La quinte branche si est d’avoir joie du mal d’autruy ou de son
empeschement et destruire à son povoir le bien quand il scet qu’il doit
venir à autruy, et de ce bien il est triste et dolent. Et de toutes
ces choses tu dois dire en ta confession: Sire, en toutes ces choses
que j’ay cy devant nommées j’ay moult grandement péchié; car, de mon
cuer je l’ay pensé, et de mon mauvais couraige je l’ay fait, et de ma
faulse bouche je l’ay dit et semé partout où j’ai peu, et se je ay bien
dit de lui ou d’un autre, je l’ay dit faintement et par faintise, et
toutesvoies m’en suis-je mocqué; voire et de ceulx de qui je deusse le
bien et l’onneur garder et le peusse bien avoir fait se je voulsisse,
je l’ay trestourné et converti à mal; et, quant je véoie qui mal en
disoit je me mectoie et aloie avec, et me consentoie au mal dire et
affermer à mon povoir du cuer, de la bouche et du corps. Et tout, chier
père, ay-je fait par mon envie et m’en repens, si vous en requier
pardon.

Après envie vient le péchié d’ire qui descent d’envie. Ou péchié d’ire
a cinq branches, c’est assavoir: haine, contencion, présumpcion,
indignacion et juracion. Haine est quant aucune personne ne puet mectre
autruy en sa subjection ou qu’elle ne puet commander et suppéditer
cellui qu’elle vouldroit bien comme plus grant de lui et en vouldroit
avoir la seignourie et la subjection, elle en est dolente et courroucée
et en a le cuer enflé. C’est la première branche d’ire. La seconde
branche d’ire si est quant en parlant la personne a le cuer enflé à
mal faire et dire et quant elle parle laidement et désordonnéement
par ire contre aucun autre. La tierce branche de ire si est quant
par parler meslées et batailles viennent et dissencions, et lors
la personne doit penser se aucuns de son costé ou d’autre ont esté
grevés de chevance ou de corps par ses paroles; car en ce cas seroit
la personne cause de tout le mal qui seroit advenu. La quarte branche
de ire si est quant par ton ire tu as esmeu Dieu par jurer. La quinte
branche de ire si est quant par ton ire tu as esmeu et fait esmouvoir
les autres à courroux, et de ce tu te dois confesser ainsi: Sire, j’ay
le nom de Dieu parjuré par mon ire, et de Dieu mauvaisement parlé et
de la benoite vierge Marie sa doulce mère et de tous les Sains de
paradis; j’ay eu indignacion contre autres personnes, et par mon ire
leur ay véé[139] ma parole; monseigneur mon père et madame ma mère ay
par mon ire courrouciés et despiteusement à eulx parlé et par ire les
ay mal regardés et désiré la fin de leurs jours; aux povres ay moult
despiteusement parlé et par mon ire les ay appellé truans. Sire, j’ay
par mon ire esmeu plusieurs à jurer moult vilainement et de moult
vilains sermens; mes serviteurs et moult d’autres ay-je fait esmouvoir
à courroux et les ay esmeus à mal faire. Et ay moult de fois pensé à
moy vengier de ceulx que je hayoie et voulentiers les meisse à mal
quant je les avoie à contrecuer se je peusse. Grant pièce et long temps
ay-je esté en haine, dont je me repens, et pour ce, chier père, je vous
en requier pardon et pénitence.

Après si est le péchié de paresse qui est le quart péchié mortel duquel
si naist et descent oysiveté qui est lait blasme et laide tache en
personne qui vueille estre bonne. Car il est dit en l’Euvangille que au
jour du jugement toute personne oyseuse aura à rendre compte du temps
qu’elle aura perdu par son oysiveté. Or est grant merveille quelle
défense les oyseux auront, quant devant Dieu ils seront accusés. En un
autre lieu en L’Euvangille il est dit que la vie du corps oyseux est
ennemi mortel à l’âme et monseigneur saint Jérosme dit ceste auctorité:
fay toujours aucune chose afin que l’ennemy ne te treuve oyseux; car il
est coustumier de ceulx qui sont oyseux mectre en ses euvres et en ses
besongnes. Et monseigneur saint Augustin dit ou livre de l’Euvre des
moines que nulle personne puissant de labourer ne doit estre oyseux.
Ce seroit trop longue chose de réciter les dis de tous les saiges
hommes qui blasment oysiveté et paresse.

Le péchié de paresse a six branches. La première branche si est
négligence, la seconde rancune, la tierce charnalité, la quarte vanité
en cuer, la quinte branche désespéracion, la sixiesme est présumpcion.

Négligence c’est quand l’en aime et craint si peu Dieu et en souvient
si peu que parce que on n’en tient ainsi comme nul compte, l’en ne fait
nul bien pour lui ne pour son amour, et de ce faire est-l’en paresseux
et négligent et l’en n’est mie paresseux de quérir son plaisir et ses
aises. Certes c’est grant péchié que d’estre paresseux de bien faire.
Car il est trouvé en l’Escripture que se une personne n’avoit onques
péchié, ne jamais ne péchast, et elle ne feist aucun bien mais laissast
ainsi passer le temps, elle pourroit aller en enfer; et ceste première
branche de négligence naist de paresse.

La seconde branche si est quant une personne a rancune en son cuer
contre un autre, et pour la mauvaise voulenté qu’elle a à luy,
s’applique à vengence et en ce s’endort et crout[140], et en délaisse à
faire ses pénitences, ses aumosnes et autres biens. Car tousjours ceste
personne rancuneuse pense à grever celluy qu’elle het, et de jour et
de nuit y met toute sa pensée; ainsi délaisse à faire le bien qu’elle
doit, et c’est la seconde branche qui est en paresse.

La tierce branche de paresse si est charnalité. Charnalité si est quant
l’en quiert le désir de la char, comme dormir en bons lits, reposer
longuement, gésir grandes matinées, et au matin quant l’en est bien
aise en son lit et l’en oit sonner la messe, l’en n’en tient compte et
se tourne-l’en de l’autre costé pour rendormir, et telles gens lâches
et vaines ont plus chier perdre quatre messes que une sueur ou un
somme; et c’est la tierce branche de paresse.

La quarte branche de paresse si est vanité: c’est à dire quant une
personne scet bien qu’elle est en péchié et elle est de si vain cuer
qu’elle ne se peut ou ne vuelt ou ne daigne retourner à Dieu par
confession et par dévocion, ains pense et promet tousjours à lui-mesme
de amender sa vie de jour en autre, et si ne se corrige point, ains est
paresseux et négligent de soi retourner et ainsi ne lui chault de faire
aucun bien et les commandemens de Dieu, si comme bonne personne le doit
faire et garder; et c’est la quarte branche de paresse.

La quinte branche si est désespéracion; c’est une manière de péchié que
Dieu het moult et quiconques est pris en ce péchié il est dampné si
comme Judas qui en désespérance se pendit, car il cuidoit tant avoir
fourfait envers Dieu que jamais ne peust impétrer de lui miséricorde,
et quiconques meurt en ce péchié et n’a point d’espérance de la
miséricorde de Dieu il pèche contre le Saint Esperit et contre la bonté
de Dieu; et pour ce en nulle manière on ne doit cheoir en ce péchié
de désespérance ne y demourer. Car se tu chiez et fais un très grand
péchié comme d’ardre maisons et ardre les biens de saincte église par
force qui est sacrilége, tu fais pis que tous les sept péchiés mortels,
mais encores dis-je que la miséricorde de Dieu est plus grande à
pardonner. Toutesvoies, se tu te veulx confesser et faire pénitence et
à Dieu retourner, voire se tu avoies fait plus de maulx que langue ne
pourroit dire, ne cuidier, ne cuer penser, si trouveroies-tu en lui
miséricorde; et c’est la quinte branche de paresse.

La sixiesme branche si est présumpcion: c’est quant une personne est
si oultrecuidiée et si orgueilleuse qu’elle croit que pour péchié
qu’elle eust fait, ne pourroit faire, elle ne pourroit estre dampnée;
et telles gens sont d’opinion telle qu’ils dient que Dieu ne les a
pas fais pour estre dampnés. Et ils doivent savoir que Dieu ne seroit
pas juste s’il donnoit paradis aussi bien à ceulx qui ne l’aroient
point desservi que à ceulx qui l’aroient desservi. Ce ne seroit pas
justement jugié que autant en emportast l’un que l’autre, car s’il
estoit ainsi, l’en ne feroit jamais bien, puisque autel guerdon auroit
cellui qui ne serviroit point Nostre Seigneur, comme cellui qui le
serviroit. Certes ceulx qui ainsi le croient pechent contre la bonne
justice de Dieu, contre sa bénignité et sa doulceur. Car combien qu’il
soit plain de miséricorde, si comme j’ay dit devant, si est-il juste
justicier, et chacun si est fait pour servir icelluy créateur et pour
faire sa voulenté, et ainsi peut-l’en avoir et desservir le royaume de
paradis et autrement non, car qui de son service faire est négligent et
paresseux, il peche. Et pour ce, tu qui es paresseux te dois confesser
des branches de paresse et dire ainsi. Sire, j’ay aussi erré en toutes
les branches de paresse; par ma négligence ou service de Dieu ay esté
lent, paresseux et négligent en la foy et curieusement pensé de l’aise
de ma charongne, et ce que j’ay ouy de l’Escripture je ne l’ay pas
retenu ne mis à oeuvre par ma paresse. Après, je n’ay pas rendu grâce
à Dieu, si comme je deusse, des biens espirituels et temporels qu’il
ma donnés et envoiés, et oultre je n’ay pas servi Dieu si comme je
deusse, selon les grâces et les vertus qu’il m’a données. Je n’ay pas
dit ne fait les biens que je peusse avoir dit ou fait et ay esté lent
et paresseux ou service de Nostre Seigneur et ay servi et ay esté
curieux ou service mondain, et aussi j’ay plus servi à moi et à ma char
et y ay mis plus grant entente que ou service de mon doulx créateur.
J’ay esté moult oyseux longuement, dont moult de maulx et mauvaises
pensées et cogitacions me sont venues.

Après tu dois dire en toi confessant que quant on chantoit la messe,
ou aucune heure, ou quant tu estoies en dévocion, ou en disant tes
heures, tu estoies en vaine cogitacion et mauvaises pensées lesquelles
ne te povoient proufiter, ains te nuisoient à ton sauvement. Et pour
ce tu dois dire ainsi: Sire, et quand je apercevoie ces choses, je
ne retournoie pas à Dieu ne me rapaisoie à lui si comme je deusse.
Et oultre, Sire, quant l’en disoit et faisoit le service de Dieu je
jengloie et disoie paroles oyseuses et de telles qui n’appartenoient
pas de parler à l’église. Sire, j’ay dormi en l’église quant les autres
prioient Dieu. Sire, aucune fois je ne me suis pas confessé quant ma
conscience me remordoit et ramentevoit mon mal, et mesmement quant
j’avois lieu et espace et temps convenable je ne me disposoie pas à
ce, ains disoie en mon couraige, par ma paresse, tu le feras bien
une autre fois ou une autre sepmaine, ou une autre journée, et par
telles attentes et négligences je oublioie moult de péchiés; après
par négligence et par paresse ay-je oublié à faire mes pénitences
enjointes. Je n’ay pas monstré bon exemple à mes gens. Car par ma
très déshonneste conversacion à qui ils prenoient garde pour ce que
j’estoie leur souverain, je les mectoie en cause de péchier. Sire, et
quand j’ay ouy mes gens jurer vilainement, je ne les ay pas reprins ne
corrigiés, ains les ay escoutés et l’ay laissié passer par ma paresse.
Après, Sire, quant je venoie à confesse je ne m’estoie point par avant
advisée de mes péchiés que je devoie dire, ne n’y avoie point pensé;
ains quant je me départoie de ma confession je me trouvoie plus plaine
de péchiés que devant et de plus grans, et n’avoie point de diligence
de retourner à mon confesseur, ains passoie ainsi le temps; et tout ce
me faisoit paresse en quoy j’ay demouré et m’y suis tenu dont je me
repens; et pour ce, chier père, je vous en requier pardon et pénitence.

Après le péchié de paresse est avarice. Avarice est soi estroitement
tenir, escharcement despendre, avec volenté désordonnée et ardeur de
acquérir les biens de ce monde à tort ou à droit, ne peut chaloir
comment, et toutesvoies la raison de la personne scet bien se l’en fait
ou bien ou mal. Certes avarice a moult d’escoliers, comme exécuteurs de
testamens qui enrichissent et retiennent les biens des mors qui telle
amour leur monstrèrent à leur fin qu’ils les esleurent comme les plus
espéciaulx pour avoir la cure du remède de leur salut, et après leur
mort ils mordent en leur char comme tirans et s’engraissent de leur
sang et de leur substance: tels gens sont escoliers d’avarice. Aussi
en sont mauvais seigneurs qui par grosses amendes tolent la substance
de leurs povres subjets; hosteliers et marchans qui vendent leurs
choses oultre le juste pris et ont faulx pois et faulses mesures; faulx
plaideurs qui par plait et par barat font dégaster aux gens simples le
leur et les tourmentent ès cours des grans seigneurs tellement et si
longuement qu’ils ont d’eulx leur désir comment qu’il soit. Avarice,
comme dit est, est née de paresse; quant une personne est paresseuse et
négligente de faire ou ouvrer ce qui est de nécessité pour son corps
soustenir et ce qui lui est proufitable et par icelle paresse il laisse
et pert à acquérir sa substance, pour refournir sa faculté[141] lui
vient convoitise de rapine et voulenté de retenir l’autruy injustement
et sans raison. Se tu es riche et puissant et tu as assez et largement
et te doubtes que ton avoir ne te doie faillir et pour ce tu ne donnes
quant il est temps et nécessité aux povres, ou quant tu ne rens ce que
tu as de l’autruy, soit par emprunt ou autrement, mauvaisement acquis,
tu peches en avarice.

Avarice a sept branches: la première si est larrecin, la seconde
rapine, la tierce fraude, la quarte décepcion, la quinte usure, la
sixiesme hazart et la septiesme simonie.

Larrecin est quant une personne injustement et de nuit prent aucune
chose sans le sceu et contre la voulenté de cellui à qui la chose est;
et c’est la première branche d’avarice.

La seconde branche d’avarice si est rapine; c’est quant une personne
ravit aucune chose de l’autruy, et quant il l’a, il ne la veult rendre
ou envoier à cellui à qui elle doit estre, ains par avarice le retient
et recelle pour ce qu’elle lui plaist, et s’il l’oït demander par
aventure, si ne la veult-il enseignier, ains la recelle et la muce que
nul ne la puisse trouver.

La tierce branche d’avarice si est fraude: c’est quant une personne,
par décepcion, par barat ou frauduleusement en l’achat ou vente d’une
chose dit mensonges à la personne de qui elle veult acheter ou vendre,
en lui faisant faulx entendre et que la chose vaille mieulx ou plus
qu’elle ne fait.

La quarte branche d’avarice si est décepcion: c’est à dire quant une
personne monstre par dehors à aucun chose de belle apparence et le mal
n’appert mie et il le laisse et ne le dit mie et dit et afferme et jure
que la chose est bonne et vraie, et il scet bien qu’il n’est pas ainsi.
Et ainsi font faulx marchans qui mectent le plus bel et le meilleur
dessus et le pire dessoubs et jurent que tout est bon et loyal, et
ainsi est décepcion, car ils déçoivent les gens et font faulx seremens.

La quinte branche d’avarice si est usure: c’est à dire quant une
personne preste son argent pour en avoir plus grant somme pour la
longue tenue, ou vent son blé ou son vin plus chier par ce qu’il donne
long terme, et ainsi de toutes autres marchandises desquelles je me
passe quant à présent, car c’est moult longue chose que de usure et
moult mauvaise.

La sixiesme branche d’avarice si est le hazart: si est quant on joue
aux dés pour gaigner l’argent d’autruy et y a moult de barat, de
convoitise, d’avarice et de décepcion, si comme faulsement compter et
d’argent prester pour gaigner, comme prester douze deniers pour treize;
et en tels jeux sont fais moult de seremens et de mauvais comme de
jurer Dieu et Nostre Dame et tous les Sains de paradis, et sont fais et
dis moult de maulx: pour ce s’en doit-l’en garder.

La septiesme branche d’avarice si est simonie: c’est à dire quant les
sacremens de sainte église sont vendus ou achetés ou les prébendes
des églises, et tels péchiés viennent de clercs et de religieux et
viennent aussi de mal païer les dismes et de pénitences mal faictes et
mal garder les commandemens de sainte église et de mal distribuer ce
qui doit estre donné pour Dieu.

Le Déable fait six commandemens à l’avaricieux: le premier, que il
garde très bien le sien; le second, qu’il ne le preste sans acquest,
ne n’en face bien devant sa mort; le tiers, qu’il mengeusse tout seul,
ne ne face courtoisie ne aumosne; le quart, qu’il restraigne sa mesnie
de boire et de mengier; le quint, qu’il ne face miectes ne relief; le
sixiesme, qu’il entende diligemment à acquérir pour ses hoirs.

De toutes ces choses de quoi ta conscience te juge tu t’en dois
confesser, et de tout ce dont tu te sens coulpable et qui regarde le
péchié d’avarice, et dire l’un après l’autre par l’ordonnance que
dessus, et à la fin, dois dire: Sire, chier père, de tout ce que je
vous ay dit que j’ay péchié ou péchié d’avarice, je m’en repens très
grandement et vous en requier pardon et pénitence.

Après le péchié d’avarice vient le péchié de gloutonnie qui est
parti en deux manières: l’une est quant l’en prent des viandes trop
habondamment, et l’autre de parler gouliardeusement et oultrageusement.
Le péchié de trop boire et de trop mengier est le plaisir au Déable.
On treuve en l’Euvangille que Dieu donna povoir au Déable d’entrer ou
ventre des pourceaulx pour leur gloutonnie et le Déable y entra et les
mena en la mer et les fist noïer; ainsi entre-il ou corps des gloutons
qui mainent vie déshonneste, et les boute en la mer d’enfer. Dieu
commande à jeuner, et la gloute dit: _Je mengeray_. Dieu commande à
aler au moustier et matin lever, et la gloute dit: _Il me fault dormir;
je fus hier yvre. Le moustier n’est pas lièvre, il me attendra bien._
Quant elle est à quelque peine levée, savez-vous quelles sont ses
heures? Ses matines sont: _Ha! de quoi burons-nous? Y a-il rien d’hier
soir?_ Après dit ses laudes ainsi: _Ha! nous beumes hier bon vin!_
Après dit ses oroisons ainsi: _La teste me deult; je ne seray mais
aise jusques j’aye beu_. Certes telle gloutonnie met femme à honte,
car elle en devient ribaude, gouliarde et larronnesse. La taverne si
est le moustier au Déable où ses disciples vont pour le servir et où
il fait ses miracles[142]; car quant les personnes y vont, ils vont
drois et bien parlans, saiges et bien atrempés et advisés, et quant ils
reviennent ils ne se pevent soustenir et ne pevent parler: ils sont
tous fols et tous enragiés et reviennent jurant, battant et desmentant
l’un l’autre.

L’autre partie du péchié de la bouche est folement parler en moult
de manières, dire paroles oyseuses, vantance, louenge, parjuremens,
contens, murmuracion, rébellion, blasmes. Tu ne auras jà dicte si
petite parole dont il ne te conviengne rendre compte devant Dieu.
Hélas! que tu en dis à prime[143] dont il ne te souvient à tierce.
Parlers oyseux sont comme les bates du molin qui ne se pevent taire;
les venteres et les pestrins ne parlent que de soy.

Ce péchié de gloutonnie qui, comme dit est, est parti en deux parties,
a cinq branches. La première branche si est quant une personne mengue
avant qu’elle ne doit, c’est à dire trop matin, ou avant qu’elle ait
dit ses heures, ou avant qu’elle ait esté au moustier et qu’elle ait oy
la parole de Dieu et ses commandemens; car créature doit avoir sens et
discrécion qu’elle ne doit pas mengier avant l’eure de tierce, se ce
n’est pour cause de maladie ou de foiblesse ou pour aucune nécessité
qui à ce le contraigne.

La seconde branche de gloutonnie si est quant une personne mengue plus
souvent qu’elle ne doit et sans nécessité. Car, si comme l’Escripture
dit: Mengier une fois le jour est vie d’ange, et mengier deux fois le
jour est vie humaine, et trois fois ou quatre ou plusieurs est vie de
beste et non pas de créature humaine.

La tierce branche de gloutonnie si est quant une personne boit et
mengue tant le jour qu’il luy en est de pis, par quoy elle est yvre et
prent une maladie dont il lui convient aler couchier au lit et est très
griefve.

La quarte branche de gloutonnie si est quant une personne mengue si
gloutement d’une viande qu’elle ne la mache point, ains l’engloutit
ainsi comme toute entière et plus tost qu’elle ne doit, si comme dit
l’Escripture de Esaü qui fut le premier né de tous ses frères qui se
hasta si de mengier que peu s’en failli qu’il ne se estrangla.

La quinte branche de gloutonnie si est quant une personne quiert viande
délicieuse tant soit chière[144], et se peut bien faire à moins et
soy restraindre pour plus aidier à un povre ou à deux ou à plusieurs.
Et c’est un péchié de quoy nous trouvons en l’Euvangille du mauvais
riche qui estoit vestu de pourpre, lequel riche mengeoit chascun jour
si largement des viandes et nul bien n’en vouloit faire au povre
ladre, et de luy trouvons qu’il fut dampné pour ce qu’il vesquit trop
délicieusement et n’en donna point pour Dieu si comme il devoit. Et
de ces choses cy devant dictes tu te dois ainsi confesser: Sire, de
toutes ces choses et de moult d’autres manifestement et souventes fois
j’ay péchié et fait moult d’autres péchier et fait par ma cause faire à
autres. J’ay maintes fois beu sans soif, par quoy mon corps en estoit
péris et pis ordonné et mal disposé, et par ce j’estoie abandonnée à
parler plus largement et plus désordonnéement et faisoie les autres
péchier qui prenoient par moy et avec moy plus largement des biens
qu’ils ne faisoient se je ne feusse; de viandes aussy ay-je mengié
sans faim et sans nécessité et maintes fois que je m’en peusse bien
passer à moins, et tant en prenoie que mon corps en estoit aucunes fois
grevé et nature en estoit en moy plus endormie, plus foible et plus
lasche à bien faire et à bien ouir, et tout ce venoit par le péchié de
gloutonnie ou quel j’ay péchié comme j’ay dit, et pour ce, chier père,
je m’en repens et vous en demande pardon et pénitence.

Après est le péchié de luxure qui est né de gloutonnie, car quant la
meschant personne a bien beu et mengié et plus qu’elle ne doit, les
membres qui sont voisins et près du ventre sont esmeus à ce péchié
et eschauffés, et puis viennent désordonnées pensées et cogitacions
mauvaises, et puis du penser vient-on au fait. Et ce péchié de luxure
si a six branches.

La première si est quant un homme pense à une femme ou la femme à
l’homme, et la personne a en celle pensée grant plaisance et s’y
délicte grandement et y demeure longuement, et par longue demeure la
char s’esmeut à délectation; non pourtant elle ne pécheroit point
pour le premier esmouvement qui vient soudainement, se la personne
contraignoit son couraige à y obvier et remédier, mais quant la
personne n’y résiste ne contrarie si tost qu’elle devroit ou pouroit,
ne elle n’a pas en voulenté ne en pensée de tourner son couraige
autre part, ne de y résister, ains s’y délicte et demeure, elle peche
mortelment.

La seconde branche de luxure si est quant la personne se consent à
faire le péchié, et si ne demeure pas en lui, et fait tout son povoir
et quiert le temps et heure et le lieu où elle le pourra faire, et lors
elle ne le puet faire ne accomplir, et non pourquant[145] il lui plaist
moult en son cuer. Combien que charnellement elle ne fait pas le fait,
Dieu dit, et l’Escripture: Ce que tu veulx faire et tu ne peus est
réputé pour fait. Et en autre lieu dit l’Escripture: La voulenté sera
réputée pour fait advenu, soit bien ou mal. Et ceste seconde branche
et aussi la première sont appellées _luxure de cuer_. Car il est deux
espèces de luxure: c’est assavoir, luxure de fait et luxure de cuer. Et
sont les devant dictes; et luxure de corps est quant le fait y est.

La tierce branche de luxure si est quant une personne n’a point de
femme espousée ou femme n’a point espousé d’homme et l’un peche avec
l’autre, comme d’avoir à faire à femme qui n’est en rien liée, ne à
homme qui n’est point lié; lors est le péchié appellé fornication.

La quarte branche de luxure si est quant une personne a femme espousée,
ou femme a homme espousé, et ils brisent leurs fois que ils doivent et
ont promis à garder l’un à l’autre et l’un et l’autre pechent, et qui
pis est, pevent faire faulx héritiers qui succéderoient; et tel péchié
est appellé avoultire.

La quinte branche de luxure si est quant homme ou femme a affaire
charnelment à sa cousine ou qu’elle soit de son lignaige, soit loing
ou près, ou à sa mère, ou à celle qui est du lignaige de sa femme, ou
la femme a affaire à celluy du lignaige de son mary; et à femme de
religion benoite ou non, ou en vigille de festes, en temps de jeûnes
ou de festes, ou le jour que on doit garder, que homme marié ne doit
pas aler à sa propre femme ne à autre, car ce seroit moult grief péchié
lequel Dieu deffent en la loy; ou quant un homme est avec sa femme ou
avec autres contre droit et autrement que honnestement, et ainsi comme
raison l’enseigne en mariaige. Car tout homme peut moult grandement et
en moult de manières péchier avec sa femme espousée. Et, pour ce, dit
Ysaac en l’Escripture que qui est désordonnéement avec sa femme, c’est
à dire pour la convoitise de la char, ou pour son seul délit, sans
espérance de engendrer lignée, ou en lieu saint, que c’est péchié de
fornication, et pour ce estrangla le Déable les sept maris de Sarra.

La sixiesme branche de luxure si est un péchié qui est contre
nature, comme soy corrumpre par sodomie, duquel péchié nous lisons
en l’Escripture que pour cellui péchié Dieu en print telle vengence
que cinq citez en Sodome et en Gomorre furent destruites et arses par
pluie de feu et de souffre puant, duquel péchié il n’est pas bon
tenir longues parolles pour l’orreur d’icellui péchié, car le Déable
mesmes qui pourchasse icellui péchié en a honte quant on l’a fait. Et
aussi quant une personne se corrompt par lui tout seul en veillant,
et scet bien que c’est contre nature, ou déshonnestement en faisant
atouchemens mauvais par quoy personne soit esmeue et en aucunes autres
manières qui ne sont honnestes à dire, fors en confession. Car chascun
scet bonnement et doit savoir que quant ils font tels péchiés, leurs
cuers et leurs pensées leur dient bien que c’est contre Dieu et contre
nature. Et pour ce, de toutes ces choses la créature pécheresse doit
ses péchiés humblement dire à son confesseur et demander pardon et
dire: J’ay péchié en ces péchiés et en grant jour de festes et en
vigilles et peut-estre ès vigilles de Nostre Dame, ès festes, ou en
karesme, ou en lieu saint comme au moustier, et doit dire une fois ou
deux ou plusieurs et ès quels il peche plus que ès autres. Et à la fin,
doit dire: Chier père, j’ay mespris et péchié comme j’ay dit ou péchié
de luxure, et vraiement je m’en repens: si vous en requier pardon et
pénitence.

       *       *       *       *       *

Cy après s’ensuivent les noms et les condicions des sept vertus par
lesquelles vertus l’en se puet garder de mortelment péchier, et
premièrement:

Humilité est contre orgueil; car ainsi comme orgueil naist de mauvais
cuer orgueilleux et despit, et fait despire, perdre et mectre à mort
le corps et l’âme, aussi humilité naist de cuer piteux et fait en ce
siècle honnourer le corps, et l’âme mectre en joie pardurable, et pour
ce est humilité comparée à la vierge Marie. Ainsi comme orgueil est
comparé à folie, en mal respondre, en forcenerie, en peu souffrir,
desloyaulté ou foiblesse de bien faire, voulenté ou pensée de mal
jugier par arrogance contre autruy et plusieurs autres mauvaises
branches que tu peus avoir oy cy dessus sur le péchié d’orgueil, ainsi
attrempance pour tout bien escouter, force de cuer de tout doulcement
souffrir, justice pour tout le plaisir de Dieu acomplir sans mal faire
à autruy, ne à ses fais, véés cy quatre pensées par quoy humilité
entre et demeure au corps d’omme et deffent que orgueil ne s’y mecte.
Premièrement, tu dois penser la vilité et l’ordure dont tu es engendré
en péchié. Secondement, comment tu fus en si grant povreté sans âme
jusques à tant que Dieu par sa grâce te resveilla. Tiercement, comment
tu fus en si grant peine nourris et comment tu mourras, ne scez
l’heure. Quartement, pense souvent quelle joye et quel bien tu auras de
bien faire et quelle peine et quel dommaige tu auras de mal faire. Car
de bien faire tu aras en ce siècle louenge et honneur, et après la mort
joie perpétuelle sans tristesse, richesse sans povreté et santé sans
langueur; pour mal faire à quoy tu mes grant peine et te couste moult à
faire, tu seras en ce siècle mesprisié, en l’autre auras tristesse et
peine périlleuse sans joie, povreté sans confort, maladie sans garison.
Pense comment tu dois d’ores à jà[146] morir, ne scez quant, ne où
l’âme ira: voy comment la nuit et le jour se gaste le temps, et garde
comment tu as ton temps oublié, dont il conviendra que de chascune
heure tu rendes compte d’ores à jà; regarde comment tu as le temps
gasté en moult de vils péchiés et de mauvais; regarde que tu n’as fait
nul bien, et se par aventure tu en as fait aucun, si l’as-tu fait en
péchié mortel et ne te prouffite ne te prouffitera néant.

Amitié est contre le péchié d’envie: car ainsi comme le péchié envenime
et art le cuer de l’envieux, si comme tu as oy dessus, ainsi la sainte
vertu d’amitié qui est le don du Saint Esperit fait le cuer humble et
doubteux; et pour ce l’appelle-on: _don de paour_. La vertu d’amitié
est une doulceur, une rousée et un triacle[147] contre envie: car ainsi
comme envieux est tousjours triste et courroucié du bien d’autruy,
ainsi le bon cuer plain d’amitié est tousjours lié des biens de son
proïsme[148] et est courroucié et a compassion de ses adversaires.
La vertu d’amitié oste toute envie de cuer et fait l’omme content de
ce qu’il a. Jamais tu n’auroies envie du bien de ton bon amy se tu
l’amoies bien. La vertu d’amitié si se monstre en sept manières ainsi
comme on congnoist l’amour des membres du corps en sept manières.
Premièrement, l’un des membres contregarde l’autre qu’il ne luy
mefface: ce commandement est escript que tu ne faces à autruy ce que
tu ne vouldroies qu’il te feist. Après, l’un membre souffre l’autre
doulcement, car se l’une des mains fait mal à l’autre, elle ne se
revenchera pas: à ce appert la grant amour et débonnaireté que les
membres du corps ont l’un vers l’autre, car ils ne se courroucent de
riens que l’un face à l’autre, ne ils ne tiennent pas ne ont envie de
riens que l’autre ait ou face; l’un secourt et aide à l’autre à son
besoin sans requerre. Tous les membres aident à leur souverain, c’est
assavoir au cuer: c’est parfaicte amitié sans envie, c’est droite
obéissance et charité. Dont tu dois avoir telle pure amitié à ton
proïsme qui est ton membre, car nous sommes tous membres de Dieu, et
il est le corps. Dieu en l’Euvangille donne aux povres le ciel, et aux
amiables et débonnaires la terre: or regarde dont où seront les envieux
et les félons, fors ou tourment d’enfer?

Débonnaireté est contre ire. La saincte vertu débonnaireté ou
attrempance veult tousjours paix, équité et justice, sans faire tort à
aucun, sans nullui courroucier, ne avoir haine à aucun, ne nullui ne
het ne desprise. Ainsi comme ire est le feu qui gaste tous les biens
de la maison du cuer félon, ainsi débonnaireté est le précieux triacle
qui met partout paix et veult équité et justice. Equité a huit degrés
moult bons à compter par quoy le preudomme paisible voit les las et
les engins du Déable qui nous voit et nous ne le véons pas et nous
espreuve griefment en plus de mille manières. Le Déable est philosophe,
il scet l’estat et la manière d’omme et sa complexion et en quel vice
il est plus enclin ou par nature ou par accoustumance, et d’icelle
partie il l’assault plus fort; le colérique de ire et de discorde,
le sanguin de joliveté et de luxure, le fleumatique de gloutonnie et
de paresse, le mélencolieux d’envie et de tristesse. Pour ce se doit
chascun défendre de ceste part où il scet que son chasteau est plus
foible, pour soy combattre contre cellui vice que il voit dont il est
plus assailli. Le débonnaire mect partout paix. Paix vaint toute malice
et toute ire. Sans paix nul ne peut avoir victoire. Saint Pol dit que
avec paix toutes autres vertus courent, mais paix court le mieulx,
car elle gaigne l’espée. Toutes vertus se combattent, mais paix a la
victoire, l’onneur et la couronne: toutes servent, mais ceste emporte
le loyer. Justice est l’armeure de paix qui toutes les vaint, comme
dit est. Jasoit-ce que le chevalier soit armé de paix et justice, si
lui convient-il repentence de cuer, vraie confession de bouche et
amende souffisant, et se l’une de ces trois choses y fault, l’armeure
est faulsée et cellui qui la porte est vaincu et desconfit, et pert le
loyer de paradis.

Prouesse qui vault autant comme diligence est une sainte vertu contre
le péchié de accide[149] et de paresse: car ainsi comme le bourgois
veille pour acquérir richesses à lui et à ses enfans, le chevalier et
le noble veille pour acquerre pris et los ou monde; chascun selon son
estat en ce siècle veille pour les choses mondaines acquerre. Hélas!
qu’il y en a peu qui veillent pour acquerre les biens espirituels!
Les bons sans vaine gloire à qui le monde ennuie et qui veillent pour
venir devant Dieu sont sages de despire le monde pour les périls et
pour les peines dont il est plain: c’est une forest plaine de lyons,
une montaigne plaine de serpens et de ours, une bataille plaine
d’ennemis traistres, une valée ténébreuse plaine de pleurs, et n’y a
riens estable; nul n’y a paix de cuer ne de conscience, se il veult
croire le monde et amer. Les bons à qui le monde ennuie tendent droit
leur cuer à Dieu où ils pensent à venir et desprisent tous les biens
du monde; mais c’est si grant chose que peu y a de ceulx qui facent
ceste entreprinse[150].... de la persévérance. De ceste vertu, dit
Jhésu-Crist, toutes les autres vertus se combatent: ceste a gaigné la
victoire; toutes labeurent: mais ceste emporte le loyer au vespre.

Miséricorde ou charité est contre avarice, car miséricorde est ainsi
comme de avoir dueil et compassion du mal, de la nécessité ou de la
povreté d’autruy, et de lui aidier, conseillier et conforter à son
povoir. Ainsi comme le Déable fait ses commandemens à l’aver[151] tels
comme tu as oy, ainsi le Saint Esperit fait à celui qui a miséricorde
ou charité en lui ses commandemens qu’il desprise les biens temporels,
qu’il en face aumosnes, qu’il en veste les nus, qu’il en donne à boire
à ceulx qui ont soif, à mengier à ceulx qui ont faim, qu’il visite les
malades. Ainsi comme l’aver est fils du Déable et lui ressemble, ainsi
le charitable ressemble à Dieu son père. Ainsi comme avarice pense de
nuit et de jour à acquester et amasser à tort et à droit, ainsi charité
et miséricorde pensent à accomplir les sept œuvres de miséricorde.
Hélas! qu’il y fait bon penser et les accomplir de fait, ou de voulenté
et compassion qui faire ne le peut de fait! Car nostre grant juge les
nous reprouchera en ses grans jours, et c’est chose qui moult nous doit
mouvoir à charité que la paour de la sentence du jour du jugement où
Dieu dira aux avers: Alez-vous-en avec le Déable vostre père! et aux
charitables: Mes fils, demourez avec moy. Hélas! quant il les partira
de sa compaignie com grant douleur[152]!

Miséricorde a sept branches: la première est donner à boire et à
mengier aux povres; la seconde est de vestir les nus; la tierce est
prester aux povres quant ils en ont besoing et leur pardonner la debte;
la quarte visiter les malades; la quinte, hébergier les povres; la
sixiesme, visiter ceux qui sont en chartre de maladie; et la septiesme
ensevelir les mors. Et toutes ces choses devez-vous faire en charité
et compassion, pour l’amour de Dieu seulement et sans vaine gloire.
Vous devez faire aumosne de vostre loyal acquest liement, hastivement,
secrètement, dévotement et humblement sans despire les povres en
pensée ne en fait. Cellui fait bien qui leur donne tost quant ils lui
demandent, mais encore fait-il mieulx qui leur donne sans demander.

Sobriété est contre gloutonnie: car ainsi comme la sainte vertu de
sobriété est droite mesure contre le péchié mortel de gloutonnie,
ainsi c’est la vertu que le don de sapience donne et plante au cuer
du glouton contre oultrage. Sobriété est un arbre moult précieux, car
il garde la vie du corps et de l’âme; car par trop boire et par trop
mengier meurt-on, et par trop mal parler deult la teste et fait-on
tuer corps et âme. Par sobriété vit le corps en ce siècle longuement
en paix, et en a l’âme la vie pardurable. Ceste vertu doit-on garder
sur toutes les autres pour les biens qu’elle fait. Premièrement,
sobriété garde raison, entendement et sens, et l’omme sans sens est
beste. Cellui qui est yvre et si rempli de vin qu’il en pert raison
et entendement il cuide boire le vin et le vin le boit. Le second est
que sobriété délivre homme glouton du servaige du ventre à qui il est
serf. Saint Pol dit que moult s’avile qui pert sa franchise pour estre
serf à un seigneur, mais plus s’avile cellui qui se fait serf à son
ventre dont il ne peut yssir que ordure. Sobriété garde l’omme en sa
seignourie, car l’esperit et le sens doivent estre seigneurs du corps
et le corps doit pourveoir à l’esperit. Le glouton par son yvresse et
gloutonnie pert le sens et l’esperit, si qu’il ne scet gouverner le
corps. Le tiers est qu’elle garde bien la porte du chastel afin que
le Déable par péchié mortel n’entre ou corps de l’homme; la bouche
est la porte par où le Déable entre ou chastel pour soy combatre aux
bonnes vertus et y entre par les faulx traistres seigneurs Gloutonnie
et Male-langue qui laissent la porte de la bouche ouverte au Déable.
Ceste vertu a la seigneurie du corps, car par sobriété on maistrie le
corps si comme le cheval par le frain. Sobriété a la première bataille
de l’ost et garde les autres vertus. Le Déable tempte l’omme par la
bouche, si comme il fist Nostre Seigneur quant il lui dist qu’il feist
de pierre pain et Adam quant il lui fist mengier le fruit. Entre les
autres créatures l’omme a la bouche plus petite selon le corps; homme
a les autres membres doubles: deux oreilles et deux narines et deux
yeulx, mais il n’a que une bouche, et ce nous monstre que l’omme doit
sobrement mengier et boire et sobrement parler. Sobriété n’est autre
chose que droite mesure qui est moyenne entre trop et peu; sur toutes
choses doit avoir l’omme mesure en son cuer, et en son sens qui est
ainsi comme l’oisel qui se justice par les yeulx de sobriété[153], il
s’envole et chiet souventesfois ès las de l’oiseleur: c’est du Déable
qui souvent chasse à prendre tel oisel.

Chasteté est contre luxure, et est sainte vertu de chasteté, c’est
assavoir la conscience toute pure de mauvais pensemens, les membres
purs de tous atouchemens. Et ainsi que les créatures plaines du vil
péchié de luxure ont la conscience plaine et trouble de mauvais
pensemens, le corps et les membres ors et vils de mauvais atouchemens
et sont à Dieu lais et obscurs comme déables, ainsi les chastes ont
le cuer et la conscience clers, nets et luisans et ont clarté et
lumière de Dieu. A chastes convient, comme tu as oy, necte conscience
avoir; à avoir necte conscience convient trois choses: la première
est voulentiers oïr parler de Dieu; la seconde lui bien et souvent
confesser; la tierce avoir remembrance de la passion Jhésu-Crist et
remembrer pour quoy il mourut, et que tu mourras, que jà n’en seras
délivre; et c’est le premier degré de chasteté. Le second degré de
chasteté est que on se garde de vilainement parler, car vilaines
paroles courroussent les bonnes meurs. Le tiers degré est de bien
garder les cinq sens corporels: les yeulx de folement regarder, les
oreilles de folement escouter, les narines de soy en souefves choses
trop délicter et odourer, les mains de folement touchier, les piez de
aler en mauvais lieux; ce sont les cinq portes et les cinq fenestres
par où le Déable vient rober la chasteté du chastel de l’âme et du
chétif corps. Le quart degré est jeuner et avoir tousjours remembrance
de la mort qui te puet soudainement happer et prendre d’ores à jà, se
tu ne t’en gardes. Le quint degré est fuir mauvaise compaignie, comme
fist Joseph qui s’enfouist quant la dame le voult faire péchier. Le
sixiesme degré est d’estre embesognié de bonnes oeuvres; car quant
le Déable treuve la personne oyseuse, il la mort voulentiers en ses
besoignes. Le septiesme degré est de vraye oroison; à oroison sont
nécessaires trois choses: bonne foy, espérance d’avoir ce que on
requiert, dévocion de cuer sans penser ailleurs. Oroison sans dévocion
est messaigier sans lettres. Dieu regarde en prière cuer humble et
dévost et n’a cure de paremens, ne de haulte manière, comme font ces
foles hardies qui vont baudement, le col estendu comme cerf en lande
et regardent de travers comme cheval desréé[154].

Et atant, chère seur, vous souffise de cette matière, car le sens
naturel que Dieu vous a donné, la voulenté que vous avez d’estre dévote
et bonne vers Dieu et l’église, les prédications et sermons que vous
orrez en vostre parroisse et ailleurs, la Bible, la Légende dorée[155],
l’Apocalipse, la Vie des Pères[156] et autres plusieurs bons livres en
françois que j’ay dont vous estes maistresse pour en prendre à vostre
plaisir, vous donra et attraira parfondément le remenant au bon plaisir
de Dieu qui à ce vous vueille conduire et entalenter[157].



LE QUART ARTICLE.


Le quart article de la première distincion dit que vous devez garder
continence et vivre chastement.

Je suis certain que si ferez-vous, je n’en suis mie en doubte, mais
pour ce que je sçay que après vous et moy ce livre cherra ès mains de
nos enfans ou autres nos amis, je y mects voulentiers tout ce que je
sçay, et dy que aussi devez-vous endoctriner vos amies et par espécial
vos filles, et leur dictes, belle seur, pour tout certain que tous
biens sont reculés en fille ou femme en laquelle virginité, continence
et chasteté défaillent; ne richesse, ne beauté, ne sens, ne hault
lignaige, ne nul autre bien ne peut jamais effacer la renommée du vice
contraire, se en femme espécialment il est une seule fois commis,
voire seulement souspeçonné, et pour ce maintes preudes femmes se sont
gardées non mie seulement du fait, mais du souspeçon, espécialment
pour acquérir le nom de virginité: pour lequel nom les saintes
escriptures de monseigneur saint Augustin et de monseigneur saint
Grégoire et moult d’autres dient et tesmoingnent que les preudes femmes
qui ont esté sont et seront, de quelque estat qu’elles soient ou aient
esté, pevent estre dictes et appellées vierges. Et monseigneur saint
Pol le conferme en l’onziesme chappitre de ses épistres qu’il fait
secondement à ceulx de Corinte où il dit ainsi: _Despondi enim vos_,
etc. Je vueil, dit-il, que vous sachiez que une femme qui est espousée
à un homme, puis qu’elle vive chastement sans penser à avoir affaire
à autre homme, peut estre dicte vierge et présentée à Notre Seigneur
Jhésu-Crist. De chascune bonne preude femme Jhésu-Crist ou treiziesme
chappitre de l’euvangille de saint Mathieu en une parabole dit ainsi:
_Simile est regnum cœlorum thesauro abscondito in agro_, etc. Le règne
du ciel, dit-il, est semblable au trésor qui est repos dedans un champ
de terre, lequel trésor quant aucun homme qui laboure en fouyant le
descuevre, il le remuce; de la grant joye qu’il en a, il s’en va et
vent tout quanque il a et achète le champ. En ce chappitre mesmes dit
Nostre Seigneur ceste parabole: Le royaulme des cieulx est semblable
à l’omme marchant qui quiert bonnes pierres précieuses, et quant il
en a trouvé une bonne et précieuse, il va et vent tout quanque il a
et l’achète. Par le trésor trouvé ou champ de terre et par la pierre
précieuse nous povons entendre chascune bonne preude femme; car en
quelque estat qu’elle soit, pucelle, mariée ou vefve, elle peut estre
comparée au trésor et à la pierre précieuse; car elle est si bonne, si
pure, si necte qu’elle plaist à Dieu et l’aime comme sainte vierge en
quelque estat qu’elle soit, mariée, vefve ou pucelle. Et pour certain,
homme en quelque estat qu’il soit, noble ou non noble, ne peut avoir
meilleur trésor que de preude femme et saige. Et ce puet-on bien savoir
et prouver qui veult regarder aux fais et aux bonnes meurs et aux
bonnes oeuvres des glorieuses dames qui furent du temps de la vieille
loy, si comme Sarre, Rébecque, Lye et Rachel qui furent moulliers aux
sains patriarches Abraham, Ysaac et Jacob qui est appelé Ysraël, qui
toutes furent chastes et vesquirent chastement et virginalement.

Item, à ce propos nous trouvons escript ou treiziesme chappitre ou
livre fait de Daniel que après la transmigracion de Babilonne, c’est
à dire après ce que Jéchonias[158] le roi de Jhérusalem et le peuple
de Ysraël furent menés en prison et chétiveté[159] en Babilonne, et
que la cité de Jhérusalem fut destruite par le roy Nabugodonosor, il
ot en Babilonne un Juif preudomme et riche lequel fut nommé Joachin,
et Joachin prist une femme fille d’un autre Juif lequel ot nom
Belchias[160], et la pucelle Susanne, laquelle estoit très belle et
crémant Dieu; car son père et sa mère qui estoient justes et bonnes
gens l’avoient moult bien aprise et endoctrinée en chasteté selon la
loy Moyse. Ce Joachin, mary de Susanne, estoit moult riche et avoit un
moult bel jardin plain d’arbres portant fruis. Là venoient communément
esbatre les Juifs pour ce que le lieu estoit plus honnourable de tous
les autres; Susanne mesmes aloit souvent esbatre en ce jardin. Or
advint que deux anciens prestres d’icelle loy furent du peuple establis
juges pour un an, lesquels juges virent Susanne très belle et tant
qu’ils furent espris et alumés de fole amour. Si parlèrent ensemble
et regardèrent comment ils la pourroient décevoir, et se accordèrent
qu’ils la guetteroient ou jardin dessusdit et parleroient à elle se ils
la trouvoient seule.

Un jour advint que après l’eure de midy ils se mussèrent en un anglet
de ce jardin: Susanne vint ou dit jardin pour soy laver, selon ce
que leur loy l’ordonnoit, et mena avecques soy deux de ses pucelles
lesquelles elle renvoya en sa maison pour lui rapporter oeille[161] et
oingnemens pour soy enoindre. Et quant les deux vieillars la virent
seule, ils coururent à elle et lui dirent: Coyement[162] seufre ce
que nous voulons faire de toy, et se tu ne le fais, nous porterons
tesmoingnage encontre toy et dirons que nous t’avons trouvée en
advoultaire. Et quant Susanne vit et sceut la mauvaistié des juges,
elle proposa en soy mesmes et dist en ceste manière: _Angustie michi
sunt undique_, etc., Dieux! dit-elle, angoisses sont à moy de toutes
pars, car se je fais ceste chose, morte suis comme à Dieu, et se je ne
le fay, je ne pourray eschapper de leurs mains que je ne soie tormentée
et lapidée; mais mieulx me vault sans meffaire cheoir en leur dangier
que faire péchié devant Dieu. Lors elle cria à haulte voix: les deux
vieillars crièrent aussi, tellement que les serviteurs de la maison y
acoururent, et les juges dirent qu’ils l’avoient trouvée en présent
meffait avec un jouvencel lequel estoit fort et viguereux; si leur
eschappa et ne sceurent ne ne peurent congnoistre qui il estoit. De ce
furent les sergens[163] merveilleusement vergongneux et esbahis, car
oncques mais ils n’avoient oy dite telle parole de leur dame, ne veu
mal en elle; toutesfois elle fut emprisonnée.

Et l’endemain que les juges furent assis en jugement, tout le peuple
devant eulx assemblé pour veoir la merveille, Susanne fut amenée en
jugement; ses parens et amis la regardoient, moult tendrement plourans.
Susanne avoit son chief couvert, de honte et de vergongne qu’elle
avoit. Les juges lui firent descouvrir son viaire[164] par grant honte
et despit. Adonc elle plourant leva ses yeulx au ciel, car elle avoit
fiance en nostre Seigneur et ou bien de son ignorance. Adonc les deux
prestres racontèrent devant le peuple comment eulx alans esbatans
dedans le jardin avoient veu Susanne entrer en icellui, avec elle deux
de ses pucelles lesquelles elle renvoya et serra l’uis après elles; et
disoient que lors estoit venu un jeune homme lequel ils avoient veu
charnellement habiter à elle, et pour ce ils estoient là courus, et
le jeune homme s’en estoit fouy par l’uis, et n’avoient peu arrester
ne prendre fors icelle Susanne qui n’avoit icellui jeune homme voulu
nommer; et de ce meffait nous deux sommes tesmoings, et pour ce meffait
nous la jugeons à mort. Susanne adonc s’escria et dist en ceste
manière: Dieu pardurable, tu es congnoissant des choses répostes[165]
et scez toutes choses ains qu’elles soient faictes, et scez bien que
contre moy ils portent faulx tesmoingnaige; souviengne-t’en et aies
mercy de moy!

Après ce on la mena à son torment, et en passant par une rue, nostre
Seigneur évertua l’esperit d’un jeune et petit enfant appelé Daniel
lequel commença à crier à haulte voix: O peuple d’Israel, ceste femme
est jugée faulcement, retournez au jugement, retournez, car les
jugemens sont faulx! Adonc le peuple s’escria et firent retourner
Susanne au lieu où le jugement avoit esté donné et amenèrent les
jugeurs et l’enfant appelé Daniel lequel dist tels mots: Séparez moy
ces jugeurs et les menez l’un çà, l’autre là. Quant ce fut fait, il
vint à l’un et lui demanda soubs quel arbre ce avoit esté fait et qu’il
avoit vu l’omme et Susanne faisans leur péchié; et icellui jugeur
respondi: soubs un chesne[166]. Après, icellui Daniel vint à l’autre
jugeur et lui demanda soubs quel arbre il avoit veu Susanne soubs le
jeune homme; et il respondi: soubs un arbre appelé _Lentiscus_[167].
Lentiscus est un arbre qui rent huille et la racine est une espice
appellée _macis_. Ainsi fut attainte leur mençonge, et fut Susanne
délivrée, comme pure et necte, sans tache de mauvais atouchemens. Et
est bien prouvé qu’elle estoit bien remplie de la vertu de chasteté
quant elle dist ceste parole aux faulx jugeurs: J’aime mieulx cheoir en
vos mains comme ès mains de mes ennemis, et mourir sans faire péchié
que faire péchié devant Dieu nostre Seigneur. O femme pleine de foy
et de grant loyaulté qui crémoit tant Dieu et le péchié de mariage
enfraindre qu’elle voulloit mieulx mourir que son corps vilainement
atoucher! Et certes il est tout certain que les Juifs et les Juifves
qui sont à présent en ce royaume ont si abbominable ce péchié, et est
telle leur loy, que se une femme estoit trouvée en adultère, elle
seroit lapidée et tourmentée de pierres jusques à la mort selon leur
loy. Mesmes les mauvais tiennent cette loy, et nous la devons bien
tenir, car c’est bonne loy[168].

Autre exemple y a, si comme met Cerxès[169] le philosophe en son livre
nommé des _Eschez_, ou chappitre _de la Royne_, et dit que la Royne
doit sur toutes choses sa chasteté garder et endoctriner à ses filles,
car, dist-il, nous lisons de moult de filles qui pour leur virginité
ou pucellaige garder ont esté roynes. Pol istoriographe des Lombars
raconte que en Ytalie avoit une duchesse qui avoit nom Raymonde, et
avoit un fils et deux filles. Advint que le roy de Hongrie appelé
Cantamus eut débat à icelle Raymonde et vint devant une sienne ville
et y mist le siége. Elle et ses enfans estoient dedens le chastel, et
si regarda une fois ses ennemis qui faisoient une escarmouche contre
les gens de sa ville qui fort se deffendoient, et entre les ennemis
vit un chevalier qui estoit forment bel. Elle fu tant embrasée de
s’amour qu’elle lui manda que secrètement et parmy son chastel elle luy
rendroit sa ville, se il la vouloit prendre à femme. Et le chevalier
dist oyl[170], et après ce, elle luy ouvri les portes du chastel, et
il et ses gens y entrèrent. Quant ils furent au chastel, ses gens
entrèrent par là en la ville et prindrent hommes et femmes et tout ce
qu’ils peurent; et les fils d’elle orent si grant honte et douleur de
sa traïson qu’ils la laissèrent et s’en alèrent, et depuis furent si
bons que l’un d’iceulx enfans qui avoit nom Grimault, c’est assavoir le
plus petit, fut duc des Bienventens[171] et depuis roy de Lombardie. Et
les filles qui ne sceurent fouir doubtèrent estre violées des Hongres;
si tuèrent pigons et les mussèrent dessoubs leurs mamelles, si que
par l’eschauffement de leurs mamelles la char des pigons puoit, et
quant les Hongres les vouldrent approuchier, si sentirent la puantise,
et s’en refroidirent et desmeurent[172] et les laissèrent tantost,
et disoient l’un à l’autre: Fy que ces Lombardes puent! Et à la fin
icelles filles s’enfouirent par mer pour garder leur virginité, et
toutesvoies, pour ce bien et leurs autres vertus, l’une fut depuis
royne de France et l’autre fut royne d’Alemaigne. Icellui chevalier
print icelle duchesse et jeut avec elle une nuit pour son serement
saulver et l’endemain la fist à tous les Hongres commune. Le jour après
lui fist ficher un pel dès parmy la nature au long du corps jusques
à la gorge, disant: Tel mary doit avoir telle lécheresse qui par sa
luxure a trahy sa cité et ses gens baillés et mis ès mains de leurs
ennemis. Et aussi ces paroles fist-il escripre en plusieurs lieux
parmy sa robe, et toute morte la fist attacher et lier aux barrières de
dehors et devant la porte de sa cité afin que chascun la veist, et la
laissa[173].

Encores met-il[174] là un autre exemple de garder son mariage et sa
chasteté, et dit que saint Augustin ou livre de la _Cité de Dieu_ dit
(et aussi l’ay-je veu en Titus Livius) que à Romme estoit une dame
moult bonne et de grant et vertueux couraige appellée Lucresse qui
estoit femme d’un Rommain appellé Collatin qui convoya et semmoni[175]
une fois à disner avec lui l’empereur Tarquin l’orguilleux et Sexte
son fils; lesquels y disnèrent et furent festiés et après disner se
esbatirent, et Sexte advisa la contenance de toutes les dames qui là
estoient; et entre toutes et pardessus toutes les autres, la manière
Lucresse lui pleut et sa beauté. Par aucune espace de temps après, les
gens d’un chastel qui estoit à quatre lieues d’illec, emprès Romme,
firent rébellion contre l’empereur qui ala mettre le siége devant,
et avec lui fut et ala Sexte son fils avec lequel estoient et de sa
compaignie furent plusieurs des jeunes hommes de Romme, entre lesquels
estoit Collatin le mary Lucresse. Long temps furent illec les Rommains
à siège, et un jour qu’il faisoit bel et seryn, estoient assemblés
après disner à boire ensemble Sexte le fils l’empereur et plusieurs
d’iceulx jeunes hommes romains entre lesquels estoit Collatin, et
prindrent complot ensemble de soupper tantost, et après alèrent
hastivement à Romme en l’hostel de chascun d’iceulx jeunes hommes
veoir la manière et contenance de chascune de leurs femmes et leur
gouvernement, par tel[176] que cellui duquel sa femme seroit trouvée
en meilleur convine[177] auroit l’honneur de logier Sexte le fils
l’empereur en son hostel. Ainsi fu accordé, et vindrent à Romme et
trouvèrent les unes devisans[178], les autres jouans au _bric_, les
autres à _qui féry?_ les autres à _pince-merille_, les autres jouans
aux _cartes_ et aux autres jeux d’esbatemens avecques leurs voisines;
les autres qui avoient souppé ensemble, disoient des chançons, des
fables, des contes, des jeux-partis; les autres estoient en la rue
avecques leurs voisines jouans au _tiers_ et au _bric_, et ainsi
semblablement de plusieurs jeux, excepté Lucresse qui dedens et ou plus
parfont de son hostel, en une grant chambre loing de la rue, avoit
ouvriers de laine, et là, toute seule, assise loingnet[179] de ses
ouvriers et à part, tenoit son livre dévotement et à basse chière[180]
disoit ses heures moult humblement; et fut trouvé que lors, ne
autresfois que son mary Collatin estoit hors, et en quelque compaignie
ou feste qu’elle feust, il n’estoit nul ne nulle qui la feist dancer
ne chanter, se ce n’estoit seulement le jour qu’elle avoit lettres de
luy ou qu’il retournast la veoir; et lors chantoit et dançoit avec les
autres, se feste y avoit. Et pour ce Collatin eust l’honneur de la
venue et loga en son hostel Sexte le fils l’empereur lequel fut servi
de tous les autres et de leurs femmes et apparentés, et l’endemain
bien matin fut des dames esveillié, vestu, et oy messe, et le veirent
monter et mettre à chemin. Et à ce voyage fut Sexte moult fort espris
de l’amour de Lucresse et tellement qu’il pensa qu’il revenroit devers
elle acompaignié d’autres gens que des amis d’elle ou de son mary.
Ainsi fut fait et vint au soir en l’hostel Lucresse laquelle le receut
moult honnourablement, et quant le temps vint d’aler couchier, l’en
ordonna le lit à Sexte comme à fils d’empereur, et ce mauvais fils
d’empereur espia où Lucresse gisoit, et après ce que tous léans furent
couchiés et endormis, Sexte vint à elle, l’une main mise à la poitrine
et l’autre à l’espée, et lui dist: Lucresse, tais toy! Je suis Sexte le
fils à l’empereur Tarquin, se tu dis mot tu es morte! Et de paour elle
s’escria, dont la commença Sexte à prier. Rien n’y vault. Et après ce,
à luy offrir et promettre dons et services. Riens n’y vault. Et puis, à
menacier qu’elle se voulsist à luy accorder ou qu’il destruiroit elle
et sa lignée. Rien n’y vault. Quant il vit que tout ce rien n’y valoit,
si lui dist ainsi: Lucresse, se tu ne fais ma voulenté, je te tueray et
si tueray aussi un de tes varlès, et puis diray que je vous aray tous
deux trouvés couchiés ensemble et pour vostre ribauldie vous ay tués.
Et celle qui doubta plus la honte du monde que la mort, si se consenti
se jouer.

Et tantost après que Sexte s’en fu alé, la dame manda par lettres son
mari qui estoit en l’ost, et aussi manda son père, ses frères et tous
ses amis et un homme qui avoit nom Brut et nepveu Collatin son mary. Et
quant ils furent venus, elle leur dist moult espouventablement: Sexte
le fils à l’empereur entra hier comme hoste en cest hostel, mais il ne
s’en est pas départi comme hoste, mais comme ennemy de toy, Collatin!
et saiches qu’il a ton lit deshonnouré. Toutesvoies se mon corps est
deshonnouré, se n’est pas le cuer, et pour tant me absols-je du péchié,
mais non pas de la peine. Adonc Collatin son mary vit qu’elle estoit
toute pâle et descoulorée et sa face blanche et toute esplourée, car
la trasse des larmes estoit apparant en son viaire des yeulx jusques
aux baulièvres, et avoit les yeulx gros et enflés, les paupières mortes
et perses[181] et dedans vermaulx par le décourement des larmes,
et regardoit et parloit effroyeusement. Si commença à la conforter
moult doulcement et à luy pardonner, et lui monstra moult de belles
raisons, que le corps n’avoit pas péchié puisque le cuer n’y avoit
donné consentement ne pris délit, et se prist à alléguer exemples et
auctorités. Tout ce ne luy pleut; elle luy rompi sa parole en disant
moult asprement: Ho! ho, nennil, nennil! c’est trop tart, tout ce ne
vault riens, car je ne suis jamais digne de vivre; et celluy qui m’a ce
fait, l’a fait à sa grant male meschéance se vous valez riens, et pour
ce que nulle ribauldie ne règne à l’exemple de Lucresse, qui vouldra
prendre exemple au péchié et au forfait, si prengne aussi exemple à
l’amende. Et tantost d’une espée qu’elle tenoit soubs sa robe se féri
parmy le corps et morut devant eulx tous.

Adonc Brut le conseiller et Collatin le mary d’icelle Lucresse et tous
ses amis plourans et dolens prindrent celle espée qui estoit sanglante,
et sur le sang jurèrent par le sang Lucresse que jamais ne fineroient
jusques à tant qu’ils auroient Tarquin et son fils destruit, et le
poursuivroient à feu et à sang, et toute sa lignée bouteroient hors,
si que jamais nul n’en vendra à dignité. Et tout ce fut tantost fait,
car ils la portèrent emmy la ville de Romme et esmeurent tellement le
peuple que chascun jura la destruction de l’empereur Tarquin et de son
fils, et à feu et à sang. Et adonc fermèrent les portes afin que nul
n’issist pour aler adviser l’empereur de leur emprise, et s’armèrent
et yssirent dehors alant vers l’ost de l’empereur comme tous forcenés.
Et quant ils approchèrent de l’empereur, et il ouy le bruit et tumulte
et vit les gens pouldrés[182], et fumées des chevaulx, avec ce que
l’en luy dit, il et son fils s’enfouirent en désers, chétifs et
desconfortés. Sur quoy le Rommant de la Rose dit ainsi:

    N’onc puis Rommains, pour ce desroy,
    Ne vouldrent faire à Romme roy.

Ainsi avez-vous deux exemples, l’un de garder honnestement son
vefvaige, ou sa virginité ou pucellaige; l’autre de garder son mariaige
ou chasteté. Et sachiez que richesse, beaulté de corps et de viaire,
lignaige et toutes les autres vertus sont péries et anichillées
en femme qui a tache ou souspeçon contre l’une d’icelles vertus.
Certes en ce cas tout est péri et effacié, tout est cheu sans jamais
relever, puis que une seule fois femme est souspeçonnée ou renommée
au contraire; et encores, supposé que la renommée soit à tort, si
ne peut jamais[183] icelle renommée estre effaciée. Or véez en quel
péril perpétuel une femme met son honneur et l’honneur du lignaige de
son mary et de ses enfans quant elle n’eschieve[184] le parler de tel
blasme, ce qui est légier à faire. Et est à noter sur ce, si comme
j’ay oy dire, que puis que les Roynes de France sont mariées, elles ne
lisent jamais seules lettres closes, se elles ne sont escriptes de la
propre main de leur mary, si comme l’en dit, et celles lisent-elles
toutes seules, et aux autres elles appellent compaignie et les font
lire par autres devant elles, et dient souvent qu’elles ne sçevent mie
bien lire autre lettre ou escripture que de leur mary; et leur vient de
bonne doctrine et de très grant bien, pour oster seulement les paroles
et le souspeçon, car du fait n’est-il point de doubte[185]. Et puisque
si haultes dames et si honnourées le font, les petites qui ont aussi
grant besoing de l’amour de leurs maris et de bonne renommée le doivent
bien faire.

Si vous conseille que les lettres amoureuses et secrètes de vostre
mary, vous recevez en grant joye et révérence, et secrètement toute
seule les lisez tout à part-vous, et toute seule lui rescripvez
de vostre main se vous savez, ou par la main d’autre bien secrète
personne; et lui rescripvez bonnes paroles amoureuses et vos joyes et
esbatemens, et nulles autres lettres ne recevez, ne ne lisez, ne ne
rescripvez à autre personne, fors par estrange main et devant chascun,
et en publique les faictes lire.

Item dit-l’en aussi que les Roynes depuis qu’elles sont mariées, jamais
elles ne baiseront homme, ne père, ne frère, ne parent, fors que le
Roy, tant comme il vivra; pour quoi elles s’en abstiennent, ne se c’est
vray, je ne sçay. Ces choses, chère seur, souffisent assez à vous
bailler pour cest article; et vous sont baillées plus pour raconte que
pour doctrine. Il ne vous convient jà endoctriner sur ce cas, car Dieu
mercy de ce péril et souspeçon estes-vous bien gardée et serez.



LE QUINT ARTICLE.


Le quint article de la première distinction dit que vous devez estre
très amoureuse et très privée de vostre mary par dessus toutes autres
créatures vivans, moiennement amoureuse et privée de vos bons et
prochains parens charnels et parens de vostre mary, très estrangement
privée de tous autres hommes, et du tout en tout estrange des
oultrecuidés et oyseux jeunes hommes et qui sont de trop grant despence
selon leur revenue, et qui, sans terre ou grans lignaiges, deviennent
danceurs; et aussi des gens de court, de trop grans seigneurs, et en
oultre de ceulx et celles qui sont renommés et renommées d’estre de vie
jolie, amoureuse ou dissolue.

A ce que j’ay dit très amoureuse de vostre mary, il est bien voir que
tout homme doit amer et chérir sa femme et que toute femme doit amer et
servir son homme, car il est son commencement et je le preuve. Car il
est trouvé ou deuxiesme chappitre du premier livre de la Bible que l’en
appelle Genesy, que quant Dieu eust créé ciel et terre, mer et air,
et toutes les choses et créatures à leur aournement et perfection, il
admena à Adam toutes les créatures qui eurent vie et il nomma chascune
ainsi qu’il luy pleut et qu’elles sont encores appellées. Mais il n’y
ot créature semblable à Adam, ne convenable pour lui faire aide et
compaignie. Et pour ce dist Dieu adonc: _Non est bonum hominem esse
solum; faciamus ei adjutorium simile ei_. Bonne chose, dist Dieu, n’est
pas que l’omme soit seul; faisons-lui aide qui lui soit semblable.
Donc meist Dieu sommeil en Adam, et adonc osta une des costes de Adam
et rempli le lieu où il la prist de chair, si comme dit Moyses ou
second chappitre de Genesy. Cellui qui fait Histoire sur Bible[186]
dit que Dieu prist de la char aussi avecques la coste, aussi dit
Josephus[187], et nostre Seigneur édifia la coste qu’il en avoit ostée
en une femme; voire, ce dist l’Historieur, il lui édifia char de la
char qu’il prist avecques la coste, et os de la coste, et quant il lui
ot donné vie, il l’admena à Adam pour ce qu’il luy meist nom. Et quant
Adam la regarda, il dit ainsi: _Hoc nunc os ex ossibus meis et caro
de carne mea: hec vocabitur virago quoniam de viro sumpta est_. Ceste
chose, dist-il, est os de mes os et char de ma char, elle sera appellée
_virago_, c’est à dire faicte d’omme. Elle ot nom ainsi premièrement,
et après ce qu’ils orent péchié, elle ot nom _Eva_ qui vault autant
que _vita_. Car toutes les créatures humaines qui puis ont eu vie
et auront, sont venues d’elle. Encores adjousta Adam et dist ainsi:
_Propter hoc relinquet homo_, etc. Pour ceste chose laissera homme son
père et sa mère et se aherdera[188] à sa moullier, et seront deux en
une chair; c’est à dire que du sang des deux, voire de l’omme et de la
femme, sera faicte une char ès enfans qui d’eulx naistront. Là fist
donc Dieu et establi premièrement mariaige, si comme dit l’Historieur,
car il dist au conjoindre: _Crescite et multiplicamini_, etc. Croissez,
dist-il, et multipliez et remplez la terre.

Je di adonc, par les raisons dictes et prises en Bible, que femme doit
moult amer son mary, quant de la coste de l’omme elle fut faicte.

Item on lit en l’onziesme chappitre de Genesy que un patriarche appellé
Abraham prist à moullier en la cité ou ville de Caldée une moult bonne
et sainte dame appellée Sarre laquelle fut depuis princesse souveraine
et première des bonnes et vaillans dames desquelles Moyses fait mention
en ses cinq livres qui sont les premiers de la Bible. On lit illec que
Sarre vesqui moult saintement et fut très loyalle et de bonne foy à
son mary Abraham, et obéissant à ses commandemens. Et lit-on illecques
que quant Abraham fut parti de Damas pour la grant famine qui estoit
en icelle terre et il deust entrer en Egipte, il dist à Sarre sa
moullier: Je sçay, dist-il, que les hommes de ceste terre sont chaulx
et luxurieux, et tu es moult belle femme; pour quoy je doubte moult,
se ils scevent que tu soies ma moullier, que ils ne me occisent pour
toy avoir; et pour ce, je te prie que tu vueilles dire que tu es ma
seur et non pas ma moullier, et je le diray aussi, par quoy je y puisse
vivre paisiblement, entre eulx et mes gens et ma mesgniée[189]. A ce
conseil et commandement obéi Sarre, non pas voulentiers, mais pour
sauver la vie à son seigneur et à sa gent, et quant les hommes et le
prince d’icelle contrée virent Sarre tant belle, ils la prindrent et
la menèrent au roy Pharaon qui en ot moult grant joye et la retint,
mais oncques, ne lors ne depuis, en quelconque heure, le roy Pharaon
ne peust venir vers elle qu’il ne la trouvast toujours plourant du
regret qu’elle avoit à son mary, et pour ce, quant le roy Pharaon la
véoit en icelluy estat, la voulenté et le désir qu’il avoit d’elle se
tresalloit et changeoit, et ainsi la laissoit. Et pour ce, peut-l’en
dire que pour sa bonté et la loiaulté que Dieu savoit en elle, laquelle
estoit triste et courrouciée de ce que on l’avoit ostée à son mary, il
la garda et défendi par telle manière que Pharaon ne pot habiter à
elle et fut moult tourmenté, et tous ceulx de sa mesgniée, pour Sarre
qu’ils avoient ostée à Abraham. L’Historieur dit sur ce chappitre que
tant que Pharaon tint Sarre, il n’ot povoir de habiter à femme, ne tous
ses hommes aussi ne povoient engendrer; et pour ce, les prestres de sa
loy sacrifièrent à leurs dieux et il leur fut respondu que c’estoit
pour Sarre la moullier à Abraham que le roy Pharaon lui avoit tolue. Et
quant le Roy le sceut, il manda Abraham qui vivoit bien paisiblement
en sa terre et lui dist: Pourquoi m’as-tu deceu et fait grant mal?
Tu disoies que Sarre estoit ta seur, et c’est ta femme! Prens-la et
l’emmaine hors de ma terre. Lors commanda-il à ses hommes qu’ils le
menassent hors de la terre d’Egipte paisiblement et sans perdre nulle
de ses choses.

On lit ou sixiesme chappitre de Genesy que quant Abraham fut party
d’Egipte, il ala demourer en la terre de Canaen de coste[190] Bétel.
Donc regarda Sarre qu’elle estoit brehaigne[191] et ne povoit avoir
enfant, dont elle estoit moult dolente; lors s’advisa qu’elle
bailleroit Agar sa chamberière qu’elle avoit admenée d’Egipte, à
Abraham son mary, pour savoir s’elle en pourroit avoir enfant, car elle
doubtoit moult qu’il ne morust sans hoir, et ce dist-elle à Abraham qui
se consenti à faire sa voulenté. Et elle lui bailla Agar sa meschine
laquelle conceut tantost un fils dont Sarre ot moult grant joye. Mais
quant Agar la meschine vit et sceut qu’elle avoit conceu de Abraham,
elle despita sa dame et se portoit grossement contre elle. Et quant
elle vit ce, Sarre dist à Abraham: Tu fais mauvaisement encontre moy,
je te baillay ma meschine pour ce que je ne puis avoir enfans de toy,
et je désiroie que je peusse avoir fils d’elle et de toy lesquels je
peusse nourrir et garder, à la fin que tu ne morusses pas sans laisser
lignée de toy: pour ce que ma meschine Agar voit qu’elle a conceu de
toy, elle m’a en despit et ne me prise rien; Dieu vueille jugier entre
moy et toy, car tu as tort qui sueuffres qu’elle me despite.

Or véons la grant bonté et la grant loyaulté de ceste bonne dame et
sainte femme Sarre. Elle amoit si très loyaulment Abraham son mary, et
bien savoit qu’il estoit si saint homme et vaillant patriarche, que
il lui sembloit que ce feust doleur et grant dommaige s’il mouroit
sans hoir et avoir fils de son sang, et si véoit bien qu’elle estoit
brehaigne et ne povoit concevoir, et pour le grant désir qu’elle avoit
d’avoir fils de son mary lesquels elle peust nourrir et garder, elle
bailla sa meschine et la fist couchier en son propre lit, et s’en voult
déporter. Quantes dames ou femmes trouveroit-on qui ainsi feissent?
Je croy qu’on en trouveroit peu, et pour ce est Sarre tenue à la
plus loyale à son mary qui fust dès Adam le premier homme jusques à
la loy qui fut donnée à Moyse. Mais Agar sa meschine à tort l’eut en
despit quant elle sceut qu’elle eust conceu de Abraham, mais on dit
communément que qui essauce[192] son serf il en fait son ennemy. Mais
Abraham le bon patriarche vit bien et sceut que Agar la meschine avoit
tort, et pour ce il dist à Sarre: Vécy Agar ta meschine, je la mets en
ta main, si en fais ta voulenté.

Lors la commença Sarre à approuchier, et la tint vile jusques à tant
qu’elle mesmes, par le commandement de l’ange, se humilia et à sa dame
cria mercy; et Sarre la garda tant qu’elle ot enfanté son fils qui
ot nom Ysmaël, dont Sarre ot grant joye et le garda et fist garder
moult bien. Après ce, nostre Seigneur visita Sarre et s’apparut aussi
à Abraham ou val de Mambré, devant son tabernacle, et lui dist qu’il
auroit un fils de Sarre sa franche moullier, et auroit nom Ysaac, et
ce fils vivroit et sa lignée il multiplieroit ainsi comme les estoiles
du ciel et la gravelle de la mer ou la pouldre de la terre. Encores
dist-il à Abraham: en ta lignée ou semence toutes gens seront beneurés.
Et quant Sarre qui estoit derrière l’uis du tabernacle oy quelle
concevroit, si commença à rire et dist à soy mesmes: je suis vieille
et ancienne, et Abraham aussi; comment pourray-je avoir enfant? Et
merveilles ne fut pas de ce quelle rit et dit ainsi, qu’elle avoit jà
plus de quatre-vingts ans, et Abraham en avoit plus de cent. Et Dieu
qui la vit bien rire dist à Abraham: Pourquoy a ris Sarre ta moullier?
Et Sarre qui ot paour respondi qu’elle n’avoit pas ris, et Dieu lui
dist: Je te vis bien rire derrière ton huis; ne sont pas toutes choses
légières à Dieu quant il les veult faire? Après ce, Sarre conceut quant
il pleust à Dieu et enfanta un fils lequel Abraham appella Ysaac, et
le circonci au jour vingtième qu’il fut né. Lors dist Sarre par moult
grant joie: Dieu m’a fait rire, et tous ceulx et celles qui orront dire
que j’ay enfanté riront aussi avec moy. Qui creroit, dist-elle, Abraham
se il disoit que Sarre alaitast un enfant qu’elle luy aroit enfanté
en sa vieillesse? Et pour certain toutes gens qui oient de ce parler
pevent bien croire et penser que Dieu ama moult Abraham et Sarre aussi
quant il leur fist si belle grâce. Mais Abraham estoit si saint et si
bon patriarche que Dieu parla à lui par moult de fois et lui promist
que il mesmes se donroit à sa lignée[193], et aussi ama-il moult Sarre
pour sa grant loyauté et sa grant bonté.

Moult bien nourri Sarre son fils Ysaac, et quant il fut si grant
qu’elle le sevra et qu’il deust mengier à la table son père Abraham,
elle appella ses amis et fist grant mengier et grant feste pour son
fils. Et quant Sarre vit Ysmaël le fils Agar l’Egipcienne jouer à Ysaac
son fils, elle dist à Abraham: Chasse hors la meschine et son fils; le
fils de la meschine ne sera pas hoir avecques mon fils Ysaac. Il est
dit en Genesy ou XXIe chappitre: Ceste parole fut moult dure à Abraham,
mais Dieu lui dist ainsi: Ne te semble pas aspre chose de bouter hors
la meschine et son fils; oy la parolle de Sarre et fay tout ce qu’elle
te dira, car en Ysaac ta semence sera appellée. (C’est à dire que de
Ysaac devoit venir la lignée que Dieu avoit promise à Abraham.) Et pour
ce, dit Dieu, que le fils de la meschine est de ta semence, je le feray
croistre en moult grant gent. Donc se leva Abraham au matin et bailla
à Agar la meschine du pain et un bouchel[194] d’eaue et luy mist sur
ses espaules, puis lui fist prendre Ysmaël son fils; si lui commanda
qu’elle s’en alast quelle part qu’il luy pleust, et si fist-elle.

Or pourroient, par adventure, penser aucunes personnes que Sarre eust
par mal et par envie enchassé Agar sa meschine et Ysmaël son fils: mais
qui veult bien considérer la cause, elle n’ot pas tort; Histoire sur
Bible dist ainsi: Sarre vit bien que Ysmaël en son jeu faisoit félonnie
à Ysaac son fils; et aussi que, de par esperit de prophécie, elle sceut
et apperceut que Ysmaël avoit ymagetes faictes de terre auxquelles il
aouroit comme Dieu et vouloit contraindre Ysaac à ce que les aourast
aussi. Encores considéroit-elle et savoit assez que se Ysmaël demouroit
tant avecques eulx que Abraham morust, il vouldroit déshériter Ysaac et
avoir sa seignourie par sa force, et pour ce elle fist moult bien de
enchasser la mère et son fils. Et jasoit-ce que j’aye mise l’istoire
tout au long et ne l’aye voulu desmembrer ne descoupler pour ce que la
matière est belle et s’entretient, toutesvoies par icelle peut estre
recueilli à mon propos seulement que Sarre fut très amoureuse privée et
obéissant à son mary en tant qu’elle laissa ses parens et sa terre pour
aler seule de sa lignée avec son mary en estrange terre et de différent
langage, et avec ce, elle délaissa à la prière et pour l’amour de son
mary le nom de moullier ou femme qui est le plus prouchain en affinité,
en amour et dilection, et, à la demande de son mary, prist le nom de
seur; et en oultre que tant comme elle fut hors d’avecques son mary,
tout jour et toute nuit plouroit pour l’amour de son mary; et de
rechief que pour avoir lignée et représentacion de son mary après la
mort d’icelluy, elle en laissa son lit et le soulas de son mary, et
lui bailla Agar sa chambrière et la fist dame, et elle très humblement
devint serviteresse et humble servant, sans les autres débonnairetés et
humilités cy dessus escriptes et lesquelles je laisse pour ce qu’il me
semble que ce seroit trop longue récitation.

Item il est trouvé escript ou XXIXe chappitre de
Genesy qui est le premier livre de la Bible, que quant Jacob fut party
de Ysaac son père et de Rébecque sa mère, de Briseyda[195] leur cité il
ala tant qu’il vint en Mésopotamie, près de la cité de Aram qui estoit
à Laban son oncle. Là resta-il de coste un puis auquel les pasteurs
de la terre abreuvoient les bestes, lequel puis estoit couvert d’une
grant pierre plate. Ainsi comme les pasteurs furent assemblés entour
le puis, Jacob leur demanda se ils congnoissoient Laban le fils Batuel
qui fut fils Naccor. Les pasteurs respondirent: Oyl, moult bien. Il
leur demanda se il estoit sain et en bon point; ils respondirent: Oyl.
Vois çà, dirent-ils, Rachel sa fille qui vient abreuver ses bestes à ce
puis. Jacob leur dist: Seigneurs, abreuvez vos bestes, si les ramenez
en la pasture, car il est encores grant heure et n’est pas temps
encores de les mener aux estables. Si comme il disoit ainsi, Rachel
vint au puis, et Jacob leva la pierre du puis: si luy fist abreuver ses
bestes. Lors parla-il à elle et la baisa; si luy dist qu’il estoist
son cousin germain, fils de Ysaac et de Rébecque la seur de Laban son
père. Et quant Rachel l’ot entendu, elle s’en courust en son hostel et
dist à Laban son père comment elle ot trouvé Jacob son nepveu. Et quant
Laban l’oy, il eust moult grant joie et lui demanda la cause de sa
voye[196] et pour quoy il estoit là venu. Jacob luy dist que c’estoit
pour la paour de Esaü son frère qui le vouloit occire pour ce que il
avoit receu la bénéisson son père, mais ce luy ot fait faire sa mère
Rébecque. Lors respondi Laban: Tu es os de mes os et char de ma char,
et pour ce tu pues demourer avecques moy.

Quant Jacob ot demouré avec Laban son oncle par l’espace de un mois,
Laban lui dist: Comment que tu soies mon nepveu, ne vueil-je pas que tu
me serves pour néant; dy moy que tu vouldras avoir pour ton service.
Or avoit Laban deux filles: l’ainsnée ot nom Lye, celle ot les yeulx
plourans par enfermeté; et la plus jeune ot nom Rachel, celle estoit
moult belle et gente de viaire et de corps, et Jacob l’amoit moult. Et
pour ce il dist à Laban: Je serviray à toy sept ans pour Rachel la plus
jeune. Laban respondi: Mieulx vault que je la te donne que à un autre
homme, or demeure doncques avecques moy. Jacob demoura avecques Laban
et le servi sept ans pour avoir sa fille Rachel, et lui sembla que le
terme fut moult brief pour la grant amour qu’il avoit à elle.

Sur ceste chose dit l’Histoire: le terme de sept ans ne luy sembla pas
brief pour la grant amour, mais moult long. Car quant une personne aime
et désire aucune chose, il luy semble que les termes que il la doit
avoir tardent trop merveilleusement. Mais ce que la Bible dit que les
jours semblèrent briefs à Jacob, on peut entendre en ceste manière: il
amoit tant Rachel et luy sembloit tant belle, que s’il deust servir
encores autant pour l’avoir comme il avoit servi, ne lui sembloit-il
pas que il l’eust bien desservie.

A la fin des sept ans, il dit à Laban: Donne moy ma moullier, il est
bien temps que je l’aye. Lors appella Laban tous ses amis et voisins et
fist grans nopces; et quant la nuit fut venue, il mena à Jacob Lye sa
fille l’ainsnée et lui bailla une meschine qui ot nom Zelphan pour luy
servir. Et quant Jacob ot jeu[197] à Lye et il la regarda à la matinée,
il dist à Laban: Que est-ce que tu as voulu faire à moy? N’ay-je pas
servi à toi sept ans pour Rachel? Pourquoy m’as-tu baillé Lye? Laban
respondi: Nous n’avons pas de coustume en ceste contrée de bailler aux
nopces la plus jeune devant les ainsnées; attens tant que la sepmaine
des nopces soit passée et puis je te donray l’autre, en telle manière
que tu me serviras encores sept ans pour elle. Lors accorda Jacob ce
que Laban ot dit, et quant la sepmaine fut passée, il prist ainsi à
moullier Rachel à laquelle son père avoit donné une meschine laquelle
ot nom Balam.

Aucuns veullent dire que puis que Jacob ot prins la fille ainsnée
de Laban, il servi autres sept ans pour Rachel avant qu’il l’eust à
moullier, mais ils dient mal. On treuve en Histoire que saint Jérosme
dit: Tantost après la sepmaine des nopces faictes pour Lye, Jacob prist
Rachel, et pour la grant joye qu’il en ot, il servi voulentiers les
sept ans ensuivans.

Il est dit en Genesy ou XXIXe chappitre que Jacob ama
moult plus Rachel pour ce que elle estoit plus belle et gracieuse que
Lye qui n’estoit pas si belle, mais pour ce que Dieu ne vouloit pas
qu’il l’eust trop en despit, il la fist concevoir un fils dont elle
ot moult grant joye et l’appela Ruben, et dit ainsi: Dieu a veu mon
humilité, d’ores-en-avant m’en aymera mon mary. De rechief elle conceut
et enfanta un autre fils et l’appela Siméon, en disant ainsi: Pour
ce que Dieu m’a oye, il m’a donné encores ce fils. Tiercement, elle
conceut et enfanta un autre fils et dist ainsi: Mon mary se complaira
en moy pour ce que je luy ay enfanté trois fils; et pour ce, elle
nomma l’enfant Levy. Quartement, conceut et enfanta un fils et dist:
Orendroit je me confesseray à nostre Seigneur; et pour ce, l’enfant ot
nom Judas et vault autant à dire que confession. Lors cessa Lye qu’elle
n’ot plus enfans jusques grant temps après.

Il est escript ou XXXe chappitre de Genesy que Rachel
ot grant envie contre Lye sa seur pour ce qu’elle ot enfanté, et elle
se trouvoit brehaigne et ne povoit concevoir. Et pour ce elle dist à
Jacob son mary: Donne moy des enfans, et se tu ne le fais je mourray.
Jacob qui yrié estoit respondi: Je ne suis pas Dieu, je t’apreisse
d’avoir enfans de ton ventre. Rachel respondi: J’ay Balan ma meschine,
couche avec elle à ce qu’elle enfante et que je puisse avoir fils
d’elle et de toy. Jacob fist ce que Rachel voult, et Balan conceut et
enfanta un fils. Lors dit Rachel: Dieu a jugié pour moy, si a ma voix
essaucée et m’a donné un fils. Pour ce, elle appela l’enfant Dan. De
rechief, Balan ot un fils pour lequel Rachel dist: Nostre Seigneur m’a
comparée à Lye, et de ce, le fils ot nom Neptalim.

Or véons grant merveille et signe de grant amour. Rachel avoit si grant
désir qu’elle eust enfans de Jacob que pour ce qu’elle vit quelle ne
povoit concevoir elle luy bailla sa meschine, et les fils qu’elle en ot
elle ama aussi que s’ils feussent siens propres. Pour ce que Lye vit
qu’elle ne concevoit mais, elle bailla à Jacob Zelphan sa meschine. Le
premier fils qu’elle en ot, Lye le receut à joye et dit: Il me vient
eureusement, et de ce, le fils ot nom Gad. Et quant Zelphan ot l’autre
fils Lye dist: C’est pour ma bonne eureté et pour ce toutes femmes me
diront bieneureuse; et ce fils ot nom Aser.

Ou temps de messon Ruben apporta à Lye sa mère mandagores que il ot
trouvées en leur champ, et quant Rachel les vit, si les désira moult et
dist à Lye sa sœur: Donne moy partie des mandagores. Lye respondi: Ne
te souffist-il pas que tu me ostes mon mary, se tu ne me veulx encores
oster mes mandagores? Rachel dist: Je veuil qu’il dorme en ceste nuit
avecques toy pour les mandagores que ton fils a apporté. Lye les luy
donna, et au soir quant Jacob revint des champs, elle ala encontre luy
et luy dist: Tu vendras en ceste nuit coucher avecques moy, car je t’ay
acheté par les mandagores que ton fils m’ot donné.

De ces mandagores met l’Histoire sur Bible moult d’oppinions. Les
aucuns dient que ce sont arbres qui portent fruit souef flairant
autel que pommes. Les autres dient que ce sont racines en terre, en
manière d’erbe, portans feuilles vers, et ont ces racines figure et
façon d’ommes et de femmes, de tous membres et de chevellure[198].
_Catholicon_[199] dit: Ce m’est advis que bien pevent estre herbes
et racines, et que le fruit vault à femmes brehaignes pour aidier à
concevoir, mais que les femmes ne soient pas trop anciennes.

Celle nuit dormit Jacob avecques Lye, et elle conceut un fils, et
quant elle l’ot enfanté, elle dist: Dieu m’a enrichie de ce que j’ay
donné à mon mary ma meschine; et pour ce elle appella son fils le
cinquiesme Ysacar. Puis ot-elle le sixiesme fils; quant elle l’ot
enfanté, elle dist: Dieu m’a enrichie de bon douaire à ceste fois, et
encores sera mon mary avecques moy; et pour ce elle appella son fils
Zabulon. Encores ot-elle une fille laquelle ot nom Dinam. Après ce,
nostre Seigneur se recorda de Rachel et essauça sa prière; si lui fist
concevoir et enfanter un fils dont elle ot moult grant joye et dist:
Nostre Seigneur a ostée ma reprouche. Si appella son fils Joseph, et
dist: Dieu m’en doint encores un autre. Après toutes ces choses dessus
dictes, Jacob appella Laban son oncle et lui dist: Donne moy mes
moulliers pour lesquelles j’ay servy à toy quatorze ans, et mes enfans;
si m’en iray en la terre dont je fus né. Laban lui respondi: Je te prie
que tu demeures encore avec moy, car je sçay bien que par toy Dieu m’a
bénéy et multiplié mes biens. Jacob respondi: Il me convient pourveoir
substance pour moy, pour mes enfans, pour mes femmes et ma famille.

Ores du surplus de l’histoire je me tais, car il ne touche point à
ma matière. Mais par ce que dit est dessus peut estre recueilli la
grant bonté des dessus dictes Lye et Rachel qui toutes deux et en un
mesmes temps, elles estans ensemble en un mesme hostel et mesnage,
servoient et servirent Jacob leur mary en bonne paix et en bon amour,
sans jalousie, sans tençon et sans envie, et en oultre elles avoient
laissié leur pays, leur nativité, leur père, leur mère et leur langage
pour icelluy mary et pour le servir en estrange terre. Et est moult à
considérer la grant amour et l’ardeur que Rachel avoit d’avoir lignée
et remembrance de Jacob auquel elle bailla Balan sa chamberière.

Quantes dames est-il maintenant qui le féissent, ne qui vesquissent
si paisiblement que quant l’une l’aroit, l’autre n’en rechignast
et murmurast, mais encores pis? Car, par Dieu, je cuide qu’elles
batteroient l’une l’autre. O Dieu! quelles bonnes femmes et sainctes
elles furent! Pour néant n’est pas en la bénéisson des espousailles
ramenteue ceste parole: _Sis amabilis ut Rachel viro, prudens ut Sarra,
sapiens ut Rebecca_.

Item nous véons en _Thobie_ Xe que Raguel et Anne sa
femme, quant ils mirent hors de leur hostel Thobie le jeune et Sarre
leur fille qui estoit femme d’icelluy jeune Thobie, ils baisièrent
icelle leur fille et l’admonestèrent qu’elle amast cordialment son
mary et honnourast ses parens, et si fist-elle. Et à ce propos, il est
trouvé _Machabeorum_, XIº que quant Alixandre oy dire que le roy d’Égipte
qui avoit espousé sa seur le venoit veoir, il manda par toutes les
universités à son peuple qu’ils ississent de leurs cités et alassent
au devant d’icelluy roy d’Égipte pour luy honnorer, et ainsi faisoit
honneur à ses parens quant il honnouroit le mary de sa seur.

Et pour que l’en ne die mie que je ne vueille aussi bien dire des
devoirs des hommes comme des femmes, je di aussi qu’il est escript
_Ad Ephesios_ Vº que les maris doivent amer leurs femmes comme leur
propre corps, ce n’est mie à dire par fiction, ne par parole, c’est
léalment, de cuer, avecques ce que dit est dessus. Encores, pour
monstrer ce que j’ay dit que vous devez estre très privée et très
amoureuse de vostre mary, je mets un exemple rural que mesmes les
oiseaulx ramages[200] et les bestes privées et sauvaiges, voire les
bestes ravissables, ont le sens et industrie de ceste pratique, car
les oiseaulx femelles suivent et se tiennent prouchaines de leurs
masles et non d’autres, et les suivent et volent après eulx et non
après autres. Se les masles s’arrestent, aussi font les femelles et
s’assieent près de leurs masles: quant leurs masles s’envolent, et
elles après joingnant à joingnant. Et mesmes les oiseaulx sauvaiges qui
sont nourris par personnes qui leur sont estranges au commencement,
puis que iceulx oiseaulx ont prins nourriture d’icelles personnes
estranges, soient corbeaux, corneilles, choues[201], voire lez oiseaulx
de proye, comme espriviers, faucons, tiercelez[202], ostours et les
semblables, si les aiment-ils plus que les autres. Ce mesmes est-il des
bestes sauvaiges, des dommeschés[203], voire des bestes champestres.
Des dommeschés, vous véez que un lévrier, ou mastin, ou chiennet, soit
en alant par le chemin, ou à table, ou en lit, tousjours se tient-il
au plus près de celluy avecques qui il prent sa nourriture, et laisse
et est estrange et farouche de tous les autres; et se le chien en est
loing, tousjours a-il le cuer et l’ueil à son maistre; mesmes se son
maistre le bat et luy rue pierres après luy, si le suit-il balant
la queue, et en soy couchant devant son maistre le rapaise, et par
rivières, par bois, par larronnières et par batailles le suit.

Autre exemple peut estre prins du chien Maquaire[204], qui vit tuer
son maistre dedens un bois, et depuis qu’il fut mort, ne le laissa,
mais couchoit ou bois emprès luy qui estoit mort, et aloit de jour
querre son vivre loing et l’apportoit en sa gueule, et illec retournoit
sans mengier, mais couchoit, buvoit et mengoit emprès le corps et
gardoit icelluy corps de son maistre, au bois, tout mort. Depuis,
icelluy chien se combati et assailli plusieurs fois celluy qui son
maistre avoit tué, et toutes fois qu’il le trouvoit l’assailloit et
se combatoit; et en la parfin le desconfi ou champs en l’Isle Nostre
Dame[205] à Paris, et encore y sont les traces des lices qui furent
faictes pour le chien et pour le champ.

Par Dieu, je vy à Nyort un chien vieil qui gisoit sur la fosse où son
maistre avoit esté enterré qui avoit esté tué des Anglois, et y fut
mené monseigneur de Berry et grant nombre de chevaliers pour veoir la
merveille de la loyaulté et de l’amour du chien qui jour et nuit ne
se partoit de dessus la fosse où estoit son maistre que les Anglois
avoient tué. Et luy fist monseigneur de Berry donner dix frans qui
furent baillés à un voisin pour lui quérir à mengier toute sa vie[206].

Ce mesmes est-il des bestes champestres; vous le véez d’un mouton, d’un
aignel, qui suivent et sont privés de leurs maistres et maistresses
et les suivent et sont privés d’eulx et non d’autres; et autel est-il
des bestes sauvaiges, comme d’un sanglier, un cerf, une biche, qui
ont nature sauvage, suivent et se tiennent joingnans et près de leurs
maistres et maistresses et laissent tous autres. Item, autel est-il des
bestes mesmes sauvaiges qui sont dévourans et ravissables, comme loups,
lyons, léopars et les semblables, qui sont bestes farouches, fières,
cruelles, dévourans et ravissables; si suivent-ils, servent et sont
privés de ceulx avecques qui ils prennent leur nourriture et qui les
aiment, et sont estranges des autres.

Ores avez-vous veu moult de divers et estranges exemples dont les
derrains sont vrais et visibles à l’ueil par lesquels exemples vous
véez que les oiseaulx du ciel et les bestes privées et sauvages et
mesmes les bestes ravissables ont ce sens de parfaictement amer et
estre privées de leurs patrons et bienfaisans et estranges des autres;
doncques, par meilleure et plus forte raison, les femmes à qui Dieu a
donné sens naturel, et sont raisonnables, doivent avoir à leurs maris
parfaicte et solemnelle amour, et pour ce je vous prye que vous soyez
très amoureuse et très privée de vostre mary qui sera.



LE SIXIÈME ARTICLE.


Le sixiesme article de la première distinction dit que vous soiez
humble et obéissant à celluy qui sera vostre mary, lequel article
contient en soy quatre membres.

Le premier membre dit que vous soiez obéissant: qui est entendu à lui,
et à ses commandemens quels qu’ils soient, supposé que les commandemens
soient fais à certes[207] ou par jeu, ou que les commandemens soient
fais d’aucunes choses estranges à faire, ou que les commandemens soient
fais sur choses de petit pris ou de grant pris; car toutes choses vous
doivent estre de grant pris, puis que cellui qui sera vostre mary le
vous aura commandé. Le deuxiesme membre ou particularité est à entendre
que se vous avez aucunes besongnes à faire dont vous n’ayez point parlé
à celluy qui sera vostre mary, ne il ne s’en est point advisé, et pour
ce il n’en a riens commandé ne deffendu, se la besongne est hastive
et qu’il la conviengne faire avant que celluy qui sera vostre mary
le sache, se vous avez plaisir de la faire en aucune manière, et vous
sentez que celluy qui sera vostre mary eust plaisir de la faire en une
autre manière, faictes avant[208] au plaisir de celluy qui sera vostre
mary que au vostre, car son plaisir doit précéder le vostre.

La troisiesme particularité est à entendre que se celluy qui sera
vostre mary vous deffendra aucune chose, supposé que sa deffense soit
faicte à jeu ou à certes, ou que sa deffense soit faicte sur chose de
petit pris ou de grant value, gardez que aucunement vous ne faciez
contre sa deffense.

La quarte particularité est que vous ne soyez arrogant ne répliquant
contre celluy qui sera vostre mary ne contre ses dis, et ne dictes
contre sa parole, mesmement[209] devant les gens.

En reprenant le premier point des quatre particularités qui dit que
vous soyez humble à vostre mary et à luy obéissant, etc., l’Escripture
le commande _Ad Ephesios_ Vº où il est dit: _Mulieres viris suis subdite
sint sicut domino, quoniam vir caput est mulieris, sicut Christus caput
est Ecclesie_. C’est à dire que le commandement de Dieu est que les
femmes soient subjectes à leurs maris comme à seigneurs, car le mary
est aussi bien chief de la femme comme nostre Seigneur Jhésu-Crist est
chief de l’Église. Doncques il s’ensuit que ainsi comme l’Église est
subjecte et obéissant aux commandemens grans et petis de Jhésu-Crist,
comme à son chief, tout ainsi les femmes doivent estre subjectes à
leurs maris comme à leur chief et obéir à eulx et à leurs commandemens
grans et petis. Et ainsi le commanda nostre Seigneur, si comme dit
saint Jhérosme, et aussi le dit le Décret[210], XXXIIIe _Questione,
quinto capitulo: Cum caput_. Et pour ce dit l’apostre quant il escript
aux Hébrieux, ou XIIIe chappitre: _Obedite prepositis vestris et
subjacete eis, etc._ C’est à dire obéissez à vos souverains et soyez en
bonne subjection vers eulx. Encores vous est-il assez monstré que c’est
sentence de nostre Seigneur par ce que dit est par avant, que femme
doit estre subjecte à homme. Car il est dit que quant au commencement
du monde Adam fut fait, nostre Seigneur par sa bouche et parole dist:
Faisons-luy aide. Et lors de la coste de Adam fist la femme comme aide
et subjecte et ainsi en use-l’en, et c’est raison. Et pour ce, se doit
bien femme adviser de quelle condition est cellui qu’elle prendra,
avant qu’elle le preigne. Car, ainsi comme dit un povre homs Rommain
qui sans son sceu ou pourchas fut par les Rommains esleu à estre
empereur, quant l’en luy apporta le faudesteul[211] et la couronne
il fut tout esbahy; l’une de ses premières paroles fut qu’il dist au
peuple: Prenez vous tous garde que vous faictes ou avez fait, car s’il
est ainsi que vous m’ayez esleu et je soye demouré empereur, sachez de
certain que de là en avant mes paroles seront tranchans comme rasouers
de nouvel esmolus. C’estoit à dire que quiconques n’obéiroit à ses
défenses ou commandemens, puis qu’il seroit ou estoit fait empereur,
c’estoit sur peine de perdre la teste.

Ainsi, garde soy une femme comment ne à qui elle sera mariée, car
quiconques, povre ou petit qu’il ait esté par avant, toutesvoies pour
le temps à venir depuis le mariage, doit-il estre et est souverain et
qui peut tout multiplier ou tout descroistre. Et pour ce vous devez
plus en mary penser à la condition que à l’avoir[212], car vous ne
le pourrez après changer, et quant vous l’aurez prins, si le tenez à
amour et amez et obéissez humblement, comme fist Sarre dont il est
parlé en l’article précédent. Car plusieurs femmes ont gaignié par leur
obéissance et sont venues à grant honneur, et autres femmes par leur
désobéissance ont esté reculées et désavancées.

A ce propos d’obéissance, et dont il vient bien à la femme qui est
obéissant à son mary, puis-je traire un exemple qui fut jà pieçà
translaté par maistre François Pétrac[213] qui à Romme fut couronné
poëte, lequel histoire dit ainsi:

Aux confines de Pimont en Lombardie, ainsi comme au pié de la montaigne
qui devise France et Ytalie, qui est appellée ou païs Mont Vésée[214],
a une contrée longue et lée, qui est habitée de chasteaulx et villes
et aournée de bois, de prés, de rivières, de vignes, de foings et
de terres labourables: et celle terre est appellée la terre de
Saluces laquelle d’ancienneté seignourist les contrées voisines, et
d’ancienneté a esté gouvernée jusques aujourd’uy par aucuns nobles et
puissans princes appellés marquis de Saluces, desquels l’un des plus
nobles et plus puissans fut appellé Gautier auquel tous les autres de
celle région, comme barons, chevaliers, escuiers, bourgois, marchans
et laboureurs obéissoient. Icelluy Gautier marquis de Saluces estoit
bel de corps, fort et légier, noble de sang, riche d’avoir et de
grant seignourie, plein de toutes bonnes meurs et parfaitement garni
de précieux dons de nature. Un vice estoit en lui, car il amoit fort
solitude et n’acontoit[215] riens au temps à venir, ne en nulle manière
ne vouloit pour lui mariage. Toute sa joye et plaisance estoit en
rivières, en bois, en chiens et en oyseaulx, et peu s’entremettoit
du gouvernement de sa seignourie; pour laquelle chose ses barons le
mouvoient et admonestoient de marier, et son peuple estoit en très
grant tristesse et par espécial de ce qu’il ne vouloit entendre à
mariage. Une journée s’assemblèrent en grant nombre, et les plus
souffisans vindrent à lui et par la bouche de l’un luy dirent telles
paroles: O tu, marquis nostre seigneur, l’amour que nous avons en
toy nous donne hardement de parler féablement. Comme il soit ainsi
que toy et toutes les choses qui sont en toy nous plaisent et ont
tousjours pleu, et nous réputons bieneureux d’avoir tel seigneur, une
chose défault en toy, laquelle se tu la nous veulx octroier, nous nous
réputons estre mieulx fortunés que tous nos voisins: c’est assavoir
qu’il te plaise encliner ton courage au lien de mariage, et que ta
liberté passée soit un peu réfrénée et mise au droit des mariés. Tu
scez, Sire, que les jours passent en volant sans jamais retourner.
Et combien que tu soies de jeune aage, toutesvoies de jour en jour
t’assault la mort et s’approche, laquelle n’espargne à nul aage, et de
ce nul n’a privilège. Il les convient tous morir, mais l’en ne scet
quant, ne comment, ne le jour, ne la fin. Tes hommes doncques qui tes
commandemens jamais ne refuseroient, te prient très humblement qu’ils
aient liberté de querre pour toy une dame de convenable lignée, noble
de sang, belle de corps, de bonté et de sens aournée, laquelle il te
plaira à prendre par mariage, et par laquelle nous espérons avoir de
toy lignée et seigneur venant de toy à successeur. Sire, fay ceste
grâce à tes loyaulx subjects, afin que, se de ta haulte et noble
personne avenoit aucune chose, et que tu t’en alasses de ce siècle, ce
ne fust mie sans hoir et successeur, et que tes subjects tristes et
dolans ne demourassent mie sans seigneur.

Ces paroles finées, le marquis meu de pitié et d’amour envers ses
subjects leur respondi moult doulcement et dist: Mes amis, vous me
contraignez à ce qui en mon courage ne peut oncquesmais estre; car
je me délitoie en liberté et en franchise de voulenté laquelle est
peu trouvée en mariage, ce scevent bien ceulx qui l’ont esprouvé.
Toutesvoies, pour vostre amour, je me soubsmets à vostre voulenté. Vray
est que mariage est une chose doubteuse, et maintes fois les enfans
ne ressemblent pas au père. Toutesfois s’aucun bien vient au père, il
ne doit mie pour ce dire qu’il luy soit deu de droit, mais vient de
Dieu de lassus; à lui je recommande le sort de mon mariage, espérant
en sa doulce bonté qu’il me octroie telle avecques laquelle je puisse
vivre en paix et en repos expédient à mon salut. Je vous octroye de
prendre femme, mes amis, et le vous promects; mais je la vueil moy
mesmes eslire et choisir, et de vous je vueil une chose que vous me
promectez et gardez: c’est asseurément que celle que je prendray par
mon élection, quelle qu’elle soit, fille de Prince des Rommains, femme
de poste[216], ou autre, vous la doiez amer entièrement et honnourer,
et qu’il n’y ait aucun de vous qui après l’élection du mariage doie
estre d’elle mal content, ne contre elle groncier ne murmurer.

Lors tous les barons et subjects du marquis furent liés de ce qu’ils
avoient ce qu’ils demandoient, de laquelle chose ils avoient esté
maintes fois désespérés. A une voix remercièrent le marquis leur
seigneur et promirent de bon cuer la révérence et obéissance qu’il leur
avoit demandé. Grant joie fut ou palais de Saluces, et par le marquis
fut le jour assigné de ses nopces auquel il devoit prendre femme, et
commanda faire un grant appareil, trop plus grant que par autre marquis
n’avoit autresfois esté fait, et que les parens et amis, voisins, et
les dames du païs ensement[217], fussent semoncés à la dicte journée;
laquelle chose fut solemnéement acomplie, et entretant que l’appareil
se faisoit, le marquis de Saluces comme il avoit acoustumé aloit en son
déduit chacier et vouler[218].

Assez près du chastel de Saluces avoit une petite villette en laquelle
demouroient un peu de laboureurs, par laquelle villette le marquis
passoit souventesfois, et entre les dessusdis laboureurs avoit
un vieil homme et povre qui ne se povoit aidier et estoit appellé
Jehannicola. A cellui povre homme estoit demourée une fille appellée
Grisilidis, assez belle de corps, mais trop plus belle de vie et
de bonnes meurs: nourrie avoit esté de petite vie, comme du labour
de son père; oncques à sa congnoissance n’estoient venues viandes
délicieuses ne choses délicatives. Un courage vertueux plein de toute
meurté en son pis virginal doulcement habitoit; la vieillesse de son
père, en très grant humilité, doulcement supportoit et soustenoit,
et icelluy nourrissoit; et un peu de brebis que son père avoit,
diligemment gardoit et avecques icelles aux champs sa quenoille filoit
continuelment. Et quant Grisilidis au vespre revenoit et ramenoit ses
bestes à l’hostel de son père, elle les affouragoit, et appareilloit
à son père et à elle les viandes que Dieu leur donnoit. Et briefment
toutes les curialités et services qu’elle povoit faire à son père
doulcement faisoit.

Le marquis assez informé par commune renommée de la vertu et grant
bonté d’icelle Grisilidis, en alant à son déduit souventesfois la
regardoit, et en son cuer la belle manière d’icelle et sa grant vertu
fichoit et atachoit. Et en la fin détermina en son cuer que Grisilidis
seroit eslevée par lui à estre sa femme marquise de Saluces, et que
autre n’aroit, et fist admonester ses barons de venir à ses nopces au
jour qui estoit déterminé. Icellui jour approucha, et les barons non
sachans de la fille que le marquis avoit advisé de prendre, furent
moult esbahis. Toutesvoies, savoient-ils bien que le marquis avoit
et faisoit appareiller riches robes, ceintures, fermaulx, anneaulx
et joiaulx à la forme d’une pucelle qui de corps ressembloit à
Grisilidis. Or advint que le jour des nopces fut venu, et que tout
le palais de Saluces fut peuplé grandement de barons, de chevaliers,
de dames et de damoiselles, de bourgois et d’autres gens, mais nulle
nouvelle n’estoit de l’espousée leur seigneur, laquelle chose n’estoit
pas sans grant merveille; et qui plus est, l’eure s’approuchoit du
disner, et tous les officiers estoient prets chascun de faire son
office. Lors le marquis de Saluces, ainsi comme s’il voulsist aler
encontre son espousée, se parti de son palais, et les chevaliers et
dames à grans routes[219], ménestrels et héraulx suivoient.

Mais la pucelle Grisilidis de tout ce riens ne savoit, car ce matin
mesmes elle appareilloit, nettoioit et ordonnoit l’hostel de son père
pour aler avecques les autres pucelles voisines veoir l’espousée de
leur seigneur. A celle heure que le marquis approuchoit, Grisilidis
apportoit sur sa teste une cruche pleine d’eaue à l’hostel de son père,
et le marquis à celle heure, ainsi acompaignié comme il estoit, appella
la pucelle par son nom et lui demanda où son père estoit. Grisilidis
mist sa cruche à terre et à genoulx, humblement, à grant révérence,
respondi: Monseigneur, il est à l’hostel.--Va à luy, dist le marquis,
et luy di qu’il viengne parler à moy. Et elle y ala. Et donc le povre
homme Jehannicola yssi de son hostel. Le marquis le tira par la main
et le traït à part et puis secrètement lui dist: Jehannicola, je sçay
assez que tu m’as amé tousjours et aimes encores, et ce qui me plaist
à toy doit plaire. Je vueil de toy une chose: c’est assavoir que tu
me donnes ta fille pour espouse.--Le povre homme n’osa dire mot, et
un petit après respondit à genoulx, moult humblement: Monseigneur,
je ne doy vouloir aucune chose ou non vouloir fors ce qui te plaist,
car tu es mon seigneur. Le marquis lui dist lors: Entre en ta maison
tout seul, toy et ta fille, car je lui vueil demander aucune chose.
Le marquis entra en la maison du povre homme Jehannicola comme dit
est, et tout le peuple demoura dehors forment esmerveillié; et la
pucelle se mist emprès son père, paoureuse, honteuse et vergongneuse
de la soudaine survenue de son seigneur et de sa grant et noble
compaignie, car elle n’avoit pas apris de veoir souvent un tel hoste
en leur maison. Le marquis adreça ses paroles à elle et si lui dist:
Grisilidis, à ton père et à moy plaist que tu soies m’espouse, et je
pense bien que tu ne me refuseras pas, mais je t’ay à demander une
chose devant ton père; c’est assavoir que ou cas que je te prendray à
femme, laquelle chose sera de présent, je vueil savoir se tu voudras
encliner ton couraige entièrement à toute ma voulenté, en telle manière
que je puisse faire de toy et de ce qui touchera à toy, à ma volenté,
sans résonance ne contredit par toy, en fait ne en dit, en signe ne en
pensée. Lors Grisilidis, non sans merveille de si grant fait esbahie,
respondi: Monseigneur, je congnoy bien que je ne suis pas digne, non
tant seulement de estre appellée t’espouse, mais d’estre appellée ton
ancelle; mais s’il te plaist et fortune le me présente, jamais je ne
sauray faire chose, ne ne feray, ne ne penseray, que je puisse sentir
qui soit encontre ta voulenté, ne tu ne feras jamais riens envers moy
que je contredie.--Il souffist, dit le marquis qui prist la pucelle par
la main et la mena hors de la maison ou milieu de ses barons et de son
peuple et dist ainsi: Mes amis véez cy ma femme, vostre dame, ceste
amez, doubtez et honnourez, et se vous m’amez, ceste très chièrement
amez. Et à ce que Grisilidis n’apportast avecques soy aucunes reliques
de la vile fortune de povreté, le marquis commanda que par les dames et
matrones la pucelle fust despouilliée toute nue, dès les piés jusques à
la teste, et tantost revestue de riches draps et paremens de nopces.

On veist lors les dames embesongnées: les unes la vestoient, et les
autres la chaussoient, et les autres la ceignoient: les autres lui
mettoient les fermaulx et cousoient sur ly les perles et pierres
précieuses: les autres pignoient leur dame et appareilloient son chief
et lui mettoient une riche couronne par dessus qu’elle n’avoit pas
apris, et ce n’estoit pas merveille s’elle estoit esbahie. Qui veist
lors une povre vierge tainte du soleil et ainsi maigre de povreté si
noblement parée et si richement couronnée et soudainement transformée
par telle manière que à peine le peuple la recongnoissoit, bien se
povoit-on de ce merveillier.

Lors les barons prindrent leur dame et à grant joie la menèrent à
l’église, et là le marquis lui mist l’annel ou doy et l’espousa selon
l’ordonnance de saincte Eglise et usage du païs. Et acompli le divin
office, la dame Grisilidis fut assise sur un blanc destrier et de tous
acompaigniée et menée au palais qui retentissoit de toutes manières
d’instrumens. Et furent les nopces célébrées, et icellui jour fut
trespassé en très grant joie et consolation du marquis et de tous
ses amis et subjects. Et fut la dame avecques son seigneur et mary
tellement inspirée de sens et de beau maintien, de la divine grâce
resplendist icelle povre dame Grisilidis en telle manière, que chascun
disoit que non tant seulement en la maison d’un pastour ou laboureur,
mais en palais royal ou impérial elle avoit esté enseignée et nourrie.
Et fut tant amée, chérie et honnourée de tous ceulx qui de s’enfance la
congnoissoient que à peine povoient croire que elle fust fille du povre
homme Jehannicola.

La belle estoit de si belle vie et bonne et de si doulces paroles que
le courage de toutes personnes elle attrayoit à elle amer, et non
pas tant seulement les subjects du marquis et les voisins, mais des
provinces d’environ; et les barons et dames pour sa bonne renommée la
venoient visiter, et tous se partirent de lui joyeux et consolés. Et
ainsi le marquis et Grisilidis vivoient joyeusement ou palais en paix
et en repos, à la grâce de Dieu, et dehors à la grâce des hommes, et
s’esmerveilloient plusieurs comment si grant vertu estoit repousée en
personne nourrie en si grant povreté; et oultre plus icelle marquise
s’entremettoit sagement et diligemment du gouvernement et de ce qui
appartenoit aux dames, et aux commandemens et en la présence de son
seigneur, de la chose publique sagement et diligemment s’entremettoit.
Mais quant le cas li offroit des débas et discors des nobles, par ses
doulces paroles, par si bon jugement et si bonne équité les appaisoit,
que tous à une voix disoient que pour le salut de la chose publique
ceste dame leur avoit esté envoiée par provision célestielle.

Un peu de temps après, la marquise Grisilidis fut ençainte et puis
se délivra d’une belle fille, dont le marquis et tous ceux du pays,
combien qu’ils amassent mieulx qu’elle eust eu un fils, toutesfois
ils en eurent grant joye et furent réconfortés. Passé le temps, les
jours passèrent que la fille du marquis fut sevrée. Lors le marquis qui
tant amoit s’espouse pour les grans vertus qu’il véoit tous les jours
croistre en elle, pensa de elle esprouver et de la fort tempter. Il
entra en sa chambre monstrant face troublée et ainsi comme couroucié
lui dist ces paroles: O tu, Grisilidis, combien que tu soies à présent
eslevée en ceste plaisant fortune, je pense bien que tu n’as pas oublié
ton estat du temps passé, et comment et en quelle manière tu entras en
cestui palais; tu y as esté bien honnourée, et es encores de moy chérie
et amée; mais il n’est pas ainsi du courage de mes vassaulx comme tu
cuides, et par espécial depuis que tu eus lignée. Car ils ont grant
desdaing d’estre subjects à dame yssue de petis parens et de basse
lignée, et à moy qui désire, comme sire, avoir paix avecques eux, me
convient obtempérer aux jugemens et consentir[220] d’aucuns et pas aux
miens, et faire de ta fille telle chose que nulle ne me pourroit estre
plus douloureuse au cuer, laquelle chose je ne vueil pas faire que
tu ne le saches. Si vueil que à ce faire tu t’acordes et prestes ta
franche voulenté et ayes patience de ce qui se fera, et telle patience
que tu me promis au commencement de nostre mariage.

Finées les paroles du marquis qui le cuer de la marquise naturelment
devoient transpercier, icelle marquise, sans muer couleur ne monstrer
signe de tristesse, à son seigneur humblement respondi: Tu es mon
seigneur, et moy et ceste petite fille sommes tiennes: de tes choses
fay ce qu’il te plaist! Nulle chose ne te peut plaire qui aussi ne
doie plaire à moy, et ce ay-je si fichié au millieu de mon cuer que
par l’espace d’aucun temps, ne pour mort, il ne sera effacé, et toutes
autres choses se pourroient faire avant que j’eusse mué mon courage.
Le marquis lors, oiant la responce de s’espouse, voiant sa constance
et son humilité, eust en son cuer grant joye laquelle il dissimula, et
comme triste et doloureux se parti de s’espouse.

Aucuns jours après ce trespassés, le marquis appella un sien subject
loyal et secret ouquel il se fioit plainement, et tout ce qu’il avoit
ordonné estre fait de sa fille le commist au sergent, et l’envoia à
la marquise. Le sergent vint devant sa dame et sagement dist telles
paroles: Madame, je te prie que tu me vueilles pardonner et que tu ne
vueilles imputer à moy ce dont je suis contraint de faire. Tu es sage
dame et scez bien quelle chose est d’estre soubs les seigneurs ausquels
nulles fois, ne par force, ne par engin, l’en ne peut résister. Madame,
je suis contraint à prendre ceste fille et acomplir ce qui m’est
commandé. Lors la marquise en son cuer remembrant des paroles que son
seigneur lui avoit dictes, par les paroles du sergent entendi bien
et souspeçonna que sa fille devoit mourir. Elle print en elle cuer
vertueux et se reconforta, vainquant nature, pour sa promesse et soy
acquictier et à son seigneur obéissance païer. Et sans soupirer, ne
autre douleur monstrer en elle, prist sa fille et longuement la regarda
et doulcement la baisa et si empraint sur elle le signe de la croix;
si la bailla au sergent et luy dist ainsi: Tout ce que monseigneur t’a
commandé pense de faire et acomplir entièrement; mais je te vueil prier
que le tendre corps de ceste pucelle ne soit mengié des oiseaulx ou
des bestes sauvages, se le contraire ne t’est commandé.

Le sergent se parti de la marquise, emportant sa fille, et secrètement
vint au marquis et lui monstra sa fille, en faisant relation de
ce qu’il avoit trouvé la marquise femme de grant courage et sans
contradition obéissant à lui. Le marquis considéra la grant vertu de sa
femme et regarda sa fille et à lui prist une paternelle compassion, et
la rigueur de son propos il ne voult pas muer, mais commanda au sergent
ouquel il se fioit qu’il envelopast sa fille ainsi qu’il appartenoit à
l’aise d’elle, et la mist en un panier sur une mule souef portant[221],
et sans nulle demeure la portast secrètement à Boulongne la Grasse à sa
seur germaine qui estoit femme du conte de Péruse, et dist à sa dicte
seur que, sur l’amour qu’elle avoit à luy, elle la feist nourrir et
endoctriner en toutes bonnes meurs, et que si secrètement fust nourrie
que son mary le conte ne personne vivant ne le peust jamais savoir.

Lequel sergent tantost et de nuit se parti et porta la fille à
Boulongne la Grasse et fist son messaige bien diligemment, ainsi comme
il lui estoit commandé. Et la contesse receut sa niepce à très grant
joie et fist très sagement tout ce que le marquis son frère luy avoit
mandé.

Passée paciemment ceste tempeste trespersant les entrailles de
Grisilidis laquelle fermement et en son cuer tenoit que sa fille fust
morte et occise, le marquis comme ès temps passés se traïst devers
s’espouse sans lui dire mot de sa fille, et souvent regardoit la face
de la marquise, sa manière et sa contenance, pour appercevoir et
esprouver soubtillement s’il pourroit veoir en son espouse aucun signe
de douleur, mais nulle mutation de courage ne peut en lui comprendre
ne veoir, mais pareille liesse et pareil service, une mesme amour, un
mesme courage; pareille comme devant estoit tousjours la dame envers
son seigneur, nulle tristesse ne démonstroit, nulle mention ne faisoit
de sa fille, ne en présence du marquis, ne en son absence.

Et ainsi passèrent quatre ans ensemble le marquis et la marquise en
grant amour et menant vie amoureuse et paisible. Et au chief de quatre
ans, la marquise Grisilidis eust un fils de merveilleuse beauté, dont
le marquis eust parfaite joie et ses amis et ses subjects et tous
ceulx du païs. Quant l’enfant fut sevré de sa nourrice et il ot deux
ans, croissant en grant beaulté, le marquis lors resmeu de nouvel de
sa merveilleuse et périlleuse espreuve, vint à la marquise et lui dit:
Tu scez et oys jà pieçà comment mon peuple estoit très mal content
de nostre mariage, et par espécial depuis qu’ils virent que en toy
avoit fécondité et portoies enfans. Toutesvoies oncquesmais ne furent
si mal contens mes barons et mon peuple comme ils sont à présent par
espécial, pour ce que tu as enfanté un enfant masle, et dient souvent,
et à mes oreilles ay oy leur murmuracion, disans en remposnes: faisons
Gautier mourir, et le bon homme Jehannicola sera nostre seigneur, et
si noble pays à tel seigneur sera subject! Telles sentences chascun
jour machinent; pour lesquelles paroles et doubtes, je qui désire vivre
en paix avec mes subjects, et néantmoins pour la très grant doubte de
mon corps, suis contraint et esmeu de faire et ordonner de cestui
enfant comme je feis de sa seur, laquelle chose je te dis afin que une
soudaine douleur ne doie perturber ton cuer.

O quelles douloureuses admiracions peut avoit ceste dame en son cuer,
en recordant la vilaine mort de sa fille, et que de son seul fils de
l’aage de deux ans la mort pareille estoit déterminée! Qui est cellui,
je ne dy pas femmes qui de leurs natures sont tendres et à leurs enfans
amoureuses, mais le plus fort homme de courage qui se pourroit trouver,
qui de son seul fils telle sentence peust dissimuler? Entendez-cy,
roynes, princesses et marquises et toutes autres femmes, que la dame
à son seigneur respondi et y prenez exemple. Monseigneur, dit-elle,
je t’ay autresfois dit et encores je le répète, que nulle chose je ne
vueil, ne ne desvueil fors ce que je sçay qu’il te plaist. De moy et
des enfans tu es seigneur! En tes choses doncques use de ton droit sans
demander mon consentement. Quant je entray premièrement en ton palais,
à l’entrée je me dévestis de mes povres robes et de ma propre voulenté
et affection et vestis les tiennes, pour laquelle cause tout ce que
tu veulx je vueil. Certainement s’il estoit possible que je feusse
enformée de tes pensées et vouloirs avant que tu les deisses, quelles
qu’elles feussent je les acompliroie à mon povoir, car il n’est chose
en ce monde, ne parens, ne amis, ne ma propre vie, qui à vostre amour
se puisse comparer.

Le marquis de Saluces oyant la response de sa femme, et en son cuer
merveillant et pensant si grant vertu et constance non pareille et la
vraie amour qu’elle avoit à luy, ne respondi riens, mais ainsi comme
s’il fust troublé de ce que faire se devoit de son fils, s’en ala la
chière basse, et assez tost après, ainsi comme autresfois avoit fait,
envoia un sergent loyal secrètement à la marquise. Lequel sergent après
maintes excusations et démonstrant doulcement qu’il estoit nécessaire à
lui de obéir à son seigneur, très humblement et piteusement demandoit
pardon à sa dame se autresfois il lui avoit fait chose qui lui
despleust, et se encores luy convenoit faire, qu’elle luy pardonnast
sa grant cruaulté, et demanda l’enfant. La dame, sans arrest et sans
nul signe de douleur, prist son beau fils entre ses bras et sans gecter
larmes ne soupirs longuement le regarda, et comme elle avoit fait de
sa fille, elle le signa du signe de la croix et le béneist en baisant
doulcement et le bailla au sergent en disant: Tien, mon amy, fais ce
qui t’est commandé, d’une chose[222] comme autresfois, ainçois je te
prie, se faire se peut, que les tendres membres de cestui enfant tu
vueilles garder de la vexation et dévoration des oyseaulx et des bestes
sauvaiges.

Le sergent print l’enfant et porta secrètement à son seigneur et lui
raconta tout ce qu’il avoit oy de sa dame, dont le marquis trop plus
que devant se merveilla du grant et constant courage de sa femme, et
s’il n’eust bien congneu la grant amour qu’elle avoit à ses enfans,
il peust penser que tel courage ne procédoit pas d’umanité, mais de
cruaulté bestiale, et veoit bien clèrement que icelle espouse n’amoit
riens soubs le ciel par dessus son mary.

Le marquis envoia son fils à Boulongne secrètement à sa seur, par la
manière qu’il avoit fait sa fille. Et sa seur la contesse de Péruse,
selon la voulenté son frère le marquis, nourrist sa fille et le fils
si sagement que onques l’on ne peust savoir de qui lesdis enfans
estoient, jusques à tant que le marquis l’ordonna comme cy après
apperra.

Bien peust au marquis de Saluces ainsi crueulx et très rigoreux mary
souffire la preuve non pareille qu’il avoit faicte de sa femme sans
luy plus essaïer ne donner autre torment. Mais ils sont aucuns qui en
fait de souspeçon, quant ils ont commencé, ne scevent prendre fin ne
appaisier leur courage.

Toutes ces choses passées, le marquis conversant avec la marquise la
regardoit souventesfois pour veoir s’elle monstroit envers luy aucun
semblant des choses trespassées, mais oncques il n’apperceust en elle
mutation ne changement de couraige. De jour en jour la trouvoit joyeuse
et amoureuse et plus obéissant, par telle manière que nul ne povoit
appercevoir que en icelles deux personnes eust que un courage, lequel
courage et voulenté principalment estoit du mary, car ceste espouse,
comme dit est dessus, ne vouloit pour elle ne par elle aucune propre
affection, mais remettoit tout à la voulenté de son seigneur.

Le marquis ainsi amoureusement vivant avec sa femme en grant repos et
en grant joie, sceust qu’il estoit sur ce une renommée, c’est assavoir
que pour ce que le marquis non advisant le grant lignage dont il estoit
yssus, honteux de ce qu’il s’étoit conjoint par mariage à la fille
Jehannicola très povre homme, vergongneux de ce qu’il avoit eu deux
enfans, il les avoit fait mourir et gecter en tel lieu que nuls ne
savoient qu’ils estoient devenus. Et combien qu’ils l’amassent bien par
avant comme leur naturel seigneur, toutesvoies pour ceste cause ils le
prenoient en haine laquelle il sentoit bien. Et néantmoins ne voit-il
fleschir ne amolier son courage rigoreux, mais pensa encores par plus
fort argument et ennuyeuse manière prouver et tempter son espouse, par
prendre autre femme.

Douze ans estoient jà passés que la fille avoit esté née; le marquis
manda secrètement à Romme au saint père le Pape et fist impétrer unes
bulles saintifiées par lesquelles la renommée ala à son peuple que le
marquis avoit congié du Pape de Romme que pour la paix et repos de luy
et de ses subjects, son premier mariage délaissé et dégecté, il peust
prendre à mariage légitime une autre femme. Laquelle chose fust assez
créable au peuple rude qui estoit indigné contre son seigneur. Ces
froides nouvelles de ceste bulle, que le marquis devoit prendre une
autre femme, vindrent aux oreilles de Grisilidis fille de Jehannicola,
et se raisonnablement fut troublée en son courage nul n’en doit avoir
merveille. Mais elle qui une fois d’elle mesmes et des siens s’estoit
soubsmise à la voulenté de son seigneur, de son fait franchement
délibérée et conseillée, prist cuer en soy, et comme toute reconfortée
conclut qu’elle attendroit tout ce que cellui ouquel elle s’estoit
toute soubsmise en vouldroit ordonner.

Lors manda et escript à Boulongne le marquis au conte de Péruse et à sa
seur qu’ils lui amenassent ses enfans, sans dire de qui ils estoient,
et sa seur rescript que ainsi le feroit-elle. Ceste venue fust tantost
publiée, et fut la renommée de courir par tout le païs qu’il venoit
belle vierge extraicte de grant lignaige qui devoit estre espouse du
marquis de Saluces.

Le conte de Péruse acompaignié de grans chevaliers et de dames se
départi de Boulongne et amena avecques luy le fils et la fille du
marquis. Et estoit le fils de l’aage de huit ans et la fille de l’aage
de douze ans laquelle estoit très belle de corps et de visaige et
preste à marier, et estoit parée de riches draps, de vestemens et de
joyaulx, et à certain jour ordonné devoit estre à Saluces.

Entretant que le conte de Péruse et les enfans estoient au chemin,
le marquis de Saluces appella Grisilidis s’espouse en la présence
d’aucuns de ses barons et lui dist telles paroles: Ès temps passés,
je me délictoie assez de ta compaignie par mariage, tes bonnes meurs
considérant et non pas ton lignaige, mais à présent, si comme je voy,
grant fortune chiet sur moy et suis en un grant servaige, ne il ne
m’est pas consentu que un povre homme laboureur dont tu es venue ait si
grant seigneurie sur mes vassaulx. Mes hommes me contraignent, et le
Pape le consent, que je prengne une autre femme que toy laquelle est ou
chemin et sera tantost icy. Soies doncques de fort courage, Grisilidis,
et laisse ton lieu à l’autre qui vient. Prens ton douaire et appaise
ton couraige. Va-t’en en la maison ton père; nulle riens qui soit à
l’omme ou à la femme en ce monde ne peut estre perpétuel.

Lors respondi Grisilidis et dist ainsi: Monseigneur, je créoie bien,
ou au moins le pensoie-je, que entre ta magnificence et ma povreté
ne povoit avoir aucune proportion ne températion, ne oncques je ne
me réputay estre digne d’estre non tant seulement ton espouse, mais
d’estre ta meschine, et en ce palais cy ouquel tu m’as fait porter
et maintenir comme dame, je prens Dieu en tesmoingnage que je me
suis toujours réputée et démenée comme ancelle, et de tout le temps
que j’ay demouré avec toy je te rens grâces, et de présent je suis
appareilliée de retourner en la maison mon père en laquelle je useray
ma vieillesse et vueil mourir comme une bieneureuse et honnorable
vefve, qui d’un tel seigneur ay esté espouse. Je laisse mon lieu à
Dieu qui vueille que très bonne vierge viengne en ce lieu ouquel j’ay
très joyeusement demouré, et puisque ainsi te plaist, je, sans mal et
sans rigueur, me pars. Et quant est à mon douaire que tu m’as commandé
que je doie emporter, quel il est je le voy. Tu scez bien, quant tu
me prins, à l’issue de l’hostel de mon père Jehannicola, tu me feis
despouillier toute nue et vestir de tes robes avec lesquelles je vins
à toy, ne oncques avecques toy je n’apportay autres biens ou douaire
fors que foy, loyauté, révérence et povreté. Vecy doncques ceste robe
dont je me despouille, et si te restitue l’annel dout tu me espousas;
les autres anneaulx, joyaulx, vestemens et aournemens par lesquels
j’estoie aournée et enrichie sont en ta chambre. Toute nue de la
maison mon père je yssis, et toute nue je y retourneray, sauf que ce
me sembleroit chose indigne que ce ventre ouquel furent les enfans que
tu as engendrés deust apparoir tout nu devant le peuple, pour quoy,
s’il te plaist et non autrement, je te prie que pour la récompensation
de ma virginité que je apportay en ton palais et laquelle je n’en
rapporte pas, il te plaise à commander que une chemise me soit laissée,
de laquelle je couvriray le ventre de ta femme, jadis marquise, et que
pour ton honneur je me parte au vespre.

Lors, ne se pot plus le marquis tenir de plourer de la pitié qu’il eust
de sa très loyale espouse. Il tourna sa face et larmoiant commanda
que au vespre une seule chemise luy fust baillée. Ainsi fut fait; au
vespre elle se despouilla de tous ses draps et deschaussa et osta les
aournemens de son chief, et de sa seule chemise que son seigneur lui
avoit fait bailler humblement se vesti, et de ce fut contente, et se
parti du palais nus piés, le chief descouvert, acompaignée de barons et
de chevaliers, de dames et de damoiselles qui plouroient et regardoient
ses grans vertus, loyaulté et merveilleuse bonté et patience. Chascun
plouroit, mais elle n’en gecta une seule larme; mais honnestement et
tout simplement, les yeulx baissiés, vint vers l’hostel de son père
Jehannicola, lequel oy le bruit de la venue de si grant compaignie. Et
pour ce que cellui Jehannicola qui estoit vieil et sage avoit tousjours
tenu en son cuer les nopces de sa fille pour souspeçonneuses, créant
que quant son seigneur seroit saoul du petit mariage d’une si povre
créature, de légier, luy qui estoit si grant seigneur, lui donroit
congié, fut adoncques tout effréé et soudainement vint à l’uis et vit
que c’estoit sa fille toute nue, et lors prist hastivement la povre et
dessirée robe qu’elle avoit pieçà laisiée, et tout larmoyant acourut
à l’encontre de sa fille laquelle il baisa et revesti et couvri de
sa dicte vieille robe. Et quant Grisilidis fut venue sur le seuil de
l’uis de l’hostel de son père, elle, sans monstrer aucun semblant de
desdaing ne de courroux, se retourna devers les chevaliers, dames et
damoiselles qui l’avoient acompaignée, et de leur compaignie et convoy
les mercia doulcement et humblement, et leur dist et monstra par belles
et doulces paroles que pour Dieu elles ne voulsissent ne dire, ne
penser, ne croire que son seigneur le marquis eust aucunement tort vers
elle, qu’il n’estoit mie ainsi, mais avoit bonne cause de faire tout
ce qu’il luy plaisoit d’elle qui bien estoit tenue de le souffrir et
endurer. Et aussi véoient-elles bien que à elle n’en desplaisoit point,
en elles admonestant que, pour l’amour de Dieu, elles voulsissent amer
léalment leurs maris et très cordieusement et de toute leur puissance
les servir et honnourer, et que plus grant bien et greigneur renommée
ne meilleure louenge ne povoient-elles en la parfin acquérir, et leur
dist adieu. Et ainsi entra en l’hostel de son père, et les seigneurs
et dames qui l’avoient convoiée s’en retournèrent plourans et fort
gémissans et souspirans, tellement qu’ils ne povoient regarder l’un
l’autre ne parler l’un à l’autre.

Grisilidis du tout en tout fut contente; oublieuse et nonchalant des
grans aises et des grans richesses qu’elle avoit eues et des grans
services, révérences et obéissances que l’en lui avoit faictes, se
tint avec son père à petite vie, comme devant, povre d’esperit et en
très grant humilité vers ses povres amies et anciennes voisines de son
père, et vesquit de moult humble conversation. Or peut-l’en penser
quelle douleur et desconfort avoit le povre Jehannicola qui estoit en
sa vieillesse voyant sa fille en un si povre et si petit estat comme
elle estoit, après si grans et si haultes honneurs et richesses; mais
c’estoit un merveilleux bien de veoir comment bénignement, humblement
et sagement, elle le servoit, et quant elle le véoit pensif, comment
sagement elle le reconfortoit, et après le mettoit en parole d’autre
matière.

Moult de jours passés comme dist est, le conte de Péruse et sa noble
compaignie approuchèrent, et toutes les gens du païs murmuroient des
nopces du marquis. Le conte de Péruse, frère du marquis, envoia
plusieurs chevaliers devant pour certifier à son frère le marquis de
Saluces le jour de sa venue, et qu’il amenoit avec luy la vierge que
le marquis devoit espouser; car en vérité icellui conte de Péruse ne
savoit riens que les enfans que la contesse sa femme avoit nourris
fussent enfans d’icelluy marquis, car celle contesse de Péruse avoit
la chose tenue secrète vers son mary en nourrissant sa niepce et son
nepveu, et par les paroles de la contesse pensoit le conte que ce
fussent enfans d’estrange païs, si comme par leur belle manière les
enfans le monstroient. Et avoit le conte espérance que puis que la
fille seroit mariée au marquis, et les nouvelles en iroient par le
monde, l’en saroit tantost qui seroit le père.

Lors le marquis de Saluces manda querre Grisilidis, et que tantost elle
venist en son palais; laquelle, sans contradiction vint. Et le marquis
lui dist: Grisilidis, la pucelle que je doy espouser sera demain cy au
disner, et pour ce que je désire qu’elle et le conte mon frère et les
autres seigneurs de leur compaignie soient honnourablement receus, et
en telle manière que à un chascun soit fait honneur selon son estat, et
par espécial pour l’amour de la vierge qui vient à moy, et je n’ay en
mon palais femme ne meschine qui si bien le sache faire à ma voulenté
comme toy, (car tu congnois mes meurs et comment l’en doit recevoir
tels gens, et si scez de tout mon palais les chambres, les lieux et les
ordonnances;) pour ce vueil-je que tu n’aies regart ou temps passé et
n’aies honte de ta povre robe, et que nonobstant ton petit habit, tu
preignes la cure de tout mon fait, et tous les officiers de mon hostel
obéiront à toy. Grisilidis respondit liement: Monseigneur, non tant
seulement voulentiers, mais de très bon cuer, tout ce que je pourray à
ton plaisir feray, ne n’en seray jamais lasse ne traveillée, et ne m’en
feindray, tant que les reliques de mon povre esperit demourront en mon
corps.

Lors Grisilidis comme une povre ancelle prist les vils instrumens et
les bailla aux mesgnies, et commanda aux uns à nettoier le palais et
aux autres les estables, enorter les officiers et meschines de bien
faire chascun en son endroit la besongne espéciale, et elle emprist à
drécier et à ordonner les lits et les chambres, tendre les tappis de
haulte lice et toutes choses de broderie et devises qui appartenoient
aux paremens du palais, comme pour recevoir l’espouse de son seigneur.
Et combien que Grisilidis fust en povre estat et en l’abit d’une povre
ancelle, si sembloit-il bien à tous ceulx qui la véoient qu’elle fust
une femme de très grant honneur et de merveilleuse prudence. Ceste
vertu, ce bien et ceste obéissance est assez grant pour toutes les
dames esmerveillier.

L’endemain, heure de tierce, le conte, avecques luy la pucelle et son
frère et toute la compaignie, entrèrent en Saluces. Et de la beaulté
de la vierge et de son frère et de leur belle manière chascun se
esmerveilloit, et aucuns en y eust qui dirent: Gaultier le marquis
change sagement son mariage, car ceste espouse est plus tendre et plus
noble que n’est la fille Jehannicola.

Ainsi entrèrent et descendirent au palais à grant joie. Grisilidis
qui à toutes ces choses estoit présente et qui se démonstroit toute
reconfortée d’un si grant cas à elle si près touchant, et de sa povre
robe non vergongneuse, à lie face, vint de loing à l’encontre de la
pucelle et de loing humblement la salua à genoulx, disant: Bien soiez
venue, madame, et puis au fils, et puis au conte, et humblement les
salua aussi en disant: Bien viengnez-vous avec ma dame. Et mena chascun
en sa chambre qui estoient richement appareillées. Et quant ils eurent
veu et advisé les fais et les manières de Grisilidis, à la parfin tous
se esmerveillèrent comment tant de si bonnes meurs povoient estre en si
povre habit.

Grisilidis, après ces choses, se traït devers la pucelle et devers
l’enfant, ne de avec eulx ne se povoit partir. Une heure regardoit à
la beaulté de la fille, et puis du jeune fils la gracieuse manière,
et ne se povoit saouler de les fort louer. L’heure approucha que l’en
devoit aler à la table. Le marquis lors devant tous appella Grisilidis
et à haulte voix lui dist: Que te semble, Grisilidis, de ceste moie
espouse? N’est-elle pas assez belle et honneste? Grisilidis, haultement
et sagement, à genoulx, respondi: Certainement, monseigneur, c’est
la plus belle et la plus honneste à mon gré que je veisse oncques.
Monseigneur, avec ceste pourrez-vous mener joyeuse vie et honneste,
laquelle chose en bonne foy je désire, mais, monseigneur, je vous vueil
prier et admonester que vous ne vueilliez pas molester ceste nouvelle
espouse d’estranges admonestemens, car, monseigneur, vous povez penser
que ceste est jeune et de grant lieu venue, doulcement nourrie, et ne
les pourroit pas souffrir comme l’autre a souffert, si comme je pense.

Lors le marquis oyant les doulces et sages paroles de Grisilidis et
considérant la bonne chière et grant constance qu’elle monstroit et
avoit tousjours monstré, eust en son cuer une piteuse compassion et
ne se peut plus tenir de monstrer sa voulenté, et en la présence de
tous à haulte voix dist ainsi: O Grisilidis! Grisilidis! je vois et
congnois, et me souffist assez ta vraie foy et loyaulté; et l’amour
que tu as vers moy, ta constant obédience et vraie humilité sont par
moy esprouvées et très bien congneues et me contraignent de dire que
je croy qu’il n’y a homme dessoubs le ciel qui s’espouse ait tant
esprouvée comme j’ay toy. Et lors Grisilidis mua couleur, à tout le
chief enclin[223] par honneste vergongne, pour les grans louenges dont
elle estoit devant tant de peuple louée du marquis son seigneur. Lequel
adoncques larmoyant l’embrassa en la baisant et luy dist: Tu seule es
mon espouse, ne autre espouse jamais je n’aray. Celle que tu pensoies
estre ma nouvelle espouse est ta fille, et cestui enfant est ton fils:
lesquels deux enfans estoient perdus par l’opinion de nos subjects.
Sachent donc tous ceulx qui le contraire pensoient que j’ay voulu
ceste ma loyale espouse curieusement et rigoreusement esprouver, et
non pas pour la contemner ou despire, et ses enfans ay-je fait nourrir
secrètement par ma seur à Boulongne, et non pas occire ne tuer.

La marquise Grisilidis lors oyant les paroles de son mary cheist
devant lui toute pasmée à terre, de joie de veoir ses enfans. Elle fut
tantost relevée et quant elle fut relevée elle prist ses deux enfans et
doulcement les acola et baisa, tellement qu’elle les couvrist tous de
larmes, ne l’en ne les povoit oster d’entre ses bras, dont c’estoit
grant pitié à veoir. Les dames et damoiselles joyeusement plourans
prirent leur dame Grisilidis et tantost l’enmenèrent en une chambre
et lui dévestirent ses povres robes et vestemens et la revestirent
des autres et la receurent à marquise comme il appartenoit. Léans eut
une telle solemnité et telle joie de ce que les enfans du marquis
estoient retournés à inestimable consolation de la mère, du marquis et
de ses amis et subjects, que par tout le pays la grant joie en fust
respandue, et ce jour ou palais de Saluces eut de pitié maintes larmes
respandues, ne ne se povoient saouler de léalment recorder les grans
vertus non pareilles de Grisilidis qui mieulx sembloit estre fille
d’un empereur par contenance, ou de Salemon par prudence, que fille
du povre Jehannicola. La feste fut trop plus grande et plus joyeuse
qu’elle n’avoit esté de leurs nopces, et vesquirent depuis ensemble
le marquis et la marquise l’espace de vingt ans en grant amour, paix
et concorde. Et quant est de Jehannicola père de Grisilidis duquel le
marquis n’avoit fait compte ès temps passés pour esprouver sa fille,
icellui marquis le fist translater ou palais de Saluces et là le tint
le marquis à grant honneur tous les jours de sa vie. Sa fille aussi
maria icellui marquis haultement et puissamment, et aussi, quant son
fils fut en aage, il le maria et ot enfans lesquels il vit; et après sa
fin gracieuse il laissa son fils hoir et successeur de Saluces, à grant
consolation de tous ses amis et subjects.

Chère seur, ceste histoire fut translatée par maistre François Pétrac
poëte couronné à Romme, non mie pour mouvoir les bonnes dames à avoir
patience ès tribulations que leur font leurs maris pour l’amour
d’iceulx maris tant seulement, mais fut translatée pour monstrer que
puisque ainsi est que Dieu, l’Église et raison veullent qu’elles soient
obéissans, et que leurs maris veullent qu’elles aient tant à souffrir,
et que pour pis eschever il leur est nécessité de eulx soubsmettre du
tout à la voulenté de leurs maris et endurer patiemment ce que iceux
maris veulent, et que encores et néantmoins icelles bonnes dames les
doient celer et taire et nonobstant ce les rappaisier, rappeller, et
elles retraire et raprouchier tousjours joyeusement à la grâce et
amour d’iceulx maris qui sont mortels, par plus forte raison doivent
hommes et femmes souffrir patiemment les tribulations que Dieu qui est
immortel, éternel et pardurable leur envoie, et nonobstant mortalité
d’amis, perte de biens, d’enfans, ne de lignage, desconfiture par
ennemis, prises, occisions, pertes, feu, tempestes, orage de temps,
ravine d’eaue ou autres tribulations soudaines, tousjours le doit-on
souffrir patiemment et retourner joindre et rappeller amoureusement et
attraiement[224] à l’amour du souverain immortel, éternel et pardurable
seigneur, par l’exemple de ceste povre femme née en povreté, de menues
gens sans honneur et science, qui tant souffri pour son mortel ami.

Et je qui seulement pour vous endoctriner l’ay mise cy, ne l’y ay pas
mise pour l’applicquer à vous, ne pour ce que je vueille de vous telle
obéissance, car je n’en suis mie digne, et aussi je ne suis mie marquis
ne ne vous ay prise bergière, ne je ne suis si fol, si oultrecuidié,
ne si jeune de sens, que je ne doie bien savoir que ce n’appartient
pas à moy de vous faire tels assaulx, ne essais ou semblables. Dieu
me gart de vous, par ceste manière ne par autres, soubs couleur de
faulses simulations, vous en essaier! Ne autrement en quelque manière
ne vous vueil-je point essaier, car à moy souffist bien l’espreuve jà
faicte par la bonne renommée de vos prédécesseurs et de vous, avecques
ce que je sens et voy à l’ueil et congnois par vraie expérience. Et me
excuse se l’histoire parle de trop grant cruaulté, à mon advis, plus
que de raison. Et croy que ce ne fust oncques vray, mais l’histoire est
telle et ne la doy pas corriger ne faire autre, car plus sage de moy la
compila et intitula. Et désire bien que puisque autres l’ont veue, que
aussi vous la véez et sachiez de tout parler comme les autres.

Ainsi, chère seur, comme j’ay dit devant que vous devez estre obéissant
à cellui qui sera vostre mary, et que par bonne obéissance une
preudefemme acquiert l’amour de son mary, et en la fin a de lui ce
qu’elle désire: ainsi puis-je dire que par deffault d’obéissance, ou
par haultesse se vous l’emprenez, vous destruisez vous et vostre mary
et vostre mesnaige. Et j’en tray à exemple un raconte qui dit ainsi:
Il advint que deux mariés eurent contention l’un contre l’autre, c’est
assavoir la femme contre le mary; car chascun d’eulx se disoit estre
le plus sage, le plus noble de lignée et le plus digne, et allégoient
comme fols plusieurs raisons l’un contre l’autre, et si aigrement garda
la femme sa rigueur contre le mary qui au commencement, par aventure,
ne l’avoit pas doctrinée doulcement, que pour eschever dommageux
esclandre il convint que amis s’en entremissent. Plusieurs assemblées
d’amis en furent faictes, plusieurs reprouches entregectés, et nul
remède n’y povoit estre trouvé que la femme par son orgueil ne voulsist
avoir ses drois tous esclarcis par poins, et que les obéissances et
services que les amis disoient qu’elle devoit faire à son mary lui
fussent mis et escripts par articles d’une part, et autant et autel à
son mary pour elle d’autre part; et à tant devoient demourer ensemble,
se non en amour, ou mains en paix. Ainsi fut fait et demourèrent depuis
par aucun temps que la femme gardoit et garda estroitement son droit
par sa cédule contre son mary, ouquel mary, pour pis eschever, il
convenoit avoir ou faindre patience en despit qu’il en eust, car il
avoit pris trop tart à l’amender.

Un jour aloient en pélerinage et leur convint passer un fossé pardessus
une estroite planche. Le mary passa le premier, puis se retourna et
vist que sa femme estoit paoureuse et n’osoit passer après luy; si
doubta le mary que s’elle passoit, la paour mesmes ne la feist cheoir,
et retourna charitablement à elle et la print et tint par la main; et
en la menant du long de la planche, la tenoit, et en parlant à elle
l’asseuroit qu’elle n’eust point paour, et tousjours parloit à elle et
aloit le bons homs à reculons; si chéy en l’eaue qui estoit parfonde
et se combatist fort en l’eaue pour eschever le péril de noyer, si
s’arresta et se tint à une vieille planche qui de grant temps passé y
estoit cheute et qui là flotoit, et dist à sa femme que à l’aide de son
bourdon qu’elle portoit, elle tirast la planche au bort de l’eaue pour
lui sauver. Elle luy respondi: Nennil, nennil, dist-elle, je regarderay
premièrement en ma cédule s’il y est escript que je le doie faire, et
s’il y est, je le feray: et autrement, non. Elle y regarda, et pour
ce que sa cédule n’en faisoit point mention, elle luy respondi qu’elle
n’en feroit rien, et le laissa et s’en ala. Le mary fut en l’eaue lonc
temps et tant qu’il fut sur le point de morir. Le seigneur du pays et
ses gens passèrent par illecques et le virent et le rescouirent qu’il
estoit près de mort. Ils le feirent chaufer et aisier, et quant la
parole lui fut revenue, l’en lui demanda le cas: il le raconta comme
dessus; le seigneur fist suivir et prendre la femme et la fist ardoir.
Or véez quelle fin son orgueil lui donna, qui par sa grant inobédience
vouloit si estroitement garder sa raison contre son mary.

Et, par Dieu, il n’est pas tousjours saison de dire à son souverain:
Je n’en feray riens, ce n’est pas raison; plus de bien vient d’obéir,
et pour ce je tray à exemple la parole de la benoite vierge Marie,
quant l’ange Gabriel luy apporta la nouvelle que nostre Seigneur
s’enumbreroit en elle. Elle ne respondi pas: ce n’est pas raison, je
suis pucelle et vierge, je n’en souffreray rien, je seroie diffamée;
mais elle obéissamment respondi: _Fiat michi secundum verbum tuum_,
qui vault autant à dire comme: ce qui luy plaist soit fait. Ainsi
elle fut vraie humble et obéissant, et par son humilité et obéissance
grant bien nous est venu, et par inobédience et orgueil grant mal et
mauvaise conclusion vient, comme il est dit dessus de celle qui fut
arse, et comme on lit en la Bible de Ève, par la désobéissance et
orgueil de laquelle elle et toutes celles qui après elle sont venues
et vendront, furent et ont esté par la bouche de Dieu mauldictes. Car,
si comme dit l’Historieur, pour ce que Ève pécha doublement elle eust
deux maléditions. Premièrement, quand elle s’éleva par orgueil et
que elle voult estre semblable à Dieu: pour ce fut-elle abaissiée et
humiliée en la première malédition où Dieu dist ainsi: _Multiplicabo
ærumnas tuas et sub potestate viri eris, et ipse dominabitur tibi_.
C’est à dire: Je multiplieray tes peines, tu seras soubs la puissance
d’homme, et il aura seignourie sur toy. L’Histoire dit que avant
qu’elle péchast, elle estoit bien aucunement subjecte à homme pour ce
qu’elle avoit esté faicte d’homme et de la coste d’icellui, mais icelle
subjection estoit moult doulce et attrempée et naissoit de droicte
obéissance et fine[225] voulenté, mais après ceste malédition, elle fut
de tout en tout subjecte par nécessité et voulsist ou non, et toutes
les autres qui d’elle vindrent et vendront ont eu et auront à souffrir
et obéir à ce que leurs maris vouldront faire, et seront tenues de
entériner[226] leurs commandemens. La seconde malédition fut telle:
_Multiplicabo conceptus tuos; in dolore paries filios tuos_. Dist Dieu:
Je multiplieray tes concevemens, c’est à dire: tu concevras plusieurs
enfans en douleur, et en travail enfanteras tes fils. L’Histoire dit
que la malédition ne fut pas pour l’enfant, mais de la douleur que
femmes ont à l’enfanter.

Aussi véez-vous la malédition que nostre Seigneur voult donner pour
la désobéissance[227] de Lucifer. Car jadis Lucifer fut le plus
solemnel ange, et le mieulx amé et le plus prouchain de Dieu qui fust
adoncques en paradis, et pour ce estoit-il de tous appellé Lucifer,
c’est _quasi lucem ferens_, qui est à dire portant lumière, car au
regart des autres toute clarté et toute joie estoit où il venoit pour
ce qu’il représentoit et donnoit souvenance d’icellui souverain
Seigneur qui tant l’amoit et dont il venoit et duquel il estoit si
prouchain. Et si tost que icelluy Lucifer laissa humilité et en orgueil
haussa son courage, le mist nostre Seigneur plus loing de luy, car
il le fist trébuchier plus bas que nul autre, c’est assavoir ou plus
parfont d’enfer où il est le plus ort, le pire et le plus meschant des
meschans. Aussi pareillement sachiez que vous serez si prouchaine de
vostre mary que partout où il vendra il portera mémoire, souvenance et
remembrance de vous. Et vous le véez de tous mariés, car tantost que
l’en voit le mary, l’en lui demande: comment le fait[228] vostre femme?
Et aussi, quant l’en voit la femme, l’en luy demande: comment le fait
vostre mary? Tant est la femme jointe avecques le mary.

Doncques véez-vous, tant par les jugemens de Dieu mesmes que par les
exemples dessus allégués, que se vous n’estes obéissant en toutes
choses grandes et petites à vostre mary qui sera, vous serez plus à
blasmer et punir de vostre dit mary que un autre qui luy désobéiroit,
en tant que vous estes plus prouchaine de lui. Se vous estiez moins
obéissant, et vostre chamberière luy feist par amours[229] et service
ou autrement, obéissance tellement que en vous délaissant il convenist
à elle commettre les espéciaulx besongnes qu’il vous devroit commettre,
et il ne vous commeist riens et vous laissast derrière, que diroient
vos amis? Que présumeroit vostre cuer quant il s’en apparcevroit?
Et puis que il auroit traîné[230] son plaisir illecques, comment le
pourriez-vous depuis retraire? Certes, il ne serait mie en vostre
puissance.

Et, pour Dieu, gardez-vous que ce meschief n’aviengne, que une seule
fois il prengne autruy service que le vostre. Et doncques vous
soient ses commandemens, mesmement les petis qui de prime face vous
sembleroient estre de nulle valeur ou estranges, tellement attachés
au cuer que de vos plaisirs ne vous chaille fors que des siens, et
gardez que par vostre main et par vous mesmes et en vostre personne
les siens soient achevés; et quant à lui ne à ses affaires qui vous
appartendront, ne souffrez aucun approucher, ne nul n’y mette la main
que vous, et les vostres affaires soient par vous commandés et commis à
vos enfans et à vos privés mesgnies qui sont dessoubs vous, à chascun
selon son endroit, et s’ils ne le font, si les en punissez.

Et pour ce que je vous ay dit que vous soiez obéissant à vostre mary
qui sera, c’est assavoir plus que à nul autre et pardessus toute
autre créature vivant, peut ceste parole d’obédience estre entendue
et à vous déclairée; c’est assavoir que en tous cas, en tous termes,
en tous lieux et en toutes saisons, vous faictes et acomplissiez
sans redargution tous ses commandemens quelconques. Car sachiez que
puis qu’il soit homme raisonnable et de bon sens naturel, il ne vous
commandera riens sans cause, ne ne vous laissera riens faire contre
raison. Jasoit-ce qu’ils sont aucunes femmes qui pardessus la raison
et sens de leurs maris veulent gloser et esplucher, et encores pour
faire les sages et les maistresses, font-elles plus devant les gens que
autrement, qui est le pis. Car jasoit-ce que je ne vueille mie dire
qu’elles ne doivent tout savoir et que leurs maris ne leur doivent
tout dire, toutesvoies ce doit estre dit et fait à part, et doit
venir du vouloir et de la courtoisie du mary, non mie de l’auctorité,
maistrise et seignourie de la femme qui le doie, par manière de
domination, interroguer devant la gent. Car devant la gent, pour
monstrer son obéissance et pour son honneur garder, n’en doit-elle
sonner mot, pour ce qu’il sembleroit à la gent qui ce orroient que le
mary eust accoustumé à rendre compte de ses vouloirs à sa femme, ce que
femme ne doit pas vouloir que l’en apparçoive, car en tel cas elles se
démonstreroient comme maistresses et dames, et à elles-mesmes feroient
grant blasme, et grant vilenie à leurs maris.

De rechief, aucunes sont à qui leurs maris commandent faire aucunes
choses qui à elles semblent petites et de petite valeur, et elles
n’ont pas regard à l’encontre de celluy de qui le commandement vient,
ne à l’obéissance qu’elles luy doivent, mais à la valeur de la chose
seulement, laquelle valeur elles jugent selon leur sens et non mie
aucunes fois selon la vérité, car elles ne la scevent pas, puisque
l’en ne leur a dicte. Exemple qui peut avenir: Un homme nommé Robert
qui me doit deux cens frans me vient dire adieu et dit qu’il s’en va
oultre mer et me dit telles paroles: Sire, fait-il, je vous doy deux
cens frans lesquels j’ay bailliés à ma femme qui ne vous congnoist,
mais je lui ay dit qu’elle les baille à celluy qui lui portera son nom
par escript de ma main, et véez-le-cy. Et à tant se part, et tantost
qu’il s’est party de moy, sans dire le cas, je le commande à garder à
ma femme à qui je me fie, laquelle ma femme le fait lire à un autre,
et quant elle voit que c’est le nom d’une femme, elle en pensant à mal
le gecte ou feu, et par courroux me vient dire qu’elle ne daigneroit
estre ma maquerelle. Cy a belle obéissance! Item, je lui bailleray
un festu ou un viés clou ou un caillou qui m’ont esté baillés pour
aucunes enseignes[231] d’aucuns grans cas, ou un fil ou une vergette
de bois pour mesure d’aucune grosse besongne dont, par oubliance ou
par autre adventure, je ne diray riens à ma femme du cas ne de la
matière, mais je luy bailleray pour garder espécialment; celle n’aura
regard fors à la valeur du fil ou de la vergette et autre compte ne
tendra de mon commandement, en despit de ce que je ne luy auray porté
honneur et révérence de lui dire le cas au long. Et communément telles
femmes rebelles, haultaines et couvertes[232], quant pour monstrer leur
maistrise elles ont tout honni[233], elles cuident, en elles excusant,
faire croire à leurs maris qu’elles cuidoient que ce fust un néant et
pour ce n’ont point fait leur commandement; mais se leurs maris sont
saiges, ils voient bien que c’est par desdaing et despit de ce qu’ils
ne leur avoient pas porté telle honneur que de leur dire le cas tantost
et sans délay, et par aventure ont le commandement en nonchalance par
leur fierté, ne ne leur chault en riens du desplaisir de leurs maris,
mais que[234] seulement elles ayent achoison d’elles excuser et dire:
ce n’estoit riens, mais se ce eust esté grant chose, je l’eusse fait.
Et pour tant, ce leur semble, seront excusées, mais il leur semble
mal, car jasoit-ce que lors le mari n’en die rien adonc, toutesvoies
elles perdent tousjours le nom de la vertu d’obéissance, et la tache
de la désobéissance demeure long temps après dedens le cuer du mary si
attachée qu’à une autre fois il en souviendra au mary quant la femme
cuidera que la paix soit faicte et que le mary l’ait oublié. Or escheve
donc femme ce dangereux péril, et prengne garde à ce que dit l’apostre
_Ad Hebreos_ XIIIº: _Obedite_, etc.

Or dit encores cest article que la femme doit obéir à son mary et
faire ses commandemens quelconques grans et petis, et mesmes les très
petis; ne il ne convient point que vostre mary vous die la cause de son
commandement, ne qui le meut, car ce sembleroit un signe de le vouloir
ou non vouloir faire selon ce que la cause vous sembleroit ou bonne ou
autre, ce qui ne doit pas cheoir en vous ne en vostre jugement, car
à lui appartient de le savoir tout seul, et à vous n’appartient pas
de luy demander, se ce n’est après, à vous deux seulement et à privé.
Car pardessus son commandement vous ne devez avoir en quelque chose
reculement, reffus, retardement ou délay, ne pardessus sa deffence
rien faire, corrigier, acroistre, apeticier, eslargir ou estrecier en
quelque manière; car en tout et partout, soit bien, soit mal que vous
ayez fait, vous estes quictes et délivres en disant: mon mary le m’a
commandé. Encores, se mal vient par vostre ouvrage, si dit-l’en d’une
femme mariée: elle fist bien puis que son mary luy commanda, car en ce
faisant elle fist son devoir. Et ainsi, au pis venir, vous en seriez
non mie seulement excusée, mais bien louée.

Et à ce propos je vous diray une piteuse merveille et que je plain
bien[235]. Je sçay une femme de très grant nom en bourgeoisie qui est
mariée à une bonne personne, et sont deux bonnes créatures, jeunes
gens paisibles, et qui ont de beaux petis enfans. La femme est blasmée
d’avoir receu la compaignie d’un grant seigneur, mais, par Dieu,
quant l’on en parle, les autres femmes et hommes qui scevent le cas,
et mesmement ceux qui héent ce péchié, dient que la femme n’en doit
point estre blasmée, car son mary luy commanda. Le cas est tel qu’ils
demeurent en une des plus grans cités de ce royaume. Son mary et
plusieurs autres bourgois furent de par le Roy emprisonnés pour une
rébellion que le commun avoit faicte. Chascun jour l’en en coppoit les
testes à trois ou à quatre d’iceulx. Elle et les autres femmes d’iceulx
prisonniers estoient chascun jour devers les seigneurs, plourans et
agenoillans, et les mains joinctes requérans que l’en eust pitié et
miséricorde et entendist-l’en à la délivrance de leurs maris. L’un
des seigneurs qui estoit entour le Roy, comme non crémant Dieu ne sa
justice, mais comme cruel et félon tirant, fist dire à icelle bourgoise
que s’elle vouloit faire sa voulenté, sans faulte il feroit délivrer
son mary. Elle ne respondi riens sur ce, mais dist au messaige que
pour l’amour de Dieu il feist par devers ceulx qui gardoient son mary
en la prison qu’elle veist son mary et qu’elle parlast à luy. Et ainsi
fut fait, car elle fut mise en prison avec son mary, et toute plourant
luy dist ce qu’elle véoit ou povoit apparcevoir des autres, et aussi
de l’estat de sa délivrance, et la vilaine requeste que l’en lui avoit
faicte. Son mary luy commanda que comment qu’il fust elle feist tant
qu’il eschappast sans mort, et qu’elle n’y espargnast ne son corps,
ne son honneur, ne autre chose, pour le sauver et rescourre sa vie. A
tant se partirent l’un de l’autre, tous deux plourans. Plusieurs des
autres prisonniers bourgois furent décapités, son mary fut délivré. Si
l’excuse-l’en d’un si grant cas que, supposé encores qu’il soit vray,
si n’y a-elle ne péchié ne coulpe, ne n’y commist délit ne mauvaistié
quant son mary luy commanda, mais le fist, pour sauver son mary,
sagement et comme bonne femme. Mais toutesvoies, je laisse le cas
qui est vilain à raconter et trop grant, (maudit soit le tirant qui
ce fist!) et revien à mon propos que l’en doit obéir à son mary, et
laisseray les grans cas et prendray les petis cas d’esbatement.

Par Dieu, je croy que quant deux bonnes preudes gens sont mariés,
toutes autres amours sont reculées, annichilées et oubliées, fors
d’eulx deux, et me semble que quant ils sont présens et l’un devant
l’autre, ils s’entre-regardent plus que autres, ils s’entre-pincent,
ils s’entre-hurtent, et ne font signe ne ne parlent voulentiers, fors
l’un à l’autre. Et quant ils s’entr’éloignent, si pensent-ils l’un
à l’autre, et dient en leur cuer: quant je le verray, je luy feray
ainsi, je luy diray ainsi, je le prieray de tel chose. Et tous leurs
plaisirs espéciaulx, leurs principaulx désirs et leurs parfaictes joies
sont de faire les plaisirs et obéissances l’un de l’autre, et s’ils
s’entre-aiment, il ne leur chault de obéissance ne de révérence, fors
le commun qui est trop petite entre plusieurs.

Et à ce propos de jeux et esbatemens entre les maris et les femmes,
par Dieu, j’ay ouy dire au bailli de Tournay[236] qu’il a esté en
plusieurs compaignies et disners avecques hommes qui estoient de long
temps mariés, et avecques iceulx a fait plusieurs bourgages[237] et
gaigeures de païer le disner qu’ils auroient fait et plusieurs escos et
disners à païer sur condition que d’illecques tous les compaignons de
l’escot iroient ensemble en l’hostel de tous iceulx mariés, l’un après
l’autre, et celluy de l’assemblée qui aroit femme si obéissant qu’il
la peust arrangéement et sans faillir faire compter jusques à quatre,
sans arrest, contradition, mocquerie ou réplication, seroit quicte de
l’escot, et cellui ou ceulx de qui les femmes seroient rebelles et
répliqueroient, mocqueroient ou desdiroient, icelluy escot rendroient,
ou chascun autant. Et quant ainsi estoit accordé, l’en aloit adoncques
par droit esbatement et par droit jeu en l’hostel Robin qui appelloit
Marie sa femme qui bien faisoit la gorgue[238], et devant tous le mary
luy disoit: Marie, dictes après moy ce que je diray. Voulentiers,
sire.--Marie dictes: empreu[239],--empreu--et deux--et deux--et
trois... Adonc, Marie un peu fièrement disoit: et sept, et douze, et
quatorze! Esgar[240]! vous mocquez-vous de moy? Ainsi le mary Marie
perdoit. Après ce, l’en aloit en l’hostel Jehan qui appelloit Agnesot
sa femme qui bien savoit faire la dame, et luy disoit: dictes après moy
ce que je diray--Empreu.--Agnesot disoit par desdain: et deux. Adonc
perdoit. Tassin disoit à dame Tassine: Empreu.--Tassine par orgueil
disoit en hault: C’est de nouvel! Ou disoit: Je ne suis mie enfant pour
aprendre à compter. Ou disoit: or çà, de par Dieu, esgar, estes-vous
devenu ménestrier? Et les semblables. Et ainsi perdoit; et tous ceulx
qui avoient espousées les jeunes bien aprises et bien endoctrinées
gaignoient et estoient joyeux.

Regardez mesmes que Dieu qui est sage sur toute sagesse fist pour
ce que Adam, désobéissant et mesprisant le commandement de Dieu ou
deffense, menga la pomme (qui estoit peu de chose à luy que une pomme),
et comment il en fut courroucié; il ne se courrouça pas pour la pomme,
mais pour la désobéissance et le petit compte qu’il tenoit de luy.
Regardez comment il ama la vierge Marie pour son obéissance. Regardez
des obéissances et fais d’Abraham, dont il est parlé cy dessus à deux
feuillets près, qui par simple mandement fist si grans et terribles
choses sans demander la cause. Regardez de Grisilidis, quels fais elle
supporta et endura en son cuer sans demander cause pour quoy, et si
n’y povoit estre apparceu ne considéré cause aucune, ne couleur de
cause, proufit à venir, ne nécessité de faire, fors que seule voulenté
terrible et espoventable, et si n’en demandoit ne n’en disoit mot, et
dont elle acquist telle louenge que maintenant que sommes cinq cens ans
après sa mort, il est lecture de son bien.

Et n’est mie maintenant commencement de faire doctrine de l’obéissance
des femmes envers leurs maris. Il est trouvé en Genesy, ou XXIXe
chappitre, que Loth et sa femme se partirent d’une cité; Loth deffendit
à sa femme qu’elle ne regardast point derrière ly. Elle s’en tint une
pièce, et après mesprisa le commandement et y regarda. Incontinent,
Dieu la converti en une pierre de sel, et la demoura, et encores est
telle et sera. C’est propre texte de la Bible et le nous convient
croire par nécessité, ou autrement nous ne serions pas bons chrestiens.
Or véez-vous, se Dieu essayoit adoncques ses amis et ses serviteurs en
bien petites choses, comme pour une pomme l’un, pour regarder derrière
luy l’autre, aussi n’est-ce pas merveille se les maris qui par leur
bonté ont mis tout leur cuer, toutes leurs joies et esbatemens en leurs
femmes et arrière mises toutes autres amours, preignent plaisir en leur
obéissance, et par amoureux esbatement et à autruy non nuisibles les
essayer.

Et pour ce, en reprenant ce que dessus, comment les maris essaient
l’obéissance des femmes, jasoit-ce que ce ne soit que jeu, toutesvoies
à tous qui estoient désobéis et qui par ce perdoient, le cuer leur
douloit de la mocquerie et de la perte, et quelque semblant qu’ils
en feissent, ils en estoient tous honteux et moins amoureux de leurs
femmes qui leur estoient peu humbles, craintives et obéissans, ce
qu’elles ne devoient pas estre en tant soit petite chose, toutesvoies
s’il n’y avoit grant cause, laquelle cause elle luy devroit dire en
secret et à part. Et sont aucunes fois les jeunes et fols maris si
meschans que sans raison que par petites et inutiles achoisons[241]
dont les commencemens sont venus par jeu et de néant, et par
continuelles désobéissances de leurs preudefemmes, ils amassent et
amoncellent un secret et couvert courroux en leurs cuers dont pis
vient à tous les deux, et aucunes fois se acointent de meschans et
deshonnestes femmes qui les obéissent en toutes choses et honnorent
plus qu’ils ne sont honnorés de leurs preudefemmes; adonc, iceulx
mariés comme fols se assotent[242] d’icelles méchans femmes qui
scevent garder leur paix et iceulx honnorer et obéir à tous propos et
faire leurs plaisirs. Car, ne doubtez, il n’est nul si meschant mary
qui ne vueille estre obéy et esjoy de sa femme, et quant les maris
se treuvent mieulx obéis autre part que devant n’estoient en leurs
hostels, si laissent comme fols à nonchalance[243] leurs espouses
pour les haultesses et désobéissances d’icelles, lesquelles en sont
depuis courroucées après, quant icelles mariées voient que en toutes
compaignies elles ne sont mie si honnourées comme celles qui sont
accompaigniées de leurs maris qui[244] jà, comme fols, sont si fort
par le cuer enlassiés que l’en ne les peut descharner[245]. Et l’en ne
peut mie si légièrement reprendre son oisel quant il est eschappé de la
cage comme de garder qu’il ne s’envole: aussi ne pevent-elles retraire
les cuers de leurs maris, quant iceulx maris ont essayé et trouvé
meilleure obéissance ailleurs, et icelles en donnent à leurs maris la
coulpe qui est à elles mesmes.

Chère seur, vous véez que comme il est dit des hommes et femmes, l’en
peut dire des bestes sauvaiges, et encores non mie seulement des bestes
sauvaiges, mais des bestes qui ont acoustumé à ravir et à dévorer,
comme ours, loups et lyons: car icelles bestes aprivoise-l’en et
attrait-l’en par leur faire leurs plaisirs, et vont après et suivent
ceulx qui les servent, acompaignent et aiment; et fait-l’en les ours
chevauchier, les singes et autres bestes saillir, dancer, tumber et
obéir à tout ce que le maistre veult; et aussi par ceste raison vous
puis-je monstrer que vostre mary vous chérira, aimera et gardera se
vous pensez à luy faire le sien plaisir. Et pour ce que j’ay dit, et
j’ay dit voir, que les bestes ravissables sont apprivoisées etc., je
dy par le contraire, et vous le trouverez, que non mie seulement vos
maris, mais vos pères et mères, vos seurs, vous estrangeront se vous
leur estes farouche et ne leur soiez débonnaire et obéissant.

Or savez-vous bien que vostre principal manoir, vostre principal labour
et amour et vostre principal compaignie est de vostre mary, pour
l’amour et compaignie duquel vous estes riche et honnorée, et se il se
desfuit, retrait ou eslonge de vous par vostre inobédience ou autre
quelque cause que ce soit, à tort ou à droit, vous demourrez seule et
despariée, et si vous en sera donné le blasme et en serez moins prisée,
et se une seule fois il ait ce mal de vous, à paine le pourriez-vous
jamais rappaisier que la tache du maltalent ne luy demeure en son
cuer pourtraicte et escripte tellement que jasoit-ce qu’il n’en
monstre rien, ne ne die, elle ne pourra estre de long temps planée ou
effaciée. Et se la seconde désobéissance revient, gardez-vous de la
vengence de laquelle il sera parlé cy après en ce mesmes chappitre
et article, ou § _Mais encores_ etc.[246] Et pour ce, je vous prie,
aimez, servez et obéissez vos maris, mesmes ès très petites choses
d’esbatement, car aucunes fois essaie-l’en en très petites choses, bien
petites, d’esbatement, et qui semblent de nulle valeur pour ce que la
désobéissance d’icelles porte petit dommaige, pour essayer, et par
ce scet-l’en comment l’en se doit attendre d’estre obéy ès grans ou
désobéy; voire mesmement ès choses bien estranges et sauvaiges et dont
vostre mary vous fera commandement soit par jeu ou à certes, si di-je
que vous devez incontinent obéir.

Et à ce propos je tray un raconte qui dit: Trois abbés et trois mariés
estoient en une compaignie, et entre eulx mut une question en disant
lesquels estoient plus obéissans, ou les femmes à leurs maris, ou les
religieux à leur abbé; et sur ce eurent moult de paroles, d’argumens
et exemples racontés d’une part et d’autre. Se les exemples estoient
vrais, je ne sçay: mais en conclusion ils demourèrent contraires et
ordonnèrent que une preuve s’en feroit loyaument, et secrètement
jurée entre eulx par foy et par serement, c’est assavoir que chascun
des abbés commanderoit à chascun de ses moines que sans le sceu des
autres il laissast la nuit sa chambre ouverte et unes verges soubs son
chevet, en attendant la discipline que son abbé luy vouldroit donner;
et chascun des maris commanderoit secrètement à sa femme, à leur
couchier, et sans ce que aucun de leur mesgnie en sceussent rien, ne
aucun fors eulx deux, qu’elle meist et laissast toute nuit un balay
derrière l’uis de leur chambre; et dedens huit jours rassembleroient
illecques les abbés et les mariés, et jureroient lors d’avoir exécuté
leur essay et de rapporter justement et loyaument, sans fraude, ce
qui en seroit ensuivi; et ceulx ou des abbés ou des mariés à qui l’en
auroit moins obéy paieroient un escot de dix frans. Ainsi fut acordé
et exécuté. Le rapport de chascun des abbés fut tel que, sur l’âme
d’eulx, ils et chascun d’eulx avoient fait le commandement à chascun
de leurs moines, et à mienuit chascun avoit reviseté chascune chambre
et avoient trouvé leur commandement acompli. Les mariés firent après
leur rappors l’un après l’autre. Le premier dit qu’il fist, avant
couchier, secrètement le commandement à sa femme qui luy demanda moult
fort à quoy c’estoit bon et que ce vauldroit. Il ne le voult dire.
Elle refusoit adonc à le faire, et il adonc fist semblant de soy
courroucier, et pour ce elle luy promist qu’elle le feroit. Le soir ils
se couchèrent et envoièrent leurs gens qui emportèrent la clarté[247].
Il fist adoncques lever sa femme et oy bien qu’elle mist le balay.
Il lui en sceut bon gré et s’endormi un petit, et tantost après se
resveilla et senti bien que sa femme dormoit; si se leva tout bellement
et ala à l’uis et ne trouva point de balay, et se recoucha secrètement
et esveilla sa femme et lui demanda se le balay estoit derrière l’uis;
elle luy dist: oil. Il dit que non estoit et qu’il y avoit esté. Et
lors elle luy dit: par Dieu, pour[248] perdre la meilleur robe que
j’aye, je ne l’y eusse laissié, car quant vous fustes endormy, les
cheveulx me commencèrent à hérisser, et commençay à tressuer et n’eusse
peu dormir tant qu’il eust esté en ceste chambre; si l’ay gecté en
la rue par les fenestres. L’autre dit que depuis ce qu’ils estoient
couchiés il avoit fait relever sa femme, et en grant desplaisance
elle toute courroucée avoit mis le balay derrière l’uis, mais elle
s’estoit revestue incontinent, et parti de la chambre en disant
qu’elle ne coucheroit jà en chambre où il fust, et que voirement ils
pussent les ennemis d’enfer venir; et ala couchier toute vestue avec
sa chamberière. L’autre dit que sa femme lui avoit respondu qu’elle
n’estoit venue ne yssue d’enchanteurs ne de sorciers, et qu’elle ne
savoit jouer des basteaulx[249] de nuit, ne des balais[250], et pour
mourir elle ne le feroit, ne ne consentiroit, ne jamais en l’hostel ne
gerroit s’il estoit fait.

Ainsi les moines furent obéissans en plus grant chose et à leur abbé
qui est plus estrange: mais c’est raison, car ils sont hommes; et les
femmes mariées furent moins obéissans et en mendre chose et à leurs
propres maris qui leur doivent estre plus espéciaulx, car c’est leur
nature, car elles sont femmes; et par elles perdirent leurs maris dix
frans et furent déceus de leur oultrageuse vantance, qui se estoient
vantés de l’obéissance de leurs femmes. Mais je vous pry, belle seur,
ne soiez pas de celles, mais plus obéissant à vostre mary qui sera,
et en petite choses, et en estranges, soit à certes, par jeu, par
esbatement, ou autrement: car tout est bon.

Par Dieu, je veis à Meleun[251] une chose aussi bien estrange, un
jour que le sire d’Andresel estoit capitaine de la ville; car en
plusieurs lieux les Anglois estoient logiés à l’environ: les Navarrois
estoient logiés dedens le chastel. Et un après-disner le dit sire
d’Andresel[252] estoit à la porte et luy ennuyoit et se démenoit
qu’il ne savoit où aler esbatre pour passer le jour; un escuier luy
dit: Sire, voulez-vous aler veoir une damoiselle demourant en ceste
ville qui fait quanque son mary luy commande? Le sire d’Andresel
lui respondi: oyl, alons. Lors il se prirent à aler, et en alant
fut monstré au sire d’Andresel un escuier duquel l’en luy dit que
c’estoit le mary d’icelle demoiselle. Le sire d’Andresel l’appella et
lui demanda se sa femme faisoit ce qu’il lui commandoit. Et icellui
escuier luy dit: par Dieu, Sire, oy, s’il n’y a villenie grant. Et
le sire d’Andresel luy dit: Je mettray à vous pour un disner, que je
vous conseilleray à luy faire faire telle chose où il n’y aura point
de villenie et si ne le fera pas. L’escuier respondi: Certes, Sire,
elle le feroit et gaigneroie; et par autres plusieurs manières puis-je
gaignier plus honnourablement avecques vous, et par ceste aray-je plus
d’onneur à perdre et païer le disner; si vous prie que vous gaigez
qu’elle le fera et je gaigerai que non. Le sire d’Andresel dit: Je
vous commande que vous gaigiez ainsi que j’ay dit. Adonc l’escuier
obéist et accepta la gaigeure. Le sire d’Andresel vouloit estre présent
et tous ceulx qui là estoient; l’escuier dist qu’il le vouloit bien.
Adoncques le sire d’Andresel qui tenoit un baston lui dit: Je vueil que
si tost que nous serons arrivés, et sans dire autre chose, que devant
nous tous vous direz à vostre femme qu’elle saille pardessus ce baston
devant nous trestous, et que ce soit fait sans froncier ou guigner ou
faire aucun signe. Ainsi fut fait, car tous entrèrent en l’hostel de
l’escuier ensemble. Et incontinent la damoiselle leur vint au devant.
L’escuier mist et tint à terre le baston et dit: Damoiselle, saillez
par cy dessus! Elle saillit tantost. Il lui dist: Resaillez! Elle
resaillit encores. Saillez! Elle sailli trois fois sans dire un seul
mot fors que voulentiers. Le sire d’Andresel fut tout esbahi et dit
qu’il devoit et paieroit le disner l’endemain en son hostel d’Andresel.
Et tantost se partirent tous pour aler là; et tantost qu’il fut entré
en la porte d’Andresel, la dame d’Andresel vint au devant et s’enclina.
Tantost que le sire d’Andresel fut descendu, il qui tenoit encores
le baston pardessus lequel la damoiselle avoit sailli à Meleun, mist
icellui baston à terre et cuida pardessus icelluy faire saillir la dame
d’Andresel qui de ce faire fut refusant; dont le sire d’Andresel fut
parfaictement courroucié. Et du surplus je me tais, et pour cause: mais
tant en puis-je bien dire, et le sçay bien, que s’elle eust acompli le
commandement de son mary, lequel il faisoit plus pour jeu et pour essay
que pour prouffit, elle eust mieulx gardé son honneur et mieux lui en
eust pris; mais à aucunes ne vient pas tousjours bien et à aucunes si
fait.

Et encores à ce propos je puis bien dire une chose bien aussi estrange,
que une fois, ès jours d’esté, je venoie de devers Chaumont en Bassigny
à Paris, et à une heure de vespres me arrestay pour logier en la ville
de Bar sur Aube. Plusieurs des jeunes hommes de la ville mariés en
icelle, desquels aucuns avoient à moy aucune congnoissance, vindrent
à moy prier de soupper avecques eulx, si comme ils disoient, et
disoient leur cas estre tel: ils estoient plusieurs hommes jeunes et
assez nouvellement mariés et à jeunes femmes, et s’estoient trouvés en
une compaignie sans autres gens sages, si avoient enquis de l’estat
l’un de l’autre et trouvèrent par les dis d’un chascun que chascun
d’eulx cuidoit avoit la meilleur et la plus obéissant femme de toutes
obéissances, commandemens et défenses, petites ou grans. Si avoient
pour ce prins complot, si comme ils disoient, d’aler tous ensemble en
chascun hostel de chascun d’eulx, et là le seigneur demanderoit à sa
femme une esguille, ou une espingle, ou unes forcettes[253], ou la
clef de leur coffre, ou aucune chose semblable; et se la femme disoit:
_à quoy faire?_ ou: _qu’en ferez-vous?_ ou: _est-ce à certes?_ ou:
_vous mocquez-vous de moy?_ ou: _je n’en ay point_, ou elle ait autre
réplication ou retardement, le mary paieroit un franc pour le soupper;
et se sans rédargution ou délaier elle bailloit tantost à son mary ce
qu’il demandoit, le mary estoit tenus pour bien eureux d’avoir si saige
femme et obéissant, et pour sage homme de la maintenir et garder en
icelle obéissance et estoit assis au plus hault et ne paieroit riens.

Et jasoit-ce qu’ils soient aucunes femmes qui à telles menues
estranges choses ne se sauroient ou daigneroient fléchir, mais les
desdaigneroient et mespriseroient et tous ceulx et celles qui ainsi en
useroient, toutesvoies, belle seur, povez-vous bien savoir qu’il est
nécessité que d’aucune chose nature se resjoïsse; mesmes les povres,
les impotens, les maladifs ou enlangourés et ceulx qui sont au lit
de la mort preignent et quièrent plaisir et joye, et par plus forte
raison les sains. Des uns tout leur déduit est de chasser ou vouler:
des autres de jouer d’instrumens: des autres noer[254], ou dancer, ou
chanter, ou jouster: chascun selon sa condition prent son plaisir;
mesmes le vostre quérez-vous diversement en quelques choses diverses;
doncques, se vostre mary qui sera a telle imagination qu’il vueille
prendre son plaisir ou en vostre service ou en vostre obéissance telle
que dessus, si l’en servez et saoulez, et sachiez que Dieu vous aura
fait plus grant grâce que vostre mary prengne plaisir plus en vous
que en une autre chose; car se vous estes la clef de son plaisir, il
vous servira, suivra et aimera pour ce, et s’il a plaisir à autre
chose, il la suivra et serez derrière. Si vous conseille et admonneste
de faire son plaisir en très petites choses et très estranges et en
toutes, et se ainsi le faictes-vous, ses enfans et vous mesmes serez
son ménestrier et ses joyes et plaisirs, et ne prendra pas ses joyes
ailleurs, et sera un grant bien et une grant paix et honneur pour vous.

Et s’il advient que d’aucune besongne il n’ait point souvenu à vostre
mary quant il s’est parti de vous, et pour ce ne vous en ait parlé,
ne commandé, ne deffendu, toutesvoies devez-vous faire à son plaisir,
quelque plaisir que vous ayez autre, et devez délaisser vostre plaisir
et mettre derrière et tousjours son plaisir mettre devant; mais se la
besongne estoit pesant et de telle attendue que vous peussiez luy faire
savoir, rescrivez luy comment vous créez que sa voulenté soit de faire
ainsi etc. et pour ce vous aiez vouloir de faire à son plaisir, mais
pour ce que en ce faisant tel inconvénient s’en peut ensuir, et telle
perte et tel dommage aussi, et qu’il vous semble qu’il seroit mieulx et
plus honnourable ainsi et ainsi etc., laquelle chose vous n’osez faire
sans son congié, qu’il lui plaise vous mander son vouloir sur ce, et
son mandement vous acomplirez de très bon cuer, de tout vostre povoir
etc.

Toutes ne font pas ainsi, dont il leur mesvient à la fin, et puis
quant elles sont moins prisées et elles voient les bonnes obéissans
qui sont bieneurées, acompaignées et aimées de leurs maris, icelles
meschans qui ne sont ainsi en guerroient sus à fortune et dient que ce
a fait fortune qui leur a couru sus, et la mauvaistié de leurs maris
qui ne se fient mie tant en elles; mais elles mentent, ce n’a pas fait
fortune: ce a fait leur inobédience et irrévérence qu’elles ont envers
leurs maris qui après ce qu’ils ont moult de fois défailly vers elles
qui leur ont désobéy et irrévéré, ne s’y osent plus fier, et ont quis
iceulx maris et trouvé obéissance ailleurs où ils se fient.

Et me souvient, par Dieu, que je vis une de vos cousines qui bien aime
vous et moy, et si fait son mary, et vint à moy disant ainsi: Cousin,
nous avons telle besongne à faire, et me semble qu’elle seroit bien
faicte ainsi et ainsi, et me plairoit bien; que vous en semble? Et
je luy dis: Le premier point est de savoir le conseil de vostre mary
et son plaisir; luy en avez-vous point parlé? Et elle me respondi:
par Dieu, cousin, nennil; car par divers moyens et estranges parlers,
j’ay sentu qu’il vouldroit ainsi et ainsi, et non pas comme je dy,
et j’aroie trop chier de la faire comme j’ay dit. Et vous savez,
cousin, qu’il est maindre blasme de faire aucune chose sans le congié
de son souverain que après sa deffense, et je suis certaine qu’il
le me deffendroit et suis certaine qu’il vous aime et tient bonne
personne, et se j’avoie ainsi fait comme je dy, par vostre conseil,
quelque chose qu’il en advenist, puis que je me excuseroie de vostre
conseil, il seroit de légier appaisié, tant vous aime. Et je luy dis:
puis qu’il m’aime, je le doy amer et faire son plaisir, et pour ce
je vous conseille que vous ouvrez selon son plaisir et mettez lei
vostre plaisir au néant. Et autre chose ne peut avoir et s’en parti
toute courroucée de ce que je ne lui aidie à achever sa voulenté qui
estoit toute contraire à la voulenté de son mary; et du courroux de
son mary ne luy chaloit puis qu’elle eust esté oye à dire: _Vous ne
le m’avez point autrement commandé etc. vostre cousin le me conseilla
ainsi à faire_. Or véez-vous son courage et comment la femme est bien
entalentée de faire un grant plaisir à son mary et quelle obéissance
elle luy donne!

Chère seur, aucunes autres femmes sont, qui quant elles ont désir de
faire une chose en une manière, mais icelle doubte que son mary ne le
vueille pas ainsi, si n’en dure ou pose, et frétille et frémie, et
quant elle apperçoit que son mary et elle sont à seul et parlent de
leurs besongnes, affaires et esbatemens, et la femme par aucuns parlers
prouchains à aucune matière enquiert soubtillement et sent de icelle
besongne que son mary entend à faire et poursuivre par autre voie
qu’elle ne voulsist, adonc la femme met son mary en autre propos, afin
que d’icelluy il ne luy die mie oultréement: _de celle besongne faictes
ainsi_; et cautement se passe et met son mary en autres termes et
concluent sur autre besongne loingtaine à celle. Et tantost que icelle
femme voit son point, elle fait faire icelle première besongne à son
plaisir et ne luy chault du plaisir de son mary duquel elle ne tient
compte et s’atend à soy excuser pour dire: _vous ne m’en avez riens
dit_, car à elle ne chault du courroux ne du desplaisir de son mary,
mais que le sien passe et que sa voulenté soit faicte. Et me semble
que c’est mal fait d’ainsi barater, décevoir et essaier son mary; mais
plusieurs sont, qui tels essais et plusieurs autres font, dont c’est
mal fait, car l’on doit tousjours tendre à faire le plaisir de son
mary quant il est sage et raisonnable; et quant l’en essaie son mary
couvertement et cautement, soubs couverture malicieuse et estrange,
supposé que ce soit pour mieux exploictier, si est-ce mal fait, car
avec son mary l’en ne doit mie besongnier par aguet ou malice, mais
plainement et rondement, cuer à cuer.

Mais encores est-ce pis quant la femme a mary preudomme et débonnaire
et elle le laisse pour espérance d’avoir pardon ou excusation de mal
faire, si comme il est trouvé ou livre des Sept Sages de Romme[255] que
en la cité avoit un sage vefve, ancien de grant aage, et moult riche
de terre et de bonne renommée qui jadis avoit eu deux femmes espousées
qui estoient trespassées. Ses amis lui dirent que encores il prist
femme. Il leur dist que ils la luy quéissent et que il la prendroit
voulentiers. Ils la luy quirent belle et jeune et advenant de corps,
car à peine verrez-vous jà si vieil homme qui ne prengne voulentiers
jeune femme. Il ot espousé: la dame fut avecques lui un an que point
ne luy feist ce que vous savez. Or avoit icelle dame une mère; un jour
elle estoit au moustier emprès sa mère, si luy dist tout bas qu’elle
n’avoit nul soulas de son seigneur et pour ce elle vouloit amer. Fille,
dist la mère, se tu le faisoies, il t’en mesprendroit trop asprement,
car certes il n’est nulle si grant vengence que de vieil homme, et
pour ce, se tu me crois, ce ne feras-tu mie, car tu ne pourroies jamais
rapaisier ton mary. La fille respondi que si feroit. La mère luy dist:
quant autrement ne peut estre, je vueil que tu essaies, avant, ton
mary. Voulentiers, dist la fille, je le essaieray ainsi: il a en son
vergier une ante[256] qui est tant belle et qu’il aime plus que tous
autres arbres, je la coupperay: si verray se je le pourray rapaisier. A
cest accord demourèrent et à tant se partirent hors du moustier.

La jeune dame s’en vint à son hostel et trouva que son seigneur estoit
alé esbatre aux champs. Si prent une coignée, vient à l’ante, et y
commence à férir à dextre et à sénestre tant qu’elle la couppa, et
la fist tronçonner par un varlet et apporter au feu. Et ainsi que
celluy l’apportoit, le seigneur entra en son hostel et voit celluy
qui apportoit les tronçons de l’ante en sa main; le seigneur demanda:
dont vient ceste buche? La dame luy respondi: Je viens oresendroit du
moustier et l’en me dist que vous estiez alés aux champs: si doubtay,
pour ce qu’il avoit pleu, que vous ne retournissiez moullié et que
vous eussiez froit, si alay en ce vergier et couppay ceste ante: car
céans n’avoit point de buche. Dame, dit le seigneur, c’est ma bonne
ante! Certes, sire, fait la dame, je ne sçay. Le seigneur s’en vint en
son vergier et vit la souche de l’ante qu’il amoit tant, si fut iriés
assez plus que il ne monstroit le semblant et s’en revint et treuve
la dame qui de l’ante faisoit le feu et sembloit qu’elle le feist en
bonne pensée pour luy chauffer. Quant le seigneur fust venus, si dist
tels mots: Ores, dame, ce est ma bonne ante que vous avez couppée!
Sire, dit la dame, je ne m’en prins garde, car certes je le fis pour
ce que je savoie bien que vous venriez tout moullié et tout empluyé,
si doubtay que vous n’eussiez froit et que le froit ne vous feist mal.
Dame, dit le seigneur, je lairay ce ester[257] pour ce que vous dictes
que vous le feistes pour moy.

L’endemain la dame revint au moustier et trouva sa mère à laquelle
dit: J’ay mon seigneur essayé et couppé l’ante, mais il ne me fist
nul semblant qu’il fust moult iriés et pour ce sachiez, mère, que
j’aimeray.--Non feras, belle fille, dit la mère, laisse ester.--Certes,
dist la fille, si feray; je ne m’en pourroie plus tenir.--Belle fille,
dist la mère, puis qu’ainsi est que tu dis que tu ne t’en pourroies
tenir, essaie donc encores ton mary. Dist la fille: voulentiers, je
l’essaieray encores ainsi: il a une levrière que il aime à merveilles,
ne il n’en prendroit nul denier, tant est bonne, ne ne souffreroit pas
que nul de ses varlès la chassast hors du feu, ne que nul luy donnast à
mengier sinon luy: et je la tueray devant luy.

A tant s’en départirent. La fille s’en revint en son hostel; il fut
tart et fit froit, le feu fut beau et cler et les lis furent bien parés
et couvers de belles coustes-pointes[258] et de tapis, et la dame fut
vestue d’une pelice toute neufve. Le seigneur vint des champs. La dame
se leva encontre luy; si luy osta le mantel et puis luy voult oster les
esperons, mais le seigneur ne le voult pas souffrir, ains les fit oster
à un de ses varlès; moult s’offry la dame à luy servir: elle court,
si luy apporte un mantel de deux draps[259] et si luy met sur les
espaules et appareille une chaire[260] et met un quarrel[261] dessus,
et le fait seoir au feu et luy dit ainsi: Sire, certainement vous estes
tout pâle de froit, chauffez-vous et aisiez très bien! Ainsi qu’elle ot
ce dit, si se assit emprès luy et plus bas que luy sur une selle[262]
et estendi la robe[263] de sa pelice, regardant tousjours son mary.
Quant la levrière vit le beau feu, elle vint par sa mésaventure, si
se couche tantost sur le pan de la robe et de la pelice de la dame,
et la dame advise emprès elle un varlet qui avoit un grant coustel,
si le sache et en fiert parmy le corps d’icelle levrière qui commença
illecques à pestiller[264] et mourut devant le mary. Dame, fait-il,
comment avez-vous esté si osée comme de tuer, en ma présence, ma
levrière que j’amoie tant?--Sire, fait la dame, ne véez-vous chascun
jour comme il nous attournent? Il ne sera nuls deux jours qu’il ne
conviengne faire buée[265] céans pour vos chiens! Or regardez de ma
pelice que je n’avoie onquesmais vestue, quelle elle est attournée!
Cuidiez-vous que je n’en soye iriée? L’ancien sage respondi: Par Dieu!
c’est mal fait et vous en sçay très mauvais gré, mais maintenant je
n’en parleray plus. La dame dit: Sire, vous povez faire de moy vostre
plaisir, car je suis vostre et si sachiez bien que je me repens de ce
que en ay fait, car je sçay bien que vous l’aimiez moult; si me poise
de ce que je vous ay courroucié. Quant elle ot ce dit, si fist moult
grant semblant de plourer. Quant le seigneur vit ce, si ce laissa ester.

Et quant vint à l’endemain qu’elle fust alée au moustier, si trouva sa
mère à laquelle elle dit comment luy estoit advenu et que vraiement,
puisque ainsi bien luy estoit advenu et que ainsi bien lui en eschéoit,
qu’elle aimeroit. Ha! belle fille, dit la mère, non feras, tu t’en
pourras bien tenir.--Certes, dame, non feray. Alors dit la mère: Belle
fille, je me suis toute ma vie bien tenue à ton père, oncques telle
folie ne fis, ne n’en eus talent.--Ha! dame, respondi la fille, il
n’est mie ainsi de moy comme il est de vous, car vous assemblastes
entre vous et mon père jeunes gens; si avez eues vos joies ensemble,
mais je n’ay du mien joie ne soulas: si me convient à pourchasser.--Or,
belle fille, et se amer te convient, qui aimeras-tu?--Mère, dit la
fille, j’aimeray le chappellain de ceste ville, car prestres et
religieux craingnent honte et sont plus secrets. Je ne vouldroie
jamais amer un chevalier, car il se vanteroit plus tost et gaberoit de
moy et me demanderoit mes gages[266] à engager.--Ores, belle fille,
fais encores à mon conseil et essaye encores ton seigneur. Dist la
fille: Essaier tant et tant, et encores et encores, ainsi ne fineroie
jamais!--Par mon chief! fait la mère, tu l’essaieras encores par mon
los[267], car tu ne verras jà si male vengence ne si cruelle comme de
vieil homme.--Or, dame, fit la fille, voulentiers feray encores vostre
commandement, et l’essaieray ainsi: il sera jeudi le jour de Noël, si
tendra mon seigneur grant tinel[268] de ses parens et autres amis, car
tous les vavasseurs de ceste ville y seront, et je me seray assise au
chief de la table en une chaire; si tost comme le premier mès[269] sera
assis, je aray mes clefs meslées ès franges de la nappe, et quant je
auray ce fait, je me leveray à coup et tireray tout à moy et feray tout
espandre et verser quanque il y aura sur la table, et puis appaiseray
tout. Ainsi auray essaié mon seigneur par trois fois de trois grans
essais, et légièrement rappaisié, et à ce savez-vous bien que ainsi
légièrement le rappaiseray-je des cas plus obscurs et couvers et ès
quels ne pourra déposer[270] que par souspeçon.--Ores belle fille, dist
la mère, Dieu te doint bien faire!

Adonc se partirent; chascune vint en son hostel. La fille servit
cordieusement, par semblant, et moult attraiement et bien son seigneur,
et moult bel, tant que le jour de Noël vint. Les vavasseurs de Romme
et les damoiselles furent venues, les tables furent drécées et les
nappes mises, et tous s’assirent, et la dame fist la gouverneresse et
l’embesongnée et s’assist au chief de la table en une chaire, et les
serviteurs apportèrent le premier mès et brouets sur table. Ainsi comme
les varlès tranchans orent commencié à tranchier, la dame entortille
ses clefs ès franges de la fin de la nappe et quant elle sceut qu’elles
y furent bien entortillées, elle se liève à un coup et fait un grant
pas arrière, ainsi comme se elle eust chancelé en levant; si tire la
nappe, et escuelles plaines de brouet, et hanaps plains de vin, et
sausses versent et espandent tout quanque il y avoit sur la table.
Quant le seigneur vit ce, si ot honte et fu moult courroucié et luy
remembra des choses précédens. Aussitost la dame osta ses clefs qui
estoient entortillées en la nappe.--Dame, fit le seigneur, mal avez
exploictié!--Sire, fait la dame, je n’en puis mais, je aloie querre
vos cousteaulx à tranchier qui n’estoient mie sur table, si m’en
pesoit.--Dame, fit le seigneur, or nous apportez autres nappes. La dame
fit apporter autres nappes, et autres mès recommencent à venir. Ils
mengièrent liement, ne le seigneur n’en fit nul semblant d’ire ne de
courroux, et quant ils orent assez mengié et le seigneur les ot moult
honnourés, si s’en départirent.

Le seigneur souffri celle nuit tant qu’il vint à l’endemain. Lors luy
dit: Dame, vous m’avez fait trois grans desplaisirs et courroux, se je
puis vous ne me ferez mie le quart; et je sçay bien que ce vous a fait
faire mauvais sang: il vous convient saignier. Il mande le barbier et
fait faire le feu. La dame luy dit: Sire, que voulez-vous faire? Je ne
fus onques saignée.--Tant vault pis, fait le seigneur, encommencier le
vous convient: les trois mauvaises emprises que vous m’avez faictes, ce
vous a fait faire mauvais sang.

Lors luy fait eschauffer le bras destre au feu, et quant il fut
eschauffé, si la fist saignier; tant saigna que le gros et vermeil sang
vint. Lors la fist le seigneur estanchier, et puis luy fait l’autre
bras traire hors de la robe. La dame commence à crier mercy. Riens ne
luy vault, car il la fit eschauffer et saignier de ce second bras; et
commença à saignier: tant la tint qu’elle s’esvanoui, et perdi la
parolle et devint toute de morte couleur. Quant le seigneur vit ce,
si la fist estanchier et porter en son lit en sa chambre. Quant elle
revint de pamoison, si commença à crier et plourer et manda sa mère qui
tantost vint; et quant elle fut devant ly, tous vuidèrent la chambre
et les laissèrent ambedeux seul à seul. Quant la dame vit sa mère, si
luy dist: Ha! mère, je suis morte; mon seigneur m’a fait tant saignier
que je cuide bien que je ne jouiray jamais de mon corps.--Or, fille,
je pensoie bien que mauvais sang te démengoit: or me di, ma fille,
as-tu plus talent d’amer?--Certes, dame, nennil.--Fille, ne te di-je
bien que jà ne verroies si cruel vengence comme de vieil homme?--Dame,
oïl; mais, pour Dieu, aidiez-moi à relever et secourir à ma santé, et
par m’âme, mère, je n’aimeray jamais.--Belle fille, fait la mère, tu
feras que sage. Ton seigneur est bon preudomme et sage, aime-le et
sers, et croy qu’il ne t’en peut venir que bien et honneur.--Certes,
mère, je sçay ores bien que vous me donnastes et donnez bon conseil
et je le croiray d’ores-en-avant et honnoureray mon mary et jamais ne
l’essaieray ne ne courrouceray.

Chère seur, assez souffist quant à ce point, qui a la voulenté de
retenir et de bien obéir, car sur ceste matière d’obéissance, nous
avons cy dessus parlé de ce qui est à faire quant le mary commande
petites choses par jeu, à certes ou autrement, et puis de ce qui est à
faire quant le mary n’a commandé ne deffendu pour ce que à luy n’en est
souvenu, et tiercement des excès que les femmes font pour acomplir leur
vouloir oultre et pardessus le vouloir de leurs maris. Et maintenant
à ce derrière nous parlerons que l’en ne face pas contre la défense
d’iceulx, soit en petit cas ou en grant, car du faire c’est trop mal
fait. Et je commence ès petis cas ès quels on doit obéir aussi bien;
je le monstre mesmes par les jugemens de Dieu, car vous savez, chère
seur, que par la désobéissance de Adam qui pardessus la défense de
Dieu menga une pomme qui est pou de chose, tout le monde fut mis en
servaige. Et pour ce je vous conseille que les très petites choses et
de très petite valeur et ne fust fors d’un festu que vostre mary qui
sera après moy vous commandera à garder, que vous, sans enquerre pour
quoy ne à quelle fin, puis que la parole sera telle yssue de la bouche
de vostre mary qui sera, vous fectes et gardez très soingneusement et
très diligemment, car vous ne savez, ne ne devez adonc enquérir, si
ne le vous dist de son mouvement, qui à ce le meut ou a meu: se il a
cause, ou se il le fait pour vous essaier. Car, s’il a cause, donc
estes-vous bien tenue de le garder, et s’il n’y a point de cause,
mais le fait pour vous essaier, donc devez-vous bien vouloir qu’il
vous treuve obéissant et diligent à ses commandemens, et mesmement
devez penser que puisque sur un néant il vous treuvera obéissant à son
vouloir et que vous en tenrez grant compte, croira-il que sur un gros
cas vous trouveroit-il encores en cent doubles plus obéissant. Et vous
véez que nostre Seigneur commist à Adam de luy garder pou de chose,
c’est assavoir un seul pommier, et povez penser que nostre Seigneur ne
se courrouça pas à Adam pour une seule pomme, car à si grant seigneur
c’estoit bien pou de chose que une pomme, mais luy despleut pour
la mesprenture de Adam qui si pou avoit prisié son commandement ou
défense quant pour si pou d’avantage luy désobéissoit. Et aussi véez
et considérez que de tant que Adam estoit plus près de nostre Seigneur
qui l’avoit fait de sa propre main et le tenoit son famillier et garde
de son jardin, de tant fut nostre Seigneur pour pou de chose plus
aigrement meu contre luy; et puis la désobéissance ne voult sanctifier:
et par semblable raison, de tant que vous estes plus prouchaine et près
de vostre mary, seroit-il contre vous plus tost et pour mendre chose
plus aigrement courroucié, comme nostre Seigneur se courrouça à Lucifer
qui estoit plus prouchain de luy.

Mais aucunes femmes sont, qui cuident trop soubtillement eschapper,
car quant leur mary leur a deffendu aucune chose qui leur pleust
à faire et voulsissent bien faire, elles délayent et attendent et
passent temps jusques à ce que la deffense soit entr’oubliée par le
mary, ou qu’il s’en soit alé, ou qu’il est chargié d’autres si gros
fait que d’icelluy ne luy souvient. Et après, tantost, incontinent et
hastivement, la femme fait icelle besongne à son plaisir et contre la
voulenté et deffense du mary, ou la fait faire par ses gens disant:
faictes hardiement! Monseigneur ne s’en apparcevra jà, il n’en saura
riens. Or véez-vous que par ce, ceste est, en son courage et voulenté,
pure rebelle et désobéissant, et sa malice et mauvaistié qui riens ne
vallent empirent son cas et démonstrent plainement son mauvais courage.
Et sachiez qu’il n’est riens qui à la parfin ne soit sceu, et quant
le mary le saura, et apparcevra que celle sépare l’union de leurs
voulentés qui doivent estre tout un, comme dit est devant, icelluy mary
s’en taira par adventure comme fit le sage de Romme dont il est parlé
cy devant en l’article, mais son cuer en sera si parfondément navré que
jamais n’en garira, mais toutes fois qu’il lui en souvendra naistra
nouvelle douleur.

Si vous pry, chère seur, que de tels essais et entreprinses à faire à
autre mary que à moy, se vous l’avez, vous vous gaittiez et gardez très
espécialement, mais vostre courage et le sien soient tout un, comme
vous et moy sommes à présent; et ce souffist quant à cest article.



SEPTIÈME ARTICLE.


Le septiesme article de la première distinction doit monstrer que vous
devez estre curieuse et songneuse de la personne de vostre mary. Sur
quoy, belle seur, se vous avez autre mary après moy, sachiez que vous
devez moult penser de sa personne, car puis que une femme a perdu
son premier mary et mariage, communément à paine treuve-elle, selon
son estat, le second à son advenant, ains demeure toute esgarée et
desconseillée long temps; et par plus grant raison quant elle pert le
second. Et pour ce aimez la personne de vostre mary songneusement, et
vous pry que vous le tenez nettement de linge, car en vous en est, et
pour ce que aux hommes est la cure et soing des besongnes de dehors, et
en doivent les maris soignier, aler, venir et recourir de çà et de là,
par pluies, par vens, par neges, par gresles, une fois moullié, autre
fois sec, une fois suant, autre fois tremblant, mal peu, mal herbergié,
mal chauffé, mal couchié. Et tout ne luy fait mal pour ce qu’il est
reconforté de l’espérance qu’il a aux cures que la femme prendra de
luy à son retour, aux aises, aux joies et aux plaisirs qu’elle luy
fera ou fera faire devant elle; d’estre deschaux à bon feu, d’estre
lavé les piés, avoir chausses[271] et soulers frais, bien peu, bien
abeuvré, bien servi, bien seignouri, bien couchié en blans draps, et
cueuvrechiefs[272] blans, bien couvert de bonnes fourrures, et assouvi
des autres joies et esbatemens, privetés, amours et secrets dont je me
tais. Et l’endemain, robes-linges[273] et vestemens nouveaulx.

Certes, belle seur, tels services font amer et désirer à homme le
retour de son hostel et veoir sa preudefemme et estre estrange des
autres. Et pour ce je vous conseille à reconforter ainsi vostre autre
mary à toutes ses venues et demeures, et y persévérez; et aussi à luy
tenir bonne paix, et vous souviengne du proverbe rural qui dit que
trois choses sont qui chassent le preudomme hors de sa maison, c’est
assavoir maison descouverte, cheminée fumeuse et femme rioteuse. Et
pour ce, chère seur, je vous prie que pour vous tenir en l’amour
et grâce de vostre mary, soyez luy doulce amiable et débonnaire.
Faictes-luy ce que les bonnes simples femmes de nostre païs dient que
l’en a fait à leurs fils quant ils sont enamourés autre part et elles
n’en pevent chevir. Il est certain que quant les pères ou les mères
sont morts, et les parrastres et marrastres qui ont fillastres les
arguent, tencent et estrangent, et ne pensent de leur couchier, de leur
boire ou mengier, de leur chausses, chemises, ne autres nécessités
ou affaires, et iceulx enfans trouvent ailleurs aucun bon retrait
et conseil d’aucune autre femme qui les recueille avecques elle et
laquelle pense de leur chauffer à aucun povre tison avec elles, de leur
couchier, de les tenir nettement, à faire rappareiller leurs chausses,
brayes[274], chemises et autres vestemens, iceulx enfans les suivent et
désirent leur compaignie et estre couchiés et eschauffés entre leurs
mamelles, et du tout en tout s’estrangent de leurs mères ou pères qui
par avant n’en tenoient compte, et maintenant les voulsissent retraire
et ravoir, mais ce ne peut estre, car iceulx enfans ont plus cher la
compagnie des plus estranges qui de eux pensent et aient soing que de
leurs plus prouchains qui d’eulx ne tiennent compte. Et puis brayent
et crient, et dient que icelles femmes ont leurs enfans ensorcellés,
et sont enchantés, et ne les pevent laissier, ne ne sont aises se
ils ne sont avecques elles. Mais, quoy que l’en die, ce n’est point
ensorcellement, c’est pour les amours, les curialités, les privetés,
joies et plaisirs qu’elles leur font en toutes manières, et par m’âme,
il n’est autre ensorcellement. Car qui à un ours, un lou ou un lyon
feroit tous ses plaisirs, icelluy ours, lou ou lyon feroit et suivroit
ceulx qui ce luy feroient, et par pareille parole pourroient dire les
autres bestes, se elles parloient, que icelles qui ainsi seroient
aprivoisées serroient ensorcellées. Et, par m’âme, je ne croy mie qu’il
soit autre ensorcellement que de bien faire, ne l’en ne peut mieulx
ensorceller un homme que de luy faire son plaisir[275].

Et pour ce, chère seur, je vous pry que le mary que vous arez vous
le vueillez ainsi ensorceller et rensorceller et le gardez de maison
maucouverte et de cheminée fumeuse et ne luy soyez pas rioteuse, mais
doulce, amiable et paisible. Gardez en yver qu’il ait bon feu sans
fumée, et entre vos mamelles bien couchié, bien couvert, et illec
l’ensorcellez. Et en esté gardez que en vostre chambre ne en vostre
lit n’ait nulles puces, ce que vous povez faire en six manières, si
comme j’ay oy dire. Car, j’ay entendu par aucuns, qui sème sa chambre
de fueilles d’aune, les puces s’y prennent. Item, j’ay oy dire que qui
aroit de nuit un ou plusieurs tranchouers[276] qui feussent pardessus
oins de glus ou de trébentine et mis parmy la chambre, ou millieu de
chascun tranchouer une chandelle ardant, elles s’y venroient engluer
et prendre. L’autre que j’ay essayé et est vray: prenez un drap
estru[277] et le estendez parmy vostre chambre et sur vostre lit, et
toutes les puces qui s’y pourront bouter s’y prendront, tellement que
vous les pourrez porter avec le drap où vous vouldrez. Item des peaulx
de mouton. Item, j’ai veu mettre des blanchets[278] sur le feurre[279]
et sur le lit, et quant les puces qui noires estoient s’y estoient
boutées, l’en les trouvoit plus tost parmy le blanc et les tuoit-l’en.
Mais le plus fort est de soy gaittier de celles qui sont ès
couvertures et ès pennes[280], ès draps des robes dont l’en se cueuvre.
Car sachiez que j’ay essaié que quant les couvertures, pennes ou robes
où il a puces sont enclos et enfermés serréement, comme en male bien
liée estroictement de courroies, ou en sac bien lié et pressé, ou
autrement mis et compressé que icelles puces soient sans jour et sans
air et tenues à destroit, ainsi périront et mourront sur heure. Item,
j’ay veu aucunes fois en plusieurs chambres que quant l’en estoit
couchié, l’en se trouvoit tout plain de cincenelles[281] qui à la fumée
de l’alaine se venoient asseoir sur le visage de ceulx qui dormoient
et les poingnoient si fort qu’il se convenoit lever et alumer du foing
pour faire fumée pour laquelle il les convenoit fuir ou mourir, et
aussi bien le pourroit-l’en faire de jour qui s’en doubteroit, et aussi
bien par un cincenellier[282], qui l’a, s’en peut-l’en garantir.

Et se vous avez chambre ou estage où il ait très grant repaire de
mouches, prenez petis floqueaux de feuchière[283] et les liez à
filets[284] comme filopes[285] et les tendez, et toutes les mouches
s’y logeront au vespre: puis destendez les filopes et les gectez
hors. Item, fermez très bien vostre chambre au vespre, mais qu’il y
ait seulement un petit pertuis ou mur devers Orient, et si tost que
l’aube esclarcira, toutes les mouches s’en yront par ce pertuis, puis
soit estoupé. Item, prenez une escuelle de lait et l’amer[286] d’un
lièvre et meslez l’un parmy l’autre, et puis mettez-en deux ou trois
escuelles ès lieux là où les mouches repairent, et toutes celles qui
en tasteront, mourront. Item, autrement, ayez une chausse de toille
liée au fons d’un pot qui ait le cul percié, et mettez icelluy pot ou
lieu où les mouches repairent et oingnez-le par dedens de miel, ou
de pommes, ou de poires; quant il sera bien garny de mouches, mettez
un tranchouer sur la gueule, et puis hochez[287]. Item, autrement,
prenez des ongnons rouges crus et les broiez et espraignez le jus en
une escuelle et le mettez où les mouches repairent, et toutes celles
qui en tasteront, mourront. Item, ayez des palettes pour les tuer à
la main. Item, aiez des vergettes[288] gluées sur un bacin d’eaue.
Item, aiez vos fenestres closes bien justement de toille cirée ou
autre, ou de parchemin ou autre chose[289] si justement que nulle
mouche y puisse entrer, et les mouches qui seront dedens soient tuées
à la palette ou autrement comme dessus, et les autres n’y entreront
plus. Item, ayez un cordon pendant et moullié en miel, les mouches y
vendront asseoir, et au soir soient prinses en un sac. En somme, il me
semble que les mouches ne se arresteront point en chambre où il n’ait
tables dréciées, fourmes[290], dreçouers, ou autres choses sur quoy
ils se puissent descendre et reposer, car se ils ne se pevent aherdre
ou arrester fors aux parois qui sont droites, ils ne s’y arresteront
point, ne aussi en lieu ombragé et moicte. Et pour ce me semble que se
la chambre est bien arrousée et bien close et bien fermée, et qu’il n’y
ait rien gisant sur le plat[291], jà mouche ne s’y arrestera.

Et ainsi le[292] garantissez et gardez de toutes mésaises et lui donnez
toutes les aises que vous pourrez penser et le servez et faictes
servir en vostre hostel, et vous attendez à luy des choses de dehors,
car s’il est bon, il en prendra plus de peine et travail que vous ne
vouldriez, et par faisant ce que dit est, il aura tousjours son regret
et son cuer à vous et à vostre amoureux service et guerpira tous autres
hostels, toutes autres femmes, tous autres services et mesnages: tout
ne lui sera que terre au regard de vous qui en penserez comme dit est
et que faire le devez par l’exemple mesmes que vous véez des gens
chevauchans parmy le monde, que vous véez que si tost qu’ils sont en
leur hostel revenus d’aucun voyage, ils font à leurs chevaulx blanche
lictière jusques au ventre, iceulx chevaulx sont defferrés et mis au
bas, ils sont emmiellés[293], ils ont foing trié, et avoine criblée,
et leur fait-l’en en leur hostel plus de bien à leur retour que en nul
autre lieu. Et par plus forte raison, se les chevaulx sont aisiés, les
personnes, mesmement les souverains[294], à leurs despens le soient à
leur retour. Aux chiens qui viennent des bois et de la chasse fait-l’en
lictière devant leur maistre, et luy mesmes leur fait lictière blanche
devant son feu; l’en leur oint de sain doulx leurs piés au feu, l’en
leur fait souppes, et sont aisiés par pitié de leur travail; et par
semblable, se les femmes font ainsi à leurs maris que font les gens
à leurs chevaulx, chiens, asnes, mulles et autres bestes, certes
les autres hostels où ils ont esté servis ne leur sembleroient que
prisons obscures et lieux estranges envers le leur qui leur sera donc
un paradis de repos. Et ainsi sur le chemin les maris auront regard
à leurs femmes, ne nulle peine ne leur sera griefve pour espérance
et amour qu’ils auront à leurs femmes auxquelles reveoir ils auront
aussi grant regret comme les povres hermites, les penanciers[295] et
les religieux abstinens ont de veoir la face Jhésu-Crist; ne iceulx
maris ainsi servis n’auront jamais voulenté d’autre repaire ne d’autre
compaignie, mais en seront gardés, reculés et retardés: tout le
remenant ne leur semblera que lit de pierres envers leur hostel; mais
que ce soit continué, et de bon cuer, sans faintise.

Mais aucunes vieilles sont, qui sont rusées et font les sages et
faignent grant amour par démonstrance de grant service de leur cuer,
sans autre chose; et sachez, belle seur, que les maris sont petit
sages se ils ne s’en apparçoivent; et quant ils s’en apparçoivent, et
le mary et la femme s’en taisent et dissimulent l’un contre l’autre,
c’est mauvais commencement et s’ensuit pire fin. Et aucunes femmes
sont, qui au commencement font trop bien leur service vers leurs maris,
et leur semble bien que leurs maris lesquels elles voient bien adonc
estre amoureux d’elles et vers elles débonnaires tellement, se leur
semble, que à peine se oseroient-ils courroucier à elles se elles en
faisoient moins, si se laschent et essaient petit à petit à moins
faire de révérence, de service et d’obéissance, mais, qui plus est,
entreprennent auctorité, commandement et seigneurie, une fois sur
un petit fait, après sur un plus grant, après un petit un jour, un
autre petit en un autre. Ainsi essaient et s’avancent et montent, se
leur semble, et cuident que leurs maris qui par débonnaireté, ou, par
adventure, par aguet s’en taisent, n’y voient goutte pour ce qu’ils le
seuffrent ainsi. Et certes ce n’est pas bien pensé ne servi, car quant
les maris voient qu’elles discontinuent leur service et montent en
domination et qu’elles en font trop et que du souffrir mal en pourroit
bien venir, elles sont à un coup, par la voulenté du droit de leurs
maris, trébuchées comme fut Lucifer qui estoit souverain des anges
de paradis, et lequel nostre Seigneur aima tant qu’il tollera et lui
souffri faire moult de ses voulentés, et il s’enorguilli et monta en
oultrecuidance. Tant fist et entreprist d’autres qu’il en fist trop,
et en despleut à nostre Seigneur qui longuement avoit dissimullé et
souffert sans dire mot, et lors à un coup tout luy vint à souvenance.
Si le trébucha ou plus parfont d’enfer pour ce qu’il ne continua
son service à quoy il estoit ordonné et pour lequel il avoit au
commencement acquis l’amour de nostre Seigneur qu’il avoit si grande.
Et pour ce devez-vous estre obéissant au commencement et tousjours
persévérer à cest exemple.



HUITIÈME ARTICLE.


Le huitiesme article de la première distinction dit que vous soiés
taisant ou au moins attrempéement parlant, et sage pour garder et
céler les secrets de vostre mary. Sur quoy, belle seur, sachiez que
toute personne qui s’eschauffe en sa parole n’est mie bien attrempé en
son sens, et pour ce sachez que savoir mettre frain en sa langue est
souveraine vertu, et moult de périls sont venus de trop parler, et par
espécial quant l’en prent paroles à gens arrogans, ou de grant courage,
ou gens de court de seigneurs. Et par espécial gardez-vous en tous
vos fais de prendre paroles à telles gens; et se par adventure telles
gens se addressent à vous, si les eschevez et laissiez sagement et
courtoisement, et ce sera souverainement grant sens à vous, et sachez
que d’ainsi faire il vous est pure nécessité; et jasoit-ce que le cuer
en face mal, toutesvoies le convient-il aucunes fois mestrier[296],
et n’est pas sage qui ne le puet faire, car il est trouvé un proverbe
rural qui dit que aucun n’est digne d’avoir seignourie ou maistrise sur
autruy qui ne peut estre maistre de luy mesmes.

Et pour ce, en ce cas et en tous autres, devez-vous si estre maistre de
vostre cuer et de vostre langue qu’elle soit subjecte à vostre raison,
et advisez toudis devant qui et à qui vous parlerez; et vous prie et
admoneste que soit en compaignie, soit à table, gardez-vous de trop
habondamment parler, car en habondance de paroles ne peut estre qu’il
n’en y ait aucune fois de mal assises aucunes, et dit-l’en aucunes
fois, par esbatement et par jeu, paroles de revel[297] qui depuis
sont prinses et recordées à part en grant dérision et mocquerie de
ceulx qui les ont dictes. Et pour ce gardez devant qui et de quoy vous
parlerez, ne à quel propos, et ce que vous direz, dictes à trait[298]
et simplement: et en parlant pensez que riens ne ysse qui ne doie yssir
et que la bride soit devant les dens pour refraindre le trop. Et soyez
bon secrétaire et aiez tousjours souvenance de garder les secrets de
vostre mary qui sera; premier[299] ses meffais, vices ou péchiés, se
vous en savez aucuns, célez-les et couvrez, mesmes sans son sceu,
afin qu’il ne s’en hontie, car à peine trouverez-vous aucun que s’il
a aucun amy qui apparçoive son péchié, jà puis ne le verra de si bon
cuer que devant et aura honte de luy et l’aura en regard. Et ainsi
vous conseille-je que ce que vostre mary vous dira en conseil, vous
ne le revélez point à quelque personne tant soit privée de vous, et
vainquez en ce la nature des femmes qui est telle, si comme l’en dit,
qu’elles ne pevent riens céler, c’est à dire les mauvaises et meschans.
Dont un philosophe appellé Macrobe raconte, et est trouvé ou livre du
Songe Scipion, qu’il estoit à Romme un enfant, jeune fils, qui avoit
nom Papire, qui une fois avec son père lequel estoit sénateur de Romme
s’en ala en la chambre des sénateurs, en laquelle chambre les sénateurs
rommains tenoient leur conseil. Et illecques firent serement que leur
conseil nul n’oseroit révéler sur paine de perdre la teste. Et quant
ils orent tenu conseil et l’enfant retourna à l’hostel, sa mère luy
demanda dont il venoit, et il respondi du conseil du Sénatoire avec
son père. La mère luy demanda quel conseil c’estoit; il dist qu’il ne
l’oseroit dire sur paine de mort. Adonc fut la mère plus en grant désir
de le savoir, et commença maintenant à flater, et en après à menacier
son fils qu’il luy dist. Et quant l’enfant vit qu’il ne povoit durer
à sa mère, si luy fist premièrement promettre qu’elle ne le diroit à
nulluy et elle luy promist. Après il luy dist ceste mençonge, c’est
assavoir que les sénateurs avoient eu en leur conseil entre eulx, ou
que un mary eust deux femmes, ou une femme deux maris. Quant la mère oy
ce, si luy deffendi qu’il ne le dist à nul autre, et puis s’en ala à
ses commères et leur dist le conseil en secret, et l’autre à l’autre,
et ainsi sceurent toutes ce conseil, chascune en son secret.

Si advint un pou après que toutes les femmes de Romme vindrent au
Sénatoire où les sénateurs estoient assemblés, et par moult de fois
crièrent à haulte voix qu’elles aimoient mieulx que une femme eust deux
maris que un homme deux femmes. Les sénateurs estoient tous esbahis et
ne savoient que ce vouloit dire, et se taisoient et regardoient l’un
l’autre en demandant dont ce venoit, jusques à tant que l’enfant Papire
leur compta tout le fait. Et quant les sénateurs oyrent ce, si en
furent tous courroucés et le firent sénateur et establirent que jamais
d’ores-en-avant nul enfant ne fust en leur compaignie.

Ainsi appert par ceste exemple que l’enfant masle qui estoit jeune
sceut céler et taire et évada, et la femme qui avoit aage convenable
pour avoir sens et discrétion ne sceut taire ne céler ce qu’elle avoit
juré et promis sur son serement, et mesmes le secret qui touchoit
l’honneur de son mary et de son fils.

Et encores est-ce le pis que quant femmes racontent aucune chose
l’une à l’autre, tousjours la derrenière y adjouste plus et accroist
la bourde et y met du sien, et l’autre encores plus. Et à ce propos
raconte-l’en un conte rural d’une bonne dame qui avoit acoustumé à soy
lever matin. Un jour ne se leva mie si matin qu’elle avoit acoustumé;
sa commère se doubta qu’elle ne feust malade, si l’ala veoir en son lit
et luy demanda moult qu’elle avoit. La bonne dame qui eut honte d’avoir
tant jeu, ne sceut que dire fors qu’elle estoit moult pesante et malade
et tellement qu’elle ne le sceut dire. La commère la pressa et pria
par amours qu’elle luy dist, et elle luy jura, promist, et fiança que
jamais ce qu’elle luy diroit ne seroit révélé pour rien de ce monde à
nulle créature vivant, père, mère, seur, frère, mary, ne confesseur, ne
autre. Après celle promesse et serement la bonne dame qui ne savoit que
dire, par adventure, luy dist que elle avoit un œuf ponnu. La commère
en fut moult esbahie et monstra semblant d’en estre bien courroucée,
et jura plus fort que devant que jamais parole n’en seroit révélée.

Assez tost après icelle commère se parti et en s’en retournant encontra
une autre commère qui luy emprist à dire dont elle venoit, et celle
tantost luy dist qu’elle venoit de veoir la bonne dame qui estoit
malade et avoit ponnu deux œufs, et luy pria et aussi l’autre luy
promist que ce seroit secret. L’autre encontra une autre et en secret
luy dist que la bonne dame avoit ponnu quatre œufs: l’autre encontra
une autre et luy dist huit œufs, et ainsi de plus en plus multiplia
le nombre. La bonne dame se leva et sceut que par toute la ville l’en
disoit qu’elle avoit ponnu une pannerée d’œufs. Ainsi s’apparceut
comment femmes sont mal secrètes, et qui pis est le racontent tousjours
en pire endroit.

Et pour ce, belle seur, sachiez vos secrets céler a tous, vostre
mary excepté, et ce sera grant sens, car ne créez pas que une autre
personne cèle pour vous ce que vous mesmes n’arez peu ou sceu céler;
et pour ce soyez secrète et célant à tous fors à vostre mary, car à
celluy ne devez-vous riens céler, mais tout dire, et luy à vous aussi
ensemble. Et il est dit _Ad Ephesios_ Vº: _Sic viri debent diligere
uxores scilicet ut corpora sua_. Ideo ibidem dicitur: _Viri diligite
uxores vestras_; et _Unusquisque uxorem suam diligat sicut se ipsum_,
c’est à dire quel’homme doit amer sa femme comme son propre corps, et
pour ce, vous deux, c’est assavoir l’homme et la femme, devez estre
tout un, et en tout et partout l’un de l’autre conseil ouvrer, et ainsi
font et doivent faire les bonnes et sages gens. Et vueil bien que les
maris sachent que aussi doivent-ils céler et couvrir les simplesses
jà faictes par leurs femmes, et doulcement pourveoir aux simplesses à
venir. Et ainsi le voult faire un bon preudome de Venise.

A Venise furent deux mariés qui orent trois enfans en mariage. Après,
la femme fu gisant au lit de la mort et se confessa, entre les autres
choses, de ce que l’un des enfans n’estoit pas de son mary. Le
confesseur à la parfin luy dist qu’il auroit advis quel conseil il luy
donroit et retourneroit à elle. Icelluy confesseur vint au phisicien
qui la gouvernoit et luy demanda l’estat de la maladie d’elle. Le
phisicien dist qu’elle n’en pourroit eschapper. Adonc le confesseur
vint à elle et luy dist comment il s’estoit conseillié de son cas et
ne véoit mie que Dieu luy donnast santé, se elle ne crioit mercy à son
mary du tort qu’elle luy avoit fait. Elle manda son mary et fist tous
vuidier hors de la chambre excepté sa mère et son confesseur qui la
mirent et soustindrent dedens son lit à genoulx, et les mains joinctes
devant son mary, luy pria humblement mercy de ce qu’elle avoit péchié
en la loy de son mariage et avoit eu l’un de ses enfans d’autre que de
luy: et disoit oultre, mais son mary l’escria en disant: Ho! ho! ho!
n’en dictes plus! Sur ce la baisa et luy pardonna en disant: Jamais
plus ne le dictes, ne nommez à moy ne à autre lequel c’est de vos
enfans, car je les vueil aimer autant l’un comme l’autre si également
que en vostre vie ne après vostre mort vous ne soïez blasmée, car
en vostre blasme aroie-je honte, et vos enfans mesmes et autres par
eulx, c’est assavoir nos parens, en recevroient vilain et perpétuel
reprouche. Si vous en taisiez: je n’en vueil plus savoir afin que l’en
ne die mie que je face tort aux autres deux. Qui que cestuy soit, je
luy donne en pur don, dès maintenant, à mon vivant, ce que le droit de
nos successions luy monteroit.

Belle seur, ainsi véez-vous que le sage homme fleschi son courage pour
saulver l’onneur de sa femme qui redondoit à luy et à ses enfans, et
par ce vous appert que les sages hommes et les sages femmes doivent
faire l’un pour l’autre pour sauver son honneur. Et à ce propos peut
estre trait autre exemple.

Il fut un grant sage homme que sa femme laissa pour aler avec un autre
homme jeune en Avignon, lequel quant il en fut saoul la laissa, comme
il est acoustumé que tels jeunes hommes font souvent. Elle fut povre
et desconfortée; si se mist au commun pour ce qu’elle ne sceut de quoi
vivre. Son mary le sceut depuis et en fut moult courroucié et mist le
remède qui s’ensuit. Il mist à cheval deux des frères de la femme et
leur donna de l’argent et leur dist qu’ils alassent querre leur seur
qui estoit ainsi comme toute commune en Avignon, et qu’elle feust
vestue de housse et chargiée de coquilles, à l’usage de pelerins venant
de Saint Jaques, et montée souffisament, et quant elle seroit à une
journée près de Paris, qu’ils le luy mandassent. A tant se partirent.
Le sage homme publia et dist partout à un et à autre qu’il estoit bien
joyeulx de ce que sa femme retournoit en bon point, Dieu mercy, de là
où il l’avoit envoyée, et quant on luy demandoit où il l’avoit envoyée,
il disoit qu’il l’avoit pieçà envoyée à Saint Jaques en Galice pour
faire pour luy un pélérinage que son père à son trespassement luy avoit
enchargié. Chascun estoit tout esbahy de ce qu’il disoit, considéré
ce que l’en avoit par avant dit d’icelle. Quant sa femme fut venue à
une journée près de Paris, il fist parer son hostel et mettre du may
et de l’erbe vert[300] et assembla ses amis pour aler au devant de sa
femme. Il fut au devant et s’entre-baisièrent, puis commencèrent l’un
et l’autre à plourer, et puis firent très grant joye. Il fist dire
à sa femme que à tous elle parlast esbatéement[301], haultement et
hardiement, et à luy mesmes, et mesmement devant la gent, et qu’elle
venue à Paris alast sur toutes ses voisines l’une après l’autre et ne
fist nul semblant de rien que de joye. Et ainsi le bon homme retourna
et garda l’onneur de sa femme.

Et, par Dieu, se un homme garde l’onneur de sa femme et une femme
blasme son mary ou seuffre qu’il soit blasmé, ne couvertement, ne en
appert, elle mesmes en est blasmée, et non sans cause; car, ou il
est blasmé à tort, ou il est blasmé à droit: s’il est blasmé à tort,
donc le doit-elle aigrement revenchier; s’il est blasmé à droit, donc
le doit-elle gracieusement couvrir et doulcement défendre, car il
est certain que se le blasme demouroit sans estre effacié, de tant
comme auroit plus meschant mary, seroit elle réputée pour meschant et
partiroit à son blasme pour ce qu’elle se seroit mariée à si meschant.
Car, tout ainsi comme celluy qui joue aux eschez tient longuement en sa
main son eschec avant qu’il l’assiée pour adviser de le mettre en lieu
seur, tout ainsi la femme se doit tenir pour advisier et choisir et se
mettre en bon lieu. Et s’elle ne le fait, si luy soit reprouchié, et
doit partir au blasme de son mary; et se il est en rien taché, elle le
doit couvrir et céler de tout son povoir. Et autel doit faire le mary
de sa femme, comme dit est dessus et dit sera cy après.

Je sceus un bien notable advocat en Parlement, lequel advocat avoit
eu une fille qu’il avoit engendrée en une povre femme, qui la mist
à nourrisse: et par deffault de paiement, ou de visitation, ou des
courtoisies que les hommes ne scevent pas faire aux nourrisses en tels
cas, fu de ce telles paroles que la femme de l’advocat le sceut, et
sceut aussi que je faisoie les paiemens de ceste nouriture et pour
couvrir l’honneur du seigneur à qui j’estoie et suis bien tenu, Dieu
le gart! Et pour ce la femme d’icelluy advocat vint à moy et me dist
que je faisoie grant péchié que son seigneur fust esclandry et diffamé,
et qu’elle estoit mieulx tenue à souffrir le danger[302] de ceste
nouriture que moy, et que je la menasse où l’enfant estoit[303].... la
mist en garde avec une cousturière et luy fist aprendre son mestier et
puis la maria, ne oncques un maltalent ne un seul courroux ou laide
parole son mary n’en apparceut. Et ainsi font les bonnes femmes vers
leurs maris et les bons maris vers leurs femmes quant elles faillent.



NEUVIÈME ARTICLE.


Le neuviesme article doit monstrer que vous soyez sage à ce que se
vostre mary folloie comme jeunes gens ou simples gens font souvent,
que doulcement et sagement vous le retrayez de ses folies. Primo, s’il
veult soy courroucier ou mal exploitier contre vous, gardez que par
bonne patience et par la doulceur de vos paroles vous occiez l’orgueil
de sa cruaulté, et se ainsi le savez faire, vous l’arez vaincu
tellement qu’il ne vous pourra faire mal néant plus que s’il fust
mort, et si luy souvendra depuis tellement de vostre bien, jasoit-ce
qu’il n’en die mot devant vous, que vous l’aurez du tout attrait à
vous. Et se vous ne le povez desmouvoir qu’il ne vous courrousse,
gardez que vous ne vous en plaigniez à vos amis ne autres dont il se
puisse apparcevoir, car il en tendroit moins de bien de vous et luy en
souvendroit autre fois, mais alez en vostre chambre plourer bellement
et coyement, à basse voix, et vous en plaignez à Dieu; et ainsi le font
les sages dames. Et s’il est ainsi qu’il se vueille esmouvoir contre
autre personne plus estrange, si le refrenez sagement; et, à ce propos,
est une histoire ou traictié qui dit ainsi[304]:

Un jouvencel appellé Mellibée, puissant et riche, ot une femme nommée
Prudence, et de celle femme ot une fille. Advint un jour qu’il s’ala
esbatre et jouer et laissa en son hostel sa femme et sa fille et
les portes closes. Trois de ses anciens ennemis approuchièrent et
appoièrent escheles aux murs de sa maison, et par les fenestres
entrèrent dedans, et batirent sa femme [forment], et navrèrent
sa fille de cinq plaies mortels en cinq lieux de son corps c’est
assavoir ès piés, ès oreilles, ou nez, en la bouche et ès mains, et la
laissièrent presque morte, puis s’en alèrent.

Quant Mellibée retourna à son hostel et vit cest meschief, si commença
et prist à plaindre et à plourer et à soy batre, et en manière de
forcené sa robe dessirer. Lors Prudence sa femme le prist à admonester
qu’il se souffrist[305]; et il tousjours plus fort crioit. Adonc
Prudence se appensa de la sentence Ovide, ou livre _des Remèdes
d’amours_, qui dit que cellui est fol qui s’efforce d’empeschier la
mère de plorer la mort de son enfant, jusques à tant qu’elle se soit
bien vuidée de larmes et saoulée de plorer. Lors il est temps de la
conforter et attremper sa douleur par doulces paroles.

Pour ce Prudence se souffri un pou de temps, et puis quant elle vit son
temps, si lui dist: Sire, dist-elle, pourquoy vous faites-vous sembler
fol? Il n’appartient pas à sage homme de démener si grant dueil. Vostre
fille eschappera se Dieu plaist: se elle estoit ores morte, vous ne
vous devriez pas pour luy destruire, car Sénèque dit que li sages ne
doit point prendre grant desconfort de [la mort de] ses enfans, ains
doit souffrir leur mort aussi légièrement comme il attend la sienne
propre. Mellibée respondi: qui est celluy qui se pourroit tenir de
plorer en si grant cause de douleur? Nostre Seigneur Jhésu-Crist mesmes
plora de la mort du ladre son amy.--Certes, dist Prudence, pleurs ne
sont mie deffendus à celluy qui est triste ou entre les tristes,
mais leur est ottroié, car, selon ce que dit saint Pol l’apostre en
l’epistre aux Rommains, on doit mener joye avec ceulx qui ont joye et
mainnent, et doit-on plourer avec ceulx qui pleurent. Mais jasoit-ce
que plourer atrempéement soit permis, toutesvoies plorer desmesuréement
est deffendu, et pour ce l’on doit garder la mesure que Sénèque met.
Quant tu auras, dit-il, perdu ton amy, ton œil ne soit ne trop sec ne
trop moistes, car jasoit-ce que la larme viengne à l’œil, elle n’en
doit pas issir; et quant tu auras perdu ton ami, pense et efforce-toy
d’un autre recouvrer, car il te vault mieulx un autre ami recouvrer
que l’ami perdu plorer. Se tu veulx vivre sagement, oste tristesse de
ton cuer, car Sénèque dit: le cuer lié et joyeux maintient la personne
en la fleur de son aage, mais l’esperit triste luy fait séchier les
os[306]; et dist aussi que tristesse occist moult de gens[307]. Et
Salemon dit que tout ainsi comme la tigne ou l’artuison[308] nuit à la
robe et le petit ver au bois, tout ainsi griève tristesse au cuer. Et
pour ce nous devons porter [patiemment] en la perte de nos enfans et de
nos autres biens temporels ainsi comme Job [lequel,] quant il ot perdu
ses enfans et toute sa substance et eut receu moult de tribulations en
son corps, il dist: nostre Seigneur le m’a donné, nostre Seigneur le
m’a tolu: ainsi comme il le m’a voulu faire, il l’a fait; benoist soit
le nom nostre Seigneur!

Mellibée respondi à Prudence sa femme ainsi: toutes les choses que tu
dis sont vrayes et profitables, mais mon esperit est si troublé que
je ne sçay que je doie faire. Lors Prudence lui dist: appelle tous tes
loyaulx amis, tes affins[309] et tes parens, et leur demande conseil
de ceste chose, et te gouverne selon le conseil qu’ils te donront, car
Salemon dit: tous tes fais par conseil feras, ainsi ne t’en repentiras.

Adonc Mellibée appella moult de gens, c’est assavoir cirurgiens,
phisiciens vieillars et jeunes, et aucuns de ses anciens ennemis qui
estoient réconciliés [par semblance], et retournés en sa grâce et
en son amour, et aucuns de ses voisins qui lui portèrent révérence
plus par doubtance que par amour, et avec ce vindrent plusieurs de
losengeurs et moult de sages clers et bons advocas. Quant ceulx
furent ensemble, il leur recompta et monstra bien par la manière de
son parler qu’il estoit moult courroucié, et qu’il avoit moult grant
désir de soy vengier tantost et faire guerre incontinent: toutesvoies
il demanda sur ce leur conseil. Lors un cirurgien par le conseil des
autres cirurgiens se leva disant: Sire, il appartient à un cirurgien
que il porte à un chascun prouffit et à nul dommage, dont il advient
aucunes fois que quant deux hommes par malice se sont combatus ensemble
et navrés l’un l’autre, un mesme cirurgien garist l’un et l’autre; et
pour ce il n’appartient point à nous de esmouvoir ou nourrir guerre
ne supporter partie[310], mais à ta fille garir. Jasoit-ce qu’elle
soit navrée malement, nous mettrons toute nostre cure de jour et de
nuit, et, à l’aide de nostre Seigneur, nous te la rendrons toute
saine. Presques en ceste manière respondirent les phisiciens, et
oultre adjoustèrent avec ce aucuns que tout ainsi comme selon l’art
de médicine les maladies se doivent garir par contraires, ainsi
doit-l’en garir guerre par vengence. Les voisins envieux, les ennemis
réconciliés par semblant, les losengeurs, firent semblant de plorer
et commencèrent le fait moult à aggraver en loant moult Mellibée en
puissance d’avoir et d’amis, et en vitupérant la puissance de ses
adversaires, et dirent que tout oultre il se devoit tantost vengier et
incontinent commencier la guerre. Adonc un sage advocat de la voulenté
des autres se leva et dist: Beaulx seigneurs, la besongne pour quoy
nous sommes cy assemblés est moult haulte et pesante pour cause de
l’injure et du maléfice qui est moult grant, et pour raison des grans
maulx qui s’en pevent ensuivre ou temps advenir, et pour la force des
richesses et des puissances des parties; pour laquelle chose il seroit
grant péril errer en ceste besongne. Pour ce, Mellibée, dès maintenant
nous te conseillons que sur toutes choses tu aies diligence de garder
ta personne, et euvres en telle manière que tu soies bien pourveu
d’espies[311] et guettes[312] pour toy garder. Et après tu mettras en
ta maison bonne garnison et fort pour toy et ta maison défendre. Mais
de mouvoir guerre et de toy vengier tantost, nous n’en povons pas bien
jugier en si pou de temps lequel vault mieulx. Si demandons [espace]
d’avoir délibération, car l’on dit communément: qui tost juge, tost se
repent; et dit-on aussi que le juge est bon qui tost entent et tart
juge. Car jasoit-ce que toute demeure soit ennuyeuse, toutesvoies elle
ne fait pas à reprendre en jugement et en vengence quant elle est
souffisant et raisonnable. Et ce nous monstre nostre Seigneur par
exemple, quant la femme qui estoit prinse en adultère lui fut admenée
pour jugier d’icelle ce que on en devoit faire. Car jasoit-ce qu’il
sceust bien qu’il devoit respondre, toutesvoies il ne respondi pas
tantost, mais voult avoir délibération et escript deux fois en terre.
Pour ces raisons, nous demandons délibération, laquelle eue, nous te
conseillerons, à l’aide de Dieu, chose qui sera à ton proufit.

Lors les jeunes gens et la plus grant partie de tous les autres
mocquèrent[313] ce sage et firent grant bruit, et dirent que tout ainsi
comme l’en doit batre le fer tant comme il est chault, ainsi l’en doit
vengier l’injure tant comme elle est fresche, et se escrièrent à haulte
voix: _guerre! guerre! guerre!_

Adonques se leva un des anciens et estendit la main et cria que l’en
feist silence et dist ainsi: moult de gens crient _guerre!_ haultement,
qui ne scevent que guerre se monte. Guerre en son commencement est si
large et a si grant entrée que un chascun y puet entrer et la puet
trouver légièrement, mais à très grant peine puet-l’en savoir à quelle
fin l’en en puet venir. Car quant la guerre commence, moult de gens ne
sont encores nés, qui pour cause de la guerre mourront jeunes, ou en
vivront en douleur et en misère et fineront leur vie en chétiveté. Et
pour ce, avant que l’en mueve guerre, l’en doit avoir grant conseil et
grant délibération.

Quant icelluy ancien cuida confermer son dit par raisons, ils se
levèrent presque tous encontre luy et entrerompirent son dit souvent,
et lui dirent qu’il abrégeast ses paroles, car la narration de cellui
qui presche à ceulx qui ne le veulent oïr, est ennuyeuse; c’est à dire
que autant vault parler devant cellui à qui il ennuye comme chanter
devant cellui qui pleure. Quant ce sage ancien vit qu’il ne povoit
avoir audience, ne se efforça plus de parler. Si dit: je vois bien
maintenant que le proverbe commun est vray: lors fault le bon conseil,
quant le grant besoing est[314]. Et ce dit, il s’assist comme tout
honteulx.

Encores avoit en conseil Mellibée moult de gens qui lui conseilloient
autre chose en l’oreille et autre chose en appert. Quant Mellibée eust
oy son conseil, il conceut et advisa que trop plus grant partie se
accordoit et conseilloit que l’en feist guerre; si se arresta en leur
sentence et la conferma. Lors dame Prudence, quant elle vit son mary
qui se appareilloit de soy vengier et de faire guerre, si lui vint au
devant et lui dist moult doulcement: Sire, je vous pry que vous ne
vous hastez et que vous pour tous dons me donnez espace de parler,
car Pierre Alphons[315] dit: qui te fera bien ou mal, ne te haste du
rendre, car ainsi comme plus long temps te attendra ton amy, ainsi
plus long temps te doubtera ton ennemi. Mellibée respondi à Prudence
sa femme: je ne propose point de user de ton conseil et pour moult de
raisons. Premièrement, car chascun me tendroit pour fol, se je par ton
conseil et par ton consentement changeoie ce qui est ordonné par moult
de bonnes gens: après car toutes femmes sont mauvaises, et une seule
n’est bonne, selon le dit de Salemon: en mil hommes, dit-il, j’ay bien
trouvé un preudomme, mais de toutes les femmes je n’en treuve nulle
bonne. Après est la tierce raison, car se je me gouvernoie de ton
conseil, il sembleroit que je te donnasse sur moy seignorie, laquelle
chose ne doit pas estre. Car Jhésu-Sirac[316] dit: se la femme a la
seignorie, elle est contraire à son mary. Et Salemon dit: à ton fils,
à ta femme, à ton frère, à ton amy ne donne puissance sur toy en toute
ta vie, car il te vault mieulx que tes enfans te requièrent ce que
mestier sera pour eulx que toy regarder ès mains de tes enfans. Après,
se je vouloye user de ton conseil, il conviendroit aucunes fois que le
conseil fust secret jusques à tant qu’il fust temps de le révéler, et
ce ne se pourroit faire, car il est escript: la jenglerie des femmes ne
puet riens céler fors ce qu’elle ne scet. Après, le philosophe dit: en
mauvais conseil les femmes vainquent les hommes. Pour ces raisons je ne
doy point user de ton conseil.

Dame Prudence, après ce qu’elle ot oy débonnairement et en grant
patience toutes les choses que son mary voult avant traire, si demanda
licence de parler et puis dist: Sire, à la première raison que vous
m’avez avant mise, puet-on respondre légièrement. Car je dy qu’il n’est
pas folie de changer son conseil quant la chose se change ou quant la
chose appert autrement que devant. Après, je dy encores plus, car se tu
avoies promis et juré de faire ton emprise et tu la laissoies à faire
pour juste cause, l’en ne devroit pas dire que tu fusses mensongier
ne parjure, car il est escript: le sage ne ment mie quant il mue son
courage[317] en mieulx. Et jasoit-ce que ton emprise soit estable
et ordonnée par grant multitude de gens, pour ce ne la convient pas
accomplir, car la vérité des choses et le prouffit sont mieulx trouvés
par pou de gens sages et parlans par raison que par multitude de gens
où chascun brait et crie à sa voulenté: et telle multitude n’est point
honneste.

A la seconde raison, quant vous dittes que toutes femmes sont mauvaises
et nulles bonnes, sauf vostre grâce, [vous parlez trop généraulment
quant] vous les desprisez ainsi toutes, car il est escript: qui
tout desprise, à tout desplait; et Sénèque dit que cellui qui veult
acquerre sapience ne doit nul desprisier, mais ce qu’il scet, il le
doit enseigner sans présumption, et ce qu’il ne scet, il ne doit pas
avoir honte de demander à maindre de luy. Et que moult de femmes soient
bonnes, l’en le puet prouver légièrement. Premièrement, car nostre
Seigneur Jhésu-Crist ne se fust oncques daigné descendre en femme se
elles fussent toutes mauvaises ainsi comme tu le dis. Après, pour la
bonté des femmes, nostre Seigneur Jhésu-Crist, quant il fut ressuscité
de mort à vie, il apparut premier[318] à Marie Magdalaine que aux
apostres; et quant Salemon dist que de toutes femmes il n’en a trouvé
nulle bonne, pour ce ne s’ensuit pas que nulle ne soit bonne. Car
jasoit-ce qu’il ne l’ait trouvée, moult des autres en ont bien trouvé
plusieurs bonnes et loyaulx; ou, par adventure, quant Salemon dit qu’il
n’a point trouvé de bonne femme, il entend de la bonté souveraine de
laquelle nul n’est bon fors Dieu seulement, selon ce que lui mesmes
le dit en l’Euvangile, car nulle créature n’est tant bonne, à qui ne
faille aucune chose, sans comparoison à la perfection de son Créateur.

La tierce chose si est comme tu dis se tu te gouvernoies par mon
conseil, il sembleroit que tu me donnasses par dessus toy seignorie.
Sauve ta grâce, il n’est pas ainsi: car selon ce, nul ne prendroit
conseil fors à cellui à qui il vouldroit sur lui puissance, et ce
n’est pas vray, car cellui qui demande conseil a franchise et libérale
voulenté de faire ce que l’en luy conseille, ou de le laissier.

Quant à la quarte raison, où tu dis que la jenglerie des femmes ne
puet céler fors ce qu’elles ne scevent pas, ceste parole doit estre
entendue d’aucunes femmes jengleresses desquelles on dit: trois choses
sont qui gettent homme hors de sa maison, c’est assavoir la fumée[319],
la goutière et la femme mauvaise. Et de telles femmes parle Salemon
quant il dit: il vauldroit mieulx habiter en terre déserte que avec
femme rioteuse et courrouceuse. Or scez-tu bien que tu ne m’as pas
trouvée telle, ains as souvent esprouvé ma grant silence et ma grant
souffrance, et comme j’ai gardé et célé les choses que l’en devoit
céler et tenir secrètes.

Quant à la quinte raison, où tu dis que en mauvais conseil les femmes
vainquent les hommes, ceste raison n’a point cy son lieu, car tu ne
demandes pas conseil de mal faire, et se tu vouloies user de mauvais
conseil et mal faire, et ta femme t’en povoit retraire et vaincre, ce
ne seroit pas à reprendre, mais à loer. Et ainsi l’en doit entendre
le dit du philosophe: en mauvais conseil vainquent les femmes les
hommes, car aucunes fois quant les hommes veullent ouvrer de mauvais
conseil, les femmes les en retraient et les vainquent. Et quant vous
blasmez tant les femmes et leur conseil, je vous monstreray par moult
de raisons que moult de femmes ont esté bonnes et leur conseil bon et
proufitable. Premièrement, l’en a acoustumé de dire: conseil de femme,
ou il est très chier, ou il est très vil. Car jasoit-ce que moult de
femmes soient très mauvaises et leur conseil vil, toutesvoies l’en
en treuve assez de bonnes et qui très bon conseil et très chier ont
donné. Jacob par le bon conseil de Rébeca sa mère gaigna la bénéiçon
de Isaac son père et la seignorie sur tous ses frères. Judith par son
bon conseil délivra la cité de Buthulie où elle demouroit, des mains
de Holofernes qui l’avoit assiégée et la vouloit destruire. Abigaïl
délivra Nagal son mari de David qui le vouloit occire et appaisa le
roy par son sens et par son conseil. Hester par son conseil esleva
moult son peuple ou royaume de Assuere le roy: et, ainsi puet-l’en
dire de plusieurs autres. Après, quant nostre Seigneur ot créé Adam le
premier homme, il dist: Il n’est pas bon estre [l’homme] tout seul.
Faisons-lui aide semblable [à lui]. Se elles doncques n’estoient bonnes
et leur conseil [bon], nostre Seigneur ne les eust pas appellées[320]
adjutoires de hommes, car elles ne fussent pas adjutoires de l’homme,
mais en dommage et en nuisance. Après, un maistre fist deux vers ès
quels il demande et respont et dit ainsi: [quelle chose vault mieux
que l’or? Jaspe. Quelle chose vaut plus que jaspe? Sens.] Quelle chose
vault mieulx que sens? Femme. Quelle chose vault mieulx que femme?
Riens. Par ces raisons et par moult d’autres pues-tu veoir que moult
de femmes sont bonnes et leur conseil bon et proufitable. Se tu veulx
doncques maintenant croire mon conseil, je te rendray ta fille toute
saine, et feray tant que tu auras honneur en ce fait.

Quant Mellibée ot oy Prudence, si dist: je voy bien que la parole
Salemon est vraye, qui dit: broches de miel sont bonnes paroles bien
ordonnées, car elles donnent doulceur à l’âme et santé au corps. Car
pour tes paroles très doulces, et pour ce aussi que j’ay esprouvé ta
grant sapience et ta grant loyaulté, je me vueil du tout gouverner par
ton conseil.

Puis, dist Prudence, que tu te veulx gouverner par mon conseil, je
te vueil enseignier comment tu te dois avoir en conseil prendre.
Premièrement, en toutes tes euvres et devant tous autres conseils, tu
dois amer et prendre le conseil de Dieu et le demander, et te dois
mettre en tel lieu et en tel estat qu’il te daigne conseillier et
conforter. Pour ce dist Thobie à son fils: en tout temps bénéis Dieu
et lui prie qu’il t’adrece tes voies, et tous tes conseils soient en
lui tout temps. Saint Jaques si a dit: se aucun de nous a mestier de
sapience, si la demande à Dieu. Après, tu dois prendre conseil en toy
et entrer en ta pensée et examiner ce que mieulx te vault. Et lors
dois-tu oster trois choses de toy qui sont contrarieuses à conseil,
c’est assavoir: ire, convoitise et hastiveté. Premièrement donques,
cellui qui demande conseil à soy mesmes doit estre sans yre par moult
de raisons. La première est car cellui qui est courreciés cuide
tousjours plus povoir faire qu’il ne puet, et pour ce, son conseil[321]
surmonte tousjours sa force: l’autre car cellui qui est courroucié,
selon ce que dit Sénèque, ne puet parler fors que choses crimineuses,
et par ceste manière il esmeut les autres à courroux et à yre; l’autre
car cellui qui est courcié ne puet bien juger et par conséquent bien
conseiller. Après, tu dois oster de toy convoitise, car, selon ce que
dit l’apostre, convoitise est racine de tous maulx, et le convoiteux ne
puet riens juger fors que en la fin sa convoitise soit acomplie, qui
acomplir ne se puet, car tant com plus a li convoiteux, plus désire.

Après tu dois oster de toy hastiveté, car tu ne dois pas juger pour
le meilleur ce que tantost te vendra au devant, ains y dois penser
souvent, car, selon ce que tu as oy dessus, l’en dist communément:
qui tost juge, tost se repent. Tu n’es pas toutes heures en une
disposition, ains trouveras que ce qui aucune fois te semblera bon de
faire, l’autre fois te semblera mauvais. Et quant tu auras pris conseil
à toy mesme et auras jugié à grant délibération ce qui mieulx te vault,
tien le secret et te garde de révéler à nulle personne, se tu ne cuides
que en révélant tu faces ta condition meilleur et que le révéler te
portera prouffit. Car Jhésu-Sirac[322] dit: à ton ami ne à ton ennemi
ne raconte ton secret ne ta folie, car ils te orront et te regarderont
et te supporteront en ta présence, et par derrière se moqueront de toy.
Et un autre dit: à peine trouveras-tu un, tant seulement, qui puisse
bien céler secret. Et Pierre Alphons dit: tant comme ton secret est
en ton cuer, tu le tiens en ta prison, et quant tu le révèles à autruy
il le tient en la sienne; et pour ce il te vault mieulx taire et ton
secret céler que prier cellui à qui tu le révèles qu’il le cèle, car
Sénèque dit: se tu ne te pues taire et ton secret céler, comment ose-tu
prier un autre qu’il le vueille céler?

Se tu cuides que révéler ton secret à autre et avoir son conseil face
ta condition meilleur, lors le quiers, et maintien-toy en telle guise:
premièrement, tu ne dois pas faire semblant [à ton conseil][323] quelle
partie tu veulx tenir ne monstrer ta voulenté, car communément tous
conseillers sont losengeurs, espécialment ceulx qui sont du conseil
des grans seigneurs, car ils s’efforcent plus de dire chose plaisant
que proufitable, et pour ce, riche homme n’aura jà bon conseil se
il ne l’a de soy mesmes. Après tu dois considérer tes amis et tes
ennemis. Entre tes amis tu dois considérer le plus loial et le plus
sage, le plus ancien et le plus esprouvé en conseil, et à ceulx tu
dois conseil demander. Premièrement doncques, tu dois appeller à ton
conseil tes bons et tes loyaulx amis, car Salemon dit ainsi: comme
le cuer se délite en bonne odeur, conseil de bons amis fait à l’âme
doulceur; et dit encores: à l’amy loyal nulle chose ne se compare,
car ne or ne argent ne sont tant dignes comme la voulenté du loyal
amy. Et dit oultre: amy loyal est une forte défense: qui le trouve, il
treuve un grant trésor. Après tu dois regarder que les loyaulx amis que
tu appelles à ton conseil soient sages, car il est escript: requier
tousjours le conseil du sage. Par ceste mesme raison tu dois appeller
les anciens qui assez ont veu et assez ont esprouvé, car il est escript
en Job: ès anciens est la sapience, et en moult de temps est prudence.
Et Tulles dit: les grans besongnes ne se font pas par force ne par
légièreté de corps, mais par bon conseil et par auctorité de personne
et par science: lesquelles trois choses ne affoiblissent pas en
vieillesse, mais enforcent et croissent tous les jours. Après, en ton
conseil tu dois garder ceste règle car au commencement tu dois appeller
pou de gens des plus espéciaulx, car Salemon dit: efforce-toy d’avoir
pluseurs amis, mais entre mil eslis-en un pour ton conseiller. Quant
tu auras en ton conseil pou de gens, si le peus révéler, se mestier
est, à plusieurs. Toutesvoies les trois conditions dessus dictes si
doivent estre ès conseillers tousjours gardées, et ne te souffise pas
un conseillier tant seulement, mais en fais plusieurs, car Salemon dit:
sainement est la chose où plusieurs conseillers sont.

Après ce que je t’ay monstré à qui tu dois prendre conseil, je te
vueil monstrer lequel conseil tu dois fuir; [premièrement tu dois] le
conseil des fols eschiver, car Salemon dit: à fol ne vueil prendre
conseil, car il ne te saura conseiller fors ce qu’il aime et qui luy
plaist; et il est escript: en la propriété du fol est que il croit
légièrement tous maulx d’autruy et tous biens de luy. Après, tu dois
fuir le conseil des faintifs et losengeurs qui s’efforcent plus de
loer ta personne et à toy plaire que de dire vérité. Et Tulles dit:
entre toutes les pestilences qui en amitié sont, la plus grant est
losengerie. Et pour ce tu dois plus doubter et fuir les doulces paroles
[de celui qui te loera] que [les aigres paroles de] celui qui vérité te
dira, car Salemon dit: homme qui dit paroles de losengerie est un las
pour prendre les innocens; et dit aussi autre part: homme qui parle à
son amy paroles doulces et souefves, luy met devant les piés la rais
pour le prendre. Pour ce dit Tulles: garde que ne enclines point tes
oreilles aux losengeurs et ne reçoy point en ton conseil paroles de
losengerie. Et Caton dit ainsi: advise-toy d’eschever paroles doulces
et souefves.

Après, tu dois eschever le conseil de tes anciens ennemis qui sont
réconciliés, car il est escript: nul ne retourne seurement en la grâce
de son ennemy. Et Ysope dit: ne vous fiez point en ceulx à qui vous
avez eu guerre ou inimitié anciennement et ne leur révélez point vos
consaulx ou secrets; et la raison rent Sénèque et dit ainsi: il ne peut
estre que là où le feu a esté longuement, qu’il n’y demeure tousjours
aucune vapeur. Pour ce dit Salemon: en ton ancien ennemy ne te vueilles
nul temps fier, et encores s’il est réconcilié, se humilité est en luy
par semblant, et encline sa teste devant toy, ne le croy néant, car il
le fait plus [pour son proffit que] pour l’amour de toy, afin qu’il
puisse avoir victoire de toy en soy humiliant envers toy, laquelle
victoire il ne peut avoir en toy poursuiant. Et Pierre Alphons dit: ne
t’acompaigne pas à tes anciens ennemis, car ce que tu feras de bien,
ils le pervertiront ou amenuiseront.

Après tu dois fuir le conseil de ceulx qui te servent et portent
révérence, car ils le font plus par doubtance que par amour. Car un
philosophe dit: nul n’est bien loyal à celui que il trop doubte; et
Tulles dit: nulle puissance d’empire n’est si grant que elle puisse
durer longuement se elle n’a plus l’amour du peuple que la paour.
Après, tu dois fuir le conseil de ceulx qui sont souvent yvres, car
ils ne scevent riens céler, et dit Salemon: nul secret n’est là où
règne yvresse. Après tu dois avoir le conseil suspect de ceulx qui
conseillent une chose en secret, et puis autre dient en appert.
Car Cassiodores dit: une manière de grever son ami est de monstrer
en appert ce dont l’en veult le contraire. Après, tu dois avoir en
suspect le conseil des mauvais hommes, car il est escript: les conseils
des mauvais hommes sont tousjours plains de fraude; et David dit:
bieneureux est l’homme qui n’a point esté ès consaulx des mauvais!
Après, tu dois fuir le conseil des jeunes gens, car le sens des jeunes
gens n’est pas encores meur. De quoy Salemon dit: dolente est la terre
qui a enfant à seigneur[324]! Et le philosophe dit que nous n’eslisons
pas les jeunes en princes, car communément ils n’ont point de prudence;
et dit encores Salemon: dolente est la terre de quoy le prince ne se
liève matin!

Puis que je t’ay monstré à qui tu dois prendre conseil et de qui
conseil tu dois eschever et fuir, je te vueil apprendre comment tu dois
conseil examiner. En examinant doncques ton conseil, selon ce que dit
Tulles et enseigne, tu dois considérer plusieurs choses. Premièrement,
tu dois considérer que en ce que tu proposes et sur quoy tu veulx avoir
conseil, vérité soit gardée et dicte, car l’en ne puet bien conseillier
à cellui qui ne dit vérité. Après tu dois considérer toutes les choses
qui s’accordent à ce que tu proposes faire selon ton conseil: se raison
s’y accorde et si ta puissance s’y accorde, si plusieurs et meilleurs
s’y accordent que discordent, ou non. Après, tu dois considérer au
conseil ce qui s’ensuit: se c’est haine ou amour, paix ou guerre,
prouffit ou dommage, et aussi de moult d’autres choses; et en toutes
ces choses tu dois tousjours eslire ce qui est ton prouffit, toutes
autres choses reffusées et rabatues. Après, tu dois considérer de
quelle racine est engendrée la matière de ton conseil et quel prouffit
elle puet concevoir et engendrer, et dois encores considérer toutes les
causes dont elle est venue.

Quant tu auras examiné ton conseil en la manière dicte, et trouvé
laquelle partie est meilleur et plus prouffitable et esprouvée de
plusieurs sages et anciens, tu dois considérer se tu le pouras mener à
fin, car nul ne doit commencer chose s’il n’a povoir de la parfaire,
et ne doit prendre charge qu’il ne puisse porter. L’en dit en un
proverbe: qui trop embrasse, pou estraint; et Caton dit: essaye-toy
de faire ce que tu as povoir de faire, pour ce que la charge ne te
presse tant qu’il te faille laissier ce que tu as commencié à faire,
et s’il est doubte se tu le pourras mener à fin ou non, eslis plus
tost le délaissier que le commencier. Car Pierre Alphons dit: se tu as
povoir de faire une chose dont il te conviengne repentir, il te vault
mieulx souffrir que encommencier. Bien disent ceulx qui deffendent à un
chascun chose faire [dont il duelt et doubte se elle est de faire] ou
non. En la fin, quant tu auras examiné ton conseil en la manière dessus
dicte et auras trouvé que tu le pourras mener à fin, lors le retien et
le conferme.

Or est raison que je te monstre quant et pourquoy on doit changier son
conseil sans répréhension. L’en peut changier son conseil et son propos
quant la cause cesse ou quant nouvelle cause survient. Car la loy dit:
les choses qui de nouvel surviennent ont mestier de nouvel conseil. Et
Sénèque dit: se ton conseil est venu à la congnoissance de ton ennemy,
lors change ton conseil. Après, l’en peut changier son conseil quant
l’en treuve après que par erreur ou par autre cause mal ou dommage en
puet venir; après, quant le conseil est déshonneste ou vient de cause
déshonneste, car les lois dient que toutes promesses déshonnestes sont
de nulle valeur; après, quant il est impossible ou ne se puet garder
bonnement; et en moult d’autres manières. Après ce, tu dois tenir pour
règle générale que ton conseil est mauvais quant il est si ferme que
l’en ne le puet changier pour condition qui surviengne.

Quant Mellibée ot oy ces enseignemens de dame Prudence, si respondi:
Prudence, jusques à l’eure de maintenant vous m’avez assez enseignié
comment en général je me doy porter en conseil prendre ou retenir, or
vouldroie-je bien que vous descendissiez en espécial et me deissiez ce
que vous semble du conseil que nous avons eu en ceste propre besongne.

Lors respondi dame Prudence: Sire, dist-elle, je te prie que tu ne
rappelles point en ton courage se je dy chose qui te desplaise, car
tout ce que je te dy, je l’entens dire à ton honneur et à ton prouffit,
et ay espérance que tu le prendras en patience. Et pour ce je te fais
assavoir que ton conseil, à parler proprement, ne doit estre appellé
conseil, mais un fol esmouvement sans discrétion ouquel tu as erré en
moult de manières.

Premièrement, tu as erré en assemblant ton conseil, car au
commencement tu deusses avoir appellé moult peu de gens, et puis après
plusieurs, se besoing fust; mais tantost tu as appellé une multitude
de gent chargeuse et ennuyeuse. Après tu as erré, car tu deusses avoir
appellé tant seulement tes loyaulx amis, sages et anciens; mais avec
ceulx tu as appellé gens estranges, jouvenceaulx, fols, losengeurs,
ennemis réconciliés et gens qui te portent révérence sans amour. Après
tu as erré quant tu es venu à conseil, car tu avoies avec toy ensemble
ire, convoitise et hastiveté, lesquelles trois choses sont contraires
à conseil, et ne les as pas abaissées en toy ne en ton conseil ainsi
comme tu deusses. Après tu as erré, car tu as démonstré à ton conseil
ta voulenté et la grant affection que tu avoies de faire guerre
incontinent et de prendre vengence, et pour ce ils ont plus suivy ta
voulenté que ton prouffit. Après tu as erré, car tu as esté content
d’un conseil tant seulement, et toutesvoies en si grant besongne et
si haulte estoient bien nécessaires plusieurs conseils. Après tu as
erré, car [quant tu as fait la division entre ceulx de ton conseil,]
tu n’as pas suivy la voulenté de tes loyaulx amis sages et anciens,
mais as regardé seulement le plus grant nombre. Et tu scez bien que les
fols sont tousjours en plus grant nombre que les sages, et pour ce le
conseil des chappitres et des grans multitudes de gens où l’on regarde
plus le nombre que les mérites des personnes erre souvent, car en tel
conseil les fols ont toujours gaignié par multitude.

Mellibée adonc respondi: je confesse bien que j’ay erré, mais pour ce
que tu m’as dit dessus que cellui ne fait pas à reprendre, qui change
son conseil en moult de cas, je suis appareillié à le changier à ta
voulenté, car péchier est euvre d’omme, mais persévérer en péchié est
euvre de déable; et pour ce je ne vueil plus en ce persévérer.

Lors dit Prudence: examinons tout ton conseil [et véons lesquels ont
parlé plus raisonnablement et donné meilleur conseil,] et pour ce
que l’examination soit mieulx faicte, commençons aux cirurgiens et
aux phisiciens qui premièrement parlèrent. Je dy, dist-elle, que les
cirurgiens et les phisiciens dirent ou conseil ce qu’ils devoient
dire et parlèrent sagement, car à leur office appartient à un chascun
prouffiter et à nul nuire, et selon leur art ils doivent avoir grant
diligence de la cure de ceulx qu’ils ont en leur gouvernement, ainsi
comme ils ont dit et respondu sagement; et pour ce je conseille qu’ils
soient haultement guerdonnés, en telle manière qu’ils entendent
plus liement à la cure de ta fille. Car jasoit-ce qu’ils soient tes
amis, toutesvoies tu ne dois pas souffrir qu’ils te servent pour
néant, mais les dois plus largement païer et guerdonner. Mais quant
à la proposition que les phisiciens adjoustèrent, que ès maladies
un contraire se garit par autre contraire, je vouldroie bien savoir
comment tu l’entens.

Certes, dist Mellibée, je l’entens ainsi: car comme ils m’ont fait un
contraire, que je leur en face un autre, et pour ce qu’ils se sont
vengiés de moy et m’ont fait injure, je me vengeray d’eulx et leur
feray injure et lors auray gary un contraire par autre.

Or véez, dist Prudence, comment un chascun croit légièrement ce
qu’il veut et désire! Certes, dist-elle, la parole des phisiciens ne
doit pas estre ainsi entendue, car mal n’est pas contraire à mal, ne
vengence à vengence, ne injure à injure, mais sont semblables. Et
pour ce, vengence par vengence, ne injure par injure n’est pas curé,
mais accroist l’une l’autre. Mais la parole doit estre ainsi entendue:
ainsi que mal et bien, sont contraires paix et guerre, vengence et
souffrance, discorde et concorde, et ainsi de moult d’autres; mais mal
se doit gairir par bien, discorde par accord, guerre par paix, et ainsi
de tous les autres; et à ce s’accorde saint Pol l’appostre en plusieurs
lieux: ne rendez, dit-il, mal pour mal, ne mesdit pour mesdit, mais
faites bien à cellui qui mal vous fera, et bénéissez cellui qui vous
maudira. Et en moult d’autres lieux de ses épistres il admoneste à paix
et à concorde.

Or convient parler du conseil que donnèrent les advocas, les sages
et les anciens, qui furent tous d’un accord et dirent que devant
toutes choses tu dois mettre diligence en garder ta personne et en
garnir ta maison, et dirent aussi que en ceste besongne l’en doit aler
adviséement et à grant délibération. Quant au premier point qui touche
la garde de ta personne, tu dois savoir que cellui qui a guerre doit
tous les jours, devant toutes choses, humblement et dévotement demander
la garde et l’aide de Dieu, [car en cest monde nul ne se puet garder
souffisamment sans la garde de nostre Seigneur.] Pour ce dit David le
prophète: se Dieu de la cité n’est garde, pour néant veille qui la
garde. Après, en la garde de ta personne tu dois mettre tes loyaux amis
esprouvés et congneus et à eulx dois demander aide pour toy garder, car
Caton dit: se tu as besoing d’aide, demande-le à tes amis, car il n’est
si bon phisicien comme le loyal amy. Après, tu te dois garder de toutes
gens estranges et mescongneus et avoir leur compaignie suspecte, car
Pierre Alphons dit: ne t’acompaigne en voye à nulle personne se tu ne
la congnois devant, et s’aucune personne s’acompaigne avec toy sans ta
voulenté et enquière de ta vie et de ta voie, fains que tu veulx aler
plus loing que tu n’as proposé; et se il porte lance, si te tieng à sa
dextre: se il porte espée, si te tieng à sa senestre.

Après, garde-toy sagement de tous ceulx[325] que je t’ay dit, car
tu dois leur conseil eschever et fuir. Après, garde-toy en telle
manière que pour la présumption de ta force tu ne desprises point
ton adversaire tant que[326] laisses tes gardes, car sage homme
doit tousjours doubter, espécialment ses ennemis. Et Salemon dit:
beneuré est cellui qui tousjours se doubte, car à cellui qui par
la dureté de son cuer a trop grant présumption, mal lui vendra. Tu
dois doncques doubter tous agais et toutes espies. Car, selon ce que
dit Sénèque[327], qui toutes choses doubte, en nulle ne cherra; et
encores dit-il: sage est celluy qui doubte, et eschiève tous maulx. Et
jasoit-ce qu’il te soit semblant estre bien asseur et en seur lieu,
toutesvoies tu dois avoir tousjours diligence de toy garder, car
Sénèque dit: qui seur se garde n’a doubte de nuls périls. Après tu te
dois garder non pas tant seulement de ton grant et fort ennemi, mais
de tout le plus petit, car Sénèque dit: il appartient à homme bien
enseignié qu’il doubte son petit ennemi. Et Ovide, ou livre du _Remède
d’amours_, dit: la petite vivre[328] occist le grant torel, et le chien
qui n’est pas moult grant relient bien le sanglier. Toutesvoies, tu ne
dois pas estre tant doubteux que tu doubtes là où riens n’a à doubter,
car il est escript: aucunes gens ont enseignié leur décevoir mais ils
ont trop doubté que l’en les déceust[329]. Après, tu te dois garder de
venin et de compaignie de moqueurs, car il est escript: avecques le
moqueur n’aies compaignie, mais la fuy et ses paroles comme le venin.

Quant au second point, c’est assavoir ouquel dirent les sages que tu
dois garnir ta maison à grant diligence, je vouldroie bien savoir
comment tu entens ceste garnison.

Dist Mellibée: Je l’entens ainsi que je doy garnir ma maison de tours,
de chasteaulx[330], d’eschifes[331] et autres édifices par lesquels
je me puisse garder et deffendre, et pour cause desquels les ennemis
doubteront à approuchier ma maison.

Lors Prudence respondi: La garnison de tours haultes et des grans
édifices appartient aucunes fois à orgueil. L’en fait les tours et les
grans édifices à grant travail et à grans despens, et quant elles sont
faites, elles ne vallent riens se elles ne sont deffendues par sages et
par bons amis loyaux, et à grans missions[332]. Et pour ce sachiez que
la plus grant garnison et la plus fort que un riche homme puisse avoir
à garder son corps et ses biens, c’est qu’il soit amé de ses subjects
et de ses voisins, car Tulles dit: une garnison que l’en ne puet
vaincre ne desconfire, c’est l’amour des citoyens.

Quant au tiers point, où les sages et anciens dirent que l’en ne
doit point aler en ceste besongne soudainement ne hastivement, mais
se doit-on pourveoir et appareillier à grant diligence et à grant
délibération, je croy qu’ils parlèrent bien et sagement, car Tulles
dit: en toutes besongnes, devant ce que l’en les commence, on se doit
appareillier à grant diligence. En vengence doncques, en guerre, en
bataille et en garnison faire, devant ce que l’en commence, l’en
doit faire son appareil à grant délibération, car Tulles dit: long
appareillement de batailles fait brief victoire; et Cassiodores[333]
dit: la garnison est plus puissant quant elle est plus long temps
pensée.

Or convient aler au conseil que te donnèrent tes voisins qui te portent
révérence sans amour, tes ennemis réconciliés, les losengeurs, ceux
qui te conseillièrent une chose en secret et autre disoient en appert,
les jeunes gens, qui tous te conseillèrent vengier tantost et faire
guerre incontinent. Et certes, ainsi comme je t’ay dit dessus, tu erras
moult en appelant telles gens à ton conseil, et ce conseil est assez
réprouvé pour les choses dessus dictes. Toutesvoies, puis qu’elles sont
dictes en général, nous descendrons en espécial. Or véons doncques
premièrement, selon ce que dit Tulles, de la vérité de ce conseil. Et
certes de la vérité de ceste besongne ne convient pas moult enquerre,
car l’en scet bien qui sont ceulx qui te ont fait ceste injure, et
quans[334] ils sont, et comment, et quant, et quelle injure ils te ont
faite. Examinons doncques la seconde condition que Tulles met, qu’il
appelle consentement, c’est à dire qui sont ceulx et quans ils sont qui
se consentent à tel conseil et à ta voulenté, et considérons aussi qui
sont ceulx et quans qui se consentent à tes adversaires.

Quant au premier, l’en scet bien quels gens se consentent à ta
voulenté, car tous ceulx que j’ay dessus nommés conseillent que tu
faces guerre tantost. Or véons doncques qui tu es et qui sont ceulx que
tu tiens tant à ennemis. Quant à ta personne, jasoit-ce que tu soies
riche et puissant, tu es tout seul et n’as nul enfant masle; tu n’as
fors une seule fille tant seulement: tu n’as frères ne cousins germains
ne nuls autres bien prouchains parens, pour paour desquels tes ennemis
se cessassent de toy poursuivre et destruire; et ta personne destruite,
tu scez bien que tes richesses se diviseront en diverses parties,
et quant chascun aura sa partie, ils ne seront forcés de vengier ta
mort. Mais tes ennemis sont trois et ont moult d’enfans, de frères et
d’autres bien prouchains amis et parens, desquels quant tu en auras
occis deux ou trois, encores en demourra assez qui pourront vengier
leur mort et te pourront occire. Et jasoit-ce que tes amis soient trop
plus que les amis de tes adversaires, ils t’appartiennent de moult
loing, et les amis de tes adversaires leur sont moult plus prouchains,
et en ce leur condition est meilleur que la tienne.

Après, voyons encores se le conseil que l’en te donna de la vengence
tantost prendre, se consent à raison. Et certes tu scez que non, car,
selon droit, nul ne doit faire vengence [d’autrui, fors le juge qui
a la jurisdiction sur lui, jasoit-ce que vengence soit] ottroyée ou
permise à aucun quant on la fait incontinent et attrempéement, selon ce
que droit le commande. Après, encores sur ce mot consentement, tu dois
regarder se ton povoir se consent à ta voulenté et à ton conseil. Et
certes tu pues dire que non, car à parler proprement, nous ne povons
riens fors ce que nous povons faire deuement et selon droit; et pour
ce que selon droit tu ne dois prendre vengence de ta propre auctorité,
l’en puet dire que ton povoir ne se consent point à ta voulenté.

Or convient examiner le tiers point que Tulles appelle conséquent. Tu
dois doncques savoir que à vengence que tu veulx faire, est conséquent
et s’ensuit autre vengence, périls, guerres et d’autres maulx sans
nombre et moult de dommages lesquels l’en ne voit maintenant.

Quant au quart point que Tulles appelle engendrement, tu dois savoir
que injure est engendrée de haine, acquisition[335] d’ennemis
enflamblés de vengence; de haine et contens guerres naissent, et
dégastement de tous biens.

Quant aux causes, qui est le derrenier point que Tulles y met, tu dois
savoir que en l’injure qui t’a esté faite a deux causes ouvrières et
efficiens: la loingtaine et la prouchaine; la loingtaine est Dieu qui
est cause de toutes causes: la prouchaine sont tes trois ennemis. La
cause accidentelle fut hayne; la cause matériel sont les cinq plaies
de ta fille; la cause formal fut la manière de faire l’injure, c’est
assavoir qu’ils appoièrent eschelles contremont les murs et entrèrent
par les fenestres; la cause final fut que ils vouldrent occire ta
fille, et par eulx ne demoura. Mais la cause final loingtaine, à quel
fin ils avendront de ceste besongne, nous ne la povons pas bien savoir,
fors par conjectures et par présumptions, car nous devons présumer
qu’ils avendront à male fin par la raison du Décret qui dit: à grant
peine sont menées à bonne fin les choses qui sont mal commencées.
Qui me demanderoit pourquoy Dieu a voulu et souffert qu’ils t’aient
fait telle injure, je n’en sauroie pas bien respondre pour certain,
car, selon ce que dit l’appostre, la science et jugement nostre
Seigneur sont si parfont que nuls ne le puet comprendre ne encerchier
souffisamment. Toutesvoies, par aucunes présumptions je tien que Dieu
qui est juste et droiturier a souffert que ce soit advenu pour cause
juste et raisonnable; car tu qui as nom Mellibée qui vault autant comme
_cellui qui boit le miel_, [le miel as tant voulu boire,] c’est à dire
la doulceur des biens temporels, des richesses, des délices et des
honneurs de ce monde, que tu en as esté tout yvres et as oublié Dieu
ton créateur, ne ne lui as pas porté honneur ne révérence ainsi comme
tu deusses. Tu n’as pas retenu en ta mémoire la parole Ovide[336] qui
dit: dessoubs le miel de la doulceur des biens du corps, est abscondu
le venin qui occit l’âme. Et Salemon dit: se tu as trouvé le miel, si
en mengue à souffisance, car se tu en mengues oultre mesure, il te
convendra vomir. Pour ce, par adventure, Dieu en despit de toy a tourné
sa face et les oreilles de sa miséricorde [autre part], et a souffert
que tu as [esté prins en la manière que tu as] péchié contre lui. Tu
as péchié contre nostre Seigneur, car les trois ennemis de l’umain
lignage, qui sont le monde, la char et le Déable, tu as laissié entrer
en ton cuer tout franchement par les fenestres du corps, sans toy
deffendre souffisamment contre leur assault et leurs temptacions, en
telle manière qu’ils ont navrée sa fille, c’est assavoir l’âme de toy,
de cinq plaies: c’est à dire de tous les péchiés mortels qui entrèrent
ou cuer parmy chascun des cinq sens naturels. Par ceste semblance
nostre Seigneur a voulu et souffert que ces trois ennemis sont entrés
en ta maison par les fenestres et ont navrée ta fille en la manière
dessus dicte.

Certes, dist Mellibée, je voy bien que vous vous efforciez moult par
doulces paroles de moy encliner à ce que je ne me venge point de mes
ennemis, et m’avez monstré moult sagement les périls et les maulx qui
pourroient advenir de ceste vengence. Mais qui vouldroit considérer
en toutes vengences tous les périls qui s’en pourroient ensuir, l’en
ne feroit jamais vengence, et ce seroit moult grant dommage, car par
vengence les mauvais sont ostés d’entre les bons, et ceulx qui ont cuer
de mal faire se retraient[337] quant ils voient que l’en punist les
malfaiteurs.

A ce respond dame Prudence: certes, dist-elle, je vous octroie que de
vengence vient moult de biens, mais faire vengence n’appartient pas à
un chascun, fors seulement aux juges et à ceulx qui ont la jurisdiction
sur les malfaiteurs, et dy oultre que ainsi que une personne singulière
pécheroit en faisant vengence, [ainsi pécheroit le juge en laissant
faire[338] vengence,] car Sénèque dit: cellui nuist aux bons, qui
espargne les mauvais; et, selon ce que dist Cassiodores, l’en doubte
faire les oultrages, quant on scet qu’il desplairoit aux juges et aux
souverains. Et un autre dit: le juge qui doubte faire les drois[339],
fait les gens mauvais; et saint Pol l’appostre dist en l’épistre aux
Rommains que le juge ne porte pas le glaive sans cause, mais le porte
pour punir les mauvais [et pour deffendre les] preudomes. Se tu veulx
doncques avoir ta vengence de tes ennemis, tu recourras au juge qui
a la jurisdiction sur eulx, et il les punira selon droit, et encores
s’ils l’ont desservi, en leur avoir[340] en telle manière que ils
demourront povres et vivront à honte.

Hé! dist Mellibée, ceste vengence ne me plaist point: je regarde que
fortune m’a nourry dès mon enfance et m’a aidié à passer moult de fors
pas. Je la vueil maintenant essayer, et croy que à l’aide de Dieu elle
m’aidera à vengier [ma honte].

Certes, dit Prudence, se tu veulx ouvrer de mon conseil, tu ne
essaieras point fortune ne ne t’appoieras à elle, car, selon ce que
dit Sénèque, les choses se font folement, qui se font à l’espérance de
fortune. Car fortune est comme une verrière qui de tant comme elle est
plus clere et plus resplendissant, de tant est-elle plus tost brisée;
et pour ce, ne t’y fie point, car elle n’est point estable, et là où
tu cuideras estre plus seur de son aide, elle te fauldra. Et pour ce
que tu dis que fortune t’a nourry dès ton enfance, je te dy que de
tant tu te dois moins fier en elle et en ton sens, car Sénèque dit que
cellui que fortune nourrist trop, elle le fait fol. Puis doncques que
tu demandes vengence, et la vengence qui se fait selon l’ordre de droit
et devant le juge ne te plaist, et la vengence qui se fait en espérance
de fortune est mauvaise et périlleuse et si n’est point certaine,
tu n’as remède de recours fors au souverain et vray juge qui venge
toutes villenies et injures, et il te vengera, selon ce que lui mesmes
tesmoingne: à moy, dit-il, laisse la vengence et je la feray.

Mellibée respondi: Se je, dit-il, ne me venge de la villenie que l’en
m’a faite, je semondray ceulx qui l’a m’ont faicte et tous autres
mauvais à moy faire une nouvelle villenie, car il est escript: se tu
sueffres sans vengier la vieille villenie, tu semons à la nouvelle. Et
ainsi, par souffrir l’en me feroit tant de villenies de toutes pars
que je ne le pourroie souffrir ne porter, ains seroie au bas du tout
en tout, car il est escript: en moult souffrant, t’avendront assez de
choses que souffrir ne pourras.

Certes, dit Prudence, je te ottroie que trop grant souffrance n’est
pas bonne, mais pour ce ne s’ensuit-il pas que chascune personne à qui
l’en fait injure prengne la vengence, car ce appartient aux juges tant
seulement, qui ne doivent pas souffrir que les villenies et injures ne
soient vengées. Et pour ce, les deux auctorités que tu as avant traites
sont entendues tant seulement des juges que quant ils seuffrent trop
faire les injures et villenies sans punition, ils ne semonnent pas tant
seulement faire les injures, mais les commandent. Ainsi le dit un sage.
Le juge, dit-il, qui ne corrige le pécheur, luy commande à péchier; et
pourroient bien tant souffrir les juges et les souverains [de maulx]
en leur terre, que les malfaiteurs les getteroient hors de leur terre,
et leur convendroit perdre leur seignorie à la parfin. Mais or posons
que tu aies licence de toy vengier, je dy que tu n’as pas la puissance
quant à présent, car se tu veulx faire comparoison de ta puissance à
la puissance de tes adversaires, tu trouveras trop de choses, selon ce
que je t’ay monstré dessus, par quoy leur condition est meilleur que la
tienne, et pour ce je te dy qu’il est bon, quant à maintenant, de toy
souffrir et avoir patience.

Après, tu scez que l’en dit communément que contendre à plus fort,
c’est enragerie: contendre à esgal, c’est péril: contendre à moindre,
c’est honte. Et pour ce, l’en doit fuir toute contention tant comme
l’en puet, car Salemon dit que c’est grant honneur à homme quant il se
scet guetter de brigue et de contens. Et se plus fort de toy te griève,
estudie-toy plus à le appaisier que à toy vengier, car Sénèque dit que
cellui se met en grant péril, qui se courrouce à plus fort de lui; et
Caton dit: se plus grant que toy te griefve, sueffre-toy: car cellui
qui t’a une fois grevé, te pourra une autre fois aidier.

Or posons que tu aies licence et puissance de toy vengier, je dy
encores que moult de choses sont, qui te doivent retraire et te doivent
encliner à toy souffrir et avoir patience en l’injure qui t’a esté
faicte et aux autres tribulations de ce monde.

Premièrement [se tu veulx considérer les deffaulx qui sont en] toy,
pour lesquels Dieu a voulu souffrir que ceste tribulation te soit
advenue, selon ce que j’ay dit dessus, car le poëte dit que nous
devons porter en patience les tribulations qui nous viennent, quant
nous pensons que nous les avons desservies. Et saint Grégoire dit que
quant un chascun considère le grant nombre de ses défaulx et de ses
péchiés, les peines et les tribulations qu’il sueffre lui en appairent
plus petites; et de tant comme[341] son péchié monte, lui semble la
peine plus légière. Après, moult te doit encliner à patience, la
patience nostre Seigneur Jhésu-Crist, selon ce que dit saint Pierre en
ses épistres. Jhésu-Crist, dit-il, a souffert [pour nous] et a donné
exemple à un chascun de lui ensuivre, car il ne fist oncques péchié,
ne onques de sa bouche n’yssi une villenie. Quant on le maudissoit,
il ne maudissoit point: quant on le batoit, il ne menaçoit point.
Après, moult te doit encliner à patience, la grant patience des Sains
de paradis qui ont eu si grant patience ès tribulations qu’ils ont
souffertes sans leur coulpe. Après, moult te doit encliner à patience
que les tribulations de ce monde durent très petit de temps et sont
tantost passées, et la gloire que l’en acquiert pour avoir patience ès
tribulations est pardurable, selon ce que dit l’épistre seconde à ceulx
de Corinthe.

Après, tien fermement que cellui n’est pas bien enseigné qui ne scet
avoir patience, car Salemon dit que la doctrine de l’omme est congneue
par patience, et nostre Seigneur dit que patience vaint; et encores dit
que en nostre patience nous possiderons nos âmes. Et autre part dit
Salemon que cellui est patient qui se gouverne par grant prudence; et
cellui mesmes dit que l’omme courrouceux fait les noises, et le patient
les attrempe. Aussi dit-il que mieulx vault estre bien patient que
bien fort, et plus fait à prisier cellui qui puet avoir la seignourie
de son cuer que cellui qui par grant force prent les grans cités; et
pour ce dit saint Jaques en ses épistres que patience est euvre de
perfection.

Certes, dit Mellibée, je vous ottroye, dame Prudence, que patience
est une grant vertu, mais chascun ne puet pas avoir la perfection que
vous alez quérant. Je ne suis pas du nombre des bien parfais, et pour
ce mon cuer ne puet estre en paix jusques à tant que je soye vengié.
Et jasoit-ce que en ceste vengence eust grant péril, je regarde que
aussi [avoit-il grant péril à faire la villenie qui m’a esté faite,
et toutesvoies] mes adversaires n’ont pas regardé le péril, mais ont
hardiement acompli leur voulenté, et pour ce il me semble que l’en ne
me doit pas reprendre se je me met en un pou de péril pour moy vengier
et se je fais un grant excès, car on dit que excès n’est corrigé
que par excès, c’est à dire que oultrage ne se corrige fors que par
oultrage.

Hé! dit dame Prudence, vous dictes vostre voulenté, mais en nul cas
du monde l’en ne doit faire oultrage ne excès pour soy venger ne
autrement, car Cassiodores dit que autant de mal fait cellui qui se
venge par oultrage comme cellui qui a fait oultrage. Et pour ce, vous
vous devez vengier selon l’ordre de droit, non pas par excès ne par
oultrage, car ainsi que vous savez que vos adversaires ont péchié
encontre vous par leur oultrage, [aussi péchiez-vous se vous vous
voulez venger] autrement que droit ne l’a commandé; et pour ce dit
Sénèque que l’en ne doit nulle fois vengier mauvaistié. Et se vous
dictes que droit octroie que l’en deffende violence par violence
et barat par barat, certes c’est vérité quant la deffense se fait
incontinent et sans intervalle et pour soy deffendre, non pas pour soy
venger, et s’y convient mettre telle diligence[342] et deffense que
l’en ne puisse reprendre cellui qui se deffent d’excès ne d’oultrage,
car autrement ce seroit contre droit et contre raison. Or vois-tu
bien que tu ne fais pas incontinent deffense, ne pour toy deffendre,
mais pour toy vengier, et si n’as pas voulenté de faire ton fait
attrempéement; et pour ce il me semble encores que la patience est
bonne, car Salemon dit que cellui qui n’est pas patient aura dommage.

Certes, dit Mellibée, je vous octroye que quant un homme est impatient
et courroucié de ce qui ne le touche et ne lui appartient, se dommage
lui vient n’est pas merveille. Car la règle de droit dit que cellui est
coupable qui s’entremet de ce qui ne lui appartient point; et Salemon
dit ès Proverbes que cellui qui s’entremet des noises d’autruy est
semblable à cellui qui prent le chien par les oreilles. Et aussi comme
cellui qui tient le chien estrange qu’il ne congnoist est aucune fois
mors du chien, aussi est-il raison que dommage viengne à cellui qui
par impatience et par courroux se mesle de la noise d’autruy qui riens
ne lui appartient. Mais vous savez bien que ce fait me touche moult de
près, et pour ce j’en suis courroucié et impatient, et ce n’est pas
merveille; et si ne vois mie, sauve vostre grâce, que grant dommage me
puisse venir de moy vengier, car je suis plus riche et plus puissant
que ne sont mes adversaires et vous savez bien que par argent se
gouvernent et font les choses et le fait de ce monde, et Salemon dit
que toutes choses obéissent à pécune.

Prudence, quant elle oy son mary vanter de sa richesse et de sa
puissance et soy esjouir, et despriser la povreté de ses adversaires,
parla en ceste manière: je vous octroie que vous estes riche et
puissant et que les richesses sont bonnes à ceulx qui les ont bien
acquises et bien en usent, car ainsi comme le corps ne puet vivre sans
[l’âme, ainsi ne puet-il vivre sans] les biens temporels, et par les
richesses l’en puet acquerre les grans lignages et les amis. Et pour
ce dit Pamphile[343]: se la fille d’un bouvier est riche, elle puet
eslire de mil hommes lequel qu’elle veult pour son mary, car nul ne
la refusera pas; et dit encores: se tu es, dit-il, bien euré, c’est
à dire riche, tu trouveras grant nombre de compaignons et d’amis, et
se ta fortune se change et que tu soies povre, tu demoureras tout
seul. Et oultre dit Pamphile que par richesses sont nobles ceulx qui
sont villains par lignage; et ainsi comme de grans richesses vient
moult de biens, ainsi de grant povreté viennent moult de maulx, car
grant povreté contraint la personne à moult de maulx faire, et pour ce
[l’appelle Cassiodores mère de crimes, et dit aussi] Pierre Alphons:
une des grans adversités de ce siècle, si est quant un homme franc par
nature est contraint par povreté mendier l’aumosne de son ennemy; et
la raison de ce rent Innocent[344] en un sien livre, disant: dolente
et meschant est la condition des povres mendians, car se ils ne
demandent, ils meurent de fain, et se ils demandent, ils meurent de
honte; et toutesvoies nécessité les contraint à demander. Et pour ce
dit Salemon que mieulx vault mourir que avoir telle povreté, car, selon
ce qu’il dit autre part, mieulx vault la mort amère que telle vie.

Par les raisons que je t’ay dictes et moult d’autres que dire je te
pourroie, je t’ottroie que bonnes sont les richesses à ceulx qui
bien les acquièrent et qui bien en usent; et pour ce, je te vueil
monstrer comment tu te dois avoir en amassant les richesses et en
usant d’icelles. Premièrement, tu les dois acquerre non mie ardemment,
mais à loisir et attrempéement et par mesure, car l’homme qui est trop
ardent d’acquerre richesses se abandonne légièrement à tous vices et
à tous autres maulx; et pour ce dit Salemon: qui trop se haste de soy
enrichir, il ne sera pas innocent; et dit aussi autre part que la
richesse hastivement venue, hastivement s’en va, mais celle qui est
venue petit à petit se croist tousjours et se multiplie. Après, tu dois
acquerre les richesses par ton sens et par ton travail, à ton prouffit
et sans dommage d’autruy, car la loy dit que nul ne se face riche au
dommage d’autruy, et Tulles dit que douleur, ne peine, ne mort, ne
autre chose qui puisse advenir à homme, n’est tant contraire à homme
ne contre nature, comme accroistre ses richesses au dommage d’autruy;
et Cassiodores dit que vouloir accroistre sa richesse de ce petit que
le mendiant a, surmonte toute cruaulté. Et pour ce que tu les puisses
acquerre plus loyaulment, tu ne dois pas estre oiseux ne paresseux de
faire ton prouffit, mais dois fuir toute oisiveté, car Salemon dit que
oisiveté enseigne moult de maulx à faire; et dit autre part que cellui
qui travaille et cultive sa terre mengera du pain, mais cellui qui est
oiseux cherra en povreté et mourra de fain. Cellui qui est oiseux ne
treuve nul temps convenable à faire son prouffit, car, selon ce que dit
un versifieur, il s’excuse en yver de ce qu’il fait trop froit, et en
esté de ce qu’il fait trop chault. Pour ces causes dit Caton: veille
souvent et ne t’abandonne à trop dormir, car trop grant repos est le
nourissement des vices. Et pour ce dit saint Jhérome: fay tousjours
aucunes bonnes euvres pour ce que l’ennemi ne te treuve oiseux, car
l’ennemi ne trait pas légièrement en son euvre celluy qui est occupé
en bonnes euvres. En acquérant doncques les richesses, tu dois fuir
oisiveté.

Après, des richesses que tu auras acquises par ton sens et par ton
travail et deuement, tu dois user en telle manière, c’est assavoir
que tu ne sois tenu pour trop eschars ne pour fol larges, car ainsi
comme fait à blasmer avarice, ainsi fait à blasmer et reprendre folle
largesse. Et pour ce dit Caton: use des choses acquises par telle
manière que l’en ne t’appelle pas povre ne chétif, car grant honte est
à homme qui a le cuer povre et la bourse riche. Aussi dist-il: use
des biens que tu auras acquis, sagement, sans mésuser, car ceulx qui
folement desgastent ce qu’ils ont, quant ils n’ont plus riens, ils se
abandonnent légièrement à prendre l’autrui. Je dy doncques que tu dois
fuir avarice en usant des richesses acquises, en telle manière que l’en
ne die pas que tes richesses soient ensevelies, mais que tu les as en
ta puissance; car un sage reprent l’omme aver et dit ainsi en deux
vers: pourquoy homme qui est cendre et qui mourir convient, ensevelit
son avoir par si grant avarice? Pourquoy se joinct-il tant à son avoir
que l’en ne puet l’en déssevrer? Car quant il mourra, il ne l’emportera
pas avec soy. Et pour ce dit saint Augustin: l’omme aver est semblable
à enfer, car plus dévoure, et plus veult dévourer. Et ainsi comme tu
dois d’avoir user en manière que l’en ne te clame aver et chétif, ainsi
tu te dois garder que l’en ne te clame pour un fol large. Pour ce dit
Tulles: les biens de ton hostel ne doivent pas estre tant enclos que
pitié ne débonnaireté ne les puissent ouvrir, et aussi ne doivent-ils
pas tant estre ouvers qu’ils soient abandonnés à un chascun.

Après, en acquérant les richesses et en usant d’icelles, tu dois
tousjours avoir trois choses en ton cuer, c’est assavoir Dieu,
conscience et bonne fame et renommée. Tu dois doncques avoir Dieu en
ton cuer, car pour nulle richesse tu ne dois faire chose qui desplaise
à Dieu ton créateur, car, selon le dit Salemon, mieulx vault petit
avoir et de Dieu la paour que grant trésor acquerre et perdre son
seigneur. Et le philosophe dit que mieulx vault estre preudome et petit
avoir que estre mauvais et avoir grans richesses. Après, je dy que tu
dois acquerre et user des richesses, sauve tousjours ta conscience,
car l’appostre dit que la chose dont nous devons avoir plus grant
gloire, si est quant nostre conscience nous porte bon tesmoignage; et
le sage dit: bonne est la substance dont l’acquérir ne nuit point à la
conscience.

Après, en acquérant les richesses et en usant d’icelles, tu dois
avoir grant cure et grant diligence comment ta bonne fame et renommée
soit tousjours gardée, car il est escrit: le gaing doit estre appellé
perte, qui sa bonne fame ne garde; et Salemon dit: mieulx vault la
bonne renommée que les grans richesses; et pour ce, il dit autre part:
aies grant diligence de garder ton bon renom et ta bonne fame, car
ce te demourra plus que nul trésor grant et précieux. Et certes il
ne doit pas estre dit gentils homs, qui toutes autres choses arrière
mises après Dieu et conscience, n’a grant diligence de garder sa
bonne renommée. Pour ce dit Cassiodores: il est signe de gentil cuer,
quant il affecte et désire bon nom et bonne fame; et pour ce dit
saint Augustin: deux choses te sont nécessaires, c’est assavoir bonne
conscience pour toy, bonne fame pour ton prouchain: et cellui qui tant
se fie en sa bonne conscience qu’il néglige sa bonne renommée et ne
fait force de la garder, il est cruel et villain.

Or t’ay-je monstré comment tu te dois porter en acquérant les richesses
et usant d’icelles; et pour ce que vous vous fiez tant en vos richesses
que pour la fiance que vous y avez vous voulez mouvoir guerre [et faire
bataille, je vous conseille que vous ne commencez point guerre, car la
grant] fiance de vos richesses ne souffit point à guerre maintenir.
Pour ce dit un philosophe: homme qui guerre vuelt avoir, n’aura jà à
souffisance avoir, car de tant comme l’omme est plus riche, de tant lui
convient faire plus grans mises se il veut avoir honneur et victoire;
car Salemon dit: où plus a de richesses, plus a de despendu. Après,
très chier seigneur, jasoit-ce que par vos richesses moult de gens vous
puissiez avoir, toutesvoies pour ce ne vous convient pas commencier
guerre là où vous povez avoir autrement paix à vostre honneur et à
vostre proffit, car la victoire des batailles de ce monde ne gist pas
ou grant nombre de gens ne en la vertu des hommes, mais en la main
et en la voulenté de Dieu. Et pour ce, Judas Machabeus qui estoit
chevalier de Dieu, quant il se deut combattre contre son adversaire
qui avoit plus grant nombre de gens qu’il n’avoit, il reconforta sa
petite compaignie et dit: aussi légièrement puet donner Dieu victoire à
pou de gens comme à moult, car la victoire des batailles ne vient pas
du grant nombre de gens, mais vient du ciel. Et pour ce, très chier
seigneur, que nul n’est certain s’il est digne que Dieu lui doint
victoire ne plus que il est certain se il est digne de l’amour de Dieu
ou non, selon ce que dit Salemon, un chascun doit avoir grant paour de
faire guerre, et pour ce que ès batailles a moult de périls, et advient
aucunes fois que aussi tost occist-l’en le grant comme le petit.
Car, selon ce qu’il est escript ou second livre des Rois, les fais
des batailles sont adventureux et ne sont pas certains[345], ainçois
également occist maintenant l’un, maintenant l’autre; et pour ce que
péril y a, tout homme sage doit fuir les guerres tant comme il puet
bonnement, car Salemon dit: qui aime le péril, il cherra en péril.

Après ce que dame Prudence ot parlé, Mellibée respondi: je voy bien,
dist-il, dame Prudence, par vos belles parolles et par les raisons que
vous mettez avant, que la guerre ne vous plaist point, mais je n’ay pas
encore oy vostre conseil comment je me doy porter en ceste besongne.

Certes, dist-elle, je vous conseille que vous accordiez[346] à vos
adversaires et que vous ayez paix avec eulx, car Sénèque dit en ses
escrips que par concorde les richesses petites deviennent grandes, et
par discorde les grandes deviennent petites et vont à déclin et se
fondent tousjours; et vous savez que un des grans biens de ce monde ce
est paix. Pour ce dit Jhésu-Crist à ses appostres: bieneurés sont ceulx
qui aiment et pourchassent la paix, car ils sont appellés enfans de
Dieu.

Hé! dist Mellibée, or voy-je bien que vous n’aimez pas mon honneur.
Vous savez que mes adversaires ont commencié la riote et la brigue
par leur oultrage, et voiez qu’ils ne requièrent point la paix et ne
demandent pas la réconciliation; vous voulez doncques que je me voise
humilier et crier mercy? Certes, ce ne seroit pas mon honneur, car
ainsi comme l’on dit que trop grant familiarité engendre mesprisement,
aussi fait trop grant humilité.

Lors, dame Prudence fit semblant d’estre courrouciée et dist: Sire!
Sire! sauve vostre grâce, j’aime vostre honneur et vostre prouffit
comme le mien propre, et l’ay tousjours aimé, et vous ne autre ne
veistes oncques le contraire. Et se je vous avoie dit que vous deviez
pourchasser la paix et la réconciliation, je n’auroie pas tant mespris
comme il vous semble, car un sage dit: la dissension tousjours commence
par autre et la paix par toy; et le prophète dit: fuy le mal et
fay le bien, quier la paix et la pourchasse tant comme tu pourras.
Toutesvoies, je ne vous ay pas dit que vous requérez la paix premier
que vos adversaires, car je vous sçay bien de si dur cuer que vous ne
feriez à pièce[347] tant pour moy, et toutesvoies Salemon dit que mal
vendra en la fin à cellui qui a le cuer trop dur.

Quant Mellibée oy dame Prudence faire semblant de courroux, si dist:
Dame, je vous prie qu’il ne vous desplaise chose que je vous die, car
vous savez que je suis courroucié, et n’est mie merveille, et ceulx qui
sont courrouciés ne scevent pas bien qu’ils font ne qu’ils dient; pour
ce, dit le philosophe que les troublés ne sont pas bien cler-voyans.
Mais dictes et conseilliez ce qu’il vous plaira, et je suis appareillié
du faire; et se vous me reprenez de ma folie, je vous en doy plus
prisier et amer, car Salemon dit que cellui qui durement reprent cellui
qui fait folie, il doit trouver plus grant grâce envers lui que cellui
qui le déçoit par doulces paroles.

Je, dit Prudence, ne fay semblant d’estre yrée et courroucée fors
pour vostre grant prouffit, car Salemon dit: mieulx vault cellui qui
le fol reprent et qui lui monstre semblant d’ire, que le loer quant
il mesprent, et de ses grans folies rire; et dit après que par la
tristesse du visage corrige le fol son courage.

Adoncques dit Mellibée: Dame je ne sauroie respondre à tant de belles
raisons que vous mettez avant: dictes-moy briefment vostre voulenté et
vostre conseil, et je suis appareillié de l’acomplir.

Lors, dame Prudence descouvrit toute sa voulenté et dist ainsi: Je
conseille que devant toutes choses vous faciez paix à Dieu et vous
réconciliez à lui, car, selon ce que je vous ay dit autres fois, il
vous a souffert advenir ceste tribulation par vos péchiés, et se
vous faites ce, je vous promects de par lui que il vous amènera vos
adversaires [à vos piés et appareillés de faire toute vostre voulenté,
car] Salemon dit: quant les voies des hommes plaisent à Dieu, il leur
convertit leurs ennemis et les contraint de requérir paix. Après, je
vous prie qu’il vous plaise que je parle à secret à vos ennemis et
adversaires, sans faire semblant que ce viengne de vostre consentement:
et lors, quant je sauray leur voulenté, je vous pourray conseiller plus
seurement.

Faites, dit Mellibée, toute vostre voulenté, car je met tout mon fait
en vostre disposition.

Lors dame Prudence, quant elle vit la bonne voulenté de son mary, si
ot délibération en soy mesmes et pensa comment elle pourroit mener
ceste besongne à bonne fin. Et quant elle vit que temps fut, elle manda
les adversaires en secret lieu, et leur proposa sagement les grans
biens qui sont en paix et les grans périls qui sont en guerre, et leur
enseigna moult doulcement comment ils se devoient repentir de l’injure
qu’ils avoient faite à Mellibée son seigneur, à elle et à sa fille.

Quant ceulx oïrent les doulces paroles de dame Prudence, ils furent si
surprins et orent si grant joie que nul ne le pourroit extimer. Hé!
dame, dirent-ils, vous nous avez dénoncié en la bénéisson de doulceur
selon ce que dit David le prophète, car la réconciliation dont nous
ne sommes pas dignes et que nous vous deussions requerre à grant
dévotion et à grant humilité, vous, par vostre grant doulceur, la nous
avez présentée. Or véons-nous bien que la sentence Salemon est vraie,
qui dit que doulce parole multiplie les amis et fait débonnaires les
ennemis. Certes, dirent-ils, nous mettons nostre fait en vostre bonne
voulenté, et sommes appareilliés en tout et par tout obéir au dit et
au commandement de monseigneur Mellibée; et pour ce, très chère dame
et bénigne, nous vous requérons et prions tant humblement comme nous
povons plus, que il vous plaise acomplir par fait vos douces paroles.
Toutesvoies, très chère dame, nous considérons et congnoissons que
nous avons offendu monseigneur Mellibée oultre mesure et plus que ne
pourrions amender, et pour ce nous obligons nous et nos amis à faire
toute sa voulenté et son commandement; mais, par aventure, il, comme
courroucié, nous donnera telle peine que nous ne pourrons acomplir ne
porter. Et pour ce, plaise vous avoir en ce fait tel advisement que
nous et nos amis ne soions mie déshérités et perdus par nostre folie.

Certes, dit Prudence, il est dure chose et périlleuse que un homme se
commette du tout en l’arbitrage et en la puissance de ses ennemis,
car Salemon dit: oiez-moy, dit-il, tous peuples et toutes gens et
gouverneurs de l’Église: à ton fils, à ta femme, à ton frère et à ton
ami ne donne puissance sur toy, en toute ta vie. Se il a doncques
deffendu que l’en ne donne puissance sur soy à frère ne ami, par plus
fort raison il deffend que l’en ne la donne à son ennemi. Toutesvoies,
je vous conseille que vous ne vous deffiez point de mon seigneur: je
le congnois et sçay qu’il est debonnaire, large et courtois, et n’est
point convoiteux d’avoir; il ne désire en ce monde fors honneur tant
seulement. Après, je sçay bien que en ceste besongne il ne fera riens
sans mon conseil, et je feray, se Dieu plaist, que ceste chose vendra à
bonne fin, en telle manière que vous vous devrez loer de moy.

Adonc, dirent-ils: nous mettons nous et nos biens, en tout et partout,
en vostre ordonnance et disposition, et sommes appareilliés de venir
au jour que vous nous vouldrez donner, et faire obligation si forte
comme il vous plaira, que nous acomplirons la voulenté de monseigneur
Mellibée et la vostre.

Dame Prudence, quant elle oy la responce d’iceulx, si leur commanda
retourner en leurs lieux secrètement; elle d’autre part s’en retourna
vers son seigneur Mellibée, et lui conta comment elle avoit trouvé ses
adversaires repentans et recongnoissans leurs péchiés, et appareilliés
à souffrir toutes peines, et requérans sa pitié et sa miséricorde.

Lors Mellibée respondi: Icellui est digne de pardon, qui ne excuse
point son péchié, mais le recongnoist et s’en repent et demande
indulgence; car Sénèque dit: là est rémission où est confession, car
confession est prouchaine à innocence; et dit autre part: cellui est
presque innocent qui a honte de son péchié et le recongnoist. Et pour
ce je me accorde à paix, mais il est bon que nous la facions de la
voulenté et du consentement de nos amis.

Lors Prudence fist une chière lie et joieuse et dist: Certes, vous avez
trop bien parlé, car tout ainsi comme par le conseil et aide de vos
amis vous avez eu en propos de vous vengier et de faire guerre, aussi
sans demander leur conseil vous ne devez accorder ne faire paix, car la
loy dit que nulle chose n’est tant selon nature comme la chose deslier
par ce dont elle a esté liée.

Lors incontinent dame Prudence envoia messagiers et manda querre leurs
parens et leurs anciens amis loyaulx et sages, et leur raconta le
fait en la présence de Mellibée tout par ordre et en la guise que il
est devisé par dessus, et leur demanda quel conseil ils donroient
sur ce. Lors les amis Mellibée, toutes choses considérées et icelles
dessusdictes mesmes délibérées et examinées à grant diligence,
donnèrent conseil de paix faire et que l’en les receust à miséricorde
et à mercy. Quant dame Prudence ot oy le consentement de son seigneur
et le conseil de ses amis à son entention, si fut moult joyeuse de
cuer. L’en dist, fist-elle, ès Proverbes: le bien que tu peus faire au
matin, n’attens pas le soir ne l’endemain, et pour ce je te conseille
que tantost messagiers sages et advisés tu envoies à iceulx gens pour
leur dire que se ils veullent traictier de paix et d’accord ainsi comme
ils se sont présentés, que ils se traient vers nous incontinent et sans
dilation, ensemble leurs fiances[348] loyaulx et convenables.

Ainsi comme dame Prudence le conseilla, ainsi fut-il fait. Quant iceulx
trois malfaicteurs et repentans de leurs folies oïrent les messagiers,
ils furent liés et joyeux et respondirent, en rendant grâces à
monseigneur Mellibée et à toute sa compaignie, qu’ils estoient prests
et appareilliés d’aler vers eulx sans dilation et de obéir en tout et
partout à leur commandement. Et tantost après, ils se mirent à la voie
d’aler à la court monseigneur Mellibée, ensemble leurs femmes et aucuns
de leurs amis loyaulx.

Quant Mellibée les ot en sa présence, si dist: Il est vérité que vous,
sans cause et sans raison, avez fait injure à moy, à ma femme Prudence
et à ma fille, en entrant en ma maison à violence et en faisant tel
oultrage comme chascun scet, pour laquelle cause vous avez mort
desservie; et pour ce je vueil savoir de vous se vous vous voulez
mettre du tout à la punition et à la vengence de cest oultrage à ma
voulenté et à la voulenté de ma femme.

Lors l’ainsné et le plus sage de ces trois respondi pour tous. Sire,
dit-il, nous ne sommes pas dignes de venir à la court de si noble,
ne de tel homme comme vous estes, car nous avons tant meffait que
en vérité nous sommes dignes de mort, non pas de vie. Toutesvoies,
nous nous confions en vostre doulceur et en la debonnaireté dont
vous estes renommé par tout le monde et pour ce nous nous offrons et
sommes appareilliés de obéir à tous vos commandemens, et vous prions à
genoulx et à larmes que vous ayez pitié et miséricorde de nous. Lors
Mellibée [les releva] bénignement [et] receut leurs obligations par
leur serement et par leurs pleiges[349], et leur assigna journée de
retourner à sa court et de eulx offrir à sa personne pour oïr sentence
à sa voulenté[350].

Ces choses ainsi ordonnées, et un chascun d’une part et d’autre départi
de ensemble, dame Prudence parla premièrement à son seigneur Mellibée
et lui demanda quelle vengence il entendoit prendre de ses adversaires.
Certes, dit Mellibée, je entens à les déshériter de tout ce qu’ils ont
et eulx envoïer oultre mer, sans demourer plus en ce païs ne retourner.

Certes, dit Prudence, ceste sentence seroit moult félonneuse et contre
raison, car tu es trop riches et n’as pas besoing de l’autruy richesse
ne de l’autrui argent, et pourroies estre par raison notés et repris
de convoitise qui est un grant vice et racine de tous maulx. Et, selon
ce que dit l’appostre, il te vauldroit mieulx tout [perdre du tien
que prendre le leur; par ceste manière mieulx vault] perdre à honneur
que tout gaignier à honte; et autre part aussi: le gaing doit estre
appellé perte, qui la bone fame ne garde; et dit oultre que l’en ne se
doit pas seulement garder de faire chose par quoy l’en perde sa bonne
fame, mais se doit-on tousjours efforcier de faire chose aucune pour
acquérir nouvelle et meilleur fame, car il est escript: la vieille fame
est tost alée quant elle n’est renouvellée. Après, quant à ce que tu
dis que tu les veulx envoïer oultre la mer sans jamais retourner, il me
semble que ce seroit mésuser de la puissance que ils t’ont donnée sur
eulx pour faire à toi honneur et révérence, et le droit dit que cellui
est digne de perdre son prévilège qui mésuse de la puissance qui lui
a esté donnée. Et dis plus, car supposé que tu leur puisses enjoindre
telle peine selon droit, laquelle chose je ne octroie mie, je dis que
tu ne la pourroies pas mener de fait à exécution, ains, par aventure,
convendroit retourner à guerre comme devant. Et pour ce, se tu veulx
que l’en obéisse à toy, il te convient sentencier plus courtoisement,
car il est escript: à cellui qui plus doulcement commande, obéist-l’en
le mieulx; et pour ce je te prie que, en ceste besongne te plaise
vaincre ton cuer, car Sénèque dit: deux fois vaint, qui son cuer vaint;
et Tulles aussi dit: riens ne fait tant à loer en grant homme que quant
il est debonnaire et s’appaise légièrement. Et pour ce je te prie
qu’il te plaise toy porter en telle manière en ceste vengence que ta
bonne fame soit gardée et que tu soies loé de pitié et de doulceur, et
qu’il ne te conviengne pas repentir de chose que tu faces, car Sénèque
dit: mal vaint qui se repent de sa victoire. Pour ces choses je te prie
que tu adjoustes à ton jugement miséricorde, à celle fin que Dieu ait
de toy miséricorde en son derrain jugement, car saint Jacques dit en
son épistre: jugement sans miséricorde sera fait à cellui qui ne fera
miséricorde, car justice sans miséricorde est tirannie.

Quant Mellibée ot oy toutes les paroles dame Prudence et ses sages
enseignemens, si fut en grant paix de cuer et loua Dieu qui lui avoit
donné si sage compaigne, et quant la journée vint que ses adversaires
comparurent en sa présence, il parla à eulx moult doulcement et dit:
Jasoit-ce que vous vous soiez portés envers nous moult orguilleusement,
et de grant présumption vous soit advenu, toutesvoies la grant humilité
que je voy en vous me contraint à vous faire grâce, et pour ce nous
vous recevons en nostre amitié et en nostre bonne grâce, et vous
pardonnons toutes injures et tous vos meffais encontre nous, à celle
fin que Dieu au point de la mort nous vueille pardonner les nostres.

       *       *       *       *       *

Belle seur, ainsi povez-vous veoir comment sagement ceste bonne preude
femme Prudence refraigni et couvri la grant douleur qu’elle mesmes
avoit en son cuer, qui estoit si triste et si dolente pour l’injure
qu’elle et sa fille avoient soufferte en leur propre corps, dont
elle ne disoit un seul mot pour ce qu’il sembloit et vray estoit que
Mellibée s’en fust plus désespéréement esmeu que devant; et ainsi
monstroit bien qu’elle l’aimoit, et sagement le rapaisoit; ne icelle
bonne dame ne se démonstroit estre courrouciée fors que par le courroux
que son mary prenoit tant seulement, et le sien courroux céloit et
tapissoit en son cuer, sans en faire quelconque démonstrance. Vous
povez aussi par ce que dit est en l’istoire veoir comment sagement
et subtillement, par bonne meurté et humblement, elle admonnestoit
son mary à tolérer et dissimuler son injure et luy preschoit patience
sur si grant cas, et devez considérer les grans et cordiales pensées
que luy en convenoit avoir jour et nuit à trouver si fors argumens
et si vives raisons pour oster la rigueur de l’emprise à quoy son
mary tendoit. A ce monstroit-elle bien qu’elle l’amoit et pensoit
à le retraire de sa fole voulenté, et povez veoir comment sagement
en la parfin elle amolia le courage d’icellui, et comment la bonne
dame, sans cesser, pourchassa par divers intervalles et exploita tant
qu’elle l’appaisa du tout. Et pour ce je vous di que ainsi sagement,
subtillement, cautement et doulcement doivent les bonnes dames
conseillier et retraire leurs maris des folies et simplesses dont elles
les voyent embrasés et entéchiés, et non mie cuidier les retourner par
maistrise, par hault parler, par crier à leurs voisins ou par les rues,
ou par les blasmer, par elles plaindre à leurs amis et parens, ne par
autres voies de maistrise. Car tout ce ne vault fors engaignement[351]
et renforcement de mal en pis, car cuer d’homme envis[352] se corrige
par domination ou seignourie de femme, et sachiez qu’il n’est si povre
homme ne de si petite valeur, puis qu’il soit marié, qui ne vueille
seignourir[353].

Encores ne me vueil-je pas taire d’un exemple servant au propos de
retraire son mary par debonnaireté, lequel exemple je oys pieçà compter
à feu mon père dont Dieux ait l’âme, qui disoit que il y avoit une
bourgoise demeurant à Paris, appelée dame Jehanne la Quentine qui
estoit femme de Thomas Quentin. Elle sceut que le dit Thomas son mary
simplement et nicement foloioit et repairoit et aucunefois gisoit
avec une povre fille qui estoit filleresse de laine au rouet, et
longuement, sans en monstrer semblant ou dire un seul mot, le tolléra
icelle dame Jehanne et le souffri moult patiemment; et en la parfin
enquist où icelle povre fille demouroit et tant en enquist qu’elle le
sceut. Et vint en l’hostel et trouva la povre fille qui n’avoit aucune
garnison[354] quelconque, ne de busche, ne de lart, ne de chandelle, ne
de huille, ne de charbon, ne de rien, fors un lit et une couverture,
son touret[355] et bien pou d’autre mesnage. Si luy dist tels mots:
Ma mie, je suis tenue de garder mon mary de blasme, et pour ce que je
sçay qu’il prent plaisir en vous et vous aime et qu’il repaire céans,
je vous prie que de luy vous parliez en compaignie le moins que vous
pourrez, pour eschever son blasme, le mien et de nos enfans, et que
vous le céliez de vostre part, et je vous jure que vous et luy serez
bien célés de la moye part, car puisqu’ainsi est qu’il vous aime, mon
intention est de vous amer, secourir et aidier de tout ce dont vous
aurez à faire, et vous l’apparcevrez bien; mais je vous prie du cuer
que son péchié ne soit révélé ne publié. Et pour ce que je sçay qu’il
est de bonnes gens[356], qu’il a esté tendrement nouri, bien peu, bien
chauffé, bien couchié et bien couvert à mon povoir, et que je voy que
de luy bien aisier vous avez pou de quoy, j’ai plus chier que vous et
moy le gardions en santé que je seule le gardasse malade. Si vous prie
que vous l’amez et gardez et servez tellement que par vous il soit
refraint et contregardé de viloter ailleurs en divers périls; et sans
ce qu’il en sache riens, je vous envoieray une grant paelle pour luy
souvent laver les piés, garnison de busche pour le chauffer, un bon lit
de duvet, draps et couverture selon son estat, cuevrechiefs, orilliers,
chausses et robelinges nettes; et quant je vous envoieray des nettes,
si m’envoiez les sales, et que de tout ce qui sera entre vous et moy
qu’il n’en sache rien, qu’il ne se hontoie; pour Dieu faictes avec luy
si sagement et secrètement qu’il n’apparçoive de nostre secret. Ainsi
fu promis et juré: Jehanne la Quentine s’en parti et sagement envoya ce
qu’elle avoit promis.

Quant Thomas vint au vespre à l’hostel de la jeune fille, il ot ses
piés lavés et fut très bien couchié en lit de duvet, en grans draps
déliés pendans d’une part et d’autre[357], très bien couvert, mieulx
qu’il n’avoit accoustumé, et l’endemain eust robelinge blanche,
chausses nettes et beaulx souliers[358] tous frais. Il se donna grant
merveille de ceste nouvelleté et fut moult pensif, et ala oïr messe
comme il avoit accoustumé, et retourna à la fille et lui mist sus que
ces choses venoient de mauvais lieu, et moult aigrement l’accusa de
mauvaistié afin qu’elle en sa deffense luy dist dont ce luy estoit
venu. Or savoit-il bien qu’il l’avoit laissée povre deux ou trois jours
devant, et que en si pou de temps ne povoit-elle pas estre de tant
enrichie. Quant elle se vit ainsi accusée et qu’il la convint respondre
pour soy deffendre, elle sceut bien tant de la conscience d’icellui
Thomas que de ce qu’elle luy dirait il l’en croirait, si n’ot loy de
mentir et lui dist la vérité de tout ce que dessus est dit.

Lors vint ledit Thomas tout honteux en son hostel et plus pensif que
devant, mais un seul mot ne dist à ladicte Jehanne sa femme, ne elle
à luy, mais le servi très joyeusement, et très doulcement dormirent
luy et sa femme la nuit ensemble sans en dire l’un à l’autre un seul
mot. L’endemain ledit Thomas de son seul mouvement ala oïr messe et
se confessa de ses péchiés, et tantost après retourna à la fille et
luy donna ce qu’elle avoit du sien, et voua continence et de soy
abstenir de toutes femmes excepté de sa femme, tant comme il vivroit.
Et ainsi le retrahi sa femme par subtilleté et moult humblement, et
cordieusement l’aima depuis. Et ainsi sagement, non pas par maistrise
ne par haultesse, doivent les bonnes dames conseiller et retraire
leurs maris par humilité; ce que les mauvaises ne scevent, ne leur
cuer ne le puet endurer, dont leurs besongnes vont souvent pis que
devant. Et jasoit-ce que plusieurs autres exemples on y pourroit donner
qui seraient longs à escripre, toutesvoies ce vous doit assez souffire
quant à cest article, car de ce derrenier cas n’avez-vous garde, et
aussi en savez-vous bien oster le péril[359].

FIN DE LA PREMIÈRE DISTINCTION ET DU TOME PREMIER.



                                   LE

                           MÉNAGIER DE PARIS.



                                   LE

                           MÉNAGIER DE PARIS.

                                 TRAITÉ

                  DE MORALE ET D’ÉCONOMIE DOMESTIQUE.

                           COMPOSÉ VERS 1393.

                       PAR UN BOURGEOIS PARISIEN.

                               CONTENANT

   Des préceptes moraux, quelques faits historiques, des instructions
 sur l’art de diriger une maison, des renseignemens sur la consommation
du Roi, des Princes et de la ville de Paris, à la fin du quatorzième siècle,
                          des conseils sur le
jardinage et sur le choix des chevaux; un traité de cuisine fort étendu,
       et un autre non moins complet sur la chasse à l’épervier.

                               ENSEMBLE:

L’histoire de Grisélidis, Mellibée et Prudence par Albertan de Brescia (1246),
traduit par frère Renault de Louens; et le chemin de Povreté et de Richesse,
poëme composé, en 1342, par Jean Bruyant, notaire au Châtelet de Paris;

                      PUBLIÉ POUR LA PREMIÈRE FOIS

               PAR LA SOCIÉTÉ DES BIBLIOPHILES FRANÇOIS.

                              TOME SECOND.

           [Illustration: colohpon LITTERIS PATRIÆQUE CARUS.]

                                A PARIS,
                      DE L’IMPRIMERIE DE CRAPELET,
                          RUE DE VAUGIRARD, 9.

                             M.D.CCC.XLVI.

[Illustration]



LE MÉNAGIER DE PARIS.



LE PREMIER ARTICLE

DE LA SECONDE DISTINCTION,

LEQUEL DOIT PARLER D’AVOIR SOIN DE SON MESNAGE.


Belle seur, sachiez que je suis en grant mélancolie ou de cy finer
mon livre ou d’en faire plus, pour ce que je doubte que je ne vous
ennuye, car je vous pourroie bien tant chargier que vous auriez cause
de moy tenir pour oultrageux et que mon conseil vous donroit charge en
si grant nombre de faix et si gréveux que vous désespéreriez de trop
grant fardel pour ce qu’il vous sembleroit que vous ne le pourriez
tout porter ne acomplir, dont je seroie honteux et courroucié. Et pour
ce je vueil ycy penser et adviser que je ne vous charge trop et que
je ne vous conseille à entreprendre fors les choses très neccessaires
et honnorables, et encores sur le moins que je pourray, afin que vous
soiez en icelles choses nécessaires plus fondée et mieulx faisant et
par conséquent plus honnorée en vos dis et en vos fais, car je sçay que
vous ne povez ne que une autre femme, et pour icelle cause je vueil
premièrement adviser combien je vous ay chargée, et se c’est du plus
nécessaire, et se je vous doy plus chargier, et de combien. Et se plus
y a à faire que vous ne pourriez, je vous vueil donner aide; et sur ce
je recueil mes commencemens.

Premièrement, je vous ay admonnestée à louer Dieu à vostre esveillier
et à vostre lever, et à vostre aler au moustier vous contenir, illec
oïr messe, vous confesser et vous mettre et tenir en l’amour et
grâce de Dieu. Par m’âme, il est nécessaire à vous, ne nul autre que
vostre personne n’y peut estre commise[360]. Et après ce, je vous ay
conseillié que vous soiez continent et chaste, aimer vostre mary,
luy obéir, penser de garder ses secrets, le savoir retraire se il
folie ou veult folier; et certes encores est cecy neccessaire et très
honnourable pour vous et à vous seule appartient et n’est point trop
chargé; vous le povez bien faire moyennant la doctrine dessus dicte qui
vous fera grant avantage: les autres femmes ne l’eurent oncques tel.

Or est-il certain aussi que après ce que dit est vous avez à penser
de vous, vos enfans et vostre chevance, mais à ces trois choses et
à chascune povez-vous bien avoir aide; si vous convient dire comment
vous vous y entendrez, quelles aides et quelles gens vous prendrez et
comment vous les embesongnerez, car de ce ne vueil-je que vous aiez
fors le commandement, la visitation et la diligence de le faire faire
par autres et aux despens de vostre mary.

Or véez-vous bien, chière seur, que vous ne vous devez pas plaindre et
que vous n’estes guères chargée, et n’avez charge fors celle qu’autre
ne puet faire que vous et de chose qui vous doit estre bien plaisant,
comme de servir Dieu et penser du corps de vostre mary, et en somme
c’est tout.

Or continuons doncques nostre matière, et commençons à ce premier
article, lequel article je fais savoir à tous qu’il ne vient mie de
mon sens, ne ne l’ay mie mis en la forme qu’il est, ne à moy n’en
attribue la louenge, car je n’y ay riens mis du mien, ne n’en doy mie
avoir l’onneur, mais le doit avoir un bon preudomme et subtil appellé
feu Jehan Bruyant qui jadis fut notaire du Roy ou Chastellet de Paris,
qui fist le traictié qui s’ensuit et lequel je met cy après seulement
pour moy aidier de la diligence et persévérance que son livre monstre
que un nouvel marié doit avoir. Et pour ce que je ne vueil mie son
livre estrippeller, ne en oster un coippel[361], ne le départir du
remenant[362], et mesmement que tout est bon ensemble, je m’aide de
tout pour obtenir au point ou article que seulement je désire, et pour
le premier article je prens tout le livre qui en rime dit ainsi:


LE CHEMIN

DE POVRETÉ ET DE RICHESSE,

PAR JEAN BRUYANT[363],

NOTAIRE DU ROY AU CHASTELET DE PARIS.

M. CCC XLII.

    On dit souvent en reprochier
    Un proverbe que j’ay moult chier,
    Car véritable est, bien le say,
    Que _mettez un fol à part soy,
    Il pensera de soy chevir_[364].
    Par moi meismes le puis plevir[365]:
    Tout aie-je ma chevissance[366]
    Petitement, mais souffisance,
    Si comme l’Escripture adresce,
    Au monde est parfaicte richesce.
    Quant à or de ce me tairay
    Et cy après vous retrairay
    Une advision qui m’avint
    A dix huit jours ou a vint.
    Après que je fus mariés,
    Que passés furent les foiriez[367]
    De mes nopces et de ma feste,
    Et qu’il fut temps d’avoir moleste,
    Un soir me couchay en mon lit
    Où je eus moult peu de délit,
    Et ma femme dormoit lez moy,
    Qui n’estoit pas en grant esmoy;
    Et si m’avint, tout en veillant,
    Ce dont je m’alay merveillant,
    Car à moi vindrent, ce me semble,
    Un homme et trois femmes ensemble
    Qui bien sembloient estre ireux,
    Mornes, pensifs et désireux,
    Desconfortés, triste et las;
    En eulx n’ot joye ne soulas,
    N’il ne leur tenoit d’eulx esbatre.
    Bien furent d’un semblant tous quatre,
    Car mieulx estoient à tencier
    Taillés, qu’à feste commencier.
    L’omme si ot a nom Besoing:
    Plains iert de tristesse et de soing.
    L’ainsnée femme, en vérité,
    Nommée estoit Neccessité.
    La seconde femme Souffrete
    Ot nom, et la tierce Disette.
    Tous quatre estoient suers et frères,
    Et Povreté si fut leur mère,
    Et les engendra Méséur[368]
    En grant tristesse et en péur
    Par grant aïr vers moy s’en vindrent
    Et fort à manier me prindrent
    Sans menacier et sans jangler,
    Com s’il me deussent estrangler,
    Besoing tout premier m’assailly,
    A moy prandre point ne failly;
    De ses bras si fort me destraint
    Que j’en eu le corps si estraint
    Qu’à poi le cuer ne me party.
    Nécessité lors s’apparti[369]
    Moult angoisseuse et plaine d’ire,
    Par le col me print sans mot dire,
    De fort estraindre se pena;
    Là lourdement me demena.
    Souffrette et Disette à costé
    Me r’orent[370] de chascun costé;
    L’une sacha[371], l’autre bouta[372],
    Chascune à moy se desgleta[373].
    Ainsy ces quatre m’atrapèrent
    Et me batirent et frapèrent:
    Là me mistrent en tel destresse
    Qu’exempt fu de toute léesse.
    Adonc s’en vint à moy errant[374]
    Une grant vieille à poil ferrant[375]
    Qui estoit hideuse et flestrie
    Et moult ressembloit bien estrie[376]
    Aiant félonnie en pensée:
    On l’appelloit par nom Pensée.
    Ceste vieille me fist moult pis
    Que les autres, car sur mon pis[377]
    Se mist l’orde vieille puant:
    Tout le corps me fist tressuant.
    L’âme de lui au Deable soit!
    Car tant sur le pis me pesoit
    Que mon cuer mettoit à malaise
    De grant destresce et de mésaise.
    Trop fort me print à margoillier[378];
    Lors commençay à ventroullier,
    Et entray en si fort penser
    Que nul ne le sçauroit penser,
    Ne bouche raconter ne dire.
    Si com j’estoie en tel martire
    Que Pensée m’avoit baillié,
    Or voy un villain mautaillié,
    Let, froncié, hideux et bossu,
    Rechigué, crasseux et moussu,
    Les yeulx chacieux, plains d’ordure;
    Moult estoit de laide figure,
    Tout rongneux estoit et pelés;
    Soussy fu par nom appellés.
    Se mal m’orent les autres fait,
    Encor m’a cestui plus meffait.
    Las! je n’en avoie mestier!
    Tant me donna de son mestier,
    Et me mist à si grant meschief
    Que je n’eus ne membre, ne chief,
    Qu’il ne me convenist faillir.
    Trembler me fist et tressaillir,
    Pâlir et le sang remuer,
    Et de mésaise tressuer,
    Et me faisoit la char frémir,
    Moy dementer[379], plaindre et gémir,
    D’un costé sur autre tourner;
    Briefment, tel m’ala atourner
    Soussi, tant me fu fel et aigre,
    Que j’en devins chétif et maigre
    Et aussi sec comme une boise[380].
    Quant m’en souvient, pas ne m’envoise[381],
    Ains suis si blaffart et si fade
    Qu’il semble qu’aie esté malade.
    Hélas! certes, si l’ay-je esté
    De trop plus male enfermeté
    Que fièvre tierce ne quartaine,
    Car qui de Soussy a la paine,
    En lui a santé maladive
    Et a la maladie santive[382].
    C’est diablie[383] que de Soussy,
    Quant m’en souvient trop m’en soussy,
    Car en soy a trop dure rage
    Et merveille est que cil n’enrage
    Que Soussy tient en son demaine,
    Car trestout ainsi le demaine
    Com fait le sain en la paelle,
    Qui par force de feu sautelle,
    Et le fait-on séchier et frire:
    Ainsi fait Soussy gens défrire,
    Et les tient si fort en ses las
    Qu’il leur fait souvent dire: Hélas!
    Et les fait vivre en tel doleur
    Qu’en eulx n’a gresse ne couleur.
    Soussy est si mal amiable,
    Si hideux, si espoventable,
    Et si abhominable à cuer
    Que ne l’ameroit à nul fuer[384]
    Nullui qui l’eust essaié.
    Soussy a maint cuer esmayé[385],
    Et encor tous les jours esmaie;
    Nul ne le scet qui ne l’essaye
    Ainsi com j’ay fait maugré moi,
    En paine, en travail et esmoy.
      Quant je vis celle compaignie,
    Qu’avec moy ert à compaignie:
    C’est assavoir Besoing, Souffrete,
    Nécessité avec Disette,
    Pensée la vieille et Soussy,
    La teste levay et toussy.
    Adonc vint à moy, sans demeure,
    Un grant villain plus noir que meure
    Qui avoit à non Desconfort.
    A manier me print moult fort
    Et me fist ma peine doubler.
    Lors me print le sens à troubler,
    Car tant avoie esté pené
    Qu’à poy n’estoie forcené.
    Moult fort me print à dementer
    Et à moi mesmes tourmenter,
    Et dire: Chétif! que feras?
    Tes debtes comment paieras?
    Tu n’as riens et si dois assez.
    Que fusses-tu or trespassé!
    Tu es tout nouvel mesnagier
    Et si n’as gaige à engaigier
    Se tu ne veulx ta robe vendre.
    Las! chétif, quel tour pourras prendre?
    Ne sçay où tu pourras aler.
    Si com j’estoie en ce parler,
    A moy s’en vint grant aléure,
    Une femme qui pou séure
    Et enragée sembloit estre
    A son semblant et à son estre.
    Have estoit et eschevellée,
    Désespérance ert appellée,
    Fille Desconfort le hideux.
    Moult me vint peine et annuy d’eux,
    Par eulx perdi discrétion,
    Sens, mémoire, et entention.
    Les dens commençay à estraindre
    Et la couleur pâlir et taindre,
    Et disoie: Las! que feray?
    Tout au désespéré mettray,
    Mauvais seray, où que je viengne,
    Il ne me chault qu’il en aviengne,
    Soit en pluye ou soit en bise;
    Qui ne pourra ploier, si brise!
    Sèche qui ne pourra florir!
    N’ay que d’une mort à mourir.
    Et j’ay pieça oy parler
    Que qui au Deable veult aler,
    Riens ne vault longuement attendre:
    Noyer ne puet, cil qui doit pendre[386].
    Honny soit qui jamais vourra
    Faire fors du pis qu’il pourra,
    Quant par moy ne puet estre attaint
    Le manoir où Richesse maint!
    Car elle demeure si loing
    Que trop de travail et de soing,
    Avant qu’on la puist attaindre,
    Moult fait les gens pâlir et taindre.
    Avant qu’ils puissent estre à ly,
    Mains beaux visaiges a pâli
    A qui oncques n’en fu de mieulx,
    Car se on attent qu’on soit vieulx,
    Que l’en ne puisse mais errer[387],
    En ce pourroit-on méserrer[388];
    Qui ce feroit, son temps perdroit.
    Quant je ne puis avoir par droit
    Ne possession, ne avoir,
    J’en vouldroie donc à tort avoir;
    Mieulx vault estre en tort cras et aise
    Qu’en droit chétif et à malaise.
      Ainsi com en ce point estoie
    Et que je tout au pis mettoie
    Sans viser comment tout aloit,
    Et que de rien ne me challoit
    Fors d’acomplir ma voulenté,
    Car moult m’avoit entalenté
    Désespérance de mal faire
    Et m’avoit par son put[389] afaire
    Presque fait perdre corps et âme,
    Ès-vous une très noble dame
    Gente, droite, plaisant et belle:
    Ne sembloit pas estre rebelle,
    Mais doulce et humble à toute gent:
    Moult ot le corps et bel et gent
    Et paré de si noble arroy
    Qu’elle sembloit bien fille à roy;
    Et si ert-elle, en vérité,
    Fille du Roy de magesté
    Vers qui nul n’a comparoison;
    On l’appelle par nom: Raison.
    Moult estoit sage et advisée;
    Droit à moi a pris sa visée
    Et s’en vint de lez moi seoir,
    Mais si tost com la pot veoir
    Désesperance la hideuse,
    Elle s’en fouy moult doubteuse
    Tant com piés la porent porter;
    Car ne se pourroit déporter[390]
    En nul lieu où Raison surviengne
    Que tost fouir ne la conviengne;
    Car plus la het Raison, sans fin,
    Que triacle ne fait venin.
    Raison si fu moult esjoye
    Quant d’avec moy s’en fut foye
    Désespérance sa contraire.
    Lors se prist près de moy à traire;
    Raison dit: Amy, Dieu te gard!
    Tu as eu très mauvais regard,
    Mauvais sens et mauvais advis,
    Car nagaires t’estoit advis
    Que pour toy est tout bien failli;
    Mais onc nul à mal ne failli
    Qui voulsist entendre à bien faire
    Et vivre selon mon affaire
    Et selon mon enseignement
    Qui donne aux âmes sauvement;
    Lequel, se tu le veulx entendre,
    Je te vueil cy dire et aprendre.
    Premièrement, tu dois amer
    Mon père, de cuer, sans amer,
    Et la doulce vierge prisiée
    Sans vanité n’ypocrisie,
    Et aourer sainctes et sains,
    Soies malades ou soies sains,
    C’est à dire en prospérité
    Aussy bien qu’en adversité;
    Et, par contraire, en meschéance
    Aussi bien com en habundance,
    Car tel est humbles en tristesse
    Qui est despiteux en liesse;
    Et tel est en léesse doulx
    Qui en tristesse est moult escoux[391]
    Ce vient de male acoustumance
    Qu’on acoustume dès s’enfance,
    Car qui aprent une coustume,
    Moult à envis s’en descoustume;
    Si fait bon tel coustume aprendre
    Où l’en puist honneur et preu[392] prendre.
    Donc s’avoir veulx coustume bonne,
    Garde que ton cuer ne s’adonne
    A nul des sept mortels péchiés,
    Et que ne soies entéchiés
    D’aucunes de leurs circonstances,
    Car moult t’en vendroit de nuisances,
    Mais fay tant que ton cuer s’accorde
    Aux sept chiefs de miséricorde
    Qui sont aux sept vices contraires;
    Cestes te seront nécessaires
    A acquérir l’amour mon père
    Et de sa glorieuse mère.
    Ces sept vices dont parlé t’ay
    Déclaration t’en feray
    Et des branches qui en descendent,
    Qui à toy décevoir entendent.
    Et tu, en voyes et sentiers,
    Entens à eulx moult voulentiers,
    Tes maistres sont, à eulx es serfs,
    Car nuit et jour de cuer les sers
    En deservant un tel loier
    Où nul ne se puet apoier[393].
    Ainsi en leur subjection
    Vivras, à ta dampnacion,
    S’a eulx n’aprens à estriver
    Par guerre pour eulx eschiver.
    Car bien t’aprendray la manière
    De les traire de toy arrière,
    Et d’avoir franc povoir sur eulx
    Contre les fais aventureux
    Qui par eulx venir te pourront
    Quant ils assaillir te vendront
    Pour clamer dessus toy haussage[394].
    Se tu me veulx croire pour sage,
    Si bien te sauras d’eulx garder
    Qu’ils ne t’oseront regarder
    Pour la doubte des sept vertus
    Qui là te seront bons escus
    Encontre les sept ennemis
    Qui souvent se sont entremis
    De toy mettre à perdition;
    Mais que par bonne entention
    Leur vueilles, sans plus, déprier
    Qu’à toy se vueillent alier.
    Et se tu le fais de cuer fin,
    Ils te mettront ta guerre à fin
    Sans en prendre aucun paiement,
    Fors que ton prier seulement;
    Ce n’est pas oultrageux loier,
    Car il est aisié à paier,
    Si ne s’en puet nuls excuser
    Se il ne vouloit abuser.
      Quant tu verras venir Orgueil
    Regardant en travers de l’ueil,
    Avecque lui Desrision,
    Desdaing, Despit, Présumption,
    Supediter, Fierté, Bobance,
    Desprisier, et Oultrecuidance,
    Et tous ses autres compaignons
    Qui cueurs ont pires que gaignons[395],
    Vers toi, banière desployé,
    Si pren tantost de ton aye[396]
    Humilité, Dévotion,
    Franchise, Contemplation,
    Paour de Dieu, Doulceur, et Pitié,
    Justice, Simplesse, Équité,
    Et moult d’autres qu’à eulx vendront
    Qui pour toi secourre acourront;
    Et s’y vendra chascun offrir,
    Mais que tu les vueilles souffrir.
    Et se contre Orgueil te combas,
    Ils le mettront du tout au bas
    Et le feront fouir le cours
    Et tous les siens, sans nul recours.
    Quant auras par Humilité
    Orgueil et les siens surmonté,
    Garde toy, d’illec en avant,
    Que s’il te venoit audevant
    Pour toy tourner de sa partie,
    Que ne se soit pas départie
    D’avecques toy Humilité,
    Ne les aultres de sa mité[397],
    Car d’Orgueil bien te garderont,
    Tant comme avecques toi seront.
      D’un autre assault te fault garder
    Qui périlleux est à garder
    Entre tous ceulx qui sont en vie,
    Le chevetain[398] en est Envie
    Qui moult est de mauvais convine;
    Avec lui est tousjours Hayne,
    Fauseté, Murtre et Trayson,
    Faulx-semblant et Détraction,
    Ennemitié et Male-bouche
    Qui n’aime que mauvais reprouche.
    S’il te veulent assault livrer,
    Tantost t’en pourras délivrer,
    Mais que de trop près ne t’aprochent,
    Si que de leurs dars ne te brochent,
    Et pour leur péril contrester,
    T’encueur[399] tantost, sans arrester,
    Prier Foy qu’elle te sequeure,
    Et Loiaulté, et eus en l’eure,
    Sans plus parler, te secourront,
    Et ceulx qu’avec eulx amenront:
    C’est assavoir Paix et Concorde,
    Vraie-amitié, Miséricorde,
    Bénivolence, Vérité,
    Conscience avec Unité,
    A tout leur congrégation
    Dont je ne fais pas mention.
    Ceulx ci feront Envie fuire,
    Si qu’elle ne te pourra nuire.
      D’un assault qui moult fait à craindre
    Te refault défendre sans faindre,
    C’est d’Ire le mauvais tirant
    Qui va tousjours en empirant;
    En toute mauvaistié habonde,
    C’est le plus fel qui soit au monde.
    Et quant assaillir te vendra,
    Forte deffense y convendra,
    Car cil se scet desmesurer
    Que nul ne peut à lui durer;
    Et tous ceulx de sa compaignie[400]
    Sont de sa mauvaise manière:
    Cruaulté porte sa banière,
    Perversité, Forcenerie,
    Félonnie et Esragerie,
    Desverie et autres félons
    Lui vont tousjours près des talons.
    Quant ceste gent verras venir,
    Gart toy que ne te puist tenir
    Nuls d’eulx qu’il ne t’ait arresté;
    Tray toi vers Débonnaireté,
    Qui tost bon conseil te donra
    Et contre Yre te secourra
    Avecques ceulx de son lignage
    Qui moult sont de souef courage:
    C’est assavoir Doulceur, Souffrance[401],
    Estableté[402] et Attrempance,
    Patience, Discrétion,
    Refrainte[403] avec Correction.
    Ceulx cy et ceulx de leur banière
    Trairont Yre de toy arrière,
    Et toute sa gent forcenée
    Qu’avec lui aura amenée.
    Ainsi seras d’Ire délivre
    Se Débonnaireté veulx suivre
    Qui est franche, courtoise et douce:
    C’est celle qui nul temps ne grouce[404]
    De riens qui lui puist advenir;
    Bon la fait avec soy tenir
    Et fuire Ire le mal tirant
    Qui de pou se va ayrant.
    Ire doit-on craindre et doubter
    Et hors d’avecques soy bouter
    Et le tenir pour ennemi
    Sans l’acointer jour ne demi.
    C’est un mauvais ennemi qu’Ire,
    Car si tost com un cuer s’aïre,
    De félonnie si s’enflamme
    Qu’il en puet perdre corps et âme.
    Quant en ire se desmesure
    Et se de soy ne s’amesure[405],
    Masvei[406] mesure en lui se met
    Et de le dampner s’entremet.
    Elle est de tel condition
    Que qui en soy correction
    Ne met amesuréement,
    Elle s’y met si lourdement
    Qu’elle honnist tout à un cop.
    Et vraiement elle het trop
    Gens où il fault qu’elle se mette,
    Et pour ce tout au brouvet[407] gecte
    Sans querre y terme ne respit,
    Si tost comme on lui fait despit.
    Gart donc qu’à toi ne se courrouce,
    Aies en toi manière doulce,
    Soies courtois et débonnaire
    Comme uns homs estrait de bonne aire[408].
    Nuls ne se devroit courroucier
    De rien qu’il voie, ne groucier,
    Mais faire tousjours bone chière
    Et mettre tout courroux arrière.
    Laisse le vice et pren vertu,
    Ainsi te pourras sauver tu.
    Eschièves couroux et tristesse
    Et pren en toi joie et léesse,
    Voire par bonne entention,
    Non pas par dissolution,
    Car joye qui est dissolue
    N’est pas à l’âme de value.
      Contre un autre assault périlleux
    Te fault estre moult artilleux[409]
    Afin que tu surpris ne soies
    En ton hostel, n’enmy les voies,
    Car c’est un assault moult doubtable,
    Moult dommageux, moult décevable,
    Car les pluseurs en sont déceus
    Ains qu’avis aient de ce eu.
    De cest assault est chief Paresse
    Qui sans menacier fiert et blesse
    En tapinage, en couardie[410];
    S’enseigne porte Fétardie,
    Faintise, Oiseuse, Lâcheté,
    Négligence avec Niceté,
    Nonchaloir avec Cuer-failly
    Vont après; moult est mal bailli[411]
    Cellui qu’ils pevent entraper
    Et dessoubs leur trappe atrapper.
    Tant[412] ne soient-ils pas hardis,
    Mais lasches et reffétardis[413],
    Ainçois simples, à mate chière:
    Mais couart est de tel manière
    Que quant il se voit audessus,
    Il est de trop mauvais dessus.
    Le cuer a fier comme lyon
    Et aspre comme champion;
    Lors fiert et frappe, bat et tue,
    Quant il voit qu’on ne se remue
    Encontre lui pour soy vengier.
    Donc fait-il bon soy esloignier
    De Paresce et de sa famille
    Qui n’est qu’en son dessus soubtille,
    Et les doit-on mettre au dessoubs
    Si qu’estre n’en puissent ressous[414].
    Et s’au dessoubs mettre les veulx,
    Amaine avecques toy contre eulx
    Diligence et Apperteté,
    Bon-cuer et Bonne-voulenté,
    Talent-de-bien-faire avec Cure,
    Et Soing qui voulentiers procure
    Contre Paresse avoir victoire,
    S’ainsi est qu’on le vueille croire.
    Se ceulx ci avec toi retiens
    Et du cuer à amour les tiens,
    Garde n’aras, n’en doubte mie,
    De Paresce leur annemie,
    Ne de tous ceulx de sa banière,
    Mais se trairont de toi arrière,
    Car l’assault n’osent entreprendre,
    Fors à qui tantost se veult rendre.
      Après, gart toy du quint assault
    Car si soubtivement assault
    Cil qui en est droit capitaine
    Qu’à ses subgez donne grant peine
    Quant il les tient en son service;
    Ce capitaine est Avarice
    Qui moult est de décevant guise.
    S’enseigne porte Convoitise:
    Rapine, Usure et Faulx-traictié
    Le suivent tousjours pié à pié;
    Malice avecques Tricherie
    Murtre, Larrecin, Roberie,
    Engignement, Déception,
    Fraude avec Cavilation[415],
    Et les autres de leur banière.
    Quant tu verras ceste gent fière
    Qui te vouldront assault livrer,
    Se tu t’en veulx tost délivrer,
    Fay de Charité connestable
    Qui tant est piteuse et traitable;
    Et toute sa connestablie
    Q’avecques lui est establie,
    (Que, selon Dieu, poursuit[416] richesse,)
    C’est Souffisance avec Largesse,
    Aumosne faicte en cuer dévost,
    Ce que Dieu plus au monde volt.
    Se ceste conestablie as
    Avecques toi, acompliras
    Ceste bataille à ton vouloir
    Contre Avarice et son povoir.
    Avarice est de put affaire,
    Car il mains maulx machine à faire[417]
    Par le conseil de Convoitise
    Qui les gens à tolir atise.
    Si te garde donc de rien prendre
    De l’autrui, se ne le veulx rendre,
    Par quelque voie que ce soit;
    Car Convoitise gens déçoit,
    De jour en jour, par leur foleur,
    Dont aucuns meurent à douleur;
    Et par ce nature blasmée
    En est souvent et diffamée
    Sans cause, car elle n’y a coulpe;
    Se fait péchié qui l’en encoulpe,
    Car elle en est la plus dolente
    Et qui plus en sueffre et tormente.
    Donc qui de bien faire n’a cure
    Il ne lui vient pas de nature,
    Ainçois lui vient par accident;
    Chascun le voit tout évident.
    S’aucun en soy a mauvais vice
    Qui porter lui peut préjudice,
    S’on dit que Nature lui face
    Par force qu’il soit enclin à ce,
    Les gens ne le doivent pas croire,
    Car ce n’est mie chose voire,
    Ains est par la male doctrine
    Dont nourriture[418] le doctrine.
      Du sixième assault bien te gardes,
    Contre cestuy fay bonnes gardes.
    Gloutonnie en est conduiseur,
    Qui de tous biens est destruiseur,
    Car enclins est à tous délices,
    Et engendre tous mauvais vices.
    Nul temps ne puet estre assouvis,
    Mais tousjours semble estre allouvis[419]
    Et si est-il plus qu’il ne pert[420],
    Nul temps sa voulenté ne pert
    Qui est sur toute riens mauvaise,
    Car sans oultrage n’iert jà aise.
    Gloutonnie est soubtil guerrier:
    Assault-il devant et derrier,
    Car il part en deux sa bataille
    Toudis et avant qu’il assaille;
    Gourmandie l’une conduit:
    Avec lui sont en son conduit
    Friandise, Lopinerie,
    Yvresse, Oultrage, Lécherie,
    Et pluseurs autres de tel sorte
    Que Gloutonnie à soi enhorte.
    Ceste bataille ainsi partie
    Livre assault de une partie,
    Et si donne assez à entendre
    A ceulx qui la veulent attendre.
    L’autre bataille est Male-bouche
    Qui n’aime que mauvais reprouche,
    Mesdit, Surdit[421], Maugréerie,
    Hastiveté, Pautonnerie[422]
    Et des autres à grant planté
    Qui sont de telle voulenté.
    Ceste bataille se tient fort
    Et livre assault à grant effort
    De l’autre costé, pour surprendre,
    Si que l’en ne s’y puist deffendre.
    Gloutonnie point et repoint
    De l’un à l’autre, et leur enjoint
    Que si se tiengnent sans recroire[423]
    Que partout aient la victoire.
    Or fault, se tu te veulx garder
    Des deux assaulx, bien regarder
    De tous costés à ce qui fault
    Pour contrester à leur assault.
    S’il t’assaillent, met toy à deffense
    Et pren avec toy Abstinence
    Et Sobriété sa compaigne
    Avecques ceulx de leur enseigne,
    Car s’avecques toy as ces deulx,
    Assez en vendra avec eulx,
    Et te garderont bien, sans faille,
    Encontre celle gloutonnaille.
    Sur toute rien gart toy d’Ivresse,
    Que sa bataille à toi n’adresse;
    Car cil qu’à Yvresse se livre
    N’a povoir de longuement vivre,
    Et s’il vit, si est ce à meschief,
    Car il n’a ne membre ne chief
    Qui par yvresce ne lui dueille.
    Les mains lui tremblent comme fueille
    Et s’en chiet plus tost en vieillesse,
    En maladie ou en foiblesse.
    Qui s’enyvre, il se desnourrist,
    Car tout le foie se pourrist;
    Ainsi est de soy homicide,
    Dont c’est grant doleur et grant hide[424].
      Du septisme assault dont Luxure
    Est capitaine par nature,
    Te fault gaittier et traire arrière,
    Si qu’elle et ceulx de sa banière
    En leur chemin pas ne te truissent
    Si que suppéditer te puissent.
    Se Fol-regard le fort archier
    Trayoit à toy pour toy blécier,
    Soies sages et te retray,
    Vistement hors du trayt te tray;
    Et quant hors seras de leurs mettes,
    Garde toy bien que ne te mettes
    En la voye de souvenir
    Si près qu’à toy puist avenir,
    Car s’avec lui t’avoit attrait,
    Il te remenroit droit au trait,
    Si que la flesche de Pensée
    Te seroit tost ou corps boutée,
    Et celle de Fole-plaisance
    Qui ne tendroit qu’à décevance
    Te mectroit, tout à son plaisir,
    Ou trait de garrot[425] de Désir
    Qui si fort au cuer te ferroit
    Que jà mire ne te guerroit;
    Là languiroies en tel peine
    Que tu n’auroies cuer ne vaine
    Qui voulsist entendre à rien faire
    Qu’à maintenir le fol afaire
    Qui de folle amour se dépent
    Dont chascun en fin se repent.
    Là t’auroit si suppédité
    Folle amour par fragilité
    Qu’il te faudroit pour vaincu rendre.
    Mais se tu te veulx bien deffendre
    Contre les archiers amoureux,
    Jà ne seras surprins par eulx.
    Pren la targe de Chasteté
    Et la lance de Fermeté:
    La targe met devant tes yeulx,
    Tu ne te pues deffendre mieulx;
    Grant mestier as qu’elle te gart
    Encontre les trais de Regart.
    Se tu ce pas[426] pues bien garder
    Contre Folement-regarder,
    Jà Fole-cogitation
    Ne t’ara en subjection.
    Et quant ces deux ne te ferront
    Jà les autres ne s’y verront.
    Ainsi ces deux pevent tout faire,
    Aussi pevent-ils tout deffaire.
    Regart si est trop perçant chose;
    Toute plaisance y est enclose,
    Aussi y est tout le contraire,
    Si soubtillement scet-il traire,
    Car tous ceulx que Regart attaint,
    Soit pour bien ou pour mal, à teint
    Souvent leur fait muer couleur,
    Soit par joye ou par douleur.
    Pour ce est voir ce qu’on dire seult:
    _De ce qu’œil ne voit, cuer ne deult._
    Si sont aucuns qui se vouldroient
    Excuser qu’ils ne se pourroient
    Du fort trait de regart garder
    Et qu’il leur convient regarder
    Ly un l’autre quant sont ensemble;
    Tout Saincte Église ce assemble
    Selon l’ordre de mariage,
    A tels excusans respondray je
    Briefement, sans prolongation,
    Ce n’est mie m’entention
    De deffendre à nul, bon regart,
    Mais que de Fol-regart se gart
    Qui les fols fait ymaginer
    Et par Fol-cuidier deviner[427],
    Dont est née Fole-plaisance
    Qui convoite du corps l’aisance,
    Et de ce vient Ardent-désir
    Qui art tout, s’il n’a son plaisir;
    Lors fait tant qu’à son gré avient,
    Et tout ce de fol regart vient.
    Ce n’est pas regart convenable
    Quant à Dieu, mais quant au Déable:
    Regart fait pour charnel délit
    Au Déable moult abélist[428]
    Et autant desplaît-il à Dieu
    Si n’est pas fait en temps et lieu.
    Gens qui en mariage sont,
    Qui tousjours leurs courages ont
    A délit charnel maintenir,
    Voulans s’y soir et main[429] tenir,
    Pechent ensemble, sans doubtance,
    Par l’engin de Fole-plaisance
    Qui souvent les tient en ses las;
    Mais ne le cuident pas les las,
    Car à vertu tiennent ce vice
    Dont ils font que fols et que nices;
    Car conjoins ne devroient jà voir[430]
    L’un à l’autre affaire avoir
    Par charnele conjunction,
    Se ce n’estoit en entention
    De lignée multiplier;
    Pour ce les fais-je marier,
    Si que, par le gré de nature,
    Facent ensemble engendréure,
    Quant temps en est, et point, et lieu,
    Et tout ainsi l’ordonna Dieu,
    Non mie pour soy déliter
    A l’un avec l’autre habiter.
    Fols est qui l’un à l’autre habite
    Sans l’entention dessus dicte,
    Car quant Nature en tels gens euvre
    Selon les estas de son euvre,
    Sans moy ne Mesure appeller,
    Et que son fait nous fait celer
    Afin qu’Atrempance n’y viengne
    Qui en subjection la tiengne,
    Iceste copulation
    Faicte sans génération
    Et sans droicte nécessité,
    Par fresle superfluité,
    Est péchié mortel, nul n’en doubte,
    Qui par Fol-désir les y boute
    Pour acomplir leur volenté
    Charnele dont ils sont tempté,
    Où nature est tousjours encline.
    Nul temps qu’elle puist n’y décline,
    Ains queurt tousjours de randonnée
    Fresle, fole et abandonnée,
    Ne se scet, pour grief, espargnier
    Tant com riens a en son grenier.
    Ainsi de soy s’occist Nature
    Se ne la gouverne Mesure
    Ma suer[431] qui tant est bien ruillée[432]
    Qu’elle en nul temps n’est desruillée[433],
    Ains fait faire tout si à point
    Que où elle est, d’excès n’a point.
    Croy donc Mesure en tous tes fais
    Et tu n’y seras jà meffais
    En nul temps, je t’en asséur,
    Car qui la croit, il vit asseur.
      Cy lairay du septime assault
    Dont Luxure les gens assault
    Et revendray à ma matière
    Que j’ay entreprise première.
    Soies tous temps vray en ta foy,
    Aimes ton proesme comme toy,
    Dieu mon père le veult ainsi;
    Et fay à chascun tout ainsi
    Comme qu’il te feist vouldroies.
    Et se tu vas parmy les voies,
    Soies enclin à saluer;
    Et si ne dois nul temps ruer
    De ta bouche male parole:
    Saiges est cil qui pou parole,
    Et qui aime et désire paix
    Oyt tousjours, voit et se tait.
    Et se tu es en compaignie
    Parlant de sens ou de folie,
    Parle au plus tart[434] que tu pourras,
    Escoute ce que tu orras,
    Si que tu en saches parler
    Quant ce vendra au paraler[435],
    Et que ce soit par brief langaige;
    Ainsi seras tenu pour sage.
    Et ne le fusses ores mie,
    Là fault-il jouer d’escrémie[436]
    Assez mieux qu’au jeu du bocler[437],
    Car on apparçoit tost, moult cler,
    Qui veult à parler entreprendre[438],
    S’il ne se garde de mesprendre,
    Ou cler sens, ou clère folie.
    Et pour ce clèrement folie
    Cil qui de tost parler se haste.
    Qui parle ne doit avoir haste,
    Ains se doit trois fois adviser
    Avant qu’il doie deviser:
    La chose dont il veult parler,
    Et à quel fin il puet aler,
    Et ce qu’il en puet avenir;
    Ainsi n’en puet nul mal venir.
    Soies courtois et amiables
    Envers tous et humiliables;
    Par toy soient grans et menus
    Tous temps amés et chier tenus,
    Suy les bons et fuy les mauvais,
    Aimes tous temps douceur et paix;
    Et se tu ois tencions ne noises,
    Garde toy bien que tu n’y voises,
    Car nul ne se puet avancier
    D’amer noises, ne de tencier.
    Amis, se tu veulx advenir
    Au manoir Richesse et venir
    Dont je t’ay si fort oï plaindre
    Que nuls homs ne le puet attaindre
    Se n’est par paine et par doleur,
    Laisses ester telle foleur
    Et telle cogitation,
    Et pren en toy discrétion.
    Pren des deux voies la meilleur,
    Laisses le bren[439] et pren la fleur[440]:
    Se ne le fais, feras foleur;
    Qui est à chois, le mieux doit prendre.
    Et se tu veulx la voie aprendre
    Que tu dis que tu ne scez pas,
    Pour ce qu’il y a mal trespas,
    Si comme tu dis, à passer
    Par quoi on s’y puet trop lasser,
    (C’est au beau manoir de Richesse,)
    Je t’en aprendray bien l’adresse
    Et ce qu’il en puet avenir;
    Ainsi n’en puet nul mal venir
    Qui[441] t’y saura bien convoier,
    Sans toy feindre ne forvoier.]
    Pren le chemin droit à main destre
    Et laisse cellui à senestre,
    Car le destre toutes gens maine
    Droit à Richesse, en son demaine,
    Mais que on ne se traie hors voie;
    En cellui nul ne se forvoie,
    Ainçois va tout à sa devise.
    Or est droit que je te devise
    Comme cil chemin est nommé
    Qui tant est bel et renommé,
    Et qui fait ceulx qui le vont, estre
    Tous temps en très gracieux estre.
    Cil chemin a nom Diligence,
    Pavés[442] est de Persévérance.
    S’en ce chemin te veulx tenir,
    Tu pues à richesse venir
    Et le chemin tost achever
    Aiséement, sans toy grever,
    Et avec Richesse manoir[443]
    En son très gracieux manoir.
    Car qui n’y va, ne tient qu’à lui,
    Quant le cuer a si achailly
    Qu’il het le bel destre chemin
    Pour estre a l’ort senestre enclin.
    Qui ce senestre veult aler,
    Meschéans est au paraler,
    Ni n’en puet eschapper n’estordre[444],
    Ains lui convient telle hart[445] tordre
    En paine, en meschief, en angoisse.
    Cil chemins moult de gens angoisse
    Et les fait vivre en grant destresse:
    Laie[446] gent l’appellent paresse
    Et li clerc l’appellent accide;
    On n’y treuve confort, n’aïde,
    Ne conseil, n’espoir, ne chevance,
    Fors peine, ennuy et meschéance;
    C’est un chemin moult destravé[447].
    Plein de boullons[448], tout encavé;
    N’il ne fera jà si beau temps
    Qu’y puist tost errer qui est ens[449].
    Là le tiennent en couardie,
    Les grans boullons de fétardie,
    D’ignorance et de niceté.
    C’est le chemin de Povrété,
    Une dame qui n’est prisée,
    En ce monde, n’auctorisée
    Ne qu’un viel chien, en vérité.
    De lui vient toute adversité,
    Meschief, peine, ennuy et contraire,
    Arrière se fait donc bon traire
    Du chemin qui à lui adresse,
    Et prendre la plaisant adresse.
    Du beau chemin de Diligence,
    Car chascun puet veoir en ce
    Qui est à chois et puet eslire,
    Il ne doit pas prendre le pire;
    Et s’il le prent et puis s’en veut
    Repentir, quant il ne le peut
    Recouvrer, c’est trop grant foleur.
    Car qui bien laisse et prent doleur
    Et se forvoie à escient,
    Ne puet chaloir s’il en mesvient,
    Car quant un cuer s’est forvoyés,
    N’est pas de légier ravoiés.
    S’il est ou chemin de Paresse,
    Il tourne le cul à Richesse
    Et va à Povreté tout droit,
    Dont je t’ay parlé orendroit,
    Qui fait si mal gens atourner;
    Et quant il cuide retourner
    Et s’apperçoit de sa folie,
    Lors entre en grant mérencolie
    Qui moult le travaille et le peine,
    En pensée, en soussy, en peine,
    En desconfort, en désespoir,
    Dont il devient larron espoir[450],
    Et tolt et emble aux gens le leur,
    Dont en la fin muert à doleur.
      Or sont aucuns qui veullent dire
    Que destinée à ce les tire
    Et les fait ensement aler.
    Folie font d’ainsi parler,
    Car ils ne scevent que ils dient:
    Et les maléureux s’y fient
    Qui dient souvent et menu,
    Quant meschief leur est advenu,
    Qu’ainsi leur devoit avenir,
    Et le veulent pour vrai tenir
    Et prennent en leur meschéance,
    Par ce parler, glorifiance,
    Et s’excusent de leur meffait,
    Disans qu’ils ne l’orent mie fait
    Par leur gré, mais par destinée
    Qui au naistre leur fu donnée.
    Ceulx qui le croient se deçoivent,
    Ne croient pas si comme il doivent,
    Car à nullui n’est destiné
    Qu’il soit pendu ne traïné,
    Ne qu’il meure de mort vilaine,
    S’il ne met au desservir peine.
    Meschief contrester chacun puet
    Qui entendre à bien faire veult,
    N’il n’est pas de nécessité
    Qu’à nul aviengne adversité,
    Mais advient par cas d’aventure,
    Quant folement on s’aventure.
    Destinée ne puet contraindre
    Nul, si qu’il ne se puist refraindre,
    Mais qu’il ait bonne voulenté;
    Et s’il est à la fois tempté
    D’aler faire aucune aatie[451],
    S’avec lui suy[452], je le chastie
    Et lui oste celle pensée
    Qui en son cuer estoit entrée,
    Et lui donne advis et mémoire
    Decontrester, s’il me veult croire,
    A mauvaise temptation,
    Dont il vient à salvation.
    Ainsi peus veoir clèrement
    Que destinée nullement
    N’a nul povoir de chose faire
    Que je ne puisse tost deffaire,
    Au mains s’elle ne m’est célée
    Si qu’au fait ne soie appellée;
    Car nul fait qui sans moy est fet
    Ne puet venir à bon effet,
    Mais communément en meschiet,
    Et par ce meschief il eschiest
    Que destinée y pren le nom
    D’estre vertu et grant renom,
    Car pluseurs dient et soustiennent
    Que bien et mal par elle viennent
    Et que nul contrester ne puet
    A ce que destinée veult;
    Mais tous ceulx en sont décéu,
    Qui ont ceste créance eu,
    Car s’il estoit au Dieu vouloir
    Que destinée éust povoir
    Dessus les gens si comme on dit,
    Que vauldroit bon fait ne bon dit,
    Ne soy à bonnes euvres traire?
    Nul n’aroit mestier de bien faire
    Quant bien fait ne le secourroit,
    Ainçois villainement mourroit,
    Et s’ensuiroit, quoy que nuls die,
    Que s’uns homs à mal s’estudie,
    Et emble, et tue, et fiert, et bat,
    Quant il n’y puet mettre débat
    Pour destinée qui l’enforce
    A tous maulx faire par sa force,
    Que monstré n’en doit estre au doit
    Puisqu’il ne fait que ce qu’il doit:
    Et Dïeu mesmes qui scet tout
    N’en doit avoir vers lui courroux,
    Puisque ce n’a-il mie fait,
    Mais Destinée tout ce fait.
    Certes mais il est autrement,
    Et quiconques maintient il ment
    Que[453] destinée vertus soit,
    Et qui le croit il se déçoit.
    Fay donc ce que je t’ay apris,
    Se tu veulx avenir à pris;
    Laisse le mal et pren le bien,
    Quant avoir le pues aussi bien,
    Et plus légièrement assez,
    Car on est cent fois moins lassé
    Ou beau chemin dessus nommé
    Que Diligence t’ay nommé
    Qui toutes gens à honneur maine,
    Et cent fois y a moins de paine
    Qu’ou hideux chemin de paresse
    Plain de douleur et de tristesse
    Où nul ne pourroit estre à aise,
    Ne faire chose qui lui plaise,
    N’estre en estat, ne bien nourry;
    Car le chemin est si pourry
    Qu’on y entre jusques au ventre,
    Maleureux est cil qui y entre!
    C’est un chemin ou nuls ne court,
    Mais, sans faille, il est assez court
    Tant soit-il ort et desrivé[454],
    Car on est tantost arrivé,
    Sans y quérir autre adresse,
    Droit au manoir où il s’adresse,
    C’est assavoir chez Povreté
    Où l’en vient tout desbareté[455],
    Nu, deschaux, et de froit tremblant
    Et de très-douloureux semblant,
    Le corps courbé, acrampely[456],
    Affin qu’on ait pitié de ly.
    Mais de tels gens, en vérité,
    Doit-on avoir peu de pitié
    Quant il sont en si bas dégré:
    Puisqu’ils se mettent tout de gré
    En si doloreuse aventure,
    Que mésaise aient c’est droicture.
      Se tu crois doncques mon conseil
    Que je, pour ton preu, te conseil,
    Cest ort chemin hideux hairas,
    Ne jamais jouir ne t’y verras.
    Remenbre toy des meschéans
    Que tu es chascun jour véans
    Qui si maleureux deviennent
    Quant en ce chemin se tiennent.
    Beau chastiement met en lui
    Qui se chastie par autrui.
    Se uns homs entre en mauvais pas
    De gré, ou qu’il ne saiche pas,
    (Si comme assez souvent eschiet,)
    Et en ce mau pas lui meschiet,
    Cellui d’après qui le regarde
    Ne le suit pas, ainçois se garde
    D’aler après, qu’il ne se blesse,
    Et s’en va querre une autre adresse
    Qu’à droit port le fait arriver.
    Tout ainsi dois-tu eschiver
    Tous temps le chemin et la voie
    Que tu scez et vois qui avoie[457]
    Toutes gens à chétiveté,
    A angoisse et à povreté,
    Et que chascun jour pues véoir
    Qui ne leur fait que meschéoir[458],
    N’en ce chemin bien n’orent oncques.
    Eschive le erraument doncques,
    Et met les pans[459] à la sainture,
    Et si t’en cours grant aléure,
    Et à main destre pren t’adresse
    Au beau chemin qui tost adresse
    Tous ceulx qui y vont, et agence
    En tout honneur: c’est Diligence
    Le beau chemin plain de noblesse,
    Nuls n’y puet avoir fors léesse
    Par la planté des biens qui viennent
    A tous ceulx qui ce chemin tiennent.
    Il est lonc merveilleusement,
    Mais il n’ennuye nullement
    A ceulx qui veullent avenir
    Au manoir Richesse et venir,
    Ainçois errent et jour et nuit
    Sans ce que goute leur ennuit.
    Chascun a désir qu’il se voie
    En ce chemin. Droit en my-voie
    A deux sentes dont l’une à destre
    S’en va droit, et l’autre à senestre.
    De la destre te vueil parler:
    Par celle fait-il bon aler,
    Car tant est vertueuse adresse
    Qu’il maine à parfaicte richesse;
    C’est Souffisance la séure
    Qui ceulx qui là vont asséure
    Et les fait vivre en bon espoir
    Sans penser à nul désespoir,
    Car tout ce qu’ils ont leur souffist.
    Soit à dommage ou à prouffit,
    Dieu loent sans estre lassés
    Aussi tost d’un pou com d’assez.
    Cils sont riche parfaictement,
    Et nuls n’est riches autrement
    S’il ne va parmy Souffisance,
    Et fut-il ores roy de France.
    De l’autre sente te diray,
    La vérité n’en mentiray:
    Elle va à senestre partie,
    Mais c’est bien chose mi-partie[460]
    Envers celle qui va à destre,
    Car nul n’y puet assouvis estre.
    Celle sente a nom Convoitise
    Qui les cuers enflambe et atise
    D’estre convoiteux sur avoir;
    Qui plus en a, plus veult avoir,
    Tousjours de plus en plus convoite,
    D’aler avant si fort les coite[461]!
    Et quant ils viennent au chastel
    De Richesse qui tant est bel,
    Avis leur est que riens fait n’ont
    S’encores plus avant ne vont.
    D’aler oultre est bien leur entente,
    Tant com leur durra celle sente,
    A quelque peine que ce soit;
    Mais certes elle les déçoit.
    Mal en virent oncques l’entrée,
    Car quant personne y est entrée,
    Ne se peut d’avoir saouler,
    Ains vouldroit bien tout engouler;
    Ne se daignent là arrester,
    Mais vont tousjours, sans contrester,
    Querre meilleur pain que froment,
    Dont, puis, se repentent souvent;
    Car quant bien hault se sont juchiés,
    A un seul coup sont trébuchiés,
    De Fortune qui ne voit goute,
    Qui de sa roe si les boute
    Qu’en la boe les fait chéoir:
    On le puet chascun jour véoir.
    Quant ils se voient décéus
    Et du hault au bas chéus
    Où fortune les a flatis[462],
    Lors ont les cuers si amatis[463]
    Et si vains que du tout leur faillent,
    Et ne scevent quel part ils aillent,
    Tant sont honteux et esbahis,
    Et se tiennent pour fols naïs[464],
    Chétis, las, courbés, sans léesse,
    Entrans ou chemin de Paresse,
    Et s’en vont droit à Povreté,
    Desconfit et desbareté,
    Ne jà puis jour ne seront aise,
    Ainçois languiront en mésaise,
    Et en tel estat se mourront,
    Et, par aventure, pourront
    Faire aucun vilain maléfice
    Dont il seront mis à justice.
    Donc pues-tu véoir et entendre
    Qu’il fait très mauvais entreprendre
    Sente qui est si périlleuse,
    Si forvoiant, si fortuneuse
    Comme est celle de Convoitise,
    Car nul n’y a s’entente mise
    Qui en la fin ne s’en repente.
    Eschieve doncques ceste sente
    Et pren celle de Souffisance,
    Et tu auras tousjours chevance
    Et assez tant com tu vivras;
    Assez as-tu quant ton vivre as,
    Entre les gens, honnestement,
    Et as souffisant vestement
    Et à l’avenant le surplus:
    Fol es se tu demandes plus.
    Puis que tu l’as par loyauté,
    Tu as plus qu’une royaulté
    Sans souffisance ne vauldroit,
    Se tu regardes bien au droit.
      Et s’il advient que servir doies
    Je te deffent que tu ne soies
    Envers ton maistre courageux,
    Orguilleux, fel, ne oultrageux.
    Tousjours lui fay obéissance,
    Et enclines à sa plaisance,
    En tous estas[465], sans rebeller,
    Et ne te dois nul temps mêler
    D’argüer ne de contredire
    Chose que tu lui oies dire:
    S’il parle à toi, si lui respons
    Doulcement, sans vilain respons,
    Sans rebrichier[466] et sans groucier,
    Craindre le dois à courroucier.
    Et si ne dois en nul temps faire
    Chose qui lui doie desplaire
    Pour enseignement que tu truisses[467]
    Au moins puis qu’amander le puisses,
    Tu le dois amer de vray cuer,
    Sans lui estre faulx à nul fuer,
    Et se tu l’aimes, tu feras
    Son vouloir et le doubteras
    En tous estas, j’en sui certaine,
    Car amours est si souveraine
    Que toutes vertus lui enclinent
    Et de lui obéir ne finent.
    C’est moult puissant vertus qu’amour!
    Met-la donc en toy sans demour,
    Car qui aime de cuer, il craint:
    Bonne amour à ce le contraint
    Qui le met en obéissance
    Par sa vertueuse puissance,
    Et le tient en subjection
    Sans user de déception[468].
    Mais s’aucun craint, ne s’ensuit mie
    Qu’il ait en lui d’amour demie[469]:
    Amour n’obéist pas à crainte,
    Ne nullui n’aime par contrainte,
    Car on craint bient ce que l’en het,
    Que ce soit voir, chascun le scet;
    Mais qui bien aime, craint et doubte:
    De ce ne doit nuls avoir doubte.
      Aimes donc ton maistre et le sers
    Loyaument, et s’amour dessers[470];
    Et quant ton bien aparcevra,
    Vers toy fera ce qu’il devra,
    Ne jà ne saura estre avers.
    Et se tu le sers au travers,
    Sans lui amer et chier tenir,
    Nul bien ne t’en poura venir,
    Ains perdras avec luy ton temps
    Et si auras à lui contemps,
    Ou vilment congié te donra
    Et si diffamer te pourra
    En pluseurs lieux, par aventure,
    Que nullui n’aura de toy cure.
    Ainsi en tous estas perdroies,
    Se par amour ne le servoies.
      Quiconques sert il doit amer
    Son maistre de cuer, sans amer[471],
    Et de si loial cuer servir
    Que s’amour puisse desservir.
    Prendre doit trois conditions
    De trois significations
    Que briefment je te nommeray,
    Et puis si les exposeray.
    Premier, dos d’asne doit avoir
    Se bien veult faire son devoir;
    Secondement, comment qu’il voit[472],
    Oreilles de vache avoir doit;
    Et tiercement doit avoir groing
    De pourcel, sans aucun desdaing.
    Ces trois conditions estranges,
    Se tu sers, pas de toy n’estranges,
    Mais mect tousjours paine et estude
    D’avoir les par similitude,
    Quant sauras l’exposition
    De leur signification
    Que je te veuil dire et aprendre.
    Par dos d’asne tu pues entendre
    Qu’avoir dois le fais et la charge
    De ce que ton maistre te charge,
    Et que de toutes ses besoignes,
    Sans faire obliance, tu soignes;
    Tu en dois la somme porter
    Pour mieulx ton maistre déporter;
    Et pour bien faire ton devoir,
    Lui dois souvent ramentevoir
    Et avoir chier sur toute rien
    Le sien prouffit comme le tien.
    Après, par oreille de vache
    Pues-tu entendre, sans falache[473],
    Que tu dois ton maistre doubter,
    Et s’il te laidenge[474], escouter
    Sans ce que contre lui t’orgueilles;
    Faire lui dois grandes oreilles,
    Et faire semblant toutesvoies
    Que tu n’ois adonc, ne ne vois.
    Quant le verras de tencier chault,
    Tais-toy tout coy et ne t’en chault,
    N’à tort, n’à droit, ne respons point
    Tant comme il est en ycel point,
    Car trop s’en pourroit engaignier;
    Autre chose ne puet gaignier
    Servant qui respont à son maistre,
    Soit chevalier, bourgois ou prestre.
    Qui se tait et point ne rebelle,
    C’est une vertu bonne et belle:
    Ceste-cy, se tu me veulx croire,
    Aras-tu tousjours en mémoire.
    Par groing de pourcel ensement
    Peus-tu entendre clèrement
    Qu’en toy ne doit avoir danger
    Ne de boire, ne de menger,
    De grant disner, ne de petit:
    Tous dois prendre par appétit
    Et en bon gré, se tu es sage,
    Sans mener despit ne haussage,
    Orgueil, ramposnes, ne desdaing,
    Et fay tout ainsi com le groing
    Du pourcel qui partout se boute;
    Tout prent en gré, riens ne déboute,
    Ainçois se vit de ce qu’il treuve
    Liement, sans faire repreuve[475],
    Tout treuve bon et savoureux,
    De nulle rien n’est dangereux[476].
    Par semblable, ne dois-tu estre[477]
    Quant tu es à l’ostel ton maistre,
    Ains te doit tout plaire et souffire,
    Sans rien refuser ne despire.
      A tant se tut Raison la sage;
    Lors tournay un pou mon visage,
    Et pour penser mieulx m’acosté;
    Donc s’en vint de lez mon costé,
    Uns homs saiges et plain d’avis,
    Ainsi comme il me fu avis
    Et il en est bien renommés,
    Entendement estoit nommés.
    Beaux amis, dist-il, or entens:
    Se tu veux emploier ton temps
    A faire ce que Raison dit,
    Tu feras que sage, à mon dit.
    Elle t’a cy moult sermoné,
    Moult bonne exemple t’a donné:
    Se tu l’as scéu retenir,
    Tu en pues à grant bien venir
    Selon Dieu et selon le monde;
    Croy la, et j’octroy qu’on me tonde,
    (Se de ce qu’elle a dit t’apens[478];)
    Se tu jà nul jour t’en repens:
    Et tu l’apparcevras à l’ueil;
    Quant à or, plus dire n’en vueil,
    Car on doit mettre son assent[479]
    Autant à un mot comme à cent.
    Quant j’oy un pou après pensé,
    Repensé et contrepensé
    A ce que Raison apris m’ot,
    Et bien recordé mot à mot
    Par le conseil d’Entendement,
    Et que j’estoie en grant dément
    De tout en mon cuer retenir,
    Ès-vous un homme à moi venir
    Qui bien sembloit estre advocas
    Qui parler scéust en tous cas:
    Moult sembloit estre sages hom
    Selon droit et selon raison;
    Coiffe et habit fourré portoit,
    Et richement se déportoit:
    Preudoms sembloit, et sans riot,
    Clerc et varlet avec lui ot.
    Le maistre fu Barat[480] nommés,
    De ce ne fu pas mesnommés:
    Son clerc avoit nom Tricherie,
    Et son varlet Hoquelerie[481].
      Barat s’est de lez moy assis,
    Et commença par mos rassis
    A parler attrempéement
    Aussi comme par chastiement.
    Auras-tu huy assez pensé?
    Di, chaitif, qu’as-tu empensé?
    Veulx-tu croire Raison la fole
    Qui ceulx qui la croient affole?
    Se tu la crois, chaitif seras
    Tant com de son sens useras;
    Nuls ne puet à estat venir
    Qui se veult à Raison tenir,
    Mais à grant paine se chevit
    Et tousjours en souffreté vit
    Sans avoir nulle chevissance.
    Or est fols qui a souffisance
    Quant au cuer a tant de doleur;
    Je le tendroie à grant foleur
    Qui selon raison ouverroit:
    Jamais riche ne se verroit,
    Ains seroit tousjours en un point
    Sans ce que il enrichist point.
    Tousjours seroit com povre et chiche,
    Dolent, subjet et serf au riche
    Dont souvent s’oroit laidengier:
    Ainsi vivroit en grant dangier.
    Qui a le cuer pur, net et monde,
    Povre est et n’a loy[482] en cest monde,
    Ne ne puet venir à estat;
    Met doncques Raison en restat[483]
    Et me crois, si feras que sage,
    Car s’user veux de mon usage,
    Tu seras tantost surhaucié,
    Riche, puissant et essaucié;
    Servis et honneurés seras,
    Et tout à ton plaisir feras.
    Tu ne feras que commander,
    Chascun vendra à ton mander:
    Tous temps vivras en tel conroy
    Com se tu fusses duc ou roy,
    Car tous auras tes aisemens.
    Se tu fais mes enseignemens
    Que je te vueil dire et aprendre,
    Moult bon exemple y pourras prendre.
    Flateur soies premièrement,
    Car c’est le droit commencement
    Par quoi on puet à bien venir
    Et à grant estat avenir:
    S’avenir y veulx, sans deffault,
    De _Placebo_ jouer te fault.
    Soies en tous lieux décevant
    Où tu seras, et par devant
    A toutes gens fais beau semblant,
    Si leur iras le cuer emblant,
    Et faing que tu soies loyaulx,
    Vrais en cuer et espéciaulx[484];
    Aquier des amis, sauf le tien[485],
    Serré par devers toy le tien.
    Ne soies pas larges, mais chiches;
    Ainsi seras tu tantost riches.
    Quel compaignie que tu truisses,
    Là ne despens riens que tu puisses[486],
    Aies le cuer bault[487], et te truffes,
    Et dy des gorgées et des truffes
    Quant tu verras qu’il sera point,
    Et met paine à le faire à point;
    Par ce seras tu bien venus
    En compaignie, et chiers tenus.
      Après, ne te doit ennuyer
    De voulentiers gens conchier[488]
    En tous estas, et mettre en voie
    Que tu aies de leur monnoie,
    Ou soit à droit, ou soit à tort,
    Ou par contrainte, ou par accort;
    Et se bien me veulx apaier[489],
    Acrois[490] partout sans riens payer,
    Et voulentiers par tout mescompte[491],
    Ne jà du péchié ne fais compte;
    Ceulx qui te doivent fay contraindre,
    De les mengier ne te dois faindre,
    Et les mener à povreté
    Sans avoir d’eulx nulle pitié:
    Ne te chault s’ils perdent chevance,
    Mais que tu aies leur substance;
    Soies tousjours tout prest de prendre,
    Mais garde-toi bien de riens rendre.
    Je te deffens que tu ne paies
    A âme chose que tu doies,
    Et s’aucun te faisoit semondre[492]
    A qui il te faulsist respondre,
    Ou soit à bel, ou soit à let,
    Moy et mon clerc et mon varlet
    Tous ensemble t’irons aidier
    Ou cas qu’il te fauldra plaidier.
    Se tu nous crois, tu materas
    Tous ceulx à qui tu plaideras,
    Sans faillir en nulle saison,
    Soit droit, soit tort, maugré raison,
    Tousjours à ton besoing vendrons
    Et bien près de toi nous tendrons
    Et te feron tost achever
    Tes causes et en hault lever
    Ton estat, habonder et croistre,
    Tant que bien te pourras acroistre.
      Après, te vueil encor aprendre
    Trois choses qu’il te fault emprendre
    Se tu veulx tost monter en pris
    Et si sont d’assez moien pris.
      La première est que tu te vestes
    De bonnes robes et honnestes
    Fourrées à leur avenant[493]:
    Si en seras plus avenant[494],
    Plus honnourés et mieulx prisiés
    Et entre gens auctorisiés
    Et tenus pour sage de tous,
    Et fusses tu fols et estous.
    La seconde chose est mentir
    Soubtivement, sans alentir,
    Par beaux mos polis, plains de lobe,[495]
    Ce siet bien sur la bonne robe:
    Par ce pourras tu faire acroire
    Que mençonge soit chose voire
    Et que vérité soit mençonge,
    Ne qu’on y croie ne qu’en songe.
    La tierce chose est vraiement
    Que tu faces hardiement
    Quanque tu auras empensé,
    Soit bien pensé ou mal pensé;
    Tu dois hardiement ouvrer
    Se grant avoir veulx recovrer,
    Car cil qui hardiement ne euvre
    Et est honteux, riens ne recoeuvre,
    Mais est povre et las en ce monde,
    Et li hardi tousjours habonde
    Puis que beau langage a en main.
    Partout et à soir et à main
    Les trois derreniers poins tiens
    Et principalment les retiens
    Et tu auras tousjours chevance
    Combien que tout soit décevance,
    Car nul ne puet chevance avoir
    S’il ne met paine à décevoir
    Et s’il n’est bien malicieux,
    Viseux[496] et caut et engineux,
    Semblant doulx et courtois vers tous,
    Et en cuer faulx, rude et estous:
    Et que tousjours rie sa bouche
    Combien qu’au cuer point ne lui touche,
    Car combien que beau semblant moustre,
    Le ris ne doit point passer oultre
    Le neu de la gorge, à nul fuer;
    Des dens doit rire et non du cuer.
    Il doit estre blaffart[497] toudis,
    Et en tous fais et en tous dis
    Les puissans doit aplanier[498]
    Par souples mos et festier,
    Et leur porter grant révérence,
    Car on puet moult acquester en ce;
    Des povres ne puet il chaloir,
    Car ils ne pevent riens valoir:
    Ceulx là fait bon bouter arrière,
    Sans leur faire semblant ne chière,
    Et du tout en tout soy retraire,
    Car on ne puet d’eulx denier traire.
    Or m’as tu oy raconter
    Comment on puet à pris monter:
    Se tu crois mon enseignement,
    Riche seras parfaictement,
    Et auras, tout à ton vouloir,
    Tout ce que tu sauras vouloir;
    Et se tu veulx croire Raison,
    Tu seras en toute saison
    Chaitif, mendiant, povre et las,
    Car si te tendra en ses las
    Que monter plus hault ne pourras.
    Or fay lequel que tu vouldras
    Et y pense tout à loisir:
    Quant à chois es, tu pues choisir.
    Se tu veulx estre povres hom,
    Si me laisse et croy Raison;
    Et se tu veulx riche homs estre,
    Si me tien pour seigneur et maistre,
    Tant com tu vivras, et me croy,
    Et de Raison croire recroy.
      A ce mot s’est Barat téu,
    Car assez m’ot ramentéu
    Ses affaires et sa doctrine
    Et enseignié tout son convine;
    A tant de moy se départi.
    Lors pensay moult au jeu-parti
    Que Barat et Raison fait m’orent
    Et enchargié tant comme ils porent,
    Mais le jeu si parti avoie
    Que lequel croire ne savoie,
    Ou Raison qu’ot à moy parlé,
    Ou Barat le bien enparlé;
    Mais bien croi qu’au derrain créusse
    Barat, s’autre conseil n’éusse,
    Car si bel m’avoit flajolé
    Que tout sus m’avoit affolé.
      Lors vint à moy Entendement
    Pour moi donner enseignement
    Auquel des deux je me donnasse
    Et cuer et corps habandonnasse.
    Fol, dist-il, es-tu rassoté
    Qui ce que Raison t’a noté
    Veulx laissier pour estre trichierres
    Faulx et mauvais et décevierres,
    Et croire Barat le lobeur
    Qui pires est que desrobeur?
    Bien es fol et oultrecuidés
    Et de sens naturel vidés,
    Et bien pert que tu ne vois goute
    Qui veulx mettre entente toute
    A toy envers Barat plaissier,
    Pour Raison la sage laissier,
    Car oncques nuls ne la laissa,
    Ne vers Barat ne se plessa
    A qui n’en meschéist après,
    Sans faillir, à loing ou à près.
    De ton temps véoir l’as péu
    Que maint grant maistre décéu
    En ont esté, et mis à honte
    Pourcequ’il ne tenoient compte
    De Raison ne ses fais ensuire,
    Mais se penoient de la fuire,
    Et adnichilloient droiture,
    Contre Dieu, Raison et Mesure.
    Et combien qu’avec eulx féusse,
    Jà d’eux audience n’eusse
    A desdire leur voulenté,
    Tant ièrent espris et tempté
    Par Fol-cuidier le pou séur,
    Qu’estre cuidoient asséur,
    Et tousjours Barat surmontoient
    Pour ce que par lui hault montoient,
    Et amassèrent les trésors
    Qui erent très-vils et très-ors;
    Car de ce qui par Barat vient,
    En la fin nul bien n’en avient.
    Il n’est pas bon logicien:
    Belle entrée a et beau moyen,
    Mais tousjours fait conclusion
    A honte et à confusion;
    Car tout quanque Barat aüne[499],
    En vingt ans, anientist fortune
    En une seule heure de jour,
    Ne nuls n’y puet mettre séjour.
    Ainsi ne puet Barat durer,
    Car ne le pourroit endurer
    Droit qui tout adresse et aligne
    Et qui ne fait riens fors à ligne,
    Mais est enclin à son affaire
    A tout ce que Raison veult faire.
    Croi doncques Raison et la sers,
    Car vraiement tu seras sers
    D’une mauvaise servitude
    Se tu mes en Barat t’estude.
    Pluseurs par ses las sont passés,
    Plus sages que tu n’es d’assez,
    A qui mal en est advenu,
    Tu le vois souvent et menu.
    Plus sages que tu n’es? Vraiement,
    Par le mien mesmes jugement
    Plus saiges voir ne sont-ils mie,
    Car en eulx n’a de sens demie,
    Combien qu’ils aient de sens le nom
    Par grant abit et par renom,
    Car tels est saiges qui est fols
    En ce monde, bien dire l’os,
    Tel y est fol qui est bien sage,
    Ce voit on par commun usage;
    Car selon le dit de ce monde,
    Ly homs qui de richesse habonde
    Et a assez or et argent
    Pour sage est tenu de la gent
    Et est prisié en tous pays
    Combien qu’il soit uns fols naïs;
    Donc il est sage et fol ensemble
    Par ce que j’ay dit[500], ce me semble:
    Voire sage pour son avoir,
    Et fol naïs pour pou savoir.
    Et li povre, par opposite
    De l’exemplaire que j’ay dicte,
    Tant soit-il sage à grant devise,
    Nul ne l’aime, honnoure ne prise,
    Ains le tient-on pour fol et nice
    Et est tenu son sens pour vice,
    Car quant il dit sage parole,
    Si la tiennent la gent pour fole,
    Ne de riens ne puet avoir los,
    Dont il est sage, et si est fols:
    Fols, pour ce qu’il est povres hom:
    Sage, pour ce qu’il a raison,
    Et sens en soy de lui retraire
    De mal faire, et à bien atraire.
    Or vois-tu bien que je te preuve
    Tout clèrement par une preuve
    Qu’il n’a fors pure vérité
    En ceste contrariété
    Que je t’ay voulu cy espondre[501],
    Ne nuls n’y sauroit que respondre
    Pour le contraire soustenir
    S’il se veult à raison tenir.
    Soies sages et me croi doncques,
    Tu ne féis si bon sens oncques.
    Croy Raison et à luy te tiens
    Et ses enseignemens retiens,
    Et tu en vendras à grant bien.
    Tu le verras ains dix ans bien,
    Faillir n’y pues par nulles voies
    Se par Barat ne te desvoies.
      A tant se tut Entendement;
    Lors commençay parfondément
    A penser à la vérité
    Que devant m’avoit récité;
    Adonc apparceu-je de voir
    Que voir m’ot dit, sans décevoir,
    Entendement le sages hom
    Que trop mieulx vault croire Raison
    Que Barat; si m’y assenti,
    Car onc nuls ne s’en repenti.
      Lors vint Raison, sans demourée,
    Blanche, vermeille, colourée,
    Faisant grant joie et bonne chière
    Com celle qui n’a riens tant chière
    En ce monde, comme personne
    Qui de bon cuer à lui se donne.
    Ami, Dieux te gart, dist Raison,
    Or est-il bien temps et saison
    Que tu faces ma volenté,
    Quant je t’en voi entalenté;
    Tout maintenant jurer te fault
    Que par toi n’y aura default,
    Et que de cuer me serviras,
    Ne contre mon vouloir n’iras
    Jamais, quoy que Barat te die,
    Ne nul de ceulx de sa mesnie,
    Par leur beau parler décevable.
    Aies le cuer ferme et estable
    A mes œuvres continuer
    Sans ton courage point muer
    En pensée, n’en fait, n’en dit,
    Comme autrefois je le t’ay dit
    Et monstré pour prendre chastoy,
    Quant je fus cy parler à toy;
    Mais si tost com je m’entourné,
    Par Barat fus tantost tourné
    Et par la force de son vent,
    Tout ainsi que l’en voit souvent,
    Quelque part que le vent s’atourne,
    Le cochet d’un clochier se tourne.
    Prens doncques en toy fermeté,
    Vertu, force et estableté
    A bien tenir les convenances,
    Que je vueil que m’enconvenances
    Pour avoir de toy séurté
    Que tu me tendras loyaulté
    Et que tous mes commans tendras
    En quelque lieu que tu vendras.
    Et saches bien que mon service
    Est au monde droicte franchise;
    Qui me sert, puet partout aler
    Et devant toutes gens parler
    Baudement, sans baissier la chière
    Et sans traire le cul arrière:
    Paour ne doit avoir ne honte
    Devant pape, roy, duc, ne conte,
    Ne devant autre justicier
    Ordonné pour gens justicier,
    Non voir devant homme qui vive,
    Car mon sergent à nul n’estrive,
    Ne sa pensée en nul endroit
    Ne vouldroit mettre, fors en droit
    Et en vérité maintenir,
    Et s’y veult soir et main tenir.
    Pour ce, vueil-je que tu deviengnes
    Mon sergent, et qu’à moy te tiengnes,
    Sans t’en départir à nul fuer,
    Et espécialment ton cuer;
    Et je aussi en ton cuer seray,
    Ne jà ne m’en départiray
    Jusques à la mort, ne t’en doubtes,
    Se maugré moy hors ne m’en boutes.
    Se tu m’aimes, bien te suivra,
    Et se ce non, il te fuira.
    Se tu n’as l’entendement trouble,
    Tu vois que mon salaire est double;
    Que ce soit voir, je le te preuve
    Par preuve où n’a point de repreuve.
      En moi servant, premièrement,
    Pues-tu vivre tout seurement,
    Sans nul doubter fors Dieu mon père:
    Qui ce ne croit, il le compère.
    Après, quant tu trespasseras
    De ceste vie, tu seras
    Avecques mon père en sa gloire,
    Ceste sentence est toute voire,
    Et là vivras-tu finement
    Sans jamais avoir finement,
    Car tu dois créance avoir ferme
    Que quant personne vient au terme
    Qu’elle en ce monde doit mourir,
    Adonc commence-elle à flourir
    Et prent commencement de vie
    Tout aussi tost qu’elle dévie,
    Car elle ist de vie muable
    Et entre en vie pardurable.
    Tout donc pues tu veoir clèrement
    (S’en toy a point d’entendement)
    Que mon loyer se double bien
    Quant on en reçoit double bien,
    C’est assavoir honneur parfait
    Au monde, par œuvre et par fait,
    Et paradis en la parfin
    Qui durera tousjours sans fin.
    N’il n’est nul autre bien, sans faille,
    Qui le mendre de ces deux vaille;
    Or te gard donc de les perdre
    Et te veuilles du tout aherdre
    A mes euvres si bien ensuivre
    Que tu les aies à délivre,
    Et laisse Barat et ses euvres,
    Car saches que se tu en euvres
    Et en son service remains,
    Tu perdras le plus pour le mains.
    Car ces deux biens dessus nommés
    Qui tant sont beaulx et renommés
    Par son service auras perdus
    Et tu mesmes seras pendus
    Corporelment, par aventure,
    A grant angoisse et à laidure.
    Tu y perdras, bien dire l’os,
    Se tu le sers, corps, âme et los
    Qui sont trois très souverains biens,
    Et si ne te puet donner riens
    Fors plaisance d’acquerre avoir
    Sans point de conscience avoir,
    Car tousjours son servant atise
    D’avoir sur l’autrui convoitise,
    Et quant son servant a assez
    D’avoir et trésors amassés
    Et il cuide vivre asséur,
    Lors lui vient aucun méséur
    Qui tout met ce dessus dessoubs:
    Par nuls n’en puet estre ressoubs,
    Ne nul de son meschief ne pleure,
    Mais chascun, de fait, lui queurt seure,
    Et tel, espoir, ne le vit oncques
    Qui en dit moult de mal adoncques
    Et en a le cuer esjoy
    Pour le mal qu’il en a oy,
    Et n’en fait fors chanter et rire,
    Et souvent par ramposne[502] dire:
    Trop estoit riche devenu,
    Tout estoit du deable venu
    Et au deable tout s’en ira
    Tout ainsi chascun s’en rira
    Et n’aura nuls de lui pité,
    Ains sera vilment despité
    Et de Dieu et du monde ensemble.
    Donc pues tu voir, ce me semble,
    Que Barat fait mauvais servir
    Puisque l’en ne puet desservir
    Fors que honte, angoisse et doleur,
    Et que qui le sert fait foleur.
    Met le doncques en non chaloir,
    Et m’aimes qui te puis valoir
    En tous cas, vers Dieu et le monde,
    Et aies le cuer pur et monde.
    Aies en toy humilité,
    Loyaulté, foy et vérité,
    Et se humble es de contenance,
    Gardes qu’il n’y ait décevance,
    De cuer le soies et de fait,
    Car tel humble et loyal se fait
    Devant la gent, qui ne l’est mie
    Ne n’a d’humilité demie,
    Mais sa chiere humble et encline
    Fait acroire à ceulx qu’il encline
    Qu’il est preudoms, par son semblant.
    Ainsi leur va leurs cuers emblant
    Par sa simple papelardie
    Qui est pleine de renardie
    Et de faulseté, car soubs l’ombre
    De la simplesse où il s’aombre,
    Deçoit tous ceulx qui le regardent
    Qui du faulx semblant ne se gardent;
    Si avuglés les a sans doubte
    Que nulluy de luy ne se doubte,
    Mais jurroit chascun fermement
    Qu’il est preudoms parfaictement,
    Combien qu’en faulseté habonde.
    Tout ainsi deçoit-il le monde,
    Mais Dieu ne puet-il decevoir:
    Cellui en scet bien tout le voir,
    Car il voit tout à descouvert
    Le mal qu’en son cuer a couvert;
    Jà si ne le saura répondre[503]:
    Devant lui l’en fauldra respondre
    Quant il son jugement tendra
    Que sentence à chascun rendra
    Par rigueur, selon le forfait
    Qu’il aura au monde forfait.
    Ou milieu du trosne sera,
    Les plaies à chascun monstrera,
    Les cloux, la couronne et la lance:
    Lors sera chascun en balance,
    Là n’aura roy ne empereour
    Qui n’ait en son cuer grant paour.
    Là tendra-on aussi grant compte
    D’un savettier comme d’un conte,
    Et de ceulx qui vestent les rois[504]
    Comme des prelas et des rois,
    Mais que loyaulx aient esté,
    Prenans en gré leur povreté,
    Et la seurté de Souffisance,
    Et qu’ils aient éu créance
    En Dieu, telle qu’il appartient
    Et comme Crestienté tient.
    Là ne pourra nuls pour avoir
    Vers mon père sa paix avoir
    Qu’il n’ait ce qu’aura deservi
    Selon ce qu’il aura servi:
    Tuit cil qui seront d’Adam nés
    Auront paour d’estre dampnés,
    Jà si justes ne sauront estre.
    Mais Dieu fera aler à destre
    Mes gens que il congnoistra bien,
    Qui n’ont entendu fors à bien
    Au monde, et selon moy vescu;
    Là leur seray-je bon escu,
    Car Dieu tretous les béneira.
    Ainsi mes gens départira
    D’avec les gens Barat, sans doubte,
    Qui seront tous en une route
    Dolens à senestre partie;
    Là iert la chose mi-partie,
    Car mes gens qu’à destre seront
    Tons ensemble joye feront
    Et auront parfaite léesse
    Exemps de dueil et de tristesse.
    Et les gens Barat, d’autre part,
    Dont mon père aura fait depart
    D’avec les miens, par leur foleur,
    Grant pleur, grant cri et grant doleur
    Adonc tous ensemble menront
    Quant ils condempnés se verront
    Et tournés à perdition
    Sans espérer rédemption.
      Or ne te fay pas donc hessier[505]
    De moi prendre et Barat laissier,
    Rens toy à moy tout en ceste heure,
    Sans querre y terme ne demeure,
    Fay moy tost hommage mains joinctes,
    Et selon mes œuvres t’apointes
    Si com je t’ay cy-devant trait,
    Et persévères sans retrait,
    Car qui aujourd’uy bien feroit
    Et demain ne perséverroit,
    Tout ce ne vauldroit un festu.
    Lors me dit Raison: Que fais-tu?
    Il me semble que tu n’oies goute.
    Dame, dis-je, je vous escoute,
    Car tant me plaist à vous oïr
    Que tout me faites resjoïr
    Des grans biens que vous m’aprenez,
    Et pour ce à tort me reprenez,
    Car vous m’avez dit et apris
    Que qui veult avenir à pris,
    Il doit oïr et bien entendre
    Avant qu’il doie response rendre,
    Et qu’à parler si à point preigne
    Et par avis, qu’il ne mespreigne:
    Et que de parler ne se haste,
    Ne que nuls n’en doit avoir haste
    Qu’avant n’y ait trois fois avis;
    Et pour ce, dame, il m’est avis
    Se je vous ay laissié parler
    Sans reprendre vostre parler
    Que je n’ay fait cy nullement
    Fors selon vostre enseignement
    Auquel faire je sui tenu.
      C’est voir, tu l’as bien retenu,
    Ce dit Raison, et à cuer mis:
    Si en seras à honneur mis
    S’ainsi le veulx continuer
    Sans ton courage point muer.
    Puisqu’estre veulx de mes complices,
    Garde bien que tu acomplisses
    Mes commandemens, sans retraire,
    Que tu m’as oy cy retraire.
      Je respondi: Voulentiers, dame,
    Tout sui vostre de corps et d’âme;
    En vous ay mis tout mon courage,
    Tenez et je vous fay hommage
    Et me rent jointes mains à vous,
    Comme le vostre, à nus genouls;
    Et si vous ay enconvenant
    Que bien vous tendray convenant
    En tous les lieux où je seray,
    Ne jamais chose ne feray,
    Que je puisse, qui vous desplaise.
      Lors Raison se baisse et me baise
    Et en baisant s’esvanouy.
    Plus parler ne la vis, n’oy,
    Mais bien dedens moy la senti,
    N’oncques puis je ne m’assenti
    De faire à nulluy desraison
    N’autre chose contre raison,
    A tout le mains que je péusse
    Ne que congnoissance en éusse.
    Quant dedens moi senti ainsi
    Raison la sage que j’aim si
    Que tousjours en mon cuer demeure,
    Lors vindrent à moy, sans demeure,
    Un moult simples homs et sa femme;
    Bien sembloient gens sans diffame
    Et sans estre de mal tempté:
    Bon-cuer et Bonne-voulenté
    Se faisoient-ils appeller.
    (Tels noms n’affierent à céler.)
    Chascun moult bel se maintenoit;
    Bonne-voulenté si menoit
    Un enfant bel et doulx et gent
    Et gracieux à toute gent,
    (En tous cas ert de bon affaire,)
    Nommé fut Talent-de-bien-faire;
    Bon-cuer le preudom fut son père
    Et Bonne-voulenté sa mère.
    Tous trois de lez moy s’arrestèrent
    Et moult bel semblant me monstrèrent;
    Bon-cuer premier m’araisonna
    Et moult bel salut me donna
    Par doulx parler, com simples hom:
    Amis, dist-il, puisque Raison
    As avec toy acompaignie,
    Tu m’auras en ta compaignie
    Tous temps, et avec toi seray,
    Ne jamais jour ne te lairay;
    Ma femme et mon fils que vois cy
    Ne te lairont jamais aussi;
    Nous trois te conduirons ensemble
    A la voie, se bon te semble,
    Que Raison t’a dit et apris
    Qui fait gens avenir à pris;
    Et se tu nous veulx croire et suire,
    Tous prets sommes de toy conduire
    Et d’aprouver en vérité
    Ce que Raison t’a endité;
    Et sans nous trois ne pues-tu faire
    Chose qui puist à Raison plaire,
    Car ne saroies assener[506]
    Au chemin qui te doit mener
    Au noble chastel de Richesse
    Qui tant parest plain de noblesse.
    Qui sans nous y vouldroit aler
    Il ne feroit que reculer
    Jusqu’à tant qu’il se fust bouté
    Droit au chemin de Povreté
    Qui tant parest boueux et ort.
    Lors lui dis: Sire, je m’acort
    A vous trois, et si vous requier
    Que vous me vueilliez convoïer
    Ou chemin que je tant désir,
    Si m’acomplirez mon désir:
    C’est au chemin de Diligence
    Que je ne say où l’en commence
    A y entrer, qu’onques n’y fuy,
    Dont dolent et courroucié suy.
    Tu y entreras tout en l’eure,
    Dist Bon-cuer, or tost, sans demeure,
    Lieves sus et si t’apareilles;
    Il fauldra bien que tu t’esveilles
    Tel fois que tu dormisses bien,
    Se tu veulx avenir à bien:
    En ce chemin faut traveillier,
    Pou dormir et souvent veillier.
    Par trop dormir pues-tu bien perdre,
    Nuls ne s’en scet à quoi aherdre[507]
    Se n’est à robe dessirée
    Qui n’est pas chose désirée
    De personne qui honte craint;
    Pour ce est saige qui se contraint
    A souffrir un pou d’abstinence
    Dont on vient à telle excellence
    Que on a des biens a planté.
    Lors parla Bonne-volenté:
    Beaux fils, dist-elle, à moi entens,
    Il te fault employer ton temps
    Tout autrement que tu n’as fait,
    Et si bien maintenir ton fait
    Que tu puisses acquerre avoir
    Sans chose de l’autrui avoir;
    Et me croy moi et mon seigneur,
    Si en vendras à grant honneur.
    Tu n’y verras jà le contraire,
    Amis, dist Talent-de-bien-faire,
    Croy ma mère que tu os cy,
    Et mon père Bon-cuer aussi;
    En leur conseil met tout assens
    Et les aimes, si feras sens:
    Lieves sus tost, sans plus d’atente,
    Si te menrons droit à la sente
    Du beau chemin de Diligence;
    Et ne met point de débat en ce,
    Car tu en pues venir à pris,
    Si comme Raison t’a apris.
      A ce mot respondi en l’eure:
    Sire, voulentiers, sans demeure;
    Jà par moy n’y aura débat;
    Vostre conseil pas ne débat,
    Ains le vueil du tout acomplir.
    Lors me commençay à vestir
    Et me chaussay appertement,
    Puis dis: C’est fait, alons nous en,
    Véez moy cy tout apresté.
    Lors ala Bonne-voulenté
    Tantost alumer la chandelle,
    Car moult estoit le cuer chault d’elle
    Que fusse entré en Diligence
    Le beau chemin plain d’excellence;
    Puis dist doulcement, sans hault braire,
    A son fils Talent-de-bien-faire:
    Tien, dist-elle, mon enfant doulx,
    Ceste chandelle devant nous
    Porte, si que plus cler voyons
    Tant qu’en Diligence soions;
    Or tost, n’y ait plus séjourné.
    Dame, véez me ci attourné,
    Dist Talent-de-bien-faire adoncques.
    Désobéissant n’en fut oncques,
    A la voie se mist devant,
    Pié à pié l’alasmes suivant.
      Tous quatre ensemble tant errasmes
    Que nous en Diligence entrasmes,
    Où je onquesmais entré n’avoie
    Pour ce que aler n’y savoie.
    En ce chemin grant et ferré
    N’éusmes pas grantment erré
    Que nous trouvasmes un chastel,
    Onques personne ne vit tel
    Se ce ne fust cellui meismes;
    Et quant à la porte venismes
    Et nous cuidasmes ens entrer,
    Adonc nous vint à l’encontrer
    Cellui qui la porte gardoit,
    Qui moult fellement regardoit
    Et moult estoit mal engroigné
    Et, par semblant, embesoigné.
    Moult lourdement me print à dire:
    Qu’est-ce que voulez-vous, beau sire?
    Voulez-vous entrer sans congié
    Si tost que vous l’avez songié?
    Nul n’entre ou chastel de céans,
    S’il n’est à moy obédiens
    Et à ma femme que veez cy.
    Ay! sire, pour Dieu mercy!
    Ce dist lors Talent-de-bien-faire,
    Ne vous vueille à tous deux desplaire,
    Il n’y vueil pas, sans vous entrer.
    Lors a prins Bon-cuer à parler:
    Sire, dist-il, il est bien digne
    D’entrer léans sans long termine,
    Car je le sçay pour vérité.
    C’est mon, dist Bonne-voulenté,
    Sire, n’en soie en doubtance,
    Car je sçay bien qu’il a béance,
    Grant voulenté et grant désir
    D’acomplir tout vostre plaisir
    Et de la dame de vos biens,
    Car sans ce ne vauldroit-il riens;
    Dictes que voulez-vous qu’il face,
    Et il le fera sans fallace.
      Lors dist le portier doulcement:
    Puisque de son assentement
    L’avez jusques ci amené,
    Il sera moult bien assené
    Ne il ne le pourroit mieulx estre.
    Adonc me prist par la main destre
    Et me commença à preschier
    En disant: Mon amy très chier,
    Puisque tu es céans venu,
    Tu seras désormais tenu
    De moy et ma femme obéir,
    Se tu veulx Richesse véir,
    Qui demeure assez près de cy
    En son bel chastel seignoury.
    A elle ne puet nuls aler
    Sans à ceulx de céans parler
    Et toute leur voulenté faire
    Et persévérer sans retraire;
    A moy fault parler tout premier
    Qui suis de ce chastel portier,
    Qu’on clame chastel de Labour[508],
    Où l’en besongne nuit et jour;
    On m’appelle par mon nom Soing
    Qui maine les gens par le poing,
    Entre moy et Cure ma femme,
    A monseigneur et à madame
    Qui de céans ont le demaine,
    Qu’on appelle Travail et Peine:
    Si que, beaux amis, se tu veulx,
    Nous te menrons tout droit à eulx,
    Mais moult t’y fauldra endurer
    On tu n’y pourras jà durer,
    Car on te feroit hors chacier,
    En l’eure, sans toy menacier,
    Se n’y faisoies ton devoir.
    Je ne te vueil pas décevoir,
    Demourer pues, ou retourner;
    On dit souvent qu’à l’enfourner
    Font li fournier les pains cornus[509].
    Sire, dis-je, n’en parle nuls,
    De retourner n’est pas m’entente
    Pour nulle durté que je y sente:
    Jà ne m’en verrez remuer
    Pour froit, pour chaut, ne pour suer;
    Bon-cuer et Bonne-voulenté
    Le vous ont assez créanté,
    Et Talent-de-bien-faire aussi,
    Qu’amené m’ont avec eulx cy,
    Et se defaillir m’en véez,
    Jamais, nul jour, ne me créez.
      Lors me menèrent Soing et Cure
    Ens ou chastel grant aléure.
    Là avoit bien plus de cent mille
    Ouvriers ouvrans par la ville,
    Dont chascun faisoit son mestier
    Si comme il lui estoit mestier;
    Là n’ot homme ne femme oiseux.
    Tant estoit ce chastel noiseux
    De férir et de marteller[510]
    Qu’on n’y oïst pas Dieu tonner;
    Qui de trois jours n’eust sommeillé
    Si fust-il là tout esveillé.
    Quant les ouvriers vy et oy,
    J’en eu le cuer tout esjoy
    Et me fut tart que je m’y veisse
    Et que je aussi comme eulx feisse.
    Soing et Cure me regardèrent
    Talentif[511], si me demandèrent
    Se je vouloie demourer
    En Labour et y labourer:
    Oïl, dis-je, pour Dieu mercy!
    Moult me plaist à demourer cy;
    Au chastellain bien parleray
    Et à sa femme, quant j’aray
    Icy esté jusques au soir.
    Dist Soing et Cure: Tu dis voir,
    Or commence donc, de par Dieu.
    Adonc prins ma place et mon lieu
    Et m’alay tost mettre en conroy.
    Ma chandelle mis devant moy
    Sur la table, en un chandelier,
    Pour mieulx véoir à besongnier.
    Et comme je m’apareilloie
    Et que je commencier vouloie,
    Es-vous venir la chastellaine
    De ce chastel, à grant alaine,
    Peine qui aloit visitant
    Tous les ouvriers dont je vy tant.
    Les pans avoit à sa ceinture
    Et moult aloit grant aléure;
    De telle ardeur se remuoit
    Qu’a pou que le sang ne suoit;
    Nulle fois surcot ne vestoit,
    Mais en sa povre cote estoit
    Et aucune fois en chemise,
    Quant elle l’avoit blanche mise.
      En passant Peine m’apparçut,
    Et pour ce que ne me congnut,
    Demanda à Soing le portier:
    Qui est, dist-elle, cel ouvrier
    Que je voy là tout seul séoir?
    Ne l’ay point apris à véoir,
    Il est venu tout nouvel huy,
    Je vueil aler parler à luy
    Savoir s’il croire me voulra
    Et s’à mon plaisir labourra.
    Dame, dist Soing, vueilliez savoir
    Qu’il a grant fain de vous véoir;
    Tesmoingnié nous a bien esté:
    Bon-cuer et Bonne-voulenté
    Et aussi Talent-de-bien-faire
    Dient qu’il est de bon affaire
    Et qu’il d’estre oiseux n’a cure.
    Lors parla moult haultement Cure
    Et dist: Vraiement, se n’a mon[512],
    Et pour ce nous du cuer l’amon
    Entre moy et mon mari Soing,
    Avec lui serons près et loing:
    Prests sommes de le vous plégier
    Et de nous en bien obligier.
    Lors respondi la chastellaine:
    Puisqu’il est, dist-elle, en tel vaine,
    Je le vueil aler essaier
    Si me pourra si appaier
    Comme vous dictes, or y parra;
    S’ainsi le fait, il acquerra
    Pour l’amour de moy moult d’avoir
    Que nuls ne puet sans moy avoir.
    Peine se trait lors près de moy:
    Amis, ne soies en esmoy,
    Dist-elle, mais fay liement
    Ta besoigne, et appertement
    A ta main entens sans muser
    Et ne t’entens pas à ruser,
    Mais si l’ouvrage continues
    Que par force d’ouvrer tressues,
    Car nuls ne doit céans oser
    Soy alaschir ne repouser,
    Car tantost seroit bouté hors.
    Je respondi humblement lors:
    Dame, dis-je, j’ay grant désir
    De faire tout vostre plaisir,
    Ne jà jour ne vous pourrez plaindre
    De moy que m’aiez véu faindre,
    Ne que vous face mesprenture,
    En tesmoing de Soing et de Cure.
    Amis, dist Peine, c’est bien dit,
    Fay que le fait s’accorde au dit,
    Ou tout ce ne vauldroit un ail,
    Si que quant mon mari Travail
    Vendra au soir, puist parcevoir
    Que bien aies fait ton devoir.
    Je visite nos gens au main,
    Et il les visite au serain:
    Or fay tant qu’il ne se courrouce,
    Carde pou parle, tence et grouce.
      A tant se tut la chastellaine
    Qui moult estoit d’angoisse plaine;
    A besognier commençay lors,
    Entente y mis, et cuer et corps.
    Ainsi besongnay sans séjour
    Jusqu’à tant que je vy le jour
    Par les fenestres pairoir cler:
    Lors ma chandelle alay souffler,
    Puis entendi à ma besoigne,
    Sans querre y terme ne essoigne,
    Jusqu’à heure de desjuner
    Qui vault desjuner et disner
    A la coustume des ouvriers.
    De ceulx illec vis-je premiers
    La manière et la contenance[513],
    Qui vivoient en abstinence.
    N’y ot si grant ne si petit
    Qui ne préist grant appétit
    En pain sec, en aux et en sel,
    Ne il ne mengoit riens en el
    Mouton, buef, oye ne poucin;
    Et puis prenoient le bacin,
    A deux mains, plain d’eaue et buvoient
    A plain musel, tant qu’ils povoient.
    Quant je regarday cel afaire,
    Grant talent me print d’ainsi faire
    Combien que pas ne l’eusse apris;
    Mais aux ouvriers exemple pris,
    Qui mengoient, si me prist fain:
    Lors fis tant que j’êus du pain
    De Corbueil[514], du sel et des aulx,
    Et si prins du vin aux chevaulx[515],
    Puis mengay par si grant saveur
    Qu’oncques ne mengay par greigneur,
    Car moult me vint à gré cel ordre.
    Qui me véist en mon pain mordre,
    Ma manière et mon contenir,
    Grant appétit l’en peust venir.
    Et tout adès en besongnant
    Alay illec mon pain mengant
    Et beu de l’ieaue à plain musel;
    Vin ne prisoie un viel fusel.
    Et quant j’éu mengié et beu,
    Aussi bien me sentis-je peu
    Comme s’à feste éusse été
    Ou j’éusse eu à grant planté
    Mouton, buef, poulaille et paons,
    Pastés et tartes et flaons,
    Pain de bouche[516] et estrange vin
    Bourgouing, Gascoing et Angevin[517],
    Beaune, Rochelle, Saint-Pourçain[518]
    Que l’en met en son sein pour sain.
    Lors me pris fort à besongnier,
    Je ne m’en fis pas essoignier,
    Car là furent, lez mon costé,
    Bon-cuer et Bonne-voulenté
    Et aussi Talent-de-bien-faire
    Qui regardoient mon affaire;
    Soing et Cure aussi y estoient
    Qui tout adès m’admonnestoient
    Que j’ouvrasse à col estendu
    Et que bien me seroit rendu,
    Car j’en auroie bon loier.
    Ainsi ouvray sans délayer
    Jusqu’à la nuit noire et obscure;
    Adonc alèrent Soing et Cure
    Tost la chandelle appareillier
    Pour jusqu’à cueuvre-feu veillier,
    Car d’iver estoit la saison
    Qu’on ne souppe pas, par raison,
    Jusqu’à tant qu’on l’oie sonner.
      Lors m’alay tost habandonner
    A l’euvre, de cul et de pointe,
    Je n’en fis oncques le mescointe,
    Et tant besoignay que j’oy
    Cueuvre-feu, si m’en esjoy,
    Car lassés et vaincus estoie
    De besongner, et si sentoie
    Un appétit qu’on clame fain.
    A ce point vint le chastellain
    Travail qui me dit: Doulx amis
    Bien doy amer qui cy t’a mis,
    Car bien y as fait ton devoir;
    Je m’en sçay bien apparcevoir.
    Bien voy que tu as sans faintise
    Huy en labour t’entente mise,
    Et pour ce te vueil pourvéoir
    Que tu puisses Repos véoir.
    C’est cil qui les gens de céans
    Qui en labour sont paciens
    Fait aaisier à leur plaisir,
    Boire, mengier, dormir, gésir
    Et prendre consolation
    Après la tribulation
    Que ma femme leur fait souffrir
    Quant à lui se veullent offrir.
    Et pour ce qu’à lui t’es offert
    Et grant ahan as huy souffert,
    Congié te doing, en guerredon,
    D’aler à Repos le preudon
    Qui te fera ton corps aisier,
    Ta char et ton sang appaisier
    Que tu as huy moult esméu
    Pour l’enhan que tu as éu.
    Sire, dis-je, je m’y accort
    Puisque ce vient de vostre accort:
    A Repos m’en vois orendroit.
    Lors me mis à voie tout droit
    Vers la porte, par un sentier:
    Là requis à Soing le portier
    Et à Cure que par amour
    Hors me méissent sans demour.
    Adonc respondi li portiers:
    Beaulx amis, dist-il, voulentiers,
    Car tu es vains et endormis.
    Lors m’ont Soing et Cure hors mis,
    Qui virent que temps en estoit,
    Mais trop forment m’admonnestoit
    Chascun d’eulx deux de moi lever
    Dès matines, pour achever
    L’euvre que commencié avoie
    Pour plus tost achever ma voie
    D’aler ou chastel de Richesse
    Où l’en ne va pas par paresse,
    Non fait-on pas par diligence
    Se il n’y a persévérance.
    Raison me dist, (bien m’en souvient)
    Que persévérance convient
    En bien faire, c’est ce qui fait
    L’ouvrier louer de son bienfait.
    Amis, dist Soing, à Repos vas:
    Plus décevable ne trouvas
    Puis que tu fus de mère nés;
    Repos a maintes gens menés
    Ou hideux chemin de Paresse
    Qui tourne le cul à Richesse:
    Repos a tous ceulx décéu
    Qui contre Raison l’ont créu,
    Et si est prest de décevoir
    Tous les jours ceulx qui recevoir
    Veulent ce qu’il leur veult donner;
    Tous ses biens veult habandonner
    A tous ceulx qui prendre les veulent,
    Mais vraiement tous ceulx se deulent,
    En la fin, qui contre raison
    Les prennent hors heure et saison
    Sans cogente nécessité.
    Bien est raison et vérité,
    Sans Repos ne puet vivre nuls,
    De quelque estat, gros ne menus,
    Mais ceulx qui Repos croient trop
    Povres en la fin sont com Job.
    Or ne le vueilles mie croire,
    Mais aies tousjours en mémoire
    Ce que je te dy et enseigne
    Et le retien en cest ensaingne.
    Adonc me tira Soing l’oreille;
    Cure, d’autre part, s’appareille
    A moi enseigner et aprendre
    Comme je doy par raison prendre
    Les biens que Repos scet donner
    Quant il se veult habandonner.
    Amis, dist Cure, ne crois pas
    Repos, se ce n’est un trespas[519]
    Quant en auras nécessité,
    Car, si comme Soing t’a dicté,
    Nuls ne pourroit sans Repos vivre[520]
    S’il n’est ou hors du sens ou yvre.
    Mais qui Repos croit à oultrage,
    Il pert du tout son bon courage
    Qu’il avoit, par devant, d’ouvrer
    Et ne le puet pas recouvrer
    Aucune fois à son vouloir,
    Dont en la fin le fait douloir.
    Garde donc bien qu’il ne te tiengne
    Que par raison, et te souviengne
    De moy à ces enseignes-cy.
    Lors me tira l’oreille aussi
    Comme Soing ot fait par devant
    En moy mon preu ramentevant.
    A tant du portier prins congié
    Et de sa femme, et eslongnié
    Le lieu au plus tost que je pos
    Et m’en alay droit à Repos
    Qui m’attendoit en ma maison,
    Car il en estoit bien saison.
    Ens entray, si trouvay ma femme
    Qui ne pensoit à nul diffame,
    Mais m’appareilloit à mengier
    A lie chière et sans dangier.
    Mes mains lavay et puis m’assis,
    Et souspasmes à sang rassis,
    Moy et ma femme, bec à bec,
    Du pain et du potage avec,
    Et de ce que Dieu mis y ot.
    Quant soupé eusmes sans riot
    Et la nappe si fu ostée,
    Près de moy se fu acostée
    Ma femme; lors luy comptay brief
    Mon affaire de chief en chief:
    Dame, dis-je, ne savez mie
    Comme j’ay eu forte nuitie
    Quant vous de lez moy dormiez
    Et vostre repos preniez.
    Vous n’avez pas véu à-nuit
    La male gent qui tant m’a nuit
    Et fait si grant adversité:
    Besoing avec Nécessité,
    Souffreté, Disette autressy,
    Pensée la vieille et Soussy,
    Desconfort et Désespérance.
    Et tant m’ont fait de meschéance,
    Sachié, bouté et tourmenté,
    Qu’à poi qu’ils ne m’ont craventé;
    Mais Raison la bonne et la sage
    M’a apris la voie et l’usage
    D’eschever toute adversité
    Et de vivre en prospérité.
    Entendement, com mes amis,
    En la voie aussi m’en a mis,
    Et m’ont fait de Barat retraire
    Qui se penoit de moy attraire
    Pour moy faire à mal habonder
    Et moy honnir et vergonder,
    Et aussi son clerc Tricherie
    Et son varlet Hoquelerie.
    Tant m’a donné Entendement
    Et Raison bon enseignement,
    Que je sui en foy et hommage
    De Raison la bonne et la sage,
    Et tousjours en moy demourra
    Ne jamais jour n’en partira,
    Ainsi comme elle m’a promis;
    A lui faire hommage ay trop mis.
    Si m’y ont moult bien aïdé
    Bon-cuer et Bonne-voulenté,
    Talent-de-bien-faire leur fils.
    Quant à moy vindrent, je leur fis
    Tout ce que il me commandèrent
    Et alay où ils me menèrent.
    Au chastel de Labour alasmes,
    Où nous Soing et Cure trouvasmes
    Qui sont de ce chastel portiers:
    Ceulx me reçurent moult volentiers
    Et me menèrent droit à Peine
    Qui de Labour est chastellaine;
    Peine me reçut sans séjour:
    O moy a esté toute jour;
    Travail ores, puis l’anuitier,
    Vint à moy non pas pour luitier,
    Mais pour dire et ramentevoir
    Qu’avoie bien fait mon devoir
    Et que temps estoit de venir
    Mon corps aisier et soustenir.
    Mais trop m’ont hasté Soing et Cure
    Qui de long aisement n’ont cure,
    De moy, dès matines, lever
    Pour tost ma besoigne achever.
    Or vous ay compté sans mençonge
    Ma vision qui n’est pas songe.
      Lors respondi ma femme ainsi:
    Qu’est-ce que vous me dictes cy?
    Vous estes, je croy, hors du sens,
    Car ne me congnois en nul sens
    En ce que vous m’alez disant
    Et toute nuit cy devisant,
    Car ce n’est tout que fantasie
    Que vous dictes par frenaisie.
      Quant ma femme ramposné m’ot,
    Je me teus et ne sonnay mot,
    Car s’à lui me feusse engaignié,
    Certes riens ne eusse gaignié
    Et j’ay pieça du sage apris
    Que nuls ne devroit prendre à pris
    Nulle chose que femme die.
    Soit bien, soit mal, tence ou mesdie,
    Tousjours veult femme estre loée,
    Et de ce que dit advoée:
    De riens ne veult estre reprise,
    Ains veult que l’en la loe et prise
    Aussi bien du mal com du bien:
    Ceste coustume say-je bien,
    Et pour ce que je bien le sçay,
    De la ramposne me passay,
    Car contre femme se fault taire
    Et toute leur voulenté faire:
    Ainsi le conseil à tous ceulx
    Qui ont femmes avecques eulx;
    Combien que ce soit folletés
    De leur faire leurs voulentés,
    Encore est-ce plus grant foleur,
    Selon raison, de faire leur
    Nulle chose qui leur desplaise,
    Car jà femme ne sera aise
    Se son mary lui fait despit,
    Jusqu’à tant, sans aucun respit,
    Que rendu lui ait doublement,
    Ou nature de femme ment.
    Dont doit-on, qui bien veult eslire,
    De deux maulx prendre le moins pire;
    Bon se fait près d’un péril traire
    Pour de greigneur péril retraire.
      Lors m’appareillay pour couchier
    Et mis en coste moy l’eschier[521],
    Pour tost alumer ma chandelle
    Sans moy bougier, dessus ma selle.
    De Soing me souvint et de Cure
    Qui de fétardie n’ont cure,
    Car moult estoie entalenté
    De bien faire leur voulenté,
    Et ferai d’ores-en-avant,
    Et Dieu, par sa grâce, m’amand
    De si bien vivre en Diligence
    Et en bonne Persévérance,
    Au gré de Travail et de Peine,
    Que véoir me puisse ou demaine
    De Richesse la haute Dame,
    Au sauvement de corps et d’âme.
    Et se je ne puis advenir
    A la grant Richesse, et venir,
    Qui est la mendre selon Dieu,
    Je pry la Vierge de cuer pieu,
    Qui le benoit fils Dieu porta,
    En quoy les pécheurs conforta,
    Qu’avenir puisse à Souffisance,
    Car j’ay en ce ferme créance
    Que qui à Souffisance adresse,
    En lui a parfaicte richesse,
    Ne jà ne croiray le contraire.
    Icy vueil mon livre à fin traire
    Appellé la _Voie et l’adresse
    De Povreté et de Richesse_.

Chière seur, par ce que dit est vous povez veoir qu’est diligence et
qu’est persévérance, et ainsi, chière seur, est le premier article
démonstré.



LE SECOND ARTICLE

DE LA SECONDE DISTINCTION,

LEQUEL ARTICLE DOIT PARLER DE COURTILLAGE.


_Primo_, est à noter que tout ce que l’on sème, plante ou ente, l’en
le doit semer, planter ou enter par temps moite et au soir ou au bien
matin, avant l’ardeur du soleil et en décours[522], et doit-l’en
arroser le pié et la terre et non la fueille.

_Item_, par l’ardeur du soleil l’en ne doit mie arroser, mais au soir
et au matin; ne coper choux, percil[523], ne autres telles verdures qui
regettent, car la chaleur du soleil cuiroit la coupeure et l’ardroit,
et ainsi ne regetteroit jamais par iceluy endroit de la coupeure.

_Nota_ que en temps pluieux fait bon planter, mais non mie semer, car
la graine se retient au ratel.

Dès la Toussains sont fèves des marais, mais afin que icelles ne
gellent, on en plante vers Noël et en Janvier et Février et au
commencement de Mars; et les plante-l’en ainsi à diverses fois afin que
se les unes sont gelées, les autres ne le soient pas. Et quant elles se
lièvent hors de terre, si tost qu’elles poignent l’en les doit harser
et rompre le premier germe: et si tost qu’elles ont six fueilles l’en
les doit seurfouir[524]. Et de toutes icelles, les premières venues
sont les plus chières et doivent estre mengées le jour qu’elles sont
escossées, ou autrement elles deviennent noires et aigres.

_Nota_ que marjolaine et violettes que l’en veult garder en yver contre
la froidure, l’en ne les doit mie mettre soudainement de froit à
chault, ne de moite à froit, car qui longuement les garde l’iver en un
célier moite et soudainement les met au sec, il les pert; _et sic de
contrariis similibus_.

En yver l’en doit oster les branches du sauger qui sont mortes. Encores
en Janvier et Février, sauge, lavende, coq[525], mente, toutebonne[526]
soient plantés jusques à Juing.--Panoit[527] soit semé large à
large.--Oseille soit semée ou décours et jusques à Mars et plus.

_Nota_ que l’iver de Décembre et de Janvier fait mourir les porées,
c’est assavoir ce qui est hors terre, mais en Février les racines
regettent nouvelle et tendre porée, c’est assavoir si tost comme la
gelée cesse, et quinze jours après viennent les espinars.

Février.--Sarriette et marjolaine sont comme d’une saveur à mengier,
et sont semés ou décours et ne sont que huit jours en terre.--_Item_,
sarriette ne dure fors jusques à la Saint-Jehan.--_Item_, en
décours doit-l’en planter arbres ou vignes et semer choux blans et
pommés.--_Nota_ que les marquets chevelus portent dès l’année qu’ils
sont plantés chevelus.

Espinars sont en Février et ont longue fueille et crenelée comme
fueille de chesne, et croissent par touffes comme porées, et les
convient esverder[528] et bien cuire après.--Bettes viennent après.

_Nota_ que framboisiers et aussi framboises sont bonnes à planter.

Mars.--Ou décours doit l’en enter: jombarde[529] planter de Mars
jusques à la Saint-Jehan.--Violettes, giroflée semée en Mars ou plantée
à la Saint-Remy.--_Item_, soit l’une, soit l’autre, quant les gelées
approuchent, l’en la doit en aucun décours replanter en pos pour mettre
à couvert et garder en cave ou en célier pour le froit, et de jour
mettre à l’air ou au soleil et arroser de telle heure que l’eau soit
beue et la terre sèche avant que l’en la mette à couvert, car nullement
l’en ne la doit au vespre estuier[530] mouillée.--Fèves planter et
rompre le premier tuiau au herser comme dit est dessus.--_Nota_ que le
percil qui est semé la veille de la Nostre-Dame en Mars, yst hors de
terre à neuf jours.

Fenoul et marjolaine plantez ou décours de Mars ou en Avril; et
_nota_ que marjolaine veult plus grasse terre que violettes[531], et
s’elle a trop ombre elle devient jaune.--_Item_, quant elle est bien
reprise, adonc la dois arrachier par touffes et replanter à large en
pots.--_Item_, les branches couppées, fichées en terré et arrousées
prennent racines et croissent.--_Item_, terre engressée par fiens de
vaches et brebis est meilleur que de fiens de cheval.

Violette de karesme et violette d’Arménie[532] ne veullent ne couver
ne mucier; et _nota_ que violette d’Arménie ne porte fleur jusques
au deuxième an, mais les jardiniers qui l’ont eue un an en terre, la
vendent et replantent ailleurs, et lors elle porte.

Ozeille, bazeillecoq[533] soient semées en Janvier et Février
ou décours et jusques à Mars, et se tu veulx replanter ozeille
surannée[534], il te la convient replanter à toute sa terre qui est
entour la racine. _Item_, à la queillir a maistrise[535], car l’en
doit tousjours queillir les grans fueilles et laissier croistre les
petites fueilles qui sont dessus icelles grans; et se tout estoit par
aventure cueilli, il convient coupper le tuyau rez à rez de terre, et
il regettera nouvelle ozeille.

Percil sème, sarcle, oste les pierrettes; et celuy qui est semé en
Aoust est le meilleur, car il n’espie[536] point et se tient en vertu
toute l’année.

Laictues doivent estre semées, et _nota_ qu’elles n’arrestent point en
terre et reviennent bien drues: et pour ce les arrache-l’en çà et là à
toute la racine pour donner espace aux autres et oster espoisseur. Et
_nota_ que la semence des laictues de France est noire, et la semence
des laictues d’Avignon est plus blanche, et en fit apporter Monseigneur
de La Rivière[537], et sont les laictues trop meilleurs et plus
tendres assez que celles de France; et ne se queult la semence fors
bouton après autre, ainsi comme chascun bouton s’avance de getter sa
bourre.--_Nota_ que laictues ne se plantent point, et mesmement quant
l’en les veult mengier, si arrache-l’en racine et tout.

Courges. Les pepins sont la semence et les convient tremper deux jours,
puis semer, et sans les moullier laisser croistre jusques à ce qu’elles
appairent dehors, et lors mouillier le pié seulement et la terre sans
moullier les feuilles, et en Avril les arrouser courtoisement et les
planter d’un lieu en autre un dour[538] ou demy pié en terre, et à
demy-pié l’une courge de l’autre, et moullier le pié continuelment et
pendre à un eschalat un pot percié, un festu et de l’eaue etc., ou une
lesche de drap neuf ou pot[539].

Bettes semez en Mars, et quant elles sont bonnes à mengier, soient
coupées près de la racine, car tousjours rejettent et recroissent et
deviennent porées.

Bourraches, arraches[540] comme dessus.

Choulx blans et choulx cabus est tout un; et sont semés ou décours
de Mars, et quant ils ont cinq fueilles, adonc l’en les arrache
courtoisement et les plante-l’en à demy-pié loing l’un de l’autre, et
les convient mettre en terre jusques à l’œil et arrouser le pié; et les
mengue-l’en en Juing et en Juillet.--Pommes de chou sont semées en Mars
et replantées en May.--Choulx Romains sont de la nature de pommés et
de auques[541] pareille semence, car l’une et l’autre semence croist
sur un tronc, et de la semence qui vient par le tuyau du milieu et qui
est au bout d’en haut croist la pomme, et de la semence qui vient d’en
bas viennent les choulx Romains.--Minces en karesme est le regaing du
chou, et durent jusques en Mars, et lors sont icelles minces en Mars de
plus fort saveur à mengier, et pour ce les convient plus parboulir, et
en iceluy temps l’en arrache les troncs hors de terre.--_Nota_ que en
Juillet, quant il pleut, l’en doit planter des choulx.

_Nota_ que se fromis habondent en un jardin, et l’en gette en leur
repaire de la scieure d’ais de chesne, ils mourront ou vuideront à la
première pluie qui cherra, car les scieures retiennent la moiteur.

_Nota_ que en Avril et Mai, tout le mois, sème-l’en les porées qui
sont mangées en Juing et en Juillet.--Les porées d’esté doivent estre
soyées, et laissées les racines en terre, et après yver les racines
gettent, et les convient surfouir et lever la terre à l’environ et
illecques semer les nouvelles qui venront et cueillir le gecton
des vieilles.--_Nota_ que depuis Avril jusques à la Magdelaine
fait bon semer porées, et les porées de karesme sont semées en
Juillet et jusques à la Magdelaine et non plus, elles appelle-l’en
bettes.--_Item_, espinars.--_Item_ icelles bettes, quant elles sont
levées de terre, sont replantées par ordre.--_Item_, en Avril et May
convient planter choulx blans et pommes de chou qui furent semés en
Février et Mars.--En May treuve-l’en fèves nouvelles, navez, raves.

_Nota_ que en Juing, la végille St.-Jehan, doit-l’en semer percil, et
aussi la veille de la mi-Aoust.

Aoust et my-Aoust.--Ysope semez. Choulx pasquerés[542] soient semés ou
décours; percil aussy, car celui n’espie point.

_Nota_ que la porée qui est en terre regette nouvelle porée cinq ou six
fois comme percil, et la peut-l’en coupper audessus du troignon jusques
la my-septembre, et d’illec en avant non mie coupper, car le troignon
pourriroit, mais esbranchier à la main les fueilles d’entour, et non le
milieu.

En icelluy temps convient esbranchier[543] toutes semences de
porées, car les semences ne pevent meurir pour la froidure du temps,
mais la semence esbranchée et gettée, le troignon regette nouvelle
porée.--_Item_, en ce temps ne convient point couper le percil, mais
effueiller.

Après la septembresse[544], pivoine, serpentine, oignons de lis,
rosiers, groselliers soient plantés.

Octobre.--Pois, fèves, un doit[545] parfont en terre, et loing l’un de
l’autre un dour, et que ce soient grosses fèves des plus grosses, car
quant elles sont nouvelles, elles se démonstrent plus grosses que les
petites ne font, et n’en doit-l’en planter que un petit, et à chascun
décours après, un petit, afin se l’une partie gelle que l’autre non.

Se tu veulx semer ou planter poix perciés, sème les par temps sec
et bel et non pluyeux, car se l’eaue de la pluie entroit dedens les
pertuis du pois, il se fendroit et partiroit en deux et ne germeroit
point.

Jusques à la Toussains peut-l’en tousjours replanter choulx: et quant
ils sont trop mengiés de chenilles, qu’il n’y a point de fueille
fors les arrestes, s’ils sont replantés, tout revient minces: et
convient oster les feuilles d’en bas et les replanter jusques à l’euil
d’en hault. Les troncs qui sont tous défueillés ne convient-il plus
replanter, mais laissier en terre, car ils getteront minces.

_Nota_ que se tu replantes en esté en temps sec, tu dois getter de
l’eaue en la fosse; en temps moiste, non.

_Nota_ que se les chenilles menguent tes choulx, quant il plouvera sème
de la cendre par dessus les choulx et les chenilles mourront.--_Item_,
tu peus regarder par dessoubs les fueilles des choulx et là trouveras
grant assemblée de mittes blanches en un tas, et saches que c’est dont
les chenilles naissent, et pour ce l’en doit coupper la place où est
celle graine et getter loing.

Poreaux soient semés en la saison, puis replantés en Octobre et
Novembre.

Se vous voulez avoir roisins sans pépins, prenez en croissant[546] ou
temps que l’en plante la vigne, c’est assavoir en Février, une plante
de vigne avecques la racine et fendez le cep moitié par moitié tout au
long jusques à la racine, et ostez la mouelle d’une part et d’autre.
Puis rongnez le cep et liez tout au long de fil noir, puis plantez le
cep et fumez de bonne fumeure et estoupez de terre le trou d’en hault
de la jointure du cep.

Se vous voulez enter un cerisier ou un prunier sur et dedans un cep de
vigne, tailliez la vigne, puis en Mars la fendez à quatre dois près du
bout et ostez la mouelle d’une part et d’autre, et là faictes la place
de l’amande d’un noyau de cerise, et la mettez et encloez dedens celle
fente et liez de fil le cep joinct comme devant.

Se vous voulez enter un cep de vigne dedans un cerisier, faictes
tailler le cep de vigne qui sera planté et de long temps enraciné
emprès le cerisier, et en Mars, environ Nostre-Dame[547], perciez
icelluy cerisier d’une tarière du gros[548] d’icelluy cep, et parmy
le trou dudit cerisier boutez icelluy cep, qu’il passe tout oultre
un pié de long, puis estoupez le tout aux deux costés du cerisier,
c’est assavoir de terre glaze, de mousse, et entortillez de drappeaulx
tellement que aucune pluie ne puisse atouchier au pertuis. _Item_, le
cep de vigne doit estre escorchié et l’escorce d’icelluy cep pelée et
ostée jusques au vert, en tant seulement comme touche ce qui est dedans
le corps du cerisier, car s’ainsi est fait et que l’escorce soit pelée
et ostée, le vif du cep qui joindra au vif du cerisier se consolidera
l’un à l’autre, ce qui seroit empeschié par l’escorce du cep se elle y
demouroit. Ce fait laissiez les ensemble deux ans, et après coupperez
le cep par derrière, et audessoubs de la jointure du cerisier.

_Item_, sur un tronc ou souche de chesne, povez enter dix ou douze
arbres, c’est assavoir que ou mois de Mars, environ la Nostre-Dame,
vous soiez garnis de tant de greffes et de divers fruis que vous
vouldrez avoir pour enter, et ferez scier au travers le chesne ou
arbre sur lequel vous vouldrez enter; et aiez aguisés vos greffes
d’un costé tant seulement à manière d’un coin borgne si comme il est
cy: [Illustration: un picot] et tellement que l’escorce d’icelluy
greffe soit toute entière de l’un des costés et sans estre escorchée
ou entamée, puis fichiez vos greffes entre l’escorce du chesne et la
char, ou[549] le vif du greffe devers le bois ou le vif du chesne.
Puis estoupez et couvrez de terre glase, de mousse et de drappeaulx
tellement[550] que pluie, neige ou gelée ne y puisse férir.

Se vous voulez garder roses en yver[551], prenez sur le rosier petis
boutons qui ne soient point espanis et les laissiez les queues longues,
et entassez en un petit tonnelet de bois comme un tonnellet à composte
et sans eaue. Faictes bien enfoncer le tonnellet et qu’il soit
serréement relié qu’il n’y puisse riens entrer ne yssir, et aux deux
bouts d’icelluy tonnellet liez deux grosses pierres pesans et mettez
icelluy tonnellet en une rivière courant.

Romarin. Les jardiniers dient que la semence de romarin ne vient
point en la terre de France, mais qui d’un romarin arracheroit et
desmembreroit, en dévalant, aucunes petites branchettes et les tendroit
par le bout et les plantast, ils revendroient; et qui les vouldroit
envoïer loing, il convendroit icelles branches envelopper en toile
cirée et coudre, et puis oindre par dehors de miel, et puis poudrez de
fleur de fourment et l’envoïez où vous vouldrez.

J’ay oy dire à Monseigneur de Berry que en Auvergne a trop plus grosses
cerises que en France pour ce qu’ils provignent leurs cerisiers.



DE LA SECONDE DISTINCTION

LE TROISIÈME ARTICLE

QUI DOIT PARLER DE CHOISIR VARLETS, AIDES ET CHAMBERIÈRES, ETC.


Sur quoy, chière seur, ou cas que vous vouldriez entreprendre à
estre mesnagière, ou introduire une autre vostre amie, sachiez que
serviteurs sont de trois manières. Les uns qui sont prins comme
aides pour certaine heure, à un besoing hastif, comme porteurs à
l’enfeutreure[552], brouetiers, lieurs de fardeaulx et les semblables;
ou pour un jour ou deux, une sepmaine ou une saison, en un cas
nécessaire ou pénible ou de fort labour, comme soieurs, faucheurs,
bateurs en granche ou vendangeurs, hottiers, fouleurs, tonneliers et
les semblables. Les autres à temps et pour certain mistère, comme
cousturiers, fourreurs, boulengiers, bouchiers, cordoenniers et les
semblables qui euvrent à la pièce ou en tâche pour certain euvre. Et
les autres sont pris pour estre serviteurs domestiques pour servir à
l’année et demourer à l’ostel. Et de tous les dessusdis aucun n’est qui
voulentiers ne quière besongne et maistre.

Quant est des premiers, ils sont neccessaires pour descharger et
porter fardeaulx et faire grosses et pesans besongnes; et ceulx sont
communément ennuyeux, rudes et de diverses responses: arrogans,
haultains, fors à paier, près de dire injures et reprouches se l’en
ne les paie à leur gré quant la besongne est faicte. Si vous pry,
chière seur, que quant vous en aurez à faire, dictes à maistre Jehan le
despensier[553] ou autres de vos gens qu’ils quièrent et choisissent
et prennent ou facent choisir et prendre les paisibles; et tousjours
faictes marchander à eulx avant ce qu’ils mettent la main à la besoigne
afin qu’il n’y ait débat après, jasoit-ce que le plus souvent il ne
veulent marchander, mais se veulent bouter en la besoigne sans marchié
faire, et si doulcement dient: «_Monseigneur, ce n’est riens, il n’y
a que faire: vous me paierez bien, et de ce que vous vouldrez je
seray content._»--Et se ainsi maistre Jehan les prent, quant ce sera
fait ils diront: _Sire, il y avoit plus à faire que je ne cuidoie;
il y avait à faire et cecy et cela, et d’amont et d’aval_; et ne se
vouldront païer et crieront laides parolles et villaines. Si dictes à
maistre Jehan qu’il ne les embesoigne point, ne seuffre embesoigner,
sans marchander avant, car ceulx qui ont voulenté de gaigner sont vos
subjects avant que la besoigne soit commencée, et pour le besoing
qu’ils ont de gaigner, craignent que un autre ne l’entrepreigne par
devant eulx pour doubte de perdre le marchié et que autre n’ait ce
gaing: et pour ce ils se mettent à plus grant raison. Et se maistre
Jehan estoit si crédule à eulx et à leurs douces paroles ès quelles
il se fiast trop, et il advenoit que il souffrist que sans marchander
ils entrassent en la besoigne, ils scevent bien que après la besoigne
par eulx commencée, nul autre, pour honte, n’y mettra pardessus eulx
la main, et ainsi seriez en leur subjection après et en demanderoient
plus; et se lors ils ne sont païés à leur voulenté, ils crieront et
brairont vilain blasme et oultrageux, et ne sont honteux de rien et
publient male renommée, qui est le pis. Et pour ce est-il meilleur de
faire marchander à eulx plainement et entendiblement avant le coup
pour oster toutes paroles de débat. Et très à certes vous prie que
se le cas ou la besoinge le désire, vous faictes enquerre de quelle
condition sont et ont esté vers autres, ceulx que vous vouldrez faire
embesongner, et aussi que à gens repliquans, arrogans, haultains,
raffardeurs[554] ou de laides responses ne aiez riens à faire, quelque
prouffit que vous y véez ou quelque advantage, ne quelque bon marchié
qu’ils vous facent, mais gracieusement et paisiblement les esloingnez
de vous et de vos besongnes, car se ils s’y boutent, vous n’en
eschapperez jà sans esclandre ou débat. Et pour ce faictes par vos gens
prendre des serviteurs et aides paisibles et debonnaires et leur donnez
plus, car c’est tout repos et paix que d’avoir à faire à bonnes gens;
pour ce est-il dit que _qui a à faire à bonnes gens, il se repose_: et
par semblable peut-l’en dire que qui a à faire à hargneux, douleur luy
croist.

_Item_, des autres comme vignerons, bateurs en granche, laboureurs et
les semblables, ou autres comme cousturiers, drapiers, cordoenniers,
boulengiers, mareschaulx, chandeliers de suif[555], espiciers, fèvres,
charrons, vignerons et les semblables autres, chière seur, je vous
conseille et pry que vous aiez tousjours en mémoire de dire à vos gens
qu’ils aient à besongner à gens paisibles, et marchandent tousjours
avant le fait, et comptent et paient souvent sans attendre longue
créance sur taille ne sur papier, jasoit-ce que encores vault-il
mieulx taille ou escripture que soy attendre du tout à sa mémoire, car
les créditeurs cuident tousjours plus et les debteurs moins, et de
ce naissent débas, haines et lais reprouches; et vos bons créanciers
faictes païer voulentiers et souvent de ce que vous leur devrez et les
tenez en amour afin qu’ils ne vous changent, car l’en n’en recueuvre
mie bien tousjours de bien paisibles.

_Item_, quant aux chamberières et varlets d’ostel que l’en dit
domestiques[556], chière seur, sachiez que afin qu’elles vous
obéissent mieulx et qu’elles vous doubtent et craignent plus à
courroucier, je vous laisse la seignorie et auctorité de les faire
choisir par dame Agnès la béguine[557] ou autre de vos filles qui vous
plaira, à recevoir en nostre service, de les louer à vostre gré et de
les païer et tenir en nostre service tant comme il vous plaira et leur
donner congié quant vous vouldrez. Toutesvoies de ce devez-vous à part
secrètement parler à moy et faire par mon conseil pour ce que vous
estes trop jeune et y pourriez bien estre déceue par vos gens mesmes.
Et sachiez que d’icelles chamberières qui n’ont service, pluseurs sont
qui se offrent et ramentoivent et quierent à grant besoing maistres et
maistresses, et de celles ne prenez aucunes que vous ne sachiez avant
où elles ont demouré, et y envoiez de vos gens pour enquérir de leurs
conditions sur le trop parler, sur le trop boire: combien de temps
elles ont demouré: quel service elles faisoient et scevent faire: se
elles ont chambres ou acointances en ville: de quel païs et gens elles
sont: combien elles y demourèrent et pourquoy elles s’en partirent;
et par le service du temps passé, enquérez quelle créance ou espérance
l’en peut avoir de leur service pour le temps à venir. Et sachiez que
communément telles femmes d’estrange pays ont esté blasmées d’aucun
vice en leur pays, car c’est la cause qui les amaine à servir hors de
leur lieu. Car s’elles fussent sans tache, elles fussent maistresses
et non serviteresses; et di des hommes autel. Et se vous trouvez par
le rapport de leurs maistres ou maistresses, voisins ou autres, que
ce soit vostre besoigne, sachiez par elles, et devant elles faictes
par maistre Jehan le despensier enregistrer en son papier de la
despense[558] le jour que vous la retendrez, son nom et de son père et
de sa mère et d’aucuns de ses parens: le lieu de leur demourance et le
lieu de sa nativité et ses pleiges[559]; car elles en craindront plus
à faillir pour ce qu’elles considéreront bien que vous enregistrez
ces choses pour ce que s’elles se deffuioient de vous sans congié, ou
qu’elles feissent aucune offense, que vous en plaindriez ou rescririez
à la justice de leur pays ou à iceulx leurs amis. Et nonobstant tout,
aiez en mémoire le dit du philosophe lequel s’appelle Bertran le vieil,
qui dit que se vous prenez chamberière ou varlet de haultes responses
et fières, sachiez que au départir, s’elle peut, elle vous fera injure;
et se elle n’est mie telle, mais flateresse et use de blandices, ne
vous y fiez point, car elle bée en aucune autre partie à vous trichier;
mais se elle rougist et est taisant et vergongneuse quant vous la
corrigerez, amez la comme vostre fille.

Après, chière seur, sachiez que sur elles, après vostre mary, vous
devez estre maistresse de l’ostel, commandeur, visiteur, gouverneur et
souverain administrateur, et à vous appartient de les tenir en vostre
subjection et obéissance, les endoctriner, corrigier et chastier; et
pour ce, deffendez leur à faire excès ne gloutonnie de vie tellement
qu’elles en vaillent pis. Aussi deffendez les de rioter[560] l’une
à l’autre ne à vos voisins; deffendez leur de mesdire d’autruy,
fors seulement à vous et en secret, et en tant comme le meffait
toucheroit vostre prouffit seulement, et pour eschever vostre dommaige
et non plus; deffendez leur le mentir: le jouer à jeux illicites:
de laidement jurer et de dire parolles qui sentent villenies ne
parolles déshonnestes ne gouliardeuses, comme aucunes mescheans ou
mal endoctrinées qui maudient _de males sanglantes fièvres, de male
sanglante sepmaine, de male sanglante journée_. Il semble qu’elles
sachent bien qu’est sanglante journée, sanglante sepmaine etc., et
non font-elles, ne doivent point savoir qu’est sanglante chose, car
preudefemmes ne le scevent point, car elles sont toutes abhominables
de veoir seulement le sang d’un aignel ou d’un pigon quant on le tue
devant elles. Et certes, femmes ne doivent parler de nulle laidure, non
mie seulement... des secrès membres de nature, car c’est déshonneste
chose à femme d’en parler.

J’oy une fois raconter d’une jeune preudefemme qui estoit assise
en une presse de ses autres amis et amies, et par adventure, elle
dist par esbatement aux autres: Vous me pressez si fort que....[561]
Et jasoit-ce qu’elle l’eust dit par jeu et entre ses amis, cuidant
faire la galoise[562], toutesvoies les autres saiges preudefemmes ses
parentes l’en blasmèrent à part. _Item_, telles femmes gouliardoises
dient aucunes fois de femme qu’elle est p..... ou qu’elle est ribaude,
et par ce disant il semble qu’elles sachent qu’est p..... ou ribaude,
et preudefemmes ne scevent que ce est de ce; et pour ce deffendez leur
tel langaige, car elles ne scevent que c’est. Deffendez leur vengence,
et endoctrinez en toute patience à l’exemple de Melibée dont il est
cy-dessus parlé, et vous mesmes, belle seur, soiez telle en toutes
choses que par vos fais elles puissent en vous prendre exemple de tout
bien.

Or nous convient parler d’embesongner vos gens et serviteurs aux heures
propres à besongner, et aux heures convenables leur donner repos.--Sur
quoy, chière seur, sachiez que selon les besongnes que vous avez à
faire et que vos gens sont propres plus à une besongne que à l’autre,
vous et dame Agnès la béguine qui avec vous est pour vous aprendre
contenance sage et meure et vous servir et endoctriner, et à laquelle
principalment je donne la charge de ceste besongne, la devez diviser
et crier, et commander l’une besongne à l’un, et l’autre besongne à
l’autre. Et se vous leur commandez maintenant à faire aucune chose,
et iceulx vos serviteurs respondent: _il est assez à temps, il sera
jà bien fait_, ou _il sera fait demain bien matin_, tenez le pour
oublié: c’est à recommencier, c’est tout néant. Et aussi de ce que vous
commanderez généralment à tous, sachiez que l’un s’atend à l’autre:
c’est comme devant.

Si soiez advertie, et dictes à dame Agnès la béguine qu’elle voie
commencier devant elle ce que vous aurez à cuer estre tost fait; et
premièrement qu’elle commande aux chamberières que bien matin les
entrées de vostre hostel, c’est assavoir la salle et les autres lieux
par où les gens entrent et s’arrestent en l’ostel pour parler, soient
au bien matin balléyés et tenus nettement, et les marchepiés[563],
banquiers et fourmiers qui illecques sont sur les fourmes, despoudrés
et escoués; et subséquemment les autres chambres pareillement nettoiées
et ordonnées pour ce jour, et de jour en jour, ainsi comme il
appartient à nostre estat.

_Item_, que par la dicte dame Agnès vous faciez principalment et
songneusement et diligemment penser de vos bestes de chambre comme
petis chiennés, oiselets de chambre[564]: et aussi la béguine et vous
pensez des autres oiseaulx domeschés, car ils ne pevent parler, et pour
ce vous devez parler et penser pour eulx, se vous en avez.

Et aussi dy-je à dame Agnès la béguine que des autres bestes, quant
vous serez au village, elle commande à ceulx à qui il appartient à en
penser: comme à Robin le bergier, qu’il pense de ses moutons, brebis et
aigneaulx; à Josson le bouvier, des beufs et des toreaulx; à Arnoul le
vachier et Jehanneton la laictière, qu’ils pensent des vaches, genices
et veaulx, truies, cochons et pourceaulx; à Eudeline femme du mettoier
qu’elle pense des oés, oisons, coqs, gelines, poucins, coulons, pigons;
au charretier ou mettoier, qu’il pense de nos chevaulx, jumens et les
semblables. Et doit la dicte béguine et aussi vous devez faire semblant
devant vos gens qu’il vous en souviengne, que vous y congnoissiez et
que vous l’avez à cuer, car par ce en seront-ils plus diligens. Et
faictes faire, s’il vous en souvient, par vos gens penser du vivre
d’icelles bestes et oiseaulx, et y doit la dite dame Agnès embesongner
ceulx et celles qui y sont propres. Et sur ce est à noter que à vous
appartient bien à faire savoir par la dicte dame Agnès la béguine le
conte de vos moutons, brebis et aigneaulx, et les faire reviseter, et
enquérir de leur accroissement et descroissement, ne comment ne par qui
elles sont gouvernées, et elle le doit rapporter à vous, et entre vous
deux le devez faire enregistrer.

Et se vous este en païs ou il y ait repaire de loups, je vous
enseigneray maistre Jehan vostre maistre d’ostel ou vos bergiers et
gens de les tuer sans cop férir par la recepte qui s’ensuit.--_Recepte
de pouldre pour tuer loups et renars._--R.[565] la racine de l’ectoire
de canarade (c’est l’ectoire qui fait fleur de couleur blanche[566]),
et faictes séchier icelle racine meurement et sans soleil, et gectez
hors la terre: et adonc face-en pouldre en un mortier, et avec celle
poudre mettez la quinte partie de voirre bien moulu et la quarte partie
de la feuille de lis, et tout soit meslé et pilé ensemble, et tellement
qu’il se puisse passer ou cribler. _Item_, ait miel et sain[567] frès
autant de l’un comme de l’autre et mesle parmy de la poudre dessusdite,
et face paste qui soit dure et fort, et gros morceaulx rons du gros
d’un œuf de poule, et cuevre iceulx morceaulx de sain frès et les mette
sur les pierres ou tuillettes ès lieux qu’il saura que loups et renars
repaireront. Et se il veult faire amorse[568] de une vielle beste
morte, faire le peut deux ou trois jours devant. _Item_, sans faire
morceaulx, peut-il la poudre jetter sur la charongne.

Ainsi vous et la béguine embesongnez les unes de vos gens aux choses
et besongnes qui leur sont propres, et aussi dictes à maistre Jehan
le despensier qu’il envoie ou face envoier les autres reviseter vos
greniers, remuer et essorer[569] vos grains et autres garnisons[570];
et se vos mesgnies vous rapportent que les ras dommagent vos blés,
lars, fromages et autres garnisons, dictes à maistre Jehan qu’il les
puet destruire en six manières: 1º Par avoir garnison de bons chats.
2º Par ratières et soricières. 3º Par engins d’aiselles[571] appuiées
sur buchettes que les bons serviteurs font. 4º Par faire tourtellés de
paste et fromage frit ensemble et poudre de riagal[572], et mettre en
leur repaire où ils n’aient que boire. 5º Se vous ne les povez garder
qu’ils ne treuvent à boire, il convient faire de l’espurge[573] par
morcellés, et lors s’ils les avallent, plus tost buveront et plus tost
enfleront et mourront. 6º Prenez une once de riagal: deux onces fin
arcenic: un quarteron gresse de porc: une livre fleur de farine de
fourment et quatre œufs, et de ce faites pain et cuisiez au four et
tailliez par lesches et les clouez à un clou.

Or revien encores à ma matière de faire embesongner vos gens, vous et
la béguine, en temps convenable, par vos femmes essorer, esventer
et reviseter vos draps, couvertures, robes et fourreures, pennes et
autres telles choses.--Sur quoy sachiez et dictes à vos femmes que
pour conserver et garder vos pennes et draps, il les convient essorer
souvent pour eschever les dommages que les vers y pevent faire; et
pour ce que telle vermine se congrée par le ramolissement du temps
d’automne et de yver et naissent sur l’esté, en iceulx temps convient
les pennes et les draps mettre à bon soleil et beau temps et sec; et se
il survient une nuée noire et moicte qui s’assiée sur vos robes et en
tel estat vous les ploiez, cest air envelopé et ployé dedans vos robes
couvera et engendrera pire vermine que devant. Et pour ce, choisissiez
bel air qui soit continué et bien sec, et tantost que vous verrez autre
gros air survenir, avant qu’il soit venu vers vous, faictes mettre vos
robes à couvert et escourre pour oster la grosse pouldre[574], puis
nettoier à unes verges sèches[575]. Et la béguine scet bien et le vous
le dira que s’il y a aucune tache d’uille ou autre gresse, le remède
est tel: Ayez pis..t et le chauffez comme tiède, et mettez la tache
tremper dedans par deux jours, et puis espraignez le drap où est la
tache sans le tordre, et se la tache ne s’en est alée, si le face dame
Agnès la béguine, mettre en un autre pis..t et battre un fiel de beuf
avec, et face-l’en comme devant. Ou vous faictes ainsi: faites prendre
de la terre de robes[576] et tremper en lessive, puis mettre sur la
tache et laissiez sécher, et puis frotez; et se la terre ne s’en va
légièrement, si faictes mouillier en lessive, et laissiez encores
séchier et frotez tant qu’elle s’en soit alée; ou se vous n’avez
terre de robes, faictes mettre cendres tremper en lessive, et icelles
cendres bien trempées mettez sur la tache; ou vous faictes prendre de
bien nettes plumes de poucins et moulliez en eaue bien chaude pour là
laissier la gresse qu’elles auront prise, et remoulliez en eaue necte
bien chaude: bien refrottez aussi et tout s’en yra.

S’il y a sur robe de pers[577] aucune tache ou destaincture de couleur,
faictes prendre une espurge et la moulliez en necte et clère lessive,
puis espraigniez et traynnez sur la robe en frotant la tache, et la
couleur y revendra. Et se sur quelsconques autres couleurs de drap y
a tache de destainture de couleur, faictes prendre de la lessive bien
nette et qui point n’ait coullé sur drappeaulx, et mettre avec la
cendre sur la tache, et laissiez sécher, puis faictes frotter, et la
première couleur revendra.

Pour oster tache de robe de soie, satin, camelot, drap de Damas ou
autre, trempez et lavez la tache en vertjus et la tache s’en yra, et
mesmes se la robe est destainte, si revendra-elle en sa couleur (_ce
que je ne croy pas_)[578].

VERTJUS. Nota que ou temps que le vertjus nouvel se fait, l’en
en doit prendre, sans sel, une fiole et la garder, car ce vault pour
oster tache de robe et la remettre en sa couleur, et est tousjours bon,
et nouvel et vieil.

_Item_, et se aucunes de vos pennes ou fourreures ont esté moulliées
et se soient endurcies, faictes deffourrer le garnement[579], et
arrouser de vin la penne qui est dure, et soit arrousée à la bouche
ainsi comme un cousturier arrouse d’eaue le pan d’une robe qui veult
retraire, et sur icelluy arrousement faictes gecter de la fleur[580] et
laissiez sécher un jour; puis frottez très bien icelle penne[581]... en
son premier estat.

Or revien au propos que devant, et dy que vostre maistre d’ostel
doit savoir qu’il doit chascune sepmaine faire reviseter et boire
de vos vins, vertjus et vinaigres; veoir les grains, huilles, noix,
pois, fèves et autres garnisons. Et quant aux vins, sachiez que s’ils
deviennent malades, il les convient garir de maladies par la manière
qui s’ensuit:

Premièrement se le vin est pourri, il doit mettre la queue[582], en
yver, emmi une court sur deux tréteaulx afin que la gelée y frappe, et
il garira.

_Item_, se le vin est trop vert, il doit prendre plain pennier de
morillons[583] bien meurs, et gecte dedens la queue, par le bondonnail,
tous entiers, et il amendra.

_Item_, se le vin sent l’esventé[584], il doit prendre une once de
seurmontain[585] en pouldre et autant en graine de paradis[586] en
pouldre et mettre chascune desdictes pouldres en un sachet et le
pertuisier d’une greffe[587], et puis pendez tous les deux sachets
dedens la queue à cordelettes et estoupez bien le bondonnail.

_Item_, se le vin est gras, preigne douze œufs et mette boullir en eaue
tant qu’ils soient durs, et puis gecte hors le jaune et laisse le blanc
et les coquilles ensemble, et puis frire en paelle de fer et mettre
tout chault dedens un sachet et pertuisé d’une greffe comme dessus,
et pendre dedans la queue à une cordelette. _Item_, preigne un grant
pot neuf et le mette dessus un trepié vuit[588], et quant il sera bien
cuit, despièce le par pièces et le gecte dedans la queue, et il garira
de la gresse.

_Item_, pour desroussir le vin blanc, preigne plain pennier de feuilles
de houx et gecte dedens la queue par le bondonnail.

_Item_, se le vin est aigri, preigne une cruche d’eaue et gecte dedans
pour départir le vin de devers la lie, et puis preigne plain plat de
fourment et mettez tremper en eaue, et puis gectez l’eaue, et mettez
boullir en autre eaue, et faciez bien boullir en autre eaue tant qu’il
se vueille crever, et puis l’ostez; et s’il en y a des grains tous
crevés, si les gecte, et après gecte le froment tout chault dedens la
queue. Et se pour ce le vin ne veult esclarcir, preigne plain pennier
de sablon bien lavé en Saine et puis gecte dedens la queue par le
bondonnail et il esclarcira.

_Item_, pour faire ès vendenges un vin fort, n’emple pas la queue que
il s’en faille deux sextiers[589] de vin, et frotte tout entour le
bondonnail, et lors il ne pourra gecter et en sera plus fort.

_Item_, pour traire une queue de vin sans luy donner vent, face un
petit pertuis d’un foret emprès le bondonnail, et puis ait un petit
plastreau[590] d’estouppes du large d’un blanc et puis mette dessus,
et preigne deux petites bûchettes et mette en croix dessus le dit
plastreau, et mette un autre plastreau sur les dictes bûchettes.
Et pour esclarcir vin troublé, se c’est une queue, vuide-l’en deux
quartes[591], puis le remue-l’en à un baston ou autrement, tellement
que lie et tout soit bien meslé, puis preigne-l’en un quarteron d’œufs,
et soient batus moult longuement les moyeulx et les blans tant que tout
soit fin cler comme eaue, et tantost gectez après un quarteron d’alun
batu et incontinent une quarte d’eaue clère et l’estoupez, ou autrement
il se vuideroit par le bondonnail.

Et après ce et avec ce que dit est, belle seur, faictes commander par
maistre Jehan le despensier à Richart de la cuisine escurer, laver,
nettoier et tout ce que appartient à cuisine, et véez comme dame Agnès
la béguine quant aux femmes, et maistre Jehan le despensier quant aux
hommes, mettront vos gens en œuvre de toutes pars: l’un à-mont, l’autre
à-val, l’un aux champs, l’autre en la ville, l’un en chambre, l’autre
en solier[592] ou en cuisine et envoieront l’un ça, l’autre là, un
chascun selon son endroit et science, et tant que iceulx serviteurs
gaignent leur salaire chascun et chascune en ce qu’il saura et devra
faire; et s’ils le font, ils feront bien, car sachez que paresse et
oisiveté engendrent tous maulx.

Toutesvoies, belle seur, aux heures pertinentes faictes les seoir à
la table, et les faites repaistre d’une espèce de viande largement et
seulement, et non pas de plusieurs, ne délitables ou délicatives, et
leur ordonnez un seul buvrage nourrissant et non entestant, soit vin ou
autre et non de plusieurs; et les admonestez de mengier fort et boire
bien et largement, car c’est raison qu’ils mengeussent d’une tire,
sans seoir à oultrage[593], et à une alaine, sans reposer sur leur
viande ou arrester ou acouster[594] sur la table. Et si tost qu’ils
commenceront à compter des comptes ou des raisons, ou à eulx reposer
sur leurs coustes[595], commandez la béguine qu’on les face lever et
oster leur table, car les communes gens dient: _Quant varlet presche à
table et cheval paist en gué, il est tems qu’on l’en oste, que assez y
a esté_. Deffendez leur yvresse, et que personne yvrongne ne vous serve
ne approuche, car c’est péril, et après leur reffection prise à midy,
quant temps sera, les laissiez par vos gens remettre à besongner. Et
après leur second labour et aux jours de feste aient autre repas, et
après ce, c’est assavoir au vespre, soient repus habondamment comme
devant et largement, et se la saison le requiert soient chauffés et
aaisiés.

Et après ce, soit par maistre Jehan le despencier ou la béguine vostre
hostel clos et fermé, et ait l’un d’eux les clefs par devers luy,
afin que nuls sans congié n’y entre ne ysse. Et chascun soir et avant
vostre coucher, faictes par dame Agnès la béguine ou maistre Jehan le
despensier faire reviseter à la clarté de la chandelle les fons de vos
vins, vertjus, ou vinaigre, que nul ne s’en voit[596], et facent par
vostre closier ou fermier savoir par ses gens que vos bestes soient
bien affouragées pour la nuit. Et quant vous aurez sceu par dame Agnès
la béguine ou maistre Jehan le despencier que le feu des cheminées sera
couvert partout, donnez à vos gens, pour leurs membres, temps et espace
de repos. Et ayez fait adviser par avant, qu’ils aient chascun loing
de son lit chandelier à platine[597] pour mettre sa chandelle, et les
aiez fait introduire[598] sagement de l’estaindre à la bouche ou à la
main avant qu’ils entrent en leur lit, et non mie à la chemise[599]. Et
aussi les aiez fait admonnester et introduire, chascun endroit soy, de
ce qu’il devra commencier l’endemain, et de soy lever l’endemain matin,
et recommencier chascun endroit soy son service, et de ce soit chascun
advisié. Et toutesvoies de deux choses vous advise: l’une que se vous
avez vos filles ou chamberières de quinze à vint ans, pour ce que en
tel aage elles sont sottes et n’ont guères veu du siècle, que vous les
faciez coucher près de vous en garderobe ou chambre où il n’ait lucarne
ne fenestre basse, ne sur rue, et se couchent et lièvent à vostre
heure, et vous mesmes qui avant ce temps serez sage se Dieu plaist, les
gardez de près; l’autre si est que se l’un de vos serviteurs chiet en
maladie, toutes choses communes mises arrière, vous mesmes pensez de
luy très amoureusement et charitablement et le revisetez et pensez de
lui ou d’elle très curieusement en avançant sa garison, et ainsi aurez
acompli cest article.

       *       *       *       *       *

Or vueil-je, en cest endroit, vous laissier reposer ou jouer et non
plus parler à vous:[600] vous esbatrez ailleurs, je parleray à maistre
Jehan le despencier qui nos biens gouverne, afin que se aucun de nos
chevaulx tant de charrue comme à chevauchier est en essoine[601], ou
qu’il conviengne acheter ou eschanger, qu’il s’y congnoisse un petit.

Sachiez donc, maistre Jehan, que cheval doit avoir seize[602]
conditions, c’est assavoir:

Trois des conditions du renart: c’est courtes oreilles droictes, bon
poil et fort et roide, queue bien pelue.

Du lièvre quatre: c’est maigre teste, bien esveillé, de légier mouvant,
viste et tost alant.

Du beuf quatre, c’est assavoir: la harpe[603] large, grosse et ouverte,
gros bouel, gros yeulx et saillans hors de la teste, et bas enjointé.

De l’asne trois: bon pié, forte eschine, et soit débonnaire.

De la pucelle quatre, c’est assavoir: beaulx crins, belle poitrine,
beaulx rains et grosses fesses.

Maistre Jehan, mon ami, qui veult acheter un cheval, il le doit
premièrement veoir en l’estable, car là voit-l’en s’il est en main
d’affaiteur ou non, et s’il est bien ou mal gardé; s’il abonne
cocte[604], et comment il siet sur le fien[605]. Après ce, à l’issir
de l’estable, s’il a courtes et droites oreilles, maigre ou grasse
teste, bonne veue et saine, et bons yeulx, gros, saillans dehors
la teste; et puis taster dessoubs les gencives qu’il y ait grant
entre-deux et bonne ouverture et large, et qu’il n’y ait gourme, bube
ne malen[606], et que l’entrée du gavion ne soit en riens empeschée.

Et puis, mon ami maistre Jehan, tu te dois congnoistre à l’aage;
dont il est à savoir que quant un cheval a deux ans, il a ses dens
nouvelles, blanches, déliées et pareilles. Au troisième an, les trois
dens de devant luy muent, et dedens icelluy troisième an deviennent
plus grosses assez et plus brunes que les autres. Au quatrième an, les
deux dens qui sont aux deux costés d’iceulx trois dens muées, luy muent
et deviennent pareilles aux trois dont dessus est parlé. Au cinquième
an, les autres muent. Au sixième an, viennent les crochés dont le fons
est creux, et est la fève ou fons du creux. Au septième an les hors du
creux des crochés si usent, et n’y a mais point de creux ne de fève, et
devient tout plat et tout aouni[607] et de là en avant on n’y congnoist
aage.

Après ce, maistre Jehan, tu dois aviser se le cheval a bonne encontre
et bonne herpe et ouverte: qu’il ne soit courbé ne fuiselé[608]; et
s’il est durié[609] c’est bon signe. Et par entre les deux jambes de
devant, regardes aux jambes de derrière qu’il n’y ait esparvain ou
courbe. Esparvain dedens le plat de la cuisse de derrière est, et
s’apperçoit mieulx par entre les deux jambes de devant. Courbe est à
icelluy endroit que devant, et plus sur le derrière, car elle tient
au bout du gerret derrière, sur le bout de la jointe de la queue en
dévalant; et est au commencement une petite bossette qui agrandist et
est longuette, et gist au long et dessoubs le pli du gerret. Et quant
on veult gracieusement parler devant marchans, on dit ainsi: _Véez-cy
un bon cheval, il est long et esgarretté_. Et lors on entent que c’est
à dire qu’il est corbeux.

Après ce, maistre Jehan mon amy, tu dois aler au costé et regarder s’il
est point grevé soubs la selle, car en cheval qui ait tendre dos ne
vous fiez; gardez aussi qu’il ne soit blécié au jarret[610]. _Item_,
qu’il ait bon bouel; s’il est point batu d’esperons, qu’il n’ait
grosses c......, qu’il ait long corps, car on dit un cheval plat quant
il n’est pas ront ne bien esquartellé. Véez aussi quelle chière il fait
par l’apparence de ses oreilles et de ses yeulx et par l’esmouvement
de sa teste et le remuement de ses piés, et gardez bien qu’il n’ait
malandres, [malandre est dedans le garret derrière; gardez aussi qu’il
n’ait][611] molettes ne suros; ne soit crapeux, ne ne s’entretaille de
la jambe de l’autre lez[612], car d’illec le peut-l’en bien veoir.

Après ce que dit est, doit-l’en adviser que le cheval ait maigres
jambes, larges et plates, et qu’il n’ait pas les genoulx couronnés, et
que les joinctes[613] de dessus les couronnelles ne boutent mie devant.
Et regardez s’il a piés gras et combles, piés fendus, faulx quartiers,
piés avalés, crapaudines ou fourme. Fourme sur couronnelle est quant au
travers sur le coup-du-pié a une soubaudreure[614] qui se hausse, et en
huit jours est formée aussi derrière comme devant, et durant ce qu’elle
est entière, l’en l’appelle fourme et fait piés avalés, mais quant
elle est crevée, l’en dist crapaudine et ne garist-l’en puis, et est
sur le bout de la couronnelle du pié[615].

Après, va par derrière et garde qu’il ait les fesses escartelées et
bien secourcées[616], belle queue et bien pelue et serrant aux fesses
que on ne la puisse sourdre[617], car c’est bon signe quant le cheval a
bon et fort quoier, saines c....... Et encores de rechief, advise qu’il
ne s’entretaille, ne ne soit crapeux ne rongneux, ne qu’il n’ait javart
et rongne, et par entredeux icelles jambes de derrière qu’elles ne
soient arçonnées parmy le milieu comme un arc, et audessoubs qu’il n’y
ait esparvain, molette, suros dedens la jambe ou dehors, ou malandre,
et qu’il ne s’entretaille ne n’ait crape[618] ne rape, ne derrière ne
devant. Après, le convient veoir trotter bellement de rechief en sa
droicte aleure commune, et adviser adonc s’il liève ses piés ouniement
et égaulment, d’un hault[619] et d’une légièreté; s’il plie bien ses
jambes devant et qu’elles ne soient mie roides; s’il escout sa teste,
s’il soufle du nez et ouvre ses narines, et s’il est long en la main,
car toutes ces choses sont de bon signe. Après, le dois faire trotter
fort, et prendre garde s’il trotte bel et qu’il ne s’entretaille ne
ataigne. Puis faire courre et aler les galos, et lors regarder à certes
s’il a grosse alaine; s’il soufle et qu’il ait grant et grosse alaine
par la bouche, se les flancs luy haletent ou qu’il soit poucis; et ce
puet aussi estre veu dessoubs la queue. Puis le veoir l’endemain à
froit, et savoir en l’estable comment il se tient sur le sien, puis
trotter et aler les galos et reveoir s’il est poucis, et ce peut estre
veu dessous la queue, puis le veoir et savoir de rechief aux champs et
ailleurs s’il est bon aux esperons.

_Nota_, maistre Jehan, que ès festes de Flandres, se vous avez
barguaignié[620] et sceu le pris d’un cheval, et vous demandez à le
veoir courre, _eo ipso_ vous vous départez de tous les autres vices,
tellement que s’il est bon à l’esperon et qu’il queure, il est vostre,
quelque autre tache qu’il ait.

Maistre Jehan, s’aucun cheval est qui ait passé aage, et soit trouvé
sans suros, malandre, courbe, entretaille, molettes _et similia_, c’est
adonc à entendre qu’il est affermé[621], et que puis qu’il a passé sa
jeunesse sans tache, jamais n’en aura aucune.

_Item_, tant est un cheval plus court, maistre Jehan, tant a plus fort
eschine.--_Item_, tant plus dur trotte, maistre Jehan, tant plus est
fort.--_Item_, maistre Jehan, s’il est délié sur la poincte d’en bas,
c’est mauvais signe.

Maistre Jehan, se vous voulez engresser, pour vendre, un de nos
chevaulx, _primo_ soit estrillé, lavé et tenu nettement, et fresche
lectière.--_Item_, s’il ne fut pieçà seigné, si le faictes seigner
des costés, c’est du ventre, car icelle seignée des costés est propre
pour leur donner bon bouel. Puis luy emplissiez son ratellier de très
bon foing d’une part, et de feurre d’avoine d’autre part; puis prenez
quatre boisseaulx de bien nette paille de fourment, deux boisseaulx
de bran[622], un boissel de fèves menues et un boissel d’avoine, et
meslez tout ensemble et luy en donnez quatre fois le jour, avant
boire. _Item_ après, boire de l’eaue de rivière chauffée au soleil ou
sur le fumier, ou en yver chauffée sur le feu, et y ait du son dedens
une toille, car sans toille le cheval toussiroit comme s’il eust mengié
plume; puis mengeusse du foing. Puis pour prou vendre[623], comme
dessus, ou se c’est cheval de petit pris, il ait avant boire, trois
fois orge boulu, et après boire, fèves et bran et bien pou d’avoine.

OINGNEMENT POUR LES PIÉS DES CHEVAULX.--Prenez un quarteron
de suif de bouc, un quarteron de cire, un quarteron de terbentine, un
quarteron de poix rasine et boulez tout ensemble, et oignez les piés
des chevaulx.--_Item_, aiez un drappel moullié en viez oint et mettez
ou fons du pié et de la fiente avec.

Pour garir de rape, crape, rongne et javart, lavez d’uille de chennevis
avec eaue batue ensemble, et s’il n’en garist, il le convient seigner
de la pointe du pié.

_Item_, est à noter que quant un cheval est seigné du col, l’en le
doit tenir lié hault, et faire petitement mengier et hault, car le
débatement des mandibules et du col le pourroient faire escrever.
_Item_, le convient abuvrer le plus loing de la seignée que l’en puet
et lier hault, pour ce que le baisser la teste le fait escrever.
_Item_, se le cheval est de grant pris, si soit veillé de nuit.

Malandre veult estre lavé deux fois le jour de chault pis..t ou
chaude eaue. _Item_, _idem_, grosses jambes derrière[624]; et se
ainsi l’en ne peut garir, que l’en face restrainctif, c’est assavoir
de sang-de-dragon[625], d’aubun d’œufs[626], ou plastre bien sassé
et aubun d’œufs[627], et liez par bandeaulx entour la jambe, et puis
seicher à un tison de feu par derrière.

Quant cheval pert la veue, faictes mouldre du saing[628] de voirre
vieil, et luy gette-l’en dedens l’ueil à un tuel[629].

Quant cheval a tranchoisons, faictes-le mettre par terre et puis luy
faictes mettre à un cornet un quarteron de quelque huille dedens le
c.l, et puis le faites chevauchier tant qu’il sue, et il garira.

Quant cheval a vives[630], il luy convient dire ces trois mos, avec
trois patenostres: ✝ _abgla_, ✝ _abgly_, ✝ _alphara_, ✝ _asy_, ✝ _pater
noster_ etc.

Contre farcin, te convient ce couver[631] par neuf jours, et chascun
jour en jeun dire par trois fois, et chascune fois dire trois
patenostres et toucher le mal ✝ _In nomine Patris_ ✝ _et Filii_ ✝ _et
Spiritus Sancti_ ✝ _amen_ ✝ _Je te conjure, mal félon de par Dieu
omnipotent et de par le Père et de par le Fils et de par le Saint
Esperit, et de par tous les sains et de par tous les anges de nostre
Seigneur Jhésu Crist. et par toutes les vertus que Dieu donna à paroles
ne en voix, par les vertus que Dieu fist de faire le ladre guérir de sa
maladie: et que tu, mal félon, n’ailles plus avant, et que ne doubles
ne ne enfles, n’en fenestres, n’en fistules, néant plus que firent les
cinq plaies nostre Seigneur Jhésu Crist, et aussi le monde sauva, et
pour ce se firent les cinq plaies de nostre Seigneur, Jhésu Crist. In
nomine Patris_ ✝ _et Filii_ ✝ _et Spiritus Sancti_ ✝ _Amen_.

S’aucun cheval est morfondu, il le convient tantost faire seigner
des jambes devant au plus bas, et au hault du plat des cuisses, et
recueillir le sang, et d’icelluy oindre les piés, puis torchier de
foing moullié et pourmener sans boire et sans mengier, et dedens quatre
heures ou environ, mettre un restraintif sur les couronnelles afin
qu’il ne face pié neuf; et le convient pourmener sans arrest trente-six
heures, et luy donner à la main du foing s’il en veult mengier: et ne
boive point d’un jour naturel; et après vint-quatre heures depuis la
seignée, boive de l’eaue chaude avec du bran. Et pendant le dit temps
et tantost après ce qu’il sera seigné, soit couvert de trois linceuls
moulliés tout à une fois, et au bout de trente-six heures ou plus,
c’est assavoir quant il se prendra à mengier du bran et faire bonne
chière et qu’il aura fienté, luy face-l’en bonne lictière et blanche,
et le face-l’en reposer, puis pourmener, et quant il yra de bon cuer,
si luy oste-l’en un jour un drap, l’autre jour l’autre, et le tiers
l’autre, et ne luy donne-l’en fors brennée à boire et à mengier jusques
à ce qu’il face bonne chière. Aucuns leur donnent du buvrage de pommes
à un cornet. Et de tout le mareschal puet avoir franc et demi[632].



DE LA DEUXIÈME DISTINCTION

LE QUART ARTICLE[633]

     QUI VOUS DOIT APRENDRE QUE VOUS, COMME SOUVERAIN MAISTRE DE VOSTRE
     HOSTEL, SACHIEZ COMMANDER ET DEVISER A MAISTRE JEHAN DISNERS ET
     SOUPPERS, ET DEVISER MÈS ET ASSIETES.


Et à ce commencement je vous mettray aucuns termes servans aucun pou,
et qui vous donront commencement ou au moins esbatement.

_Primo_, pour ce qu’il convient que vous envoiez maistre Jehan ès
boucheries, cy-après s’ensuivent les noms de toutes les boucheries de
Paris et leur délivrance de char.

A la Porte-de-Paris[634] a dix-neuf bouchiers qui par estimation
commune vendent, pour sepmaine, eulx tous, l’un temps parmi l’autre, et
la forte saison portant la foible, dix neuf cens moutons, quatre cens
beufs, quatre cens pourceaulx, et deux cens veaulx.

Saincte-Geneviefve: cinq cens moutons, seize beufs, seize porcs, et
six[635] veaulx[636].

Le Parvis: quatre-vint moutons, dix beufs, dix veaulx, huit porcs.

A Saint-Germain a treize bouchiers; deux cens moutons, trente beufs,
trente veaulx, cinquante porcs.

Le Temple, deux bouchiers; deux cens moutons, vint-quatre beufs,
vint-huit[637] veaulx, trente-deux porcs.

Saint-Martin: deux cent cinquante moutons, trente-deux beufs,
trente-deux veaulx, vint-deux[638] porcs.

Somme des boucheries de Paris, pour sepmaine, sans le fait du Roy et de
la Royne et des autres nos seigneurs de France, trois mille quatre-vint
moutons, cinq cent quatorze beufs, trois cent six veaulx, six cens
porcs[639]. Et au vendredi absolut[640], sont vendus de deux mille à
trois mille lars[641].

Pour ce qu’il a cy-devant esté parlé du fait du bouchier et
poullaillier, le fait de l’ostel du Roy en office de boucherie monte
bien, pour sepmaine, six-vints moutons, seize beufs, seize veaulx,
douze porcs: et par an deux cens lars.

Le fait du poullaillier: par jour, six cens poullailles, deux cens
paires de pigons, cinquante chevriaux, cinquante oisons.

La Royne et les enfans. Boucherie, pour sepmaine, quatre-vins moutons,
douze veaulx, douze beufs, douze porcs: et par an six-vins lars.--Le
fait du poullaillier: pour jour, trois cens poullailles, trente-six
chevreaulx, cent cinquante paires de pigons, trente-six oisons.

Orléans[642] aussi.

Berry aussi.

Les gens de Monseigneur de Berry dient que aux dimenches et grans
festes, il leur convient trois beufs, trente moutons, huit-vins
douzaines de perdris, et connins à l’avenant, mais j’en doubte.--Avéré
depuis.--Et est certain que[643] plusieurs grans festes, dimenches
et jeudis, mais le plus commun des autres jours est à deux beufs
et vingt moutons.--_Nota_ encores que à la court de Monseigneur de
Berry on fait livrée à pages et à varlets des joes de beuf, et est le
museau du beuf taillié à travers, et les mandibules demeurent pour la
livrée, comme dit est.--_Item_, l’en fait du col du beuf livrée ausdis
varlets.--_Item_, et ce qui vient après le col est le meilleur de tout
le beuf, car ce d’entre les jambes de devant, c’est la poitrine, et ce
dessus, c’est le noyau[644].

Bourgoingne, de parisis à tournois du Roy[645].

Bourbon, la moitié du fait de la Royne.

_Item_, et sans espandre ou baillier vostre argent chascun jour,
vous pourrez envoïer maistre Jehan au bouchier, et prendre char sur
taille[646], considérant ce qui s’ensuit:

En la moitié de la poitrine de beuf a quatre pièces, dont la première
pièce a nom le grumel[647]; et toute celle moitié couste dix blans[648]
ou trois sols. En la longe a six pièces, et couste six sols huit
deniers ou six sols. La surlonge trois sols. Ou giste[649] a huit
pièces et est la plus grosse char, mais elle fait la meilleure
eaue[650] après la joe; et couste le giste, huit sols.

Le quartier de mouton a quatre pièces ou trois pièces et l’espaule, et
couste huit blans ou trois sols.

Le quartier de veel, huit sols. Porc[651]....

Et _nota_ que ce que l’en dit la poictrine d’un beuf, l’en dit le
brichet d’un mouton: et quant l’en parle d’un cerf, l’os d’icelle
poictrine est nommé la hampe.

De la poictrine d’un beuf, la première pièce qui part d’emprès le colet
est appellée le grumel, et est la meilleur. D’un mouton, le flanchet
est ce qui demeure du quartier de devant quant l’espaule en est
levée.--_Item_, l’en dit le couart[652] d’un cerf.--_Item_, les dentés
sont les c......ns.

La surlonge trois sols. La longe six sols. La char d’un mouton dix sols.

       *       *       *       *       *

Après ces choses, convient dire et parler d’aucuns termes généraulx qui
regardent fait de queurie[653] en aucune qualité, et après sera monstré
à congnoistre et choisir les viandes desquelles l’en doit ouvrer comme
il s’ensuit:

_Primo_, que en toutes sausses et potages lians en quoy l’en broie
espices et pain, l’en doit premièrement broïer les espices et oster
du mortier, car le pain que l’en broie après, requeut ce qui des
espices est demouré; ainsi on ne pert rien ce qu’on perdroit qui feroit
autrement.

_Item_, des espices et lieures[654] mises en potages, l’en ne doit
riens couler[655], combien que sausses si fait, afin que les sausses
soient plus clères et aussi plus plaisans.

_Item_, sachiez que pou advient que pois ou fèves ou autres potages
s’aoursent[656], se les tisons ardans ne touchent au cul du pot quant
il est sur le feu.--_Item_, avant que ton potage s’aourse, et afin
qu’il ne s’aourse, remue-le souvent au cul du pot et appuie ta cuillier
au fons, afin que le potage ne se preigne là. Et _nota_ que si tost que
tu apparceveras que ton potage s’aoursera, si ne le remue point, mais
l’oste tantost de dessus le feu et le mets en un autre pot.

_Item_, _nota_ que communément tous potages qui sont sur le feu
surondent et s’en vont sur le dit feu jusques à ce que l’en ait mis au
pot sel et gresse, et depuis, non.

_Item_, _nota_ que le meilleur chaudeau qui soit, c’est de la joe de
beuf lavée en eaue deux fois ou trois, puis boullir et bien escumer.

_Item_, l’en scet se un connin est gras, à luy taster un nerf ou col
entre les deux espaules, car là scet-l’en s’il a grosse gresse par le
gros nerf; et s’il est tendre, l’en le scet à luy rompre une des jambes
de derrière.

_Item_, _nota_ qu’il y a différence entre les queux, entre boutonner et
larder, car boutonner est de giroffle et larder est de lart.

_Item_, des brochets, le laictié vault mieulx que l’ouvé, se ce n’est
quant l’en veult faire rissolles, pour ce que des œuvés l’en fait
rissolles, _ut patet in tabula_. Des brochets, l’en dit lancerel,
brochet, quarrel, lux et luceau[657].

_Item_, aloze franche entre en Mars en saison.

_Item_, carpe doit estre très cuite, ou autrement c’est péril de la
mangier.

_Item_, plais[658] sont doulces à applanier à la main, et lymandes au
contraire.

_Item_, à Paris, les oyers[659] engressent leurs oies de farine, non
mie la fleur ne le son, mais ce qui est entre deux, que l’en appelle
les gruyaux ou recoppes: et autant comme ils prennent de ces gruyaux
ou recoppes, autant mettent-ils d’avoine avec, et meslent tout avec
un petit d’eaue, et ce demeure ensemble espais comme paste, et ceste
viande mettent en une goutière[660] sur quatre piés, et d’autre part,
de l’eaue et lictière nouvelle chascun jour, et en quinze jours sont
gras. Et _nota_ que la lictière leur fait tenir leurs plumes nettes.

_Item_, pour faisander chapons et gélines, il les convient saignier par
la gueule et incontinent les mettre et faire morir en un scel d’eaue
très froide, et il sera faisandé ce jour mesmes comme de deux jours tué.

_Item_, l’en congnoist les jeunes malars[661] des viels, quant ils
sont aussi grans les uns comme les autres, aux tuyaux des esles qui
sont plus tendres des jeunes que des vieulx.--_Item_, l’en congnoist
ceulx de rivière à ce qu’ils ont les ongles fins, noirs, et aussi ont
les piés rouges, et ceulx de paillier[662] les ont jaunes. _Item_,
ont la creste[663] du bec, c’est assavoir le dessus, vert tout au
long, et aucunes fois les masles ont au travers du col, endroit le
hasterel[664], une tache blanche, et sont tous d’un plumage et ont la
plume de dessus la teste très ondoiant.

_Item_, coulons ramiers sont bons en yver, et congnoist-l’en les vieulx
à ce que les venneaulx[665] de leurs esles sont tout d’une couleur
noire, et les jeunes d’un an ont les venneaulx cendrés et le surplus
noir.

_Item_, l’en congnoist l’aage d’un lièvre au nombre des pertuis qui
sont dessoubs la queue, car pour tant de pertuis, tant d’ans.

_Item_, les perdris qui ont les plumes bien serrées et bien joinctes
à la char, et sont arrangéement et bien joinctes et sont comme les
plumes sont sur un esprivier, sont fresches tuées: et celles dont les
plumes se haussent contremont et laissent la char et se desrangent de
leur siége et vont sans ordre çà et là, sont vieilles tuées.--_Item_, à
tirer les plumes du braier[666], le sent-l’en.

_Item_, la carpe qui a l’escaille blanche et non mie jaune ne rousse,
est de bonne eaue. Celle qui a gros yeulx et saillans hors de la teste,
et le palais et langue mols et ouny, est grasse. Et _nota_, se vous
voulez porter une carpe vive par tout un jour, entortilliez-la en foing
moullié et la portez le ventre dessus, et la portez sans luy donner
air, c’est assavoir en bouges ou en sac.

La saison des truites commence en[667]..... et dure jusques à
Septembre. Les blanches sont bonnes en yver, et les vermeilles[668] en
esté. Le meilleur de la truite est la queue, et de la carpe c’est la
teste.

_Item_, l’anguille qui a menue teste, becque délié, cuir reluisant,
ondoiant et estincelant, petis yeulx, gros corps et blanc ventre, est
la franche. L’autre est à grosse teste, sor[669] ventre, et cuir gros
et brun.

       *       *       *       *       *

Cy-après s’ensuivent aucuns disners et soupers de grans seigneurs et
autres, et notes sur lesquels vous pourrez choisir, reconqueillir[670]
et aprendre des quels mets qu’il vous plaira, selon les saisons et les
viandes qui seront ès païs où vous serez, quant vous aurez à donner à
disner ou à soupper.


I. DISNER A JOUR DE CHAR, SERVI DE TRENTE ET UN MÈS A SIX
ASSIETTES.

Première assiette. Garnache[671] et tostées[672], pastés de veel,
pastés de pinparneaux, boudins et saucisses.

Seconde assiette. Civé de lièvres et les costellettes, pois coulés,
saleure et grosse char, une soringue d’anguilles (12)[673] et autre
poisson.

Tierce assiette. Rost: connins, perdris, chappons, etc., lux, bars,
carpes, et un potage escartelé (35, 36, 37).

Quarte assiette. Oiseaulx de rivière à la dodine, ris engoulé (37),
bourrée à la sausse chaude et anguilles renversées (26).

Quinte assiette. Pastés d’aloés, ruissolles, lait lardé (41), flaonnés
succrés.

Sixième assiette. Poires et dragées, neffles et nois pelées. Ypocras et
le mestier[674].


II. AUTRE DISNER DE CHAR DE VINT-QUATRE METS A SIX ASSIETTES.

Première assiette. Pastés de veel menu déhaché à gresse et mouelle de
beuf, pastés de pinparneaux, boudins, saucisses, pipefarce, et pastés
norrois _de quibus_ (41).

Seconde assiette. Civé de lièvre (16) et brouet d’anguille (17); fèves
coulées, saleures, grosse char, s.[675] beuf et mouton.

Tiers mets. Rost: chappons, connins, veel et perdris, poisson d’eaue
doulce et de mer, aucun taillis (36) avec doreures (39).

Quart mets. Mallars de rivière à la dodine, tanches aux soupes et
bourrées à la sausse chaude[676] (26), pastés de chappons de haulte
gresse à la souppe de la gresse et du persil.

Quint mets. Un boulli lardé, ris engoulé, anguilles renversées, aucun
rost de poisson de mer ou d’eaue doulce, roissolles (41), crespes et
vielz sucre (41).

La sixième assiette et derrenière pour yssue. Flanciaux succrés et lait
lardé, neffles, noix pellées, poires cuites et la dragée. Ypocras et le
mestier.


III. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mès. Pastés de beuf et roissoles, poirée noire, lamproies à
froide sauge, un brouet d’Alemaigne de char, une sausse blanche de
poisson et une arbolastre, et grosse char de beuf et mouton.

Second mès. Rost de char, poissons d’eaue doulce, poissons de mer, une
cretonnée de char, raniolles[677], un rosé de lapereaulx et de bourrées
à la sausse chaude,[678] d’oiselets tourtes Pisaines (_id est_ de Pise
en Lombardie, et dit-l’en tourtes Lombardes, et y a des oiselets parmi
la farce, et en plusieurs lieux cy-après dit tourtes Lombardes).

Tiers mès. Tenches aux souppes, blanc mengier paré, lait lardé,
crottes, queue de sanglier à la sausse chaude, chappons à la dodine,
pastés de bresmes et de saumon, pleis en l’eaue et leschefrite et
darioles.

Quart mès. Fromentée, venoison, rost de poissons, froide sauge,
anguilles renversées, gelées de poisson, pastés de chappons à là soupe
courte.


IV. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mès. Pastés norrois (40), un brouet camelin de char, bignés de
mouelle de beuf, soringue d’anguilles, loche en eaue et froide sauge,
grosse char et poisson de mer.

Second mès. Rost le meilleur que on peut et poisson doulx, un bouli
lardé, un tieule[679] de char, pastés de chappons et crespes, pastés de
bresmes, d’anguilles, et blanc mengier.

Tiers mets. Froumentée, venoison, lamproie à la sausse chaude (26),
leschefrites, bresmes en rost et darioles, esturgon et gelée.


V. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mets et assiette. Pastés de beuf et de mouelle, civé de lièvre,
grosse char, un brouet blanc de connins, chappons et venoison aux
souppes, porée blanche, navés, oés salées et eschinées.

Second mets. Rost le meilleur etc., un rosé d’aloés, un blanc mengier,
nomblès et queue de sanglier à la sausse chaude (26), pastés de
chappons gras, frittures et pastés norroix.

Tierce assiette. Fromentée, venoison, dorures de pluseurs manières,
oés et chappons gras à la dodine, darioles de cresme et leschefrites
sucrées, bourrées à la galentine chaude (26), gelée de chappons,
connins, poucins[680], lapereaux et cochons.

Quarte assiette. Ypocras et le mestier pour issue.


VI. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mets. Fèves frasées, un brouet de cannelle (13), un civé de
lièvre noir (16), un brouet vert d’anguilles (17), harenc sor, grosse
char, navès, tanches aux souppes, oés et eschinées salées, roissolles
de mouelle de beuf (4) et hastelés de beuf _ut pa_[681].

Second mets. Rost le meilleur que on puet, poisson doulx, poisson de
mer, plais en l’eaue, bourrées à la sausse chaude _ut_[682] lamproions
(26), un gravé d’aloés g. i. g.[683], de fleur de peschier, blanc
mengier parti, tourtes Lombardes, pastés de venoison et d’oiselets,
cretonnée d’Espaigne, harenc frais.

Tiers mès. Froumentée, venoison, dorures, gelées de poisson, chappons
gras à la dodine, rost de poisson, leschefrites et darioles, anguilles
renversées, escrevices, crespes et pipefarces.


VII. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mets. Poirée blanche, hastelés de beuf, grosse char, civé de
veel, du brouet houssé.

Second mets. Rost de char, poisson de mer et d’eaue doulce, ranioles
Lombardes, une cretonnée d’Espaigne.

Tiers mets. Lamproies, alause[684], un rosé, lait lardé et croutes de
lait, tourtes Pisaines _id est_ Lombardes, darioles de cresme.

Quart mets. Froumentée, venoison, doreures, pastés de bresmes et de
gornaux, anguilles renversées, chappons gras à la dodine.

Yssue est ypocras et le mestier.--Boute-hors; vin et espices.


VIII. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mets. Grosse char, pastés norrois, bignés de mouelle de beuf,
brouet camelin de char, soringue d’anguilles, loches en eaue, poisson
de mer et froide sauge.

Second mets. Rost le meilleur qu’on pourra, poisson doulx, un tieule de
char, un bouli lardé de chevrel, pastés de chapons, crespes, pastés de
bresmes et d’anguilles et blanc mengier.

Tiers mets. Froumentée, venoison, doreures, lamproies à la sausse
chaude, leschefrites et darioles, bresmes en rost, boulis au verjus,
esturgon et gelée.


IX. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mets. Poreaux blans, pastés de beuf, oyes et eschinées, civé de
lièvre et de connins, un geneste d’aloés, grosse char.

Second mets. Rost: queue de sanglier à la sausse chaude (26), blanc
mengier parti, dodines d’oés, lait lardé et croutes, venoison,
doreures, gelées, croutes au lait à la dodine, pastés de chapons,
froide sauge, pastés de vache et talemouse.


X. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mets. Pois coulés, harenc, anguilles salées, civé
d’oestres[685] noir, un brouet d’amandes, tieule, un bouli de brochets
et d’anguilles, une cretonnée, un brouet vert d’anguilles, pastés
d’argent.

Second mets. Poisson de mer, poisson doulx, pastés de bresme et de
saumon, anguilles renversées, une arboulastre brune, tanches à un bouli
lardé, un blanc mengier, crespes, lettues, losenges, orillettes et
pastés norrois, lux et saumons farcis.

Tiers mets. Fromentée, venoison, doreures de pommeaulx et de pès
d’Espaigne et de chastellier, rost de poisson, gelée, lamproies,
congres et turbos à la sausse vert, bresmes au vert jus, leschefrites,
darioles et l’entremès grant.


XI. AUTRE DISNER.

Premier mets. Pastés de beuf et roissoles, porée noire, un gravé de
lamproies, un brouet d’Alemaigne de char, un brouet georgié de char,
une sausse blanche de poisson, une arboulastre.

Second mets. Rost de char, poisson de mer, poisson doulx, une cretonnée
de char, ranioles, un rosé de lapereaulx et d’oiselets, bourrées à la
sausse chaude (26), tourtes Pisaines.

Tiers mets. Tanches aux souppes, blanc mengier parti, lait lardé et
croittes[686], queues de sanglier à la sausse chaude (26), chapons
à la dodine, pastés de bresmes et de saumon, plais en l’eaue,
leschefrictes[687] et darioles.

Quart mets. Fromentée, venoison, doreures, rost de poisson, froide
sauge, anguilles renversées, gelée de poisson, pastés de chappons.


XII. AUTRE DISNER.

Premier mets. Fèves frasées, un brouet de canelle, un civé de lièvre
noir ou brouet d’anguilles vert, harens sors, grosse char, navets,
tanches aux souppes, oés et eschinées salées, roissolles de mouelle de
beuf.

Second mets. Rost le meilleur qu’on peut, poisson d’eaue doulce,
poisson de mer, plais en l’eaue, bourrées à la sausse chaude, un gravé
d’aloués en couleur de fleur de peschier, blanc mengier parti, tourtes
Lombardes, pastés de venoison et d’oiselés, cretonnée d’Espaigne,
harens frais.

Tiers mets. Froumentée, venoison, doreures, gelée de poissons, chappons
gras à la dodine, rost de poisson, leschefrictes et darioles, anguilles
renversées, escrevices, crespes et pipefarces.


XIII. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mets. Un brouet d’Alemaingne, choulx cabus, une soringue
d’anguilles, navez, pastés de beuf, grosse char.

Second mets. Rost le meilleur qu’on pourra avoir, oés grasses à la
dodine, poisson d’eaue doulce, blanc mengier, une arboulastre, pastés
norrois, crespes, lait lardé, tourtes de lait.

Tiers mets. Pastés de chapon à la doudine, ris engoulé, queue de
sanglier à la sausse chaude, leschefrictes et darioles succrées.

Quart mets. Fromentée, venoison, doreures, anguilles renversées, rost
de bresmes.

La teste de sanglier à l’entremès.


XIV. AUTRE DISNER DE CHAR.

Premier mets. Poreaulx blancs à chappons, oé à l’eschinée et à
l’andoulle rostie, pièces de beuf et de mouton, un brouet gorgé[688] de
lièvres, de veel, de connins.

Second mets. Chappons, perdris, connins, plouviers, cochons farcis,
faisans pour les seigneurs[689], gelée de char et de poisson.

L’entremets. Lux et carpes.

L’entremets eslevé[690]. Cine, paons, butors, hérons et autres choses.

L’issue. Venoison, ris engoulé, pastés de chappons, flaons de cresme,
darioles, anguilles renversées, fruit, oublées[691], estrées[692] et le
claré[693].


XV. AUTRE DISNER DE VINT QUATRE METS[694] A TROIS
ASSIÈTES.

Premier mets. Pois coulés, anguilles salées et harenc, poireaux aux
amandes, grosse char, un brouet jaunet, une salemine, poisson de mer,
civé d’oïtres.

Second mets. Rost, poisson doulx, poisson de mer, un brouet de Savoie,
un brouet lardé d’anguilles renversées.

Tiers mets. Rost de bresmes, galentine, cine, chapons pelerins, gelée,
blanc mengier parti, plais en l’eaue, turbos à la soucie, darioles de
cresme, lamproies à la sausse chaude, doreures, ris engoulé, etc.


SOUPERS.

XVI. SOUPER DE CHAR A QUATRE ASSIÈTES.

Première assiète. Seymé, poules aux herbes, brouet de vertjus et de
poullaille, une espinbesche de un bouly lardé, brochereaulx et loche en
eaue, rougé et chastelongnes salées.

Second mets. Rost le meilleur que on peut de char et poisson, et drois
au persil et au vinaigre, poisson à la galantine, une sausse blanche
sur poisson, et fraze de char.

Tiers mets. Pastés de chapons, bécuit de brochets et d’anguilles,
laittues, tubesches et une arboulastre, poisson, crespes et pipefarces.

Quart mets. Gelée, escrevices, plais en l’eaue, ables et froide sauge,
nomblès à la sausse chaude, pastés de vache et talemouses.--Potage pour
faire yssue, appellé gelée.


XVII. AUTRE SOUPER DE CHAR.

Première assiète. Chapons aux herbes, une comminée, poix daguenets,
loches au jaunel, venoison aux souppes.

Second mets. Rost le meilleur qu’on peut avoir, gelée, blanc mengier
parti, flanceaulx de cresme bien succrés.

Tiers mets. Pastés de chapons, froides sauges, espaules de mouton
farcies, brochetons à un rebouly, venoison à la queue de sanglier,
escrevices.


XVIII. AUTRE SOUPER DE CHAR.

Premier mets. Trois manières de potages, chapons entiers en un blanc
brouet, une chaudumée de beschets, venoison aux souppes, loches et
anguilles tronsonnées dessus.

Second mets. Rost, chapons, connins, perdris, plouviers, mesles[695],
oiselets, chevriaulx, un blanc mengier sus, etc., lux carpes et bars,
etc., anguilles renversées.--Faisans et cines pour entremets.

Tiers mets. Venoison à la froumentée, pastés de turtres et d’alouettes,
tartes, escrevices, harens frais, fruit, claré, nieulles[696], neffles,
poires, noix pelées.


XIX. DISNERS DE POISSON POUR CARESME.

Premier mets et assiète. Pommes cuites, grosses figues de Prouvence
rosties et fueilles de lorier par-dessus, le cresson et le soret au
vinaigre, poix coulés, anguilles salées, harens blans, gravé sur
friture de mer et d’eaue doulce.

Second mets. Carpes, lux, soles, rougés, saumons, anguilles.


XX. AUTRE DISNER DE POISSON POUR CARESME.

Premier mets. Pommes cuites, etc., comme dessus.

Second mets. Carpes, lux, soles, rougés, saumon, anguilles renversées à
la boe et une arboulastre.

Tiers mets. Pinperneaulx rostis, merlans fris, marsouin poudré à l’eaue
et fromentée, crespes et pastés norrois. Yssue: figues et roisins,
ypocras et le mestier, comme dessus est dit.


XXI. AUTRE DISNER DE POISSON.

Premier mets. Pois coulés, purée, civé d’oïstres, une sausse blanche de
brochets et de perches, porée de cresson, harens, graspoix, anguilles
salées, loches en l’eaue.

Second mets. Poisson d’eaue doulce et de mer, turbot à la soucie,
taillis, un bécuit, anguilles en galentine.

Tiers mets. Rost le plus bel et le meilleur qu’on pourra avoir, blans
pastés, larras, loche au waymel, escrevices, perches au percil et au
vinaigre, tanches aux souppes, gelée.


XXII. AUTRE DISNER DE POISSON.

Premier mets. Pois coulés, harens, porée, anguilles salées, oïstres,
une salaminée de brochets et de carpes.

Second mets. Poisson d’eaue doulce, une soringue d’anguilles, pastés
norrois et blanc mengier parti, une arboulastre, pastés, bignés.

Tiers mets. Rost le meilleur, etc., ris engoulé, tartres, leschefrayes
et darioles, pastés de saumon et de bresme, une chaudumée.

Quart mets. Taillis, crespes, pipefarces, escherois, loche frite[697],
doreures, congres et turbos au soucié[698], tourtes Lombardes,
anguilles renversées.


XXIII. AUTRE DISNER DE POISSON.

Premier mets. Pommes cuites, figues grasses, Garnache, cresson et
poulés, pois coulés, aloze, anguille salée, harens et craspois, brouet
blanc sur perches, et sèches à un gravé sur friture.

Second mets. Poisson doulx le meilleur qu’on peut et poisson de mer,
anguilles renversées, bourrées à la sausse chaude, tenches aux souppes,
escrevices, pastés de bresmes et plais en l’eaue.

Tiers mets. Fromentée au marsouin, pastés norrois et maquereaulx
rostis, pinperneaulx en rost et crespes, oïttres, sèches frites avec un
bescuit de brochereaulx.


XXIV. AUTRE DISNER DE POISSON.

Premier mets. Pois coulés, harenc, anguilles salées, civé d’oïttres
noir, un brouet d’amandes, tieule, un bouly de brochets et d’anguilles,
une cretonnée, un brouet vert d’anguilles, pastés d’argent.

Second mets. Poisson de mer, poisson doulx, pastés de bresmes et de
saumon, anguilles renversées, une arboulastre brune, tanches à un bouly
lardé, un blanc mengier, crespes, lettues, losenges, orillettes et
pastés norrois, lux et saumon farcis.

Tiers mets. Fromentée au pourpois[699], doreures de pommeaulx et de
pets d’Espaigne et de chastellier, rost de poisson, gelée, lamproies,
congres et turbot à la sausse vert, bresmes au vert jus, leschefroies,
darioles et l’entremès: puis Desserte, l’Issue et le Boutehors.


CY APRÈS S’ENSUIVENT AUCUNS INCIDENS SERVANS AUQUES[700] A
CE PROPOS.

_Primo_, L’appareil que fist faire M. de Laigny[701] pour un disner
qu’il fist à Monseigneur de Paris, le président, procureur et advocas
du Roy et son autre conseil[702], montans à huit escuelles[703].

_Primo_, appareil de draps à tendre, vaisselle de sale et de cuisine,
may, herbe vert à mettre sur table, aiguières et hanaps à pié, deux
dragouers, salières d’argent, pain de deux jours pour chappeler et pour
tranchouers. Pour cuisine: deux grans paelles, deux cuviers à eaue et
deux balais.

_Nota_ que Monsr. de Paris ot trois escuiers de ses gens pour luy
servir, et fut servi seul et à couvert[704]. Et Monsr. le Président,
un escuier, et fut servi seul et non couvert. _Item_, par le dit de
Monsr. le président, le procureur du Roy fut audessus de l’advocat
du Roy.

Les assietes et mès s’ensuivent: Garnache deux quartes, c’est à deux
personnes une chopine[705], mais c’est sur le trop, car il souffist
à trois une chopine et que les seconds en aient. Eschaudés chaulx,
pommes de rouvel rosties et dragée blanche dessus, un quarteron: figues
grasses rosties, cinq quarterons: soret et cresson, rommarin.

Potages, c’est assavoir salemine de six becquets et six tanches, poirée
vert, et harenc blanc, un quarteron: six anguilles d’eaue doulce salées
d’un jour devant et trois mellus trempés d’une nuit devant.

Pour les potages: amandes, six livres; pouldre de gingembre, demie
livre; saffren, demie once; menues espices, deux onces; pouldre de
canelle, un quarteron; dragée, demie livre.

Poisson de mer: soles, gournaulx, congres, turbot, saumon. Poisson
d’eaue doulce: lux faudis[706], deux carpes de Marne[707] faudisses,
bresme.

Entremès: plays, lemproie à la boe. Rost: et convient autres touailles
et seize[708] pommes d’orenge, marsouin à sa sausse, maquereaux, soles,
bresmes, aloses à la cameline ou au vertjus, ris et amandes frictes
dessus; succre pour ris et pour pommes, une livre; petites serviettes.

Pour desserte: composte, et dragée blanche et vermeille mise
par-dessus: rissoles, flaonnés, figues, dates, raisins, avelaines.

Ypocras et le mestier sont l’issue. Ypocras deux quartes, et est le
surplus comme dit est dessus de Garnache[709], oublies deux cens et les
supplications[710]. Et _nota_, pour chascune escuelle l’en prent huit
oublies et quatre supplications et quatre estriers, et est largement;
et coustent huit deniers pour escuelle.

Vin et espices sont le Boute-hors. Au laver, grâces et aler en la
chambre de parement; et lors les servans disnent, et assez tost après
vin et espices[711]; et puis congié.

       *       *       *       *       *

L’ordenance des nopces que fera maistre Helye en May, à un mardy;
disner seulement pour vint escuelles.

Assiette: beurre, rien, pour ce qu’il est jour de char. _Item_,
cerises, rien, pour ce que nulles n’en estoient trouvées; et pour ce
assiette nulle.

Potages: chapons au blanc mengier, grenade et dragée vermeille
par-dessus.

Rost: en chascun plat un quartier de chevrel: quartier de chevrel est
meilleur que aignel; un oison, deux poucins et sausses à ce; orenges,
cameline, vertjus, et à ce fraîches touailles ou serviettes.

Entremès: gelée d’escrevices, de loches, lapereaux et cochon. Desserte:
froumentée et venoison. Yssue: ypocras et le mestier. Boute-hors: vin
et espices.

L’ordonnance du souper que fera ce jour est telle pour dix escuelles.

Froide sauge de moitiés de poucins, de petites oés, et vinaigrette
de ce mesmes mets pour icelluy soupper en un plat. Un pasté de deux
lappereaulx et deux flaons (jasoit-ce que aucuns dient que à nopces
franches convient darrioles), et en l’autre plat la frase de chevreaulx
et les demies testes dorées.

Entremets: gelée comme dessus. Issue: pommes et fromage sans ypocras,
car il est hors de saison[712].

Dancer, chanter, vin et espices et torches à alumer.

Or convient[713] la quantité des choses dessus dictes et leurs
appartenances et le pris d’icelles, et qui les pourverra[714] et
marchandera.

Au boulengier, dix douzaines de blanc pain plat cuit d’un jour devant
et de un denier pièce[715].

Pain de tranchouers, trois douzaines de demi pié d’ample et quatre dois
de large de haut, cuit de quatre jours devant et sera brun, ou qu’il
soit pris ès halles pain de Corbueil[716].

Eschançonnerie: trois paires de vins.

Au bouchier, demy mouton pour faire la souppe aux compaignons et un
quartier de lart pour larder; le maistre os d’un trumeau de beuf pour
cuire avecques les chapons pour avoir le chaudeau à faire le blanc
mengier; un quartier de veel devant pour servir au blanc mengier. Les
seconds[717], un trumel de veel derrière ou des piés de veel, pour
avoir l’eaue pour la gelée. Venoison[718], un pié en quarreure.

A l’oubloier convient ordonner: _primo_, pour le service de la pucelle,
douzaine et demie de gauffres fourrées[719], trois sols; douzaine et
demie de gros bastons, six sols; douzaine et demie de portes[720],
dix-huit deniers; douzaine et demie d’estriers, dix-huit deniers; un
cent de galettes succrées, huit deniers.

_Item_, fut marchandé à luy pour vint escuelles, pour le jour des
nopces au disner, et six escuelles pour les serviteurs, qu’il aura six
deniers pour escuelle, et servira chascune escuelle de huit oublies,
quatre supplications et quatre estriers.

Au poullaillier, vint chappons, deux sols parisis la pièce; cinq
chevriaulx, quatre sols parisis; vint oisons, trois sols parisis
pièce; cincquante poucins, douze deniers parisis pièce; c’est assavoir
quarante rostis pour le disner, cinq pour la gelée et cinq au souper
pour froide sauge. Cincquante lappereaux, c’est assavoir quarante pour
le disner, lesquels seront en rost, et dix pour la gelée, et cousteront
douze deniers parisis chascun. Un maigre cochon, pour la gelée, quatre
sols parisis; douze paires de pigons pour le soupper, dix deniers
parisis la paire.--A luy convient enquérir de la venoison.

Es halles, pain pour tranchouers, trois douzaines. Pommes grenades pour
blanc mengier, trois qui cousteront.... Pommes d’orenges, cincquante
qui cousteront[721].... Six frommages nouveaulx et un vieil, et trois
cens œufs.

Est assavoir que chascun fromage doit fournir six tartelettes, et
aussi pour chascun fromage convient trois œufs.

Ozeille pour faire vertjus pour les poucins, sauge et percil pour faire
la froide sauge, deux cens pommes de blandureau.

Deux balais et une pele pour la cuisine, et du sel[722].

Au saussier, trois chopines de cameline pour disner et souper et une
quarte de vertjus d’ozeille.

A l’espicier: dix livres d’amande, quatorze deniers la livre.--Trois
livres fourment mondé[723], huit deniers la livre.--Une livre pouldre
de gingembre-coulombin, onze sols.--Un quarteron gingembre-mesche,
cinq sols[724].--Demie livre canelle batue, cinq sols.--Deux livres
ris batus, deux sols.--Deux livres succre en pierre, seize sols.--Une
once de saffren, trois sols.--Un quarteron clou[725] et graine entre,
six sols.--Demi quarteron poivre long, quatre sols.--Demi quarteron
garingal[726], cinq sols.--Demi quarteron macis[727], trois sols quatre
deniers.--Demi quarteron feuille lorier vert, six deniers.--Deux livres
bougie grosse et menue, trois sols quatre deniers la livre, valent six
sols huit deniers.--Torches de trois livres la pièce, six; flambeaux de
une livre la pièce, six; c’est assavoir trois sols la livre à l’achat,
et la reprise six deniers moins pour la livre[728].

A luy espices de chambre[729], c’est assavoir orengat, une livre, dix
sols.--Chitron[730], une livre, douze sols.--Anis vermeil, une livre,
huit sols.--Succre rosat[731], une livre, dix sols.--Dragée blanche,
trois livres, dix sols la livre.--A luy hypocras, trois quartes, dix
sols la quarte, et querra tout.

Somme que ceste espicerie monta à douze francs, à compter ce qui fut
ars des torches[732], et petit demoura d’espices; ainsi peut estre pris
demi franc pour escuelle[733].

A la Pierre-au-Lait[734], un sextier de bon lait non esburré et sans
eaue, pour faire la froumentée.

En Grève[735], un cent de costerez de Bourgongne, treize sols; deux
sacs de charbon, dix sols.

A la Porte-de-Paris[736]: may, herbe vert, violette, chappeaulx, un
quart de sel blanc, un quart de sel gros, un cent d’escrevices, une
chopine de loche, deux pots de terre, l’un d’un sextier pour la gelée,
et l’autre de deux quartes pour la cameline.

Or avons _primo_ le service en général, et secondement où les matières
seront trouvées: or convient, tiercement, trouver sur ce administreurs
et officiers.

_Primo_, convient un clerc ou varlet qui fera finance d’erbe vert,
violette, chapeaulx, lait, fromages, œufs, busche, charbon, sel, cuves
et cuviers tant pour sale que pour garde-mengiers, vertjus, vinaigre,
ozeille, sauge, percil, aulx nouveaulx, deux balais, une pesle et
telles menues choses.

_Item_, un queux et ses varlets qui cousteront deux francs de loyer,
sans les autres drois, mais le queux paiera varlets et portages, et
dient: _à plus d’escuelles, plus de loyer_.

_Item_, deux porte-chappes[737], dont l’un chappelera pain et fera
tranchouers et sallieres de pain, et porteront et le sel et le pain
et tranchouers aux tables, et fineront pour la sale de deux ou trois
couloueres pour gecter le gros relief[738] comme souppes, pain trenché
ou brisié, tranchouers, chars et telles choses: et deux seaulx pour
gecter et recueillir brouets, sausses et choses coulans[739].

_Item_, convient un ou deux porteurs d’eaue. _Item_, sergens grans et
fors à garder l’uis.

_Item_, deux escuiers de cuisine et deux aides avec eulx pour le
dressouer de cuisine, desquels l’un ira marchander de l’office de
cuisine, de paticerie et du linge pour six tables; ausquelles convient
deux grans pos de cuivre pour vint escuelles, deux chaudières, quatre
couloueres, un mortier et un pestail[740], six grosses nappes pour
cuisine, trois grans pos de terre à vin, un grant pot de terre pour
potage, quatre jattes et quatre cuillers de bois, une paelle de fer,
quatre grans paelles à ance, deux trépiers et une cuillier de fer.
Et aussi marchandera de la vaisselle d’estain: c’est assavoir dix
douzaines d’escuelles, six douzaines de petits plas, deux douzaines et
demie de grans plas, huit quartes, deux douzaines de pintes, deux pos à
aumosne[741].

_Item_, que[742] l’ostel; sur quoy est assavoir que l’ostel de
Beauvais[743] cousta à Jehan du Chesne[744] quatre francs; tables,
tresteaulx, fourmes _et similia_, cinq francs; et la chappellerie luy
cousta quinze francs.

Et l’autre escuier de cuisine ou son aide ira avecques le queux vers le
bouchier, vers le poullaillier, l’espicier, etc., marchander, choisir
et faire apporter, et paier portages; et auront une huche fermant à
clef où seront les espices, etc., et tout distribueront par raison et
mesure. Et après ce, eulx ou leurs aides retrairont et mettront en
garde le surplus en corbeillons et corbeilles,[745] en huche fermant
pour eschever le gast et excès des mesnies.

Deux autres escuiers convient pour le dressouer de sale, qui livreront
cuilliers et les recouvreront: livreront hanaps, et verseront tel
vin comme chascun leur demandera pour ceulx qui seront à table, et
recouvreront la vaisselle[746].

Deux autres escuiers pour l’eschançonnerie, lesquels livreront vin pour
porter au dressouer, aux tables et ailleurs; et auront un varlet qui
traiera le vin.

Deux des plus honnestes et mieulx savans[747], qui compaigneront
tousjours le marié et avec luy yront devant les mets.

Deux maistres d’ostel pour faire lever[748] et ordener l’assiette des
personnes[749], un asséeur et deux serviteurs pour chascune table,
qui serviront et desserviront: getteront le relief ès corbeilles, les
sausses et brouets ès seilles ou cuviers, et retrairont et apporteront
la desserte des mets aux escuiers de cuisine ou autres qui seront
ordonnés à la sauver, et ne porteront riens ailleurs.

L’office du maistre d’ostel est de pourveoir des salières pour la
grant table; hanaps, quatre douzaines; gobelets couvers dorés, quatre;
aiguières, six; cuilliers d’argent, quatre douzaines; quartes d’argent,
quatre; pos à aumosne, deux; dragouers, deux.

Une chappelière[750] qui livrera chappeaulx le jour du regard[751] et
le jour des nopces.

L’office des femmes est de faire provision de tapisseries, de ordonner
à les tendre, et par espécial la chambre parer et le lit qui sera
benoist[752].

Lavendière pour tressier[753].

Et _nota_ que se le lit est couvert de drap, il convient penne de menu
vair: mais s’il est couvert de sarge, de broderie, ou couste-pointe de
cendail, non.

       *       *       *       *       *

L’ordonnance pour les nopces Hautecourt[754], pour vint escuelles, ou
mois de Septembre:

Assiette: roisins et pesches ou petis pastés.

Potages: civé, quatre lièvres et veau; ou pour blanc mengier vint
chappons, deux sols quatre deniers pièce, ou poules.

Rost: cinq cochons, vint hétoudeaux, deux sols quatre deniers pièce;
quarante perdriaux, deux sols quatre deniers pièce. Mortereul
ou[755]...

Gelée: dix poucins, douze deniers; dix lappereaulx, un cochon;
escrevices, un cent et demy.

Fromentée, venoison, poires et noix. _Nota_ que pour la fromentée
convendra trois cens œufs.

Tartelettes et autres choses, ypocras et le mestier, vin et espices.

Souper.--Gravé de douze douzaines d’oiselets ou de dix canets, ou
bouly lardé de venoison fresche. Pastés de quarante lappereaulx, vint
poucins, quarante pigons; quarante darioles ou soixante tartelettes.

_Nota_ que trois oiselets en une escuelle, c’est assez; toutesvoies
quant l’en a jugiers[756] de chappons _vel similia_, l’en met trois
oiselès et demi jugier avec, en l’escuelle.


LA QUANTITÉ DES CHOSES DESSUS-DICTES.

Au boulengier, _ut supra_ ès autres nopces précédens.

Au pasticier, _ut supra_.

Eschançonnerie, _ut supra_.

Au bouchier, trois quartiers de mouton pour faire les souppes aux
compaignons, un quartier de lart pour larder, un quartier de veel de
devant pour le blanc mengier; pour les servans, venoison.

A l’oubloier, douzaine et demie de gauffres fourrées faites, c’est
assavoir de fleur de farine pettrie aux œufs et des leches de frommage
mises dedens, et dix-huit autres gauffres pettries aux œufs et sans
fromage. _Item_, douzaine et demie de gros bastons, c’est assavoir
farine pettrie aux œufs et pouldre de gingembre batue ensemble et mis
en la fourme, et aussi gros comme une andoulle: et lors mettre entre
deux fers sur le feu. _Item_, douzaine et demie d’autres bastons et
autant de portes.

_Item_, convient au dit regard envoier (oultre le fait dudit oubloier)
cinquante pommes de blandureau, les chappeaulx et les ménestriers.

_Item_, audit oubloier, le service du jour des nopces _ut supra_ ès
nopces précédens.

Au poullaillier, les rots et la volaille et venoison _ut supra_.

Ès halles et à la Porte-de-Paris, les choses appartenans _ut supra_.

Au saussier, une quarte de cameline pour le disner, et à soupper deux
quartes de moustarde.

A l’espicier, espices de chambre: dragée, succre rosat, noisettes
confites, chitron et _manus-christi_[757], quatre livres pour tout.
_Item_, ypocras. Espices de cuisine: poudre blanche, une livre; poudre
fine, demie livre; poudre de canelle, demie livre pour blanc mengier.
Menues espices, deux onces. Succre en pierre, trois livres; trois
pommes grenades; dragée blanche et vermeille, demie livre; amandes, six
livres; fleur de ris, une livre; un quart de froment mondé.

Au cirier furent prinses torches et flambeaux à trois sols la livre,
et à deux sols six deniers de reprinse.

_Item_, pour louage de linge, c’est assavoir pour six tables, trois
grans pos de cuivre, pour seize douzaines d’escuelles, deux chaudières,
deux[758] couloueres, un mortier, un pestail, six grosses nappes pour
cuisine, trois grans pos de terre à vin, un grant pot de terre pour
potage, quatre jattes, quatre cuilliers de bois, une paelle de fer,
quatre grans paelles à ance, deux trépiés et une cuillier de fer
percée; pour ce, cinquante-six sols parisis.

Vaisselle d’estain: dix douzaines d’escuelles, six douzaines de petis
plas, deux douzaines et demie de grans plas, huit quartes, deux
douzaines de pintes, deux pos à aumosne; pour tout ce, seize sols.

En Grève, _ut supra_ ès autres nopces.

_Nota_ que pour ce qu’ils[759] estoient vefves, ils espousèrent bien
matin en leurs robes noires et puis se vestirent d’autres.

_Nota_ des mises extraordinaires pour les nopces Jehan du Chesne. Au
queux quatre francs et demi, et aides et portages, un franc: pour
tout, cinq francs et demi. Au concierge de Beauvais, quatre francs:
pour tables tréteaulx _et similia_, cinq francs. A la chappellière,
quinze frans. Eaue, vint sols. Menestrels huit francs, sans les
cuillers et autres courtoisies[760]; et feront le regart[761] et les
acrebades[762]. Sergens deux frans. Herbe vert, huit sols. Flambeaux et
torches, dix frans. Vaisselle de cuisine, nappes, touailles et voirres,
sept frans. Pots d’estain, quatre frans.



DE LA DEUXIÈME DISTINCTION

LE QUINT ARTICLE

     QUI PARLE DE COMMANDER, DEVISER ET FAIRE FAIRE TOUTES MANIÈRES DE
     POTAIGES, CIVÉS, SAULSES ET TOUTES AUTRES VIANDES.


Or convient maintenant monstrer des appareils des viandes dessus
nommées, mais, _primo_, te convient savoir aucuns termes généraulx
lesquels tu pourras recueillir plus largement par aucunes additions qui
sont çà et là parmi ce livre, c’est assavoir des lieures des potages,
comme de pain, d’œufs, d’amidon, de fleur[763], etc., et par tous les
potages lians.

_Item_, pour garder que ton potage ne s’aourse, tu le dois remuer ou
fons du pot et regarder que les tisons ne touchent au fons, et s’il est
jà commencé à aourser, tu le dois tantost changier en un autre pot[764].

_Item_, de lait garder de tourner.

_Item_, que le pot ne s’envoise de dessus le feu.

Ès potaiges, l’en doit mettre les espices très bien broiées et non
coulées, et au plus tart. Ès sausses et en gelée _secus_[765].

Congnoistre espices, comme devant le quint article[766].

_Item_, POUR PORS TUER.--L’en dit que l’en doit tuer les
masles ès mois de Novembre, et les fumelles en Décembre; et ainsi est
leur saison, à l’exemple que l’en dit: _géline de Février_.

_Item_, pour faire boudins, aiez le sang du porc recueilli en un bel
bacin ou paelle, et quant vous aurez entendu à vostre pourcel veoir
deffaire, et fait laver très bien et mis cuire vostre froissure, et
tandis qu’elle cuira, ostez du fons du bacin les coles du sang et
gettez hors; et après, aiez oignons pelés et mincés jusques à la
montance de la moitié du sang, avec la montance de la moitié de la
gresse qui est entre les boyaulx, que l’on appelle l’entrecerelle[767]
des boyaulx, mincée menue comme dés, ensemble un petit de sel broyé, et
gettez ou sang. Puis, aiez gingembre, clou, et pou de poivre, et broiez
tout ensemble. Puis, aiez les menus boyaulx bien lavés, renversés et
essangés[768] en rivière courant, et pour oster la freschumée[769],
aiez-les mis en une paelle sur le feu, et remuez; puis, mettez sel
avec; et faites seconde fois, et encores troisième fois: et puis lavez,
et après renversez et les lavez, puis mettez essuier sur une touaille;
et les pousser et estraindre[770] pour seicher. (L’en dit l’entrecerele
et sont les gras boiaulx qui ont gresse dedens que l’en arrache à
un coustel). Après ce que vous aurez mis et adjousté par esgales
portions et quantités, pour autant de sang moitié d’oignons, et pour
autant de sang, au quart de gresse, et puis quant vos boudins seront
de ce emplis, faites-les cuire en une paelle en l’eaue de froissure,
et picquiez d’une espingle quant ils s’enflent, ou autrement ils
crèveroient.

_Nota_ que le sang se garde bien deux jours, voire trois, puis que les
espices sont dedens. Et aucuns pour espices, ont poulieul[771], grant
sarriette, ysope, marjolaine, queullis[772] quant ils sont en fleur et
puis séchés, pilés, pour espices. Et quant à la froissure, mettez-la en
un pot de cuivre pour cuire au feu, tout entière et sans sel, et mettez
le long de la gorge dehors le pot, car par la froissure s’escumera; et
quant elle sera cuite, si l’ostez et pour faire le potage la regardez.

Pour faire boudins de foie, prenez deux morceaulx de foie, deux
morceaulx de mol, un morcel de gresse, et mettez en un bouel[773]
avecques du sang: et au surplus comme dessus.

_Nota_ que l’en fait bien boudins du sang d’une oé[774], mais qu’elle
soit maigre, car de la maigre les boyaulx sont plus larges que de la
grasse.

_Quæritur_[775] comment les boyaulx seront renversés pour laver;
_responsio_: à un fil de lin et un fil d’archal long comme la verge
d’un jaugeur.

_Nota_ que aucuns pendent en Pasquerés[776] leurs pourceaulx, et
l’air les jaunist; et pour ce les vault mieulx tenir ou salouer comme
ils font en Picardie, combien que la char n’en soit pas si ferme, ce
semble; toutesvoies est-ce trop plus bel service du lart qui est bel et
blanc que du jaune, car quelque bonté qu’il ait ou jaune, il est trop
reprouchié et donne descouragement quant l’en le voit[777].

Pour faire andoulles.--_Nota_ que les andoulles sont faictes du boiau
culier et autres boyaulx gros, lesquels gros sont remplis des autres
pour faire saucisses; et iceulx boyaulx menus, quant l’en les veult
mettre ès andoulles, sont fendus au long en quatre parties. _Item_,
de la pance qui est fendue par lesches, fait-l’en andoulles; _item_,
de la char qui est dessoubs les costelettes; _item_ des fagoés et
autres choses qui sont entour la haste-menue, quant l’en ne veult
point retenir celle haste-menue entière.--Mais premièrement, iceulx
boyaulx sont deffreschumés en la paelle avec du sel, deux ou trois
fois, comme dessus est dit des boyaulx pour boudins. Et les autres
choses dessus-dictes, dont le dit boyau culier et autres dont l’en
fait andouilles doivent estre remplis, seront premièrement plungiés et
pouldrés de la pouldre de poivre demie once, et du fanoil un sixain,
broiés avec un petit de sel et attrempéement mis, tout broié menu,
avec les espices; et quant icelles andoulles sont ainsi ensachées et
emplies, l’en les porte saler avec le lart et dessus le lart.

Costelettes de fresche saleure, rosties sur le gril.

Eschinées et jambons salés de trois jours naturels, aux pois.

_Nota_ que se un jambon est salé de longue saleure comme d’un mois,
il convient dès le soir devant le mettre tremper en eaue froide, et
l’endemain rere[778] et laver en eaue chaude pour mettre cuire, ou
mettre cuire _primo_ en eaue et en vin, et gecter ceste première
boulure, et puis cuire en autre eaue.

Cy après s’ensuivent tous les noms particuliers qui sont ès yssues d’un
porc, qui sont vendues à la tripperie sept blans.

_Primo_, quant le porc est décoré[779], le sang et les coles yssent
premièrement, et en fait-l’en boudins qui veult. _Item_ et en la
froissure sont et appartiennent 1º en sain; 2º la haste-menue; 3º le
chaudun[780].

Le sain est le sain qui est entre les boyaulx et la haste-menue.
La froisseure, c’est le foie, le mol, le cuer et la langue. La
haste-menue, c’est la rate: et à icelle tient bien la moitié du foie
et les rongnons; et l’autre moitié du foie tient à la froissure,
entre le mol et le cuer. Le chaudun, ce sont les boyaulx que l’en dit
l’entrecerele des boyaulx, et aussi sont-ce les boyaulx menus dont l’en
fait boudins et saucisses, et aussi en est la pance.

Ès yssues du mouton a la froissure à laquelle sont la panse et
la caillette, les quatre piés et la teste; et couste tout, deux
parisis[781] à la tripperie.

Les yssues du veel coustent à la triperie, deux blans, c’est assavoir
la froissure, et y a la teste et la fraze et la pance et les quatre
piés.

_Nota_, la fraze[782] c’est la caillette, la pance et les boyaulx,
lesquels les tripiers vendent tous nettoiés, lavés et appareillés,
trempans en belle eaue nette; mais ceulx qui les achettent ne
s’attendent pas aux tripiers de leur appareil, mais les lavent en deux
ou en trois paires d’eaues chaudes, et les eschaudument de nouvel avec
du sel; et puis mettre cuire en eaue sans sel, tant que toute icelle
soit beue, puis nourrir d’eaue de mouton, et mettre des herbes, de
l’eaue, et du saffran en un plat avecques la fraze, et mengier comme
trippes, au sel et au vertjus.

_Nota_, cy grant diversité de langage, car ce que l’en dit du porc
la fressure, c’est le foie, le mol et le cuer; et ce que l’en dit la
fressure de mouton, c’est la teste, la pance, la caillette et les
quatre piés; et ce que l’en dit la fressure d’un veel, c’est la teste,
la fraze, la pance et les quatre piés; et ce que l’en dit la fressure
d’un beuf, c’est la pance, le psaultier, la franche-mule, la rate, le
mol et le foie et les quatre piés; et de venoison, autrement et par
autres noms. (_Quæritur_[783] la cause de ceste diversité sur ce seul
mot fressure.)

VENOISON DE CERF OU AUTRE.--Qui la veult saler en esté, la
convient saler en cuvier ou baignoire[784], gros sel broié, et après
séchier au soleil. Seimier[785] _id est_ le coyer, qui est salé, l’en
le doit cuire en la première eaue et vin pour le premier boullon pour
oster son sel: et puis getter eaue et vin, et après mettre parcuire en
boullon de char et des navès, et servir par lesches avec de l’eaue en
un plat et venoison.

_Item_, qui a navès jeunes et petis, l’en la doit cuire en eaue et sans
vin pour le premier boullon, puis getter l’eaue, et puis parcuire en
eaue et vin et des chateingnes dedens, ou qui n’a chateingnes, de la
sauge: puis servir comme dessus.

En Juin et en Juillet, beuf et mouton salé par pièces est bien cuit à
l’eaue et aux ciboulles; salé du matin au vespre ou d’un jour au plus.

       *       *       *       *       *

Les bouchiers de Paris[786] tiennent que en un beuf, selon leur stile
et leur parler, n’a que quatre membres principaulx: c’est assavoir les
deux espaules, les deux cuisses, et le corps de devant tout au long,
et le corps de derrière tout au long. Car les espaules et les cuisses
levées, l’en fent le beuf par les deux costés et fait-l’en du devant
une pièce, et du derrière une autre; et ainsi est apporté le corps du
beuf à l’estal, se le beuf est petit ou moïen: mais s’il est grant, la
pièce de devant est fendue depuis en deux tout au long, et la pièce
de derrière aussi, pour apporter plus aisiéement. Ainsi avons-nous
maintenant du beuf six pièces, dont les deux poictrines sont levées
au premier, et puis les deux souppis qui là tiennent qui sont bien de
trois piés de long et demy-pié de large, eu venant par en bas et non
pas par en hault. Et puis couppe-l’en le flanchet: et puis si a la
surlonge qui n’est mie grantment plus espais de trois dois[787] ou
de deux. Puis, si a la longe qui est au plus près de l’eschine, qui
est espoisse d’une grosse poignée; puis si a le filet que l’en appelle
le nomblet, qui est bien d’un pié de long et non plus; et tient l’un
bout au col et l’autre au rongnon, et est du droit de celluy qui tient
les piés des beufs à l’escorcher, et le vent à un petit estal qui est
au-dessous[788] de la grant Boucherie; et est de petite valeur.

_Item_, selon ce que les beufs sont grans, l’en fait et vent à la
Porte[789] plus de pièces de l’un des membres devisés que de l’autre.
Si ne sçay comment la taille des bourgois[790] se peut proportionner
en compte justement avec les bouchiers, car le bon beuf couste vingt
livres où l’autre ne couste que douze[791].

_Item_, les yssues du beuf coustent à la triperie huit sous: c’est
assavoir la fressure en laquelle sont la pance, le saultier[792], la
franche mule[793], la rate, le mol[794], le foie et les quatre piés.

_Item_, à Besiers, depuis la Saint-Andry[795] qui est devant Noël, l’en
sale les moutons par quartiers, par bien frotter de sel et refrotter,
et tant et tant, et puis mettre les quartiers l’un sur l’autre huit
jours, et puis mettre à la cheminée.

Se tu veulx saler char de beuf ou de mouton en yver, aies de gros sel
et le sèche en la paelle très-bien, puis le broies bien menu, et sales.

Et _nota_ que en Juin et Juillet mouton veult estre trempé, puis salé.

LANGUE DE BEUF SALÉE. En la saison qu’il fait bon saler,
prenez des langues de beuf une quantité et les parboulez un petit, puis
les réez et pelez, puis les salez l’une sur l’autre, et les laissiez
en sel huit ou dix jours, puis les pendez à la cheminée, le remenant
de l’iver: puis les pendez en un lieu sec, un an ou deux ou trois ou
quatre.

OÉ doit estre salée de trois jours naturels.

FOUQUES salées de deux jours sont bonnes aux choux.

COULONS RAMIERS aussi; _nota_ que ils viennent de trois ans en
trois ans.

Se un lièvre est pris quinze jours ou trois sepmaines devant Pasques,
ou en autre temps que l’en le vueille garder, effondrez-le et lui ostez
les entrailles, puis luy fendez la pel[796] de la teste et luy rompez
et cassez, et faictes une ouverture ou test et ostez la cervelle et
emplez le creux de sel et recousez la pel; il se gardera un mois s’il
est pendu par les oreilles.

_Nota_ que un des meilleurs morceaulx ou pièces de dessus le beuf, soit
à rostir ou cuire en l’eaue, c’est le noyau du beuf; et _nota_ que
le noyau du beuf est la pièce après le col et les espaules. Et aussi
icelle pièce est souverainement bonne tranchée par lesches, mise en
pasté; et quant le pasté est cuit, gettez dedens sausse de lamproye.

ANGUILLE. Faictes-la mourir en sel et la laissiez illec trois
jours naturels toute entière, puis soit eschaudée, osté le limon,
tranchée par tronçons, cuite en l’eaue et aux ciboules. Et se vous
la voulez saler du vespre au matin, estuviez-la et effondrez, puis
tranchiez par tronçons, et salez et frottez très-bien chascun tronçon
en fort sel; et se vous la voulez plus avancer, broyez du sel et
frottez chascune couppure de tronçon et la hochez en sel entre deux
escuelles. Cuite comme dessus et mengée à la moustarde.

HARENC QUAQUE soit mis en eaue fresche et laissié trois jours
et trois nuis tremper en foison d’icelle eaue, et au bout de trois
jours soit lavé et mis en autre eaue fresche deux jours tremper, et
chascun jour changier son eaue deux fois. Et toutesvoies le menu et
petit harenc veult moins tremper, et aussi est d’aucun harenc qui de sa
nature veult moins tremper l’un que l’autre.

HARENC SOR. L’en congnoist le bon à ce qu’il est meigre et a
le dos espois, ront et vert; et l’autre est gras et jaune ou a le dos
plat et sec.


POTAGES COMMUNS SANS ESPICES ET NON LIANS.

Et primò POTAGE DE POIS VIELZ.--Convient eslire[797], et
savoir aux gens du lieu la nature des pois d’icelluy lieu, (car
communément les pois ne cuisent pas bien d’eaue de puis: et en aucuns
lieux ils cuisent bien d’eaue de fontaine et d’eaue de rivière,
comme à Paris, et en autres lieux, ils ne cuisent point d’eaue de
fontaine[798], comme à Bésiers) et ce sceu, il les convient laver en
une paelle avec de l’eaue tiède, puis mettre en un pot et de l’eaue
tiède avec au feu, et faire boulir tant qu’ils soient bayens[799]. Puis
purer[800] la purée et la mettre à part, puis emplir le pot aux pois
d’eaue tiède et mettre au feu et les repurer secondement, qui veult
avoir plus largement purée: et puis remettre sans eaue, car ils en
gecteront assez et bouldront en icelle; et ne convient point mettre la
cuillier dedens le pot puis qu’ils sont purés, mais hocher le pot et
les pois ensemble, et petit à petit les paistre de l’eaue tiède ou plus
chaude que tiède et non de la froide, et faire boulir et cuire du tout
avant que tu y mettes quelque chose que eaue chaude soit de la char ou
autre: ne n’y met sel, ne lart, ne affaitement quelsconques jusques à
ce qu’ils soient tous cuis. De l’eaue du lart y pues tu bien mettre et
de l’eaue de la char, mais l’en n’y doit point mettre de sel, non mie
bouter la cuillier, jusques à ce qu’ils soient bien cuis; toutesvoies,
l’en les peut bien remuer à tout le pot.

A jour de char, l’en doit, après ce qu’ils sont purés, paistre de
l’eau du lart et de la char, et quant ils seront presque cuis, l’en
peut mettre le lart dedens; et quant l’en trait le lart d’iceulx pois,
l’en le doit laver de l’eaue de la char, afin qu’il en soit plus bel à
mettre par lesches sur la char, et qu’il n’appere point crotté de pois.

A jour de poisson, quant les pois sont cuis, l’en doit avoir oignons
qui aient autant cuit comme les pois en un pot et le lart en autre
pot[801], et[802] que de l’eaue du lart l’en paist et sert les pois,
tout ainsi, à jour de poisson, quant l’en a mis ses pois au feu en
un pot, l’en doit mettre à part ses ongnons mincés[803] en un autre
pot, et de l’eaue des oignons servir et mettre dedens les pois en
paissant; et quant tout ce est cuit, frire les oignons et en mettre la
moictié ès pois, et l’autre en la purée dont il sera parlé cy-après,
et lors mettre du sel. Et se à ce jour de poisson ou en karesme il y a
craspois[804], l’en doit faire des craspois comme de lart en jour de
char.

Quant est de pois nouveaulx, aucunes fois ils sont cuis à jour de char
et à l’eaue de char et du percil broié, pour faire potage vert, et
c’est à jour de char; et à jour de poisson, l’en les cuit au lait, du
gingembre et du saffran dedens; et aucunes fois à la cretonnée dont il
sera parlé cy-après.

De tous iceulx pois, soient viels, soient nouveaulx, l’en en peut faire
de coulés en un buletel[805], estamine[806] ou sacs[807]; mais les
vielz pois, l’en les doit jaunir de saffran broyé dont l’eaue soit mise
boulir avec les pois et le saffran avec la purée.

Autres pois y a qui sont en cosse avec du lart dedans.

_Item_, cretonnée de pois nouveaulx, trouverez vous ou chappitre
ensuivant.

De purée à jour de char l’en ne tient compte. A jour de poisson et en
karesme, l’en frit les oignons dont cy-dessus ou chappitre précédent
est parlé, et puis l’uille en quoy les oignons sont fris et iceulx
oignons l’en met dedans[808] avec chappeleures de pain, gingembre, clo
et graine broiés: et deffait de vinaigre et vin, et y met-l’en un petit
de saffren, puis dressiez souppes[809] en l’escuelle.

_Item_, de purée fait l’en civé[810] à jour de poisson. Si ne le remue
point et l’oste tantost de dessus le feu, etc.[811]

_Item_, de purée aliez[812] vostre porée de bettes et sera très-bon
potage, mais que vous n’y mettez point d’autre eaue; et est pour porée
de karesme[813].

_Nota_ que si tost que tu apparcevras que ton potage s’aoursera, si
le fay plus cler, car il s’aourse d’estre trop espois; et le remue
tousjours ou fons du pot qui aura esté aoursé, avant que tu y mettes
riens plus.

Véez-cy comment l’en cuit les oignons: en l’eaue longuement avant les
pois, et tant que l’eaue soit toute dégastée au cuire; puis y met-l’en
de la purée pour les parcuire et oster la saveur de l’eaue.

Aussy les oïttres sont _primo_ lavées en eaue chaude, puis parboulies,
puis doivent estre parcuites en la purée afin que la saveur d’icelles
demeure en la purée, et non point escumées, puis oster les oïttres et
frire qui veult, et en mettre une partie ès escuelles, et de l’autre
partie font mès.

FÈVES vieilles qui sont pour cuire à toute l’escorce doivent
estre trempées et mises au feu en un pot dès le soir devant et toute
la nuit; puis getter celle eaue, et mettre cuire en une autre eaue,
puis les purer comme pois, pour oster celle première forte saveur, et
puis cuire à l’eaue de la char et au lart comme dit est devant à l’eaue
des pois, ou à jour de poisson à l’eaue doulce, et puis après mettre
de l’uile: ou à l’eaue des oignons et aux oignons. Et qui en veult de
coulés, fasse comme des pois.

_Item_, les fèves seront frasées en Pasquerés en ceste manière, c’est
assavoir qui en vouldra de frasées, il les convient eslire, laver, et
sans tremper mettre les fèves à toute l’escorce en un pot au feu en
eaue frémiant, et laissiez boulir jusques à ce que l’escorce soit ridée
et grédelié; et puis tiré arrière du feu, et puisié à une cuillier,
et les escorcher et fraser en leur chaleur, l’une cuillerée après
l’autre, et getter en eaue froide. Après ce, les convient laver en eaue
tiède comme les pois, puis les mettre cuire en eaue froide, et quant
elles seront boulies comme bayennes, les purer: et getter la purée, et
remplir de boullon de char se c’est à jour de char, ou d’autre eaue se
c’est à jour de poisson; à affaitier à l’uille et à l’oignon bien cuit,
puis frit: ou affaitié au beurre. Et pevent estre reverdies de fueilles
de fèves nouvelles broyées, deffaites d’eaue chaude et coulées; puis
faire comme des autres, soit à jour de char au lart, ou à jour de
poisson.

_Item_, cretonnée de fèves nouvelles se fait comme vous trouverez ou
chappitre ensuivant.

_Item_, qui veult en tous les mois de l’an mengier fèves sentans et
ayans saveur de fèves nouvelles, aiez et plantez chascun mois des
fèves, et de ce qui sera le plus tendre qui croistra dehors terre
prenez ainsi comme une pongnée, et broyez et mettez en vos fèves, et
vos fèves blanchiront et aront couleur et saveur de fèves nouvelles.

_Item_, fèves nouvelles doivent premièrement estre cuites jusques à
bayennes[814], puis purer, et après boulir dedens la purée grosses
souppes de deux dois d’espois et de pain brun, puis mettre en un
chascun[815] des fèves deux d’icelles souppes et du sel par-dessus.

_Item_, quant elles sont baiennes et purées, l’en les peut frire à
la gresse de la ribelette[816] puis mettre un petit de pouldre[817]
par-dessus.

L’en congnoist les fèves des marais à ce qu’elles sont plates, et
les fèves des champs sont rondes.--_Item_, à la dent l’en les treuve
doulces et l’escorce tendre, et les autres au contraire.

_Item_, qui veult fraser fèves nouvelles, il les convient premièrement
fendre au long au coustel, et quant tout est fendu, les peler à la main.

_Nota_ que en Aoust commence-l’en à mengier fèves et pois coulés à la
char salée; et _nota_ que un jambon de porc doit estre salé de trois
jours naturels, et lors est fin bon.

_Nota_ encores de fèves et de pois, que cretonnée de fèves et de pois
est ou chappitre des _Potages lians_.

PORÉE. Trois manières de porées sont selon le dit des queux
qui les nomment, l’une porée blanche, l’autre porée vert, l’autre porée
noire.

Porée blanche est dicte ainsi pour ce qu’elle est faite du blanc des
poireaux, à l’eschinée, à l’andoulle et au jambon, ès saisons d’automne
et d’iver, à jour de char; et sachez que nulle autre gresse que le porc
n’y est bonne. Et premièrement l’en eslit, lave, mince et esverde les
poreaux, c’est assavoir en esté, quant iceulx poreaux sont jeunes: mais
en yver, quant iceulx poreaux sont plus viels et plus durs, il les
convient pourboulir en lieu d’esverder, et se c’est à jour de poisson,
après ce que dit est, il les convient mettre en un pot avec de l’eaue
chaude et ainsi cuire, et aussi cuire des oignons mincés, puis frire
les oignons, et après frire iceulx poreaux avec les oignons qui jà sont
fris; puis mettre tout cuire en un pot et du lait de vache, se c’est en
charnage[818] et à jour de poisson; et se c’est en karesme, l’en y met
lait d’amandes. Et se c’est à jour de char, quant iceulx poreaux d’esté
sont esverdés, ou les poreaux d’iver pourboulis comme dit est, l’en
les met en un pot cuire en l’eaue des saleures, ou du porc et du lart
dedans.

_Nota_ que aucunesfois à poreaux, l’en fait lioison de pain.

_Item_, porée blanche de bettes se fait comme dessus en eaue de mouton
et beuf ensemble, mais non point de porc; et à jour de poisson, au lait
ou d’amandes ou de vache.

_Item_, DE CRESSON EN KARESME AU LAIT D’AMANDES. Prenez
votre cresson et le mettez pourboulir et une pongnée de bettes avec
des hachées, et les friolez en huille, puis la mettez boulir en lait
d’amandes; et en charnage, friolez au lart et au beurre tant qu’il
soit cuit[819], puis destrempez de l’eaue de la char; ou au frommage
et dressiez tantost, car il roussiroit. Toutesvoies, se l’en y met
percil, il ne doit point estre esverdé.

Une espèce de porée[820] que l’en dit espinars et ont plus longues
feuilles, plus gresles et plus vers que porée commune, et aussi l’en
appelle espinoches, et se menguent au commencement de karesme.

Nouvelle et première porée[821]. Eslisiez-le, et à eslire ostez les
grosses costes comme l’en fait des choulx, puis les mettez en eaue
frémiant sans mincer, et aiez en un pot eaue clere, ou purée, et du
sel, et mettez la porée dedens icelluy pot cuire, et puis dréciez et
mettez huille d’olive ou vertjus en l’escuelle, et n’y ait point de
percil.

Aucunes fois et le plus souvent l’en frit les espinars tous crus, et
quant ils sont bien fris, l’en met de l’eaue un petit, comme l’en fait
souppe à l’uille.

_Aliter_, porée de bettes nouvelles soit esverdée en esté quant elle
est jeune, ou pourboulie en yver quant elle est droite porée vieille,
selon la considération de sa vieillesse.

Porée de bettes qui est lavée, puis mincée et pourboulie, se tient plus
vert que celle qui premièrement est pourboulie et puis hachée. Mais
encores est plus verte et meilleur celle qui est esleue, puis lavée
et puis mincée bien menu, puis esverdée en eaue froide, puis changer
l’eaue et laissier tremper en autre eaue, puis espraindre par pelottes
et mettre au pot boulir ou boullon avec le lart et de l’eaue de mouton;
et quant elle a un petit bouli et l’en le veult drécier, que l’en mette
dedens du percil esleu, lavé et haché, et un petit de fanoul jeune, et
boulir un boullon seulement.

Tout considéré, la porée moins boulue et non pourboulie est la plus
vert, et le percil ne doit point estre boulu, se très-petit non, car en
boulant il pert sa saveur.

Porée verte à jour de poisson. Soit eslite, mincée, puis lavée en eaue
froide sans pourboulir, puis cuite au vertjus et pou d’eaue, et mettre
du sel, et soit drécée toute boulant bien espoisse sans cler, puis l’en
mettra dedens, au fons de l’escuelle, dessoubs la porée, du beurre salé
ou frais qui veult, ou frommage ou frommagée ou vertjus viel.

Porée de minces[822] est en saison, de Janvier jusques à Pasques, et
encore après.

Et _nota_ que à faire porée au lait d’amandes, le lait ne doit point
estre coulé par l’estamine; en aucuns autres potages ou à boire, si
fait.

Porée noire est celle qui est faite à la ribelette de lart; c’est
assavoir que la porée est esleue, lavée, puis mincée et esverdée en
eaue boulant, puis fritte en la gresse des lardons; et puis alaier[823]
d’eaue chaude frémiant (et dient aucuns, qui la laveroit d’eaue froide,
qu’elle seroit plus laide et noire), puis convient mettre sur chascune
escuelle deux lardons.

CHOULX sont de cinq manières: les meilleurs sont ceulx qui ont
esté férus de la gelée, et sont tendres et tost cuis; et en temps de
gelée ne les convient point pourboulir, et en temps pluyeux, si. (Et
commence à iceulx pour ce que ce sont de celle année les premiers crus,
_scilicet_ puis Avril[824], et puis va en descendant vers vendenges,
Nouel et Pasques.)

Choulx blanc sont en la fin d’Aoust.

Pommes de chou, sur la fin de vendenges. Et quant la pomme d’icelluy
chou, laquelle est ou milieu, est ostée, l’en arrache et replante en
terre nouvelle le tronc de ce chou, et en yssent larges feuilles qui
s’espandent: et tient un chou grant place, et l’en appelle iceulx
choulx nommés[825] choulx Rommains, et sont mengiés en yver; et des
troncs, se ils sont replantés, yssent de petits choulx que l’en appelle
minces, que l’en mengue avec les herbes crues en vinaigre; et qui en a
foison, ils sont bons esleus, lavés en eaue chaude, et tous entiers mis
cuire avec un petit d’eaue: et puis quant ils sont cuis, mettre du sel
et de l’uile, et dréciés bien espois sans eaue, et mettre de l’uille
d’olive dessus en karesme. Puis y a autres choulx que l’en appelle
choulx pasquerés pour ce que l’en les mengue en Pasquerez[826], mais
ils sont semés dès Aoust; et quant après la semence ils sont percreus
demy-pié de hault, l’en les arrache et plante-l’en ailleurs, et sont
souvent arrousés.

Aussi tous les choulx dessusdis sont premièrement semés, puis quant ils
sont creus à demy-pié de hault, sont ostés et replantés.

Et premièrement des pommes, est assavoir que quant icelles pommes sont
effeuillées, eslites et mincées, il les convient très-bien pourboulir,
et longuement plus que les autres choulx, car les choulx Rommains
se veullent le vert des feuilles dessirer par pesches[827], et le
jaune, c’est assavoir les arrestes ou veines[828], escachées[829] ou
mortier, puis tout ensemble esverder en eaue chaude, puis espraindre
et mettre en un pot et de l’eaue tiède, qui n’a assez eaue de char: et
puis servir du plus gras et[830] de l’eaue de la char, et plusieurs y
broient du pain.

Et sachez que choulx veulent estre mis au feu dès bien matin, et cuire
très-longuement et plus longuement que nul autre potage, et à bon feu
et fort, et doivent tremper en gresse de beuf et non autre, soient
pommes ou choulx ou quels qu’ils soient, excepté minces. Sachez aussi
que eaue grasse de beuf et de mouton y est propre, mais non mie de
porc; celle de porc n’est pas bonne fors pour poreaux.

Après, l’en fait choulx, à jour de poisson, après ce qu’ils sont
pourboulis, cuire en eaue tiède: et mettre de l’uille et du sel.

_Item_, avec ce, aucuns y mettent du gruyau[831]. _Item_, en lieu
d’uille, aucuns y mettent beurre.

A jour de char[832], l’en y met pigons, saussisses et lièvre,
fourques[833] et foison lart.

NAVETS sont durs et mal cuisans jusques à ce qu’ils aient esté
au froit et à la gelée; l’en leur oste la teste, la queue et autres
barbillons ou racines, puis sont rés, puis lavés en deux ou en trois
paires d’eaues chaudes, bien chaudes, puis cuire en chaude eaue de
char, soit porc, beuf, ou mouton.

_Item_, en Beausse, puis qu’ils sont cuis, l’en les tronçonne et frit
en la paelle, et gecte l’en pouldre par dessus.

MENUS DE PIÉS. Prenez jugiers[834] et foies et faites cuire
en vin et en eaue, premièrement les jugiers et au derrenier les
foies, puis les mettez en un plat et du percil mincié et du vinaigre
par-dessus. _Item_, de pié de beuf et de mouton et de chevrel.

GRAMOSE[835] est faite[836] de la char froide du giste qui est
demourée du disner et de l’eaue d’icelle char demourée comme dessus, en
la manière qui s’ensuit: _primo_, il convient batre quatre ou six œufs,
c’est assavoir moyeul et blanc, et batre, batre, et tant qu’ils soient
dégoutans comme eaue, car autrement ils se tourneroient; et mettre
autant de vertjus comme les œufs montent, et faire boulir avec l’eaue
de la char; et d’autre part faire la char par lesches, et mettre deux
pièces en l’escuelle, et le brouet par-dessus.

SOUPPE DESPOURVEUE. Aiez du percil et frisiez en beurre, puis
gettez de l’eaue boulant dessus et faites boulir: et mettre du sel, et
dréciez vos souppes comme en purée[837].

_Aliter_, se vous avez du beuf froit, si le trenchiez bien menu, puis
broiez un pou de pain allayé de vertjus et coulez par l’estamine; mise
en un plat et de la pouldre dessus. Chauffez sur le charbon. C’est bon
pour trois personnes.

_Aliter_, à jour de poisson, prenez de l’eaue et mettez frémir et des
amandes dedans; puis escorchez les amandes et les broyez et allaiez
d’eaue tiède, coulez et mettez boulir avec pouldre de gingembre et
saffran, et dréciez par escuelles; et en chascune escuelle, une pièce
de poisson frit.

_Aliter_, à jour de char, prenez du chaudeau de la char, et aiez
pain trempé ou maigre[838] de l’eaue de la char, puis broyez, et six
œufs: puis coulez et mettez en un pot avec de l’eaue grasse, espices,
vertjus, vinaigre et saffran; faictes boulir un bouillon, puis dréciez
par escuelles.

_Item_, et qui en une hostellerie, en haste, treuve eaue de char et il
en veult faire potage, il peut gecter ens des espices et faire boulir,
puis, au derrenier, filer des œufs et drécier.

_Aliter_, à jour de poisson, broyez du pain, et destrempez d’eaue, de
vertjus et du vinaigre, et mettez sur le feu; et quand il frémira,
mettez jus[839], et mettez les moyeux dedans; puis mettez sur le feu
et faites à petit feu tant chauffer qu’il bouille, et mettez pouldres
d’espices et faites vostre souppe.

_Aliter_, faites boulir ou pot un petit de lart, et quant il sera la
moitié cuit, aiez un maquerel frais, et découpez par tronçons et le
mettez cuire avec, et puis ostez tout, et mettez du percil hachié
boulir une onde[840] et dréciez.

POUR CONGNOISTRE BON FROMMAGE. Bon frommage a six conditions.
_Non Argus, nec Helena, nec Maria Magdalena, sed Lazarus et Martinus,
respondens pontifici._[841]

    Non mie blanc comme Hélaine,
    Non mie plourant com Magdalaine,
    Non Argus, mais du tout avugle,
    Et aussi pesant comme un bugle[842]:
    Contre le poulce soit rebelle,
    Et qu’il ait tigneuse cotelle[843].
      Sans yeulx, sans plourer, non pas blanc,
    Tigneulx, rebelle, bien pesant.

En Juillet, jambon de porc frais cuit à l’eaue jaune et au vertjus de
grain, un petit de gingembre et de pain: à la sausse rapée.

_Item_, au soupper, char salée du matin cuite à l’eaue et aux ciboules,
soit beuf ou mouton.

En pois nouveaulx cuis pour mengier en la cosse, l’en doit mettre
du lart à jour de char: et à jour de poisson, quant ils sont cuis,
l’en pure l’eaue, et l’en met dessoubs du beurre salé fondre, et puis
hochier.


AUTRES POTAGES QUI SONT A ESPICES ET NOS LIANS.

_Primo_, _nota_ que toutes espices qui doivent estre mises en potages
doivent estre bien broyées et non coulées, excepté pour gelée; et en
tous potages, l’en doit mettre les espices le plus tart que l’en puet,
car tant plus perdent de leur saveur comme plus tost sont mises: et
doit-l’en couler le pain broyé.

Potage à jour de poisson, _vide[844] pagina proxima præcedente_.

_Aliter_, prenez amandes, eschaudez et pelez et broiez: deffaites
d’eaue tiède; faites boulir avec pouldre fine et saffran, et en
chascune escuelle soit mise une moitié de sole frite et du potage
dessus.

COURGES. Soit pelée l’escorce, car c’est le meilleur: et
toutesvoies qui vouldra mettre ce[845] dedans, soient ostés les grains,
jàsoit-ce que l’escorce seule vault mieulx, puis convient tranchier
l’escorce pelée par morceaux, puis pourboulir, puis hacher longuement,
puis mettre cuire en gresse de beuf: à la parfin jaunir de saffren ou
getter dessus du saffren par filés, l’un çà, l’autre là; ce que les
queux dient _frangié de saffran_.

HERICOT DE MOUTON. Despeciez-le par petites pièces, puis le
mettez pourboulir une onde, puis le frisiez en sain de lart, et frisiez
avec des oignons menus minciés et cuis, et deffaites du boullon de
beuf, et mettez avec macis, percil, ysope et sauge, et faites boulir
ensemble[846].

_Item_, PASTÉ EN POT DE MOUTON. Prenez de la cuisse[847],
et gresse ou mouelle de beuf ou de veel haché menu et oignons menus
hachiés, et faictes boulir et cuire en un pot bien couvert à bien petit
de boullon de char ou autre eaue, puis mettez boulir dedens espices, et
un petit de vinaigre pour aguisier, et dréciez en un plat.

_Item_, qui veult saler mouton en temps chault, il le convient tremper
avant, et puis pouldrer de gros sel broyé.

MOUTON AUSOERRE[848]. Despeciez le mouton par pièces, puis
lavez et mettez cuire en eaue, puis broyez foison percil et pain, et
coulez, et mettez ou pot avec espices.

MOUTON AU JAUNET. Despeciez le tout cru, et soit du flanchet;
et le cuisiez en eaue, puis y broyez une cloche de gingembre et du
saffran, et allaiez de vertjus, de vin et de vinaigre[849].

TRIPPES AU JAUNET. Qui veult cuire trippes, il n’y convient
point mettre de sel au cuire, car elles noirciroient.--_Item_, les
piés, la queue et la caillette qui sont noires, doivent cuire à part,
et la pance et autres choses blanches, d’autre part[850].

TRUMEL DE BEUF[851] AU JAUNET.✝ Soit cuit longuement; et qui veult,
de la poullaille tuée de deux jours ou d’un jour devant soit boulie
longuement avec, et des herbes, et puis mis du saffran dedans[852].

POTAGE D’UNE PETITE OÉ. Cuisiez très bien vostre petite oé et
frisiez: puis broiez gingembre, clou, graine et poivre long, du percil
et un petit de sauge, destrampez de l’eaue de la char ou de la petite
oé, et mettez du fromage gratuisié[853], et servez en chascune escuelle
trois pièces de petite oé[854].

BROUET DE CHAPONS. Cuisiez vos chapons en eaue et en vin,
puis si les despeciez par membres et frisiez en sain, puis broiez les
braons[855] de vos chapons et les foies et amandes, et deffaites
de vostre boullon et faites boulir, puis prenez gingembre, canelle,
girofle, garingal, poivre long et graine de paradis, et deffaites de
vinaigre et faites boulir; et au dressier, mettez vostre grain[856] par
escuelles, et dressiez le potage sus.

CHAPONS AUX HERBES.--VEEL AUX HERBES. En yver chapons tués,
mouillés et puis mis six jours à la gelée, et en esté mors de deux
jours (sans soleil) ou estouffés soubs une couste; mettez cuire en eaue
et du lart avec pour donner appétit, et mettez percil, sauge, coq et
ysope, un petit de vertjus pour aiguisier, et du gingembre bien petit,
et saffran pour donner couleur. C’est potage propre s’il fait froit,
mais s’il fait chault, il ne convient n’en l’un n’en l’autre[857] fors
lart et saffran[858].

GRAVÉ D’OISELETS OU D’AUTRE CHAR. Soient plumés à sec[859],
puis aiez du gras du lart décoppé comme par morceaulx quarrés, et
mettez au fer de la paelle[860] et en traiez la graisse et là les
frisiez; puis mettez cuire ou boullon de la char, puis prenez pain
hallé sur le gril ou chappelleures de pain trempées ou boullon de
la char et un petit de vin; puis prenez gingembre, girofle, graine
et fleur de canelle et les foies, et les broyez; et puis coulez
vostre pain et boullon par l’estamine et les espices broyées à fin
et sans couler; et mettre boulir avec vos oiselets et un petit de
vertjus.--_Item_, qui n’a boullon, si mette purée de pois.--_Item_, ne
doit point estre trop lyant, mais claret; doncques ne convient-il que
le pain ou les foies pour lier[861].

GRAVÉ OU SEYMÉ[862] est potage d’iver. Pelez oignons et les
cuisiez tous hachiés, puis les frisiez en un pot; or convient avoir
vostre poullaille fendue sur le dos et hallée sur le gril au feu de
charbon, ou se c’est veel, aussi; et qu’ils soient mis par morceaulx
soit veel, ou par quartiers se c’est poulaille, et les mettez avec
les oignons dedans le pot; puis avoir pain blanc harlé sur le gril et
trempé au boullon d’autre char: et puis broyez gingembre, clou, graine
et poivre long, deffaire de vertjus et de vin, sans couler, mettre
d’une part: puis broyer le pain et couler par l’estamine et mettre au
brouet, et tout couler ensemble et boulir; puis drécier.

_Nota_ que l’en dit _seurfrire_ pour ce que c’est en un pot, et se
c’estoit en une paelle de fer, l’en diroit _frire_.

GRAVÉ D’ESCREVICES. Mettez boulir vos escrevices, et quant
elles seront cuites, soient eslites comme qui les vouldroit mengier, et
ostez le mauvais de dedans, puis aiez des amandes pelées et broyées,
deffaites[863] de purée de pois coulée par l’estamine, et du pain
harlé ou des chappeleures trempées en purée, broyées et coulées par
l’estamine, puis aiez gingembre, canelle, graine et clou: broyez,
et tout mis en un pot, et un petit de vinaigre et boulu ensemble,
puis drécié par escuelles, et soit mis dedens chascune escuelle les
escrevisses frictes en huille et de l’autre poisson frit.

_Item_, qui veult faire _tuille d’escrevisses_, ainsi se peut-il faire,
mais forment les escailles des escrevisses[864].

Et qui au brayer[865] veult trouver grant avantaige, face les coquilles
des escrevisses seicher en un four dedens un pot ou en une paelle de
terre, puis broier en un mortier à espicier, et puis couler à leur plus
délié sasses, puis de rechief séchier au four, puis broyer et sasser,
et après mettre ou potage; et croy que ce serre.

BOUSSAC DE CONNINS. Premièrement, les connins de garenne
sont congneus à ce qu’ils ont le hasterel[866], c’est assavoir depuis
les oreilles jusques vers les espaules, de couleur entre tanné[867]
et jaune, et sont tous blans soubs les ventres, et tous les quatre
membres par dedans jusques au pié, et ne doivent avoir nulle autre
tache blanche parmi le corps.--_Item_, l’en congnoist qu’ils sont
dedans leur premier an, à ce qu’ils ont en la jointe des jambes de
devant un petit osselet emprès le pié, et est agu. Et quant ils sont
surannés, la jointe est toute ounie; et aussi est-il des lièvres et
des chiens.--_Item_, l’en congnoist qu’ils sont de fresche prise à
ce qu’ils n’ont pas les yeulx enfoncés: l’en ne leur peut ouvrir les
dens; ils se tiennent droit sur leurs piés; et quant il est cuit, le
ventre luy demeure entier. Et s’il est de vieille prise, il a les yeulx
enfoncés: l’en luy euvre de légier la gueule: l’en ne le peut tenir
droit; et quant il est cuit, il a le ventre despecié. En yver, connins
pris de huit jours sont bons, et en esté, de quatre jours, mais qu’ils
n’aient sentu le soleil.

Et quant ils sont bien choisis et escorchiés, puis les despeciez par
pièces quarrées, et les mettez parboulir, puis reffaire en eaue froide:
puis en chascune pièce, de chascun costé, trois lardons; puis les
mettez boulir en eaue et du vin après. Adonc broyez gingembre, graine,
clo de giroffle, et destrempez ou boullon de beuf ou du leur[868], et
d’un petit de vertjus, et mettez dedens le pot et faites boulir jusques
au cuire.

_Item_, ainsi se fait un seymé, mais l’en y met oignons fris, et
un petit de pain ou chappelleures pour lier. (_Et doncques c’est
civé[869]._)

_Item_, ainsi est fait un bouly lardé de veau, de chevrel ou cerf.

BOUSSAC DE LIÈVRE. _Nota_ que du lièvre freschement pris et
tantost mengié, la char est plus tendre que de lièvre gardé.

_Item_, lièvre pris de quinze jours vault mieulx, mais que le soleil ne
l’ait atouchié; c’est assavoir quinze jours ou fort de l’iver: en esté,
six jours ou huit au plus et sans soleil.

_Item_, sachiez que se le lièvre est mengié frais prins, la char en est
plus tendre, et ne le convient point laver, mais harler ou rostir avec
son sang.

Boussac de lièvre ou de connin se fait ainsi: harlez le lièvre en la
broche ou sur le gril, puis le découpez par membres, et mettez frire
en sain ou en lart: puis aiez pain brûlé ou chappelleures deffais de
boullon de beuf et de vin, et coulez, et faites boulir ensemble; puis
prenez gingembre, clo de giroffle et graine; deffait de vertjus et soit
brun-noir et non trop lyant.--_Nota_ que les espices doivent estre
broyées avant que[870] le pain.

De connin se fait-il ainsi, sauf tant[871] que le connin est parbouli,
puis refait en eaue froide, et puis lardé, etc.[872]

ROSÉ DE LAPPEREAUX, d’allouettes, de menus oiseaux ou de
poucins. Lappereaulx soient escorchiés, découppés, pourboulis,
reffais en eaue froide et lardés: les poucins soient eschaudés pour
plumer[873], puis reffais, découppés et lardés, et les allouettes ou
oiselets soient plumés seulement pour pourboulir en eaue de char; puis
avoir du gras du lart découppé comme par morceaulx quarrés, et mettez
au fer de la paelle, et en traiant les chaons[874], et laissiez la
gresse: et là frire vostre grain[875], ou mettre vostre grain boulir
sur le charbon et souvent tourner en un pot avec du sain[876]. Et en
ce faisant, aiez des amandes pelées, et deffaites du boullon de beuf
et coulez par l’estamine, puis aiez gingembre, clo de giroffle, cèdre
autrement dit _alixandre_[877], deffaites du boullon et coulez, et le
grain cuit et trestout soit mis dedans un pot et bouly ensemble et du
sucre largement; puis dréciez par escuelles et des espices dorées par
dessus.

Cèdre vermeil est un fust[878] que l’en vent sur les espiciers, et est
dit _cèdre dont l’en fait manches à cousteaulx_.

VENOISON DE CERF. Pour ce que la char en est plus dure que
de bichot[879] ne de chevrel, soit pourboulie et lardée au long: et au
cuire, soit mis du vin grant foison, et au parcuire, du macis broié; et
soit mengié à la cameline.--_Item_, en pasté, soit pourboulie, lardée
au long, et mengiée froide à la cameline.

Et qui la veult saler en esté, il convient mettre gros sel fondre en
eaue, puis y tremper la venoison, et après seicher au soleil[880].

Et se vous voulez faire une pièce de beuf sembler venoison de cerf ou
d’ours, se vous estes en pays d’ours, prenez du nomblet de beuf ou du
giste, puis le parboulez et lardez, embrochiez et rostissiez; et soit
mengié à la queue de sanglier[881]. Soit le beuf pourbouly, puis lardé
au long après ce qu’il sera trenchié par loppins, et puis mettre la
queue de sanglier bien chaude en plat pardessus vostre beuf qui _primo_
soit rosty ou bouté en eaue boulant et retiré tantost, pour ce qu’il
est plus tendre que cerf.

BEUF COMME VENOISON D’OURS. Du giste de bœuf. Fait-l’en sausse
noire de gingembre, clo de giroffle, poivre long, graine, etc. Et
met-l’en en chascune escuelle, deux escuelles[882], et le mengue-l’en à
saveur d’ours[883].

CHEVREL SAUVAGE[884] au boussac claret et non lyant: soit
escorchié, puis bouté en eaue boulant et retiré tantost pour ce qu’il
est plus tendre que cerf, et lardé au long, puis mis cuire en meigre
eaue de char qui l’a, ou autre: du vin, espices broyées en gros, et
dréciez vostre grain dedens[885].--_Item_, chevrel sauvaige, ainsi
comme il est dit de chevrel ou chappitre cy-dessus.

SANGLIER FRAIS soit cuit en eaue avec du vin et mengié au
poivre chault, et le salé cuit comme dessus et mengié à la moustarde;
c’est ou fort de l’iver, mais au commencement, il se mengut aux espices
et aux souppes.

A la Nostre-Dame en Mars[886], commencent les appareils des cervoisons,
et dit-l’en _à la my-May, my-teste_[887], pour ce que lors le cerf a
boulu la moitié de sa teste, mais le droit cuer des cervoisons commence
à la Saincte-Croix en May[888], et de là croist le cerf en venoison
jusques à la Magdalaine, et peut estre chacié le cerf jusques à la
Saincte-Croix en Septembre; et lors se passe sa saison.

_Item_, au deffaire, l’en luy oste premièrement les deytiés[889], ce
sont les c......ns, avec lesquels sont les neux[890], le jargeau[891],
le franc-boyau, etc. Et sont ses deytiés pourboulis, puis cuis, mengiés
à la sausse chaude.

_Item_, en un cerf sont les espaules, la hampe, les cuisses, le foie,
les nomblès, les lardés, la queue scilicet le semier, les deux costés,
et c’est tout.

_Item_, la char par pièces fresche, il semble que sans pourboulir l’en
la doit mettre en eaue boulant, et tantost retirer et larder au long,
et est boulie et lardée au long, puis boulie en eaue, et appelle-l’en
le potage _bouly lardé aux espices et aux souppes_.

_Item_, les nomblets[892] sont rostis à la sausse chaude.

_Item_, les lardés c’est ce qui est entre les costés et l’eschine; et
sont meilleurs en pasté que autrement.

_Item_, aussi d’un cerf frais, l’en le mengue à la sausse chaude quant
il est mis en rost.

_Item_, l’en fait présent de la teste et du pié aux seigneurs, et cela
n’est point mengaille: ce n’est fors pour savoir quel et de quel aage
le cerf estoit; mais de mengaille, l’en fait présent du seymier, de la
hampe et des deux costés.

_Item_, la queue est dicte le seymier: et qui la veult saler, il
convient oster tous les os ce que l’en puet, car il contient une grant
partie du dos.

_Item_, la hampe c’est la poictrine, et est bonne salée; et sale-l’en
la venoison du cerf tout ainsi comme la char de beuf.

_Item_, toute la brouaille, excepté le foie, est pour la cuirié des
chiens, et l’appelle-l’en le _hu_[893].

En Septembre l’en commence à chacier les bestes noires jusques à la
Saint-Martin d’iver.--_Item_, tous les quatre membres sont appellés
jambons, comme d’un porc. _Item_, d’un sanglier a la hure, les costés,
l’eschinée, les nomblès, les quatre jambons; c’est tout. _Item_, des
yssues l’en ne retient fors le foie qui semble qu’il soit propre pour
faire soutil brouet d’Angleterre.

_Item_, la char fresche est cuite et appareilliée en eaue et aux
espices comme le cerf.

Du bourbelier, c’est le nomblet. (_Combien que en cest endroit, l’en
dit bien nomblets d’une part, et bourbelier de l’autre._)

_Item_, le sanglier salé se mengue à la fourmentée. La teste se cuit
entière, et moitié vin, moitié eaue. Les joes en sont bonnes par
lesches sur le gril.

BICHOT SAUVAGE au boussac claret et non liant: soit
escorchiés, puis boulis ou boutés en eaue boulant et retiré tantost,
pour ce qu’il est plus tendre[894] que cerf; et lardés au long; puis
mis cuire en maigre eaue de char qui l’a, ou en autre, avec du vin,
espices broiées; et dréciez vostre grain dedans[895].


AUTRES POTAGES LIANS DE CHAR.

BROUET DE FRESSURE DE POURCEL. Broiez du gingembre, clo,
graine, etc., puis deffaites de vinaigre et vin, puis aiez pain rosti
et trempé en vinaigre, broiez et coulez: et mettre tout ensemble; et
ayez vostre fressure cuite, couppée par plusieurs morceaulx et frite
en sain doulx. Puis mettez du chaudeau des boudins, ou du chaudeau du
chaudun en un pot, avec vostre pain broié après vos espices broyées, et
faites boulir; puis gettez dedans vostre pot les morceaulx de vostre
friture et faites boulir un boullon, et dréciez.

FÈVES NOUVELLES. Faites-les boulir plus que bayennes, puis
prenez foison percil et petit de sauge et d’isope, et broiez très bien,
et après ce broiez du pain, et une pongnée d’icelles mesmes fèves qui
soient pelées broiez avec pour lier, puis couler par l’estamine: puis
friolez le remanant de vos fèves en lart, se c’est à jour de char, ou
en huille ou beurre, se c’est à jour de poisson; puis mettez vos fèves
en eaue de char, se c’est à jour de char, ou en l’eaue des fèves, se
c’est à jour de poisson.

CRETONNÉE DE POIS NOUVEAULX ou fèves nouvelles. Cuisiez-les
jusques au purer[896], et les purez[897], puis prenez lait de vache
bien frais, et dictes à celle qui le vous vendra qu’elle ne le vous
baille point s’elle y a mis eaue, car moult souvent elles agrandissent
leur lait[898], et s’il n’est bien frais ou qu’il y ait eaue, il
tournera. Et icelluy lait boulez premièrement et avant que vous y
mettez riens, car encores tourneroit-il: puis broiez premièrement
gingembre pour donner appétit, et saffran pour jaunir: jàsoit-ce
que qui le veult faire lyant de moieulx d’œufs filés[899] dedans,
iceulx moieulx d’œufs jaunissent assez et si font lioison, mais le
lait se tourne plus tost de moyeulx d’œufs que de lioison de pain et
du saffran pour coulourer. Et pour ce, qui veult lier de pain, il
convient que ce soit pain non levé et blanc, et sera mis tremper en
une escuelle avec du lait ou avec du boullon de la char, puis broyé et
coulé par l’estamine; et quant vostre pain est coulé et vos espices
non coulées, mettez tout boulir avec vos pois; et quant tout sera
cuit, mettez adonc vostre lait et du saffren. Encores povez-vous faire
autre lioison, c’est assavoir des pois mesmes ou des fèves broyées,
puis coulées; si prenez laquelle lioison que mieulx vous plaira. Car
quant est de lioison de moieulx d’œufs, il les convient batre, couler
par l’estamine, et filer dedens le lait, après ce qu’il a bien boulu
et qu’il est trait arrière du feu avec les pois nouveaulx ou fèves
nouvelles et les espices. Le plus seur est que l’en preigne un petit du
lait, et destremper les œufs en l’escuelle, et puis encores autant, et
encores, tant que les moieux soient bien destrempés à la cuillier avec
foison de lait, puis mettre ou pot qui est hors du feu, et le potage ne
se tournera point. Et se le potage est espois, allayez-le de l’eaue de
la char. Ce fait, il vous convient avoir poucins escartelés, veel, ou
petite oé cuit, puis frit, et en chascune escuelle mis deux ou trois
morceaulx et du potage pardessus.

CRETONNÉE à jour de poisson; soit la friture faite de tanches,
brochets, soles ou limandes frites.

CHAUDUN DE POURCEAU, _scilicet_ les boyaulx, doivent estre
vuidés à la rivière, puis lavés en eaue tiède par deux fois, et mettre
en une paelle d’arain et froter très bien en sel et eaue, puis relaver
en eaue tiède. Aucuns les lavent en sel et en vinaigre, et quant ils
sont très bien lavés soit par vinaigre ou sans vinaigre qui veult, l’en
les trenche par tronçons, et sont embrochiés par hastelets et rostis
sur le gril et mengiés au vertjus de grain. Et qui en veult faire
potage, il le reconvient mettre cuire tout entier en un pot de terre et
puis mettre esgouter en un plat, puis découpper par menus morceaulx,
et frisiés en sain de lart; puis broiez pain premièrement, puis macis,
garingal, saffran, gingembre, clo, graine, canelle: destrempé de
bouillon et mis d’une part; puis broiez pain brulé ou chappeleures, et
soient allaiés du chaudeau et coulés par l’estamine et mis en eaue
de char ou de chaudeau de lui mesmes, ou moitié d’un moitié d’autre,
et boulu tout ensemble avec vin vermeil, vertjus et vinaigre. En yver
doit estre brun et drécié comme dessus, et en esté soit plus cler et
jaunet; et aiez du vertjus de grain cuit en eaue dedens un drappel, ou
des groiselles, et quant vous drécerez vos escuelles, mettez six ou
huit morceaulx du chaudun, puis du potage dessus, et par dessus six ou
huit grains de vertjus, ou groiselles par dessus en chascune escuelle.
Et aucuns font le potage des espices et lait comme cy-dessus est dit de
cretonnée.

_Nota_ que le sel et vinaigre ostent la freschumée. Et ce que dit est
en ceste addition est du chaudun que l’en mengue en Juillet, et les
autres hastelets qui sont fais en Décembre, sont fais de toutes pièces
comme de foie, de mol et des autres pièces du chaudun, et est ce que
ces povres cuisent en bacins à laver parmy ces rues[900].

COMMINÉE DE POULAILLE. Mettez-la par morceaulx cuire en l’eaue
et un petit de vin, puis la frisiez en sain, puis prenez un petit de
pain, trempez en vostre boullon, et _primo_ prenez du gingembre et
du commin[901], deffait de vertjus, broyez et coulez et mettez tout
ensemble avec du boullon de char ou de poulaille, et puis lui donnez
couleur ou de saffran ou d’œufs ou des moyeux coulés par l’estamine
et filés ou potage après ce qu’il sera trait hors du feu. _Item_, le
meilleur est de le faire de lait tel comme dit est, puis broyer vostre
pain après vos espices, mais il convient que le lait soit premièrement
bouly afin qu’il ne s’aourse; et après ce que le potage sera tout fait,
le lait soit mis dedans vin (_Il me semble qu’il n’y sert de rien_) et
la frisiez. Plusieurs ne la frisent point, jàsoit-ce que c’est le plus
friant.

(_Pain est lioison, et il dit après œufs qui est autre lioison, et
il doit souffire de l’une, si comme il est dit ou chappitre de la
cretonnée._)

(_Vertjus et vin.--Qui veult faire son potage de lait, il n’y convient
ne vin ne vertjus._)[902]

COMMINÉE A JOUR DE POISSON. Frisiez vostre poisson, puis pelez
amandes et broyez, et deffaites de purée ou de boullon de poisson et
faites lait[903], mais lait de vache est plus appétissant, jàsoit-ce
qu’il n’est mie si sain pour malades; et au surplus faites comme
dessus. _Item_, à jour de char, qui ne treuve lait de vache, se peut
faire de lait d’amandes, et la char comme dessus.

HARDOUIL[904] DE CHAPONS.✝ Despeciez-les par membres ou quartiers, puis
les cuisiez en eaue, puis friolez en sain de lart: et tandis, broyez
gingembre, canelle, giroffle et graine, et deffaites de vertjus, et ne
soit point coulé, mais sorissiez[905] pain sur le gril, broyez après
les espices, et destrempez de vertjus, puis passez le dit pain par
l’estamine et faites tout boulir. Et au drécier, mettez vostre grain
par escuelles et le potage tout chault dessus[906].

HOCHEPOT DE VOLAILLE est fait ainsi et soit non claret. L’en
les doit despecier par morceaulx; ainsi fait-l’en d’oé quant elle
est dure et maigre, car les grasses sont rosties.--_Item_, des viels
coulons. Ainsi est fait _rouillée de beuf_[907].

BROUET DE CANELLE. Despeciez vostre poulaille ou autre char,
puis la cuisiez en eaue et mettez du vin avec, et friolez: puis prenez
des amandes crues et séchées à toute l’escorce et sans peler, et
canelle grant foison, et si broyez très bien, et deffaites de vostre
boullon ou de boullon de beuf, et faites boulir avec vostre grain: puis
broyez gingembre, giroffle et graine, etc., et soit liant[908] et sor.

BROUET GEORGÉ[909], BROUET HOUSSIÉ.✝ Prenez poulaille despecée par
quartiers, veau ou telle char comme vous vouldrez despeciés par pièces,
et faites boulir avec du lart: et d’autre part aiez en un pot, avec du
sain, oignons menus minciés qui y cuiront et friront. Aiez aussi du
pain harlé sur le greil[910], puis le mettez tremper avec du boullon de
vostre char et du vin dedans, puis broyez gingembre, canelle, poivre
long, saffren, giroffle et graine et les foies, et les broyez si bien
qu’il n’y convengne point couler: et destrempez de vertjus, vin et
vinaigre. Et quant les espices seront ostées du mortier, broyez vostre
pain, et si le deffaites de ce en quoy il a trempé, et coulez par
l’estamine, et mettez espices et du percil effeullié qui veult, tout
boulir avec le sain et des oignons, et adonc frisiez vostre grain. Et
doit ce potage estre brun de sain et liant comme soringue.

_Nota_ que tousjours l’en doit broyer les espices le premier; et en
potages, l’en ne coule point les espices, et après l’en broie et coule
le pain.

(_Je croy qu’il n’y convient vin ne vinaigre._)

_Nota_ que pour le percil seulement est-il dit brouet _houssié_,
car ainsi comme l’en dit ailleurs _frangié_ de saffran[911], aussi
peut-l’en dire _houssié_ ce qui est de percil; et c’est la manière de
parler des queux.

BROUET ROUSSET est fait comme brouet georgé cy dessus, sauf
tant que l’en n’y met point de saffran, de vin, ne de vinaigre, et
l’en y met plus plantureusement canelle, et les oignons couppés par
rouelles[912].

UNE VINAIGRETTE. Prenez la menue-haste d’un porc, laquelle
soit bien lavée et eschaudée, puis rostie comme à demy sur le greil:
puis minciez par morceaux, puis les mettez en un pot de terre, du sain
et des oignons couppés par rouelles, et mettez le pot sur le charbon,
et hochiez souvent. Et quant tout sera bien frit ou cuit, si y mettez
du boullon de beuf, et faites tout boulir, puis broiez pain halé[913],
gingembre, graine, saffran, etc., et deffaites de vin et de vinaigre,
et faites tout boulir, et doit estre brune. (_Brune. Comment sera-elle
brune, s’il n’y a du pain hallé?_--Item, _je croy qu’elle doit estre
liant, car je la treuve ou chapitre des potages lians, cy-devant; et
par ces deux raisons, je croy qu’il y convient du pain harlé pour lier
et tenir brune_.)

BROUET BLANC. Prenez chapons, poulets ou poucins tués par
avant de temps convenable, ou tous entiers ou par moitié ou par
quartiers, et du veel par pièces, et les cuisiez avec du lart en
l’eaue et au vin: et quant ils seront cuis, si les traiez, puis prenez
des amandes, si les pelez et broiez et deffaites de l’eaue de vostre
poulaille, c’est assavoir de la plus clere, sans fondrille ou trouble
aucun, et puis les coulez par l’estamine; puis prenez gingembre blanc
paré ou pelé, avec graine de paradis, allayé comme dessus, et coulez à
une bien déliée estamine, et meslez avec le lait d’amandes. Et si n’est
assez espois, si coulez de la fleur d’amidon ou ris qui soit boulis, et
luy donnez goust de vertjus, et y mettez du succre blanc grant foison.
Et quant l’en aura drécié, si pouldrez par-dessus une espice que l’en
appelle coriandre vermeille et des grains de la pomme de grenade avec
dragée et amandes friolées, piquées en chascune escuelle sur le bout.
Soit veu cy-après à ce propos, de blanc mengier.

BLANC MENGIER de chapons pour malades. Cuisiez-le en eaue tant
qu’il soit bien cuit, puis broiez amandes grant foison et du braon[914]
du chapon, et soit bien broyé et deffait de vostre boullon, et passé
parmy l’estamine: puis mettez bien boulir, tant qu’il soit bien liant
et espais; puis broyez gingembre blanc paré et les autres espices
contenues cy-dessus ou brouet blanc.

BROUET D’ALEMAIGNE. Prenez char de connins, de poullaille ou
de veel, et despeciez par pièces: puis cuis en l’eaue comme à moitié,
puis friolés au sain de lart; puis aiez de l’oignon menu mincié en
un pot, sur le charbon, et du sain dedans le pot, et hochez le pot
souvent: puis broyez gingembre, canelle, graine de paradis, noix
muguettes, des foies rostis en une brochette sur le gril, et du saffren
deffait de vertjus, et soit sur le jaune et liant. Et _primo_ pain
sori sur le gril, broyé et passé par l’estamine: et soit tout avec des
fueilles de percil mis boulir ensemble ou dit pot et du sucre dedans;
et au drécier, mettez trois ou quatre morceaulx de vostre grain en
l’escuelle et du brouet dessus, et du sucre par-dessus le brouet.

(Nota _qu’il fault; car aucuns queux dient que brouet d’Alemaigne
ne doit point estre jaune, et cestuy dit que si fait[915]. Et
doncques, s’il doit estre jaune, ne doit mie le saffran estre passé
par l’estamine, mais doit estre bien broyé et allayé et mis ainsi ou
potage; car cellui qui est passé, c’est pour donner couleur: celluy qui
est mis par-dessus, est dit frangié._)

SOUBTIL BROUET D’ANGLETERRE. Prenez chastaignes cuites pelées,
et autant ou plus de moyeux d’œufs durs et du foye de porc: broyez tout
ensemble, destrempez d’eaue tiède, puis coulez par l’estamine; puis
broyez gingembre, canelle, girofle, graine, poivre long, garingal et
saffran pour donner couleur et faites boulir ensemble[916].

BROUET DE SAVOIE. Prenez chapons ou poulés et faites boulir
avec du lart bien maigre et les foyes: et quant ce sera demi cuit,
traiez-les, puis mettez de la mie de pain tremper ou boullon, puis
broyez gingembre, canelle, saffran, et les ostez; puis broyez les foyes
et du percil foison, puis coulez, et après broyez et coulez le pain,
puis boulez tout ensemble[917].

(_Et_ nota _que le saffran fait le brouet jaune, et le percil le fait
vert: ainsi semble que ce soit mauvaise couleur. Mais il semble que
la couleur seroit plus certaine se de pain estoit noirci, car le pain
noirci et saffren font vert, et percil aussi fait vert._)

BROUET DE VERTJUS ET DE POULAILLE. (C’est en esté.) Mettez
cuire par quartiers vostre poulaille ou du veel ou poucins, en boullon
ou autre eaue avec du lart, vin et vertjus, et que le goust de vertjus
passe: puis frisiez vostre grain en bon sain doulx, et aiez moyeux
d’œufs et pouldre fine batue ensemble et coulez par l’estamine; puis
filez vos œufs dedans le pot à vostre boullon et à petit fil[918], et
remuez fort à la cuillier, et que le pot soit arrière du feu: puis aiez
percil effueillié et vertjus de grain bouly ou boullon de la char,
dedans la cuillier, et que le pot soit arrière du feu, ou autrement
bouli en un autre petit pot en eaue clere pour oster la première
verdeur; puis drécez vostre grain[919], et gettez du potage par-dessus,
et par-dessus tout mettez vostre percil et vertjus de grain bouly[920].

BROUET VERGAY. Cuisiez telle char comme vous vouldrez en eaue,
ou un pou de vin, ou en boullon de char, vin et lart pour donner goust,
puis friolez vostre char, puis broiez gingembre, saffran, percil et un
petit de sauge, qui veult, et des moyeux d’œufs filez par une cuillier
pertuisée, tous crus, pour lier, ou pain broyé allayé du boullon, et
mettre boulir ensemble et du vertjus; et aucuns y mettent du fromage,
et c’est raison[921].

RAPPÉ. Mettez vostre char cuire, puis la friolez en sain, puis
broyez graine, gingembre, etc., et deffaites de vertjus: puis aiez pain
trempé ou boullon de la char, broyé et passé par l’estamine, et mettez
espices, pain et chaudeau tout boulu ensemble; puis aiez vertjus de
grain ou groiseilles qui soient boulies une onde en la paelle percée,
ou en autre eaue ou drapel[922], estamine, ou autrement, c’est assavoir
pour oster la première verdeur, puis dréciez vostre grain par escuelles
et du potage dessus, et par-dessus, vostre vertjus de grain.

GENESTE est dit _geneste_ pour ce qu’il est jaune comme fleur
de geneste, et est jauni de moyeux d’œufs et de saffran, et se fait en
esté en lieu de civé et est frit[923] comme dit sera cy après, fors
tant qu’il n’y a nuls oignons.

CIVÉ DE VEEL. Non lavé, non pourbouli, demy cuit en la broche
ou sur le gril, puis le despeciez par pièces et friolez en sain avec
grant quantité d’oignons par avant cuis: puis prenez pain roussi
seulement, ou chappelleures de pain non brûlé, pour ce qu’il seroit
trop noir pour civé de veel; (jàsoit-ce que icelluy pain roussi seroit
bon[924] civé de lièvre.) Et soit icelluy pain trempé ou boullon
de beuf et un petit de vin ou de purée de pois, et en le trempant,
broyez gingembre, canelle, giroffle, graine de paradis, et du saffran
largement pour jaunir et pour lui donner couleur, et destrempez de
vertjus, vin et vinaigre, puis broyez vostre pain et coulez par
l’estamine: et mettez vos espices, le pain coulé, ou chaudeau, et
faites tout boulir ensemble; et soit plus sur le jaune que sur le brun,
agu de vinaigre, et attrempé d’espices.--Et _nota_ qu’il y convient
largement saffran, et eschever à y mettre noix muguettes ne canelle,
pour ce qu’ils roussissent.

CIVÉ DE LIÈVRE. Premièrement, fendez le lièvre par la
poictrine: et s’il est de fresche prise, comme d’un ou de deux jours,
ne le lavez point, mais le mettez harler sur le greil, _id est_ roidir
sur bon feu de charbon ou en la broche; puis aiez des oignons cuis et
du sain en un pot, et mettez vos oignons avec le sain et vostre lièvre
par morceaulx, et les friolez au feu en hochant le pot très souvent,
ou le friolez au fer de la paelle. Puis harlez et brûlez du pain et
trempez en l’eaue de la char avec vinaigre et vin: et aiez avant broyé
gingembre, graine, giroffle, poivre long, noix muguettes et canelle, et
soient broyés et destrempés de vertjus et vinaigre ou boullon de char;
requeilliez, et mettez d’une part. Puis broyez vostre pain, deffaites
du boullon, et coulez le pain et non les espices par l’estamine, et
mettez le boullon, les oignons et sain, espices et pain brûlé, tout
cuire ensemble, et le lièvre aussi; et gardez que le civé soit brun,
aguisé de vinaigre, attrempé de sel et d’espices.

_Nota._ Vous cognoistrez l’aage d’un lièvre aux trous qui sont dessoubs
la queue, car pour tant de pertuis tant d’ans.

CIVÉ DE CONNINS comme dessus.

TUILLE DE CHAR. Prenez escrevices cuites, et en ostez la char
des queues: et le surplus, c’est assavoir coquilles et charquois[925],
broyez très longuement; et après, ayez amandes sans peler, et soient
eslites et lavées en eaue chaude comme pois, et avec l’escorce soient
broyées avec ce que dit est, et avec ce broyez mie de pain sori sur
le gril. Or devez-vous avoir cuit en eaue en vin et en sel, chapons,
poucins et poulés despeciés tous crus par quartiers, ou veel despecié
par morceaulx, et de l’eaue d’icelle cuiture devez destremper et
deffaire ce que vous avez broyé, puis couler par l’estamine; puis
rebroyez les relais[926] et coulez arrière: puis gingembre, canelle,
clou et poivre long destrempé de vertjus sans vinaigre, puis boulez
tout ensemble. Or soit vostre grain cuit en sain de porc par morceaulx
ou quartiers, et dréciez vostre grain par escuelles et mettez du potage
par dessus, et sur le potage, en chascune escuelle, quatre ou cinq
queues d’escrevices et du sucre par dessus pouldré.

HOUSSEBARRE[927] DE CHAR✝ est fait en haste à un soupper quant gens
surviennent despourveuement. Pour dix escuelles, prenez vint lesches de
la char froide de disner et du giste de beuf; et soient les lesches
petites comme lesches de lart, et les frisiez en sain au fer de la
paelle. _Item_, ayez de six œufs les moyeux et un petit de vin blanc,
et soit tout batu ensemble tant comme à ennuy, puis mis avec de l’eaue
de la char et du vertjus viel et non nouvel, car il tourneroit: et tout
bouly sans la char; et après dréciez par escuelles, et en chascune
escuelle deux lesches de char. Aucuns drecent le brouet par escuelles,
et en un plat, devant quatre personnes, cinq lesches de char et du
brouet avec; et c’est quant il y a plus de gens et mains de char[928].

HOUSSEBARRE DE POISSON. Aiez des carrelets appareillés et
lavés, puis séchiés, essuiés entre deux touailles et fris et mis en un
plat et deux en un autre: qui font deux plats. _Item_, aiez deux onces
de coriandre et de cercuis non confis, dont l’une[929] couste un blanc,
et soit broyé et destrempé de vin et vertjus, puis bouli et getté sur
les deux plats.

POTAGE DE LOMBARS. Quant la char est cuite, si la traiez et
mettez l’eaue de la char en un autre pot, mais gardez bien que il
n’y coule ne fondrilles, ne osselets; puis aiez moyeux d’œufs batus
longuement avec du vertjus et pouldre, et filez dedans le pot en filant
et en remuant, puis faites vos souppes[930].


AUTRES POTAGES LIANS SANS CHAIR.

BROUET VERGAY D’ANGUILLES, escorchiez _i_.[931] estauvez[932]
ou eschaudez les anguilles et les mettez cuire en l’eaue avec du vin
par très bien menus morceaulx, puis broyez percil et pain ars, et
coulez par l’estamine: et aiez avant broyé gingembre paré et saffren,
et faictes tout boulir ensemble, et à la parfin mettez morceaulx de
fromage comme dés quarrés[933].

BROUET SARRASINOIS. Escorchiez l’anguille et découppez par
bien menus tronçons, puis pouldrez de sel et frisiez en huile; puis
broyez gingembre, canelle, giroffle, graine, garingal, poivre long
et saffran pour donner couleur, et[934] de vertjus, et boulir tout
ensemble avec les anguilles qui d’elles mêmes font lioison.

BROUET VERT D’ŒUFS ET DE FROMAGE. Prenez percil et un pou de
frommage et de sauge et bien pou de saffren, pain trempé, et deffaites
de purée de pois ou d’eaue boulie, broyez et coulez: et aiez broyé
gingembre deffait de vin, et mettez boulir; puis mettez du frommage
dedens et des œufs pochés en eaue, et soit vert gay.--_Item_, aucuns
n’y mettent point de pain, mais en lieu de pain convient lart.

BROUET D’ALEMAIGNE D’ŒUFS POCHÉS EN HUILLE,[935] puis prenez
amandes et les pelez, broyez et coulez: mincez oignons par rouelles, et
soient cuis en eaue, puis fris en huille, et faites tout boulir; puis
broyez gingembre, canelle, giroffle et un pou de saffran deffait de
vertjus, et au derrain[936] mettez vos espices ou potage, et boulir un
boullon, et soit bien liant et non trop jaune.

BROUET BLANC se peut faire des lus, des carpes et des bars,
comme il est dit cy-dessus de la poulaille.

SORINGUE D’ANGUILLES. Estauvez ou escorchiez, puis tronçonnez
vos anguilles: puis aiez oignons cuis par rouelles et percil effueillé,
et mettez tout frire en huille; puis broyez gingembre, canelle,
giroffle, graine et saffren, et deffaites de vertjus, et ostez du
mortier. Puis aiez pain harlé broyé et deffait de purée, et coulez
par l’estamine, puis mettez dedans la purée, et faites boulir tout
ensemble, et l’assavourez de vin, de vertjus et vinaigre; et soit
claret[937].

GRAVÉ OU SEYMÉ (car c’est tout un) de loche ou autre poisson
froit ou chault, soit perche ou autre de ceste nature. Frisiez sans
farine en huille, puis la tenez devant le feu: mais avant ce, aiez pain
harlé broyé et deffait d’un petit de vin, d’eaue boulie ou purée, et
passez par l’estamine, et mettez en un pot; puis affinez gingembre,
canelle, giroffle, graine et saffren pour donner couleur, deffait de
vinaigre, et aiez des oignons minciés cuis, et les frisiez[938] en
huille, puis mettez tout boulir ensemble en un pot avec la purée ou
eaue boulie, excepté la loche frite de laquelle vous mettez six ou huit
en l’escuelle ou plus, et du brouet par dessus; et ne soit pas jaune,
mais roux.

CHAUDUMÉE D’UN BROCHET. _Primo_, à appareillier un brochet,
luy convient tirer les boyaux par l’oreille, et oste-l’en l’amer, et
puis reboute-l’en les boyaux dedans, et après l’en les[939] rostit sur
le greil. Se le brochet est petit, soit rosti tout entier: et s’il est
plus grandelet, soit encisé en plusieurs lieux au travers, et ainsi
rosti. Puis aiez saffren largement, poivre long, giroffle et graine, et
soit tout bien broyé et deffait de vertjus, vin, et vinaigre très-petit
comme néant, broyé et osté du mortier; puis aiez pain harlé trempé en
purée de pois ou en eaue de poisson, ou moitié vin moitié vertjus, et
soit broyé, puis coulé par l’estamine, et tout mis ensemble soit bouly
et mis en plats sur le brocherel, et soit jaune.

Ainsi se peut faire _galentine de poisson froit_, sauf tant que l’en
n’y met point de purée, car pour ce[940] ne se garde pas longuement,
mais y met-l’en de la gresse du poisson.

CIVÉ D’OÏTTRES. Eschaudez et lavez très bien les oïttres,
les cuisiez pour[941] un seul boullon, et les mettez esgouter, et les
friolez avec de l’oignon cuit en huille; puis prenez pain harlé ou
chappelleures grant foison, et mettez tremper en purée de pois ou en
l’eaue boulie des oïttres et du vin plain[942], et coulez: puis prenez
canelle, giroffle, poivre long, graine et saffran pour donner couleur,
broyez et destrempez de vertjus et vinaigre et mettez d’une part; puis
broyez vostre pain harlé ou chappeleures avec la purée ou eaue des
oïttres et aussi les oïttres puis qu’elles ne seroient assez cuites.

CIVÉS D’ŒUFS[943]. Pochez œufs à l’uille, puis aiez oignons
par rouelles cuis, et les friolez à l’uille, puis mettez boulir en vin,
vertjus et vinaigre, et faites boulir tout ensemble; puis mettez en
chascune escuelle trois ou quatre œufs, et gettez vostre brouet dessus,
et soit non liant.

SOUPPE EN MOUSTARDE. Prenez de l’uille en quoy vous avez
pochés vos œufs, du vin, de l’eaue, et tout boulir en une paelle de
fer: puis prenez les croustes du pain et les mettez harler sur le gril,
puis en faittes souppes quarrées, et mettez boulir; puis retraiez
vostre souppe, et mettez en un plat ressuier: et dedans le boullon
mettez de la moustarde, et faites boulir. Puis mettez vos souppes par
escuelles, et versez vostre boullon dessus.

LAIT DE VACHE LIÉ. Soit pris le lait à eslite[944], comme dit
est cy-devant ou chappitre des potages[945], et soit bouly une onde,
puis mis hors du feu: puis y filez par l’estamine grant foison de
moieux d’œufs et ostez le germe, et puis broyez une cloche de gingembre
et saffren, et mettez dedans, et tenez chaudement emprès le feu; puis
ayez des œufs pochés en eaue et mettez deux ou trois œufs pochés en
l’escuelle, et le lait dessus.

ESPIMBÈCHE DE ROUGETS. Espaulez[946], pourboulez et rosticiez
vos rougets: puis aiez vertjus et pouldre, cameline et percil: tout
bouly ensemble, et gettez sus.

POTAGE JAUNET OU SAUSSE JAUNETTE sur poisson froit ou chault.
Frisiez en huille, sans point de farine, loche, perche pelée ou autre
de ceste nature, puis broyez amandes, et deffaites le plus de vin et de
vertjus et coulez, et mettez au feu: puis broyez gingembre, giroffle,
graine et saffren, et deffaites de vostre boullon, et quant le potage
aura bouly, mettez vos espices; et au drécier mettez du sucre, et soit
liant.

MILLET. Lavez-le en trois paires d’eaue et puis le mettez en
une paelle de fer sécher sur le feu, et hochiez bien, qu’il n’arde;
et puis le mettez en lait de vache frémiant, et n’y mettez point la
cuillier jusques à tant qu’il ait bien bouly, et puis le mettez jus de
dessus le feu[947], et le batez du dos de la cuillier[948] tant qu’il
soit bien espois.

La nature du lait est telle que se le lait est trait et mis en un très
bel et net vaissel de terre ou de bois ou d’estain et non mie d’arain
ne de cuivre, et en iceulx vaiseaulx le tenir en repos sans remuer ou
changier en divers vaisseaulx, ne transporter çà ne là, il se garde
bien jour et demi ou deux jours, et ne se tourne point au boulir, mais
que l’en le remue quant il s’esmeut au boulir; et n’y convient point
mettre de sel jusques au descendre du feu, ou au moins quant l’en y
veult mettre les souppes, et y puet-on mettre des souppes de pain levé
ou autre, que jà ne se tournera puis que le lait sera ainsi gouverné
comme dit est.--_Item_, et se le lait n’est frais ou que tu aies doubte
qu’il ne tourne en la paelle, si y met un petit de fleur[949] et le
mouveras très bien, et jà ne se tournera. Et se tu en veulx faire
boulie, si desmelle _primo_ ta fleur et ton lait et du sel, puis met
boulir et le muef[950] très bien. Et se tu en veulx faire potage,
si y met pour chascune pinte de lait les moyeux de demy quarteron
d’œufs, les germes ostés, très bien batus ensemble à part eulx, et
puis rebattus avec du lait; et puis tout filé en la paelle, et puis
très bien remué le lait qui bout: puis faire souppes. Et qui veult une
cloche de gingembre et du saffran, _fiat_.


ROST DE CHAR.

LANGUE DE BEUF fresche soit parboulie, pelée, lardée et
rostie, et mengée à la cameline.

_Item_, est assavoir que la langue du vieil vault mieulx que la langue
du jeune beuf, si comme aucuns dient; autres dient le contraire.

En Gascongne, quant il commence à faire froit, ils achètent des
langues, les parboullissent et pelent, et puis les salent l’une sur
l’autre en un salouer et laissent huit jours, puis les pendent à la
cheminée tout l’iver, et en esté, hault, à sec; et ainsi se gardent
bien dix ans. Et puis sont cuites en eaue et vin qui veult, et mengées
à la moustarde.

_Aliter_, langue de beuf vieil soit parboulie, pelée et nettoiée: puis
embrochée, boutonnée de clous de giroffle, rostie, et mengée à la
cameline.

ALLOUYAUX DE BEUF. Faictes lesches de la char du trumel, et
enveloppez dedens mouelle et gresse de beuf: embrochiez, rostissiez et
mengiez au sel.

MOUTON ROSTI au sel menu ou au vertjus et vinaigre. L’espaule
soit première embrochée et tournée devant le feu jusques à ce qu’elle
ait getté sa gresse, puis soit lardée de percil[951]: et non plus tost
pour deux causes, l’une car adonc elle est meilleur à larder, l’autre
car qui plus tost la larderoit, le percil s’ardroit avant que l’espaule
fust rostie.

Porc eschaudé, rosty en la broche: et mettre du sain doulx en la
paelle, et au bout d’un baston avoir des plumes, et oindre l’escorce
ou couanne du porc afin qu’elle ne s’arde et endurcisse ou larder. Et
autel convient-il faire à un cochon[952], ou le larder; et est mengié
au vertjus de grain ou vertjus vieil et ciboule.

POURCELET FARCI. Le pourcelet tué et acouré[953] par la gorge
soit eschaudé en eaue boulant, puis pelé: puis prenez de la char meigre
de porc, et ostez le gras et les issues du pourcelet et mettez cuire en
l’eaue, et prenez vint œufs et les cuisiez durs, et des chastaingnes
cuites en l’eaue et pelées: puis prenez les moyeux des œufs,
chastaingnes, fin fromage vieil, et char d’un cuissot de porc cuit, et
en hachez, puis broyez avec du saffran et pouldre de gingembre grant
foison entremellée parmy la char; et se vostre char revient trop dure,
si l’alaiez de moyeux d’œufs. Et ne fendez pas vostre cochon parmy le
ventre, mais parmy le cousté le plus petit trou que vous pourrez: puis
le mettez en broche, et après boutez vostre farce dedans, et recousez
à une grosse aguille; et soit mengié ou au poivre jaunet se c’est en
yver, ou à la cameline se c’est en esté.

_Nota_ que j’ay bien veu pourcelet lardé, et est très bon. Et ainsi le
fait-l’en maintenant et des pigons aussi.

CONNINS pourboulis, lardés, en rost, à la cameline.

L’en scet bien se un connin est gras etc.[954]

VEEL ROSTY. Soit harlé au feu en la broche et sans laver, puis
lardé, rosti, et mengié à la cameline. Aucuns le pourboulent, lardent,
puis embrochent. Ainsi le souloit[955]-l’en faire.

CHEVREAULX, AGNEAULX. Boutez en eaue boullant et tirez
hors tantost, et harlez en la broche; puis rostis et mengiés à la
cameline[956].

BOURBELIER DE SANGLIER[957]. _Primo_ le convient mettre en
eaue boulant, et bien tost retraire et boutonner de giroffle; mettre
rostir, et baciner[958] de sausse faicte d’espices, c’est assavoir
gingembre, canelle, giroffle, graine, poivre long et noix muguettes,
destrempé de vertjus, vin et vinaigre, et sans boulir l’en baciner;
et quant il sera rosti, si boulez tout ensemble. Et ceste sausse est
appellée _queue de sanglier_[959], et la trouverez cy-après (_et là il
la fait liant de pain: et cy, non_).

POUR CONTREFAIRE D’UNE PIÈCE DE BEUF, VENOISON D’OURS. Prenez
de là pièce d’emprès le flanchet, et soit tronçonnée par gros tronçons
comme bouly lardé, puis pourbouli, lardé et rosti: et puis boulez une
queue de sanglier[960] et mettez vostre grain[961] peu boulir, et
gettez sausse et tout en un plat.

Toute venoison fresche sans baciner se mengue à la cameline.

OÉS rosties à l’aillet blanc en yver, ou à la jance.

Et _nota_ que en Aoust et Septembre, quant les oisons sont aussi grans
comme père et mère, l’en congnoist les jeunes à ce que quant l’en
appuie son poulce sur leur becq, il fond soubs le poulce, et aux autres
non.

_Item_, _nota_ que oisons mis en mue, se ils sont bien petis, ils
engressent jusques au neuvième jour, et après amaigrissent: mais les
oés engressent toujours sans défrire[962]; et soit l’un, soit l’autre,
il les convient tenir seichement et garder de mouillier leurs piés, ne
estre sur lictière moitte, mais finement seiche, et garder de baigner
ne mengier verdure, et ne voient point de clarté, et soient peus de
fourment cuit, et abeuvrés de lait meigre ou de l’eaue en quoy le
fourment aura cuit, et ne leur convient donner autre buvrage, et soient
peus de bonne avoine.

A Paris, les oiers engressent leurs oisons de farine etc.[963]

CHAPONS, GÉLINES, faisandés de deux ou de trois jours,
embrochiés, flambés, et rostis, mettez au vertjus avec leur gresse;
bouly, à la poictevine ou à la jance.

POUCINS gros comme hétoudeaux[964] en Juillet, tués deux
jours devant, et rostis, flambés, mengiés au moust qui se fait en tout
temps de vin, vertjus et foison sucre.

Pour les faisander, il les convient saigner, et incontinent les mettre
et faire morir en un seel d’eaue froide, et tantost remettre en un
aultre seel d’eaue très froide, et il sera faisandé ce matin mesmes
comme de deux jours tué[965].

MENUS OISEAULX. Plumez à sec et laissiez les piés, et
embrochiez parmy le corps: et entre deux mettre une pièce de lart gras
tanné[966] comme une fueille.

MALARS DE RIVIÈRE. En yver, quant les jeunes etc.[967]

_Item_, malars de rivière plumez à sec, puis mettre sur la flambe:
ostez la teste et la gettez, et laissiez les piés; puis mettez en
broche et une leschefrite dessoubs pour requeillir la gresse, et mettre
des oignons dedans qui se frisent en la gresse. Et quant l’oisel est
cuit, mettez du lart et du percil en la leschefrite, et boulez tout
ensemble, et des tostées dedans, et l’oisel par pièces; ou soit mengié
au sel menu.

_Item_, autrement se peut faire. Mettez en la leschefrite des oignons
comme dit est, et quant l’oisel sera cuit, si mettez en la leschefrite
un petit de vertjus et moitié vin, moitié vinaigre, et tout bouli
ensemble, et après mis la tostée. Et ceste derrenière sausse est
appellée _le Saupiquet_.

PAON, _Faisans_, _Cigoignes_, _Héron_, _Outardes_, _Grues_,
_Gentes_, _Butor_, _Cormorant_, soient plumés à sec ou saignés comme le
cigne, et laissez à ceulx à qui il appartient les testes et queues, et
aux autres testes et piés[968]: et du surplus comme du cigne.

_Item_, au faisant à qui l’en oste la queue, l’en luy reboute deux ou
trois plumes quant il est rosty, mais atourné[969].

COULONS RAMIERS sont bons en yver; et congnoist-l’en les viels
à ce qu’ils ont les venneaux des esles tout d’une couleur noire, et
les jeunes qui sont de celluy an ont le bout des venneaux cendrés et
le surplus noir comme les autres[970]; et sont bons en pasté, à la
cameline frois, ou tous chaulx à la sausse d’oiseaulx de rivière, ou
rostis longuement comme beuf et mengiés au sel, ou à la dodine, par
pièces, en un plat, comme oiseaulx de rivière.

_Nota_ que à Bésiers, l’en vent de deux paires[971] de coulons ramiers,
les uns petis, et ceulx ne sont pas les meilleurs, car les grans
sont de meilleur saveur et menguent le glan au bois comme font les
pourceaulx; et les mengue-l’en au boussac comme un connin, et mis par
quartiers: et aucunes fois à la sausse des halebrans, et en rost à la
dodine; ou qui en veult garder, soient mis en pasté lardés. Et sont en
saison de la Saint-Andry jusques en karesme, et ne viennent fors de
trois ans en trois ans.

PLOUVIERS ET VIDECOQS. Plumer à sec, bruler et laissier les
piés; rostir et mengier au sel.

Et _nota_ que trois paires d’oiseaulx sont, que les aucuns queux
rostissent sans effondrer; _scilicet_ aloés, turtres et plouviers,
pour ce que leurs bouyaulx sont gras et sans ordure, car aloés ne
menguent fors pierettes et sablon: turtres, graine de genèvre et herbes
souef-flairans: et plouviers vent[972].

Perdrix s’adouent vers la my Février, et adonc s’envolent deux et deux:
et en Pasqueret se doivent cuire en l’eaue, avec char de beuf, un
boullon largement; puis les tirer et rostir.

_Item_, les perdris qui ont les plumes etc[973].

_Item_, perdrix se doivent plumer à sec, et copper les ongles et la
teste, reffaire en eaue boulant, puis boutonner de venoison qui en a,
ou lart, et mengier au sel menu, ou à l’eaue froide et eaue rose et un
petit de vin, ou en eaue rose les trois pars, jus de pomme d’orenge et
vin, le quart[974].

CIGNE. Plumez comme un poucin ou une oé, eschaudez, ou
reffait; embrochiez, arçonnez[975] en quatre lieux, et rostissiez à
tout les piés et bec tout entier, et la teste sans plumer; et mengié au
poivre jaunet.

_Item_, qui veult, l’en le dore.

_Item_, au tuer, soit fendu de la teste jusques aux espaules.

_Item_, sont aucune fois escorchiés et revestus.

CIGNE REVESTU en sa pel à toute la plume. Prenez-la et
l’enflez par entre les espaules, et le fendez au long du ventre: puis
ostez la pel à tout le col couppé emprès les espaules, tenant au corps
les piés; puis mettre en broche, et l’arçonnez et dorez. Et quant il
sera cuit, soit revestu en sa pel, et que le col soit bien droit ou
plat; et soit mengié au poivre jaunet[976].


PASTÉS.

POUCINS soient mis en pasté, le dos dessoubs et la poictrine
dessus, et larges lesches de lart sur la poictrine; et puis couvers.

_Item_, à la mode Lombarde, quant les poucins sont plumés et
appareillés, aiez œufs batus, c’est assavoir moyeux et aubuns[977],
avec vertjus et pouldre, et mouillez vos poucins dedans: puis mettez en
pasté[978] et des lesches de lart comme dessus.

CHAMPIGNONS d’une nuit sont les meilleurs, et sont petits et
vermeils dedans, clos dessus: et les convient peler, puis laver en
eaue chaude et pourboulir; qui en veult mettre en pasté, si y mette de
l’uille, du frommage et de la pouldre.

_Item_, mettez-les entre deux plats sur charbons, et mettez un petit de
sel, du frommage et de la pouldre. L’en les treuve en la fin de May et
en Juin.

ESCHEROYS[979]. Lavez-les en deux ou en trois paires d’eaues
chaudes, puis les enfarinez et frisiez en huille.

_Item_, après ce, aucuns les mettent en pasté avec grant foison
d’oignons et tronçons de harenc ou d’anguille et pouldre.

_Nota._ Pastés doivent estre au large et la viande à large dedans.

PASTÉS DE VENOISON FRESCHE. Il convient à venoison pourboulir
et escumer, puis larder et faire pastés: et ainsi se font pastés de
toute venoison fresche; et se doit tailler à grans lopins comme billes,
et pour ce dit-l’en _pasté de bouly lardé_.

PASTÉS DE BEUF. Aiez bon beuf et jeune et en ostez toute la
gresse, et le meigre soit mis par morceaulx cuire un boullon, et après
porté sur[980] le pastissier hachier: et la gresse avec mouelle de beuf.

La char d’une joe de beuf trenchée par lesches et mise en pasté;
et puis quant le pasté est cuit, convient getter de la sausse d’un
halebran dedans.

PASTÉS DE MOUTON. Bien hachiés menus avec des ciboules.

PASTÉS DE VEAU. Prenez de la rouelle de la cuisse, et convient
mettre avec, près d’autant de gresse de beuf; et de ce fait-l’en six
bons pastés d’assiette[981].


POISSON D’EAUE DOULCE.

A cuire poisson convient premièrement mettre l’eaue frémir et du sel,
et puis mettre les testes boulir un petit, puis les queues, et boulir
ensemble, et puis le remenant.

Tout poisson freschement mort est ferme sur le poulce et dur, et a
l’oreille vermeille; et s’il est vieil mort, _secus_.

BAR soit en eaue cuit, et mengié à la sausse vert.

BARBELET[982] en esté soit cuit en eaue et le tiers vin,
foison percil et oseille, et cuire longuement: et il sera ferme.

BARBILLONS rostis au vertjus, les petis en yver au potage ou à
la jance fris; _item_, en yver, au poivre aigret ou jaunet, car c’est
tout un.

PERCHE soit sans escharder[983] cuite en eaue, et puis soit
pelée: au vinaigre et au percil soit mise; la frite soit mise au
gravé[984].

TANCHE eschaudée, et osté le limon comme d’une anguille,
puis soit cuite en eaue: mengée à la sausse vert. La frite en potage;
la renversée, rostie et pouldrée de pouldre de canelle, et puis soit
plungée en vinaigre et huille tandis que l’en la rostira, et mengée à
la cameline. Et notez que à la renverser, il la convient fendre au long
du dos, teste et tout, puis renverser, et mettre une essaule[985] entre
les deux couannes, puis lier de fil et rostir.

BRESME soit cuite en eaue, mengée à la sausse vert: et la
rostie au vertjus[986].

LUS[987] se doit cuire en eaue frémiant et un petit de vin,
et mettre la teste premièrement et puis la queue, et faire boulir une
onde: puis mettre le remenant. Lus se mengue à la sausse vert quant il
est cuit en eaue. Aucunes fois l’en en fait potage, et est frit aucunes
fois; le frit est mengié à la jance.

D’un lus on en peut mengier la moitié cuite en eaue, et l’autre moitié
salée d’un jour ou de deux jours, voire de huit jours, mais en ce cas
l’en le doit mettre tremper pour dessaller, puis pourboulir et après
esgouter, puis frire et mengier à la jance. Quant du lus frais est
demouré de disner, au souper l’en en fait charpie.

BROCHET est bon au chaudumé.

Des brochets le laitié vault mieux que l’ouvé, se ce n’est quant l’en
veult faire roissolles, car de l’ouvé broyé l’en fait roissoles.

ALOZE salée, cuite en l’eaue et mengée à la moustarde ou
au vin et à la ciboule. La fresche[988] entre en saison en Mars. La
convient appareillier par l’oreille, escharder, cuire en eaue, et
mengier à la cameline; et celle qui sera en pasté, convient premier
escharder, puis mettre en pasté et de la cameline bien clère dedans le
pasté quant il est presque cuit, et icelle sausse faire boulir. _Item_,
aloze appareilliée comme dessus, sans escharder, puis rostir au four
avec percil et moitié vertjus, l’autre moitié vin et vinaigre[989]; et
est en saison depuis Février jusques en Juin.

FUITES[990] comme alozes.

CARPES. Aucuns aiment mieulx la laictié que l’ouvée, _et e
contrario_. Et _nota_ que la brehaigne[991] vault mieulx que nulle des
deux autres.

La carpe qui a l’escaille blanche etc.[992]

_Item_, à l’appareillier, ostez-luy l’amer qui est droitement ou
gouttron[993] de la gorge, et ce fait, l’en peut mettre cuire la teste
toute entière, et elle se cuira tout nettement; et se l’amer n’en
estoit osté, la teste demourroit tousjours sanglante et amère. Et pour
ce, quant l’amer n’est osté entier et sans crever, l’en doit tantost
laver la place et frotter de sel, et se l’amer est osté entier, l’en
ne doit point laver la teste ne autre chose, mais convient mettre
premièrement boulir la teste et assez tost après la queue, et puis
après le remenant, et tout à petit feu.[994] La carpe cuite se mengue à
la sausse vert, et se demourant en y a, l’en en met en galentine.

_Item_, CARPE A L’ESTOUFFÉE. _Primo_, mettez des oignons
minciés en un pot cuire avec de l’eaue, et quant les oignons seront
bien cuis, gettez la teste et assez tost après la queue dedans, et
assez tost après les tronçons, et couvrez fort sans ce qu’il en ysse
point d’alaine[995]. Et quant elle sera cuite, si aiez fait vostre
affaitement de gingembre, canelle et saffran, allayé de vin et un petit
de vertjus, c’est assavoir le tiers, et faites tout boulir ensemble, et
bien couvert; et puis dréciez par escuelles[996].

_Nota_ que les Alemans dient des François qu’ils se mettent en grant
péril de mengier leurs carpes si pou cuites. Et a-l’en veu que se
François et Alemans ont un queux François qui leur cuise carpes,
icelles carpes cuites à la guise de France, les Alemans prendront leur
part et la feront recuire plus assez que devant, et les François non.

TRUITTES. Leur saison commence en May. (_Item, leur saison est
de Mars jusques en Septembre._) Les blanches etc.[997] La truitte qui
ou palais a deux petites veines noires, est vermeille.

Truitte soit cuite en eaue et foison vin vermeil, doit estre mengiée à
la cameline et doit estre mise cuire par tronçons de deux dois. A jour
de char, en pasté, l’en les doit couvrir de larges lardons[998].

ANGUILLES. Celle qui a la menue teste, becque etc.[999]

Anguillettes fresches estauvées et tronçonnées, cuites en eaue avec
foison de percil, puis mettre du frommage lesche: puis traiez les
tronçons, et faites souppes, et en chascune escuelle quatre tronçons;
ou cuire des oignons, puis cuites en celle eaue, et un petit d’espices
et saffran[1000] et oignons en un pot, et faire la souppe.

Grosse anguille cuite en l’eaue et au percil se mengue aux aillets
blans; en pasté, du frommage et de la pouldre fine. La grosse,
renversée[1001], à la sausse chaude comme une lamproie.

Se vous voulez garder anguille, faites-la mourir en sel, et la laissiez
trois jours naturels toute entière: puis soit eschaudée, osté le
limon, trenchée par tronçons, cuite en l’eaue et la ciboule, et en la
parfin mettez du vin. Et se vous la voulez saler du matin au soir,
appareilliez-la et la tronçonnez, et mettez les tronçons en gros sel;
et se vous la voulez plus avancier, broyez sel noir[1002] et frottez
chascune coppure du tronçon, et avec ce, la hochiez en sel entre deux
escuelles[1003].

ANGUILLE RENVERSÉE. Prenez une grosse anguille et l’estauvez,
puis la fendez par le dos au long de l’areste d’un costé et d’autre,
en telle manière que vous ostiez d’une part l’areste, queue et teste
tout ensemble, puis lavez et ploiez icelle à l’envers, c’est assavoir
la char par dehors, et soit liée loing à loing: et la mettez cuire
en vin vermeil, puis la traiez et couppez le fil à un coustel ou
forcettes[1004], et mettez reffroidier sur une touaille; puis aiez
gingembre, canelle, clo de giroffle, fleur de canelle, graine, noix
muguettes[1005], et broyez et mettez d’une part: puis aiez pain brulé
et broyez très bien, et ne soit point coulé, mais deffaites du vin
où l’anguille aura cuit, et boulez tout en une paelle de fer, et y
mettez du vertjus, du vin[1006], et du vinaigre[1007], et gettez sur
l’anguille[1008].

PINPERNAUX ont luisant et deliée pel et ne sont point
limonneux comme sont anguilles. L’en les doit eschauder et rostir sans
effondrer, _scilicet_ les frais, et les salés qui sont séchés, rostir
et mengier au vertjus[1009].

LOCHE cuite en eaue au percil et au bon frommage, mengée à la
moustarde. La frite, en potage et à l’aillet vert. La cuite en l’eaue,
à la moustarde soit mengée: et au frire soit effleurée[1010] celle qui
sera frite.

GAYMEAU cuit en l’eaue, mengié à la moustarde: ou qui veult, à
l’aillet vert.

LAMPROYONS rostis verdelets, mengiés à la sausse chaude comme
cy dessoubs sera dit à la lamproye; et se ils sont cuis en eaue, soient
mengiés à la moustarde: et se ils sont cuis en pasté, gettez la sausse
chaude dessus les pastés, et faites boulir[1011].

LAMPROIES. Il est assavoir que les aucuns saignent la lamproie
avant ce que ils les estauvent, et aucuns les estauvent avant ce qu’ils
les saignent ne eschaudent. Pour la saigner, premièrement lavez très
bien vos mains, puis fendez-lui la gueule parmy le menton, _id est_
joignant du baulièvre, et boutez vostre doit dedens et arrachez la
langue, et faites la lemproie saignier en un plat, et lui boutez une
petite brochette dedans la gueule pour la faire mieulx saigner. Et se
vos dois ou vos mains sont touilliés de sang, si les lavez, et la plaie
aussi, de vinaigre, et faites couler dedans le plat, et gardez ce sang,
car c’est la gresse.

Quant à l’estauver, aiez de l’eaue chauffée, sur le feu, frémiant,
et l’estauvez comme une anguille: d’un coustel non pointu luy pelez
et ratissiez la gueulle par dedens, et gettez hors les riffleures,
puis l’embrochiez et faites rostir verdelette. Et pour faire la
boe[1012], prenez gingembre, canelle, poivre long, graine et une
noix muguette, et broyez et mettez d’une part: puis aiez du pain
brulé tant qu’il soit noir, et le broyez et deffaites de vinaigre et
le coulez par l’estamine; puis mettez boulir le sang, vos espices et
le pain, tout ensemble, un boullon tant seulement, et se le vinaigre
est trop fort, si le attrempez de vin ou de vertjus; et adonc c’est
boue: et est noire, espoisse à point et non pas trop, et le vinaigre
un pou passant[1013], et salé un petit; puis versez tout chault sur la
lamproye, et laissiez suer[1014].

_Item_, l’en peut faire autre sausse plus briefve. Prenez le sang et du
vinaigre et du sel, et quant la lamproie sera rostie verdelette, boulez
icelle sausse un bouillon seulement et gettez sur vostre lamproye, et
laissiez suer entre deux plats.

_Item_, LAMPROIE BOULIE. Saignez-la comme devant est dit, et
gardez le sang: puis la mettez cuire en vinaigre et en vin plain[1015]
et un pou d’eaue, et quant elle sera cuite verdelette, si la traiez
hors du feu et la mettez reffroidier sur une nappe; puis prenez pain
brulé et deffaites de vostre boullon et coulez parmi une estamine, et
puis mettez boulir le sang avec, et mouvez bien qu’il n’arde: et quant
il sera bouly, si versez en un mortier ou en une jatte nette, et mouvez
tousjours jusques à tant qu’il soit reffroidié; puis broyez gingembre,
canelle, fleur de canelle, giroffle, graine de paradis, noix muguettes
et poivre long, et deffaites de vostre boullon, et mettez dedans un
plat comme dit est devant; et doit estre noir[1016].

_Item_, LAMPROIE A L’ESTOUFFÉE. Ostez le sang de la lamproye
comme dessus, puis l’estauvez en eaue bien chaude. Après ce, ayez
vostre sausse preste de boulir, et soit clere, et mettez vostre
lamproye en un pot et vostre sausse dessus, et faites très bien couvrir
d’un couvescle bien joignant et juste, et faites boulir; puis retournez
une fois la lamproie ce dessus dessoubs[1017] ou pot, et faites cuire
verdelette. Et s’elle ne moulle toute en sausse, il n’y a pas péril,
mais que le pot soit bien couvert; puis la mettez toute entière en un
plat sur la table[1018].

ESCREVICES cuites en l’eaue et en vin, mengées au vinaigre.

ABLES cuites en l’eaue et au percil, mengées à la moustarde.

GARDONS ET ROSSES[1019]. C’est friture, et les convient
effonder, puis enfleurer, puis frire; mengier à la sausse vert[1020].

VENDOISES comme dessus, ou rosties sans escharder[1021],
et mengier au vertjus d’ozeille; et est assavoir que vendoises sont
assez plus grans que ables, et sont rondes plus que gardons[1022], car
gardons sont plas.


POISSON DE MER RONT.

Poisson de mer ront en yver, et le plat en esté.

_Nota_ que nulle marée n’est bonne quant elle est chassée par temps
pluyeulx ou moicte.

BRETTE[1023] affaitié comme un rouget, cuite comme une raye,
et ainsi pelée: mengée aux aulx camelins. Et est la brette aussi comme
chien de mer, mais brette est plus petite et plus doulce et meilleure,
et dit-l’en que c’est la femelle du chien: et est brune sur le dos, et
le chien est roux.

CHIEN DE MER comme la brette. Et _nota_ que de l’un et de
l’autre le foie est bon à mettre en pasté, et de la pouldre fine parmy;
et aucuns y mettent du frommage, et est bon.

MULET est dit _migon_[1024] en Languedoc, et est eschardé
comme une carpe, puis effondré au long du ventre, cuit en l’eaue, et du
percil dessus, puis reffroidié en son eaue; et puis mengié à la sausse
vert, et meilleur à l’orenge. _Item_, il est bon en pasté.

MORUE n’est point dicte à Tournay s’elle n’est salée, car la
fresche est dicte _cableaux_[1025], et, se mengue et est cuite comme
dit sera cy-après de morue.

_Item_, quant icelle morue est prise ès marches de la mer, et l’en
veult icelle garder dix ou douze ans, l’en l’effondre, et luy oste-l’en
la teste, et est seichée à l’air et au soleil, et non mie au feu ou à
la fumée; et ce fait, elle est nommée _stofix_[1026]. Et quant l’en
l’a tant gardée et l’en la veult mengier, il la convient batre d’un
maillet de bois bien une heure, et puis mettre tremper en eaue tiède
bien douze heures ou plus, puis cuire et escumer très bien comme beuf;
puis mengier à la moustarde ou mengier trempée au beurre. Et se rien
en demeure au soir, soit par pièces petites comme charpie frit, et mis
pouldre dessus.

Aussi de morue fresche, s’aucune partie en demeure pour le soir ou
pour l’endemain[1027], faictes-en de la charpie et le frisez à pou de
beurre, et puis ostez de la paelle, et puis vuidiez tout le beurre que
riens n’y demeure, et la refrisiez à sec, et filez pardessus des œufs
batus: puis mettez en plateaux ou escuelles et pouldre fine pardessus.
Et s’il n’y a œufs, si se fait-il bien[1028].

Morue fresche, appareillée et cuite comme gournaut et du vin blanc au
cuire, et mengée à la jance; et la salée, mengée au beurre ou mengée
à la moustarde. La salée, pou trempée, sent trop le sel, et la trop
trempée n’est pas bonne; et pour ce, qui l’achaitte, doit essaier à la
dent et en mengier un petit[1029].

MAQUEREL frais entre en saison en Juin, jàsoit-ce que l’en en
treuve dès le mois de Mars. Affaitiez par l’oreille, puis l’essuiez
d’un net torchon, et sans laver aucunement soit mis rostir, puis mengié
à la cameline ou à sel menu; et salé, au vin et à l’eschaloigne[1030].
Et si en met-on en pasté, et pouldre dessus[1031].

Ton est un poisson qui est trouvé en la mer ou estans marinaulx des
parties de Languedoc, et n’a aucunes arestes fors l’eschine, et a dure
pel, et se doit cuire en eaue et se mengue au poivre jaunet[1032].

LANGOUSTES sont grans escrevices, et sont bonnes cuites en
l’eaue, et leur convient estouper d’estoupes la queue par où l’en l’a
vuidée et aussi la gueule et les piés qui sont rompus, et tous les
autres lieux par lesquels aucune liqueur puisse yssir de son corps, et
puis cuire en l’eaue ou en four, et mengié au vinaigre. Toutesvoies,
qui la veult rostir au four, il ne la convient jà estouper, mais
souffit qu’elle soit mise cuire enverse[1033].

CONGRE. Eschaudez-le et estauvez comme une anguille, puis
mis en la paelle et salé comme le rouget, et le cuisiez longuement
comme beuf; et en la parfin mettre boulir avec du percil, puis le
laissiez[1034] refaire en son eaue, puis dréciez et mengiez à la sausse
vert. Aucuns le mettent roussir sur le gril[1035].

TUMBE[1036], ROUGET, GOURNAUT,
GRIMONDIN, soient affaitiés par le ventre et lavés très bien,
puis soient mis en la paelle et du sel pardessus, et puis l’eaue
froide; (et ainsi est-il du poisson de mer, jàsoit-ce que poisson
d’eaue doulce il convient premièrement que l’eaue soit frémiant),
puis soient cuis à petit feu, et mis hors de dessus le feu; laissiez
reffaire en leur eaue et mengiez à la cameline. Toutesvoies, les
grimondins, en esté, fendus sont au long du dos par les espaules,
rostis sur le greil[1037] et arrousés de beurre et mengiés au
vertjus. _Nota_ que tumbe est le plus grant, et sont prises en la mer
d’Angleterre. Gournaut est le plus grant après, et sont toutes ces
deux espèces de couleur tannée[1038]. Le rouget est le plus petit et
le plus rouge, et le grimondin est le mendre de tous et est tanné,
tavellé[1039], et de diverses couleurs; et tous sont comme d’une nature
et d’une saveur.

_Item_, rougets sont bons au chaudumé de vertjus de pouldre et de
saffran.

SAUMON frais soit baconné[1040], et gardez l’eschine pour
rostir; puis despeciez par dales cuites en eaue, et du vin et du sel au
cuire; mengié au poivre jaunet ou à la cameline et en pasté, qui veult,
pouldré[1041] d’espices; et se le saumon est salé, soit mengié au vin
et à la ciboule par rouelles[1042].

AIGREFIN appareillié comme le rouget, et le convient un pou
laissier froidir en son eaue, et soit mengié à la jance[1043].

ORFIN affaitié par l’oreille, cuit en l’eaue, mengié à la
cameline: ou mis par tronçons, et sur les tronçons mettre pouldre fine
et huille d’olive[1044].

PORC DE MER, MARSOUIN, POURPOIS[1045] est
tout un, et le poisson entier doit estre fendu par le ventre comme un
pourcel; et du foye et fressure l’en fait brouet et potage comme d’un
porc. _Item_, l’en le despièce et fend comme un porc, par le dos, et
aucunes fois est rosti en la broche à toute sa couanne, et puis mengié
à la sausse chaude comme brulis[1046] en yver. Autrement, est cuit en
eaue et mis du vin avec, puis de la pouldre et du saffran, et mis en un
plat dedans son eaue comme venoison; puis broyez gingembre, canelle,
giroffle, graine, poivre long et saffran, et deffaites de vostre
boullon, et mettez hors du mortier d’une part; _item_, broyez pain
harlé, deffait de l’eaue de vostre poisson et coulé par l’estamine,
et faictes boulir tout ensemble, et soit claret; puis dréciez comme
venoison. Ou faites poivre noir, et soit vostre poisson, sans laver,
cuit moitié eaue moitié vin, et mis en plas: et gettez vostre sausse
dessus comme galentine, et dréciez. Et quant vous en vouldrez mengier,
prenez un petit de la sauce qui est froide, et mettez ou eaue de char,
ou de celle mesmes, ou vinaigre _et similia_, et mettez sur le feu en
une escuelle chauffer[1047].

MERLUS doit estre despecié par morceaux quarrés comme
eschiquier, puis tremper une nuit seulement, puis le oster hors de
l’eaue, et après mettez séchier sur une touaille; puis mettez vostre
huille boulir, puis frisiez à pou d’huille vos pièces de merlus, et
mengiez à la moustarde ou à jance d’aulx. Merlus est fait, ce semble,
de morue[1048].

ESTURGON. Eschaudez, ostez le limon, couppez la teste et
la fendez en deux. Et premièrement le fendez au long par le ventre
comme l’en fait un pourcel, puis soit vuidié, tronçonné, et mis cuire
en vin et en eaue et que le vin passe; et que à la mesure qu’il se
esboudra[1049] que l’en y mette tousjours vin. Et congnoist-l’en qu’il
est cuit, quant la couanne se liève de légier; et ce que l’en mengue
chaut, l’en y met de l’eaue du bouly et espices comme se ce feust
venoison: et ce que l’en veult garder doit estre mis refroidier, et
mengier au percil et au vinaigre[1050].

ESTURGON CONTREFAIT DE VEEL pour six escuelles. Prenez le soir
devant, ou le bien matin, six testes de veel sans escorcher, et les
plumez en eaue chaude comme un cochon, et les cuisiez en vin, et mettez
une chopine de vinaigre et du sel dedans, et faites boulir tant qu’il
soit tout pourry de cuire; puis laissiez les testes refroidier et ostez
les os. Puis prenez un quartier de bonne grosse toile, et mettez tout
dedans, c’est assavoir l’une sur l’autre en la mendre place que vous
pourrez, puis cousez de bon fort fil, comme un oreillier quarré, puis
le mettez entre deux belles ais et le chargiez très fort, et laissiez
la nuit en la cave; et puis le tailliez par lesches, la couenne dehors
comme venoison, et mettez du percil et du vinaigre, et ne mettez que
deux lesches en chascun plat. _Item_, qui ne trouveroit assez testes,
l’en le peut faire d’un veel entrepelé[1051].

CRASPOIS[1052]. C’est balaine salée, et doit estre par
lesches tout cru, et cuit en eaue comme lart; et servir avec vos pois.

MERLANT SALÉ est bon quant sa noe[1053] est entière, et son
ventre blanc et entier; et est bon au chaudumé de beurre, de vertjus et
de moustarde; et le frais, frit, à la jance.

VIVE a trois lieux périlleux à touchier, c’est assavoir les
arestes qui sont sur le dos près de la teste, les deux oreilles; et
à ce ne convient touchier fors au coustel, et tout ce getter hors,
et tirer la brouaille par l’oreille, et puis enciser au travers en
pluseurs lieux, la rostir, et mengier au vertjus et beurre, ou vertjus
et pouldre.

_Aliter_, cuisiez-la en l’eaue un petit, puis la frisiez en beurre,
puis boulez du vertjus avec le remenant du beurre, et getter sus.


POISSON DE MER PLAT.

RAYE affaitié par endroit le nombril, et gardez le foye, et la
despeciez par pièces, puis la mettez cuire comme plays, puis la pelez
et la mengiez aux aulx camelins.

Raye est bonne en Septembre, et meilleur en Octobre, car lors elle
mengue les harens frais. Celle qui n’a que une queue est _notrée_,
et les autres qui ont pluseurs queues, non. Et encores est-il autre
poisson pareil à raye qui a nom _Tire_, mais il n’a nul aguillon sur le
dos; et si est plus grant et plus tavellé de noir[1054].

GALENTINE POUR RAIE en esté. Broyez amandes et deffaites
d’eaue boulie, et coulez par l’estamine; puis broyez gingembre et aulx,
et deffaites d’icelluy lait d’amandes et passez par l’estamine, et
boulez tout ensemble et mettez sur les pièces de la raye.

Raye qui une fois a esté cuite, s’elle est frite sans farine en huille
et mengée chaude à la cameline, elle est bonne et meilleur que en
galentine froide.

Raye doit estre lavée en plusieurs eaues, puis cuire en petit boullon
et par quartiers, puis peler et laissier refroidier: mais aucuns la
pourboulent en eaue sans sel, puis la tirent, la pellent et nettoient
très bien, et mettent sur beau feurre; puis mettent en une paelle, sur
le feu, de l’eaue et du sel frémier, puis cuire la raye à petit feu.
Et qui veult, l’en en frit une partie de celle qui est pourboulye, et
ceste raye se garde bien huit jours[1055].

PLAYS[1056] ET QUARRELET sont aucques[1057] d’une
nature. La plus grant est nommée _plays_, et la petite _quarrelet_, et
est tavellée de rouge sur le dos; et sont bons du flo[1058] de Mars,
et meilleurs du flo d’Avril. Affaitiez par devers le dos audessoubs de
l’oreille: bien lavée, et mise en la paelle et du sel dessus, et cuite
en l’eaue comme un rouget; et mengiez au vin et au sel.

_Item_, quarrelets sont bons fris à la fleur[1059] et mengiés à la
sausse vert[1060].

LIMANDES sont tavellées de jaune ou roux par le dos, et ont
l’oreille devers le blanc[1061]; soient fris à la fleur et mengiés à la
sausse vert, ou fris par moitié et mengiés au civé ou au gravé[1062].

POLES[1063], SOLES sont d’une nature; et sont les
poles tavellées par le dos. Il les convient escharder et affaitier
comme la plays, laver et mettre en la paelle, et du sel dessus et
de l’eaue, puis faire cuire, et à la parfin mettre du percil avec;
puis laissier reffaire en leur eaue, et mengier à la sausse vert ou
au beurre avec de leur eaue chaude, ou au chaudumé de vertjus vieil,
moustarde et beurre chauffé ensemble.

_Item_, l’en les rostit sur le greil[1064] et du feurre moullié entre
deux; et celles ne doivent point estre eschardées et sont mengées au
vertjus d’oseille.

_Item_, aussi sont eschaudées celles que l’en doit frire, et doivent
estre enfleurées, puis frites, mengées à la sausse vert[1065], et mises
au civé ou gravé.

TURBOT est dit _Ront_ à Bésiers. Soit eschardé, appareillié
comme dessus et mengié à la sausse vert, ou mis au soucié[1066]; et
vault mieulx froit de deux jours.

BARBUE eschardée, appareilliée comme dessus, cuite et mengée,
car tout est d’une espèce et d’une saveur, fors tant que la barbue est
plus petite[1067], et le turbot greigneur et meilleur.

BRESME, BAITTE[1068] eschardée, cuite en eaue, mengée
à la cameline ou mise en pasté à la pouldre[1069].

TANTE[1070] cuite en eaue ou rostie, mengée au vertjus.

DORÉE appareilliée par le costé au long, cuite en eaue, ou en
rost, mengée au vertjus.

ALES rosties en filopant[1071], mengées à la moustarde; ou
pelées, puis cuites en l’eaue un très petit, puis enfarinées, frites à
l’uille, et mengées à la jance ou aux aillets.

FLAYS[1072]. De ce ne convient faire nul compte, car ils
ne sont en saison fors quant le quarrel[1073] font soubs le pié. Ce
poisson n’est point tavelé de rouge sur le dos comme sont quarrelets,
et si ont le dos bien noir.

HANONS[1074]. _Nota_ que les hanons qui sont ensemble
amoncelés et se entretiennent à une masse sans esparpillier ou
départir, et sont vermeils et de vive couleur, sont frais: et ceulx qui
ne s’entretiennent et sont esparpilliés et de fade ou morte couleur,
sont de vieille prise. Soient esleus, puis lavez très bien et eschaudez
en deux ou trois eaues bien chaudes, et puis refais en eaue froide,
puis seicher sur une touaille bien petit au feu, et soient fris en
huille avec oignons cuis, et après poudrés d’espices et mengiés aux
aillets vers clarets, reverdis de blé ou d’ozeille[1075] ou de feuille
de sanemonde ou de barbarin.

MOULES[1076] soient cuites en grant feu et hastivement, en
très petit d’eaue et de vin sans sel, mengées au vinaigre. _Item_,
quant elles sont cuites avec vertjus vieil et percil, puis mettez
beurre frais, c’est très bon potage.

Moules sont les meilleurs ou commencement du nouvel temps de Mars.
Moule de Quayeu[1077] est rousse, ronde au travers et longuette, et la
moule de Normandie est noire.

ESCREVICES. Cuisiez-les en eaue et vin plus que d’eaue, et
escumez, puis mettez un petit de sel (jàsoit-ce que aucuns dient que
non, pour ce que le sel noircist[1078]).

ESCREVICES DE MER doivent estre cuites en four, et dit-l’en
_lengoustes_, et convient estouper tous les pertuis à la guise du
fournier, et mengier trenchiée au vinaigre et à la ciboule.

SEICHE CONRÉE[1079] soit pelée, puis despeciée par morceaulx,
puis la mettez en une paelle sur le feu et du sel avec, et remuez
souvent, et qu’elle soit bien séchée; puis la mettez en une nappe, et
l’espraignez bien et seichez çà et là par la nappe; puis l’enfarinez
en farine, et frisiez en foison d’uille ou à oignons ou sans oignons,
puis pouldrez d’espices dessus, et mengiez aux aillets reverdis de blé.

_Item_, aucuns après ce qu’elle est pelée et mise par morceaulx, la
tiennent et remuent longuement en la paelle pour getter son humeur et
sa liqueur laquelle l’en doit souvent getter et purer. Et quant elle
ne gette plus rien, l’en l’essuye comme dessus, et puis la frit-l’en
en foison d’uille longuement, tant qu’elle devient grédelié[1080] et
recroquillée comme chaons[1081] de lart, et adonc est mise en un plat
et de la pouldre fine dessus, et ainsi mengée. Et en la paelle où est
demourée l’uille toute chaude sur le feu, laquelle huille a receu la
freschumée de la sèche, dont elle vault pis, l’en doit getter du vin
froit qui par fumée fait yssir la freschumée; et ainsi l’uille demeure
bonne pour potages, et meilleur que autres qui ne sont mie cuites.

_Item_, qui n’auroit autre viande que sèche, et elle fust frite aux
oignons comme dessus, puis mise en deux plats et avoir bonne jance aux
aulx boulie et gettée dessus, ce seroit appétit assez passable[1082].

Sèche fresche soit lavée très bien, puis mise en une paelle ou four
avec de l’eaue, du vertjus, de l’uille et des ciboules nouvelles, et
cuite; mais _primo_ soient ostés l’os et l’amer.


ŒUFS DE DIVERS APPAREILS.

UNE ARBOULASTRE ou deux d’œufs. Prenez du coq deux fueilles
seulement, et de rue moins la moitié ou néant[1083], car sachez qu’il
est fort et amer: de l’ache, ténoisie[1084], mente et sauge, de chascun
au regart de quatre fueilles ou moins, car chascun est fort: marjolaine
un petit plus, fenoul plus, et percil encores plus; mais de porée,
bettes, feuilles de violettes, espinars et laitues, orvale, autant
de l’un comme de l’autre, tant que de tout vous aiez deux poignées
largement: eslisez et lavez en eaue froide, puis les espraignez et
ostez toute l’eaue, et broyez deux cloches de gingembre; puis mettez
ou mortier à deux ou à trois fois vos herbes avec le dit gingembre
broyé, et broyez l’un avec l’autre. Et puis aiez seize œufs bien
batus ensemble, moyeux et aubuns, et broyez et meslez ou mortier avec
ce que dit est, puis partez en deux, et faites deux alumelles[1085]
espesses qui seront frites par la manière qui s’ensuit: premièrement
vous chaufferez très bien vostre paelle à huille, beurre ou autre telle
gresse que vous vouldrez, et quant elle sera bien chaude de toutes
pars, et par espécial devers la queue, meslez et espandez vos œufs
parmy la paelle et tournez à une palette souvent ce dessus dessoubs,
puis gettez de bon frommage gratuisé[1086] pardessus; et sachez que ce
est ainsi fait pour ce[1087] qui brayeroit[1088] le frommage avec les
herbes et œufs, quant l’en cuideroit frire son alumelle, le frommage
qui seroit dessoubs se tendroit à la paelle; et ainsi fait-il d’une
allumelle d’œufs, qui mesle les œufs avec le frommage. Et pour ce l’en
doit premièrement mettre les œufs en la paelle, et mettre le frommage
dessus, et puis couvrir des bors des œufs: et autrement se prendroient
à la paelle. Et quant vos herbes seront frites en la paelle, si donnez
forme quarrée ou ronde à vostre arboulastre et la mengiez ne trop
chaude ne trop froide.

ŒUFS PERDUS. Rompez l’escaille et gettez moieulx et aubuns sur
charbons ou sur brèse bien chaude, et après les nettoyez et mengiez.

ŒUFS HEAUMÉS. Cassez le bout et vuidiez l’aubun, et le moyeu
estant en la coquille, mettez et asséez icelle coquille sur une tuille,
le trou de la coquille dessoubs.

ALUMELLE[1089] FRITE AU SUCRE.✝ Ostez tous les aubuns et batez les
moyeux, puis mettez du sucre en la paelle et il se fondra, et après ce
frisiez dedans vos aubuns, puis mettez en un plat, et du sucre dessus.

ŒUFS PERDUS. Prenez quatre moyeux d’œufs et les batez, et du
sucre en pierre batu et en pouldre, et soit tout batu ensemble très
bien, puis coulé en l’estamine, puis frit au fer de la paelle et après
trenchié par losenges; puis avecques aultre allumelle d’œufs pochés,
soient icelles losenges mises ou plat et fine pouldre par-dessus[1090].

POUR FAIRE BELLE ALLUMELLE D’ŒUFS. Prenez sept œufs et
des[1091] deux ostez les aubuns et les mettez en une escuelle, et tous
les autres cassez sur[1092] moyeux, et batez tout ensemble, et frisiez;
et ils seront jaunes.

_Aliter_, prenez dix ou douze œufs et ostez les aubuns et batez les
moyeux, puis les frisiez en huille, et soient bien espandus en la
paelle et couppés par losenges, et chascune losenge retournée à la
palette ce dessoubs dessus, puis mettre en un plat demye allumelle
d’œufs fris communément et quatre losenges de ces moyeux, et du succre
fris communément.

ARBOULASTRE EN TARTRE FAICTE EN LA PAELLE. Aiez vos œufs et
herbes et une cloche de gingembre batues, meslées et broyées comme
devant est dit, puis aiez de la paste pestrie ainsi comme pour le fons
d’une tartre, et chauffez vostre paelle à huille ou autre gresse: puis
mettez vostre paste pestrie dedans le fons de la paelle, puis mettez la
farce de vostre tartre avec frommage gratuisié meslé parmi à souffisant
planté. Et pour ce que le dessoubs, c’est assavoir la paste qui fait
le fons de la tartre, seroit cuit avant que le dessus feust guères
eschauffé, il convient avoir une autre paelle dont le fons soit bien
eschauffé, torché et nettoyé, et soit icelle paelle plaine de charbon
ardant, et la mettez par dedans l’autre paelle, près et joignant de
la farce, pour icelle eschauffer et cuire à l’essuyé[1093] et aussi à
ouni[1094] comme la paste.

ŒUFS A LA TENOISIE[1095]. Broyez un petit de gingembre et de
la tenoisie, et allaiez de vinaigre, coulez et mettez en un plat et des
œufs durs pelés tous entiers.

_Nota_ DE LA NATURE DES ŒUFS. Mettez-les cuire en eaue boulant
et le moyeu ne sera point dur, toutesvoies se vous ne les avez
moulliés en eaue froide premièrement: mais se vous les y avez moulliés
et incontinent vous les mettez en potage boullant, ils durciront bien.
_Item_, se vous les mettez en eaue frémiant et les laissiez sur le feu,
ils seront tantost durs. _Item_, soient mols, soient durs[1096], si
tost qu’ils sont cuis, vous les mettez en eaue froide, ils seront plus
aisiés à peler.


ENTREMÈS, FRITURES ET DORURES.

FROUMENTÉE[1097]. Premièrement, vous convient monder vostre
froument ainsi comme l’en fait orge mondé, puis sachiez que pour dix
escuelles convient une livre de froument mondé, lequel on treuve
aucunes fois sur les espiciers tout mondé pour un blanc[1098] la livre.
Eslisiez-le et le cuisiez en eaue dès le soir, et le laissiez toute
nuit couvert emprès le feu en eaue comme tiède, puis le trayez et
eslisez. Puis boulez du lait en une paelle et ne le mouvez point, car
il tourneroit: et incontinent, sans attendre, le mettez en un pot qu’il
ne sente l’arain; et aussi, quant il est froit, si ostez la cresme de
dessus afin que icelle cresme ne face tourner la fourmentée, et de
rechief faites boulir le lait et un petit de froument avec, mais qu’il
n’y ait guères de froument; puis prenez moyeux d’œufs et les coulez,
c’est assavoir pour chascun sextier de lait un cent d’œufs, puis prenez
le lait boulant, et batre les œufs avec le lait, puis reculer le pot
et getter les œufs, et reculer; et se l’en veoit qu’il se voulsist
tourner, mettre le pot en plaine paelle d’eaue. A jour de poisson,
l’en prend lait: à jour de char, du boullon de la char; et convient
mettre saffran se les œufs ne jaunissent assez: _item_, demie cloche de
gingembre[1099].

FAULX GRENON. Cuisiez en eaue et en vin des foies et des
jugiers[1100] de poulaille, ou de char de veel, ou d’une cuisse de porc
ou de mouton, puis la hachiez bien menuement et friolez au saing de
lart: puis broyez gingembre, canelle, giroffle, graine, vin, vertjus,
boullon de beuf ou de celluy mesmes, et des moyeux grant foison, et
coulez dessus vostre char, et faites bien boulir ensemble. Aucuns y
mettent du saffran, car il doit estre sur jaune couleur, et aucuns y
mettent pain harlé, broyé et coulé, car il doit estre liant et d’œufs
et de pain, et si doit estre aigre de vertjus. Et au drécier, sur
chascune escuelle, pouldrez pouldre de canelle[1101].

MORTEREUL est fait comme faulx grenon, sauf tant que la char
est broyée ou mortier avec espices de canelle: et n’y a point de pain,
mais pouldre de canelle pardessus.

TAILLIS à servir comme en karesme. Prenez fins roisins, lait
d’amandes bouli, eschaudés, galettes et croutes de pain blanc et pommes
couppées par menus morceaulx quarrés, et faites boulir vostre lait, et
saffren pour lui donner couleur, et du succre, et puis mettez tout
ensemble tant qu’il soit bien liant pour tailler[1102]. L’en en sert en
karesme en lieu de riz.

POUCINS FARCIS. Il convient souffler un poucin quant il est
tout vif, et est soufflé par le col; puis liez le col et laissiez
mourir: puis eschaudé, plumé, effondré, reffait et farcy.

_Item_, autrement, quant il est du tout appareillié pour mettre en
broche, par endroit le pertuis là où l’en l’a effondré, l’en luy
dessevre[1103] au doit la pel de la char, puis l’en le farcist au bout
du doit, et recoust-l’en à sourget[1104], endroit le trou, la pel avec
la char, et met-l’en en broche.

Et _nota_ que la farce est faite de percil et un petit de sauge avec
œufs durs et beurre, tout hachié ensemble, et mettre parmi pouldre fine
avec. A chascun poucin convient trois œufs, blanc et tout.

POUR ENGRESSER POUCINS, mettez-les en orbe[1105] lieu, et leur
nettoiez leur auget ou abeuvrouer neuf fois ou dix le jour, et leur
donnez à chascune fois nouvelle paisson, et fresche et nouvelle eaue;
c’est assavoir pour paisson, avoine batue que l’en doit dire _gruyau
d’avoine_, destrempé en lait ou matons[1106] de lait un petit; et aient
le pié sec jusques à neuf jours.

POUR ENGRESSER UNE OÉ EN TROIS JOURS, paissez-la de mie de
pain chault trempé en matons ou lait maigre[1107].

POUR FAIRE PERDRIAULX DE POUCINS, il convient avoir petites
poulettes, et les tuer un ou deux jours devant, puis appareillier, et
copper les jambes et les cols, oster les charcois[1108] et getter hors,
rompre la granche[1109], et pousser les cuisses pour faire la char plus
courte, puis boutonner et rostir, et mengier au sel comme perdriaulx.

POULAILLE FARCÉE AUTREMENT[1110]. Prenez vos poulles et
leur couppez le gavion, puis les eschaudez et plumez, et gardez que
au plumer la peau ne soit dessirée; puis les reffaites en eaue, puis
prenez un tuel et le boutez entre cuir et char, et le[1111] soufflez:
puis le[1111] fendez entre deux espaules et n’y faictes pas trop grant
trou, et en tirez hors les charcois, et le[1112] laissiez à sa peau les
cuisses, les esles, le cul[1113] à tout la teste et piés. Et pour faire
la farce, prenez char de mouton, de veel et de porc et du braon[1114]
des poulles; hachiez tout ensemble tout cru, puis le broyez en un
mortier, et des œufs tous crus avec et de bon fromage de gain[1115] et
de bonne pouldre d’espices et bien pou de saffren, et saler à point.
Puis emplez vos poulles et ce trou soit recousu[1116], et du remenant
de vostre farce faites-en pommes ainsi comme pasteaulx de guède[1117],
et mettez cuire en boullon de beuf ou en belle eaue[1118] boulant, et
du saffran grant foison, et qu’il ne boulle pas trop fort qu’ils ne se
despiècent; puis les enhastez en une broche bien déliée. Et pour les
dorer, prenez grant foison de moieux d’œufs et les batez bien en un pou
de saffren broyé avec, et les en dorer; et qui veult dorer vert, si
broye la verdure et puis des moyeux d’œufs grant foison bien batus et
passés par l’estamine pour la verdure, et en dorer poulaille quant elle
sera cuite et vos pommes. Et dréciez vostre broche ou vaissel où vostre
doreure sera, et gettez tout au long vostre doreure, et remettez au feu
par deux fois ou par trois, afin que vostre doreure se preingne; et
gardez que vostre doreure n’ait pas trop grant[1119] feu afin qu’elle
ne arde.

RIS ENGOULÉ à jour de mengier char. Eslisez-le et le lavez en
deux ou en trois paires d’eaues chaudes, et mettez ressuer sur le feu,
puis le mettez en lait de vache frémiant, et broyez du saffran pour
le jaunir: deffait de vostre lait, et puis mettez dedans du gras du
boullon de beuf[1120].

_Aliter_, RIS. Eslisez-le et le lavez en deux ou trois paires
d’eaues chaudes tant que l’eaue reviengne toute clère, puis le faites
ainsi comme demy cuire, puis le purez et mettez sur tranchouers en
plas pour esgouter et séchier devant le feu: puis cuisiez bien espois
avec l’eaue de la gresse de la char de beuf et avec du saffran, se
c’est à jour de char: et se c’est à jour de poisson, n’y mettez pas
eaue de char, mais en ce lieu mettez amandes bien forment broyées et
sans couler; puis succrer et sans saffren.

POUR FAIRE UNE FROIDE SAUGE, prenez vostre poulaille et mettez
par quartiers, et la mettez cuire en eaue avec du sel, puis la mettez
reffroidier: puis broyez gingembre, fleur de canelle, graine, giroffle,
et broyez bien sans couler; puis broyez du pain trempé en l’eaue des
poucins, percil le plus, sauge et un pou de saffren en la verdure pour
estre vertgay, et les coulez par l’estamine, (et aucuns y coulent[1121]
des moyeux d’œufs durs) et deffaites de bon vinaigre: et icelles
deffaites, mettez sur vostre poulaille, et avec et pardessus icelle
poulaille mettez des œufs durs par quartiers et gettez vostre sausse
pardessus tout.

_Aliter_, prenez le poucin et le plumez, puis le mettez boulir et du
sel tant qu’il soit cuit, puis l’ostez et le mettez par quartiers
reffroidier: puis mettez cuire des œufs durs en l’eaue, et mettez du
pain tremper en vin et vertjus ou vinaigre, et autant de l’un comme de
l’autre; puis prenez du percil et de la sauge, puis broyez gingembre,
graine, et coulez par l’estamine, et coulez les moyeux d’œufs et mettez
des œufs durs par quartiers dessus les poucins, et puis mettez vostre
sausse pardessus.

SOUS DE POURCELET se fait ainsi comme d’une froide sauge,
sans y mettre nuls œufs et point de sauge ne de pain. Il est fait du
groing, des oreilles, de la queue, des jarrets cours[1122], et des
quatre trotignons[1123] bien cuis et très bien plumés, puis mis en
sausse de percil broyé, vinaigre et espices.

POTAGE PARTI OU[1124] FAULX GRENON.✝ Prenez une cuisse de mouton ou
foies et jugiers de poulailles, et les mettez cuire très bien en eaue
et en vin, et les tranchez comme quarrés: puis broyez gingembre,
canelle, giroffle et un pou de saffren et graine de paradis, et
deffaites de vin et de vertjus, du bouillon de char, (de celluy mesmes
ou de la char à cuire[1125],) et puis ostez du mortier; puis aiez pain
hazé[1126] trempé en vin et vertjus, broyez très bien, et après ce le
passez par l’estamine, et faictes tout boulir ensemble, puis prenez la
char et la frisiez au lart et la gettez dedans, et prenez dedens[1127]
moieux d’œufs passés par l’estamine, et gettez dedans pour lier. Et
après dréciez par escuelles, et gettez dessus pouldre de canelle et
sucre: c’est assavoir gettez sur la moitié de l’escuelle et non sur
l’autre; et l’apelle-l’en _Potage parti_[1128].

FLAONS EN KARESME. Affaitiez et estauvez anguilles:
cuisiez-les après en si chaude eaue que vous en puissiez oster la char
sans les arestes, et laissiez aussi la teste et la queue, et ne prenez
que la char; et broyez du saffren ou mortier, puis broyez dessus
la char de l’anguille, destrempez de vin blanc, et de ce faites vos
flaons; et succrez pardessus.

_Item_, flaons ont saveur de frommage quant l’en les fait de laittences
de lus, de carpes, amandes ou amidon broyés, et du saffren destrempé de
vin et de sucre foison dessus.

_Item_, se font de char de tanches, lus, carpes, et amidon, saffran,
deffait de vin blanc et succre dessus.

TARTE JACOBINE. Prenez des anguilles et les eschaudez et
tronçonnez par petis tronçons qui n’aient que demy doit d’espois, et
prenez de la cloche[1129], du frommage de gain[1130] esmié, et puis
cela soit porté au four et que l’en face une tarte, et que l’en pouldre
du frommage au fons, et puis que l’en mette l’anguille debout, et puis
du frommage un lit, et puis un lit de cols[1131] d’escrevices, et
tousjours, tant comme chascun durera, un lit d’un et un lit d’autre. Et
puis boulez du lait, et puis boulez[1132] du saffran et du gingembre,
graine, giroffle, et puis destrampez du lait, et puis mettez dedans la
tartre quant elle aura esté un pou au four, et mettez du sel dedans le
lait, et qu’elle ne soit point couverte; et pongnez[1133] les piés des
escrevices, et faites un joly couvescle à par soy[1134], pour mettre
dessus quant elle sera cuite.

AUTRE TARTRE. _Nota_ que de la farcissure d’un cochon
peut-l’en faire une tartre couverte, et que la farce soit bien faite.

POUR FAIRE UNE TOURTE, prenez quatre pongnées de bettes, deux
poignées de percil, une pongnée de cerfueil, un brain de fanoil et deux
pongnées d’espinoches[1135], et les eslisez et lavez en eaue froide,
puis hachiez bien menu: puis broyez de deux paires de frommages, c’est
assavoir du mol et du moïen, et puis mettez des œufs avec ce, moyeu et
aubun, et les broyez parmi le frommage; puis mettez les herbes dedans
le mortier et broyez tout ensemble, et aussi mettez-y de la pouldre
fine. Ou en lieu de ce aiez premièrement broyé ou mortier deux cloches
de gingembre, et sur ce broyez vos frommages, œufs et herbes, et puis
gettez du vieil frommage de presse[1136] ou autre gratuisé[1137] dessus
celles herbes, et portez au four, et puis faites faire une tartre et la
mengez chaude.

POUR FAIRE QUATRE PLATS DE GELÉE DE CHAR, prenez un cochon et
quatre piés de veau et faites plumer deux poucins et deux lappereaulx
tous meigres, et fault oster la gresse, et seront fendus tout au long
tous crus, excepté le cochon qui est par morceaulx: et puis mettez en
une paelle trois quartes de vin blanc ou claret, une pinte de vinaigre,
une chopine de vertjus, faictes boulir et escumer fort; puis mettez
dedans en un petit drapelet délié le quart d’une once de saffran
pour donner couleur ambrine, et faictes boulir char et tout ensemble
avec un pou de sel; puis prenez dix ou douze cloches de gingembre
blanc[1138] ou cinq ou six cloches de garingal, demie once de graine de
paradis, trois ou quatre pièces de folium de macis, pour deux blans,
citoual[1139]: cubebbes[1140], espic[1141] pour trois blans: fueilles
de lorier, six nois muguettes; puis les escachiez en un mortier et
mettez en un sachet et mettez boulir avec la char tant qu’elle soit
cuite, puis la traiez et mettez sécher sur une nappe blanche, puis
prenez pour le meilleur plat les piés, le groin et les oreilles: et
du remenant aux autres. Puis prenez une belle touaille[1142] sur deux
tresteaux, et versez tout vostre chaudeau dedans, excepté les espices
que vous osterez, et mettez couler pour potage, et ne la remuez point
afin qu’elle reviengne plus clère. Mais s’elle ne couloit bien, si
faites feu d’une part et d’autre pour la tenir chaude pour mieulx
couler, et la coulez avant deux ou trois fois qu’elle ne soit bien
clère[1143], ou parmi une nappe en trois doubles. Puis prenez vos plas
et dréciez vostre char dedans, et aiez des escrevices cuites, dont vous
mettrez dessus votre char des cuisses et la queue; de vostre gelée,
laquelle sera réchauffée, versez tant dessus la char que la char baigne
et soit couverte dedans, car il n’y doit avoir que un petit de char,
puis mettre une nuit refroidier en la cave, et au matin poigniez dedans
clos de giroffle et fueilles de lorier et fleur de canelle, et semez
anis vermeil. _Nota_ que pour la faire prendre en deux heures, il
convient avoir graine de coings, philicon[1144] et gomme de cerisier,
et tout ce faire conquasser et mettre en un sac de toile boulir avec
la char.

_Item_, à jour de poisson, l’en fait gelée comme dessus, de lus, de
tanches, de bresmes, d’anguilles, d’escrevices et de loche. Et quant
le poisson est cuit, l’en le met essuier et sécher sur une belle nappe
blanche, et le peler et nettoier très bien, et getter les peleures ou
bouillon.

_Item_, POUR FAIRE GELÉE BLEUE, prenez dudit boullon, soit
poisson ou char, et mettez en une belle paelle et faites boulir encores
sur le feu, et prenez sus un espicier deux onces de tournesot[1145] et
le mettez boulir avec tant qu’il ait bonne couleur, puis l’espraingnez
et ostez: et puis prenez une pinte de loche[1146] et le cuisiez autre
part, et eschaudez la loche en vos plats, et laissiez couler le boullon
comme dessus, et laissiez refroidier. _Item_, de ce mesmes se fait un
bleu. Et se vous voulez faire armoirie dessus la gelée, prenez or ou
argent, lequel que mieulx vous plaira, et de l’aubun d’un œuf tracez à
une plumette, et mettez de l’or dessus à une pincette.

_Aliter_, POUR VINT PLAS DE GELÉE convient dix lappereaulx
meigres, dix poucins meigres, une chopine de loche qui peut valoir
trois sols: un cent d’escrevices qui ne soient pas de Marne, six sols:
un cochon meigre, trois sols huit deniers; (et combien qu’il soit
meigre, encores convient-il oster la gresse d’entre la couenne et
la char, et faire petis morceaulx quarrés,) trois espaules de veau,
quatre sols: huit quartes de vin pour cuire le veau tout en vin, deux
quartes de vinaigre: demie aulne de toile de lin, deux sols. _Item_, il
convient cuire le veel tout en vin et vinaigre, et escumer et mettre
du sel dedans, puis traire[1147], et cuire les lappereaulx et poucins,
et escumer, et mettre la moitié du lorier et mettre du saffren en une
toile ou sachet pour cuire avec: aussi mettre les espices bien petit
moulues ou mortier de pierre; et quant tout est cuit, si le faictes
couler parmy l’estamine et toile, et regetter tant qu’il soit bien
cler; puis cuisiez la loche d’une part et les escrevisses d’autre, et
prenez les queues des escrevisses, et faites vos plats chascun de demy
lappereau, demy poucin, six loches et quatre[1148] queues d’escrevices;
et les mettez en la cave ou celier, et asséez vos plats bien drois, et
gettez vostre gelée dessus et l’emplez bien. Et le lendemain[1149],
mettez sur chascun plat violette blanche, grenade et dragée vermeille
et quatre fueilles de lorier.

UNE ANDOUILLE D’ESTÉ. Prenez une fressure d’aignel ou chevrel
et ostez la taye, et le remenant cuisiez en eaue et un petit de sel:
et quant elle sera cuite, si la hachez bien menu ou broyez, puis ayez
six moyeux d’œufs et pouldre fine, une cuillier d’argent, et hatez tout
ensemble en une escuelle; puis mettez et meslez vostre fressure avec
vos moyeux d’œufs et pouldre, puis estendez tout sur la coiffe ou taye,
et entortilliez en guise d’andouille, puis liez de fil laschement du
long, et puis au travers bien dru; et puis rostir sur le greil, puis
ostez le fil et servir. _Vel sic_: faites-en pommettes, c’est assavoir
de la taye mesmes, et icelles pommettes frisiez en sain de porc doulx.

POMMEAULX. Prenez d’un cuissot de mouton le meigre tout cru,
et autant de la cuisse de porc meigre: soit tout ensemble hachié bien
menu, puis broyez ou mortier gingembre, graine, giroffle, et mettez en
pouldre sur vostre char hachée, et puis destrempez d’aubun et non pas
du moyeu; puis paumoyez[1150] aux mains les espices et la char toute
crue en luy donnant forme de pomme, puis quant la forme est bien faite,
l’en les met cuire en l’eaue avec du sel, puis les ostez, et ayez de
broches de couldre[1151] et les embrochiez et mettez rostir; et quant
ils se roussiront, ayez percil broyé et passé par l’estamine et de la
fleur[1152] meslée ensemble, ne trop cler ne trop espois, et ostez vos
pommeaulx de dessus le feu et mettez un plat dessoubs, et en tournant
la broche sur le plat, oingnez vos pommeaulx, puis mettez au feu tant
de fois que les pommeaulx deviennent[1153] bien vers.

RENOULLES[1154]. Pour les prendre, aiez une ligne et un ameçon
avec esche[1155] de char ou d’un drap vermeil, et icelles renoulles
prises, couppez-les à travers parmi le corps emprès les cuisses et
vuidiez ce qu’il y sera emprès le cul, et prenez desdictes renoulles
les deux cuisses, coupez les piés, et lesdites cuisses pelez toutes
crues, puis aiez eaue froide et les lavez; et se les cuisses demeurent
une nuit en eaue froide, de tant sont-elles meilleurs et plus tendres.
Et ainsi trempées, soient lavées en eaue tiède, puis mises et essuites
en une touaille; lesdictes cuisses, ainsi lavées et essuites, soient
en farine touillées, _id est_ enfarinées, et puis frites en huille,
sain ou autre liqueur, et soient mises en une escuelle et de la pouldre
dessus[1156].

LIMASSONS que l’en dit _escargols_, convient prendre à matin.
Prenez les limassons jeunes, petis, et qui ont coquilles noires, des
vignes ou des seurs[1157], puis les lavez en tant d’eaue qu’ils ne
gettent plus d’escume: puis les lavez une fois en sel et vinaigre et
mettez cuire en eaue. Puis il vous convient traire iceulx limassons de
la coquerette au bout d’une espingle ou aguille, et puis leur devez
oster leur queue, qui est noire, car c’est leur m..de; et puis laver,
mettre cuire et boulir en eaue, et puis les traire et mettre en un
plat ou escuelle, à mengier au pain. Et aussi dient aucuns qu’ils sont
meilleurs fris en huille et oignon ou autre liqueur après ce qu’ils
sont ainsi cuis que dit est dessus, et sont mengiés à la pouldre, et
sont pour riches gens[1158].

PASTÉS NORROIS sont fais de foie de morue et aucunes fois
du poisson hachié avec. Et fault premièrement un petit pourboulir,
puis hacher, et mis en petis pastés de trois deniers pièce et de la
pouldre fine pardessus. Et quant le pasticier les apporte non cuis ou
four, sont fris tous entiers en huille et c’est à jour de poisson; et
à jour de char, l’en les fait de mouelle de beuf qui est reffaite,
c’est à dire que l’en met icelle mouelle dedans une cuillier percée,
et met-l’en icelle cuillier percée avec la mouelle dedans le bouillon
du pot à la char, et l’y laisse-l’en autant comme l’en laisseroit un
poucin plumé en l’eaue chaude pour reffaire; et puis la met-l’en en
eaue froide, puis couppe-l’en la mouelle et arrondist-l’en comme gros
jabets[1159] ou petites boulettes, puis porte-l’en au pasticier qui les
met quatre et quatre ou trois en un pasté et de la pouldre fine dessus.
Et sans cuire ou four sont cuis en sain.

Et qui en veult faire _buignets de mouelle_, convient la reffaire en la
manière[1160], puis prendre de la fleur et des moyeux d’œufs et faire
le[1161] paste, prendre chascun morcel de mouelle et frire au sain. Des
buignets quérez le remenant.


AUTRES ENTREMÈS.

LAIT LARDÉ. Prenez lait de vache ou de brebis et mettez
fremier sur le feu, et gettez des lardons et du saffran: et aiez œufs,
_scilicet_ blanc et moyeux, bien batus, et gettez à ung coup, sans
mouvoir, et faites boulir tout ensemble, et après l’ostez hors du feu
et laissiez tourner; ou, sans œufs, le fait-l’en tourner de vertjus.
Et quant il est refroidié, l’en le lie bien fort en une pièce de toile
ou estamine et luy donne-l’en quelque forme que l’en veult, ou plate
ou longue et chargié d’une grosse pierre laissiez reffroidier sur un
dréçouer toute nuit, et l’endemain lachié et frit au fer de la paelle,
et se frit de luy mesmes sans autre gresse[1162], ou à gresse qui
veult; et est mis en plas ou escuelles comme lesche de lart, et lardé
de giroffle et de pignolat. Et qui le veult faire vert, si preigne du
tournesol.

RISSOLLES A JOUR DE POISSON. Cuisiez chastaingnes à petit feu
et les pelez, et aiez durs œufs et du frommage pelé et hachez tout bien
menu; puis les arrousez d’aubuns d’œufs, et meslez parmy pouldre et
bien petit de sel délié, et faites vos rissoles, puis les frisiez en
grant foison d’uille et succrez.

Et _nota_, en karesme, en lieu d’œufs et frommage, mettez merlus et
escheroys cuis, bien menu hachiés, ou char de brocherès ou d’anguilles,
figues et dates hachées.

_Item_, au commun[1163], l’en les fait de figues, roisins, pommes
hastées et noix pelées pour contrefaire le pignolat, et pouldre
d’espices: et soit la paste très bien ensaffrenée, puis soient frites
en huille. S’il y convient lieure[1164], amidon lie et ris aussi.
_Item_, char de langouste de mer y est bonne en lieu de char.

RISSOLLES EN JOUR DE CHAR sont en saison depuis la Saint
Remy[1165]. Prenez un cuissot de porc, et ostez toute la gresse qu’il
n’y en demeure point, puis mettez le meigre cuire en un pot et du sel
largement: et quant elle sera presque cuite, si la traiez et aiez œufs
durs cuis, et hachiez aubun et moyeu, et d’autre part hachiez vostre
grain bien menu, puis meslez œufs et char tout ensemble, et mettez
pouldre dessus, puis mettez en paste et frisiez au sain de luy mesmes.
Et _nota_ que c’est propre farce pour cochon; et aucunes fois les queux
l’achetent des oubloiers[1166] pour farcir cochons: mais toutesvoies,
à farcir cochon, il est bon de y mettre bon vieil frommage.

_Item_, à la court des seigneurs comme Monseigneur de Berry, quant l’en
y tue un beuf, de la mouelle l’en fait rissolles[1167].

CRESPES. Prenez de la fleur et destrempez d’œufs tant moyeux
comme aubuns, osté le germe, et le deffaites d’eaue, et y mettez du sel
et du vin, et batez longuement ensemble: puis mettez du sain sur le
feu en une petite paelle de fer, ou moitié sain ou[1168] moitié beurre
frais, et faites[1169] fremier; et adonc aiez une escuelle percée d’un
pertuis gros comme vostre petit doit, et adonc mettez de celle boulie
dedans l’escuelle en commençant ou milieu, et laissiez filer tout
autour de la paelle; puis mettez en un plat, et de la pouldre de succre
dessus[1170]. Et que la paelle dessusdite de fer ou d’arain tiengne
trois choppines, et ait le bort demy doy de hault, et soit aussi large
ou dessus comme en bas, ne plus ne moins; et pour cause.

CRESPES A LA GUISE DE TOURNAY. _Primo_, il vous convient avoir
fait provision d’une paelle d’arain tenant une quarte, dont la gueule
ne soit point plus large que le fons, se très petit non, et soient les
bors de hauteur quatre doie ou trois doie et demye largement. _Item_,
convient estre garni de beurre salé, et fondre, escumer et nettoier,
et puis verser en une autre paelle, et laissier tout le sel et de
sain frais bien net autant de l’un comme de l’autre. Puis prenez des
œufs et les frisiez, et de la moitié d’iceulx ostez les aubuns, et
le remenant d’iceulx soient batus avec tous les aubuns et moieux,
puis prenez le tiers ou le quart de vin blanc tiède, et meslez tout
ensemble: puis prenez la plus belle fleur de fourment que vous pourrez
avoir, et puis batez ensemble tant et tant, comme à l’ennuy d’une ou
de deux personnes, et ne soit vostre paste ne clère ne espoisse, mais
telle qu’elle se puisse légièrement couler parmi un pertuis aussi
gros comme un petit doy; puis mettez vostre beurre et vostre sain sur
le feu ensemble, autant d’un comme d’autre, tant qu’il bouille, puis
prenez vostre paste et emplez une escuelle ou une grant cuillier de
bois percée, et filez dedans vostre gresse, premièrement ou milieu
de la paelle, puis en tournyant jusques à ce que vostre paelle soit
plaine; et que l’en bate tousjours vostre paste sans cesser pour faire
des autres crespes. Et icelle crespe qui est en la paelle convient
soubslever à une brochette ou fuisel[1171], et tourner ce dessus
dessoubs pour cuire, puis oster, mettre en un plat, et commencier à
l’autre; et que l’en ait tousjours meu et batu la paste sans cesser.

PIPEFARCES. Prenez des moyeux d’œufs et de la fleur et du
sel, et un pou de vin, et batez fort ensemble, et du frommage tranchié
par lesches, et puis toulliez[1172] les lesches de frommage dedans la
paste, et puis la frisiez dedans une paelle de fer et du sain dedens.
Aussi en fait-l’en de mouelle de beuf.

UNE ARBOULASTE[1173] DE CHAR POUR QUATRE PERSONNES.✝ Se vous avez fait
tuer un chevrel, vous povez faire assiette[1174] de la pance, mulette
ou caillette, saultier, etc., au jaunet avec du lart et du foie, mol,
fressure et autres trippes. Cuisez-les très bien en eaue, puis les
hachiez à deux cousteaulx comme porée, et[1175] faites hachier au
pasticier très bien menus, ou broyez ou mortier avec sauge ou mente,
etc., comme dessus.

_Nota_ que du chevrel les boyaulx ne sont point laissiés avec la
fressure comme ils sont laissiés avec la fressure du porc; la raison
est car les boyaulx du porc sont larges et se pevent laver, retourner
et renverser à la rivière, et les boyaulx de chevrel, non; mais toutes
les autres choses y sont laissiées comme au porc, _scilicet_ la teste,
le gosier et le col, le foie, le mol ou pomon, car c’est tout un, la
rate menue et le cuer. Et tout ensemble est appellé fressure: et autel
de porc[1176].

_Item_, quant l’en parle des hastelets de chaudun[1177] de porc que
l’en mengue en Juillet, qui sont lavés en sel et en vinaigre, ce sont
les boyaulx qui sont gras, qui sont tranchés par lopins de quatre doie
de long, et mengiés au vertjus nouvel.

ESCHEROYS[1178] les plus nouveaulx mis hors de terre et frais
tirés, cueillis en Janvier, Février, etc., sont les meilleurs; et sont
les plus frais congneus à ce que au plaier ils se rompent, et les
viels tirés hors de terre se ployent. Il les convient rere et oster le
mauvais au coustel comme on fait les navets, puis les convient laver
très bien en eaue tiède, puis pourboulir un petit, puis les mettre
essuier sur une touaille, puis enfleurer[1179], puis frire, puis
drécier par petis platelets arrangéement, et mettre du succre dessus.

_Item_, qui en veult faire pastés, il les convient faire comme dessus
jusques au frire, et lors les mettre en pasté, rompus en deux les trop
longs, et au lieu du succre dont dessus est parlé, convient mettre
figues couppées par menus morceaulx et des roisins avec.

BUIGNETS D’ŒUVES[1180] DE LUS.✝ Il convient mettre les œuves en eaue
et avec du sel, et bien cuire: laissier refroidier, puis mettre par
morceaulx et envelopper en paste et œufs, et frire à l’uille.


SAULCES NON BOULIES.

MOUSTARDE. Se vous voulez faire provision de moustarde pour
garder longuement, faites-la en vendenges de moulx doulx. Et aucuns
dient que le moust soit bouly. _Item_, se vous voulez faire moustarde
en un village à haste, broyez du senevé en un mortier et deffaites de
vinaigre, et coulez par l’estamine; et se vous la voulez tantost faire
parer[1181], mettez-la en un pot devant le feu. _Item_, et se vous la
voulez faire bonne et à loisir, mettez le senevé tremper par une nuit
en bon vinaigre, puis le faites bien broyer au moulin, et bien petit à
petit destremper de vinaigre: et se vous avez des espices qui soient de
remenant de gelée, de claré, d’ypocras on de saulces, si soient broyées
avec, et après la laissier parer.

VERTJUS D’OZEILLE. Broyez l’ozeille très bien sans les
bastons, et deffaites de vertjus vieil blanc, et ne coulez point
l’ozeille, mais soit bien broyée; _vel sic_: broyez percil et ozeille
ou la feuille du blé. _Item_ du bourgon de vigne, c’est assavoir jeune
bourgon et tendre, sans point de tuyau.

CAMELINE. _Nota_ que à Tournay, pour faire cameline, l’en
broyé gingembre, canelle et saffren et demye noix muguette: destrempé
de vin, puis osté du mortier; puis aiez mie de pain blanc, sans bruler,
trempé en eaue froide et broyez au mortier, destrempez de vin et
coulez, puis boulez tout, et mettez au derrain du succre roux: et ce
est cameline d’yver. Et en esté la font autelle, mais elle n’est point
boulie.

Et à vérité, à mon goust, celle d’iver est bonne, mais en[1182] est
trop meilleure celle qui s’ensuit: broyez un pou de gingembre et foison
canelle, puis ostez, et aiez pain hazé[1183] trempé ou chappeleures
foison en vinaigre broyées et coulées.

_Nota_ que trois différences sont entre gingembre de mesche et
gingembre coulombin. Car le gingembre de mesche a l’escorce plus brune,
et si est le plus mol à trenchier au coustel et plus blanc dedans que
l’autre; _item_, meilleur et tousjours plus cher[1184].

Le garingal qui est le plus vermeil violet en la taille, est le
meilleur[1185].

Des noix muguettes les plus pesans sont les meilleurs et les plus
fermes en la taille. Et aussi le garingal pesant et ferme en la taille,
car il y en a de heudry[1186], pourry et légier comme mort bois; celluy
n’est pas bon, mais celluy qui est pesant et ferme contre le coustel
comme le noyer[1187], celluy est bon.

AULX CAMELINS POUR RAYE. Broyez gingembre, aulx et croustes
de pain blanc trempées en vinaigre, ou pain ars, et deffaites de
vinaigre; et se vous y mettez du foye il en vauldroit mieulx.

SAULCE D’AULX BLANCHE OU VERTE POUR OISONS OU BEUF. Broyez
une doulce[1188] d’aulx et de la mie de pain blanc sans bruler, et
destrempez de vertjus blanc; et qui la veult verte pour poisson, si
broye du percil et de l’ozeille ou de l’un d’iceulx ou rommarin[1189].

AULX MOUSSUS A HARENS FRAIS. Broyez les aulx sans peler, et
soient pou broyés et deffais de moust, et dréciez à toutes les peleures.

SAULCE VERT D’ESPICES. Broyez très bien gingembre, clo,
graine, et ostez du mortier: puis broyez percil ou salemonde[1190],
ozeille, marjolaine, ou l’un ou les deux des quatre, et de la mie de
pain blanc trempé en vertjus, et coulez et rebroyez très bien, puis
recoulez et mettez tout ensemble et assavourez de vinaigre.

_Nota_ que c’est bon _soucié_, mais qu’il n’y ait pain.

_Nota_ que pour toutes espices, pluseurs n’y mettent fors des fueilles
de rommarin.

UN SOUCIÉ VERGAY A GARDER POISSON DE MER. Prenez percil,
sauge, sanemonde, vinaigre, et coulez; mais avant aiez broyé coq,
ysope, ozeille, toute[1191], marjolaine, gingembre, fleur de canelle,
poivre long, giroffle, graine, et osté hors du mortier, et mettez
dessus vostre poisson quant tout sera passé; et soit vergay. Et aucuns
y mettent sanemonde à toute la racine.

_Nota_ que le mot _soucié_[1192] est dit de _soux_ pour ce qu’il est
fait comme soux de pourcel.

Pour poisson d’eaue doulce ainsi se fait chaudumé, fors tant que l’en
n’y met nulles herbes, et en lieu d’herbes, l’en y met saffren et noix
muguettes et vertjus, et doit estre fin jaune et bouly, et mis tout
chault sur le poisson froit.

Au brochier, taillez au travers et rostis sur le greil.

La saulce d’un chappon rosti est de le despescier par membres, et
mettre sur les jointes du sel et du vertjus, et le tiers vin blanc ou
vermeil; et poucer[1193] fort comme un poucin.

_Item_, en esté, la saulce d’un poucin rostis est moitié vinaigre,
moitié eaue rose, et froissié, etc. _Item_, le jus d’orenge y est bon.


SAULCES BOULIES.

_Nota_, que en Juillet le vertjus vieil est bien foible et le verjus
nouvel est trop vert: et pour[1194] ce, en vendenges, le vertjus
entremellé moitié vieil moitié nouvel est le meilleur. _Item_, en
potage, l’en deffoiblist de purée, mais en Janvier, Février, etc., le
nouvel est le meilleur.

CAMELINE A LA GUISE DE TOURNAY, quérez ou chappitre
précédent[1195].

POIVRE JAUNET OU AIGRET. Prenez gingembre, saffren, puis
preingne-l’en pain rosty deffait d’eaue de char, (et encores vault
mieux la meigre eaue[1196] de choulx,) puis boulir, et au boulir mettre
le vinaigre.

POIVRE NOIR[1197]. Prenez clou de giroffle et un pou de
poivre, gingembre, et broyez très bien: puis broyez pain ars destrempé
en meigre eaue de char ou en meigre eaue de choulx qui mieulx vault,
puis soit bouly en une paelle de fer, et au boulir soit mis du
vinaigre; puis mettez en un pot au feu pour tenir chault. _Item_,
pluseurs y mettent de la canelle.

GALENTINE POUR CARPE. Broyez saffren, gingembre, giroffle,
graine, poivre long et noix muguettes, et deffaictes de la grasse eaue
en quoy la carpe aura cuit, et y mettez vertjus, vin et vinaigre;
et soit lié d’un petit de[1198] pain hazé très bien broyé, et sans
couler, (jàsoit-ce que le pain coulé fait plus belle saulce,) et soit
tout bouly et getté sur le poisson cuit, puis mis en plats. Et est
bon reschauffé ou plat sur le gril, meilleur que tout froit. _Nota_
qu’elle est bonne et belle sans saffren; et _nota_ qu’il souffist que
en chascun plat ait deux tronçons de carpe et quatre gougons fris.

LE SAUPIQUET POUR CONNIN OU POUR OISEAU DE RIVIÈRE OU COULON
RAMIER. Frisiez oignons en bon sain, ou vous les mincez et mettez
cuire en la leschefrite avec eaue de beuf, et n’y mettez vertjus ne
vinaigre jusques au boulir: et lors mettez moitié vertjus moitié vin et
un petit de vinaigre, et que les espices passent. Puis prenez moitié
vin moitié vertjus et un petit de vinaigre, et mettez tout en la
leschefrite dessoubs le connin, coulon ou oisel de rivière; et quant
ils seront cuis, si boulez la saulce, et aiez des tostées[1199] et
mettez dedens avec l’oisel.

CALIMAFRÉE OU SAULCE PARESSEUSE. Prenez de la moustarde et de
la pouldre de gingembre et un petit de vinaigre, et la gresse et l’eaue
de la carpe, et boulez ensemble: et se vous voulez faire ceste saulce
pour un chappon, ou lieu que l’en met la gresse et l’eaue de la carpe,
mettez vertjus, vinaigre et la gresse du chappon.

JANCE DE LAIT DE VACHE. Broyez gingembre, moyeux d’œufs sans
le germe, et soient crus passés par l’estamine avec lait de vache: ou
pour paour de tourner, soient les moyeux d’œufs cuis, puis broyés et
passés par l’estamine; deffaictes de lait de vache, et faites bien
boulir[1200].

JANCE A AULX. Broyez gingembre, aulx, amandes, et deffaites de
bon vertjus et puis boulez; et aucuns y mettent le tiers de vin blanc.

JANCE se fait en ceste manière: prenez amandes, mettez en eaue
chaude, pelez, broyez, et du gingembre deux cloches aussi; ou y mettez
de la pouldre, un pou d’aulx, et du pain blanc, pou plus que d’amandes,
qui ne soit point brûlé, destrempé de vertjus blanc et le quart de vin
blanc: couler, puis faire très bien boulir, et drécier par escuelles.
Et en doit-l’en plus drécier que d’autre saulce[1201].

UNE POITEVINE. Broyez gingembre, giroffle, graine et des
foies, puis ostez du mortier: puis broyez pain brûlé, vin et vertjus et
eaue, de chascun le tiers, et faictes boulir, et de la gresse du rost
dedans, puis versez sur vostre rost ou par escuelles[1202].

MOUST POUR HÉTOUDEAUX. Prenez roisins nouveaulx et noirs, et
les escachiez[1203] ou mortier, et boulez un bouillon, puis coulez par
une estamine: et lors gettez dessus pouldre, petit de gingembre et plus
de canelle, ou de canelle seulement _quia melior_, et meslez un petit
à une cuillier d’argent, et gettez croustes ou pain broyé ou œufs ou
chastaignes, pour lier, dedans: du succre roux, et dréciez.

(_Item_, à ce propos, sachiez que _Arquenet_[1204] est espice qui rent
rouge couleur et est aussi comme garingal; et la convient tremper en
vin et en l’eaue de la char, puis broyer.)

_Item_, et qui veult faire ce moust dès la Saint Jehan et avant que
l’en treuve aucuns roisins, faire le convient de cerises, merises,
guines, vin de meures, avec pouldre de canelle, sans gingembre, se
petit non, boulir comme dessus, puis mettre du succre dessus[1205].

_Item_, et après ce que l’en ne treuve nuls roisins, _scilicet_ en
Novembre, l’en fait le moust de prunelles de haye, ostés les noiaux,
puis broyées ou escachées ou mortier, faire boulir avec les escorces,
puis passer par l’estamine, mettre la pouldre, et tout comme dessus.

SAULCE BRIEFVE POUR CHAPPON. Ayez de belle eaue nette, et
mettez en la leschefrite dessoubs le chappon quant il rostist, et
arrousez tousdis[1206] le chappon, puis broyez une doulce[1207] d’ail
et destrempez d’icelle eaue et boulez, puis dréciez. Comme _jance_
elle est bonne, qui mieulx n’a.

SAULCE A METTRE BOULIR EN PASTÉS DE HALEBRANS, CANETS, LAPPEREAULX
OU CONNINS DE GARENNE. Prenez foison de bonne canelle, gingembre,
giroffle, graine, demie noix muguette et macis, garingal, et broyez
très bien, et deffaites de vertjus moitié et vinaigre moitié, et soit
la saulce clère. Et quant le pasté sera ainsi comme cuit, soit icelle
saulce gettée dedans et remis au four boulir un seul bouillon.

(_Nota_ que _Halebrans_ sont les petis canets qui ne pevent voler
jusques à tant qu’ils ont eu de la pluye d’Aoust.)

Et _nota_ que en yver l’en y met plus gingembre pour estre plus forte
d’espices, car en yver toutes saulces doivent estre plus fortes que en
esté.

UNE QUEUE DE SANGLIER. Prenez nomblets de porc, lièvres
et[1208] oiseaulx de rivière, et les mettez en la broche, et une
leschefrite dessoubs, et du vin franc[1209] et du vinaigre. Et puis
prenez graine, gingembre, giroffle, noix muguettes et du poivre long
et canelle, et broyez et ostez du mortier: puis broyez pain brûlé et
trempé en vin franc, et le coulez par l’estamine; et puis coulez tout
ce qui est en la leschefrite et les espices et le pain en une paelle de
fer ou en un pot avec eaue de la char, et y mettez le rost de quoy vous
le ferez, et l’ayez avant boutonné de doux de giroffle.

Ainsi convient faire à un _Bourberel[1210] de sanglier_.

_Nota_ que les noix muguettes, macis et garingal font douloir la teste.

SAULCE RAPPÉE. Eschaudez trois ou quatre grappes de vertjus,
puis en broyez une partie et ostez le marc d’icelluy vertjus: et puis
broyez du gingembre et allaiez d’icellui vertjus et mettez en une
escuelle; puis broyez les escorces du vertjus autrefois broyé, et
destrempez de vertjus blanc et coulez; et mettez tout en icelle[1211]
escuelle et meslez tout ensemble, puis dréciez et mettez des grains
dessus. _Nota_, en Juillet, quant le vertjus engrossist, est au jambon
ou pié de porc[1212].

SAULCE POUR UN CHAPPON OU POULE. Mettez tremper un très petit
de mie de pain blanc en vertjus et du saffran, puis soit broyé: puis
le mettez en la leschefrite, et les quatre parties de vertjus et la
cinquième partie de la gresse de la poule ou chappon et non plus, car
le plus seroit trop, et faites boulir en la leschefrite, et dréciez par
escuelles.

SAULCE POUR OEUFS POCHIÉS EN HUILE. Aiez des oignons cuis
et pourboulis moult longuement comme choulx, puis les frisiez: après
vuidiez la paelle où vous avez frit vos œufs que rien n’y demeure, et
en icelle mettez l’eaue et oignons et le quart de vinaigre, c’est à
dire que le vinaigre face le quart de tout, et boulez, et gettez sur
vos œufs.


BUVRAGES POUR MALADES.

TIZANNE DOULCE. Prenez de l’eaue et faites boulir, puis mettez
pour chascun sextier[1213] d’eaue une escuelle d’orge largement, et ne
chault s’elle est à toute l’escorce, et pour deux parisis[1214] de
réglisse, _item_, des figues, et soit tant bouly que l’orge crève; puis
soit coulée en deux ou trois toiles, et mis en chascun gobelet grant
foison de succre en roche. Puis est bonne icelle orge[1215] à donner à
mengier à la poulaille pour engressier.

_Nota_ que la bonne réglisse est la plus nouvelle, et est en la taille
de vive couleur vergaie, et la vieille est de plus fade et morte, et
sèche.

BOUILLON. Pour faire quatre sextiers de bouillon, il convient
avoir la moitié d’un pain brun d’un denier, de levain, levé de trois
jours[1216]: _item_, de son, le quart largement d’un boissel, et mettre
cinq sextiers d’eaue en une paelle, et quant elle fremiera, mettre le
son en l’eaue et tant boulir que tout s’appetice du cinquième ou plus;
puis oster de dessus le feu et laissier refroidier jusques à tiède,
puis couler par une estamine ou sas, ou[1217] destremper le levain en
eaue et mettre ou tonnel, et laissier deux ou trois jours parer[1218];
puis encaver et laissier esclarcir, et puis boire.

_Item_, qui le veult faire meilleur, il y convient mettre une pinte de
miel bien bouly et bien escumé.

BOCHET. Pour faire six sextiers de bochet, prenez six pintes
de miel bien doulx, et le mettez en une chaudière sur le feu et le
faites boulir, et remuez si longuement que il laisse à soy croistre,
et que vous véez qu’il gette bouillon aussi comme petites orines[1219]
qui se creveront, et au crever getteront un petit de fumée aussi
comme notre: et lors faites-le mouvoir, et lors mettez sept sextiers
d’eaue et les faites tant boulir qu’ils reviengnent à six sextiers,
et tousjours mouvoir. Et lors le mettez en un cuvier pour refroidier
jusques à tant qu’il soit ainsi comme tiède; et lors le coulez en un
sas, et après[1220] le mettez en un tonnel et y mettez une choppine de
leveçon[1221] de cervoise, car c’est ce qui le fait piquant, (et qui y
mettroit levain de pain, autant vauldroit pour saveur, mais la couleur
en seroit plus fade,) et couvrez bien et chaudement pour parer. Et se
vous le voulez faire très bon, si y mettez une once de gingembre, de
poivre long, graine de paradis et cloux de giroffle autant de l’un que
de l’autre, excepté des cloux de giroffle dont il y aura le moins, et
les mettez en un sachet de toile et gettez dedans. Et quant il y aura
esté deux ou trois jours et le bochet sentira assez les espices et
il piquera assez, si ostez le sachet et l’espraignez et le mettez en
l’autre baril que vous ferez. Et ainsi vous servira bien celle pouldre
jusques à trois ou quatre fois.

_Item._ AUTRE BOCHET DE QUATRE ANS DE GARDE, _et peut-l’en
faire une queue ou plus ou moins à une fois qui veult_. Mettez les
trois pars d’eaue et la quatrième de miel, faites boulir et escumer
tant qu’il déchée du dixième, et puis gettez en un vaissel: puis
remplez vostre chaudière et faictes comme devant, tant que vous en aiez
assez; puis laissiez refroidier et puis remplez vostre queue: adonc,
vostre bochet gettera comme moust qui se pare. Si le vous convient
tousjours tenir plain afin qu’il gette, et après six sepmaines ou un
mois l’en doit traire tout le bochet jusques à la lye et le mettre en
cuve ou en autre vaissel, puis deffoncier le vaissel où il estoit,
oster la lye, eschauder, laver, renfoncer, et remplir de ce qui est
demouré, et garder; et ne chault s’il est en vuidenge. Et adonc aiez
quatre onces et demie de pouldre fine de fine canelle et une once et
demie de clou de giroffle et une de graine batus et mis en un sachet de
toile et pendus à une cordelette au bondonnail.

_Nota_ que de l’escume qui en est ostée, prenez pour chascun pot
d’icelle douze pos d’eaue, et boulez ensemble, et ce sera bon bochet
pour les mesgnies[1222]. _Item_, d’autre miel que d’escume se fait à
autele portion[1223].

BEUVRAGE D’EAUE ROUSSE D’UN CHAPPON. Mettez vostre chappon ou
poule en un pot bien net et qui soit tout neuf plommé[1224] et bien
couvert, que rien n’en puisse yssir, et mettez vostre pot dedans une
paelle plaine d’eaue et faites boulir tant que le chappon ou poule soit
cuit dedans le pot; puis ostez le chappon ou poule, et de l’eaue qu’il
aura faicte dedans le pot donnez au malade à[1225] boire.

BUVRAGE DE NOISETTES. Pourboulez et pelez, puis mettez en eaue
froide, puis les broyez et allaiez d’eaue boulie et coulez: broyez et
coulez deux fois, puis mettez reffroidier en la cave; et vault mieulx
assez que tizanne.

BUVRAGE DE LAIT D’AMANDES. Comme dessus.


POTAGES POUR MALADES.

CHAUDEAU FLAMENT. Mettez un pou d’eaue boulir, puis pour
chascune escuelle quatre moyeux d’œufs batus avec vin blanc[1226], et
versez à fil[1227] en vostre eaue et remuez très bien, et du sel y
mettez bien à point; et quant il aura bien boulu, tirez-le arrière du
feu.

_Nota._ Qui n’en fait fors une escuelle pour un malade, l’en y met cinq
moyeux.

ORGE MONDÉ[1228] OU GRUIAU D’ORGE. Mettez l’orge
tremper en un bacin ainsi comme demie heure, puis la purez et mettez
en un mortier de cuivre et pilez d’une pilette de bois, puis la mettez
séchier: et quant elle sera sèche, si la vennez. Et quant vous en
vouldrez faire potage, mettez-la cuire en un petit pot avec de l’eaue,
et quant elle sera ainsi comme baienne[1229], purez-la et la mettez
avec du lait d’amandes boulir; et aucuns le coulent. _Item_, l’en y met
du succre foison.

LAIT D’AMANDES. Pourboulez et pelez vos amandes, puis les
mettez en eaue froide, puis les broyez et destrempez de l’eaue où
les oignons auront cuit et coulez par une estamine: puis frisiez les
oignons, et mettez dedans un petit de sel, et faites boulir sur le
feu, puis mettez les souppes. Et se vous faites lait d’amandes pour
malades, n’y mettez aucuns oignons, et ou lieu de l’eaue d’oignons
pour destremper les amandes et dont dessus est parlé, mettez-y et les
destrempez d’eaue tiède nette et faites boulir, et n’y mettez point de
sel, mais succre foison. Et se vous en voulez faire pour boire, si le
coulez à l’estamine ou par deux toiles, et succre foison au boire.

COULIS D’UN POULET. Cuisiez le poulet tant qu’il soit tout
pourry de cuire, et le broyez et tous les os en un mortier, puis
deffaites de son boullon, coulez, et mettez du succre[1230].

_Nota_ que les os doivent estre boulis les premiers: puis ostez du
mortier, coulez, et nettoiez le mortier; puis broyez la char[1231] et
grant foison succre.

UN COULIS DE PERCHE, OU DE TANCHE, OU DE SOLE, OU
D’ESCREVICES. Cuisiez-la en eaue et gardez le boullon, puis broyez
amandes et de la perche avec, et deffaites de vostre boullon, et coulez
et mettez tout boulir; puis dréciez vostre perche et mettez du succre
dessus. Et soit claret, et foison succre[1232].

Le meilleur coulis qui soit à jour de char, ce sont les cols des
poulets et poucins. Et doit-l’en broyer cols, testes et os, puis broyer
à fort, et deffaire d’eaue de joe de beuf ou de giste de beuf, et
couler.

_Nota_ que après les grans chaleurs de Juing, potages d’espices
viennent en saison, et après la Saint Remy, civé de veel, de lièvre,
d’oïttres, etc.

GRUYAU convient cuire comme boyen[1233], puis purer et mettre
cuire avec le lait d’amandes comme dit est prouchainement cy-dessus
d’orge mondé, et foison succre.

RIS. Eslisez-le et lavez, etc.[1234]


AUTRES MENUES CHOSES QUI NE SONT DE NECCESSITÉ.

C’EST LA MANIÈRE DE FAIRE COMPOSTE[1235]. _Nota_ qu’il fault
commencier à la Sainct Jehan qui est vingt-quatrième jour de Juing.

Premièrement, vous prendrez cinq cens de noix nouvelles environ la
Sainct Jehan, et gardez que l’escorce ne le noyau ne soient encores
formés et que l’escorce ne soit encores trop dure ne trop tendre,
et les pelez tout entour, et puis les perciez en trois lieux tout
oultre ou en croix. Et puis les mettez tremper en eaue de Saine ou
de fontaine, et la changez chascun jour: et les fault tremper de
dix à douze jours et lesquelles[1236] deviennent comme noires, et
que au macher vous n’y puissiez assavourer aucune amertume; et puis
les mettre boulir une onde en eaue doulce par l’espace de dire une
_miserelle_[1237], et[1238] tant comme vous verrez qu’il appartiendra à
ce qu’elles ne soient trop dures ne trop moles. Après vuidiez l’eaue,
et après les mettez esgouter sur un sac[1239], et puis fondez du miel
un sextier ou tant qu’elles puissent toutes tremper, et qu’il soit
coulé et escumé: et quant il sera reffroidié ainsi comme tiède, si
y mettez vos noix et les laissiez deux ou trois jours, et puis si
les mettez esgouter, et prenez tant de vostre miel qu’elles puissent
tremper dedans, et mettez sur le feu le miel et le faites très bien
boulir un boullon seulement et l’escumez, et ostez de dessus le feu: et
mettez en chascun pertuis de vos noix un clou de giroffle d’un costé,
et un petit de gingembre coupé de l’autre, et après les mettez en miel
quant il sera tiède. Et si les tournez deux ou trois[1240] fois le
jour, et au bout de trois[1241] jours si les ostez: et recuisiez[1242]
miel, et s’il n’en y a assez, si en mettez et le boulez et escumez
et boulez, puis mettez vos noix dedans; et ainsi chascune sepmaine
jusques à un mois. Et puis les laissiez en un pot de terre ou en un
poinçon[1243], et retournez chascune sepmaine une fois.

Prendrez, environ la Toussains, des gros navets, et les pelez et fendez
en quatre quartiers, et puis mettez cuire en eaue: et quant ils seront
un petit cuis, si les ostez et mettez en eaue froide pour attendrir,
et puis les mettez esgouter; et prenez du miel et fondez ainsi comme
cellui des noix, et gardez que vous ne cuisiez trop vos navets.

_Item_, à la Toussains, vous prendrez des garroittes[1244] tant que
vous y vouldrez mettre, et qu’elles soient bien raclées et décopées
par morceaux, et qu’elles soient cuites comme les navets. (Garroites
sont racines rouges que l’en vent ès Halles par pongnées, et chascune
pongnée un blanc.)

_Item_, prenez des poires d’angoisse et les fendez en quatre quartiers,
et les cuisiez ainsi comme les navets, et ne les pelez point; et les
faites ne plus ne moins comme les navets.

_Item_, quant les courges sont en saison, si en prenez ne des plus
dures ne des plus tendres, et les pelez et ostez le cuer de dedans et
mettez en quartiers, et faites tout ainsi comme des navets.

_Item_, quant les pesches sont en saison, si en prenez des plus dures
et les pelez et fendez.

_Item_, environ la Saint Andry[1245], prenez des racines de percil
et de fanoil, et les resez[1246] pardessus, et en mettez par petites
pièces, et fendez le fanoil parmi et ostez le dureillon du dedans, et
n’ostez pas celluy du percil, et les gouvernez tout ainsi comme les
choses dessusdictes, ne plus ne moins.

Et quant toutes vos confitures seront prestes, vous pourrez faire ce
qui appartient, dont la recepte s’ensuit.

Premièrement, pour cinq cens de noix, prenez une livre de sennevé et
demie livre d’anis, un quarteron et demi fanoil, un quarteron et demi
coriande, un quarteron et demi karvy[1247], c’est assavoir une semence
que l’en mengue en dragée, et mettez toutes ces choses en pouldre: et
puis faites toutes ces choses broyer en un moulin à moustarde et le
destrempez bien espois et de très bon vinaigre, et mettez en un pot
de terre. Et puis prenez demie livre de raffle[1248], c’est assavoir
une racine que l’en vent sur les herbiers[1249], et la raclez très
bien et la décopez le plus menuement que vous pourrez et la faictes
mouldre à un moulin à moustarde, et le destrempez de vinaigre. _Item_,
prenez demi quarteron de fust de giroffle dit _baston de giroffle_,
demi quarteron de canelle, demi quarteron de poivre, demi quarteron
de mesche[1250], demi quarteron de noix muguettes, demi quarteron de
graine de paradis, et faites de toutes ces choses pouldre. _Item_,
prenez demi once de saffran d’Ort[1251] séché et batu et une once
de ceudre vermeille, c’est assavoir un fust que l’en vent sur les
espiciers[1252] et est dit _cèdre dont l’en fait manches à cousteaulx_.
Et puis prenez douze livres[1253] de bon miel dur et blanc et le faites
fondre sur le feu, et quant il sera bien cuit et escumé, si le laissiez
rasseoir, puis le coulez, et le cuisiez encores: et s’il rent escume,
encores le convient couler, sinon le convient laissier reffroidier;
puis destrempez vostre moustarde de bon vin vermeil et vinaigre par
moitié et mettez dedans le miel. Vous destrempez vos pouldres de vin
et vinaigre et mettez ou miel, et en vin chault boulez un petit vos
cèdres, et après mettez le saffran avec les autres choses, et une autre
pongnée de sel gros. _Item_, et après ces choses, prenez deux livres
de roisins que l’en dit roisins de Digne, c’est assavoir qui sont
petis et n’ont aucuns noyaux dedans ne pepins quelxconques, et soient
nouveaulx, et les pilez très bien en un mortier et les destrempez de
bon vinaigre, puis les coulez parmi une estamine, et mettez avec les
autres choses. _Item_, se vous y mettez quatre ou cinq pintes de moust
ou de vin cuit, la saulce en vauldroit mieulx.

POUR FAIRE CONDOIGNAC[1254], prenez des coings et les pelez,
puis fendez par quartiers, et ostez l’ueil[1255] et les pepins, puis
les cuisiez en bon vin rouge et puis soient coulés parmi une estamine:
puis prenez du miel et le faites longuement boulir et escumer, et après
mettez vos coings dedans et remuez très bien, et le faites tant boulir
que le miel se reviengne à moins la moitié; puis gettez dedans pouldre
d’ypocras, et remuez tant qu’il soit tout froit, puis taillez par
morceaulx et les gardez.

POULDRE FINE. Prenez gingembre blanc 1º [Illustration: un
symbol] (une once et une drachme?) canelle triée [Illustration: un
symbol][3] (un quarteron?) giroffle et graine de chascun demi quart
d’once, et de succre en pierre [Illustration: un symbol][1256] (un
quarteron?) et faictes pouldre.

CONFITURE DE NOIX. Prenez, avant la Saint Jehan, noix
nouvelles et les pelez et perciez, et mettez en eaue fresche tremper
par neuf jours, et chascun jour renouvellez l’eaue: puis les laissiez
sécher, et emplez les pertuis de clous de giroffle et de gingembre, et
mettez boulir en miel, et illec les laissiez en conserve.

POUR FAIRE EAUE A LAVER MAINS SUR TABLE. Mettez boulir de la
sauge, puis coulez l’eaue, et faites refroidier jusques à plus que
tiède. Ou vous mettez comme dessus[1257] camomille ou marjolaine, ou
vous mettez du rommarin: et cuire avec l’escorce d’orenge. Et aussi
fueilles de lorier y sont bonnes.

YPOCRAS. Pour faire pouldre d’ypocras, prenez un quarteron de
très fine canelle triée à la dent[1258], et demy quarteron de fleur
de canelle fine, une once de gingembre de mesche trié fin blanc et
une once de graine de paradis, un sizain[1259] de noix muguettes et
de garingal ensemble, et faites tout battre ensemble. Et quant vous
vouldrez faire l’ypocras, prenez demye once largement et sur le plus de
ceste pouldre et deux quarterons de succre, et les meslez ensemble, et
une quarte de vin à la mesure de Paris.

Et _nota_ que la pouldre et le succre meslés ensemble, font _pouldre de
duc_.

Pour une quarte ou quarteron[1260] d’ypocras à la mesure de Bésiers,
Carcassonne, ou Montpellier, prenez cinq drames de canelle fine triée
et mondée, gingembre blanc trié et paré, trois drames: de giroffle,
graine, macis, garingal, noix muguettes, espic nardy[1261], de tout
ensemble une drame et un quart: du premier le plus et des autres en
dévalant moins et moins[1262]. Soit faicte pouldre, et avec ce soit mis
une livre et demi quarteron, au gros poix[1263], de succre en roche
broyé, et meslé parmi les autres devant dictes espices et mis; et soit
du vin et le succre mis et fondu en un plat sur le feu, et mis la
pouldre, et meslez avec: puis mis en la chausse, et coulé tant de fois
qu’il rechée tout cler vermeil.

_Nota_ que le sucre et la canelle doivent passer comme maistres[1264].

SAUGE. Pour faire un poinçon[1265] de sauge, prenez deux
livres de sauge et rongnez les bastons[1266], puis mettez les feuilles
dedans le poinçon. _Item_, aiez demie once de giroffle mis en un sachet
de toile et pendu dedans le poinçon à une cordelette; _item_, l’en
peut mettre demie once de lorier dedans: _item_, demy quarteron de
gingembre de mesche, demi quarteron de poivre long et demi quarteron de
lorier. Et qui veult faire la[1267] sauge sur table en yver, ait en une
aiguière de l’eaue de sauge, et verse sur son vin blanc en un hanap.

POUR FAIRE SUR TABLE VIN BLANC DEVENIR VERMEIL, prenez en esté
des fleurs vermeilles qui croissent ès blefs, que l’en appelle perceau
ou neelle ou passe-rose, et les laissiez séchier tant qu’elles puissent
estre mises en pouldre, et en gettez secrètement ou voirre avec le vin,
et il devenra vermeil.

SE VOUS VOULEZ AVOIR VERTJUS[1268] A NOEL SUR LA
TREILLE, quant vous verrez que la grappe à son commencement se
descouvrera, et avant qu’elle soit en fleur, coppez la grappe par la
queue, et la tierce fois laissiez-la revenir jusques à Noél.

Maistre Jehan de Hautecourt[1269] dit que l’en doit coupper le cep
audessoubs de la grappe, et l’autre bourgon de dessoubs getteroit
grappe nouvelle.

SE VOUS VOULEZ EN NOVEMBRE ET EN DÉCEMBRE FAIRE AVOIR A POIRES
D’ANGOISSE VERMEILLE COULEUR, mettez du foing au cuire, et couvrez
le pot tellement qu’il n’en isse point de fumée. _Nota_ qu’il convient
mettre sur les poires de la graine de fanoil qui est bolue en vin
nouvel et puis séchée, ou dragée[1270].

POUR FAIRE SEL BLANC, prenez du gros sel une pinte et trois
pintes d’eaue, et mettez sur le feu tant que tout soit fondu ensemble,
puis coulez parmi une nappe, touaille ou estamine, puis mettez sur
le feu et faictes très bien boulir et escumer: et qu’il bouille si
longuement qu’il soit ainsi comme tout sec, et que les petis boullons
qui auront getté eaue deviennent tous secs; puis ostez le sel de la
paelle et estandez sur une nappe au soleil pour sécher.

POUR ESCRIPRE SUR LE PAPIER LETTRE QUE NUL NE VERRA SE LE PAPIER
N’EST CHAUFFÉ, prenez sel armoniac ou salmoniac et mettez tremper
et fondre avec eaue: puis escripvez de ce et laissiez seicher. Et ce
durera environ huit jours.

POUR FAIRE GLUS, il convient peler le houx quant il est en
sa séve, (et est communément ou mois de May jusques à Aoust,) et puis
boulir l’escorce en eaue tant que la taie de dessus se sépare: puis
pelez, et quant la taye sera pelée, enveloppez le demourant de fueilles
d’yèbles, de seun[1271], ou autres larges feuilles, et soit mis en
lieu froit comme en cave, ou dedans terre ou en un fumier froit, par
l’espace de neuf jours ou plus, tant qu’il soit pourry. Et puis la
convient piler comme porée de choulx et mettre par tourteaux comme
guède[1272], et puis aler laver les tourteaux l’un après l’autre et
despecier comme cire; et ne soit pas trop lavée en la première eaue ne
trop roide[1273] eaue. Et après l’en peut tout ensemble despecier et
paumaier[1274] en eaue bien courant, et mettre en un pot et conserver
bien couvert.

Et qui veult faire glus pour eaue, il convient eschauffer un petit
d’uille, et là destremper sa glus: et puis gluer sa ligne.

_Item_, l’en fait autre glus de fromment.

SE VOUS VOULEZ GARDER ROSES VERMEILLES, prenez des boutons
une douzaine, et les assemblez ainsi comme en une pelotte, et puis les
enveloppez de lin et liez de fil ainsi comme une pelotte, et faites
pelottes tant comme vous vouldrez garder de roses; et puis les mettez
en une cruche de terre de Beauvais[1275] et non mie d’autre terre, et
l’emplez de vertjus: et à la mesure que le vertjus se dégastera[1276],
si le remplez, mais que le vertjus soit très bien paré[1277]. Et quant
vous les vouldrez très bien espanir, si les ostez des estouppes et les
mettez en eaue tiède, et les laissiez un petit tremper.

_Item_, pour garder roses en une autre manière, prenez des boutons
tant comme vous vouldrez, et les boutez en une bouteille de terre de
Beauvais, tant comme il en y pourra entrer. Après prenez du plus délié
sablon que vous pourrez, et mettez dedens la boutaille tant comme vous
y pourrez mettre, et puis l’estoupez très bien que rien n’y puisse
yssir ne entrer, et mettez la boutaille dedans une eaue courant; et là
se gardera la rose toute l’année.

POUR FAIRE EAUE ROSE SANS CHAPPELLE[1278], prenez un bacin à
barbier, et liez d’un cueuvrechief tout estendu sur la gueule à guise
de tabour, et puis mettez vos roses sur le cueuvrechief, et dessus vos
roses asséez le cul d’un autre bacin où il ait cendres chaudes et du
charbon vif.

POUR FAIRE EAUE ROSE SANS CHAPPELLE ET SANS FEU, prenez
deux bacins de voirre, et en faictes comme dit est au blanc de ceste
cédule[1279], et en lieu de cendres et charbon, mettez tout au soleil:
et à la chaleur d’icelluy l’eau se fera.

Les roses de Prouvins sont les meilleures à mettre en robes, mais il
les convient sécher, et à la my-Aoust sasser par un crible afin que les
vers chéent parmi les pertuis du crible, et après ce espandre sur les
robes.

POUR FAIRE EAUE ROSE DE DAMAS, mettez sur les pasteaulx de
roses, du rosé batu[1280]. _Vel sic_: gettez l’eau distillée du premier
lit sur le second et sur le tiers et sur le quart; et elle, ainsi
remise par quatre fois, devendra rouge[1281].

POUR FAIRE EAUE ROSE VERMEILLE. Prenez une fiole de voirre et
l’emplez à moitié de bonne eaue rose et l’autre moitié emplez de roses
vermeilles, c’est assavoir des pampes[1282] de jeunes roses dont le
bout de la pampe qui est blanc sera couppé, et la laissiez neuf jours
au soleil et les nuis aussi, et puis coulez.

POUR FAIRE PONDRE, COUVER ET NOURRIR OISEAULX EN UNE CAGE.
_Nota_ que en la cage de Hesdin[1283], qui est la plus grant de ce
royaulme, ne en la cage du Roy à Saint-Pol[1284], ne en la cage
Messire Hugues Aubriot[1285], ne porent oncques estre couvés et après
parnourris petis oiseaulx, et en la cage Charlot[1286] si font[1287],
_scilicet_ pons, couvés, nourris et parnourris. Ou premier cas[1288],
le deffault vient parceque les petis oiseaulx sont peus[1289] de
chenevis qui est chault et sec, et n’ont que boire[1290]. Et ou second
cas[1291], l’en leur donne mouron ou lasseron, chardons de champs
trampans en eaue souvent renouvellée et tousjours fresche, rafreschie
trois fois le jour, et en vaisseaulx de plont qui est frais, et là
dedans avec le lasseron et le mouron tout vert, tout de chardons
des champs dont le pié trempe en eaue bien avant[1292], du chenevis
escachié et trié et osté les coquilles, moullié et trempé en eaue.
_Item_, que l’en leur mette en la cage de la laine cardée et des plumes
pour faire leur ny. Et ainsi ay-je en cages veu nourrir turtres[1293],
linottes, chardonnerels[1294], pondre et parnourrir. _Item_, et
aussi doit-l’en donner des chenilles, verets, mouchettes, yraignes,
sautereaux, papillons, channevis nouvel en herbe et moullié et trempé.
_Item_, yraignes, chenilles et telles choses qui sont molles au bec de
l’oiselet qui est tendre.

(Et de telles choses les paons nourissent[1295] leurs poucins, car l’en
a bien veu à une geline couver les œufs d’une paonne avec les œufs
d’une geline, et se escloent les œufs en un mesmes temps, mais les
petis paons ne povoient mie vivre longuement pour ce qu’ils ont le becq
trop tendre, et la geline ne leur quéroit mie choses moles[1296] selon
leur nature, et les poucins vivoient bien de blé ou paste molle, ce
qui n’est pas si propre nourreçon aux paons.--Encores véez-vous que qui
bailleroit à une geline le plus bel froument et mieulx criblé du monde,
si le gatteroit[1297]-elle pour trouver verets ou mouchettes.)

_Item_, en la fin d’Avril convient aler au bois quérir des branchettes
fourchées de trois fourchons, et clouer contre le mur et couvrir
d’autre verdure, et là dedans ce fourchon font leur ny.

POUR GARIR DES DENS. Prenez un pot de terre à couvercle ou un
pot sans couvercle qui aura un tranchouer dessus, et l’emplez d’eaue
et mettez boulir: puis vous despouillez, couchiez, et soit vostre
chief très bien couvert, puis aiez le pot à couvercle, et soit bien
arsillié[1298] entour et un trou ou millieu, ou il[1299] soit couvert
d’un tranchouer percié ou millieu. Et sur le pertuis vous adentez[1300]
gueulle bée pour aspirer la fumée de l’eaue qui passera par le pertuis,
et soient mises de sauge ou autres herbes dedans, et se tenir bien
couvert.

POUR FAIRE SABLON A METTRE A ORLOGES[1301]. Prenez le limon
qui se chiet du siage de marbre quant l’en sie ces grans tumbes de
marbre noir, puis le boulez très bien en vin comme une pièce de char et
l’escumez, et puis le mettez seicher au soleil, puis le mettez boulir,
escumer, et puis séchier par neuf fois: et ainsi sera bon.

POISONS POUR TUER CERF OU SANGLIER[1302]. Prenez la racine de
l’herbe d’électoire qui fait fleur de couleur d’azur, et broyez en un
mortier et mettez en un sac ou drappel et l’espraignez pour avoir le
jus: et mettez icelluy jus en un bacin au soleil, et la nuit soit mis à
couvert à sec que eaue ne autre liqueur moite ne l’attouche, et tant la
mettez et remettez à la chaleur du soleil qu’elle se tienne conglutinée
et prise comme cire gommée, et la mettez en une boiste bien close. Et
quant en vouldrez traire[1303], si en mettez entre les barbillons[1304]
et la douille du fer afin que quant la beste sera ferue, cela fiere
et attouche à la char, car qui autrement le feroit, c’est assavoir
qui oindroit autrement le fer, quant il entreroit dedans le cuir de la
beste, l’ointure demourroit dedans[1305], et le coup ne vauldroit.

MÉDECINE POUR GARIR DE MORSURE DE CHIEN OU AUTRE BESTE ARRAGÉE. Prenez
une crouste de pain et escripvez ce qui s’ensuit: ✝ _Bestera_ ✝
_bestie_[1306] ✝ _nay_ [un croix] _brigonay_ ✝ dictera ✝ _sagragan_ ✝
_es_ ✝ _domina_ ✝ _fiat_ ✝ _fiat_ ✝ _fiat_ ✝.

POUR FAIRE D’UN VER[1307] BON SANGLIER. Prenez un
ver de deux ans ou environ, et ou mois de May ou de Juing le faites
chastrer, et en la saison de porchoisons[1308] le faictes chasser,
fouaillier[1309] et deffaire comme un sanglier. _Vel sic_: prenez d’un
porc privé qui soit brulé, et le cuisiez en moitié eaue moitié vin, et
servez en un plat d’icelluy chaudeau, des[1310] navets et chastaingnes
et la venoison. _Sic_ 3º.....[1311]

_Nota_ que chandelle mise en bran[1312] se garde souverainement. _Nota_
qui veut faire chandelle, l’en doit avant faire sécher au feu très bien
le limignon[1313].

POUR OSTER EAUE DE VIN. Mettez eaue et vin en une tasse, et
aiez du fil de coton et plungez l’un bout au fons de la tasse, et
l’autre bout soit pendant sur le bort et audessoubs et dehors de la
tasse, et vous verrez que par icellui bout l’eaue dégoutera comme
blanche. Et quant l’eaue sera toute dégoutée, vous verrez le vin
vermeil dégouter. (_Il semble que pareillement d’une queue de vin se
peut faire._)

POUR FAIRE VIN CUIT, prenez de la cuve ou tonne la mère
goute, c’est à dire la fleur du vin[1314], soit blanc ou vermeil,
tant comme vous en vouldrez, et le mettez en un vaissel de terre, et
le faites boulir à petit et attrempé bouillon et à feu de très sèche
buche et cler feu, sans tant soit petit de fumée, et ostez l’escume à
une palette de fust percée et non de fer. Et soit tant bouly, se la
vendenge est verde pour celle année, que le vin reviengne au tiers,
et s’elle est meure, que le vin reviengne au quart[1315]. Et après
le mettez reffroidier en un cuvier ou autre net vaissel de bois, et
icellui refroidié, le mettez au poinçon; et le tiers ou quart an
vauldra mieulx que le premier an. Et gardez en lieu moyen, ne chault
ne froit, et aiez retenu en un petit vaissel d’icelluy vin boulu, pour
remplir tousjours le tonnellet, car vous savez que le vin se veult
tousjours tenir plain.

A SERVIR DE TRIPPES AU JAUNET. Ou vous les prendrez crues,
ou cuites. Si crues, mettez-les cuire en un pot en eaue et sans sel,
et d’autre part mettez cuire une pièce de giste de beuf ou de la
joe sans sel. Et quant les deux pots bouldront, paissiez le pot de
trippes de l’eaue du beuf et faites plus cuire les trippes que le beuf;
et quant les trippes seront presque cuites, si y mettez du lart, et
faites boulir et cuire avec: et sur le point que l’en doit tirer hors
les trippes du pot, mettez du saffran, et quant le saffran aura assez
jauni, traiez les trippes, et mettez du sel en l’eaue se vous voulez.
Si cuites[1316], si les mettez plus parcuire en l’eaue du giste et sans
sel; et du remenant comme dessus.

Qui veult cuire trippes, etc.[1317]

HERIÇON soit coupé par la gorge, escorché et effondré,
puis refait comme un poucin, puis pressié en une touaille et illec
très bien essuié; et après ce rosti et mengé à la cameline, ou en
pasté à la sausse de hallebran. _Nota_ que se le heriçon ne se veult
destortillier, l’en le doit mettre en l’eaue chaude, et lors il
s’estendra.

ESCURIEUX soient escorchiés, effondrés, reffais comme connins,
rostis, ou en pasté: mengiés à la cameline ou à la sausse de hallebrans
en pasté.

TURTRES sont bonnes en rost et en pasté, et en Septembre sont
en saison, voire dès Aoust. Toutesvoies en rost elles serrent[1318]
merveilleusement; et qui en a foison et il les veult nourrir et garder,
il leur convient tondre ou plumer le cul, car autrement leur fiente les
estouperoit, et par ce mourroient.

GAUFFRES sont faites par quatre manières. L’une que l’en bat
des œufs en une jatte, et puis du sel et du vin, et gette-l’en de la
fleur, et destremper l’un avec l’autre, et puis mettre en deux fers
petit à petit, à chascune fois autant de paste comme une lesche de
frommage est grande, et estraindre entre deux fers, et cuire d’une part
et d’autre; et se le fer ne se délivre bien de la paste, l’en l’oint
avant d’un petit drappelet mouillé en huille ou en sain.--La deuxième
manière est comme la première, mais l’en y met du frommage, c’est
assavoir que l’en estend la paste comme pour faire tartre ou pasté,
puis met-l’en le frommage par lesches ou milieu et recueuvre-l’en les
deux bors; ainsi demeure le frommage entre deux pastes et ainsi est mis
entre deux fers.--La tierce manière, si est de gauffres _couléisses_,
et sont dictes _couléisses_ pour ce seulement que la paste est plus
clère et est comme boulie clère, faicte comme dessus; et gecte-l’en
avec, du fin frommage esmié à la gratuise[1319]; et tout mesler
ensemble.--La quarte manière est de fleur pestrie à l’eaue, sel et vin,
sans œufs ne frommage.

_Item_, les gauffriers font un autre service que l’en dit _gros
bastons_ qui sont fais de farine pestrie aux œufs et pouldre de
gingembre batus ensemble, et puis aussi gros et ainsi fais comme
andouilles; mis entre deux fers.


AUTRES MENUES CHOSES DIVERSES QUI NE DÉSIRENT POINT DE CHAPPITRE.

POUR DESSALLER TOUS POTAGES SANS Y METTRE NE OSTER, Prenez une
nappe bien blanche et mettez sur vostre pot, et le retournez souvent;
et convient le pot estre loing du feu[1320].

POUR OSTER L’ARSURE D’UN POTAGE, prenez un pot nouvel et
mettez vostre potage dedans, puis prenez un pou de levain et le liez
dedans un drappel blanc, et gettez dedans vostre pot, et ne luy
laissiez guères demourer.

POUR FAIRE LIQUEUR POUR SEIGNER[1321] LINGE. Prenez
camboïs, c’est le limon noir qui est aux deux bouts de l’essieul de
la charette, et mettez de l’arrement[1322], et allaiez d’uille et de
vinaigre et boulez tout ensemble, et puis chauffez vostre merque[1323]
et moulliez dedans, et asséez dessus vostre linge.

SE TU VEULX FAIRE BONNE ESCHE[1324] pour alumer du feu au
fusil, pren de l’escume[1325] de noyer qui sont surannées, et puis
la[1326] met en un pot plain de lessive bien forte, toute entière, ou
par pièces du large de deux dois, lequel que tu vouldras, et la fais
boulir tousjours par l’espace de deux jours et une nuit du moins. Et se
tu n’as de la lessive, si prens de bonnes cendres et met avec de l’eaue
et fais comme charrée[1327], puis mets ton escume boulir dedans par
l’espace dessusdit, et la fournis tousjours tant comme elle bouldra.
Se tu la fais boulir en lessive, fournis-la de lessive; se tu la
bouls en la charrée, si la fournis d’eaue; et toutes voies en quoy que
tu la boules, se tu povoies finer de pis..t pour la fournir, elle en
vauldroit mieulx. Et quant elle sera ainsy boulie, si la pures[1328],
et puis la lave en belle eaue nette pour la ressuier, puis la met au
soleil seicher ou en la cheminée, loing du feu, qu’elle ne s’arde, car
il la convient sécher attrempéement et à loisir; et quant elle sera
seiche et on s’en vouldra aidier, si la fault batre d’un maillet ou
d’un baston, tant quelle deviengne ainsi comme espurge[1329]. Et quant
on veult alumer du feu, si en fault prendre ainsi comme le gros d’un
pois et mettre sur son caillou, et on a tantost du feu; si ne fault
que des mesches ensouffrées, et alumer la chandeille. Et la doit-l’en
garder nettement et sèchement.

FOUQUES[1330] doivent estre très bien rosties, et sont
meilleurs cuites en potage que en rost, car en rost elles sont trop
sèches, et veulent estre arrousées de leur gresse, et avoir le feu
devant.--_Item_, elle sont très bonnes fresches aux choulx.--_Item_,
mettez de l’eaue et des oignons en un petit pot et la fouque, puis
laissiez boulir comme une pièce de beuf, puis broyez des menues
espices, et allaiez les deux pars vertjus et la troisième vinaigre,
et vous aurez bon potage.--_Item_, fouques salées de deux jours sont
bonnes au potage.

_Nota_ que le seymier d’un cerf, c’est le quoier et[1331] la queue; et
quant il est frais, il est cuit à l’eaue et au vin, aux espices et
saffran et soupes en esté: et en yver au poivre[1332]; et ainsi est-il
du sanglier frais.

POUR FAIRE TROIS PINTES D’ENCRE, prenez des galles[1333] et de
gomme[1334] de chascun deux onces, couperose trois onces; et soient les
galles cassées et mises tremper trois jours, puis mises boulir en trois
quartes d’eaue de pluye ou de mare coye[1335]. Et quant ils auront
assez boulu et tant que l’eau sera esboulie près de la moitié, c’est
assavoir qu’il n’y ait mais que trois pintes, lors le convient oster du
feu, et mettre la couperose et gomme, et remuer tant qu’il soit froit,
et lors mettre en lieu froit et moite. Et _nota_ que quant elle passe
trois sepmaines, elle empire.

POUR FAIRE ORENGAT, mettez en cinq quartiers les peleures
d’une orenge et raclez à un coustel la mousse qui est dedans, puis les
mettez tremper en bonne eaue doulce par neuf jours, et changez l’eaue
chascun jour: puis les boulez en eaue doulce une seule onde, et ce
fait, les faictes estendre sur une nappe et les laissiez essuier très
bien, puis les mettez en un pot et du miel tant qu’ils soient tous
couvers, et faites boulir à petit feu et escumer, et quant vous croirez
que le miel soit cuit, (pour essaier s’il est cuit, ayez de l’eaue en
une escuelle, et faites dégouter en icelle eaue une goutte d’icelluy
miel, et s’il s’espant, il n’est pas cuit: et se icelle goute de miel
se tient en l’eau sans espandre, il est cuit;) et lors devez traire
vos peleures d’orenge, et d’icelles faites par ordre un lit, et gettez
pouldre de gingembre dessus, puis un autre, et getter etc., _usque in
infinitum_; et laissier un mois ou plus, puis mengier.

POUR FAIRE SAULSISSES. Quant vous aurez tué vostre pourcel,
prenez de la char des costelettes, premièrement de l’endroit que l’en
appelle le filet[1336], et après de l’autre endroit des costelettes
et de la plus belle gresse, autant de l’un comme de l’autre, en telle
quantité que vouldrez faire de saulsisses; et faictes très menuement
mincer et détranchier par un pasticier. Puis broyez du fenoul et
un petit de sel menu, et après ce requeillez vostre fenoul broyé,
et meslez très bien parmi le quart d’autant de pouldre fine; puis
entremeslez très bien vostre char, vos espices et vostre fenoul, et
après emplez les boyaulx, c’est assavoir les menus. (Et sachiez que les
boyaulx d’un vielz porc sont meilleurs à ce, que d’un jeune, pour ce
qu’ils sont plus gros.) Et après ce, les mettez quatre jours à la fumée
ou plus, et quant vous les vouldrez mengier, si les mettez en eaue
chaude et boulir une onde, et puis mettre sur le greil.

POUR DESSALLER BEURRE, mettez-le en une escuelle sur le feu
pour fondre, et le sel dévalera ou fons de l’escuelle, lequel sel ainsi
dévalé est bon ou potage, et le remenant du beurre demeure doulx.
Aultrement, mettez vostre beurre salé en eaue doulce fresche, et le
pestrissiez et paumoiez dedens, et le sel demourra en l’eaue.

(_Item_, _nota_ que les mouches ne queurent point sus à un cheval qui
est oint de beurre ou de vielz oint salé.)

BOURBOTTE[1337] est de pareille fourme à un chavessot, mais
il est plus grant assez: et est cuite en eaue, puis peler comme une
perche, puis faire boulir cameline ou galentine et getter sus; ou rosty
et mis en pasté avec de la pouldre.

POIRES à leur commencement, _scilicet_ en Octobre et Novembre,
et qu’elles sont de nouvel queillies, sont dures et fortes, et lors
l’en les doit cuire en l’eaue: et quant ce sont poires d’angoisse,
pour leur faire avoir belle couleur, l’en doit mettre du foing dedans
le pot où elles cuisent, et après sont rosties; mais après ce, quant
elles sont plus fannées et ramoities pour la moiteur du temps, l’en ne
les met point cuire en eaue, mais en la brese seulement; _scilicet_ en
Février et en Mars.

PIES, CORNILLAS[1338], CHOÉS[1339]. L’en
les tue aux matelas[1340] qui sont[1341] grosse pilette[1342], et de
foibles arbalestres peut-l’en traire à iceulx cornillas[1343] qui sont
sur les branches, mais à ceulx qui sont ès nys convient traire de plus
fors bastons pour abatre nit et tout. Il les convient escorcher, puis
pourboulir avec du lart, puis découpper par morceaulx, et frioler avec
des œufs comme charpie.

TESTE DE MOUTON soit très cuite, puis ostez les os, et hachez
le demourant bien menu, et gettez pouldre fine dessus.

Se vous voulez faire provision de vinaigre, vuidiez le tonnellet de
vostre vielz vinaigre, puis lavez le tonnellet très bien de très bon
vinaigre et non mie d’eaue chaude ne froide: après, mettez les laveures
en un vaisseau de bois ou de terre et non mie d’arain ou de fer, et
illec laissiez reposer et rasseoir vos rainsseures: puis vuidiez le
cler et le coulez, et mettre de rechief ou tonnellet, et l’emplez
d’aultre bon vinaigre, et mettez au soleil et au chault, le fons percié
en six lieux et destoupé de jour, et de nuit et par brouillas[1344]
estoupez tout; et quant le soleil revient, destoupez comme devant.

LE RIQUE-MENGER. Prenez deux pommes aussi grosses que deux
œufs ou pou plus, et les pelez, et ostez les pepins, puis les découppez
par menus morceaulx, puis les mettez pourboulir en une paelle de fer,
puis purez l’eaue, et mettez seicher le rique-menger: puis mettre
beurre pour frioler, et en friolant filez deux œufs dessus en remuant;
et quant tout sera friolé, gettez pouldre fine dessus, et soit
frangé[1345] de saffran, et mengiez au pain ou mois de Septembre.

LIÈVRE ROSTY. J’ai vu rostir lièvre enveloppé en la toile de
la fressure d’un porc que l’en dit la crespine et couste trois blans,
et par ce le lièvre n’est autrement lardé. _Item_, je l’ay veu larder.

LA CHAR D’UNE JOE DE BEUF, etc.[1346]

En la HASTE-MENUE d’un pourcel n’a aucun appareil à faire,
fors la laver et embrocher et envelopper de sa taye et cuire longuement.

POULES FARCIES COULOURÉES OU DORÉES. Elles sont _primo_
soufflées, et toute la char dedans ostée, puis remplies d’autre char,
puis coulourées ou dorées comme dessus[1347]: mais il y a trop à faire,
et n’est pas ouvrage pour le queux d’un bourgois, non mie[1348] d’un
chevalier simple; et pour ce, je le laisse.

_Item_, DES ESPAULES DE MOUTON, _quia nichil est nisi pena et
labor_.

_Item_, LES HÉRIÇONS sont fais de caillettes de mouton et est
grant frais et grant labour et pou d’onneur et de prouffit, et pour ce
_nichil hic_.

AMIGDALA _recentia recipe, et ab eis cum gladio remove etiam
subtiliter primum corticem, et postea perforetur quodlibet amigdalum
uno foramine in medio. Et iis peractis dicta amigdala ponentur in aqua
dulci, in qua stent per quinque vel sex dies, sed qualibet die fiat
mutatio aque semel in die. Deinde lapsis quinque vel sex diebus, dicta
amigdala extrahentur a dicta aqua et ponentur in aliqua aqua[1349]
ubi stent per unum diem naturalem ad exsicandum et removendum vaporem
dicte aque; postea habeatur sufficiens quantitas boni et optimi mellis
respectu quantitatis dictarum amigdalarum, et illud mel buliatur
et decoquatur bene et sufficienter, et decoquendo purgetur. Et cum
decoctum fuerit et refrigeratum, ponatur in quolibet foramine dicti
amigdali unum gariofilum: et repositis omnibus dictis amigdalis
in aliquo bono vase terreo, ponatur desuper (item fiat de nucibus
conficiendis, sed ille habent[1350] stare in aqua per novem dies,
qualibet die mutanda;) dictum mel bene decoctum et dispositum pro
mensura debita coperiente dicta amigdala, et elapsis duobus mensibus,
postea comedantur_[1351].

TETINES DE VACHE. Cuites avec la char et mangées comme la
char.--_Item_, salée à la moustarde.--_Item_, aucunes fois trenchée par
lesches, et rosties sur le greil, toute fresche cuite.

ESTOURNEAUX. Soient plumés à sec[1352], effondrés[1353],
puis couppez les cols et les piés, puis reffais, mis en pasté et deux
lesches de lart audessus: ou découppez les membres par morceaulx comme
un oison, et mis à la charpie, c’est à dire que de la cuisse l’en face
trois pièces, et laisse-l’en en chascune pièce les os: des esles aussi
et du résidu semblablement, et puis frire aux œufs en la paelle comme
charpie. Il semble qu’il les convient _primo_ cuire à demi avant que
frire.

ALLOUETTES EN ROST. Plumez à sec, puis couppez les cols et
ne les effondrez pas. Soient reffaites, et n’aient point les jambes
couppées, et les embrochiez au travers et entre deux tesmoings[1354]
de lart. _Item_, en pasté, l’en coupe jambes et testes, et les
effondre-l’en, et dedans le trou l’en boute fin frommage, et les
mengue-l’en au sel.

LIÈVRE pourbouly, puis lardé, mis en pasté et de la pouldre,
et mengié à la cameline; et est viande d’esté.

CONNIN en esté.

PORC EN PASTÉ. Mis en pasté et du vertjus de grain[1355]
dessus.

OÉS, POULES, CHAPPONS despeciez par pièces,
et mis en pasté, excepté les chappons de haulte gresse qui ne se
despiecent point; et de chascune oé l’en fait trois pastés.

OISEAULX DE RIVIÈRE. En pasté, et de la saulce cameline ou
meilleur mise dedans le pasté quant il est cuit; la teste, les jambes
et piés sont hors.

PIGONS en pasté, cols et testes et les piés couppés, et deux
lesches de lart dessus: ou en rost, et soient lardés.

MONDER ORGE OU FROMMENT POUR FAIRE FROUMENTÉE. Il convient
eaue très chaude, et mettre le fromment ou orge dedans icelle eaue
chaude, et laver et paulmoïer[1356] très bien et longuement: puis
getter et purer toute l’eau, et laissier essuier le fourment ou orge
et puis le piler à un pestail[1357] de bois, puis vanner à un bacin à
laver.

BUVRAGES DE AVELINES. Eschaudez-les et pelez et mettez en eaue
froide, puis soient très bien broyées et deffaites d’eaue boulue, puis
coulées à l’estamine.

SARDINES, effondrées, cuites en eaue, et mengées à la
moustarde.

HARENC NOUVELLET commence en Avril et dure jusques à la Saint
Remy que les harens frais commencent; et est cuit en eaue, et après
l’en y fait les bonnes souppes grosses que l’en mengue au vertjus
vieil, mais avant, et si tost qu’il est cuit et trait de la paelle,
l’en le doit mettre en belle eaue fresche, et le convient nettoier et
oster les escailles, teste et queue.


HIC FINIT[1358].



APPENDICE A L’ARTICLE V

DE LA DEUXIÈME DISTINCTION.


_Pour faire ung lot de bon ypocras_ prenés une onches de cinamonde
nommée longue canelle en pippe, avec unes cloche de gingembre et autant
de garingal, bien estampé[1359] ensemble, et puis prenés ung livre de
bon çuquere[1360]: et tout cela broyés ensamble et destrempés avec ung
lot du milleur vin de Beaune que pourés finer et le laissir tremper
ungne heure ou deux. Et puis le coullés parmy ung chause[1361] par
pluiseurs fois tant qui soit bien cler.

_Pour avoir des caordes et pompons_[1362] fault planter en bonne terre
et crasse deux ou trois pans[1363] de parfont, et quattre grains au
cop[1364] ensamble par longhes rengues[1365], et trois piés largement
de plache[1366] de tous costés. Et quant y seront crut de la haulteur
de deux paumes, les fault racourchir desus deux dois de lonc, et les
arouser deux fois la sepmaine tant qui soient grant; et les fault
planter environ le quatre Mars ou à l’entrée d’Averil. Mais pour
che[1367] que nostre pays est froit, fault aviser plache hors des frois
vens et en bon solleil; et dient les gardineus de Portigal[1368] que
fiens de cheval bien court et bien pourit, et oussy les fientes des
bestes que on tuue, il est très bon: et affin qui ne faillent, tout
est neceschitez que on en plante depuis le my Mars jusques à la fin
d’Averil, par toutes les quinsainnes, affin que on garde les plus biaus
et que on deffeuche[1369] cheux qui porroient enpeschier les aultres à
croistre, car comme desus est dyt, y fault à quatre grains trois piés
de large tout entour.

_Item, pour lappreux rosti_ etc.[1370]

_Item, pour faire de sukere[1371] rosart_ en plate, il fault pour
une livere de sukere ung pinte et demie[1372] de bonne eaue rose,
et faire boilier ensamble, et tant qu’il fache le fillet entre deux
doés[1373]; mais ensois que on maeste[1374] boilier, il fault mettre
le glerre d’un ouf[1375] à chascun livere de sukere, et le fault bien
batre tout en escume: et puis laissir rassir en yauve[1376] et estamper
ledit sukere tout en pouvre, et tout meller ensamble, et puis boillier
comme dessus; et puis avoir del fluer[1377] de amidon, et mettre en
ung délié drappelet ousy[1378] gros que ung estuet[1379] ou deux,
et prendre ung plat bachin, et tapper sur le cuel dudit bachin le
fluer à tout le drappelet, tant que le fluer se espaert[1380] dessus
bien temmené[1381], et puis jettés vostre rossart[1382] dessus ledit
bachin quant il fait le fillet, et puis laissir couler l’espesseur
du hule[1383] d’un coutel ou plus espès. Et puis quant il est ung
peu réfroidié, royés[1384] à tout ung coutel et ung rieughelet[1385]
des pettites losenghe dessus de deux doés[1386] de grant ou environ.
Et quant ledit sukere rossart sera réfroidié sur le bachin, rostelle
jus[1387] et le rompez par losenghe, et le mettés en ung laye de
dragié. Et est boen pour mengier pour conforter l’estomac.

_Pour fere encquere[1388] sans boullier._ Pour deux pintes d’yauvve de
plue[1389] ou de mares, il fault prendre deux onzes de noies de galle,
deux onzes de copperot[1390] et deux onzes ·_S_·[1391] de gomme arrabe
cler comme or; et fault rompre le nois de galle bien menu, et mettre
temprer trois jours dedens une pintte d’yauwe dessusdite, et batre sept
ou huit fois le jour environ le demy sept psalmen[1392] les trois jours
durant, et puis rompre le copperot bien menu et mettre avecque les nois
de galle, et battre encore trois jours comme devant; se sont six jours
acomply largement. Et fault prendre l’aultre pintte d’yauwe et mettre
le gomme dedens quant on met les nois temprer; et les six jours passé,
il fault mettre ledit yauwe de gomme quant il est fonduee avec l’yauwe
des nois et de copperot, et les mouvoir tout trois ensamble ung jour ou
deux comme dessus. Et dedens ung mois ou six septimaines r’oter l’encre
hors de le mattere[1393] et le mettre en ung aultre pot de piere.

_Item_, et sus le mattere dessus dicte puelt-on mettre pintte ·_S_·
d’yauwe de plue ou de mares, et mettre avecques le quart des nois,
copperot, et gomme dessusdite, avecque le mattere de l’encre qui a esté
fecte devant, et le battre cinq ou six jours comme dessus; et est bon
commung encre.

_Item_, pour escripre sur papier, il ne fault point mettre de vin ne
de vinergre, mès quant on veult escripre sur parchemin, pour ung lot
d’yauwe, on peult prendre une my-pintte de vin ou de vinergre.

       *       *       *       *       *

CHI APRÈS S’ENSIEUT QUE HOTIN LE QUISENIER QUI FU A MONSEIGNEUR DE
ROUBAIS A ENVOYÉ PAR ESCRIPT POUR FAIRE AULCUNS BROUÈS QUI SERVENT A
APPOINTIER VIANDES SUR CAR ET SUR POISSON.

_Item, pour lapreaulx roti_, pour la sauche à mettre sus, prenés ung
pau de pain roti, et le mettés tremper en boullon et du vin et vergus,
et le mains la moitié de vinesgre, et mettés tremprer le pain dedens;
et prenés canelle le plus, et gingembre et ung peu de povre[1394], de
claus[1395], ou de nois musscade, et coulés tout ensamble, et au boulir
du sucre dedens; et au servir de la dragié pardesus.

Et pour jouvenes oisons paraillement.

_Item, pigons au sucre._ Rotisiés vous pigons: rotisiés du pain,
canelle, gingembre et menus espèces[1396] le mains, vin et vinesgre au
couler et du lart fondu dedens et faittes boullir; et quant il bout,
mettez les pigons dedens et du sucre au pot.

_Pouchins_, _perdris_ à l’eauwe benitte d’yauwe roze ou d’orengue ou à
l’ongnon.

_Item, perdris ou perdrisieux._ Faicte-les rostir, et les mettés en
pot ou en telle[1397] de l’iauwe roze et du vinesgre, et mettés
boullir tout ensamble, et du sel; et le couvres bien, tant que vous
vorés servir.

Et pour _l’orengue de pouchins, ou de perdris ou de pigons_, prenés les
orenges et les copés en vergus blanc et vin blanc, et mettés boullir:
et du gingembre au boullir, et mettés vous chozes[1398] dedens boullir.

_Pour pouchins roti à l’eauwe benitte d’ongnons_, prenés ongnons par
roelles, et frisiez en sain de lart et vergus, et pau de vinesgre et
gingembre, et boulés en pot ou en telle et mettés vous pouchins dedens
jusque au servir.


POUR POTAGES.

_Item, brouès d’Allemaigne._ Prenés amandes et les broiés, et peu de
blanc pain avecques, et au couller vergus et vin blanc et boullon dous,
et gingembre et du safren, et tout boulli ensamble, et du sucre dedens;
et mettés vous brouès sur chappons rotis ou boullis, oisons ou jouvenes
connins, et mettés au boullir ung peu d’ongnons fris en sain de lart
dedens bien menus.

_Item, brouès de fleur de peschier._[1399] Prenés amandes broiés et
blanc pain avecques, et tremper en boulon dous: vergus, gingembre au
couler. Et quant il bout, prenés du tornissot[1400] trempré en vin
bien chault, et ly bailliés couleur de fleur de pieuquier[1401]; pour
chappons rotis, ou oisons, ou jouvenes connins rotis, ou sur chappons
boullis.

_Item, pour faire Aragondis_, prenés cresme douche et le faittes
boullir en ung pot de terre, et prenés moieux d’œus et fleur et le
coulés, et de le cresme avecques pour mieux passer, et mettés du burre
doulx largement dedens le pot, et filés les eux[1402] dedens le pot,
et du sucre dedens le pot, et le mettés arière du fu[1403] que il
n’aerde[1404].

_Pour brouet d’Engeltaire._ Prenés poisons de mer ou d’eauwe douche,
ch’est à sçavoir[1405] œus cuit en l’eaue durs et frisiés au burre, ou
eurs[1406] pausiés[1407] au burre qui n’a du poison. _Item_, pour le
brouet à mettre sus, prenés pain blanc trempré en purée, et moieux
d’oeux et du gingembre et canelle le plus et vergus, et coulés tout
ensamble, et au boullir largement du persin, izope, et peu de safren,
et largement burre dedens le brouet.

_Pour brochès au romarin_, mettés-les bien rôtir sur le gri, qui soient
tout cuit. _Item_, pour le brouet à mettre sus: vin vermel, vergus,
ung bien peu de vinesgre et du gingembre et du romarin, et mettés tout
boullir ensamble en telle de terre: et quant les brochès sont cuit,
mettés-les dedens.

_Item, sivé d’oïtres ou de moule ou d’oeus fris._ Prenés pain roti sur
le gri, et mettés tremprer en pourée, et prenés le pain, vinesgre et
le mains de vergus et du vin, canelle le plus et gingembre, et peu de
menus especes, et coulés tout ensamble: et au boulir ongnons fris et du
safren et le faites bien boulir; et quant il est cuit, mette-le en ung
pot de terre, et frisiés les oïtres ou les moules, et mettés-les boulir
avecque le brouet. Et pour les oeus fris, mettés en plas et le brouet
pardessus.

_Pour petis patés de poison_, prenés tourbot ung peu boulir et
hasiés[1408] bien menus gingembre et safren, et du burre dous dedens,
et bien hasiet ensamble; et faites vous patés en fachon de la court et
ne les laisiés point chéquier[1409] au four.


FIN DE L’APPENDICE A L’ARTICLE V.

[Illustration: CHASSE A L’ÉPERVIER EN 1379 (_Mss. du Roi Suppt.
Fr 632^{12}_)]

[Illustration]



LE MÉNAGIER

DE PARIS.



LE DEUXIÈME ARTICLE[1410]

DE LA TROISIÈME DISTINCTION,

LEQUEL EST DE SAVOIR NOURRIR ET FAIRE VOLER L’ESPREVIER.


En acomplissant ce que je vous ay promis cy dessus, chière seur, je
met cy-après ce que je sçay d’espreveterie, afin que en la saison
vous y esbatiez se vostre plaisir y est. Et sur ce, au commencement,
vous devez savoir que l’en tient communément que un bon espreveteur,
en la saison, recroist[1411] d’espreveterie neuf chiens et trois
chevaulx se il veult bien continuer et faire son devoir au mestier. Et
aussi tient-l’en que le droit cuer de la saison d’espreveterie bonne
ne dure que environ six sepmaines que il convient voler aux cailles,
c’est assavoir depuis le mois de Juillet que l’en treuve les volées
des premiers perdriaux, jusques en Aoust qu’ils deviennent fors,
qu’il convient voler aux cailles. Et lors se affoiblie le déduit, car
depuis que les perdriaulx sont faillis et que l’en ne treuve que les
pères et les mères qui sont fors, l’en ne les peut prendre fors au
_voulon_[1412] c’est assavoir au sourdre[1413], et de ce sera parlé
cy-après, quant l’en parlera du voler, mais à ce commencement il sera
premièrement parlé des chiens, et après du cheval: et en oultre de la
nourreture et duisson[1414] de l’esprevier prins ou ny, et en oultre
sera parlé du _branchier_, et en oultre du _muier_.

Premièrement, qui veult avoir bon déduit de l’esprevier, il est
neccessité que assez tost après Pasques l’espreveteur se garnisse
d’espaignols[1415] et qu’il les maine souvent aux champs quérir les
cailles et les perdris, et dès lors les duise et chastie, et tant face
que au moins en Juing il en soit pourveu de trois bons, duis pour le
mestier, qui congnoissent les oiseaulx: et que dès lors il les mette
au lien et les garde bien, car en celle saison ceulx qui en sont
despourveus les emblent voulentiers. Et les doit-l’en attacher et faire
leurs gistes et leur lit dessoubs ou en coste[1416] la perche où son
esprevier sera perchié quant il[1417] l’aura, afin que lors l’esprevier
les voie continuelment et les congnoisse, et aussi qu’ils congnoissent
l’esprevier.

Et est assavoir que tous espaignols qui sont bons pour la chace du
lièvre ne sont pas bons pour le déduit de l’esprevier, car ceulx qui
sont bons pour le lièvre queurent après et le chassent, et quant ils
l’ataignent, le mordent, arrestent et tuent, se à ce sont duis: et
autel pourroient-ils faire à l’esprevier. Et pour ce, ceulx qui scevent
bien trouver les perdris et la caille et ne queurent point après
l’esprevier, ou s’ils y vont, si sont-ils si duis que tantost qu’ils
voient que l’esprevier a liée[1418] et abatue la perdris ou autre oisel
et la tient soubs lui, s’arrestent et ne s’approuchent point, iceulx
espaignols sont bons, et les autres non. _Item_, ceulx qui sont jeunes
et fors et roides et qui sont trop hastifs, trop loingtains[1419], ne
sont pas bons pour ce qu’ils queurent trop devant et trop loing de
l’esprevier, et quant ils treuvent la perdris ou autre oisel et ils
la font lever, l’esprevier qui est loing ne puet venir à temps et se
lasse de voler après, et en la fin n’y peut attaindre et demeure lassé
et blasmé, et si n’est point sa faulte, car il a bien volé, mais est
la faulte de l’espreveteur qui n’a par avant mis ses chiens en si
grant subjection qu’ils s’arrestassent à son escry[1420]. Et qui pis
est, se l’esprevier est ainsi deux fois foulé[1421], il craindra à y
plus voler et ne s’embatera[1422] plus, car l’esprevier se resjoïst
et enhardist quant il est tousjours audessus et met à mercy tout ce à
qui il vole, et au contraire se effroidist et attardist quant il est
foulé ou grévé par les oiseaulx. Et par ce me semble qu’il convient que
l’espreveteur soit sage d’avoir duit ses chiens pour quérir près de
lui, et de donner le vol à point: et pour ce je croy que les espaignols
aagiés qui queurent ainsi comme deux ou trois toises devant l’esprevier
sont bons. Et puisqu’ainsi est que l’en ne scet au commencement quels
ils seront, celuy qui a entention de les mettre en besoingne en la
saison d’espreveterie, les doit devant le temps affaitier et tenir
liés et en subjection de verges ou de fouet, afin qu’ils le craignent
et que quant il les menra aux champs et il les escriera ou appellera:
_Arrière! arrière!_ qu’ils s’arrestent et l’attendent, et retournent
à leur maistre s’ils voient qu’il tourne autre chemin. Et s’ils sont
ainsi duis, ils ne feront nul mal à l’oisel quant l’en les escriera, et
seront bons.

_Item_, il est assavoir de la nature des jeunes chiens que tant plus
les menrez aux champs souvent, de jour en jour et de heure en heure,
et plus leur donrez de paine et de travail à querre ès champs depuis
l’aube du jour jusques à la nuit, et l’endemain et chascun jour
commencier, et plus les chastierez, puis qu’ils seront bien nourris et
ensemble, plus vous craindront et aimeront et suivront voulentiers et
seront bons. Mais soiez diligent que si tost que vous serez à l’ostel,
que vous mesmes, ou vos gens devant vous, donnez très bien à mengier à
vos chiens, puis à boire, en une paelle[1423], d’eaue bonne et nette:
et puis soient couchiés sur belle lictière de feurre en quelque lieu
chault, ou au feu s’ils sont moulliés ou crottés, et soient tousjours
tenus à la subjection du fouet. Et se ainsi le faites, ils ne donront
nul ennuy à la table ne au dressouer, ne ne coucheront sur les lis: et
s’ainsi ne le faites, vous povez savoir que quant ils ont traveillié et
ont fain, pour ce qu’il est nécessité qu’ils vivent, ils quierent soubs
la table et happent sur le dressouer ou en la cuisine une pièce de
char ou viande, et s’entremordent et font des ennuis pour pourchassier
leur vie, et en ce faisant se traveillent et ne reposent point et si
demeurent truans et diffamés, et c’est vostre faulte et non la leur. Et
pour ce, se vous voulez estre tenu bon espreveteur, pensez premièrement
à vostre esprevier et de vos chiens, et puis de vous.

(_Item_, aucuns dient que à chiens qui abaient[1424] l’en leur doit
donner à mengier du poulmon de mouton ou de brebis, et ils n’abaieront
plus. Ce qu’il en est, je ne sçay.)

_Item_, il convient estre pourveu et avoir un cheval basset et aisié
pour monter et descendre souvent, qui soit paisible au chevauchier,
sans fretillier ne tournoier, ne tirer la bride, ne regiber, ne faire
autres empeschemens qui doient empescher à l’esprevier quant il sera
réclamé[1425]: et qu’il se tiengne tout coy et tout arresté, attende
son maistre quant il sera descendu, et aussy se tiengne bien coy et
bien paisible au remonter.

Et pour ce que je vous ay devant dit qu’il est neccessité d’avoir
des premiers espreviers, sachiez que les espreviers commencent à
couver, c’est assavoir les premiers, à la Saint-George qui est le
vint-troisième jour d’Avril, et couvent six sepmaines. Et pour ce, dès
le temps dessus dit jusques au commencement de Juing, l’en doit espier
les aires des espreviers, lesquels l’en peut trouver et aparcevoir
tant par leurs aires comme par leurs charniers, car communément leur
charnier est fait sur un arbre qui a regart à leur aire et est aussi
comme au trait d’un arc de leur dit aire; et sur icelluy hault arbre
les espreviers descharnent[1426] les coulons ramiers et autres oiseaulx
qu’ils ont prins, et laissent cheoir les os à terre, et détrenchent à
leur becq et despiècent la char qu’ils portent en leur aire à leurs
faons qui lors ont le becq trop tendre: et par les ossellez peut-l’en
apparcevoir le charnier, et par le charnier peut-l’en trouver l’aire.

Et est à noter que en la fin du mois de May ou au commencement du mois
de Juing les premiers espreviers d’icelle saison escloent. Si convient
lors entendre de soy pourveoir d’iceulx premiers espreviers, car les
premiers espreviers sont plus tost avanciés et près de voler. Et pour
ce que chascun désire avoir des premiers espreviers, et pour les avoir
tous bons espreveteurs sont tousjours traitres et larrons l’un à
l’autre, tellement que l’un frère les voulroit embler à l’autre, pour
laquelle chose, qui veult avoir des premiers espreviers, il doit faire
tant enquerre et encerchier qu’il sache aucun aire des premiers[1427],
et les prendre ou ny avant que[1428] nul autre.

(Et est assavoir que les meilleurs et plus fors espreviers sont ceulx
qui se paissent de coulons ramiers ou autres gros oiseaulx, et ceulx
font leurs aires sur bas arbres pour ce qu’ils ne pevent porter hault
si gros oiseaulx.)

Or convient-il donc savoir comment ils seront nourris se ils sont
pris si jeunes que ils n’aient que deux jours. Et sachiez sur ce
au commencement il[1429] est bon qu’ils soient nourris plusieurs
espreviers ensemble, ou esprevier et mouchez[1430], on esprevier et
poucins, afin qu’ils s’entrejoingnent et gardent la chaleur naturelle
l’un à l’autre; et ceste chaleur naturelle est leur souveraine
nourreture, car se ils seuffrent tant soit petit de pluie ne de
froidure, ils sont en adventure de mourir, et pour ce est-il bon d’en
mettre pluseurs ensemble pour ce qu’ils se joindront et garderont la
chaleur naturelle l’un de l’autre. Et si est bon qu’ils soient en un
petit clotet[1431], par manière de ny, fait de foin délié bien batu, de
plume, de coton, d’estoupes ou de telles molles choses, et mis en une
cage à poucins, en une cuve ou en un cuvier ou en un autre vaissel de
bois qui soit long et large tellement qu’ils puissent esmeutir[1432]
loing d’eulx; et se leur ny n’est bien molet, l’en peut mettre soubs
eulx un drap linge[1433] bien délié pour garder leurs ongles. Et
espécialment soient gardés et maintenus en bonne chaleur naturelle,
comme aucunes fois du feu de charbon entour eulx, et soient sur deux
tresteaulx hault en leur cage, ou aucune fois au soleil: aucune fois,
s’il fait froit de nuit, soient couvers d’une robe, et d’une rais[1434]
pour les chas, et qu’ils aient air largement. Et soit souvent regardé
qu’ils n’aient ne trop froit ne trop chault; et mesmement[1435] de
nuit les convient-il ainsi garder, et de jour les convient-il paistre
tant de fois le jour comme ils auront enduit[1436], et commencier dès
le bien matin à souleil levant ou avant, car les espreviers qui sont
bien peus en leur jeunesse ne crient point quant ils sont sur le poing,
et les autres si font; et les convient paistre de bonne char chaulde,
nouvel tuée, d’oiselets escorchiés dont la chair, sans aucune gresse,
soit bien menue haschée, jusques à ce qu’ils aient le becq fort pour
tirer cuers de volaille, des cuers de mouton dont vous recouvrerez
aux bouchiers, et qui mieulx ne peut, de pigons: jàsoit-ce que ce
soit trop grosse char et trop orgueilleuse, qui[1437] peut recouvrer
d’autre char; _item_, le filet[1438] de porc qui est dedens la cuisse
est meilleur que cuer de mouton: mais à l’esprevier qui vole, l’en ne
doit pas donner deux gorgées[1439] l’une après l’autre, pour ce qu’il
est trop délié, trop laxatif et trop courant et coulant. Et de quoy que
vous paissiez vostre esprevier, gardez que vous ne luy donniez deux
gorgées l’une sur l’autre, c’est à dire que vous ne le paissiez mie la
seconde fois jusques à ce qu’il ait enduit la première; et puis soit
peu afin qu’il n’ait nulle fain, car autrement[1440], s’il n’est très
bien nourry en sa jeunesse, il ne volera jà bien, ne ne sera fort en
la saison d’espreveterie. Et aussi se vostre esprevier avoit aucune
fain, les bons espreveteurs l’appercevroient à l’areste des plumes où
il auroit raies de travers, et tant de roies qu’il y auroit et tant
de fains jugeroit-l’en que l’esprevier auroit eues[1441]; si vous en
mocqueroit-l’en de non avoir bien gouverné vostre esprevier.

Et _nota_ que à trois choses congnoist-l’en en jeunesse l’esprevier
du mouschet: _item_, que le mouschet a la teste et le becq sur[1442]
le rond, et l’esprevier sur le long: _item_, le mouchet a la
jambette greslette et plus courte que l’esprevier: _item_, au cry le
congnoissent aucuns.

_Item_, en leur très grant jeunesse, l’en les doit tenir très
nettement et paistre souvent[1443], et très seichement de blancs
drappellez souvent remués dessoubs leurs piés, et du foing, et changier
souvent, et laver et sécher leurs drappellets. Et soient en un pennier,
et soit ledit pennier couvert de beaulx drappeaulx; et soient tenus
chaudement par feu ou par soleil, et de nuit soit mis l’esprevier[1444]
entre deux draps au lit, couchié avec une personne pour garder chaleur
naturelle, et l’endemain au feu ou au soleil. Et ainsi, jusques à ce
qu’il soit temps de les mettre en la ferme[1445].

_Item_, se vous povez, faites que les costés du vaissel ou ferme où
vostre esprevier sera, ne soit mie clos d’ais, mais de trailles[1446]
ou de filé, afin que l’esmeut de l’esprevier saille dehors, car quant
l’esmeut demeure dedans le vaissel, il put.

_Item_, tant comme l’esprevier plus s’efforcera[1447], il se
souldra[1448] sur les jointes[1449]; et lors, quant il s’estera[1450],
le peut-l’en mettre en la ferme qui sera faite de cinq piés de long
et de trois piés de lé[1451] et de trois piés de hault. Et a[1452]
besoing d’une cuve ou d’un cuvier souvent nectoié ou changié, couvert
d’une rais, ouquel cuvier ou cuve il ait du foing au fons et un viel
drappel linge dessus pour luy garder ses ongles sains comme dessus,
et illec s’enforcera et sera plus fort sur ses piés. Et ainsi comme
plus croistra, l’en ne le paistra pas si souvent, que quatre fois le
jour; et après, quant il sera plus fort et qu’il volletera, l’en lui
doit mettre en la ferme ou cuvier un petit bloc[1453] de trois dois de
hault, couvert pour ses ongles comme dit est. Et quant il commencera
à soy perchier sur icelluy bloc, l’en luy fera autre travers dedans
la ferme deux perchettes de demi pié de hault[1454], sur lesquelles
perchettes il, de sa propre nature, volera de l’une à l’autre et
passera par-dessoubs, et sa nature luy enseignera à duire ses eles et
son vol; et lors ne sera peu[1455] que trois fois le jour. Et est bon
que lors et par avant sa ferme soit mise à terre une fois le jour, en
une place où les chiens repairent entour luy, et qu’ils le voient et
congnoissent, et luy eulx, et soit peu devant eulx, afin que quant il
volera et aura prins et tendra sa proie aux champs et ils surviennent,
qu’il ne s’esbaïsse mie pour eulx, ne que eulx ne le descongnoissent.
Et dès lors en avant convendra soy prendre garde quant il aura deux
mercqs[1456] frans, car lors le conviendra-il mettre ès gets[1457] et
paistre sur le poing, et puis le perchier et tenir paisiblement sur
son poing tant qu’il ait enduit et avalé sa gorgée. Et le doit-l’en à
ce commencement tenir si court que au reget de son débat[1458] il ne
mefface à son balay[1459].

Et depuis que vostre esprevier sera premier mis sur le poing, gardez
que par vous ne par autre il n’ait aucun desplaisir; et sachiez, chière
seur, que toutes choses qui vers luy survendroient[1460] soudainement,
hastivement ou tempestivement[1461], soit personne, beste, pierre,
estueil[1462], baston, ou autre chose, lui font desplaisir et le
tourmentent fort. _Item_, chière seur, sachiez que se vostre esprevier
vous lie et estraint fort, sachiez que c’est signe qu’il a fain, et
sinon[1463], car quant il a fain il estraint, et quant il[1464] gorge,
non. Et toutesvoies s’il vous lie ou estraint, ne vous courrouciez de
riens ne lui aussi, mais le descharnez tout bellement, sans vous ne lui
courroucier, quelque douleur qu’il vous face sentir, car se vous le
courroucez une seule fois, jà puis ne vous aimera.

_Item_, il vous convient continuer à le tenir souvent sur le poing
et entre gent tant et si longuement que vous pourrez. Et se tandis
que vous disnerez, dormirez ou pour autre chose, laisserez vostre
esprevier, si soit perchié à grant air, hors de la moiteur de la pluie
et de l’ardeur du soleil, et qu’il ne voie nuls poucins, pigons ne
aultre volaille, ne ne soit en péril de chas, et que rien soudain ne
puisse venir sur luy.

Et sachiez, chière seur, que s’il est perchié tantost après ce qu’il
sera peu, il se tendra bien paisible jusques à ce qu’il ait enduit,
mais après ce, se il bat à la perche, c’est signe qu’il a fain ou
qu’il veult estre sur le poing: et pour ce est bon qu’il ait tousjours
gens devant luy, afin que s’il se batoit et se pendist[1465], qu’il
fust tantost secourus et relevés. Sachiez aussi que quant il a esté
longuement sur le poing et qu’il a tous ses sept mercqs (jàsoit-ce que
j’aye bien veu tel qui en avoit huit), et aussi quant le troisième noir
mercq[1466] du balay passe le bout dès eles, il est adonc tenu pour
fourmé, et doit-l’en penser de le baignier, qui le fait avancier pour
oindre[1467], desrouillier et mettre à point ses plumes, et mieulx
voler: et de la manière du baignier sera dit cy-après.

_Item_, et au bout des longes doit avoir un petit bâtonnet, afin que
se l’esprevier s’entreprenoit, que au bout du bâtonnet, sans mettre la
main, l’en luy mette ses plumes à point: ou l’en doit remuer et tourner
son poing, afin qu’il se débate autre fois, car au rebat[1468] les
plumes reviennent à leur point. Et tousjours, tantost qu’il est peu,
l’en le doit tenir si souef et en place si propre et si paisible qu’il
n’ait cause de soy débatre sur sa gorge, car s’il se débatoit sur sa
gorge qu’il auroit lors prinse, il seroit en adventure de la getter; et
qui n’a loisir de le tenir en place paisible, l’en le doit perchier. Et
sachiez en cest endroit que les bons espreveteurs dient un tel proverbe:

    Au lier et au deslier,
    Te tien saisy de l’esprevier.

Si povez maintenant adviser sur le poing et sur la perche se vostre
esprevier peut rien valoir. Premièrement, les aucuns espreviers se
perchent tout droit et sont moult esveilliés et regardent fièrement et
espoventeusement[1469] quant ils veillent, et quant ils dorment, si
se tiennent-ils bien droit sur un pié et ont l’autre en leur plume,
et ainsi dorment, et c’est signe de bon esprevier et sain. Les autres
espreviers se couchent sur le ventre au travers de la perche, ainsi
comme un chappon, et ainsi se reposent en dormant et en veillant: et
n’est ne trop bon ne trop mauvais signe, car il leur vient de nature.
Et les autres sont tousjours raemplis et endormis et ont un pié en leur
plume, et c’est signe de fétardie[1470] ou de maladie.

_Item_, quant est à congnoistre l’esprevier par son plumage, il
est assavoir que les uns[1471] espreviers sont de plumage blanc et
délié.....[1472], à travers de péris.....[1472], tendres ou roux
assis en leur poictrine ainsi comme par ordre et à droite ligne, et
sont bien merlés ou goutés[1473] ou brueil[1474], c’est assavoir entre
les cuisses et le balay, et ont bonnes[1475] les plumes qui sont à
l’endroit des costés sur les cuisses. Et iceulx espreviers dit-l’en que
ils sont bons pour dames, car ils sont tost réclamés et rendent tost
leur proie et viennent voulentiers au sifflet et aiment leur maistre,
et sont paisibles et peu hardis. Les autres sont de plus gros, plus dur
et plus aspre plumage, et ont plus grosses mailles, et sont les tuyaux
de leurs plumes plus durs d’autant comme les plumes d’une vielle géline
ou d’un viel coq sont plus aspres et plus dures que d’un jeune chappon,
ou comme un laboureur des champs a plus dure coanne que le fils d’un
roy: et sont cueuretés de cueres[1476] entre-changablement[1477] assis
çà et là, sans ligne et sans ordre, et ont une petite teste et uns
gros yeulx estincelans comme un serpent, et sont moult esveilliés; et
ceulx sont aspres, roides et hardis, et sont plus fors à réclamer, plus
glouts et plus despis à paistre, et plus félons en toutes choses; et
mettent leur proie entre leurs eles, et la défendent aux ongles et au
becq. Et mesmes, quant on les paist, ils estrainguent et saillent au
visage et mordent: et convient avoir un gant en la main destre, dont
les dois du gant soient couppés, pour doubte des esgratineures: et
portent voulentiers au couvert[1478]; mais se ils sont bien nourris et
bien réclamés, un bon espreveteur s’en aide mieulx que des devant dis,
car ils sont plus hardis, plus sages, et plus fors assez.

_Item_, les uns ont jambes et piés rouges, et dit-l’en que ceulx sont
de aire de jeune mouchet: et les aultres qui ont jambes et piés jaunes,
dit-l’en qu’ils sont de aire de vieilz mouchet. Les aucuns ont jambes
rondes et les autres sur le plat, _scilicet_ sur le demi ront; de
ceulx ne sçay-je quel signe c’est: mais en somme, l’esprevier qui est
de grant corsage, qui a teste de serpent, c’est assavoir menue teste
sèche, qui est bien chappé[1479], gros yeulx saillans et esveilliés,
gros par les espaules, plumage dur et roide, mailletté de grosses
mailles aspres et dures: qui ait bons serceaulx, bons cousteaulx,
bonnes longues plumes, bons venneaulx[1480], bonnes....[1481], sans
balay a sain, grant ouverture endroit le bouel, courtes jambes
grossettes, ses ongles entiers, c’est assavoir du pessouer[1482] et du
charnier et de la grant et petite sangle, et que le remenant de son
corps et de ses piés soit tenu entier: qui soit bien esveillié et se
perche bel: tel esprevier est d’eslite.

Toutesvoies quel qu’il soit, puis que vous le vouldrez nourrir pour
vous, au commencement qui[1483] sera mis sur le poing, si luy bailliez
beaulx gects, surlonges que l’en dit petites longes, touret[1484] et
grans longes, et les acoustumez de petit à petit et de plus loing en
plus loing à voler à vous, sur vostre poing, quérir sa proie pour soy
paistre.

Or est temps, chière seur, que je vous parle de congnoistre l’ésmeut
de l’esprevier. Si sachiez, chière seur, que quant l’esprevier si a
esmeuti, par l’esmeut l’en peut jugier s’il est sain ou non: car s’il
esmeut loing, et l’esmeut est fin, blanc, liant et bien moulu, il est
bon. Et s’il est pers[1485], vert, ou roulx comme lessive, ou cler
comme eaue, ou qu’il ait un neu noir en l’es-meut, à ce voit-l’en que
l’esprevier n’est pas sain, et lors le fault curer, et donner plume
par la manière que dit sera cy-après quant l’en parlera du réclamer
et affaitier pour voler, car jusques à ce que l’en le réclame sans
commande[1486], n’est-il jà trop grant besoing de lui donner plume ne
trop souvent curer, fors par une fois la sepmaine.

Mais en cest endroit d’espreveterie, le convient plus que devant
tenir sur le poing et le porter aux plais[1487] et entre les gens
aux églises[1488] et ès autres assamblées, et emmy les rues, et le
tenir jour et nuit le plus continuelment que l’en pourra, et aucune
fois le perchier emmi les rues pour veoir gens, chevaulx, charettes,
chiens, et toutes choses congnoistre; et soit en l’ombre, et qu’il
n’y ait nuls pigons, poucins ne autre volaille qu’il voie comme dit
est. Et aucunes fois à l’ostel soit perchié sur les chiens, et que
les chiens le voient, et il eulx. Ce fait, le convient réclamer en
un secret lieu, petit à petit et de plus loing en plus loing, tant
qu’il reviengne du long de ses longes; puis le convient réclamer à
la commande ou recréance: et puis en pluseurs lieux et en espécial
aux champs et ès prés à recréance: et puis sans recréance, à pié à
pluseurs fois, présens les chiens; et puis à cheval le convient-il
réclamer, et de dessus les arbres, tant qu’il congnoisse le cheval.
Et adonc est neccessité que vous prenez bien garde, comme dit est
dessus, à son esmeut qu’il soit net: et comme dit est dessus, le noir
donne enseignement qu’il est ort par dedans. Et s’ainsi est qu’il y
ait trop de noir, si lui donnez au vespre char de poucin ou cuer de
mouton trempés et bien lavés en eaue un petit chaudette et espraint;
et se vous n’avez eaue tiède, fors froide, si y trempez vostre char,
puis l’espraingnez fort et eschauffez par force d’espraindre entre
deux esseules[1489], puis en paissiez vostre esprevier comme dessus,
car char lavée l’amaigrist. Et à ce donner ne doit-on point son oisel
appeller ne réclamer, mais prendre sur la perche sans siffler ou
réclamer, et paistre sans dire mot, car la char ne luy est mie bien
savoureuse, et pour ce, qui à ce donner le réclameroit, quant l’en le
réclameroit après et depuis, il cuideroit que ce fust autele viande
comme devant: si seroit plus lent et tardif à y venir.

_Item_, avec ce que dit est, quant il sera gorgié souffisamment, l’en
luy doit donner, en lieu de plume, aussi gros de coton comme une fève
enveloppé en char, à deux fois: ou faire tirer les plumes de l’aleron
d’une perdris, et s’il en avale, c’est bonne plume[1490]; et aussi
coton moullié en eaue: et dit-l’en que petite plume est la meilleur; et
ne luy doit-l’en donner viande par-dessus sa plume, car ce que l’en
donroit par dessus ne pourroit passer les mailles de l’estomac[1491]
pour la plume qui seroit au devant. Et sachiez que quant l’esprevier
vole et se paist de son vol, il ne luy convient point donner d’autre
plume, car il en prent assez des oiseaulx dont il se paist; et la plume
de l’aleron de l’ele est bonne plume. Et doit-l’en[1492] le soir que
l’en luy a donné plume, nettoier la place dessoubs l’esprevier pour
trouver l’endemain sa plume. Et l’endemain, quant vous serez levée,
regardez à son esmeut s’il est plus net que devant; et se l’esprevier a
esmeuti loing, c’est signe qu’il est fort: s’il a esmeuti près, c’est
au contraire; se son esmeut est fin blanc, pâteux et bien molu, c’est
signe qu’il est sain: se l’esmeut est vert, ou qu’il y ait trop de
noir, c’est signe qu’il n’est pas sain. Et aussi gardez s’il a gecté
sa plume orde ou necte. Et se vous avez apparceu par deux ou par trois
fois que l’esprevier soit lent de gecter sa plume, si lui donnez avec
le coton un ou deux grains de fourment, car ce l’avancera de la gecter;
et quant icelle sera par luy gectée au matin, si le paissiez de bonne
viande et chaude, et au soir luy redonnez plume comme devant: et ainsi
de soir en soir jusques à ce qu’il soit net.

Et soiez adverti que depuis ce, comme dit est dessus, que vostre
esprevier commencera à voler, _item_ ainsi le convient deux fois la
sepmaine nettoyer, et aussi baignier deux fois la sepmaine, à certain
jour, entre tierce et midi, en un jardin ou préel[1493], au soleil,
et en si large bacin que ses eles ne se batent aux bors, et le tenir à
la commande ou recréance, afin que sans congié il ne s’en voit[1494]
essorer[1495]; et au commencement doit-l’en rebondir et ressatir[1496]
l’eaue sur la teste et le col, à une vergette[1497], pour le moullier:
et puis qu’il sera baignié, le convient-il essuyer au soleil de midi.
Toutesvoies, aucuns lui donnent plume chascun soir, et baignent
chascun jour quant il a enduit, et en soy baignant ou quant il est
baignié le réclament: et pendant le temps que vous baignerez vostre
esprevier, se le soleil se convertissoit en pluie, ou se en cheminant
il plouvoit sur vostre oisel, il le convient essuyer à très bon feu sur
un trestel[1498] ou au soleil. Mais gardez-vous bien que jamais vous ne
le mettez sur perche moulliée, car si tost qu’il a le pié moullié, il
devient enrumé et malade: si gardez tousjours qu’il ait le pié sec et
chault. Et après ce qu’il sera ainsi séchié, il voulera de très bonne
ele.

En cest endroit d’espreveterie, devez-vous congnoistre savoir-mon[1499]
s’il est trop maigre ou trop gras: car s’il est trop maigre, il est
foible, et s’il est trop gras, il est lent et pesant; et sachiez
que quant il se tient acrempeli[1500] ou bossu, et a les yeulx plus
vers et jaunes entour, et démonstre chière pesant, et ne se tient
droit, esveillé, sur le poing et à la perche, il est malade: et c’est
parcequ’il est maigre; et le convient paistre un jour ou deux d’un
nomblet de porc pour revenir. Et s’il se tient droit et esveillié, et
les yeulx luy saillent, il est sain; mais qu’il ne soit trop gras. Et
se vous apparcevez qu’il le soit trop, pour mettre à raison il le
convient paistre de char lavée ou de beuf.

Et quant il est réclamé à pié à la commande et qu’il congnoist les
chiens et il n’est trop maigre ne trop gras, et curé et net, il le
convient enoiseler et luy baillier à vouler des petis poucins aux
champs, premièrement à pié, et puis à cheval. Et quant il les aura
volés, liés et abatus, si descendez et alez à luy tout bellement, et de
loing vous agenoilliez, puis doulcement aussi comme à quatre piés[1501]
petit à petit, et mettez vostre main vers les piés de vostre esprevier
et prenez sa proie en souslevant les piés de l’esprevier, et faites
paistre sur sa proie. Et se vous le voulez afaictier pour la pie,
si le faites voler aux champs à poucins ou pigons vérés[1502] blans
et tavellés[1503] de noir comme la pie est; et aucunes fois, quant
l’en en peut finer, il convient avoir des jeunes pias[1504], et les y
faire voler aux champs, et estre garny d’unes petites turquoises[1505]
propres à ce, afin que si tost que l’esprevier aura lié le piat, l’en
luy rompe les jambes et le becq afin que l’esprevier en soit tousjours
audessus et ait l’avantaige du piat sans estre blécié. Et se l’en ne
peut finer de piat, mais seulement de forte pie, il convient que l’en
luy couppe ou rompe le becq et les ongles et deux ou trois des maistres
plumes de chascune ele; et l’esprevier ainsi duit volera aux pies en la
saison, et toutesvoies sa nature l’enseigne plus que estrange doctrine.

_Item_, l’en dit que la personne, les chiens et le cheval qu’il a
acointié et acoustumé à veoir ne lui doivent point estre changiés,
c’est assavoir que se un esprevier avoit esté gouverné par un
homme[1506] blanc chevauchant un cheval noir, et l’en le bailloit ès
mains d’un moine noir chevauchant un cheval blanc, ou d’un escuier,
chevalier ou bourgois, ou d’une femme, ou d’autre personne vestue
d’autre habit, ou en autres mains que ès mains de cellui qu’il
auroit apris, l’esprevier qui auroit mescongnoissance d’icelluy
nouvel maistre, ne seroit si réclamé à luy comme à son maistre qu’il
congnoissoit et qui l’avoit nourry. Et pour ce, cellui ne le devroit
laissier tenir ne paistre à autre fors à luy.

Chière seur, avant que vous commenciez à voler à droit essient[1507],
il vous convient et est neccessité d’avoir cerchié et enquis aux
compaignons du païs où sont les volées des perdris; et sachiez que
en païs estrange et ou repaire[1508], la souveraine queste que bon
espreveteur puisse faire, si est d’enquérir aux bergiers et vachiers et
autres gens d’aval les champs, s’ils ont veues aucunes perdrix et où
est leur commun repaire, et puis aler celle part. Mais sur toute rien
gardez-vous que chiens de bergiers ne autres chiens estranges que vous
ne congnoissez et qui ne congnoissent vos oiseaulx, et espécialment
mastins, ne vous suivent, car vostre esprevier ne voleroit pas si
voulentiers ne si hardiement, et s’il avoit abatu ou lié un oisel, si
seroit en aventure d’estre par eulx tué; et moult de fois en est ainsi
advenu.

_Item_, chière seur, en cest endroit d’espreveterie, aux jours que vous
ne vouldrez voler, vous convient acoustumer à paistre vostre esprevier
dès le bien matin, afin que à celle heure quant vous volerez, il ait
tousjours fain; si volera mieulx, car les bons espreveteurs se lièvent
dès l’aube du jour, et dès lors vont voler, mais toutesvoies que leur
esprevier ait gecté sa plume, et aussi qu’il ne pleuve ne face grant
vent, car se vous volez par grant vent, le vent emportera vostre
esprevier qu’il n’en pourra mais, et se moquera-l’en de vous.

_Item_, ne volez pas près de bois, ne de haie, ne de vigne, ou de
fossés ou autre empeschement d’eaues.

_Item_, ne volez pas aux petits oiseaulx, car ils sont trop roides et
scevent les tours des buissons où ils ont acoustumé à repairier, et
pour ce l’esprevier fault; si se travaille fort pour ce que iceulx
menus oiseaulx sont fors, et si n’emportent mie si grant honneur pour
l’espreveteur ne pour l’esprevier comme perdris qui volent foiblement
et sont plus tost prinses; et aussi quant les menus oiseaulx se boutent
ès buissons, l’esprevier qui vole après se lasse et descourage; pour
sa hardiesse et faire son devoir se ront souvent sa queue et ses eles
telement que en la fin il en demeure tout diffamé, et n’en peut mais.
Toutesvoies, se vostre esprevier y vole, et vous véez que pour ce faire
vostre esprevier ait la teste d’aucunes de ses plumes quassées, si la
moulliez tantost de vostre salive endroit la quasseure, et quant vous
viendrez à l’ostel, d’eaue non mie chaude, mais moins que tiède, et
elle se raffermera: sinon[1509] elle se rompra. Et s’il a son balay
rompu, il n’en vauldra pas pis pour voler aux cailles, à perdris et à
gros oiseaulx qui volent droit à terre[1510], mais il en est plus lait,
et si ne suit mie si bien petis oiseaulx qui se plient, comme l’aloé
qui gauchist[1511] comme à esquierre, et si ne peut monter après l’aloé.

_Item_, s’il advenoit que vostre esprevier ait l’une des parties de
sa queue rompue, l’en doit rongner aux forces[1512] l’autre partie,
afin qu’il vole justement. Et jàsoit-ce que l’esprevier qui a la queue
rompue en soit plus lait, toutesvoies il n’en vault de riens pis pour
voler au gros, mais pour voler aux menus, si fait.

L’aloé de gibier, c’est l’aloé de cest an qui a courte queue, sans
blancheur, toute rousse de rousseur cendrée, et ne chante point au
sourdre[1513], et vole droit et se rassiet près. Et la vieille aloé à
longue queue, dont aucunes des pennes sont fines blanches[1514] et au
sourdre pipe et dit: _Andrieu_, et vole par ondées et plie son vol par
esquierres, puis à destre, puis à senestre, et se assiet loing, celle
n’est pas de gibier, ne n’y doit-l’en point voler ès mois d’Aoust et de
Septembre: mais en Septembre, quant elle mue, la queue luy chiet, et
est de gibier pour ce qu’elle est foible.

_Item_, il est dit dessus et il est vray que tout bon espreveteur doit
garder qu’il ne vole à menus oyseaulx roides, comme à l’aloé vieille,
moissons[1515] vielz et autres qui sont près des buissons, pour ce
que incontinent qu’ils voient l’esprevier, ils s’y boutent, et fault
l’esprevier à les lier, et ront sa queue et despièce ses eles ou
buisson, et par ce se lasse et descourage de voler; mais le pis est que
aucunes fois l’esprevier qui est ainsi lassé ne revient point à son
maistre, mais s’envole et se repose sur un grant arbre. Et est certain
que les espreviers ainsi lassés sont plus tardis et plus lens à
revenir de dessus un grant arbre, maison ou autre hault lieu que dessus
un bas, se grant fain ne les y muet; et à ce besoing convient avoir ou
poucins ou autre oisel vif pour voleter devant eulx, en les réclamant
sans monstrer le visaige.

Ces choses veues et faites, vous povez aler voler; et le premier jour
que vous volerez, soiez garni de poucin ou autre oysel vif pour y
faire voler vostre esprevier se vous ne trouvez autre oisel, et au
premier oisel que vostre esprevier prendra aux champs, si tost qu’il
l’aura abatu et le tendra entre ses piés, il convient descendre et
aler à luy à long trait, et se garde-l’en de toute hastiveté, et que
l’espreveteur s’agenoille bellement et loing, et bellement estende ses
bras, et doulcement preigne et liève sa proie et l’oisel dessus, puis
rompe la teste à l’oisel et du cervel paisse son esprevier[1516]. Et se
l’esprevier vous lie des ongles, si vous descharnez ongle après l’autre
tout bellement, sans tirer ne le courroucier.

_Item_, quant vostre esprevier est gorgé, vous le povez tenir sur la
main nue et sans gant, car lors il ne vous estraindra point; mais avant
qu’il soit peu, s’il a fain, si ne vous y fiez point, car lors il
estraint fort et tant que sang en fait saillir. Et à ce jugent aucuns
se l’esprevier est fort ou non, car quant ils sentent parmi le gant
que l’esprevier estraint fort, ils jugent qu’il est fort: sinon, non.
_Item_, tenez-le adonc en place si paisiblement qu’il n’ait cause de
soy débatre sur sa gorgée, car il seroit en aventure de la gecter, ou
se vous n’avez loisir de le tenir sur le poing en place convenable et
paisible, si le perchiez en lieu paisible où il voie gens, chiens et
chevaulx etc., et ne voie point pigons ne autre poulaille[1517].

Et la deuxième fois que vous volerez, laissez vostre esprevier[1518]
deux vols ou trois le jour et non plus, et le paissiez comme dessus: et
la troisième fois, deux ou trois vols et non plus; et puis aux autres
jours vole tant comme il pourra, à tant d’oiseaulx comme vous trouverez.

_Item_, et se vous apparcevez qu’il porte au couvert, si
l’embraellez[1519] et laissiez prendre[1520] deux ou trois fois, et
ne le gectez plus sur arbre quant vous le vouldrez paistre, et il se
chastiera d’illec en avant.

_Item_, commenciez à aler voler chascun jour au matin dès le bien
matin et volez jusques à tierce[1521], et lors mettez vostre esprevier
en un pré ou champ, et s’il ne porte au couvert, sur un pré[1522]
ou arbre, et le réclamez d’illec et paissiez, et puis le perchiez
et[1523] reposez et laissiez passer le chault, et après volez au
serain[1524]. Car qui ou mois de Juillet et dès lors, voleroit, jusques
à la my-Aoust, par trop chault, l’esprevier si s’efforceroit hault et
loing, et à la première rivière ou eaue qu’il verroit d’en hault, s’en
yroit baignier, puis se ressuieroit sur un arbre, et là se pouroindroit
telement et si à grant loisir qu’il n’auroit plume sur lui qu’il ne
remuast au becq l’une après l’autre, tout à loisir, et sans trop
grant diligence ne pourroit estre trouvé; et s’il estoit retrouvé, si
ne pourroit-il estre reprins sans trop grant attendue. Mais après la
my-Aoust il ne s’efforcera[1525] mie si voulentiers; et toutesvoies,
ainsi comme il est dit dessus, soiez tousjours garni de vif poucin
rousset, semblant à perdris, afin que se vous ne trouvez autres foibles
oiseaulx, que vous volez aux champs de ce poucin que vous aurez porté,
et luy donnez de la cervelle et du surplus ses drois, et l’en paissiez;
puis ostez la gorge et les boyaulx du poucin, si s’en gardera mieulx,
et l’en pourrez paistre à l’une fois des eles, l’autre fois des
cuisses, puis au derrenier du charquois[1526]. Et se vous n’avez trouvé
poucin, si soiez pourveu de pigon, jàsoit-ce que ce soit chaude viande
et trop aigre à l’esprevier qui vole, car la saveur luy en demeure
longuement et le soustient sans fain plus que autre viande; et[1527] en
reffuse le poing, et[1528] tient l’esprevier orguilleux.

_Item_, vous prenez bien garde que dès ce que vous commencerez à
voler, dès lors vous ne courrouciez vostre esprevier, et que rien
ne l’approuche soudainement, effondréement ne tempesteusement, soit
personne, chien, cheval ou autre chose, et mesmement par derrière, car
de ce qui luy survient par derrière est-il plus tourmenté et s’effroie
plus.

_Item_, quant vous serez en queste, si aiez tousjours l’œil à vostre
esprevier et à vos espaignols, et quant vous verrez qu’ils mouveront
la queue à desvuidier[1529] une place, si férez tantost de l’esperon
droit à eulx, afin que quant la perdris sourdra, vostre esprevier soit
prouchain. Et se plusieurs perdris saillent, dont vostre esprevier
suive, lie et abate l’une, entendez tousjours à vostre oisel, et
criez à vos compaignons qu’ils remerquent les autres, et quant vostre
esprevier aura eu son droit du cervel, si vous remettez en queste au
remerc[1530], afin que vous aiez tous les autres oiseaulx l’un après
l’autre.

_Item_, l’en doit quérir les perdris ès grans chaumes et yèbles et
bruières, et environ les gerbes qui sont demourées aux champs, car là
se paissent les perdris et les perdriaux du grain d’icelles gerbes,
et sont voulentiers ès lieux couvers et non mie ès jachières[1531] ne
autres lieux descouvers, tant pour doubte de chault comme pour doubte
que le faulx-perdriel[1532] et les oiseaulx de proie ne les voient. Et
quant le chault est levé, icelles perdris et aussi les cailles sont ès
grans genestes, ès vignes et ès vesses, ès poisières[1533] et ès blés
qui sont sur le pié et qui donnent grant ombre, pour estre freschement.

_Item_, en ce temps l’en ne pourroit pas faire queste ès vignes pour
ce que l’en y feroit trop de dommage à ceulx à qui les vignes sont,
et aussi les perdris y auroient trop d’avantage et l’esprevier trop
d’encombrier pour les fueilles et eschallas, mais les bons espreveteurs
qui[1534] les remerquent et[1534] puis se mettent en queste ou remercq par
les champs ou buissons, et au voulon[1535] l’esprevier les prent.

Se l’esprevier porte au couvert, et son maistre le réclame et siffle,
il ne luy doit pas monstrer son visage[1536].

_Item_, sachiez que depuis que l’esprevier aura commencié à voler, il
ne doit vivre de nulle char de boucherie ne d’autres, fors que de sa
proie, car de jour en jour, continuelment, sans cesser, il doit voler
sans repos, car qui un jour le repose, il le recule pour trois jours.

_Item_, sachiez que le[1537] déduit de perdriaulx dure jusques à la
mi-Aoust, et adonc commence le déduit des cailles pour ce que alors
deviennent fortes, et voulentiers se tiennent près des bois et des
haies. En Aoust l’en treuve bien des perdris qui en cest an furent
couvées au plus tart, et se adouèrent[1538] plus tart que les autres
et n’estoient pas assez aagées quant la saison de chauchier[1539] fut,
et ne sont pas toutes réparées[1540] ou mois d’Aoust et ont encores
leurs plumes à saing[1541], et ou tuyau a un neu, et ne sont pas
si fortes comme les pères et les mères qui ont esté muées[1542], et
pour ce sont plus légières à prendre à l’esprevier que ne sont les
pères et les mères, se ce n’est toutesvoies quant freschement et
tantost après que iceulx pères et mères ont couvé et qu’ils nourissent
et tiennent encores soubs eulx leurs perdriaulx, car lors sont-ils
dévestus de leurs plumes et sont maigres et foibles et pevent bien
estre arrestés par l’esprevier; mais quant ils sont revestus de leurs
plumes et renforcées, il n’y fait nul voler fors au voulon, comme dit
est, ou[1543] après leur premier vol par remercq, car au second vol
sont-elles plus lassées qu’ils ne furent au premier. Et est grant péril
de mettre son esprevier en essay de les prendre en plains champs du
premier vol, car se l’esprevier se lasse à tirer après, ou se il lie la
perdris et elle est si forte qu’elle l’emporte, ou qu’il soit autrement
foulé soit par cest oisel ou par autre, jà puis n’y volera voulentiers.

En la saison d’Aoust, l’en peult voler aux faisandeaulx[1544] aux
oustardes, aux laperiaulx, aux levrats, aux raales des champs[1545]
qui sont roux, et aux cailles, ou au moins en la my-Aoust; et en
Septembre doit-l’en voler tout au long du jour sans retourner à l’ostel
puis qu’il ne face ne trop grant chault ne trop grant pluie ne trop
grant vent; et doit-l’en savoir que ou mois de Septembre il ne se
essore[1546] mie si voulentiers comme en Aoust.

_Item_, pour ce que les nuis sont en Septembre plus longues, il
convient donner au soir, en la fin de Septembre, plus grosse gorgée,
et petite au matin; mais tousjours[1547] aiez lors en mémoire que
c’est mauvaise paisson que de caille et de pigon, car c’est char de
dure digestion et demeure longuement en l’estomac. L’esprevier s’en
enorguillist et reffuse le poing comme dit est dessus.

_Item_, en la fin dudit mois de Septembre et après, quant le voler des
cailles et perdris est failli, et mesmes en l’iver, l’en peut voler
comme dit est aux pies, aux choés, aux cercelles qui sont en rivière ou
autres qui sont tavelées et ont longues jambes et sont aux champs et
courent à pié parmi le gravier d’eaue[1548], aux merles, aux mauvis,
aux gois[1549], aux videcocqs et aux merles. Et à ce peut-l’en aler
à pié et avoir l’arc et le boujon[1550], que[1551] quant le merle se
boute en un buisson et ne se ose partir pour l’esprevier qui est dessus
et l’espie, la dame ou damoiselle qui scet traire, le peut tuer[1552]
du bougon[1553]. (Et ainsi de temps en temps peut-on avoir déduit de
son esprevier, quant l’en le veult garder pour muer.) Et quant l’en
ne treuve plus à le paistre de son voler, l’en luy donne congié. Et
sachiez que dès la première nuit qu’il aura geu dehors, il est devenu
sauvage se il se paist de luy mesmes, et pour ce le convient l’endemain
recouvrer, à l’aube[1554].

Et, belle seur, s’il est ainsi que vous le voulez muer[1555], pour
ce que autant couste à muer un mauvais esprevier comme un bon, aiez
premièrement regart se vostre esprevier a esté bel et bon et paisible,
car icelluy doit-l’en muer; et s’il a esté autre, ne prenez plus de
paine, car encores seroit-il pire après la mue. Toutesvoies, se muer
le voulez, il le convient paistre de chaude viande, comme de gélines,
soris, rats, et d’autres oiseaulx gaignés aux fillés et à l’arbaleste,
jàsoit-ce que c’est le meilleur que l’esprevier vole tant comme l’en
trouvera à voler, et par espécial tout le karesme, car à fort et
souvent gecte-il plus naturelment ses plumes pour muer: et tousjours le
convient-il, comme dit est devant, curer et donner plume.[1556] Quant à
l’esprevier que l’en veult muer, aucuns donnent des estouppes hachées,
et aussi dient aucuns que c’est bonne plume que des pastes de lièvre
et de connins batues d’un bon martel sur une enclume et ostés les os.
Et tousjours le convient baignier et tenir sur la perche, et tousjours
paistre de bonne viande chaude et vive, qui peut, très diligemment,
et garder mieulx que devant, et le paistre à tout le moins trois fois
le jour jusques à la my-May; et lors luy convient arracher toutes ses
plumes de la queue. Aucuns dient que le meilleur est au croissant de
May, ou autrement la queue ne revient point (c’est au commencement du
mois de Juing); et la convient arrachier ainsi qu’il s’ensuit: c’est
assavoir que aucun tiengne l’esprevier entre ses mains, et l’autre
luy compressera la char du bout de la queue, à laquelle char les
tuyaulx des plumes de la queue se tiennent: et quant la char est ainsi
tenue pour le sauver[1557], l’en doit arracher les plumes l’une après
l’autre, tout en un jour. Et dit-l’en que d’autant que l’esprevier a
la queue arrachée devant la Saint-Jehan, d’autant est-il prest plus
tost devant la my-Aoust (et jàsoit-ce que aucuns dient qu’il convient
avant baignier le[1558].... de l’esprevier en karesme, dont je ne tien
compte); et ladicte queue arrachée, le convient mettre en une mue qui
soit de quatre piés de long et quatre piés de large, de trois piés de
hault, et soit couverte de bonne toile pour le vent, et y ait fenestre
pour avoir air. Et en icelle mue ait une perche, laquelle perche
sera de demi-pié de hault, et sera l’une des moitiés feutrée, et en
l’autre moitié, du long, aura une chanlatte[1559] coulant en laquelle
l’en luy donra sa viande sans touchier à luy. Et le convient lors
très diligemment garder de trop chault et de trop froit, et mettre et
tenir de jour au soleil et garder; et le gardez de courroux, d’effroy
et d’aucun autre encombrier, et le paistre de très bonnes viandes et
chaudes et hachées, tant qu’il soit remis sus; et aucunes fois luy
convient donner et mettre en sa mue un oisel, et de ce il mesmes se
paist, et ce en lui donne plume[1560]; et à luy sont bons rats et
souris, cuer de mouton chault, nomblet de porc chault. Et sera bien de
sept sepmaines à deux mois avant qu’il soit prest.

La chose qui plus tost avance un esprevier, c’est ce que en la saison
qu’il doit muer, l’en le paisse de deux jours en deux jours des glandes
du col de mouton. Et toutesvoies dit-l’en que quant les plumes de la
queue et des esles sont revenues, il souffist, car de son dos ne du
surplus ne peut chaloir. Et lors il seroit plus grant dommage, qui le
perdroit, quant l’en a eu tant de peine: et pour ce est-il le plus
bel et le meilleur et le plus seur d’essaier sagement et cautement
s’il se tendra paisible sur le poing, et le paistre dessus; sinon
y remédier sagement, et le veillier[1561] et mettre au bas[1562].
_Item_, est le plus seur de le réclamer à la commande, car toute chose
désire sa franchise et retourne de légier à sa nature, et pour ce
s’en convient contregarder. Et aussi comme ils donnent plus de paine,
aussi valent-ils mieulx que les autres, car iceulx sont enoiselés et
congnoissent leurs oiseaulx, les chiens, chevaulx, et sont plus fors.

Puis que je vous ay parlé de la nature des espreviers que l’en dit
nyais pour ce qu’ils furent pris ou ny, à présent je vueil parler de
ceulx que l’en dit _branchiers_, _ramages_ ou _rameges_, qui est tout
un: et en après, je parleray des _muiers_[1563] d’une ou de pluseurs
mues.

L’esprevier est dit branchier ou ramage[1564] pour ce que, quant il
soit pris, il vole sur les rainceaux ou sur les branches. Et est
certain qu’il convient que l’esprevier ramage soit enoisellé[1565] que
l’en doie espérer qu’il descende à la muete des pans; toutesvoies,
avant qu’il soit enoiselé, peut-l’en appareillier une belle place
devant l’aire de l’esprevier, et quant il sera enoiselé tendre ses
pans, et mettre en muette poucin ou pigon ou autre oisel à quoy il
doie descendre. Et encores est il bon que près des guilles[1566] ait
espreviers ou mouchets qui crient et volent, et par ce l’esprevier
branchier descent plus tost à la muete. Et tantost qu’il est ou filé,
il convient[1567] qu’il soit pris bien doulcement, et que l’un le
tiengne par les esles du corps, et l’autre le prent par le becq et
le cillera[1568]. Et incontinent lui convient mettre ses gets et
sonnettes[1569], et le mettre et tenir sur le poing et remuer et garder
qu’il ne dorme point, et luy offrir le vespre prouchain la char lavée
en eaue tiède. Et se il se paist sur le poing, c’est le premier bon
signe: et s’il ne se paist, il convient garder qu’il ne dorme et le
veillier de nuit; et qui ne le peut toute nuit veiller, si le perche
sur une perche branlant qui sera attachée à deux cordes par les deux
boux, et tirera-l’en aucunes fois celle perche pour la faire branler,
afin que l’esprevier ne dorme. Et quant il aura esté veillé une nuit
ou deux et qu’il sera asseuré sur le poing et s’y paistra voulentiers,
dès la deuxième fois qu’il sera peu le convient dessillier et le tenir
entre gent, et garder qu’il ne dorme fors très petit. S’il est très
bien asseuré, l’en le doit du tout asseurer[1570] et laisser à son
aise, puis réclamer et gouverner comme dessus.

Et se l’esprevier qui ainsi est pris aux pans est mué de haye[1571],
il convient qu’il soit mis au bas par veiller, et affamé[1572] par la
manière que dessus, jàsoit ce qu’il soit plus fort à affaitier et n’est
mie de si bon retour[1573] comme l’esprevier _sor_, c’est assavoir
cellui d’un an[1574].

Toutesvoies, est-il bien aucuns espreviers qui dès l’année passée ont
esté le plus tart couvés et ont esté si tardis que à paine ont-ils esté
fors quant les premiers avoient jà fait leur saison, et ceulx sont
_mués de haye_, et toutesvoies n’ont-ils point pont[1575] ne couvé
en ceste année pour ce que leur jeunesse leur a tolu[1576], et sont
pris aussi après leur mue. Et ceulx congnoist-l’en à ce que souvent
advient que encores tiennent-ils du sor, c’est à dire de la plume de
l’année précédent, et en ceulx peut-l’en avoir plus d’espérance que en
ceulx qui sont plus vieils et ont plus volé ou sont de pluseurs mues,
lesquels aucuns[1577] congnoissent bien et pour ce les refusent.

_Item_, il est assavoir que l’esprevier mué garde mieulx sa queue pour
ce qu’il n’entre point au buisson après sa proie, mais vole par dessus:
et l’esprevier nyais y entre.

_Item_, l’esprevier mué de haye a les yeulx rouges et les piés jaunes.

Aucunefois, d’aventure, sont prins les espreviers à la glus, et lors
les convient desgluer l’une plume après l’autre, à la main, et que
les[1578] dois soient moulliés en lait.

Or nous convient parler des _muiers_ qui sont de deux manières, c’est
assavoir les uns qui sont mués en la ferme[1579] et les autres qui sont
mués de haye. Les mués en la ferme sont bons à voler et sont les plus
riches[1580]. Les mués de haye sont congneus à ce qu’ils ont les yeulx
plus rouges et les piés plus jaunes. C’est assavoir que iceulx mués de
haye sont plus doubteux à voler, car jàsoit ce que ils aient esté bien
silliés, bien veilliés et très bien réclamés à commande ou à recréance,
qui est tout un, toutesvoies, quant l’en les fait voler, communément
ils se essorent fort[1581] et adonc une bouffée de vent les emporte
maulgré eulx, et tantost qu’ils ont perdu leur maistre, et mesmement si
tost que d’eulx mesmes ils se sont peus une fois, ils sont retournés à
leur première nature, ne puis ne veulent revenir au réclamer.

Esprevier hagart[1582] est celluy qui est de mue de haye: et s’il est
d’un an, il tient du sor aucunement, car s’il ne tient du sor c’est
signe qu’il tient de deux mues[1583]. _Item_, le mué a yeulx bien
rouges, et bien jaunes les piés, et plus fortes et roides plumes et
autrement coulourées; et voit l’en bien les plumes sorées[1584] parmi
les autres, car elles sont noires par dessus, et les autres sont mieulx
coulourées.

_Item_, de l’esprevier, le mouchet est le masle: et du lannier le
lanneret est le masle; et des autres comme l’austour, le faucon, etc.,
l’en dit le masle _tiercelet_.

Chière amie, sachiez que des autres oiseaulx de proie, l’en dit
tiercelet d’ostour celluy qui est masle, et est le plus petit; le
ostour est la fumelle et est plus grant. _Item_, tiercelet de faucon
est le masle, et est le plus petit, et n’est pas bon pour povre
homme, car l’en ne le peut arrester[1585]; le faucon est la fumelle,
et communément l’en l’appelle _faucon gentil_. _Item_, tiercelet
d’esmerillon est le masle, et l’esmerillon est dit le fourme[1586] et
est la fumelle, et volent ensemble, et sont réclamés au loirre[1587].
_Item_, tiercelet de hobe[1588] est masle: le fourmé est la fumelle.
_Item_, le lanneret est le masle et est plus fort et vault mieulx; le
lannier est la fumelle.

_Se un esprevier a la jaunisse, comment garira-il?_--_Recipe_: Où
il n’a point de maladie, il ne convient point de garison: et il est
certain que la jaunisse leur vient d’aise et de santé et pour les
bonnes et chaudes viandes qu’il mengue, et pour ce ne sont point
malades.

Se un esprevier a ruine, monstrez luy rue[1589]. _Item_, faites le
tenir longuement au feu, à vespre. _Item_, faites luy tirer[1590] de la
queue d’un pourcelet ou d’un pourcel où il n’ait point de char. _Item_,
aiez boiste ou autre vaissel où il ait encens et du feu, et faites que
la fumée lui adresse au becq: et lors il toussira et esternuera, et
hochera la teste et gettera la rume; et soit sa perche feutrée, et luy
tenu chaudement. _Item_, le faites tirer à l’aleron d’un poucin, et en
la main en laquelle vous tendrez l’aleron, tenez, avec, une branche de
rue, afin qu’il en ait l’oudeur en tirant. Et, soit sur le poing, soit
sur la perche, gardez qu’il ait penne[1591] ou feutre bien sec et bien
chault soubs le pié, et nuit et jour soit devant le feu ou près du feu
ou en lieu chault; et aiez tousjours en vostre sein penne ou feutre ou
autre chose chaude pour luy changer souvent[1592] et lui baillier le
chault.

Se un esprevier est malade tellement qu’il regette sa viande quant il a
esté peu, ouvrez luy à deux mains le becq et luy boutez dedans la gorge
aussi gros comme une fève de beurre frais, et une heure ou deux après
si le paissiez de bonne char vive.

_Item_, l’en congnoist espreviers qui sont trop gras à taster
par dessoubs l’esle comme une géline. Et aussi quant il a la
fourcelle[1593] my-partie et pourfilée et il baille; adonc l’en luy
doit donner à boire de l’eaue fresche pour refroider dedans le corps,
et petit paistre, pour amaigrir.

L’esprevier qui a sourcils blans est le meilleur par raison.

_Item_, espreviers nyais ou ramages ne sont mie si bons comme ceulx qui
sont pris à la rais ou à la crecerelle[1594].

Des autres maladies d’esprevier, véez en la page ensuivant les remèdes
des maladies des faucons, et ouvrez selon ce.

Des oyseaulx de proye affaitiés, l’aigle[1595], le griffon et
l’ottour[1596] volent au chevrel sauvage, aux lièvres, aux oustardes,
mais que on ait un levrier affaitié pour eulx.

Le tiercelet d’ostour vole aux lièvres, aux perdris, aux connins, aux
malars[1597] et aux plouviers.

L’en ne paist l’ottour que une fois le jour en yver: en esté, deux; un
cuer de mouton est assez à paistre l’ottour une fois, et le tient en
estat. _Item_, d’une rouelle de mouton; _item_, d’un pigon, perdris,
etc. Un cuer de porc engraisse, et dit-l’en: _hausse_; un cuer de
chièvre ou de bouc _abaisse_, _id est_ amaigrit; un pié de mouton est
pour tirer.

Quant l’en le baigne, l’en luy oste les longes, et il se baigne au bort
de la rivière et se pouroint[1598] et puis vient.

Pour un ottour, une géline est à trois jours; l’en le paist un jour
du foie, du jugier et du col à toute la plume, la teste et le cervel;
l’autre jour, d’une esle et puis la cuisse; et l’autre jour autant.

_Item_, en karesme il se mue et est bien trois ou quatre mois avec du
foing ou de la rame[1599] et trois perches pour percher; et le paistre
adonc de chaude viande comme turtres, coulons, perdris, poucins tous
vifs. _Item_, quant ils sont mués, les convient veillier bien quatre,
six ou huit nuys, puis réclamer petit à petit à la commande comme au
commencement[1600].

_Nota_ que le faucon lannier doit estre perchié à un pié et demi de
terre pour le duire à voler bas à la perdris; et le gentil se perche
hault.

_Item._ _Nota_ que jàsoit-ce que l’esprevier et l’ostour soient peus
entre le pouce et le doit démonstratif, toutesvoies les autres oiseaulx
sont peus à plain poing.

La char lavée en eaue tiède est donnée pour abaissier et amaigrir.

Quant l’esmeut est blanc et cler et que un petit de noir est au bout,
_scilicet_ premier yssu du ventre, il est bon: autrement, non. Et quant
ou millieu de l’esmeut a aucune chose rousse et grosse ou millieu, il
signifie que l’oisel soit bas. Si le convient baissier[1601].

Le faucon lannier est dit _villain_[1602] pour ce qu’il se paist de
toutes chars, comme beuf, mouton, chièvre. Et _nota_ que chièvre
abaisse[1603].

L’esmeut qui est gecté loing est bon.

Le dit lannier est de gros maillé[1604], et est plus gros que le
lanneret qui est de plus déliée maille, et vole plus hault et avec les
faucons gentils: et ce ne fait point le lannier.

Autres faucons y a qui sont de Flandres et sont dis faucons _Sacres_,
et sont d’un petit moins déliée maille, et ont les piés jaunes[1605]
et sont comme entre le gentil et le villain, et sont bons, comme l’en
dit communément, réclamés au loirre, ou d’omme quant ils reviennent
bien au loirre.

Le faucon gentils est de plus déliée maille que nul et a les piés
jaunes, et est peu de cuer de mouton le moins, mais le plus de pigons
et de poulaille.

Autres faucons y a que l’en appelle _harrottes_[1606] et viennent de
Grenade et sont moult petis et très bons pour le héron, la grue et
l’oustarde: et sont icelles harrottes ainsi que tercelés qui sont les
masles des faucons de pardeçà.

Faucons pèlerins[1607] sont ceulx qui sont pris au filé et se sont peus
et ont volé aux champs, et sont _gentis_ nommés.

_Item_, le lannier ne vole fors aux perdris et aucunes fois au connin
et au lièvre, et non plus. Et les autres volent à l’oisel de rivière,
au héron, à la grue, à l’oustarde etc.

L’ottour vole à tout, mais non pas le tiercelet d’ottour.

Des faucons villains, la fumelle est dit lannier ou le fourmé, et le
masle est dit tiercelet[1608].

Le faucon gentil est noir. Et le faucon lannier est le plus tendre.
Et le faucon pèlerin est le meilleur qui soit et est le plus gros et
plus formé de membres que tous. Et à celluy qui les veult gouverner ne
convient mengier aulx, oignons, poireaux.

_Item_, quant aucun oisel de proye baille par trois fois de renc[1609]
et fait mate chière[1610], c’est signe qu’il est malade d’une maladie
que les fauconniers appellent _le fils_, et est un ver qui les point.
Et à les garir convient les paistre de char en laquelle sera enveloppé
du saffren, et les vers en meurent.

Et se un faucon a la pépie, il convient avoir un des brocherons d’une
espine blanche et lui passer par trois jours, trois fois chascun jour,
dedens la narine, et par trois jours lui mettre sur la langue des
figues vertes, prises sur l’arbre.--_Item_, vous sarez qu’il a la pépie
quant il fait mate chière et ne se veult ou peut paistre et aucunesfois
baille.

Se vostre oisel est pouilleux, vous le verrez au soleil, car sur toute
sa teste verrez-vous les poux bougier; et lors convient avoir de
l’orpiment[1611], du meilleur, et est la fueille meilleur, et soit
très bien broyé et finement, et très déliément sassé; et convient
estre trois personnes: l’un qui tendra l’oisel, l’autre qui tendra
l’orpiment, et l’autre qui l’orpimentera. Et puis convient getter de
l’eaue dessus comme un cousturier fait, à la bouche, puis le paistre
d’une poulle chaude, puis perchier, et luy oster le gant qui est
chargié d’orpiment, car l’orpiment est trop fort: et puis l’endemain
voler.

_Nota_ que en May le faucon commence à muer, et le convient paistre de
chaude viande; et sachiez que rats est propre viande pour luy.

_Item_, l’en le mue bien sur le poing.


FIN.



TABLE ALPHABÉTIQUE DES MATIÈRES.

_N. B._ La lettre _a_ indique le premier volume: la lettre _b_ le
second.


A

_A_ (Manuscrit), _a_, LIV.

_Abaisser_, expliqué, _b_, 322.

_Abattis._ V. _Issues_.

_Abbés et mariés_ (Histoire des), _a_, 145.

_Abbés_ assistans au parlement, _b_, 104.

_Ables_, _b_, 100, 194.

ABRAHAM, _a_, 78.

_Abstinence_ de viande, _a_, XLV.

ACAROT, _a_, XLVII.

_Accessiones historicæ_, cité _a_, LXV.

_Accide_, _b_, 17.

_Acouré_, expl., _b_, 178.

_Acrebades_, _b_, 124.

_Acrobates_, _b_, 124.

_Actéa_, _b_, 258.

ADAM, _a_, 77, 98, 166.

_Additions_ faites au livre de cuisine, _a_, XXXII et _b_, 124, 161.

_Additions et corrections_, _a_, LXXVII.

_Adenter_ (S’), _b_, 257.

_Adouer_ (S’), expl. _b_, 308.

_Adultère_, _a_, 52.
  --(Loi des juifs c. l’), _a_, 67.
  --pardonné, _a_, 182, 183, 237.
  V. _Avocat_.

_Afeutrement_, expliqué, _b_, 53.

_Affaires_ du dehors confiées au mari, _a_, 168.

_Affaitement_ de l’épervier, _b_, 295.

AGAR, _a_, 80.

_Agneau_, _b_, 221.
  --roti, _b_, 179.

AGNÈS la béguine (Dame), intendante de l’auteur, _b_, 57, 61 et suiv., 70.

_Aides_ des écuyers de cuisine, _b_, 115, 117.

_Aigles_ dressés, _b_, 321.

AIGNEAUX, _a_, LXX.

_Aigrefin_, _b_, 198.

_Aiguières_, _b_, 106, 118.

_Ailes_ des oiseaux. De quoi composées, _b_, 89.

_Aires_ des éperviers, _b_, 284.

_Alause._ V. _Aloze_.

ALBÉRIC de Trois-Fontaines, _a_, LXV, 92; _b_, 124.

ALBERTAN, _a_, 186.

ALENÇON (Pierre d’), _a_, LXXXI.

_Ales_, (poisson), _b_, 204.

_Alixandre_, (espèce de cèdre), _b_, 154, 246.

_Aljubarota_ (Bataille d’), _a_, LXVI.

_Allayer_, expl. _b_, 142.

_Allemagne_ (Brouet d’), _b_, 165, 172, 276.
  --(Oiseaux de proie en), _b_, 323.

_Allemans_, aiment la carpe très-cuite, _b_, 189.

_Alloges_, _b_, 257.

_Aloé._ V. _Alouette_, _Geneste_, _Gravé_, _Rosé_, _Pasté_.

_Alouettes_, _b_, 101, 183.
  --en pasté, _ib._
  --en rosé, _b_, 154.
  --en rost, _b_, 270.
  --(Espèces d’) _b_, 303.
  --prises à l’estourse, _a_, XLIX.

_Aloze_, _b_, 88, 95, 102, 188.
  --à la cameline, _b_, 107.

_Alumelle_ (aumelette), _b_, 207.
  --belle, _b_, 208.
  --frite au sucre, _ib._

_Alun_, _b_, 68.

_Amadou_ (Sorte d’), _b_, 263.

_Amandes_, _b_, 107, 122.
  --(Buvrage d’), _b_, 241.
  --confites, _b_, 269.
  --(Lait d’), 241.
  --leur prix, 110.

_Ambassadeurs_ Vénitiens, cités, _b_, 116.

_Ambrine_ (Couleur), _b_, 218.

_Amende_ honorable, _b_, 119, 120.

_Amis._ Quels sont les meilleurs, _a_, 199.

_Amitié_, _a_, 55.

_Anchois_, _b_, 204.

_Andouilles_, _b_, 127.
  --d’esté, _b_, 221.

ANDRESEL (Aubert d’), _a_, 150.
  --Guillaume, _ib._
  --(Jehan, sire d’), _a_, LXXX et suiv., 148 et suiv.
  --(Jehanne d’), _a_, 150.

_Andresel_ (Château d’), _a_, 153.

_Andrieu_, (cri de l’alouette), _b_, 303.

_Ane_ (Conditions de l’), _b_, 72.
  --Son dos nécessaire au serviteur, _b_, 23.

_Anges_ (Des), _a_, 17.

_Angleterre_ (Brouet d’), _b_, 157, 166, 276.
  --(Mer d’), _b_, 197.
  --(Oiseaux de proie en), _b_, 323.
  --(Otages en), _a_, LXXX.

_Anglois_, _a_., 93, 95.
  --à Melun, _a_, LXXX, 149.

_Anguille_, _b_, 190, 216, 217.
  --à la boe, _b_, 101.
  --aux aillets blancs, _b_, 190.
  --Comment la tuer, l’estuver et la cuire, _b_, 134.
  --conservée, _b_, 191.
  --en galentine, _b_, 102.
  --franche, _b_, 90.
  --renversée, _b_, 91, 92, etc., et 191.
  --salée, _b_, 96, 99, etc., et 107.
  --V. _Brouet_ et _Soringue_.

_Anguillettes_ fraîches, _b_, 190.

ANGUILLIER (Dame de l’), _a_, 240.

_Anis._ Son prix, _b_, 112.

ANJOU (Louis duc d’), _a_, XXII, XLI; _b_, 147.
  --Sa consommation de fleurs, _b_, 52.
  --(Marie d’), _a_, 174.

_Anjou_ (Vin d’), _b_, 38.

_Annuaire de la Bibliothèque royale de Belgique._ Cité, _a_, LV.

ANSELME (le père), _a_, LXV, LXX, 149; _b_, 116.

_Ante_ coupée, _a_, 159.

_Août_ (Chasse en), _b_, 305, 309.

APICIUS (Cœlius), ouvrage curieux et peu lu, _a_, XXXVI.
  --Détails sur ce livre, _a_, XXXVII.
  --(Marcus), _ib._

_Apocalypse_, _a_, 62.

_Appareil_ des festins, _b_, 103.

_Appendice_ à l’art. V de la deuxième distinction, _b_, 273.

_Appointemens_ du procureur-général en 1384, _b_, 104.

_Aragondis_, _b_, 276.

_Arbalestre_, _b_, 311.
  --(Chasse des pies à l’), _b_, 267.

_Arboulastre_, _b_, 93, 97, etc.
  --brune, _b_, 96, 103.
  --de char, _b_, 227.
  --d’œufs, _b_, 206.
  --en tartre, _b_, 209.

_Arc_ (Chasse à l’), _b_, 258 et 311.

_Arc-à-jalet_, _b_, 311.

_Archevéché_ de Paris (Censive de l’), 254.

_Archives_ de Saint-Lô, _a_, XXXV.

_Arcilié_, expl., _b_, 257.

_Arçonner_, expl., _b_, 183.

ARCQ (M. Douët d’), _a_, LXII, 174.

ARCUSSIA (Ch. d’) cité, _a_, LXV, LXXXVIII, _b_, 90, 280,
   281, 288, 291, 294, 295, 298, 307, 308, 310, 311, 317,
   319, 321, 323, 324.

_Argent._ Sa dépréciation, _a_, XXXI, LXXXII.
  --Son prix au XIVe siècle, _b_, 86.

_Argenterie_, _a_, XL, XLI.

_Arménie_, (Violette d’), _b_, 45.

_Armoirie_ sur gelée, _b_, 220.

ARNOULLET (Olivier), _a_, XXXIII.

_Arquenet_, _b_, 235.

_Arquinetta_, _b_, 230, 235.

ARRABLAY (Jeanne d’), dame d’Andresel, _a_, 149, 150, 151.

_Arras_ (Prévot de l’église d’), _a_, LXXX.

_Arrement_, Quid? _b_, 263.

_Arroche_, _b_, 47.

_Arrogans_ à éviter, _a_, 177.

_Arrogante_ femme, _a_, 97.

_Arroser_ (Comment), _b_, 43.

_Arsenic_, _b_, 64, 325.

_Arsilié_, expl., _b_, 257.

_Arsin_, _b_, 198.

ARTOIS (Chevalereux comte d’), _a_, LXVII, _b_, 118.

_Asséeur_, expl., _a_, XLII, _b_, 117.

_Assiettes_ creuses pour chaque convive, quand usitées, _b_, 105.
  --de métal étoient-elles connues? _b_, 115.

_Assiette_ des personnes, _b_, 117.
  --Les ordonner, _b_, 80.
  --(Pastés d’), _b_, 186.
  --synonyme de _service_, _a_, XLI; _b_, 91, 92, 94, 101, 108, 118, 227.

AUBIN, _a_, LXXIII.

AUBRI DE MONTDIDIER, _a_, 92.

AUBRIOT, (Hugues), _b_, 104.
  --Chanson sur lui, _a_, LXXXVII; _b_, 253
  --Récit de sa fuite, _a_, XIX.
  --Rondeaux sur lui, _a_, LXXXVII.
  --Sa maison, _a_, XXI; _b_, 253.
  --Ses oiseaux, _b_, 253.

AUDIGER, cité, _a_, XLIII.

_Auffémont_, _b_, 249.
  V. OFFÉMONT.

AUGUSTIN (Saint), cité, _a_, 39, 63, 70.

_Aulx_ camelins, _b_, 230.
  --moussus, _b_, 231.

_Aumelette_, _b_, 207, 208.
  V. _Alumelle_.

_Aumône._ V. _Corbeille_ et _Pot_.

_Aune_ (Feuilles d’), _a_, 171.

_Auques_, expliqué, _a_, LXXXVII, _b_, 103.

_Auteur_ du Ménagier, a pu connoître Tristan du Bos, _a_, LXXX.
  --a pu consulter un traité de chasse italien, LI.
  --craint d’ennuyer sa femme, _b_, 1.
  --Il étoit Parisien, _a_, XXVII.
  --incrédule sur des recettes qu’il transcrit, _b_, 66.
  --n’a pas été du parti bourguignon, LVI.
  --n’a pas terminé la troisième distinction, _a_, XLVII.
  --obligé par un avocat, _a_, 185.
  --peu au fait des enfans, _a_, 185.
  --Pour qui il écrit, _a_, XXIII.
  --respecte l’ouvrage de Bruyant, _b_, 3.
  --Sa bibliothèque, _a_, XXVI.
  --Sa délicatesse, _a_, XXIV.
  --Sa modestie, XXIV.
  --Ses emprunts, _a_, XXXI, XXXV.
  --se sert d’expressions _crues_, _b_, 60.
  --Ses fenêtres non vitrées, _a_, LXXXII, et 174.
  --Ses variations, _a_, XLIV.
  --Son âge, _a_, XXIII.
  --Son état et sa position, _a_, XXV, XXVI, etc.; _b_, 269.
  --Son nom inconnu, XXV.
  --Son père, _a_, 327, 240.
  --Son style, _a_, XXIX.
  (V. _Remarques_, et _Femme de l’auteur_.)

_Auteurs_ cités (Liste des), _a_, LXV.
  --pourquoi donnée, _a_, LXI.

_Autour_, a trois serceaux, _b_, 90.
  --A quoi il vole, 310, 321, 322, 324.
  --Comment nourri, 322.
  --baigné, _ib._
  --mué, _ib._
  --pû, _ib._
  --réclamé et veillé, _ib._

_Autourserie_, _b_, 319.

_Auvergne_, _b_, 53.

AUVERGNE (Le comte-dauphin d’), _a_, LXXXI.

_Auxerre_, _b_, 296.

_Avarice_, _a_, 44; _b_, 12.

_Avelaines_ ou _avelines_, _b_, 107.
  --(Breuvage d’), _b_, 271.

_Avillon_, _b_, 294.

_Avignon_, _a_, XXI, LXXXI, 183; _b_, 46.
  --(Laitues d’), _b_, 46.

_Avives_, _b_, 78.

_Avocat_ notable, adultère _a_, 185.
  --du roi, _b_, 104.
  --Sa place à table, _b_, 106.

AYALA (Pedro Lopez de), cité, _b_, 323, 324.
  --Détails sur lui, _a_, LXVI.

_Azincourt_ (Regnault d’), _a_, XXIX.


B

_B_ (Manuscrit), _a_, LV.

_Baciner_, expliqué, _b_, 179.

_Baconner_, _b_, 198.

_Baguette_ pliée en faisant amende, _b_, 120.

_Baignoire_, _b_, 129.

_Baillemens_ de l’oiseau, _b_, 325.

_Bailly_ de Tournay, _a_, LXXIX, 139.

_Bain_ de l’autour, _b_, 322.
  --de l’épervier, _b_, 298.

_Baisers_ (Usage de donner des), _a_, LXXVII.

_Baisser_, expl., _b_, 323.

_Baitte_ (poisson), _b_, 203.

_Balai_, _b_, 106, 111.
  --derrière une porte, _a_, 146.
  --Effet qu’il produit aux femmes, 147.
  --V. _Balay_.

BALAM, _a_, 87, 88.

_Balay_ (queue), _b_, 290, 294.
  --A quoi sert, _b_, 302.
  --(Mercqs du), _b_, 291.
  --rompu, _b_, 303.
  V. _Queue_.

_Balayer_ la maison, _b_, 61.

BALBI (Jean), _a_, 89.

_Baleine_, _b_, 200.

BALSAC (Pierre de), _b_, 255.

_Bancs_ des églises, _a_, 15.

_Banquiers_ (housses), _b_, 61.

_Bar_ (poisson), _b_, 91, 101, 187.

_Bar-sur-Aube_, _a_, 153.

_Barat_ (Description de), _b_, 24.

_Barbarin_, _b_, 204.

_Barbelet_, _b_, 187.

BARBIER (Colin, le), _b_, 119, 120.

_Barbillons_, _b_, 187.

_Barbillons_ de flèche, _b_, 258.

_Barbotte_, _b_, 267.

_Barbue_, _b_, 203.

_Barguaigné_ (Cheval), acheté dans quel cas, _b_, 76.

BARON (M.), _a_, LXXIV.

BARROIS (M.), _a_, LII.

_Barte_, _b_, 203.

_Bas_ (Mettre au), _b_, 314.

_Baseillecoq_, _b_, 46.

_Basilic_, _b_, 46.

BASTIN DE BREBAN, _a_, 237.

_Bateaux_, expliqué, _a_, 147.

_Batterie_ de cuisine, _a_, XLI; _b_, 115.

_Batteurs_ en grange, _b_, 54, 56.

BAUX (Guillaume des), _a_, XLI.

BAUYN, _a_, LXIX.

_Bavards_, _a_, 178.
  --comparés aux pétrins et aux battes d’un moulin, _a_, 48.

_Bayens_, expliqué, _b_, 135, 139.

_Beaucamp_, _a_, LXXX.

_Beauce_, _b_, 144.

_Beaune_ (Vin de), _b_, 38, 273.

_Beauté_ (Concierge de), _a_, 174.

_Beauvais_ (Hôtel de), où situé, _a_, LXXXV; _b_, 116, 123.

_Beauvais_ (Terre de), _b_, 251, 252.

_Bécasse._ V. _Videcoq_.

_Bécuit_, _b_, 102.
  --de brochereaux, _b_, 103.
  --de brochets et d’anguilles, _b_, 190.

_Béguines_ (Sur les), _b_, 57.

_Beignets._ V. _Bignés_ et _Buignets_.

BELLAY (Agnès du), _a_, 151.

BELON, cité, _b_, 194, 195, 197, 198, 200, 203, 204, 205, 206.

_Bénédiction_ du lit nuptial, _a_, LXXXVI; _b_, 118.

BENOISTON DE CHATEAUNEUF, cité, _a_, XLVI.

_Berger_ de l’auteur (Robin le), _b_, 62.

_Bergers_ savent où est le gibier, _b_, 301.
  V. _Calendrier_.

BERNARD DE MONTLHÉRY, _b_, 119, 120.

BERRY (le duc de), cité, _a_, LXXXIII, 93, 94, 95, 173; _b_, 46, 53, 254.
  --Rissoles faites chez lui, _b_, 226.
  --Sa consommation, _a_, XLV, _b_, 85.
  --Sa dépense en 1373, _a_, LXV (la duchesse en payoit sa part, _ib._).
  --Sa position à Paris, _a_, LVI.

BERTRAN le vieil (Le philosophe), cité, _b_, 58.

BESCHIR (L’émir). Ses oiseaux, _a_, LI.

_Bésiers_, cité, _b_, 132, 182, 203, 248.
  --(Eau de) _b_, 135.

_Besogne_ à diviser entre les domestiques, _b_, 61.

_Bêtes_ affouragées la nuit, _b_, 71.
  --noires, quand chassées, _b_, 157.
  V. _Sangliers_.
  --sauvages s’apprivoisent, _a_, 95, 144.

_Bettes_, _b_, 44, 49, 137, 140.

_Beurre._ Comment le déssaller, _b_, 266.
  --salé chasse les mouches des chevaux, _b_, 266.

_Beuvrage_ d’eau rousse d’un chapon, _b_, 240.
  V. _Buvrage_.

_Beyrouth_, _a_, LI.

BEZU-LE-LONG (Armes de), _a_, LVIII.

_Bible._ L’auteur l’avoit et la faisoit lire à sa femme, _a_, 62.

_Bibliophiles._ V. _Société_.

_Bibliothèque_ de Charles V, _a_, XVIII.
  --de l’auteur du _Ménagier_, _a_, XXVI.

_Bibliothèque des théreuticographes_, _a_, LXVI.
  --_historique de la France_, _a_, LXV.
  --_protypographique_, _a_, LII.

_Bicêtre_ (Château de), _a_, 173.

_Bichot_, _b_, 155.
  --sauvage, _b_, 158.

_Bierre_ (Levure de), _b_, 239.

BIGNE (Gaces de la). V. _Bugne_.

_Bignés_, _b_, 102.
  --de mouelle de bœuf, _b_, 93, 95.

_Blanc_, (monnoie), _b_, 69, 86, 128.

_Blanc-mengier_, _b_, 165.
  --(Chaudeau à faire le), _b_, 109.
  --(Épices pour le), _b_, 122.
  --paré, _b_, 93.
  --parti, _b_, 95, 96.
  --(Veau pour le), _b_, 121.
  --(Volaille pour le), _b_, 119.

BLANCHE DE NAVARRE, reine de France, _a_, 148.

BLANCHET (Louis), _a_, LXXXV.

_Blanchets_, _a_, 13, 171.

BLAZE (M. Elzear), _a_, LXXII.

_Blé_, par qui acheté pour le roi, _b_, 114.
  --(Prix du), _a_, XXXI.
  Vertjus de blé vert, _b_, 229.

_Bloc_, expl., _b_, 289.

_Blois_ (Dame de) très-pudique, _a_, LXXVIII.

_Bloqueaux_, _a_, 172.

BOCCACE, _a_, 99.

_Bochet_ (tisanne), _b_, 238.
  --de quatre ans de garde, _b_, 239.
  --pour les domestiques, _b_, 240.

_Bockede_, _a_, LVIII.

_Bœuf_, _b_, 62.
  --(Allouyaux de), _b_, 177.
  --amenés de Savoie à Paris, _a_, XLVI.
  --mangé comme ours, _b_, 155, 179.
  --(Conditions du), _b_, 72.
  --consommés à Paris, _a_, XLIII, XLVI; _b_, 82, 83, 84, 85.
  --(Cuir de), _b_, 82.
  --(Division du) par les bouchers, _b_, 86, 87, 130, 131, etc.
  --(Langues de), _b_, 133, 177.
  --(Mouelle de), en pasté, _b_, 223.
  --(Noyau de), _b_, 133, en pasté, _b_, 186.
  --(Prix du), _b_, 132.
  --(Rouillée de), _b_, 163.
  --salé, _b_, 130, 133.
  --(Saulce pour le), _b_, 131.
  --(Trumel de), _b_, 231.

BOILEAU, _a_, XXXVIII.

_Bonbons_ (épices de chambre), _b_, 122.

_Bondonnail_, _b_, 68.

BONFONS (Jean). Quand lui et sa veuve imprimèrent, _a_, XXXIII.
  --Nicolas, _ib._

_Bonne-dame_, _b_, 47.

BONNEFONS (Nic. de), cité, _b_, 105.

_Bonnes gens_ (Qui a affaire à), il se repose, (proverbe) _b_, 56.

_Borde-le-Vicomte_ (La), _a_, LXXX.

BOREL D’HAUTERIVE (M.), _a_, LXIII.

BOS (Tristan du), _a_, LXXIX.

_Bouche_, porte du corps, _a_, 60.
  --Pourquoi nous n’en avons qu’une, _ib._

BOUCHER d’Argis, _a_, LXXVI.

_Bouchers_, _a_, 54.
  --à Paris, _b_, 80.
  --Ce qu’ils fournissent à un repas de noces, _b_, 109, 121.
  --Comment défont un bœuf, _b_, 130.
  --Comment ils exerçoient leur profession, _b_, 82.
  --Leurs richesses, _b_, 82.

_Bouchère_ (Luxe d’une riche), _b_, 82.

_Boucheries_ de Paris. Remarques sur elles, _a_, XLIV; _b_, 80.
  --de Saint-Benoît, _a_, XLIV.
  --de Saint-Éloy, _a_, XLIV et _b_, 84.
  --du Roi, _b_, 85.
  (La grande), _a_, XLVI; _b_, 80.

BOUCHET (Guill.), _a_, LXVI.
  --cité, _b_, 307, 321.

BOUCICAUT, _a_, 148.

_Boudins_, _b_, 91, 92, 125, 128.
  --de foie, 126.
  --d’oie, _ib._

_Boueil_, _b_, 293.
  V. _Brayer_.

_Bougie._ Son prix, _b_, 112.

_Bougon_, expl., _b_, 311.

_Bouilli lardé_, _b_, 92, 93, etc. et 153.
  --au verjus, _b_, 96.
  --aux espices et aux soupes, _b_, 156.
  --de brochets et d’anguilles, _b_, 96, 103.
  --de chevrel, _b_, 96.
  --de venoison fraîche, _b_, 121.

_Bouillie_ (Recette pour la), _b_, 176.

_Bouillon._ Quel est le meilleur, _b_, 86, 88.
  --(tisanne), _b_, 238.
  V. _Chaudeau_ et _Eau_.

_Boujon_, _b_, 311.

_Boulanger_, _b_, 54, 56, 109.
  --de Montmorency, _a_, 161.

_Boulogne_, _a_, LXXXI.

_Boulogne_ la Grasse, _a_, 110, 113.

_Bourbelier_ de sanglier, _b_, 157, 179, 236.

_Bourberel_ de sanglier, _b_, 236.

BOURBON (Louis duc de). Sa consommation, _b_, 86.
  V. CHARLES.

_Bourbotte_ (poisson), _b_, 267.

_Bourgage_, expliqué, _a_, 140.

_Bourgeois_ avoient droit de chasse et chassoient à
   l’oiseau, _a_, XLVIII et suiv.
  --de Paris, arrêtés, _a_, 136.
  --(Queux d’un), _b_, 269.

_Bourgeoise_ de Paris sauve son mari, _a_, 135.

_Bourgeoisie_ parisienne au XIVe siècle, _a_, XXV.

_Bourges_, _a_, 94.

BOURGOGNE (Le duc de), _a_, LXVI; _b_, 253, 254.
  --Sa consommation, _b_, 86.
  --(Marguerite de), _b_, 254.

_Bourgogne_ (Vin de), _b_, 38.

_Bourgon_ de vigne (Vertjus de), _b_, 229.

_Bourguignon_ (Parti) à Paris, _a_, LVI, LVII.

_Bourrache_, _b_, 47.

_Bourrée_ à la galantine chaude, _b_, 94.
  --à la sausse chaude, _b_, 91, 92, 93, 97, etc.
  --faite avec des lamproies? _b_, 92, 95.

_Boussac_ de connins, _b_, 152, 153.
  --de lièvre, _b_, 153.

_Boutehors_, _a_, XLIII; _b_, 95, 103, 107, 108.

_Bouteille_ en terre, _b_, 252.

BOUTELIER (Jehan), _a_, 139.

_Boutonner_, expliqué, _b_, 88.

_Bouvier_ (Josson le), _b_, 62.

_Boyaux_ de porc. Comment lavés, _b_, 126.

BRABANT (Le duc de), _b_, 254.

_Brabant_ (Oiseaux en), _b_, 323.

BRAGELONGNE (Le ch. de), _b_, 83.

_Bran_, _b_, 76.

_Branchier_ (Épervier), _b_, 314.

_Braons_, expl., _b_, 149, 165, 213.

_Brayer_, _b_, 190, 293, 313.
  --(Avantage pour le), _b_, 152.

_Brayeul_, _b_, 293.

_Brennée_, _b_, 79.

_Bresmes_, _b_, 187, 203.
  --au vertjus, _b_, 97.
  --en rost, _b_, 94, 98, etc.

BRETEZ (L.), _a_, LXXIII.

_Brette._ Ce que c’est et comment apprêtée, _b_, 194.

BREUL (J. du), _a_, LXVII; _b_, 80.

_Breuvage._ V. _Beuvrage_ et _Buvrage_.

_Bric_, (jeu), _a_, 71, 72.

_Brie_ en 1358, _a_, LXXX, 148, 149.

_Brochereaux_, _b_, 100.

_Brochets_, _b_, 160, 232.
  --au romarin, _b_, 277.
  --(Chaudumé d’un), _b_, 173.
  --laités et œuvés, _b_, 88, 188.

_Brochetons_ à un rebouly, _b_, 100.

_Brochier_ (brochet?), _b_, 232.

_Broderie_, _b_, 118.

BRONGNIART (M. Adolphe), _b_, 258.

_Brouet_ blanc, _b_, 165, 173.
  --blanc de connins, _b_, 95.
  --blanc sur perches, _b_, 103.
  --camelin de chair, _b_, 93, 95.
  --d’Alemaigne, _b_, 93, 98, 165, 172, 276.
  --d’amandes, _b_, 96, 103.
  --d’Angleterre, _b_, 157, 166, 276.
  --d’anguilles, _b_, 92.
  --d’anguilles, verd, _b_, 94, 97.
  --de cannelle, _b_, 94, 97, 163.
  --de chapons, _b_, 149.
  --de fleur de pêcher, _b_, 276.
  --de fressure de porc, _b_, 158.
  --de Savoie, _b_, 99, 166.
  --de vertjus et de poulaille, _b_, 100, 167.
  --georgié, _b_, 97, 98, 163, 164.
  --houssié, _b_, 95, 163.
  --jaunet, _b_, 99.
  --larde d’anguilles renversces, _a_, LXXXIV, _b_, 99.
  --rousset, _b_, 165.
  --Sarrasinois, _b_, 172.
  --vergay, _b_, 167.
  --vergay d’anguilles, _b_, 171.
  --vert d’œufs et de fromage, _b_, 172.

_Brouetiers_, _b_, 53.

_Brueil_, expl., _b_, 293.

_Bruges_ (Inventaire de), _a_, LIII.
  --(Oiseaux de proie à), _b_, 323.

_Brulis_, _b_, 198.

_Brulliau_, _b_, 198.

BRUN (Anthoine), _a_, 137.
  --(Colin), _ib._

BRUNET (M.), cité, _a_, LXXIV _et passim_.

_Bruxelles_ (Inventaire de), _a_, LIII.

BRUYANT (Jean), _b_, 3, 4.

BRYANT (Jean), _b_, 3, 4.

_Buche_ achetée, _b_, 114.

BUCHON, _a_, 94.

BUDÉ (Jean), _a_, LXVIII.

BUFFON, _b_, 323.

BUGNE (Gaces de la), _a_, LXIX.
  --cité, _a_, XLIX, L; _b_, 186, 280, 284, 296, 309, 321, 324.

_Buignets_ de mouelle, _b_, 224.
  --d’œuves de lus, _b_, 229.

_Buissons_ dangereux pour l’épervier, _b_, 302.

_Buletel_, _b_, 136.

BULLET, cité, _a_, 92.

BUREAU (Pierre), _a_, 174.

_Bureaux_ de placement, _b_, 58.

_Burgos_, _a_, LXVI.

BURON, _a_, LXX.

_Butors_, _b_, 99.
  --rôtis, _b_, 181.

_Buvrage_ d’avelines, _b_, 271.
  --de lait d’amandes, _b_, 241.
  --de noisettes, _b_, 240.
  --pour malades, _b_, 237.


C

_C_ (Manuscrit), _a_, LII, LVII.

_Cabillau._ V. _Cableaux_.

_Cabinet généalogique._ Ce que c’est, _a_, LXXV.

_Cableaux_, _b_, 195.

CABOCHE, _b_, 84.

CACCON, _a_, 70.

_Cages_ chez diverses personnes, _b_, 253.

_Cailles_ (Chasse aux), _b_, 308, 310.
  --en pasté, _b_, 186.
  --(Vol aux), _b_, 280.

_Caillette_ de mouton, _b_, 128 et 129.
  --de veau, _ib._

_Calais_, _a_, 149.

_Calendrier des bergers_, _a_, LXVII, 29; _b_, 223.

_Calimafrée_, ou saulce paresseuse, _b_, 233.

_Camboïs_, _b_, 263.

_Cambray_ (Traité de), _a_, 139.

_Camelot_, _b_, 66.

_Campagne_ (Vie à la), _b_, 62.

_Cameline_, _b_, 175, 177, 178, 179, 180.
  --achetée au saussier, _b_, 111, 122.
  --de Tournay, d’hiver et d’été, _b_, 230.
  V. _Aulx_.

_Canards_, _b_, 89. V. _Mallars_.

_Canets_, _b_, 236.
  --en gravé, _b_, 121.

_Canelle_ battue, _b_, 111.
  --triée à la dent, _b_, 248.

CANGE (Ch. du Fresne, sieur du). Objections à ce
   grand homme. V. _Coretum_, _Enfeutrure_, _Milion_.
  --cité, _passim_.

CANTAMUS, roi de Hongrie (ou plutôt des Abares), _a_, 68.

_Caordes_, _b_, 273.

_Carcassonne_, _b_, 248.

_Cardamomon_, _b_, 68, 111.

_Carpe_, _b_, 88, 91, 99; _b_, 188, 189.
  --à l’estouffée, _b_, 189.
  --Comment l’apprêter, _b_, 189.
  --de Marne, _faudisse_, _b_, 107.
  --en galentine, _b_, 233.
  --plus cuite en Allemagne qu’en France, _b_, 189.
  --portée vive, _b_, 90.
  --Quelle est la bonne, _b_, 90.
  --Sa tête, _b_, 90.

_Carrelets_, _b_, 171, 202, 204.

_Carrottes._ V. _Garroites_.

_Cartes_ à jouer, _a_, XXX, 71, 72.

_Carvi_, _b_, 245.

_Cassemuseaux_, _a_, XXXIX.

CATAFAGO (M.), _a_, LI.

_Catholicon_, _a_, 89.

_Caution_ (Accusés élargis sous), 233.

_Cayeux_, _b_, 205.

_Cèdre_ alixandre ou vermeil, ou dont l’on fait
   manches à couteaux, _b_, 154, 246.

_Cédule_, _b_, 252.

_Celle_ (La), _a_, 149.

_Cendail_, _b_, 118.

_Cerceaux_ (plumes), _b_, 90. V. _Serceaux_.

_Cercelles_, _b_, 311.

_Cerf._ Chassé quand, _b_, 156.
  --(Cimier du), _b_, 87, 264.
  --Comment défait et mangé, _b_, 156, 157.
  --(Couart du), _b_, 87.
  --(Hampe du), _b_, 87.
  --(Menus droits de), _b_, 156.
  --(Poison pour le), _b_, 258.
  --(Quoier du), _b_, 87.
  --Sa tête et son pied donnés aux seigneurs, _b_, 157.
  --(Seymier de), _b_, 264.
  --(Venaison de), _b_, 154.

_Cerises_, _b_, 53.
  --On n’en trouve pas en mai, _b_, 108.

_Cerisier_ enté sur vigne, _b_, 51.

_Cervaisons._ Quand commencent, _b_, 156.

_Cervoise_ (Leveçon de), (levure de bierre), _b_, 239.

CERXÈS (Le philosophe), _a_, 68.

CESSOLES (J. de), _a_, 68.

_Cet an._ Que signifie cette expression, _a_, XXXIII.

CHABANNES, _a_, 151.

_Chace dou cerf_, citée, _b_, 157.

_Chair_ (Grosse), (bœuf et mouton), _b_, 91, 92, 93.
  --lavée, donnée à l’oiseau, _b_, 297, 323.

_Chaleur_ (Effet de la) sur l’épervier, _b_, 305.

_Chamberières._ Les veiller de près, _b_, 74.
  --Long article sur elles, _b_, 56.
  --peuvent supplanter la femme, _a_, 130.

_Chambre_ arrosée, _a_, 174.
  --balayée, _b_, 61.
  --(Bètes de), _b_, 62.
  --démeublée n’a pas de mouches, _a_, 174.
  --de parement, _b_, 107.

CHAMPAGNE (Armes de), _a_, LVIII.

_Champagne_, _a_, 149.

CHAMPIER (Bruyère), _a_, LXVII, _b_, 206.

_Champignons_, _b_, 185.

CHAMPFLORY (Jeanne de), _a_, LXXVII.

CHAMPOLLION (M. Aimé), _a_, LXVII, LXXXII; _b_, 254.

_Champs_ (Vol pour), _b_, 301.

_Chandelier_ à platine, _b_, 71.

_Chandeliers_ (marchands), _b_, 56.

_Chandelle_ (Recette pour la), _b_, 56, 259.
  --Comment l’éteindre, _b_, 71.

_Chanlatte_, expl., _b_, 313.

_Chansons_, _a_, XXXIX, 72.
  --sur Aubriot, _a_, LXXXVII; _b_, 253.

CHANTEPIE, _a_, LXX.

_Chanter_, _b_, 108.

_Chaons_, expl., _b_, 154, 206.

_Chapeaux_ (de fleurs), _b_, 113, 114, 116, 118, 122.

_Chapellerie_ (fleurs), _b_, 115.

_Chapelière_ (marchande de fleurs), _b_, 118, 123.

_Chaperon_, _a_, 14, 15.

_Chapons_, _b_, 91, 92, 94 etc., 165.
  --à la calimafrée, _b_, 234.
  --à la dodine, _b_, 93, 94, etc.
  --à la saulce briefve, _b_, 235.
  --au blanc manger, _b_, 108.
  --aux herbes, _b_, 100, 150.
  --(Brouet de), _b_, 149.
  --Comment _poussés_, _b_, 232.
  --Comment tués et attendris, _b_, 89, 150.
  --(Consommé de), _b_, 240.
  --de haute graisse, _b_, 271.
  --entiers en un blanc brouet, _b_, 101.
  --faisandés, _b_, 89, 150.
  --(Hardouil de), _b_, 162.
  --(Jugiers de), _b_, 121.
  --pèlerins, _b_, 99.
  --(Prix des), _b_, 110, 119.
  --rosti, _b_, 180;
  à quelle sauce, _b_, 232.
  --(Saulce pour un), _b_, 237.

_Chappé_, expl., _b_, 294.

_Charbon_, _b_, 114.
  --Son prix, 113.

_Charcois_, _b_, 170, 213, 306.

_Chardonnerels_, _b_, 256.

CHARLES V, cité, _a_, LXVI, LXVIII, 148; _b_, 84, 109, 324.
  --donne un hôtel à Aubriot, _b_, 254.
  --Remarques sur son règne, _a_, XVII.

CHARLES VI, entre à Paris en 1383, _a_, 136.
  --Son ordonnance sur la chasse, _a_, XLVIII.
  --son séjour à Rouen, _a_, 135.

CHARLES II, roi de Navarre, _a_, LXXIV.

CHARLES, cardinal de Bourbon, _b_, 116.

CHARLOT (Cage de), _b_, 255.

_Charnage_, expl., _b_, 140.

_Charnalité_, _a_, 40.

_Charnier_ des éperviers, _b_, 284.

_Charnier_ (ongle), _b_, 294.

CHARNY (Jacqueline de), _a_, 14.

_Charquois_, expl., _b_, 170, 213, 306.

_Charrée_, _b_, 263.

_Charrons_, _b_, 56.

_Chartiers_, _b_, 57, 62.

_Chasse_ (Ordonnance de 1397 sur la), _a_, XLVIII.
   V. _Août_, _Arbalestre_, _Arc_, _Cailles_, _Lièvre_,
   _Perdrix_, _Septembre_.

_Chasse_ à l’épervier. Comment et par qui pratiquée au
   XIVe siècle, _a_, XLVIII, XLIX, L.
  --Sa durée, _b_, 280.
  --en Orient, _a_, LI; _b_, 321.
  --(Partie de), _a_, L.
  --(Traité de la), _b_, 279.
  V. _Esprevier_ et _Fauconnerie_.

_Chastaignes_, _b_, 259.
  --avec venaison, _b_, 130.
  --en rissoles, _b_, 225.

_Chasteau de labour_, _b_, 4, 36.

_Chastelet_ ou _Chastelier_ en Brie, _a_, 149.

_Chastelet_ (Place du), _b_, 80.
  --(Prisons du), _b_, 116.

CHASTELLUX (Seigneurs de), _b_, 296.

_Chastelongnes_ salées, _b_, 100.

_Chasteté_, _a_, 60.

_Chateingnes_, _b_, 130, 225, 259.

_Chats_, dangereux pour l’épervier, _b_, 286, 291.

_Chauchier_, expl. _b_, 308.

_Chaudeau_ flament, _b_, 241. V. _Bouillon_.

_Chaudières_, _b_, 115, 123.

_Chaudumée_, _b_, 102, etc.
  --de beschets, _b_, 101.
  --d’un brochet, _b_, 173.
  --(Limats au), _a_, XXXIX.
  --pour poisson d’eau douce, _b_, 232.

_Chaudun._ Ce que c’est, _b_, 128.
  --de pourceau, _b_, 160, 228.
  --vendu dans les rues, _b_, 161.

_Chaumont-en-Bassigny_, _a_, 153.

_Chausses_, _a_, 169, 238, 239.

CHAUVERON (Audouin), _a_, 136; _b_, 104.

_Chemin de pauvreté et de richesse_, _b_, 4.

_Chemin_ ferré, _b_, 35.

_Cheminée_ fumeuse équivaut à femme rioteuse, _a_, 169, 171.

_Chemise_, _a_, 13, 14.
  --jetée sur la chandelle, _b_, 71.

_Chêne._ V. _Chesne_.

_Chenilles._ Comment tuées, _b_, 50.

_Chère_ (apparence), du cheval, _b_, 74.

_Chervis_, _b_, 228.

CHESNE (Jean du), _a_, LXXXV; _b_, 116, 123.
  --Note sur lui, _b_, 116.

_Chesne._ (Plusieurs arbres entés sur un), _b_, 51.

_Cheval_, offert pour une patenostre dite sans distraction, _a_, 21.
  --paissant en gué (proverbe), _b_, 70. V. _Chevaux_.

_Chevalereux_ comte d’ARTOIS, _a_, LXVII; _b_, 118.

_Chevalier_ de la Tour, _a_, LXVII, 7, 240; _b_, 60.

_Chevaliers_ peu riches chassent à l’épervier, _a_, XLIX.
  --avec des bourgeois, L.
  --Queux des simples chevaliers, _b_, 269.

_Chevaux_, _b_, 62.
  --(Achat de), _b_, 72.
  --(Age des), _b_, 73.
  --Leurs conditions, _b_, 72.
  --L’épervier s’y habitue, _b_, 300.
  --de l’espreveteur, _b_, 280, 284.
  --frottés de graisse salée pour les mouches, _b_, 266.
  --(Maladies des), _b_, 73 et suiv.
  --Soins à eux donnés, _a_, 175.

_Chevreaux_, _b_, 101, 108, 155, 221, 227.
  --consommés par le roi, etc., _b_, 85.
  --(Fressure de), _b_, 228.
  --Leur prix, _b_, 110.
  --rostis, _b_, 179.

_Chevrel_. V. _Chevreau_.

_Chevrel_ sauvage (chevreuil), au boussac, _b_, 155.
  --chassé à l’oiseau, _b_, 321.

_Chien_. Aime son maître, _a_, 92.
  --Comment soigné, _a_, 175.
  --de Niort, _a_, 93.
  --enragé, _b_, 259.
  --étranges, dangereux pour l’oiseau, _b_, 301.
  --petits, _b_, 62.

_Chiens espagnols_ (Choix et éducation des), _b_, 281, 282.
  --L’épervier s’y habitue, _b_, 300.
  --nécessaires à l’épreveteur, _b_, 280.
  --L’épervier se perche sur eux, _b_, 296.
  --placés près de l’oiseau, _b_, 289.
  --leur quête, _b_, 306, 307.

_Chien_ de mer, _b_, 195. V. _Brette_.
  --(Foie de) en pâté, _ib._

_Chinon_, _a_, 174.

_Chisay_ (Combat de), _a_, 94.

_Chitron_ (citron confit), _b_, 112, 122.

_Choés_, _b_, 267.
  --(Volaux), _b_, 311.

_Choses_ (Menues), qui ne désirent pas de chapitre, _b_, 262.
  --qui ne sont de nécessité, _b_, 243.

_Choucas_, _b_, 267.

_Choulx_, _b_, 44, 48, 50, 142.
  --avec lard, pigeons, etc., _b_, 144.
  --blancs, 48, 143.
  --cabus, 48, 98.
  --Comment cuits, _b_, 144.
  --Maistre Réné, _a_, XXXIX.
  --Les meilleurs, _b_, 142.
  --pasquerés, _b_, 49, 143.
  --(Plantation des), _b_, 143.
  --(Pommesde), _b_, 48, 49, 143.
  --romains, _b_, 48, 143.

_Choysne_, _a_, XXXIX.

CHRISTINE DE PISAN, _a_, LXVII, LXXXIII, 186; _b_, 147.

_Chroniques_ de Saint-Denis, _a_, LXVII, LXXXI, 148; _b_, 253.

_Cidre._ V. _Pommes_ (Breuvage de).

_Cigne_, _a_, LXXXIV; _b_, 99, 101.
  --Comment tué, _b_, 184.
  --revestu, _b_, 184.
  --rosti, 183, 184.
  --servi en entremets, _a_, XLII; _b_, 184.

_Cigoigne_ rostie, _b_, 181.

CIGONGNE (M. A.), _a_, XXXIX.

_Ciller_, expliqué, _b_, 315.

_Cimier_ du cerf; _b_, 87, 129, 156, 157, 264.

_Cincenelles_, _a_, 172.

_Cincenellier_, _a_, 172.

_Cine_, _a_, LXXXIV. V. _Cigne_.

_Cire._ Son prix, _b_, 112, 122.

_Cirier_, _b_, 122.

_Citoual_, _b_, 112, 219.

_Citron_, _b_, 112, 122.

_Civé_, _a_, LXXXIV; _b_, 153.
  --de connins, _b_, 96, 169.
  --de lièvre, _b_, 91, 92, 94, etc., 119, 169.
  --de moules, _b_, 277.
  --de veel, 95, 119, 168.
  --d’oestres (huîtres) noir, _b_, 96, 103.
  --d’œufs, _b_, 174:
    fris, 277.
  --d’oïttres, _b_, 99, 102, 174, 277.
  --Saison des civés, _b_, 242.

_Claré_ ou _Clairet_, _b_, 99, 101.

_Clémence_ d’un mari, _a_, 182.

_Clerc_ ou varlet chargé d’acheter certaines choses, _b_, 114.
  --marié, _b_, 119.

CLERE (Le sire de), _a_, LXXXI.

CLINCHAMP, _a_, LXX.

CLISSON (Olivier de), _b_, 321.

_Clotet_, _b_, 286.

_Clou_ de girofle, _b_, 111.

_Cochon_, _b_, 62.
  --en tarte, _b_, 217.
  --farci, _b_, 99, 225.
  --maigre, 110, 121.
  --pour la gelée, _b_, 220.
  --Son prix, _b_, 220.
  --rosti, _b_, 178. V. _Porc_.

_Cœur_ (Maîtriser son), _a_, 177.
  --(Proverbe sur le), _b_, 15.

_Cœurs_ dans le plumage de l’épervier, _b_, 293.

_Coiffes_, _a_, 14, 15.

_Coin_ borgne, _b_, 52.

_Coings_ confits, _b_, 247.

COLBERT (J. B.), _a_, LXVIII, LXXI.

_Comin._ V. _Cumin_.

_Commande_, expl., _b_, 295, 296, 299.

_Commandemens_ du mari à suivre, _a_, 96, 131.
  --sans en demander la cause, 134.

_Commère_ bavarde, _a_, 180.

_Comminée_, _b_, 100.
  --de poulaille, _b_, 161.
  --de poisson, _b_, 162.

_Compiègne_, _b_, 249.

_Compostes_, _b_, 243.
  --avec dragées, _b_, 107.

COMTE (Aymery), _b_, 119.

_Concierges_ louoient les hôtels, _b_, 116.
  --de l’hôtel de Beauvais, _b_, 123.

_Condoignac_, _b_, 247.

_Confession_, _a_, 23, 31.

_Confiegs_, _b_, 122.

_Confitures_, _b_, 244, 245.
  --de noix, _b_, 247.

_Congres_, _b_, 97, 102, 197.

_Conjuration_ contre avives et farcin, _b_, 78.
  --c. la rage, _b_, 259.

_Connins_ (Age des), _b_, 152.
  --(Boussac de), _b_, 152.
  --consommés par le duc de Berry, _b_, 85.
  --Les connoître, _b_, 88, 152.
  --gras et tendres, _b_, 88.
  --rostis, _b_, 91, 92, etc. 179.
  --(Saison des), _b_, 271.
  --(Sauce pour), _b_, 236.
  --(Saupiquet pour), _b_, 233.
  --volés par le lanier, _b_, 324.

_Conseil_ de la boucherie, _b_, 81.
  --de Mellibée, _a_, 189.
  --du Roi, _b_, 104.
  --Quels sont les bons, _a_, 194, 199.

_Conseillers_ des grands seigneurs, _a_, 199.

_Consommation_ individuelle varie, _a_, XLVI.
  --a baissé depuis 1789, _ib._ V. _Paris_.

_Contrition_, _a_, 21.

_Convoitise_, _b_, 21.

_Coraux_, _b_, 89.

_Corbeil_ (Pain de), _b_, 38, 109.

_Corbeille_ de l’aumône, _b_, 115.

CORBIE (Arnault de), _b_, 104.

_Corbeux_ (Cheval). Comment le dire aux marchands, _b_, 75.

_Cordon_ bleu mis en parallèle avec la camisole rouge, _b_, 83.

_Cordonniers_, _b_, 54, 56.

_Coretum_, mot cru fautif, dans Du Cange, _b_, 295.

_Coriandre_ sur des plats, _b_, 165, 171.

_Cormorant_ rosti, _b_, 181.

_Corneilles_, _b_, 267.

_Cornillas_, _b_, 267.

_Corps_ de derrière (du bœuf), _b_, 131.
  --de devant, _ib._

_Corrections et additions_, _a_, LXXVII.

CORROZET (G.), _a_, LXVIII, LXXXV; _b_, 80, 113.

_Cost_, _b_, 44.

_Costelettes_ de porc, _b_, 127.

_Coterets_ de Bourgogne, _b_, 113.

_Cotignac_, _b_, 247.

_Coton_ donné à l’épervier, _b_, 297.

_Cotte_, _a_, 13, 14.

_Couart_ du cerf, _b_, 87.

_Coucher_ des domestiques, _b_, 71.

COUCY (Le Sire de), _a_, LXXXI.

_Couleur._ Comment la faire revenir, _b_, 66.

_Coulis_ d’écrevisses, perches, etc., _b_, 242.
  --d’un poulet, _b_, 242.

_Coulombin_ (Gingembre), _b_, 230.

_Coulons_ ramiers, _b_, 89, 133, 182.
  --Comment connaître leur âge et les manger, _b_, 182.
  --de deux espèces à Béziers, _ib._
  --(Saupiquet pour), _b_, 223.
  --vieux en hochepot, _b_, 163.

_Couloueres_, _a_, XLI; _b_, 114, 115, 123.

_Couper_ verdures (Quand), _b_, 43.

_Courbes_ du cheval, _b_, 73.

_Courges_, _b_, 47.
  --Comment cuites, _b_, 148.
  --confites, _b_, 245.

COURMONT (M. de), _a_, XXI.

_Couronné_ (Cheval), _b_, 74.

_Couronnelles_ du cheval, _b_, 74.

COURTENAY (Généalogie de), citée, _a_, 152.

_Cousin_ (insecte), _a_, 172.

_Cousine_ de la femme de l’auteur, peu obéissante à son mari, _a_, 156.

_Cousteaulx_ (plumes), _b_, 89, 294.

_Couste-pointe_, _a_, 160; _b_, 118.

_Cousturier_, _b_, 54, 56.
  --arrose le drap, _b_, 67, 326.

_Couteaux_ (Manches de), en cèdre, _b_, 154, 246. V. _Cousteaux_.

COUVEIGNON (Pierre de), _a_, LXXVII.

_Couvert_ de table au XIVe siècle, _a_, XL.

_Couvert_ (Oiseau qui porte au), _b_, 294, 305, 308.

_Couverte_ (Vol à la), _b_, 280.

_Couvertoirs_, _b_, 61.

_Couvrechef_, _a_, 14, 15, 169, 238; _b_, 252.

_Couvrefeu_, heure du souper, _b_, 39.

_Coyer_, _b_, 129.

CRAON (J. de), sr de la Suze, _b_, 99.

_Crapaudine_, _b_, 74.

_Crape_ du cheval, 75, 77.

_Crapeux_ (Cheval), _b_, 74.

_Craspois_, _b_, 102, 103, 136, 200.

_Créanciers_, _b_, 56.

_Crecerelle_ (_quid?_) _b_, 320.

_Crédit_ (Achats à), _b_, 25, 56.

CRESCENS (Pierre de), _a_, LXVIII; _b_, 246.

_Crespes_, _b_, 92, 94, 226.
  --à la guise de Tournay, _b_, 226.

_Crespine_ de porc, _b_, 268.

_Cresson_, _b_, 102, 106.
  --au vinaigre, _b_, 101.
  --(Porée de), _b_, 140.

_Creteil_, _a_, 133.

_Cretonnée_, à jour de poisson, _b_, 160.
  --de chair, _b_, 93, 97.
  --d’Espaigne, _b_, 95, 98, etc.
  --de pois et fèves, _b_, 159.

_Crime_ impuni en appelle d’autres, _a_, 214, 216.
  --racheté, _a_, 215.

_Crotet_, _b_, 286.

_Crottes_, _b_, 93.

_Croutes_ au lait à la dodine, _b_, 96.
  --de lait, _b_, 95, 96.

_Cruches_ en terre de Beauvais, _b_, 251.

_Cubèbe_, _b_, 112, 219.

_Cueres_ sur l’épervier, _b_, 293.

_Cuereté_ (Plumage), _b_, 293.

_Cuevrechief._ V. _Couvrechef_.

_Cuillers_, _b_, 105.
  --d’argent, _a_, XL; _b_, 118.
  --de bois, _b_, 115, 123.
  --de fer, _b_, 115.
  --de fer percée, _b_, 123, V. _Mouelle_.
  --données aux ménestrels, _b_, 123.

_Cuisine_ du moyen âge comparée à la cuisine romaine, _a_, XXXVI.
  --(Idée erronée de Lister, sur la), XXXVII.
  --quand simplifiée, _ib._
  --modifiée au XVIe siècle, _a_, XXXVIII.
  --(Termes généraux de), _b_, 87, 124.
  --(Traité de), _b_, 124.

_Cuisine_ nétoyée, _b_, 69.
  --(Objets nécessaires à la), _b_, 114.
  --(Richard de la), _b_, 69.

_Cuisinier._ V. _Queux_.

_Cuisinier françois_, cité, _a_, XXXVIII.

_Cuisses_ de bœuf, _b_, 131.

_Cuisson_ de la carpe, _b_, 88, 189.

_Cumin_, _b_, 161. V. _Comminée_.

_Curée_, _b_, 157.

_Cures_. V. _Plumes_.

CUVELIER, _a_, 94.

_Cuviers_, _b_, 106.

_Cygne._ V. _Cigne_.

_Cyros_ (poisson), _b_, 201.


D

_Daintiers_, _b_, 87. V. _Deytiés_.

_Damas_, _a_, LI.
  --(Drap de), _b_, 66.
  --(Eau rose de), _b_, 252.

_Dames._ (Éperviers bons pour), _b_, 293.

DAMPIERRE (Aubert de), _a_, 136.

DANIEL (le prophète), _a_, 64, 66.

_Danse_, _a_, 2, 72; _b_, 108.

_Danseurs_, _a_, 77.

_Darioles_, _b_, 93, 94 etc. 121.
  --de cresme, _b_, 94, 95.
  --necessaires à un repas de noces, _b_, 108.

_Dattes_, _b_, 107, 112, 225.

DAUVERGNE (Famille), _b_, 83.

_Débat_ (Reget du) de l’oiseau, _b_, 290. V. _Rebat_.

_Débats_, naissent de dettes, _b_, 56.

_Débiteurs_, croient toujours devoir moins, _b_, 56.

_Débonnaireté_, _a_, 56.

_Déception_, _a_, 46.

_Déchaussé_ (Mari), au feu, _a_, 168.

_Décoré_, dans le sens de tuer, _b_, 128, 178.

_Décours_ de la lune, _b_, 43.

_Défaire_, expliq. _b_, 151.

_Défenses_ du mari à suivre, _a_, 97.

_Dégaster_, expl. _b_, 251.

_Délices_ de la campagne, cités, _a_, XLII, XLIII; _b_, 88, 105, 130.

_Délié_ sur la pointe (Cheval), _b_, 76.

_Demandes_ d’ébatement par dés, par rocs et rois, _a_, 7.
  --subtiles, _ib._

_Dentés_ (daintiers), _b_, 87, 156.

_Dent_ (Canelle triée à la), _b_, 248.
  --du cheval, _b_, 73.
  --(Mal de), _b_, 257.

_Dépense_, à écrire, _b_, 56. V. _Papier_.

_Dés_ (Jeu des). Usures qui s’y faisoient, _a_, 46.

_Désafeutré_, expliqué, _b_, 54.

_Désespération_, _a_, 41.

_Désespoir_, _a_, 41.

DESMARÈS (Jean), _a_, 136, LXXXIII, LXXXVI, 136; _b_, 105.
  --(Idete), _a_, LXXXII.

_Désobéissantes_ (Femmes), _a_, 156.

_Despensier_ (Maistre Jehan le), _b_, 54, 58, 69, 70, 72, 76, 80, 86.

DESPIÉS (Louis), _a_, LXXIX.

DESSALLES (M.), _a_, LXII.

_Desserte_, _b_, 103, 107, 108.
  --expliqué, _a_, XLII.
  --Par qui serrée, _b_, 117.

_Dessevrer_, expl. _b_, 212.

_Destinée_, _b_, 18.

_Desvuidier_, expl. _b_, 307.

_Détourné_ dans le sens de dressé? _a_, XLII.

_Détraction_, _a_, 37.

_Dettes_ (Ne pas payer ses), _b_, 26.

_Deuil_ des reines, _b_, 123.
  --des veufs, _b_, 123.

_Deytiés_ du cerf, _b_, 87.
  --Comment mangés, _b_, 156.

DHEULLAND, _a_, LXXIII.

_Diable._ Père de l’avare, 58.
  --philosophe, 56.
  --Ses commandements, 47.
  --Ses fritures, _a_, 31.
  --Son Église, 48.
  --Ses miracles, 48.

_Dialecte_ flamand, _a_, LVIII.

_Digne_ (Raisins de), _b_, 246.

_Diligence_, chemin de richesse, _b_, 17.

_Diligens_ (Comment rendre ses gens), _b_, 62.

_Diners_ (Ordonner), _b_, 80.
  --de grands seigneurs, _b_, 91.

_Discorde_, _a_, 31, 34.

_Distinction_ première, _a_, 9.
  --deuxième, _b_, 1.
  --troisième, _b_, 279.

_Dit_ des pays, _a_, LXVIII; _b_, 246.

_Documens_ cités, _a_, LXV.

_Dodine_, _b_, 91, 92.
  --d’oés, _b_, 96.

_Domestiques_, _b_, 54, 56.
  --Les chauffer, _b_, 70.
  --Leur dîner, _a_, XLIII; _b_, 69, 107.
  --malades, _b_, 71.
  --Organiser leur service, _b_, 60, 69.
  --Leur tenue pendant le repas, _b_, 70. V.
   _Chamberières_, _Mesnies_, _Varlets_.

_Domination_ d’une femme insupportable à un mari, _a_, 236.

_Dorée_ (poisson), _b_, 204.

_Dorée_ verte (Volaille), _b_, 214.

DORMANS (Miles de), _b_, 116.

_Dorures_, _b_, 92, 94.
  --(Chap. des), _b_, 210. V. _Pès d’Espagne_.

_Dos_ (Tendre), du cheval dangereux, _b_, 74.

_Dot_ d’une nièce de boucher, _b_, 82.

DOUBLE (Martin), _b_, 116.

_Doulce_ pour gousse, _b_, 231, 235.

_Dour_, expliqué, _b_, 47.

_Dragées_, _b_, 92 (bis), 122.
  --Leur prix, _b_, 112.
  --sur la gelée, _b_, 221.
  --sur les pommes cuites, _b_, 106.
  --vermeilles sur les chapons, _b_, 108.

_Dragouers_, _b_, 106, 118.

_Draps_ à tendre la salle de festin, _b_, 105.
  --de Damas, _b_, 66.
  --_estou_ ou _estru_, _a_, 171.
  --Les visiter, _b_, 65.

_Drapiers_, _b_, 56.

_Dressoir_ de cuisine, _a_, XL; _b_, 115, 117.
  --de salle, _a_, XLI; _b_, 117.

DROBILLE (Raoul), _a_, LXXXIII; _b_, 119.

_Drois_, _a_, LXXXIV.
  --au percil et au vinaigre, _b_, 100.
  --menus d’un cerf, _b_, 156.

DUCHESNE (André), _a_, LXVIII.
  --Jehan, _a_, LXXXV; _b_, 116, 123.

DUCLOS (M.), _a_, LXIII.

DUREAU DE LA MALLE (M.), cité, _a_, XLVII.

_Durié_ (cheval), _b_, 73.


E

_N. B._ Voir à _Es_ certains mots écrits
   aujourd’hui par _E_, comme _escrevices_,
_espices_, etc.

_Eau_ à laver mains sur table, _b_, 247.
  --bénite d’eau rose, 275.
  --bénite d’oignons, 276.
  --chaude donnée au cheval, 77, 79.
  --cuisant bien les pois, 134.
  --grasse de bœuf, 144.
  --ôtée du vin, 259.
  --Son prix, 123.
  --rose de Damas, 252.
  --rose en sausse, 183, 275.
  --rose faite sans chapelle et sans feu, 252.
  --rose vermeille, 253.

_Échecs_ (Jeu des), _a_, 184.

_Échevins de la Pierre au lait._ Ce que c’est, _a_, LXXXV.

_Écorcheurs_, _b_, 81, 84.

_Ectoire_, _b_, 258.
  --de canarade, _b_, 63.

_Écussons_, accollés depuis quand, _a_, LVIII.

EDDAOULEH (Choudjà et Seïf), _a_, LI.

ÉDOUARD, roi d’Angleterre, _a_, LXXXI et suiv.

_Effleurer_ dans le sens d’enfariner, _b_, 192.

_Efforcer_ (S’), expliqué, _b_, 306.

_Église_ (Bancs d’), _a_, 15.
  --(Éperviers portés à l’), _b_, 296.
  --n’est pas lièvre, _a_, 48.
  --(Tenue d’une femme à l’), _a_, 15, 16.

_Électoire._ V. _Ectoire_.

_Élire_, expl., _a_, LXXXVI; _b_, 134.

_Ellébore_ noir, _b_, 258.

_Empiéter_, expl. _b_, 281.

_Encre._ Manière de la faire, _b_, 265;
  sans bouillir, _b_, 274.
  --pour papier et parchemin, _b_, 275.

_Encyclopédie_, citée, _b_, 295.

_Enfans_ abandonnés de leurs marastres s’enamourent ailleurs, _a_, 170.
  --adultérins, _a_, 182, 185.
  --mènent le bateau d’Aubriot, _a_, XXI.

_Enfant_ trouvé seul dans une maison, _a_, 95.

_Enfeutreure_, expliqué, _b_, 53.

_Enfleurer_, _b_, 192, 194, etc.

_Engins_ à détruire les rats, _a_, LXXXIV; _b_, 64.

_Engraisser_ les oies, _b_, 88.
  --un cheval, _b_, 76, 77.

_Enhaster_ p. _embrocher_, _b_, 214.

_Ennemis_ réconciliés à fuir, _a_, 201.

_Enseigne_ (témoignage), _a_, 133; _b_, 40.

_Ensorcellement_, _a_, 170, 171.

_Enter_, quand, _b_, 43, 44.

_Entes_ curieuses, _b_, 50, 51. V. _Ante_.

_Entrecercle_, _b_, 125, 128.

_Entrecerelle_, _b_, 125, 128.

_Entremès_, _a_, XLII; _b_, 99, 101, 107, 108.
  --(Tête de sanglier en), _b_, 98.
  --(Chapitre des), 6, 210, 224.
  --_élevé_, _a_, XLII; _b_, 99.
  --grand, _b_, 97.

_Entretaille_ (Cheval qui s’), _b_, 74, 75.

_Entretiens de Colbert avec Bouin_, _a_, LXVIII; _b_, 83.

_Entreveschier_, _a_, 26.

_Envie_, _a_, 36; _b_, 10.

_Épagneuls_, V. _Chiens_.

_Éperons_ (Essayer le cheval aux), _b_, 76.

_Épervier_, V. _Esprevier_.

_Épine-vinette_, _b_, 204.

_Épitaphes_ de Paris, _a_, LXXIII.

_Éponge_, _b_, 64, 66.

_Epoux_ bénis dans leur lit, _a_, LXXXVI; _b_, 118.
  --peuvent pécher, _b_, 15.
  --solidaires l’un de l’autre, _a_, 184.

_Escargols_, _b_, 223. V. _Limasson_.

_Eschalat_, _b_, 47.

_Eschaloigne_, _b_, 196.

_Eschançonnerie_, _b_, 117.

_Escharder_ (écailler?), _b_, 187.

_Eschaudés_, _a_, XXXIX; _b_, 106.

_Esche_ pour allumer du feu, _b_, 263.
  --(appât), _b_, 222.

_Escheroys_, _b_, 102, 185, 225.
  --en pasté, 228.
  --expliqué, _ib._

_Eschervis_, _b_, 228.

_Eschier_ (briquet), _b_, 42.

_Eschinées_, _b_, 94, 127.
  --salées, 97.

_Escrevices_, _b_, 95, 98, etc.; 114, 121, 170, 194, 205.
  --(Coulis d’), 242.
  --de mer, 205.
  --en gravé, 151.
  --en tarte jacobine, 217
  --en tuille, 152.
  --non de Marne, 220.
  --(Prix des), 220.

_Escrocs_ logés à la Pierre au Lait, _a_, LXXXV.

_Escuelles (A plus d’), plus de loyer_, (proverbe), _b_, 114.
  --d’oiselets, 121.
  --d’oublies, 107, 110.
  --(Esturgon pour six), 200.
  --louées en grand nombre, 123.
  --(Quantité d’), _b_, 115: répondant au
   nombre des convives, 105, 108, 109, 113.
  --Signification de ce mot douteuse, _b_, 105.

_Escuiers_ peu riches, chassent à l’épervier,
   _a_, XLIX, L.

_Escuier_ de cuisine, _a_, XL, XLII; _b_, 115, 117.
  --de l’évêque de Paris, _b_, 106.
  --devant les mets, 117.
  --pour la salle et les vins, _a_, XLI; _b_, 117.

_Escurieux_, _b_, 261.

_Esmerillon_, _b_, 318.

_Esmeut_ de l’épervier, _b_, 288, 295, 297,
   298, 323.

_Espagne_ (Oiseaux en), _b_, 323.

_Espagnols_ (Chiens), _b_, 281, 282, 283.

_Espaingnos_, _b_, 281.

_Esparvain_, _b_, 73, 75.

_Espaules_ de bœuf, _b_, 131.
  --de mouton, _b_, 100, 177, 269.

_Espic_ (nard), _b_, 219.

_Espices_, (Abus des), _a_, XXXVI, XXXVIII.
  --à mettre ès boudins, _b_, 125, 126.
  --Comment broyées et coulées, _b_, 87.
  --Comment mises en potages et sausses, 124, 147, 164.
  --de chambre, _a_, XLIII, _b_, 112, 122.
  --de cuisine, _b_, 122.
  --Douze francs d’épices dans un repas, _b_, 113.
  --menues, 122.
  --(Potages d’), 242.
  --pour les potages, 107.
  --(Saulce vert d’), 231.
  --serrées avec soin, 117,
  V. _Hiver_ et _Mal de tête_.

_Espicier_, _b_, 56, 122.
  --Ce qu’il fournit, _b_, 111.

_Espimbèche_ de rougets, _b_, 175.
  --d’un bouli lardé, _b_, 100.

_Espinars_, _b_, 44, 49.
  --Comment cuits, 141.

_Espinoches_, _b_, 141.

_Espreveteur._ Comment il évite les obstacles, _b_, 308.
  --doit penser à son oiseau et à ses chiens avant tout, _b_, 283.
  --Il lui faut neuf chiens et trois chevaux, _b_, 280.
  --ne doit pas chasser seul, _a_, XLIX.
  --refuse les vieux éperviers, _b_, 316.
  --s’agenouille pour reprendre son oiseau, 304.
  --Ses gants, _b_, 293.
  --traître et larron à ses confrères, _b_, 285.

_Esprevier_ (Traité de l’). Bien fait, LI, V. _Chasse_.
  --Où placé dans les manuscrits, _a_, XLVII; _b_, 79.
  --Seul article de la troisième distinction traité par l’auteur, _a_, XLVII.

_Esprevier_, à sourcils blancs, _b_, 320.
  --Combien doit voler, _b_, 305, 310.
  --Comment repu, 322.
  --couve à la Saint-Georges, 284.
  --d’élite, 295.
  --devient sauvage dès qu’il s’est pu lui-même, 311.
  --Esclavon et Lombard, 310.
  --félon, saute au visage, _b_, 293.
  --foulé (lassé) se dégoûte, _b_, 281, 309.
  --pouilleux, 325.
  --pris à la glu, 317.
  --Proverbe sur lui, _b_, 292.
  --Quel est le plus fort, _b_, 285, 292, 294.
  --Quels oiseaux il peut prendre, 310.
  --Ses maladies, 319, 320.
  --Ses ongles, 294.
  --Son aire et charnier, 284.
  --Son esmeut, 295.
  --trop gras, 320.
  --vieux, à refuser, _b_, 316.

_Esprevier branchier ou ramage_, _b_, 314.
  --Comment le prendre, _ib._
  --Le dompter et le dresser, 315.
  --ne vaut pas le mué, 320.

_Esprevier en mue_, _b_, 311.
  --Chairs bonnes pour lui, 312, 313.
  --Sa mue ou cage, _b_, 313.
  --Soins qu’il exige, 313.

_Esprevier hagart._ V. _Esprevier mué de haye_.

_Esprevier mué_, n’entre point au buisson, _b_, 316.
  --plus fort que le niais, _b_, 314.
  --Quand il peut voler, _b_, 314.

_Esprevier mué de haye._ Ce que c’est, _b_, 316.
  --difficile à dresser, 316, 317.
  --se laisse emporter, 317.
  --Ses yeux et piés, 316, 317.
  --Son plumage, 317.
  --tient du sor, _ib._

_Esprevier mué en la ferme_ est le meilleur, _b_, 317.

_Esprevier niais._ Bien repu, _b_, 286.
  --bon pour les dames, 293.
  --Combien de vols il peut faire par jour, 305, 310.
  --Comment déniché et nourri, _b_, 285.
  --Comment le baigner, 298.
  --Comment le faire voler la première fois, 304.
  --Comment l’enoiseler, 300.
  --Comment vole les vieilles perdrix, 309.
  --couché au lit, 288.
  --craint la surprise et le bruit, 306.
  --craint l’humidité, 299.
  --d’élite, 294, 295.
  --difficile à réclamer d’un arbre, _b_, 304.
  --Effet de la chaleur sur lui, 305.
  --entre aux buissons, 316.
  --Le repos lui nuit, 308.
  --Le traiter avec douceur, 290.
  --Le vent l’emporte, _b_, 302.
  --mange un poussin en trois fois, 306.
  --ne vaut pas le mué, 320.
  --Obstacles qu’il craint, 302, 303.
  --perché sur les chiens, 296.
  --Petits oiseaux, mauvais gibier pour lui, 302, 303.
  --porté en public, 296.
  --pour la pie, 300.
  --Quand le paistre, 301.
  --Quand lui donner chair lavée, _b_, 297.
  --Quel est le bon, 292, 294.
  --qui porte au couvert, 305.
  --Raffermir ses plumes cassées, 302.
  --s’accoutume à l’homme et au cheval, 300.
  --Sa nourriture, 308, 310.
  --serre fort son maître, 304.
  --Ses _faims_ marquées sur ses plumes, 287.
  --Ses jambes, 294.
  --Son esmeut, 295, 297, 298.
  --Son plumage, 292,
  --tenu chaudement, 286.
  --touché avec un petit bâton, 291.
  --toujours avec du monde, 291.
  --trop maigre ou trop gras, 299.

_Esprevier sor_, _b_, 316.

_Esprit_ (Le Saint), Ses commandemens, _a_, 58.

_Espurge_, _b_, 64, 66, 264.

_Essais._ N’en pas faire à l’égard de son mari, _a_, 168.

_Esseules_, _b_, 297.

_Essorer._ Diverses acceptions de ce mot, _b_, 299, 306, 310, 317.

_Estain._ V. _Vaisselle_.

_Estamine_, _b_, 136.

ESTAMPES (Le comte d’), _a_, LIX.

_Estans marinaux_, _b_, 196.

_Estauver._ Ce que c’est, _b_, 171, 190, 191, 192, 193, 194, 197, 216.

_Esteuf_, _b_, 290.

ESTIENNE (Charles), _b_, 200.
  --(Henri), cité, _a_, XXXVIII, LXXVII, 79; _b_, 11.

_Estourncaux_, _b_, 270.

ESTOUTEVILLE (Jacques d’), _b_, 255.
  --(Jean d’), _ib._
  --(Robert d’), _ib._

_Estrade_ sur la table, _a_, XLII.

_Estrées_ (pâtisserie). V. _Estriers_.

_Estriers_, _b_, 99, 107, 110.

_Estueil_, _b_, 290.

_Esturgon_, _b_, 94, 96, 199.
  --contrefait de veel, _b_, 200.

_Esverder_, _b_, 44.

ESVREUX (Jehan d’), _a_, 94.

_Etaux_, _b_, 80, 82, 132.
  --(Combien d’), par boucher, _a_, XLIV;
  --des halles, _b_, 200.

_Evangile_, cité _passim_.

EVE, _a_, 78, 128.

_Exagération_ des bavards, _a_, 180.

_Exécuteurs_ de testamens, infidèles, _a_, 44.

_Expressions_ crues au XIVe siècle, _b_, 60.


F

FAIL (Noël du), _a_, LXXXV.

_Faims_ de l’épervier marquées sur ses plumes, _b_, 287.

_Faisan_, _b_, 99, 101.
  --Comment servi sous Louis XIV, _a_, XLII.
  --en entremets, _ib._
  --rôti, _b_, 181, 182.

_Faisandeaulx_ (Vol aux), _b_, 309.

_Faisander_ (pour mortifier), _b_, 89, 180, 181, etc.

_Familles_ de la boucherie, _b_, 80.

_Fanoil_ (Graine de), sur des poires, _b_, 250.
  --(Racines de) confites, _b_, 245.

_Farce_ achetée toute faite, _b_, 225.

_Farcin_, _b_, 78.

_Farine._ V. _Fleur_.

_Fatalisme_ (Contre le), _b_, 18.

_Faucheurs_, _b_, 54, 57.

_Faucon_ (Divers noms du), _b_, 324.
  --_gentil_, 318, 324, 325.
  --_harrotte_, 324.
  --lanier, V. _Lanier_.
  --(Maladies du), 325.
  --Manière de l’orpimenter, _ib._
  --(Mue du), 326.
  --_pèlerin_, 324, 325.
  --sauvage volant l’outarde, 310.
  --_tagarote_, 324.
  --_vilain_, _a_, LI; _b_, 323.

_Fauconnerie_ au XIVe siècle, _a_, XLVIII, L.
  --au XIXe siècle en Hollande et en Syrie, _a_, LI, LII.
  --(Sur la), _b_, 182, 319.

_Fauconnerie_ d’Arcussia, _a_, LXV.

_Fauconnier_ ne doit point manger d’oignons, _b_, 325.

_Faudis._ Mot non expliqué, _b_, 107.

_Faulx-Grenon_, _b_, 211.
  --ou potage parti, _b_, 216.

_Faulx-perdriel_, _b_, 307.

_Fautes_ des plumes de l’épervier, _b_, 287.

_Faye-Montjeau_, _a_, XXXIX.

FÉLIBIEN (D. M.), _a_, LXIX; _b_, 83, 84, 254.

_Femme_ abandonnée de son amant, _a_, 183.
  --adultère demande pardon à son mari, _a_, 182.
  --brûlée vive, _a_, 128.
  --d’un procureur général ne sait pas lire, _b_, 104.
  --faisant élever l’enfant adultérin de son mari, _a_, 185.
  --indulgente pour son mari, _a_, 237.
  --laissant noyer son mari, _a_, 126.
  --obéissant sans répliquer, _a_, 152, 154.
  --pondant un œuf, _a_, 180.
  --pressée, s’exprime grossièrement, _b_, 60.
  --voulant aimer, _a_, 158, 162.

_Femme de l’auteur_, chargée de surveiller et non de faire elle-même, _b_, 3.
  --chaste, _a_, 62.
  --consultoit son mari sur le choix de ses domestiques, _b_, 57.
  --de bonne et vertueuse famille, _a_, 3.
  --mariée à quinze ans, _a_, 1.
  --ne fréquentoit pas les grands seigneurs, _a_, 2.
  --orpheline, _a_, 4.
  --savoit s’attacher son mari, _a_, 240.
  --Ses bonnes dispositions, _a_, XXIII, 2.
  --Son âge, _a_, XXIII, 1.
  --tirée hors de sa parenté et de son pays, _a_, 4.

_Femmes_ arrêtées par le Prévôt de Paris, _b_, 116.
  --baisant la bouche de leurs parens, _a_, LXXVII.
  --bavardes, _a_, 178.
  --Beaucoup sont bonnes, _a_, 194.
  --chassoient à l’oiseau, _a_, XLVIII, XLIX.
  --Comment portent leurs armoiries, _a_, LVIII.
  --dissimulées, _a_, 157, 176.
  --doivent avoir horreur du sang, _a_, XXIV; _b_, 59.
  --doivent être discrètes, _a_, 177;
    parler chastement, _b_, 59;
    tout dire à leurs maris, _a_, 181,
    et tout savoir, _a_, 132.
  --effrontées, _a_, 14, 61.
  --maîtresses de l’hôtel après leurs maris, _b_, 59.
  --moins obéissantes que les moines, _a_, 146.
  --ne font qu’un avec leurs maris, _a_, 130.
  --Ne pas discuter avec elles, _b_, 42.
  --orgueilleuses, _a_, 141.
  --rioteuses équivalent à cheminées fumeuses, _a_, 169, 171.
  --sages, comment se conduisent envers leurs maris, _a_, 185, 186.

_Femmes célèbres de l’ancienne France._ Ouvrage de M. de Lincy, _b_, 62.

_Fenêtres_ dangereuses pour les jeunes chambrières, _b_, 71.
  --vitrées, _a_, LXXXII, 173.

_Fenouil_, _b_, 45, 245, 250. V. _Fanoil_.

FERTÉ-CHAUDERON (Barons de la), _b_, 296.

_Fer_ de la paelle (Frire au). Expliqué, _b_, 150, 224.

_Fericy_, _a_, 149.

_Ferme_ (cage), expliqué, _b_, 288.

FERREIRA (Diog. Fern.), _a_, LXVI.

_Fesses_ du cheval, _b_, 72, 75.

_Festin_ de l’abbé de Lagny, _b_, 103.

_Feu_ couvert le soir, _b_, 71.

_Feuilles_ d’aune prennent les puces, _a_, 171.

_Feurre_ dans les maisons, _a_, 171.
  --mouillé avec le poisson, _b_, 203.

_Fèves_, _b_, 45, 49.
  --coulées, _b_, 92, 138.
  --des champs, _a_,LXXXVI; _b_, 139.
  --des marais, _a_, LXXXVI; _b_, 43, 139.
  --frasées, _b_, 94, 97, 138.
  --nouvelles, 139.
  --nouvelles en potage, 158.
  --nouvelles frasées, 139.
  --(Rectification sur les), _a_, LXXXVI.
  --vieilles, comment cuites, _b_, 137;
    comment rendues savoureuses, _b_, 138.

_Fèvres_, _b_, 56.

_Figues_, _b_, 101.
  --de Provence rôties, _b_, 101.
  --grasses, 102.
  --grasses rôties, 106.

_Filet_ ou nomblet de bœuf, _b_, 131.
  --de porc, _b_, 266.

_Fille_ pauvre. Son ménage, _a_, 237.

FILLEUL (Jehan), _a_, 136.

_Filoper_, _b_, 204.

_Filopes_, _a_, 172.

_Fils_, maladie d’oiseau, _b_, 325.

_Firecy_, _a_, 149.

_Flamand_ (Dialecte), _a_, LVIII.

_Flambeaux_ (bougies). Leur prix, _b_, 122, 124.

FLAMENT (Jeh. le), _a_, XXVI.

_Flanchet_ de bœuf, _b_, 130, 131.
  --de mouton, 87.

_Flanciaux_ de cresme bien sucrés, _b_, 100.
  --sucrés, _b_, 92. V. _Flaonnés et Flaons_.

FLANDRE (Marie de), _a_, XXI.

_Flandres_ (Fêtes ou foires de), _b_, 76.
  --(Retour de) en 1383, _a_, 135.

_Flaonnés_ sucrés, _b_, 92, 107.

_Flaons_, _b_, 108.
  --ayant saveur de fromage, 217.
  --de cresme, 99.
  --en caresme, 216. V. _Flanciaux_ et _Flaonnés_.

_Flatteurs_ (Domestiques), dangereux, _b_, 59.

_Flays_ (poisson), _b_, 204.

_Flèches_ empoisonnées, _b_, 258.

_Flet_, _b_, 204.

_Fleur_ (de farine), _b_, 67, 202, etc.
  --de ris, 122.

_Fleur des antiquités de Paris_, _a_, LXVIII.
  --_de toute cuisine_, _a_, XXXV.

_Fleurs_ (Usage des), _b_, 52, 118, 253. V. _Chapelière_.

FLEURY (Sire Jehan de), _a_, XXVI; _b_, 119, 120.

_Flo_, expl., _b_, 202.

_Floqueaux_, _a_, 172.

_Foie_, _b_, 128, 129, 132, 145, 211, 216.

_Fol_ pense à sa fortune, _b_, 4.

_Follette_, _b_, 47.

FOLLEVILLE (Jehan de), _b_, 119.

FONTAINE (Jean de la), cité, _b_, 60.

FONTAINES (Maistre Jehan de), _a_, LXXXII, LXXXVI; _b_, 119.

FONTAINES-GUÉRIN (Hard. de), _a_, LXXV. V. _Trésor de Vénerie_.

_Formé_ (femelle), _b_, 318, 325.

_Formes_, _a_, 174; _b_, 61, 116.

_Fornication_, _a_, 51.

_Fort-Hu_, _b_, 157.

_Fortille_, _a_, LXXII.

_Fortune_ ou chevance. Y penser, _b_, 2.

_Fouace_, _a_, XXXIX.

_Fouaillier_, _b_, 259.

_Fougère_, _a_, 172.

_Fouldre_ (Vol au), _b_, 280.

_Foule_ (Mot d’une femme dans la), _b_, 60.

_Fouleurs_, _b_, 54.

_Fouques_ aux choux, _b_, 144.
  --en potage et salées, 264.
  --salées, 133.

_Four_ (Hotel du), à Yerre, _b_, 119.

_Fourcelle_, _b_, 320.

_Fourme_ sur couronelle, _b_, 74.

_Fourmé_ (femelle), _b_, 318, 325.

_Fourmes_, _a_, 174; _b_, 61, 116.

_Fourmiers_ (housses), _b_, 61.

_Fourmis._ Comment les détruire, _b_, 48.

_Fourniers_ (Proverbe sur les), _b_, 36.

_Fourques._ V. _Fouques_.

_Fourreurs_, _b_, 54.

_Fourrures_ à visiter, _b_, 65.--mouillées, 66.

_Fraise._ V. _Fraze_.

_Framboisiers_, _b_, 44.

_Franc-boyau_ du cerf, _b_, 156.

_Franche-mule_, _b_, 129, 132.

FRANCHIÈRES, cité, _b_, 323.

_François_, cuisent peu la carpe, _b_, 189.

_Frangé_ de safran, expl., _b_, 148, 268.

_Fraude_, _a_, 45.

_Fraze_ de chair, _b_, 100.
  --de chevreaux, _b_, 108.

FRÉDÉRIC II, _a_, LXIX; cité, _b_, 89, 289, 295, 321.

_Freschumée_, expl., _b_, 125, 206.

_Fressure_ de chevreau et de porc, _b_, 228.
  --Brouet de fressure de pourcel, 158. V. _Froissure_.

_Frioul_, _a_, 70.

_Frire_, en quoi diffère de seurfrire, _b_, 151.

_Fritures_, _b_, 94.
  --(Chapitre des), 210.

_Froide-sauge_, _b_, 215.
  --de moitiés de poucins, 108, 111. V. _Sauge_.

FROISSART, cité, _a_, XLVI, LXXXI, 94, 148.

_Froissure._ Ce que c’est, _b_, 128.
  --de chevreau, 228.
  --de mouton, _b_, 128.
  --de porc, comment cuite, _b_, 126, 158, 228.
  --Diverses significations de ce mot, _b_, 129.
  --d’un bœuf, _b_, 129, 132.

_Fromage_ dans les gauffres, _b_, 121, 262.
  --de gain, 213.
  --de presse, 218.
  --mol, moyen, 218.
  --pour _Issue_, 108.
  --pour tartelettes, 110.
  --Quel est le bon, 146.

_Froment_ (Grains de) donnés à l’épervier, _b_, 298.
  --mondé, 111, 122, 210, 271.
  --Son prix, _a_, XXXI; _b_, 109, 111, 238.

_Fromentée_, _b_, 93, 94, etc., 210, 271.
  --au marsouin, _b_, 103.
  --au pourpois, _ib._
  --(Lait pour la), _b_, 113.
  --(Trois cents œufs pour la), _b_, 121. V. _Venoison_.

_Fruit_, _b_, 99, 101.

_Fuites_, _b_, 188.

_Fusée_ du cheval, _b_, 73.

_Fuselé_ (Cheval), _b_, 73.


G

_Gage_ plié, _b_, 120.

_Galanga_, _b_, 112. V. _Garingal_.

_Galentine_, _b_, 99, 100.
  --de poisson froid, 174.
  --pour carpe, 233.
  --pour raye, 202.

_Gallettes_ sucrées, _b_, 110.

_Galles_ pour encre, _b_, 265.

_Galoise_, expl., _b_, 60.

_Galop_ du cheval, _b_, 75.

GAND-VILAIN (Charyte de), _a_, LVIII.

_Gant_ de l’espreveteur, _b_, 294.

_Garde-mangers_, _b_, 114.

_Gardons_, _b_, 194.

_Garingal_, _b_, 112.
  --Fait mal à la tête, 236.
  --Quel est le bon, 230.

_Garnache_, _b_, 91, 102.
  --Quelle quantité il en falloit, _b_, 106.

_Garnement_, expl., _b_, 67.

_Garnison_, expl., _a_, 237; _b_, 64, 67.

_Garroittes_ confites, _b_, 244.
  --Leur prix, _b_, 245.

_Garrot_, _b_, 74.

_Gascogne_, _b_, 177.
  --(Vin de), _b_, 38.

GASTON-PHŒBUS, comte de Foix, _a_, LXX; _b_, 46.

_Gauchières_, _b_, 307.

_Gauffres._ Comment faites, _b_, 261.
  --couléisses, 262.
  --fourrées, 109, 121.

_Gauffriers_, _b_, 262.

GAUTIER, marquis de Saluces, _a_, 100.

_Gaulois_, empoisonnoient leurs flèches, _b_, 258.

_Gavion_ du cheval, _b_, 73.

_Gaymeau_, _b_, 192.

_Geais_, _b_, 311.

_Gelée_, _b_, 94, etc.
  --bleue, 220.
  Ce qu’on sème dessus, 219.
  --Comment la faire, 218.
  --de chapons, 94.
  --de char, 218, 220.
  --d’écrevices, etc., 108.
  --de poisson, 93, 95, 220.
  --(potage), 100.
  --(Poucins, cochon, etc., pour la), 110, 121.
  --(Veau pour la), 109,
  --(Violette sur la), 221.

_Géline_ couve des paons, _b_, 256.
  --de février, _b_, 125.
  --gratte toujours, 257.
  --mangée en trois jours par un autour, 322.
  --rôtie, 180.
  --V. _Poules_.

_Geneste_, _b_, 168.
  --d’aloés, 96.

_Gente_ rôtie, _b_, 181.

_Georgé_ (Brouet), _b_, 97, 98, 163.

GÉRARD, abbé de Saint-Germain des Prés, _b_, 84.

GÉRAUD (M.), cité, _a_, XLVI, XLVII, LXXVI, LXXXV; _b_, 113.

_Gerfaut_, _b_, 318.

_Gésiers_, _b_, 145.
  --mal dit pour _gigier_, 211.
  --V. _Jugiers_.

_Gets_, expliqué, _b_, 290.

GHISTELLES (Jean de), _a_, LVIII.
  --(Marguerite de), propriétaire de mon manuscrit du
  _Ménagier_, _a_, LVIII et suivantes; _b_, 272.

GIAC (Pierre de), _b_, 254.

_Giesles_, _b_, 315.

_Gigier_, mieux dit que _gésier_, _b_, 211.

_Gingembre_ blanc, _b_, 218.
  --coulombin, 111.
  --dans les gauffres, 122.
  --de mesche, 111.
  --En quoi le _coulombin_ diffère du _g. de mesche_, 230.
  --verd, 230.

_Giroffle_, _b_, 111. (Baston de), 246.

_Giroflée_, _b_, 45.

_Gisors_ (Vicomte de), _a_, 152.

_Gîte_ de bœuf, _b_, 86.

_Glandes_ de mouton bonnes à l’épervier, _b_, 313.

_Gloutonnie_, _a_, 47; _b_, 13.

_Glu_, _a_, 171, 173.
  --de froment, _b_, 251.
  --Manière de la faire, 250.
  --pour eau, 251.

_Gobelets_ couverts, dorés, _a_, XL; _b_, 118.

GODEFROY (Denis), _a_, LXX, 237.

_Gois_, _b_, 311.

_Gomme_ de cerisier, _b_, 219.

_Goujons_, _b_, 233.

_Gourdes_, _b_, 273.

_Gourme_ du cheval, _b_, 73.

_Gournaut_, _b_, 196, 197.

GOUSSENCOURT, _a_, LVIII.

_Goutière_ (mangeoire), _b_, 89.

_Gouttron_, expl., _b_, 189.

_Grâces_ (Dire les), _b_, 107.

_Grain_, expl., _b_, 150, 154.

_Graine_, _b_, 151. V. _Gravé_.

_Graine de paradis_, _b_, 67, 111.

_Grains_, à remuer, _b_, 64.

_Graisse._ Son prix, _b_, 82.

_Gramose_, _b_, 145.

_Granche_ (estomac), _b_, 213.

_Grand cuisinier_, cité, _a_, XXXIV, XLII; _b_, 171, 184, 211.
  --(Plats tirés du), 145 (2), 148 (2), 149 (4), 150 (2), 151,
   154, 155, 163 (4), 164 (2), 166, 167 (2), 171, 172 (2), 174,
   177, 179 (5), 180, 181, 183 (3), 185, 187 (6), 188, 189 (2),
   190 (2), 191 (3), 192 (2), 193 (2),    194 (3), 195, 196 (3),
   197 (3), 198 (3), 199 (3), 200, 201, 202 (3), 203 (4), 204,
   208, 211, 212, 223 (2), 226, 234 (2), 241.

_Grande-boucherie_ (Étal au-dessous de la), _b_, 132. V. _Boucherie_.

GRANTPRÉ (Le comte de), _a_, LXXXI.

_Graspois_, _b_, 102, 200. V. _Craspois_.

GRATIEN, _a_, 98.

_Gratuise_ (râpe?), _b_, 262.

_Gratuisié_, expl., _b_, 149, 207.

_Gravé_, _b_, 151, 173.
  --d’aloés, couleur de fleur de peschier, _b_, 95, 98, 276.
  --de canets, 121.
  --de lamproies, 97.
  --d’escrevices, 151.
  --d’oiselets, 121, 150.
  --sur friture, 101.

GRAVILLE (L’amiral de), _b_, 255.
  --(Anne de), _b_, 255.

_Grédelié_, expl., _b_, 206.

_Greffe?_ _b_, 68.

_Greffes_ curieuses, _b_, 50, 51. V. _Ente_ et _Enter_.

GRÉGOIRE (Saint), cité, _a_, 63.

_Grenache._ V. _Garnache_.

_Grenade._
  --(Pommes de), _b_, 110, 122.
  --sur chapons, 108.
  --sur la gelée, 221.

_Grenade_ (Faucon de), _b_, 324.

_Greniers_ à visiter, _b_, 64.

_Grenouilles._ V. _Renoulles_.

GRÉSY (M. Eugène), cité, _a_, LIX, LXXX.

_Grève_ (Place de), _b_, 113, 123.

_Griffon_, _b_, 321.

GRILLE (M.), _a_, 151.

GRIMAULT (Grimoald), _a_, 69, 70.

GRIMOALD, _a_, 69, 70.

_Grimondin_, _b_, 197.

GRINGORE (Pierre), a copié J. Bruyant, _b_, 4.

GRISÉLIDIS (Hist. de), _a_, 99, 103 et suiv., 141.

_Gros-bastons_ (oublies), _b_, 109.
  --(Recette des), 121, 262.

_Gros-bout_ de poitrine, _b_, 86.

_Groseillers_, _b_, 49.

_Groseilles_ sur des plats, _b_, 161, 170.

GROSIA (Martin), _b_, 146.

_Gruau._ V. _Gruyau_.

_Grue_ rostie, _b_, 181.
  --(Vol de la), _b_, 324.

_Grumel_ de bœuf, _b_, 86, 87.

_Gruyau_, _b_, 242.
  --d’avoine, expl., _b_, 212.
  --d’orge, 241.

_Guède_ (Pasteaux ou Tourteaux de), _b_, 214, 251.

_Guedes_, _b_, 315.

GUESCLIN (Bertrand du), _a_, 94; _b_, 324.

_Guides_, _b_, 315.

_Guilles_, expl., _b_, 315.

GUISE (Tapisserie à la maison de), _a_, LXXIII.


H

_Hacher_ à deux couteaux, _b_, 228.

_Hadou_, _b_, 198.

HAINAUT (Guillaume comte de), _b_, 254.

_Haine_, _a_, 38.

_Halebrans_, expliqué, _b_, 236.

_Halles_ (Les), _b_, 122.
  --(Étaux des), 200.
  --(Pain vendu aux), 109, 110.

_Hampe_ du cerf, _b_, 131, 156, 157.

_Hanaps_, _b_, 106, 117, 118.

_Hanons_ (coquillage), _b_, 204.

_Harang._ V. _Harenc_.

_Hardouil_ de chapons, _b_, 162.

_Harenc_, _b_, 200.
  --blanc, 101.
  --frais, 95, 98. V. _Aulx moussus_.
  --nouvellet, 271.
  --quaque, 134.
  --sor, 94, 97, 134.

HARGICOURT, _a_, LVIII.

_Hargneux_ (Proverbe sur les), _b_, 56.

_Haricot._ V. _Hericot_.

_Haricots_ dits fèves, _a_, LXXXVI.

_Harpayes_, _b_, 307.

_Harpe_ du cheval, _b_, 72.

_Hastelets_, _b_, 161.
  --de bœuf, 94, 95.
  --de chaudun de porc, 228.

_Haste-menue_, (ou rate), _b_, 128, 268.
  --de porc, 164.

_Hasterel_, _b_, 89.

_Hausser_, expl., _b_, 322.

HAUTECOURT (Maître Jehan de), _b_, 118, 250, 382.

_Haye-du-Puis_ (La), _a_, XXXV.

_Hazé_, pour brûlé, _b_, 216.

_Heilly_, _a_, LXXX.

HELYE, (Maistre), _b_, 108.

HEMERY (Jeanne), _a_, XXIX.

_Herbe verte_, _b_, 106, 124.
  --dans les maisons, _a_, 184.
  --Où achetée, _b_, 113, 114.

_Herbolata_, _b_, 207.

_Heriçons_, _b_, 261.
  --factices, _b_, 269.

_Hericot_ de mouton, _b_, 148.

_Héron_, _b_, 99.
  --rôti, 181.
  --(Vol du), 324.

_Hesdin_, _b_, 253.

HESTOMESNIL, (Jehan de), _a_, XIX.

_Hétoudeaux_, _b_, 180.
  --(Moust pour), 234.
  --(Prix des), 120.

_Histoire de Bourgogne_, citée, _a_, LIX.

_Histoire généalogique des grands officiers, etc._, _a_, XL, LVIII, LXV, 152.

_Histoire sur Bible_, citée, _a_, 128, 129.

_Historieur_, _a_, 128, 129.

_Hiver_ (Épices plus usitées en), _b_, 236.
  --(Fleurs gardées en), 44.

_Hobe_, _b_, 319.

_Hobereau_, _b_, 318, 319.

_Hochepot_ de volaille, _b_, 163.

HOLLANDE (G. duc de), _b_, 254.

_Hommage_ attaqué faute d’un baiser, _a_, LXXVIII.

_Hommes_ à fuir, _a_, 77.

HONCOURT (M. Guy de), _b_, 381.

_Honneur_ d’une femme à garder, _a_, 184.

_Horloges_, _b_, 257.

_Hôtel_ mené par la femme, _b_, 59. V. _Maison_.

_Hôtel_ d’Aubriot, _a_, XXI; _b_, 255, 380.
  --de Galeran de Montigny, 255.
  --des Tournelles, 254.
  --du _Porc-épic_, 254.
  --du Prévôt de Paris, 255.
  --Saint-Paul, 253.

_Hotellerie_ (Potage à faire dans une), _b_, 146.

_Hotels_ loués par les concierges, _b_, 116.

HOTIN, cuisinier de M. de Roubais, _a_, LIX, LX; _b_, 275.

_Hotteurs_, _b_, 54.

_Houpelande_, _a_, 14.

_Hourdouil_ de chapons, _b_, 162.

_Houssebarre_ de chair, _b_, 170.
  --de poisson, 171.

_Houssié_, expliqué, _b_, 164, V. _Brouet_.

_Houx_, _b_, 250.

_Hu_, expl., _b_, 157.

HUBER, cité, _a_, LI; _b_, 280, 302, 307, 309, 319.

_Huitres._ V. _Oïstres_, _oïttres_, _cive_, etc.

_Hule_ d’un couteau, _b_, 274.

_Humilité_, _a_, 53.

HUZARD (M.), _a_, LII, LXVI, LXVII, LXXIV.

_Hyères_ (L’abbesse d’), _b_, 118.

_Hypocras._ V. _Ypocras_.

_Hypocrisie_, _a_, 29, 34.


I

_Ierre_, _b_, 118.

_Ile Nostre-Dame_, ou _Saint-Louis_, à Paris, _a_, 93.

_Imprimeurs_ anciens négligeoient les livres non sérieux, _a_, XXXIV.

_Improviste_ (Souper à l’), _b_, 170. V. _Hotellerie_.

_Inconvenance_ dans les noms de certains mets, _b_, 60.

_Inobédience_, _a_, 29, 32.

_Inventaire_ de R. Picque, _a_, LXX; _b_, 115.

_Ire_, _a_, 38; _b_, 10.

ISAAC, _a_, 82.

ISABEAU DE BAVIÈRE aimoit les animaux, _b_, 62.
  --Sa dépense de bouche, 85.
  --Ses enfans, _a_, XXII; _b_, 85.

ISEBARRE (Augustin), _b_, 62.

_Issue_ de table, _a_, XLIII; _b_, 92, 94, 95, 99, 100, 101, 103, 108.

_Issues_ de bœuf et leur prix, _b_, 132.
  --de mouton et leur prix, 128.
  --de porc, 128.
  --de sanglier, 157.
  --de veau et leur prix, 128.

_Ivresse_, _a_, 49.
  --Ses inconvéniens, _b_, 14, 70.


J

_Jabets_, expl., _b_, 224.

JACOB, _a_, 85.

_Jacobins_ de Londres, _a_, LXXXI.

_Jactance_, _a_, 29, 33.

JAILLOT, _a_, LXXXV.

_Jalet_, _b_, 224.

_Jambes_ de l’épervier, _b_, 294.
  --du cheval, 74.
  --enflées, 77.

_Jambons_, _b_, 127, 237.
  --Comment dessalés, 127.
  --frais, 147.
  --salés de trois jours, 139.

_Jance_, _b_, 234, 236.
  --à aulx, 234.
  --de lait de vache, 234.

_Jardinage_, _b_, 43.

_Jargeau_ du cerf, _b_, 156.

_Jarrets_ courts, _b_, 216.
  --du cheval, 74.

JASSAUD (Hôtel de), _a_, XXI.
  --(MM, de), _ib._

_Jattes_, _b_, 115, 123.

_Jaunet_, _b_, 149.
  --V. _Loche_, _Mouton_, _potage_, _sausse_, _tripes_, _trumel_.

_Jaunisse_ de l’épervier, _b_, 319.

_Javart_, _b_, 75, 77.

_Javel_ (Bois de), _a_, 68.

JEAN (Le roi), _a_, LXXXI.

JEAN DE BRIE, _a_, XIX.

_Jean le Blanc_ (oiseau), _b_, 307.

JEAN LE DESPENSIER (Maistre), _b_, 54.

JEAN SANS PEUR, _b_, 116.

JEANNE, comtesse de Boulogne et d’Auvergne, _b_, 46.

JEANNE D’ÉVREUX, _b_, 115.

JEHANNICOLA, _a_, 103.

JÉRÔME (Saint), cité, _a_, 39, 62.

_Jets_, expl., _b_, 290.

_Jeux_, _a_, XLVII, LXXVII, 7, 71.
  --illicites, _b_, 59.

_Jeu des échecs moralisé_, _a_, 186.

_Jombarde_, _b_, 44.

JOSEPHE (L’historien), _a_, 78.

_Joubarbe_, _b_, 44.

_Joue_ de bœuf, _b_, 85, 86, 88.

JOUVENEL (Jehan), _a_, XXVI. V. JUVENAL DES URSINS.

_Joyaux_ d’une riche bouchère, _b_, 82.

_Jugiers_, _b_, 121. V. _Gésiers_.

_Juifs_ en France, _a_, XXII.
  --Comment punissent l’adultère, 67.
  --Quand chassés, 68.

_Juive_ assommée, _a_, 68.

_Jurer_, _a_, 38, 43, 46.

_Jurés_ de la boucherie, _b_, 81.

_Juridiction_ de la grande boucherie, _b_, 81.

_Justice_, _a_, 57.

JUVENAL DES URSINS (Jean), _a_, LXX, 173. V. JOUVENEL.


K

_Karvy_, _b_, 245.


L

LABAN, _a_, 85.

LABAT (Gilles). Ce qu’il étoit, _a_, LXXVIII, 137; _b_, 104.

LABORDE (Le comte de), cité, _b_, 106.

_Labour (Chasteau de)_, _b_, 4, 36.

_Laboureur_ a la coanne plus dure qu’un prince, 293.

_Laboureurs_, _b_, 56, 57.

LACABANE (M. Léon), _a_, LXXV.

LADEHORS (Oudin de la), _b_, 80.
  --Famille de bouchers, _ib._ et 83.

_Lagny_ (Abbé de), _a_, LXXXIV; _b_, 103, 104, 105.

_Lait._ Comment l’empécher de tourner, _b_, 176.
  --de vache, lié, 175.
  --(Jance de), 234.
  --lardé, 92, 93, 95, etc., 224.
  --non écrémé ni mélangé, 113.
  --(Potage de), _b_, 176, 177.
  --souvent mélangé, 159.

_Lait_ d’amandes, _b_, 241.

_Laitances_ de carpes, _b_, 217.

_Laitière_ (Jehanneton la), _b_, 62.

_Laitues_, _b_, 46, 96.

LALLEMANT (Nic. et Rich.), _a_, LXVI.

LAMARRE, cité, _b_, 80, 84.

_Lamproie_, _b_, 192.
  --à froide sauge, 93.
  --à la boue, 192.
  --à la sauce chaude, _a_, 94.
  --à l’estouffée, 193.
  --bouillie, 193.
  --(Sauce de), 133.

_Lamproyons_, _b_, 192.

_Lancerel_, _b_, 88.

_Lancerons_, _b_, 88.

_Landal_ (Château de), _a_, 149.

_Laneret_, _b_, 318, 319, 323, 325.

_Langoustes_, _b_, 196, 205, 225.

_Langue_ à retenir, _a_, 177, 178.

_Langue_ de bœuf, _b_, 177.
  --salée et fumée, 133, 177.

_Languedoc_, _b_, 195, 196.

_Lanier_, _b_, 318, 319, 325.
  --dit _faucon vilain_, XLI, 323.
  --perché bas, 322.
  --Quels oiseaux il prend, 324.
  --vole bas, 322, 323.

LANNOY (Agnès de), _a_, LVIII.

_Lapereaux_, _b_, 110, 121, 236.
  --en rosé, 154.
  --rôtis, 275.
  --(Vol aux), 309.

_Lapins._ V. _Connins_.

_Larcin_, _a_, 45.

_Lard_ acheté au boucher, _b_, 121.
  --aux choux, 144.
  --de caresme, 200.
  --jaune, déplaît, 126.
  --Son prix, 85.
  --sur les pois, 135.
  --(Témoins de), 270.

_Larder_, expliqué, _b_, 88.
  --de percil, 177.

_Lardés_ du cerf, _b_, 156, 157.

LARIVIÈRE (Armes de), _a_, LVIII. V. _Rivière_.

_Larras_, _b_, 102.

LASERNA-SANTANDER, _a_, LXVI.

_Lauderburg_, _a_, LVIII.

_Laurier_ (Feuilles de), _b_, 101, 112.

LAVAL (Généalogie de), _a_, LXVIII.
  --LOUÉ (Madame de), 240.

_Lavande_, _b_, 44.

_Lavandière._ Son emploi le jour des noces, _b_, 118.

_Laver_ les mains au sortir de table, _a_, XL; _b_, 107.

LAZARUS, _b_, 146.

LEBARBIER, (Colin), _b_, 119, 120.

LEBER (M.), _a_, LXVIII, 174; _b_, 115.

LEBEUF (Jean), _a_, LXXI, LXXVI, 133; _b_, 296.

LEBLOND (M.), _a_, LXIX.

LECZINSKA (Marie), _a_, LVIII.

LEFÈVRE (Guill.), dit VERJUS, _a_, XL; _b_, 81.

LE FLAMENT (Jehan), _a_, XXVI.

_Légende dorée_, _a_, 62.

LEGOIS, boucher, émeutier, _b_, 84.

LEGRAND D’AUSSY, cité, _a_, XXXVIII, XXXIX, XLII, LXXI, LXXV;
   _b_, 38, 110, 200, 205.

LEIBNITZ, _a_, LXV.

LE MAZIER (Henri), _a_, 140.

_Lendemain_ pour _l’endemain_, _b_, 196, 221.

_Lengoustes_, _b_, 196, 205, 225.

_Lentisque_, _a_, 67.

_Leschefrayes_, _b_, 102, 103.

_Leschefrites_, _b_, 93, 97, etc.
  --écrit _leschefrayes_, _b_, 102 et 103.
  --sucrées, _b_, 94, 98, etc.

_Leschefroies_, _b_, 103.

LESCLAT (Pierre de), _a_, LXXXIII.

_Lettres_ des reines, _a_, 75.
  --que nul ne verra, _b_, 250.
  --qu’on doit ou qu’on ne doit pas lire, _a_, 76.

_Lettues_, _b_, 46, 96.

_Leurre_, décrit, _b_, 318.
  --(Oiseaux de), _ib._

_Leurrer_, expl., _b_, 284, 318.

_Levain_ de pain, _b_, 239.

_Lève-cul_ (Vol à), _b_, 280.

_Lever_ d’une femme, _a_, 9.

_Levrats_ (Vol aux), _b_, 309.

_Levreaux._ V. _Levrats_.

_Levrière_ tuée, _a_, 161.

_Liaisons_, _b_, 87.

_Libre arbitre_, _b_, 19.

LIE (Lia), _a_, 86.

_Lier_, expl., _b_, 281.

_Lieures._ V. _Liaisons_.

_Lieurs_ de fardeaux, _b_, 53.

_Lièvre_ (Age d’un), _b_, 90, 169.
  --aux choux, 144.
  --(Civé de), 91, 169.
  --Comment couru par les épagneuls, 281.
  --(Conditions du), 72.
  --en boussac, 153.
  --en civé, 91, 169.
  --conservé, 133.
  --pourbouli, 271.
  --Quand plus tendre, 153.
  --rôti, 268.
  --(Vol au), 321, 324.
  V. _Levrats_.

_Lille_, _a_, LXXIX.

_Limaçons_, _b_, 223.
  --mangés par les riches et les Lombards, _ib._
  V. _Limats_.

_Limandes_, _b_, 88, 160, 202.

_Limats_ au chaudumé, _a_, XXXIX.

_Limoges_, _a_, 95.

_Lin_ (Toile de). Son prix, _b_, 221.

LINCY (M. de), _a_, XXIX; _b_, 36, 62, 83, 251, 255.

_Linge._ Comment marqué, _b_, 263.
  --de table, 115. V. _Touailles_ et _Serviettes_.
  --Liqueur pour le marquer, 263.
  --loué à quel prix, 123.
  --pour _mince_, 286.
  --propre donné au mari, _a_, 168.

_Linote_ en cage, _b_, 256.
  --vendue très-cher, _b_, 62.

LIPPOMANO (Jérôme), _b_, 116.

_Liqueur_ pour _seigner_ (marquer), le linge, _b_, 263.

_Lis._ V. _Lys_.

LISTER, cité, _a_, XXXVI, XXXVII.

_Lit_ nuptial (Bénédiction du), _a_, LXXXVI; _b_, 118. V. _Lits_.

_Litière_, à quoi sert aux oies, _b_, 89.

_Lits_ au XIVe siècle, _a_, 160, 169, 172, 238, 239.

_Livre d’amours_, _a_, LXXXIII.

_Livre_ de dépense, _b_, 58.

_Livre des déduits_, _a_, LXIX.

_Livre fort excellent de cuisine_, _a_, XXXIII.

_Livres_ anciens non sérieux, mal imprimés, _a_, XXXIV.
  --de l’auteur, _a_, XXVI, 62. V. _Ouvrages_.

LOBINEAU (Dom G. A.), _a_, LXIX.

_Loche_, _b_, 175, 191, 382.
  --au jaunel, 100.
  --au waymel, 102.
  --en eau, 93, etc.
  --et anguilles tronçonnées dessus, 101.
  --frite, 102.
  --Son prix, 220.
  --vendue à la mesure, 114, 220.

_Loirre_ (leurre), _b_, 318.

_Lombarde_ (Mode), en fait de pasté, _b_, 185.

_Lombardie_ (Chasse en), _b_, 310.

_Lombards_, mangeurs de limaçons, _b_, 223.
  --(Potage de), 171.

_Londres_, _a_, LXXXI.

_Longe_ (chair), _b_, 86, 87, 130, 132.

_Longes_, _b_, 295, 297.

LONGUEIL (J. de), _b_, 119, 120.

LONGUEVILLE (F. d’Orléans, duc de), _a_, LIX.

_Losenges_, _b_, 96, 103.
  --d’œufs, 209.

LOTH et sa femme, _a_, 142.

LOTRIAN (Alain), _a_, XXXV.

LOTTIN DE CHARNY (Marie Aimée), _a_, XXI.

LOTTIN (Erreur de), _a_, XXXIV.

_Louens_, _a_, 186.

LOUIS le Jeune, roi de France, _a_, 133.
  --Louis XIII, _b_, 307.
  --Louis XIV, 82.
  --abordé facilement, _a_, LXXII.
  --Petits pois à lui présentés, _ib._

_Loups._ Comment les détruire, _b_, 63.

_Lourgable_, _a_, 24.

_Loyer_ au XIVe siècle, _a_, LXXXIII.

LUCAS (Cl.), _a_, LXXIII.

_Luceau_ (brochet), _b_, 88.

LUCIFER (Désobéissance de), _a_, 129, 177.

LUCRÈCE (Hist. de), _a_, 70.

_Lus_ ou _Lux_, _b_, 88, 91, 96, 99 etc., 187.
  --faudis, 107,
  --(Œufs de), 229.

LUXEMBOURG (Jacques de), _a_, LIX.

_Luxure_, _a_, 50, _b_, 14.
  --de cœur, _a_, 51.

LUYNES (Le connétable de), _a_, LXXIV.

_Lys_, _b_, 49.
  --(Abbaye du), _a_, 148.


M

MACAIRE, _a_, 92.

MACÉ (N.), _a_, XXI.

_Machault_, _a_, 149.

MACHAUT (Perrenelle de), _b_, 120.

_Machès_, _b_, 186.

_Machination_, _a_, 37.

_Macis_ ou fleur de muscade, _a_, 67; _b_, 112.
  --fait mal à la tête, 237.

_Mâcon_, _a_, XXI.

MACROBE, cité, _a_, 179.

_Madre_ (Coupes de), _b_, 82

_Magasin pittoresque_, cité, _a_, LXXVII.

MAIGNAC (Aymeri de), _b_, 104.

_Mailles_ des plumes de l’oiseau, _b_, 293, 294, 323.
  --de son estomac, 298.

_Maillotins_, _a_, XX, LXXXIII, 135.

_Mains_ (Eau à laver les), _b_, 247.

_Maire_ de la boucherie, _b_, 81.

_Maison_ bien tenue, _b_, 61.
  --découverte chasse l’homme, _a_, 169, 171.
  --fermée au soir, _b_, 70.
  V. _Hotel_.

_Maison réglée_, citée, _a_, XLIII, LXXI.

_Maison rustique_, citée, _b_, 46, 180, 207, 214.

MAISONS (N. de Longueil), _a_, LXXI. V. _Longueil_.

_Maistre d’hostel_ de la Varenne, cité, _a_, XLII.

_Maître_ (Aimer son), _b_, 23.
  --doit donner l’exemple, 60.
  --(L’épervier s’habitue à son), _b_, 301.
  --L’être de soi-même, _a_, 178.

_Maître d’hôtel_, _a_, XL, XLII; _b_, 67.
  --Ses attributions, _b_, 117, 118.

_Maître_ de la grande boucherie, _b_, 81.

_Mal_ de tête causé par les épices, _b_, 236.

_Mal_ se guérit par le bien, _a_, 207.

_Malandre_, _b_, 74, 77.

_Malars_, _b_, 89.
  --dde rivière à la dodine, 92

_Malen_ (mal en?) _a_, LXXXIV, _b_, 73. dodine, 92.
  --rôtis, 181.
  V. _Canards_.

_Mâles_ des oiseaux de proie; leurs noms, _b_, 318.

MALIGNY (Jeanne de), dame d’Andresel, _a_, 150.

_Mallars_, _b_, 89, 92, 181.

_Malle_, _a_, 172.

_Manche_ (Archives de la), _a_, XXXV.

_Mandagores_, _a_, 89.

_Manger_ combien de fois par jour, _a_, 49.
  --sans mâcher, _a_, 49.

MANGEUR (Pierre le), cité, _a_, 77.

_Manteaux_ de deux draps, _a_, 161.
  --d’une bouchère, _b_, 82.

_Mantes_ (Fortifications de), _b_, 191.

_Manus-Christi_, _b_, 122.

_Manuscrits_ du _Ménagier_, _a_, LII et suivantes.

_Maquereau._ V. _Maquerel_.

_Maquerel_ en potage, _b_, 146.
  --frais, 196.
  --rôti, 103.

_Maquerelles_, _a_, 133; _b_, 116.

_Marchander_ toujours, _b_, 54. V. _Barguaigné_, 76.

_Marchands_, _a_, 44, 46.
  --d’oiseaux, _b_, 62, 323.

MARCHANT (Guiot), _a_, LXVII.

_Marchepiés_, _b_, 61.

_Marchiau_, _a_, 149.

MARC-PAUL, _b_, 321.

MARÉCHAL, cité, _a_, 16.

_Maréchal_ ferrant, _b_, 56.
  --Son salaire, 79.

_Marée_ mauvaise par temps pluyeux, _b_, 194.

MARES (Herlin des), _b_, 119.

MARÈS (Jean des). V. DESMARÈS.

_Mari_ clément, _a_, 182, 183.
  --dérangé, comment le ramener, 185.
  --en voyage, pense au retour, 168.
  --sauvé de l’eau, 128.
  --(Second) difficile à trouver, 168.
  --Soins à lui donner, _ib._
  --souverain chez lui, 99.
  V. _Maris_.

_Mariage_ (But du), _b_, 15.
  --en deuil, _b_, 123.

MARIE d’Anjou, reine de France. Ses fenêtres, _a_, 174.

_Marié_ servoit à table, _a_, XLI; _b_, 117.

_Mariés_ divisés font un pacte, _a_, 126.

_Maris_ aiment moins leurs femmes quand elles désobéissent, _a_, 142.
  --désirent la présence de leurs femmes, 175.
  --doivent tout leur dire, 132.
  --jeunes, prompts à changer, 143.
  --Leur heureuse vie, 139.
  --luxurieux pèchent, 52.

_Marjolaine_, _b_, 43, 44, 45.

MARNEF (Enguilb. de), _a_, LXVI.

_Marouette_, _b_, 311.

_Marques_ des plumes de l’épervier, _b_, 287. V. _Mercqs_.

_Marquets_ chevelus, _b_, 44.

_Marsouin_, _b_, 198.
  --à sa sauce, 107.
  --poudré à l’eau, 101.

MARTINUS, _b_, 146.

_Massepains_, _b_, 122.

_Mastic_, ou encens de Perse, _a_, 67.

_Matelas_ (flèche), _b_, 267.

MATHIEU (Saint), cité, _a_, 63.

_Matin._ Ce que c’est, _a_, 9.

_Mâtins_ tuent les éperviers, _b_, 301.

_Matons_ de lait, expl., _b_, 212.

_Mauvis_ (Vol du), _b_, 311.

_May_ (arbre coupé), _a_, 184; _b_, 106, 113, 114.

MAZIER (Henri le), _a_, LXXIX.

_Médecins_, _a_, 189.

_Médisance_ permise aux chambrières, dans quel cas, _b_, 59.

_Melle_, _a_, 94.

MELLIBÉE (Histoire de), _a_, 186; _b_, 60.

_Mello_, _b_, 249.

_Mellus_, (_merlus_?) _b_, 107.

_Melons_, _b_, 273.

MELUN (Jehan de), _a_, LXXX.

_Melun_, _a_, LXXXVII, 68.
  --(Siége de), 148.
  --(Vitrail à), LIX.

_Membres_ s’aiment entre eux, _a_, 55.
  --secrets. Ne pas les nommer, _b_, 59.

_Mémoires pour servir à l’histoire de France et de Bourgogne_, cités, _a_, XL.

_Mémoriaux de la chambre des comptes_ (Note sur les), _a_, LXXIV.

_Ménage_ (Avoir soin de son), _b_, 1.

_Ménager de Paris._ Article de M. le baron de Reiffenberg sur
   ce livre, _a_, LV.
  --Comment connu de l’éditeur, LII.
  --Conjectures sur le sort du manuscrit original de ce livre, LVI.
  --écrit de 1392 à 1394, XXII.
  --La partie culinaire importante, XXXV.
  --longtemps inconnu, LII.
  --(Manuscrits du), LII et suiv.
  --signalé en 1843, LV.
  --Son orthographe varie, LXI.
  --Son texte revu soigneusement, LXI.
  --Système suivi dans l’édition de ce livre, LX et suiv.

_Ménagière_, (Femme de l’auteur,) _b_, 53.

_Ménestrels_, _b_, 123.
  --Ce qu’ils faisoient aux noces, _ib._ et 124.

MENESTRIER (Le père), _a_, XXX.

_Ménestriers_, _b_, 122, 123, 124.

MENOT, cité, _a_, LXXVII.

_Mensonge_ est utile, _b_, 26.

_Menthe_, _b_, 44.

_Menue-haste._ V. _Haste_.

_Menues choses_, qui ne désirent point de chapitre, _b_, 262.

_Menues espices_, _b_, 122.

_Menus_, _b_, 91.
  --répétés, _a_, LXXXIV.

_Menus_ de piés, _b_, 145.
  --droits du cerf, _a_, LXXXIV; _b_, 156.

_Menus_ oiseaulx rôtis, _b_, 181.

MENA (Gonz. de), _a_, LXVI.

_Mer_ d’Angleterre, _b_, 197. V. _Chien_, _Porc_, etc.

_Mercqs_ de l’épervier, _b_, 289 et 291, V. _Marques_.

_Mercure de France_, _a_, 174; _b_, 296.

_Mère-goutte_, _b_, 260.

_Merlant_, _b_, 101.
  --salé, 201.

_Merles_, _b_, 101.
  --(Chasse aux), 311.

_Merluche_, _b_, 199.

_Merlus_, _b_, 199. V. _Mellus_.

_Mers_ ou _Merts_. V. _Mercqs_.

_Mesche_ (Gingembre de), _b_, 230, 246.

_Mesches_ ensouffrées, _b_, 264.

_Mesnies_ (domestiques) abusent des épices, _b_, 117.

_Messe_ (Explication des cérémonies de la), _a_, 17.
  --perdue par paresse, 41.

_Mestier_ (oublie), _a_, XXXIX, XLIII; _b_, 92, 94, etc., 121.

_Métayer_, _b_, 62.
  --(_Eudeline_ femme du), _ib._

_Mets._ Diverses significations de ce mot, _a_, XLI.
  --inconvenans, _b_, 60.
  --pris dans le sens actuel, _b_, 91, 92, 99 (intitulé des menus, I, II, XV).
  --pris pour service, _b_, 92, 93.
  --Savoir les ordonner, 80.

_Meute_ des pans, _b_, 314.

_Miel_ (Boisson au). V. _Bochet_, _b_, 238.

MIGNON (Denisette), _b_, 104.

_Migon_, _b_, 195.

_Milion_ (oiseau), _b_, 321.

_Millet_, comment cuit, _b_, 176.

_Minces._ Ce que c’est, _b_, 48, 143.
  --(Porée de), 143.

_Miserelle_, expl., _b_, 243.

_Miséricorde_, _a_, 58.

_Modus et Ratio_, _a_, XLIX, LI, LXXII, 29, 48; _b_, 99,
   157, 290, 293, 314, 315, 316, 325.

_Modus et Ratio de divine contemplation_, _a_, LXXII.

_Moëlle._ V. _Mouelle_.

MOIGNE (Lucas le), _a_, XXXIX.

_Moine de Saint-Denis_, cité, _a_, 135.

_Moines_ plus obéissans que les femmes, _a_, 146.

_Moissonneurs._ V. Soieurs, _b_, 54, 57.

_Moissons_ (moineaux), _b_, 303.

_Mol_ (mou) de porc, etc., _b_, 128, 129, 132.

_Molettes_ du cheval, _b_, 74, 75.

_Molissent_, _a_, LXIX.

_Molle_, _b_, 203.

_Mon_, expliqué, _b_, 37, 299.

_Monde_, forêt pleine de lions, etc., _a_, 57.

MONSTRELET, cité, _b_, 115.

MONSTREUL (Tassart de), _a_, 139.

MONTAIGU (Jean de), _b_, 254.

_Montgeron_, _a_, XXVI.

MONTGISON (Marie de), _a_, XXVI.

MONTGLAT (M. et Mme de), _a_, 174.

MONTIGNY (Galeran de), _b_, 255.
  --(Raoul de), _a_, 150.

MONTMORENCY (Généalogie de), _a_, LXVIII.

_Montpellier_, _b_, 248.

MORAIS (C. de), _a_, LXXII; _b_, 319.

MORANT (Colin), _b_, 119, 120.

_Moret_, _a_, 149.

_Morfondu_ (Cheval), _b_, 78.

_Morillon_ (raisin), _b_, 67.

MORIN (Dom Guillaume), _a_, 151.

_Mortereul_, _b_, 211.

_Mortier_, _b_, 115, 123.

_Morue_ (Détails sur la), _b_, 195, 196.
  --Foie de morue en pasté, 223.
  --Manière de l’acheter, la preparer, etc., 195.

_Mouches._ Comment s’en garantir, _a_, 172.

_Mouchet_, _b_, 285.
  --Comment les distinguer, 287.
  --pour attirer les éperviers, 315, 318.

_Mouelle_ (Buignets de), _b_, 224.
  --en rissoles, 226.
  --(Pastés norrois de), 223.
  --(Pipefarces de), 227.

_Moules_, _b_, 204.
  --en civé, 277.

_Moulin_ à moutarde, _b_, 245, 246.

_Mourillon_, _b_, 67.

MOUSSE (Guillaume de la), _a_, 95.

_Moust._ Comment fait, _b_, 181.
  --pour hétoudeaux, 234.

_Moustarde._ Comment faite, _b_, 229.
  --pour un dîner, 122.
  --(Soupe en), 175.

_Moustiquière_, _a_, 172.

_Mouton_ au jaunet, _b_, 149.
  --Ausoerre, 148.
  --(Brichet de), 87.
  --(Épaules de), 177.
  --(Ép. farcies de), 269.
  --(Flanchet de), 87.
  --(Glandes de), 313.
  --(Héricot de), 148.
  --(Pasté de), 148, 186.
  --(Poulmon de), 284.
  --(Prix du), 86, 87.
  --rôti, 177.
  --salé, 132, 133, 148.
  --(Tête de), 267.
  V. _Issue_ et _Pommeaux_.

_Moutons_, _b_, 62, 63.
  --consommés à Paris, _a_, XLIII; _b_, 82, 83, 84, 85.

_Moyen état_ (Gens de). Ce que c’est, _a_, L.

_Mucé-en-Auxois_, _a_, XXI.

_Mue_ de l’épervier, _b_, 311.
  --ou cage pour l’épervier, _b_, 313.

_Muete_ des pans, _b_, 314.

_Muge_ ou _Mugeon_, _b_, 195.

_Mulet_ (Poisson), _b_, 195.

_Mungon_, _b_, 195.

_Municipalité_ parisienne en 1847 très-peu zélée pour
   l’histoire de Paris, _b_, 254.

_Murmuration_, _a_, 37.

_Muscade._ V. _Noix maguettes_.

_Massy-la-Fosse_, _a_, XXI.

_Mystère_ de Griselidis, _a_, 99.


N

NANGIS (Guillaume de), _a_, LXXVI.

_Nappe_ (filet), _b_, 314.

_Nappes_, _a_, XL.
  --à franges, 163.
  --changées pendant le repas, XLII.
  --de cuisine, _b_, 123.
  --différentes de touailles, 250.
  --dites indifféremment touailles ou nappes, 219.
  --grosses, 115.

_Nard_, _b_, 112, 219.

NASSAU (Comte de), _a_, 139.

_Navarrois_ au château de Melun, _a_, 149.

_Navets_, _b_, 49, 94, 97, etc.
  --avec venaison, 130.
  --Comment cuits, 144.
  --confits, 244.

NEELLE (Jean de), _b_, 249.

_Neelle_ fleur, _b_, 249.

_Neffles_, _b_, 92 (bis), 101.

_Négligence_, _a_, 40.

_Neux_ du cerf, _b_, 156.

_Nevers_, _b_, 296.

NICOT, cité, _b_, 47 et ailleurs.

_Nid_ des oiseaux captifs, comment fait, _b_, 256, 257. V. _Aire_.

_Nieulles_, _b_, 101.

_Niort_, _a_, 93, 94.

_Nobles_ s’embrassoient, _a_, LXXVII.

_Noces_ (Devis de), _b_, 108 et suiv.

_Noe_ expliqué, _b_, 201.

_Noël_, _b_, 43.

_Noël_ du XVIe siècle rempli de termes culinaires, _a_, XXXIX.

_Noisettes_ (Buvrage de), _b_, 240.
  --confites, 122. V. _Avelaines_.

_Noix_, _b_, 121.
  --confites, 243, 247.
  --pelées, _b_, 92, 101.

_Noix muguettes_ font douloir la tête, _b_, 236.
  --Quelles sont les bonnes, 230.

_Nom_ écrit, donné en témoignage de stipulation, _a_, 132.

_Nomblès_ ou _Nomblet_, _b_, 130, 131, 132.
  --à la sauce chaude, 100.
  --de cerf, 156.
  --de porc, 236; donné à l’épervier, 299.
  --de sanglier, 94, 157 (ou bourbelier).

_Nombres_ qui renvoient à d’anciennes tables, _b_, 91.

_Normandie_ (Moule de), _b_, 205.

_Normands_ boivent beaucoup, _b_, 192.

_Norwége_ (Sacres de), _b_, 323.

_Notre-Dame_ de Mars, _b_, 156.

_Notre-Dame_ de Paris, _a_, 16, 133.

_Nourrices_, _b_, 58.

_Nourriture_ du cheval, _b_, 76.

_Nouvelliste de la Manche_, cité, _a_, XXXV.

_Noyau_ de bœuf, _b_, 86, 133.

_Noyer_ (Escume de), _b_, 263.


O

_Obéir_ à son mari, _a_, 96.
  --(Bien vient d’), 128.
  --comment, dans les cas douteux, 155.

_Observations_ de l’auteur. V. _Remarques_.

_Obstacles_ au vol de l’épervier, _b_, 302, 308.

ODINET _de Sens_, _b_, 119.

_Oé._ V. _Oies_.

_Œil_ du cheval, _b_, 77.
  --d’un fruit, 247.
  --(Proverbe sur l’), 15.

_Œuf_ pondu, _a_, 180.

_Œufs_ (Arboulastre d’), 206.
  --à la ténoisie, 209.
  --(Alumelle d’), 208.
  --(Chapitre des), _b_, 206.
  --(Civé d’), 174, 277.
  --Comment les cuire, durcir, etc., 209.
  --heaumés, 208.
  --perdus, 208.
  --pochés en brouet, 172.
  --pour la fromentée, 121.
  --pour la pâtisserie, 110, 111.

OFFÉMONT, _a_, LII; _b_, 249.

_Officiers_ nécessaires à un grand repas, _b_, 114.

_Offrande_, _a_, 19.

_Oies_, _b_, 62, 94, 96, 271.
  --à l’eschinée et à l’andoulle rostie, 98.
  --(Boudin d’), 126.
  --Comment engraissées, 88; en trois jours, 212.
  --en potage, 149.
  --grasses à la dodine, 98.
  --petites, 160.
  --(Prix des), 110.
  --rôties, 180.
  --salées, 94, 97, 133. V. _Oisons_.

_Oignons._ Comment cuits, _b_, 136, 137.
  --Leur odeur odieuse aux faucons, 325.
  --Tuent les mouches, _a_, 173.

_Oiseau de paradis_, _b_, 183.

_Oiseau saint Martin_, _b_, 307.

_Oiseaux_ bons pour l’autour, _b_, 322.
  --comment servis, 182.
  --dans la pâte d’une tourte, 93.
  --de chambre ou en cage, _b_, 62, 253, 256.
  --(Marchand d’), 62.
  --petits sont un mauvais gibier pour l’épervier, 302, 303. V. _Oiselets_.
  --qu’on ne vide pas, 183.
  --rôtis, 181.
  --s’aiment et se suivent, _a_, 92.

_Oiseaux de proie_, _a_, 92.
  --de leurre ou _rameurs_, de poing ou _voiliers_, _b_, 318, 319.
  --Leurs droits, 182.
  --Leurs maladies, 325.
  --Leurs noms, 318.
  --(Marchands d’), 323.
  --Quand ils suivoient les chiens, _a_, LXXVIII; _b_, 318.

_Oiseaux de rivière_ à la dodine, _b_, 91.
  --en pâté, 271.
  --(Saupiquet pour), 233.
  --volés par le lanier, 324.

_Oiselets._ Combien en une écuelle, _b_, 121.
  --en gravé, 121, 150.
  --en rosé, 154. V. _Oiseaux_.

_Oisons._ Comment connoître leur âge, _b_, 180.
  --Comment les engraisser, 180.
  --consommés par le roi, etc., 85.
  --rôtis, 275.
  --(Saulce pour), 231. V. _Oies_.

_Oïttres_, _b_, 102, 103.
  --(Civé d’), _b_, 174, 277.
  --Comment cuites, 137.

_Ongles_ de l’épervier, _b_, 294.

_Onglet_ de bœuf, _b_, 131.

_Oraison._ Qualités qui lui sont nécessaires, _a_, 61. V. _Prières_.

_Orangers_ bien connus en France au XIVe siècle, _b_, 110.

_Oranges_, _b_, 108.
  --avec du poisson, 195.
  --de poucins, 276.
  --(Jus d’) sur perdrix, 183, et sur poucin, 232.
  --(Pommes d’), 107, 110.

_Ordonnances_ de février 1349-50, et 3 mai 1351 sur les épices, _b_, 112.
  --de février 1350-1, _a_, 169; _b_, 57, 58.
  --de 1387 et 1388 sur la maison du roi, _a_, XL, 237; _b_, 114.

_Ordre_ donné à tous n’est pas exécuté, _b_, 61.

_Oreilles_ de cheval, _b_, 73.
  --d’homme tirées pour frapper la mémoire, _b_, 40.

_Orengat_, _b_, 112, 265.

_Orenge._ V. _Oranges_.

_Orfin_, _b_, 198.

_Orge_ en boisson et donnée à la poulaille, _b_, 238.
  --mondée, 241, 271.

ORGEMONT (Pierre d’), _a_, XIX, 148.

_Orgueil_, _a_, 29, 31; _b_, 9.

_Orillettes_, _b_, 96, 103.

_Orilliers_, _a_, 238.

_Orine_, expl., _b_, 238.

ORLÉANS (Le duc d’), cité dans le _Ménagier_, _a_, XXII, LXXXI; _b_, 380.
  --Sa consommation, _b_, 85.
  --Ses maisons, 254. V. _Longueville_.

_Orloges_, _b_, 257.

_Orphie_, _b_, 198.

_Orpiment_, _b_, 325.

_Orte_ (Saffran d’), _b_, 246.

_Orthographe du Ménagier_, _a_, LXI.

_Orvale_, _b_, 44.

_Oscille_, _b_, 44, 46.
  --(Vertjus d’), 111, 229.

_Otages_ en Angleterre, _a_, LXXXI, 149.

_Ottour._ V. _Autour_.

_Oublées._ V. _Oublies_.

_Oublies_, _a_, XLIII; _b_, 99, 107, 109, 110, 121.

_Oubloier_, _b_, 121, 122.
  --ce qu’il fournit pour une noce, 109.

_Ours_ apprivoisés, _a_, 144.
  --(Venaison d’) contrefaite, _b_, 155, 179.

_Outarde_ rostie, _b_, 181.
  --(Vol à l’), 309, 310, 321, 324.

_Ouvrages_ cités, _a_, LXV.
  --consultés par l’auteur, _a_, XXXII et suiv. V. _Livres_.

_Oyers_, _b_, 88.

_Ozeille._ V. _Oseille_.


P

PACY (Jacques de), _b_, 253.

_Paelle_ à anse, _b_, 115, 123.
  --à faire les crespes, 226.
  --à faire les fritures d’enfer, _a_, 31.
  --de cuisine, _b_, 106.
  --de fer, 115, 123.

_Pages_ du duc de Berry. Leur nourriture, _b_, 85.

_Parler_ folement, _a_, 48.

_Paille_ dans les maisons, _a_, 171.

_Paillier_ (Canards de), _b_, 89.

_Pain_ blanc plat, _b_, 109.
  --brun, 236.
  --chapelé, 114.
  --Comment le broyer, 87.
  --cornu (proverbe), 36.
  --de bouche, 38.
  --de chapitre, _a_, XXXIX.
  --de Corbeil, 38, 109.
  --de tranchoirs, leur dimension, 109, 110.
  --meilleur que froment (proverbe), 21.
  --pour tranchoirs et pour chapeler, 106.
  --(Prix du), 109.

_Paire_ d’eaux, _b_, 214.

_Paisibles_ (Gens), à rechercher, _b_, 54, 56.

_Paissonoir_, _b_, 294.

_Paix_ (Éloge de la), _a_, 56.

_Palettes_ pour tuer les mouches, _a_, 173.

_Pampes_ de rose, _b_, 253.

PAMPHILE, _a_, LXXXIII.

_Panais_, _b_, 44.

_Pance_ de mouton, porc, veau, etc., _b_, 128, 129.

_Panoit_, _b_, 44.

_Paons_, _b_, 99.
  --Comment nourris, _b_, 256.
  --en entremets, _a_, XLII.
  --rôtis, _b_, 181.

_Papier_ (Dépenses écrites sur), _b_, 56, 58.
  --(Encre pour), 275.
  --huilé aux fenêtres, _a_, 174.

PAPIRIUS (Histoire de), _a_, 179.

_Parchemin_ aux fenêtres, _a_, 173.
  --(Encre pour le), _b_, 275.

_Parement_ (Chambre de), _a_, XLIII; _b_, 107.

_Parer_, expl., _b_, 238.

_Paresse_, _a_, 39; _b_, 11, 17.

_Paris_ (Consommation de), _a_, XLIII, XLV, XLVI; _b_, 80.
  --(Eaux de), _b_, 134.
  --Évêque de Paris à table, 104, 106.
  --maltraité en 1383, _a_, 135, 136.
  --(Oiseaux de proie vendus à), 323.
  --(Population de), _a_, XLIII, XLVI. V. _Boucheries_,
   _Épitaphes_, _Hôtels_, _Rues_, etc.

_Paris sous Philippe le Bel_, cité, _a_, XLVI, XLVII, LXXXV.

PARIS (M. Paulin), cité, _a_, XIX, LXII, LXVIII, 186; _b_, 4, 253.

_Parisis_ (monnoie), _b_, 128.

_Parlement_ (Registres du). Leur style, _a_, XXIX. V. _Plaidoieries_.

_Parler_ peu, _a_, 178; _b_, 16.

_Paroles_ abondantes ou plaisantes nuisent, _a_, 178.
  --déshonnêtes à défendre aux domestiques, _b_, 59.

_Part de Dieu_, _b_, 115.

_Partie_ de chasse au XIVe siècle, _a_, L.

_Parvis_ (Boucherie du), _b_, 83, 84.

_Pasquerés_, expliqué, _b_, 49, 126, 138, 143, 183.

_Passage Charlemagne_, _b_, 255.

_Passerose_, _b_, 249.

_Pasteaux_ de guède, _b_, 214.

_Pastés_ blancs, _b_, 102.
  --(Chapitre des), 185.
  --d’aloés, _b_, 92.
  --d’anguilles, 94.
  --d’argent, 96.
  --de bœuf, 93, 94, etc., 133, 186.
  --de bœuf et de mouelle, 94.
  --de bouli lardé, 186.
  --de bresmes et saumon, 93, 94, etc.
  --de chapons, 92, 93, 98.
  --d’escheroys, 185, 228.
  --de gibier, 186.
  --de gornaux, 95.
  --de lapereaux, 108, 121.
  --de maquerel, 196.
  --de mouton, 186.
  --de mulet, 195.
  --de pigons, 271.
  --de pinparneaux, 91, 92.
  --de porc, 271.
  --de potirons, _a_, XXXIX.
  --de poucins, _b_, 185.
  --de turtres et d’alouettes, 101.
  --de vache, 96, 100.
  --de veau ou veel, 91, 92, 186.
  --de venoison, 155, et d’oiselets, 95, 97, 185.
  --d’oés, poules, etc., 271.
  --d’oiseaux, 271.
  --en pot, de mouton, 148.
  --norrois, 92, 93, etc., 223.
  --(Petits), 118, 277.
  --(Sauce à mettre en), 236.

PASTOUREL (Jean), _b_, 105.

_Patenostre_ dite sans distraction, _a_, 21.

_Patisseries_, _a_, XLIII; _b_, 115.

_Paturon_, _b_, 74.

PAUL (Saint), cité, _a_, 56, 59, 63.

PAUL-DIACRE, cité, _a_, 68.

_Paulmoïer_ ou _Paumoyer_, expl., _b_, 222, 271.

_Pauvreté_, _b_, 18.

_Pavot_, _b_, 44.

_Pêches_, _b_, 118, 245.

_Péchés_ mortels, _a_, 28.

_Pele_ (poële), _b_, 111. V. _Paele_.

_Pénanciers_, _a_, 175.

_Penne_ sous le pied de l’oiseau enrhumé, _b_, 320. V. _Fourrure_.

_Pépie_ des oiseaux, _b_, 325.

_Perceau_, _b_, 249.

_Perche_ branlant pour éveiller l’oiseau, _b_, 315.
  --de l’épervier, garnie, 313.
  --mouillée, dangereuse, 299.

_Perche_ (mesure), _b_, 47.

_Perche_, _b_, 175, 187.
  --au percil, 102.
  --(Coulis de), 242.

_Percil._ V. _Persil_.

_Perdriaulx_, _b_, 186.
  --à l’eau rose, 275.
  --à l’orange, 276.
  --(Chasse aux), _b_, 280, 308.
  --faits de poucins, 212.
  --mangés au sel, 213.

_Perdrix_, _b_, 85, 91, 92, 98, 101.
  --à l’eau rose, 275.
  --à l’orange, 276.
  --(Chasse des), 307.
  --Comment mangées, 183.
  --jeunes, bonnes à chasser, 309.
  --Où les chercher, 301, 307.
  --Quand adouées, 183.
  --Quelles sont les fraîches, 90.
  --vieilles à prendre au voulon, 309.
  --volées par le lanier, 324.

PERIERS (Bonavent. des), _b_, 380.

_Péronne_, _a_, LIX; _b_, 381.

_Pers_ (bleu). (Comment détacher les robes de), _b_, 66.

_Perse_ (Princes de), chassent à l’oiseau, _a_, LI.

_Persil_, _b_, 45, 46, 49.
  --Racines de persil confites, 245. V. _Houssié_ et _Larder_.

_Pertes_ (village), _a_, 68.

PÉRUSE (Comtesse de), _a_, 110, 113, etc.

_Pès_ de Chastellier, _b_, 97, 103.
  --d’Espaigne, _ib._

_Pesches_, _b_, 118.
  --confites, 245.

_Pessouer_, _b_, 294.

_Pestail_, _b_, 115, 123, 271.

PETIT (Jean), _b_, 115.

PÉTRARQUE, _a_, 99, 124.

PHARAON, _a_, 79.

_Philicon (quid?)_, _b_, 219.

PHILIPPE AUGUSTE, _b_, 84.

PHILIPPE DE VALOIS, _a_, 139, 149.

PHILIPPE LE BEL. Compte de ce prince, _a_, 169.

_Pias_, _b_, 300.

_Picard_ (Dialecte), _a_, LVII.

_Picardie_, _b_, 126.

PICQUE (Richard), _a_, LXX; _b_, 61, 115.

_Pieds_ de bœuf, _b_, 129, 132, 145.
  --de cheval, 74, 77.
  --de chevreau, 145.
  --de mouton, 129, 132, 145,
  --lavés, _a_, 169, 238.

_Pierre-au-lait_, _a_, LXXXV; _b_, 113.
  --(Échevins de la), _a_, LXXXV.

PIERRE (François), dit _La Varenne_, _a_, XXXVIII.

_Pies_ (Dresser l’épervier aux), _b_, 300.
  --tuées à l’arbalète et mangées, 267.
  --(Vol aux), 311.

_Pigeons_, _b_, 62, 110, 121.
  --à l’orange, 276.
  --au sucre, 275.
  --avec choux, 144.
  --consommés à la cour, 85.
  --en pasté, 271.
  --lardés, 178.
  --mauvaise nourriture pour l’épervier, 287, 306, 311.
  --sauvegarde singulière, _a_, 69. V. _Coulons_.

_Pignolat_, _b_, 225.
  --contrefait, _ib._

_Pigons_, V. _Pigeons_.

_Pilette_ (flèche), _b_, 267.

_Pince-mérille_ (jeu), _a_, LXXVII, 71.

_Pinperneaux_ en pâté, 91, 92.
  --rôtis, _b_, 101, 103, 191.

_Pintes_ (à boire), _b_, 115.
  --d’étain, 123.

_Pipefarces_, _b_, 92, 95, etc., 227.

PISAN (Chr. de), _a_, LXVII; _b_, 119.

_Pise_, _b_, 93. V. _Tourtes_.

_Pivoine_, _b_, 49.

_Placebo_ (Jouer de), (flatter,) _b_, 25.

_Plaideurs_, _a_, 44.

_Plaidoieries_ du parlement, _a_, LXXII; _b_, 116 et
   _passim_. V. _Plais_ et _Parlement_.

_Plain_ (Vin), _b_, 174.
  --expliqué, _b_, 193.

_Plais_ (Épervier porté aux), _b_, 296.

_Plais._ Voyez _Plies_.

_Plaisir_ du mari le premier suivi, _a_, 97.
  --quel qu’il soit, 155.

_Plan de tapisserie_, _a_, LXXIII; _b_, 255.
  --de Turgot, _a_, LXXIII; _b_, 80.

PLANCHER (Dom), _a_, LIX.

_Planter_ (Quand), _b_, 43, 44.

_Plastreau_, expliqué, _b_, 68.

_Plat_ (Cheval). Ce que c’est, _b_, 74.

_Plats._ Comment servis, _a_, XLI, XLII.
  --couverts, _b_, 106.
  --grands, 115, 123.
  --petits en étain, 115; en grand nombre, 123.

_Plays._ V. _Plies_.

_Pleiges_ (répondans), des domestiques, _b_, 58. V. _Caution_.

_Plies_, _b_, 88, 202.
  --en l’eau, 93, 95, 97, etc.

_Plommé_, expl., _b_, 240.

_Plouviers_, _b_, 98, 101.
  --mangent du vent, non vidés, 183.

_Pluie_ mauvaise pour l’épervier, _b_, 299.

_Plumage_ de l’épervier, _b_, 292.
  --des canards, 89.

_Plumer_ à sec, _b_, 181.

_Plumes_ cassées, comment les raffermir, _b_, 302.
  --de l’épervier marquées par les _faims_, 287.
  --des ailes des oiseaux, 89.
  --des perdrix, 90.
  --ou cures pour l’épervier, 297, 298, 312.

_Pluviers._ V. _Plouviers_.

_Poële._ V. _Paele_.

_Poëliers_, _a_, LXXXVII.

_Poids_ (Gros), expl., _b_, 248.

_Poinçon_ (tonneau). Sa contenance, _b_, 244, 249, 260.

_Poireaux._ V. _Poreaux_.

_Poirée._ V. _Porée_.

_Poires_, _b_, 92, 121.
  --confites, 245.
  --cuites, 92, 267.
  --d’angoisse, 267.
  --vermeilles en hiver, 250.

_Pois_, _b_, 49.
  --au craspois, 136.
  --au lard, 135, 136.
  --coulés, 91, 96, etc., 136.
  --daguenets, 100.
  --Dans quelle eau cuisent, 134.
  --en cosse et au lard, 136.
  --nouveaux, 136.
  --percés, 50.
  --vieils en potage, 134.
  --vieils jaunis, 136.

_Poisières_, _b_, 307.

_Poisons_ pour cerf ou sanglier, _b_, 258.

_Poisson_ d’eau douce, _b_, 92, 93; (Chapitre du), 187.
  --de mer, 92, 93.
  --de mer, plat (Chapitre du), 201.
  --de mer, rond (Chapitre du), 194.
  --froid au potage jaunet, 175.
  --en galentine, 174.

_Poitevine_ (Sauce), _b_, 234.

_Poitiers_, _a_, 94.

_Poitou_ (Chevauchée de), _a_, XLV. V. _Niort_.

POITRINE (Jeh.), _b_, 119, 120.

_Poitrine_ de bœuf, _b_, 86, 87, 131.

_Poivre_ aigret ou jaunet, _b_, 178, 232.
  --long, 112.
  --noir, 233.

_Poles_, _b_, 203.

_Pommeaux_, _b_, 97, 103, 222.

_Pommes_ (Breuvage de), _b_, 79.
  --cuites, 101, etc.
  --de blandureau, 111, 122.
  --de rouvel rôties, 106.
  --en riquemenger, 268. V. _Oranges_ et _Grenades_.

_Pommettes_ de fressure d’agneau, _b_, 222.

_Pompons_, _b_, 273.

_Ponctuation_, _a_, LXI.

_Pont-sur-Yonne_, _a_, 68.

_Pontife_ (Fromage comparé au), _b_, 146, 147.

PONTONNIER (Jean le), _b_, 82.

_Porcs_, _b_, 62, 266, 268.
  --(Boyaux de) comment lavés, 160, 228.
  --(Chaudun de), 160.
  --consommés à Paris, _a_, XLIII; _b_, 82, 83, 84, 85.
  --en pasté, _b_, 271.
  --en rissole, 225.
  --eschaudés et rostis, 178.
  --(Filet de cuisse de), 287.
  --(Fressure et boyaux de), 158, 228.
  --(Hastelets de chaudun de), 228.
  --(Issues de), 128.
  --jaunis à l’air, 126.
  --mis au saloir en Picardie, 126.
  --(Pieds de), 237.
  --Quand les tuer, 125. V. _Cochon_, _Pourceau_,
   _Pourcel_, _Pourcelet_, _Sous_, _Ver_, _Vinaigrette_.

_Porc de mer_, _b_, 198.
  --en entremets, _a_, XLII.

_Porc épic_ (Hôtel du), _b_, 254.

_Poreaux_, _b_, 50.
  --à chapons, 98.
  --aux amandes, 99.
  --blancs, 96.

_Porée_, _b_, 44, 47.
  --au lait d’amandes, 142.
  --blanche, 94, 95, 139.
  --blanche de bettes, 140.
  --de bettes, 137, 140.
  --de cresson, 102, au lait d’amandes, 140.
  --de minces, 142.
  --d’été, de caresme, etc., 48, 49.
  --noire, 93, 97, etc., 142.
  --nouvelle, 141.
  --verte, 107, 139, 141, 142.
  --vieille, 141.

_Portages_ (ports), des provisions, _b_, 123.

_Porte de Paris_, _b_, 80, 122, 132.

_Portes_ (oublies?), _b_, 110, 122.

_Portechappes_, _a_, XLI; _b_, 114.

_Portefaix._ Leur caractère, _b_, 54.

_Porteurs_ à l’enfeutrure, _b_, 53.
  --d’eau, 115.

_Portugais_ à la cour de Bourgogne, _b_, 273.

_Portugal_, _a_, LXVI.
  --(Jardiniers de), _b_, 273.

Potage aoursé (brûlé), _b_, 87, 124, 137, 263.
  --de Lombards, 171.
  --de pois vieils, 134.
  --d’une petite oé, 149.
  --écartelé, 91, 216.
  --jaunet, 175.
  --maigre, 148.
  --parti, ou faux grenon, 216.
  --pour faire issue, appelé _Gelée_, 100.

_Potages_ à épices non lians, _b_, 147.
  --communs sans épices, 134.
  --d’épices, leur saison, 242.
  --(Épices pour les), 107.
  --lians, 87.
  --lians de chair, 158.
  --Manière de les dessaler et d’en ôter l’arsure, 262, 263.
  --qui s’en vont sur le feu, 88.

POTARD (Jean), _b_, 116.

POTARDE (Perrette), _b_, 116.

_Potirons_ (Pâté de), _a_, XXXIX.

_Pots_, à aumône, _b_, 115, 118, 123.
  --Combien loués, 124.
  --de cuivre pour la vaisselle, 115, 122.
  --de diverses sortes, 115.
  --de terre, à vin, 123.
  --pour la gelée et la cameline, 114.
  --pour potages, 123.

_Poucins_, _b_, 108, 160.
  --à la mode lombarde, 185.
  --à l’eau bénite, 275.
  --à l’eau b. d’oignons, 276.
  --à l’orange, 276.
  --à porter à la chasse, 300, 306.
  --Combien pour un dîner, 110.
  --Comment engraissés, 212.
  --Comment faisandés, 181.
  --en froide sauge, 215.
  --en pasté, 185.
  --en rosé, 154.
  --farcis, 212.
  --mangés en trois fois par l’épervier, 306.
  --nourris avec des éperviers, 285.
  --(Perdreaux faits de), 212.
  --(Prix des), 110, 121.
  --rôtis, 180, 232. V. _Poulets_.

_Poudre_ blanche, _b_, 122.
  --de canelle, 122.
  --de duc, 248.
  --fine, 122, 247.
  --pour tuer les loups, 63.

_Poulailles_, _b_, 85.
  --farcées, 213.

_Poulaillier._ Ce qu’il fournit pour un repas de noces, _b_, 110, 122.
  --du roi, etc., 85.

_Poules_, _b_, 62, 271.
  --aux herbes, 100.
  --farcies, 268.

_Poulet_, _b_, 165.
  --(Coulis d’un), 242.
  --Cols de poulets en coulis, _ib._

POUPART (Charles), argentier du roi, _a_, XXX.

_Pourceau_, _b_, 62.
  --(Groin de), nécessaire au serviteur, 23.
  --jaunit à l’air, 126. V. _Porc_, _Pourcel_, _Pourcelet_, _Cochon_, etc.

_Pourcel_ (Soux de), _b_, 231.

_Pourcelet_ farci, _b_, 178.
  --lardé, 178.
  --(Sous de), 215.

_Pourpois_, _a_, LXXXIV; _b_, 103, 198.

_Poux_ des oiseaux, _b_, 325.

_Précautions_ à prendre avec les hommes de peine, _b_, 54.

_Président_ du parlement, _b_, 104.
  --Comment placé et servi à table, 106.

_Présomption_, _a_, 42.

_Presse._ V. _Foule_.

_Prêter_ 12 pour 13, _a_, 46.

_Prêtres_ discrets, _a_, 162.

_Prévôts_ de Paris, _b_, 254, 255.
  --(Hôtel des), 255.

_Prières_, _a_, 10, 11, 12. V. _Oraison_.

_Prime_ (Heure de), _a_, 48.

_Prix_, cités dans le _Ménagier_, comment les interpréter, _a_, XXXI.
  --de la bougie, _b_, 112.
  --de la canelle, 111.
  --de la chair, 128, 132.
  --de la cire, 112.
  --de la graisse, 82.
  --de la loche, 220.
  --de l’argent, 86.
  --de la vaisselle, 124.
  --de la volaille, 110, 119, 120, 121.
  --de l’eau, 123.
  --de l’herbe verte, 124.
  --de l’ypocras, 112.
  --des amandes, 111.
  --des bonbons, 112.
  --des carrotes, 245.
  --des cochons, 120, 220.
  --des cuirs de bœuf, 82.
  --des écrevisses, 220.
  --des épices, 111.
  --des flambeaux, 112, 124.
  --des fleurs, 116, 123.
  --des ménestrels, 123.
  --des morceaux de bœuf, 86, 87.
  --des moutons, 82.
  --des nappes, 124.
  --des oublies, 107, 109.
  --des perdreaux, 120.
  --des pots d’étain, 124.
  --des sergens, 124.
  --des tables, tréteaux, etc., 116, 123.
  --des torches, 112, 124.
  --des verres, 124.
  --du blé, 109, 111.
  --du bois à brûler, 113.
  --du charbon, 113.
  --du froment mondé, 111.
  --du galanga, 112.
  --du gingembre, 111.
  --du girofle, 111.
  --du macis, 112.
  --du mouton, 86, 87.
  --d’un cuisinier, 114, 123.
  --d’un hôtel pour une noce, 116, 123.
  --du pain, 109.
  --du poivre, 112.
  --du ris, 111.
  --du safran, 111.
  --du sucre, 111.
  --du veau, 86, 87, 221.

_Procureur_ au chatelet et au parlement, _a_, LXXVIII, LXXXV.

_Procureur du roi_, _b_, 104, et note.
  --Où placé à table, _b_, 106.

_Procureur général._ Remarques sur ces mots, _a_,
   LXXVIII, LXXIX; _b_, 104, 106.

_Prouesse_, _a_, 57.

_Provence_ (Figues de), _b_, 101.

_Proverbes_, _a_, LXXXVII, 169, 178; _b_, 4, 15,
   21, 37, 56, 70, 114, 125, 156, 292.

_Proverbiale_ (Façon de parler), _a_, XLVII.

_Provins_ (Roses de), _b_, 252.

_Provisions_, par qui achetées, _b_, 117.

_Prudence_, femme de Mellibée, _a_, 186 et suiv.

_Prunelles_ de haie, _b_, 235.

_Prunier_ enté sur vigne, _b_, 51.

_Psaultier_, _b_, 129, 132.

_Pucelle_ (Conditions de la), _b_, 72.

_Puces._ Comment les chasser, _a_, 171.

_Purée_, _b_, 102.
  --expl., _b_, 135, 137.
  --A quoi elle sert, 136, 137.

_Purer_, expliqué, _b_, 135.


Q

_Quadragésimal spirituel_, _a_, LXXIII; _b_, 45.

_Quarrel_ fondant sous le pied, _b_, 204.
  --ou _Quarreau_ (brochet), 88.

_Quarrelet_, _b_, 202.

_Quartes._ Ce que c’est, _b_, 106.
  --d’argent, _a_, XL; _b_, 118.
  --d’étain, 115, 123.

_Quatre-de-chiffre_, _a_, LXXXIV.

_Quayeu_ (Moule de), _b_, 205.

_Quelboe_, _b_, 204.

_Quelrel_, _b_, 204.

QUENTIN (Thomas), _a_, 237.

QUENTINE (Jeanne la), _a_, 237.

_Queue_ (tonneau), _b_, 67.

_Queue_ de cheval, _b_, 72, 75.
  --de l’épervier, _b_, 312.
  --de sanglier, 155, 179.
  --de sanglier à la sauce chaude, 93, 96.
  --Sauce dite _Queue de sanglier_, 179, 236.

_Queue._ V. _Balay_.

_Queue-en-Brie_ (La), _a_, LXXXV.

_Queurie._ V. _Cuisine_.

_Queux_ (Grand), de France, _a_, XL.

_Queux_ (Aides des), _b_, 123.
  --(Attributions d’un), _a_, XL; _b_, 117.
  --loué, 114.
  --(Salaire d’un), 123.
  --(Terme technique des), 164.

_Qui féri_ (jeu), _a_, 71.


R

_Raales_ des champs, _b_, 310.

RACHEL, _a_, 85.

_Rafan_, _b_, 246.

_Raffle_ racine, _b_, 246.

_Rage_ (Conjuration contre la), _b_, 259.

_Raie._ V. _Raye_.

_Raifort_, _b_, 246.

_Raisin._ V. _Roisins_.

_Raison._ Avantages qu’elle procure, _b_, 29.

_Ramage_ (Épervier), _b_, 314, 320.

_Ramiers_ (Coulons), _b_, 89, 133.

_Ramolles._ V. _Raniolles_.

_Rancune_, _a_, 40.

_Rangs_ peu marqués dans les relations sociales, _a_, L. V. _Bourgeois_.

_Raniolles_, _b_, 93, 97.
  --lombardes, _b_, 95.

_Rape_, _b_, 77.

_Rapine_, _a_, 45.

_Rappé_, _b_, 168.

_Rate_, _b_, 132.

_Ratières_, _b_, 64.

_Rats_, bons pour les oiseaux, 312, 313, 326.
  --Comment les détruire, _b_, 64.

_Raves_, _b_, 49.

_Raye_, _b_, 201, 202.
  --(Aulx camelins pour), 201, 230.
  --bouclée, lisse, etc., 201.
  --(Galentine pour), 202.
  --notrée, 201.

RAYMONDE, _a_, 68.

_Rebat_, _b_, 291.

REBECCA, _a_, 85.

_Recettes_ dont l’auteur doute. V. _Remarques_.
  --empruntées, _a_, XXXIV.

_Réclamer_, expl., _b_, 284, 296, 297, 299, etc., 314.

_Recommanderesses_, _b_, 58.

_Recoupes_, _b_, 89.

_Recréance_, expl., _b_, 295, 296, 297, 299, etc.

_Recueil de tous les oiseaux de proie_, etc., _a_, LXVI.

_Redefort_, _a_, LXIX.

_Regard_ (Joli passage sur le), _b_, 14.

_Regard_ (Jour du), _b_, 118, 122, 124.

_Réglisse_ (Quelle est la bonne), _b_, 238.

REIFFENBERG (M. le baron de), _a_, LIII.
  --Son article sur le _Ménagier_, LV.

_Reims_, _a_, LXX.

_Reine_ (Dépense de la) et de ses enfans, _b_, 85.

_Reine_ de Navarre, _a_, 240.

_Reines_ blanches, _b_, 123.
  --de France ne lisent seules que les lettres autographes des rois, _a_, 75.
  --n’embrassent que le roi, 76, _b_, 381.

_Réjouir_ (Tout le monde aime à se), _a_, 154.

_Relations des ambassadeurs vénitiens_, citées, _a_, XLVII.

_Religieux de Saint-Denis_, cité, _a_, 135, 136.

_Remarques_ critiques[1612] de l’auteur sur des recettes, _a_, XXXI; _b_,
   66, 85, 93, 106, 129, 153, 158, 161, 162,
   164, 166, 167, 179, 190, 235, 236, 269.

_Remèdes_ pour les chevaux, _b_, 77.

_Remere_, expl. _b_, 307.

_Renart_ (Conditions du), _b_, 72.
  --Recette pour les détruire, 63.

RENAUD de Louens, _a_, 186.

_Renodie_ (La). V. _Sainte-Aulaire_.

_Renoulles_, _b_, 222.

_Renseignemens_ à prendre sur les chambrières, _b_, 57.

_Renverser_ une anguille, _b_, 191.

_Repas_ des domestiques, _b_, 70.
  --(Ordre d’un), _a_, XL; _b_, 103 et suiv.

_Repos_ trompe les gens, _b_, 40.

_Reprise_ des torches par l’épicier, _b_, 123.

_Requêtes_ de l’hôtel, _a_, LXXIX.

_Ressatir_, _b_, 299.

_Restes_ des tables, _b_, 117.

_Restraintif_ pour les chevaux, _b_, 77, 79.

_Retrait_ de la reine, _b_, 62.

_Rets saillant_, _b_, 314.

_Révolution_ a diminué la consommation de la viande, _a_, XLVI.

_Rhombus_, _b_, 203.

_Rhume_ de l’épervier, _b_, 319, 320.

_Riagal_ (aconit), _b_, 64.

_Ribaude._ Mauvais mot, _b_, 60.

_Ribelette_, expl., _b_, 139, 142.

_Richebourg_, _a_, LIX.

RICHEMONT (Arthur de), _b_, 254.

_Riches_ gens mangent des limaçons, _b_, 223.

_Rique-menger_, _b_, 268.

_Rire_ (Comment), _b_, 26.

_Ris_, _b_, 214.
  --battu, 111.
  --engoulé, 91, 92, 98, etc.; 214, 243.
  --et amandes frites dessus, 107.
  --(Fleur de), 122.

_Rissoles_, _b_, 88, 92, 93.
  --à jour de poisson, _b_, 225.
  --à jour de chair, _ib._
  --de brochet, 188.

  --de mouelle de bœuf, 84, 97, etc.; 226.
  --en carême, 225.

RIVIÈRE (Bureau de la), _a_, LXVI; _b_, 46, 380.

_Robe_, expl., _b_, 67.

_Robes_ à visiter, _b_, 65.
  --Comment les détacher, nétoyer, etc., _b_, 65 et suiv.
  --d’une bouchère, 82.

_Robeslinges_, _a_, 169, 238, 239.

ROCHEFORT (Jean de), _a_, 150.

_Rochelle_ (Vin de la), _b_, 38.

_Rocs_ d’échiquier, _a_, XLVII, 7; _b_, 381.

RODOALD, _a_, 70.

_Rogne_ du cheval (gale), _b_, 75, 77.

ROHAN (Vicomte de), _b_, 321.

_Roi_ (Consommation du), _b_, 85.
  --(Étaux du), 200.

_Roi-qui-ne-ment_ (Jeu du), _a_, 7.

_Roi (Ne pour), ne pour roc_, _a_, XLVII; _b_, 380.

_Rois._ Étoffe grossière, ou vêtement grossier, _a_, LXXXIII; _b_, 32.

_Roisins_, _b_, 101, 118.
  --de Digne, sans pepins, 246.
  --sans pepins, 50. V. _Morillon_ et _Moust_.

_Roissoles._ V. _Rissoles_.

_Romain_ (Pauvre) fait empereur, _a_, 98.

_Romaine_ (Histoire de la), _a_, 158.

_Romaine_ (Laitue), _b_, 46.

_Romainville_, _a_, LXXXV.

_Roman de la Rose_, cité, _a_, 75.

_Romarin_, _b_, 53, 106, 231.
  --Manière de l’envoyer loin, 53.

_Roménie_ (Sacres de), _b_, 323.

ROMILDE, duchesse de Frioul, _a_, 70.

_Rondeaux_ sur Aubriot, _a_, LXXXVII.

_Rongne_, _b_, 75, 77.

_Ront_ (poisson), _b_, 203.

ROQUEFORT (J. B. B. de), _a_, LXXI, etc.

ROQUELAURE (G. J. B. duc de), _b_, 83.

_Rosé_ (plat), _b_, 95.
  --d’alouettes, 94, 97, 154.
  --de lapereaux, 93, 97, 154.
  --de poucins, 154.
  --d’oiselets, 154.

_Rosé_, (_quid_?), _b_, 252.

_Roses_ de Prouvins, _b_, 252.
  --gardées en hiver, 52, 251, 252. V. _Fleurs_.

_Rosiers_, _b_, 49.

_Rosses_ (poisson), _b_, 194.

_Rost_ de char (Chapitre du), _b_, 177.
  --Le meilleur qu’on peut, 93, 95, etc.

_Rôtisseur._ V. _Oyers_.

ROUBAIS (Isabelle de), _a_, LIX.
  --(Jean de), LVIII.
  --(Marguerite, dame de), LVIII et suiv.; _b_, 272.
  --(Pierre de), _a_, LVIII, LIX, LX; _b_, 275;
   prend Péronne en 1465, _a_, LIX.

_Roubais_ (Église de), _a_, LIX.

_Rouen_, _a_, 135.

_Rouget_, _b_, 100, 101, 197.
  --(Espimbèche de), 175.

_Rougir._ Bon signe chez une chambrière, _b_, 59.

_Rouillée_ de bœuf, _b_, 163.

ROUSSEAU (Guiot), _a_, 68.

_Rousset_ (Brouet), _b_, 164.

_Rue_ Charlemagne, _b_, 254.
  --Culture-Ste-Catherine, 254.
  --d’Avignon, _a_, LXXXV.
  --de Braque, _b_, 84.
  --de Galilée, 255.
  --de Jouy, _a_, XXI; _b_, 254.
  --de la Heaumerie, 113.
  --de la Pierre-au-Lait, _a_, LXXXV. V. _Pierre_.
  --de la Savonnerie, _b_, 113.
  --de la Verrerie, 116.
  --de la Vieille-Monnoie, 113.
  --de Lormerie, _ib._
  --des Arcis, 113.
  --des Billettes, _a_, LXXXV; _b_, 116.
  --des Écrivains, 113.
  --des Prêtres-Saint-Paul, 254, 255.
  --du Mûrier, _a_, LXXXV.
  --du Petit-Crucifix, _b_, 113.
  --du Porche-Saint-Jacques, _a_, LXXXV; _b_, 113.
  --Jean-Lecomte, _a_, LXXXV.
  --Percée, _a_, XXI; _b_, 254.
  --Saint-Antoine, _b_, 254, 255.
  --Saint-Jacques-la-Boucherie, 113.
  --Simon-le-Franc, 116.
  --Trognon, _a_, LXXXV. V. _Tenue_.

_Rue_ (Plante), _b_, 319, 320.

RUEL (Jeh. de), _b_, 120.

_Rues_ (Éperviers portés dans les), _b_, 296.
  --Leurs noms constamment changés par la municipalité actuelle de Paris, 254.

_Rues et églises de Paris_, _a_, LXXIV; _b_, 52.

_Ruissoles._ V. _Rissoles_.

RUMIGNY (M. le marquis de), _a_, LV.

_Ruses innocentes_, citées, _b_, 314.

_Russie_ (Sacres de), _b_, 323.

RUTEBEUF, cité, _b_, 57.

RYMER, cité, _a_, LXXX.


S

_Sablon_ pour horloges, _b_, 257.

_Sacres_, _b_, 318, 323.
  --employés en Asie, _a_, LI.
  --ont les pieds bleus, _b_, 324.
  --originaires de Tartarie et du Turkestan, _a_, LI.

_Saffran_ d’Ort, _b_, 246.
  --(Prix du), 111.
  --Remède pour les oiseaux, 325. V. _Frangié_.

_Sage_ et fou. Qui l’est, _b_, 28.

_Sage_ homme laissé par sa femme, _a_, 183.

_Saïda_, _a_, LI.

_Saignée_ (Détails sur la), _a_, 164.
  --du cheval, _b_, 76, 77, 79.

_Sain_ de porc, _b_, 128.

SAINT-AIGNAN (Le duc de), _a_, LXXI.

_Saint-André-des-Ars_ (Église de), _a_, 16.

_Saint-Benoît_ (Boucherie de), _a_, XLIV.

_Saint-Denis-du-Chastel_, _a_, 95.

_Saint-Éloi_ (Boucherie de), _a_, XLIV; _b_, 84.

_Saint-Francbourg-de-Senlis_, _a_, LXIX.

SAINT-GERMAIN (Guillaume de), _b_, 104.

_Saint-Germain_ (Boucherie de), _b_, 83, 84.

_Saint-Jacques_ (Pèlerins de), _a_, 183.

_Saint-Jacques-la-Boucherie_, _b_, 113.

_Saint-Lô_ (Archives de), _a_, XXXV.

_Saint-Maixent_, _a_, 94.

_Saint-Marcel_ (Boucherie de), _a_, XLIV; _b_, 83, 84.

_Saint-Martin_ (Boucherie de), _b_, 84.

_Saint-Nicolas_ (Boucherie de), _b_, 84.

_Saint-Paul_ (Quartier), _a_, XLIV.

_Saint-Pol_ (Cage du roi à l’hôtel), _b_, 253.

_Saint-Severin_ (Église de), _a_, LXXIII.

_Saint-Thibaut_ (Prieur de), _a_, LXXXV.

_Saint-Victor_ (Abbaye de), _a_, LXXIII.

SAINT-YON (Guillaume de), _a_, XLVI; _b_, 82, 83.

SAINTE-AULAIRE (François de), sieur de La Renodie, _a_, LXXIV.
  --cité, _b_, 280, 287, 288, 289, 293, 317, 323.

_Sainte-Geneviève_ (Boucherie de), _a_, XLIV; _b_, 83.

SAINTE-PALAYE (La Curne de), _b_, 380.

_Salaminée._ V. _Salemine_.

_Salemine_, _b_, 99, 102.
  --de becquets et tanches, _b_, 107.

_Saleure_ (Viande salée), _b_, 91, 92.

_Salières_, _b_, 118.
  --d’argent, _a_, XL; _b_, 106.
  --de pain, _a_, XLI; _b_, 114.

_Salle_ à manger, sa description, _a_, XL; _b_, 105.
  --où les gens entrent et s’arrêtent, _b_, 61.

_Saloirs_ en Picardie, _b_, 126.

_Saluces_, _a_, 99.

_Samois_ (Pont de), _a_, 149.

SANCERRE (Le comte de), _a_, LXXIX.
  --(Le maréchal de), _a_, 137.

_Sandal_, _b_, 118.

SANDRAS DE COURTILZ, _a_, LXVIII; _b_, 83.

_Sang_ doit faire horreur aux femmes, _b_, 59.

_Sanglant._ Mot de malédiction, _a_, LXXXIII; _b_, 59.

_Sangle_ (ongle), _b_, 294, 295.

_Sanglier_ (Bourbelier ou Bourberel de), _b_, 179, 236.
  --comment cuit, 158.
  --fait d’un ver, 259.
  --(Foie de), 157.
  --frais, comment mangé, 156, 265.
  --(Membres du), 157.
  --(Poison pour le), 258.
  --salé, 158.
  --(Tête et joues de), 158. V. _Bêtes noires_.

SANSONET. Marchand d’oiseaux et voleur, _b_, 62.

SARA, _a_, 79.

_Sarcelles_, _b_, 311.

_Sardines_, _b_, 271.

_Sarge_ (serge), _b_, 118.

_Sariette_, _b_, 44.

_Sas_, _b_, 136.

_Satin_, _b_, 66.

_Satisfaction_ (De la), _a_, 27.

_Sauce._ V. _Saulce_.

_Saucisse._ V. _Saulsisse_.

_Sauge_, _b_, 44, 249.
  --dans la venaison, 130.
  --(Froide), 93, 96, 215.

SAUGETE (Jean), _a_, 15.

_Saulce_ à mettre boulir en pasté de hallebrans, _b_, 236.
  --blanche de brochets et de perche, 102.
  --blanche de poisson, 93, 97.
  --briefve pour chapon, 235.
  --d’aulx blanche ou verte, 231.
  --de lamproie, 133.
  --jaunette, _b_, 175.
  --paresseuse, 233.
  --pour chapon ou poule, 237.
  --pour œufs pochés, 237.
  --râpée, 237.
  --vert d’espices, 231.

_Saulces_ boulies (Chapitre des), _b_, 232.
  --liantes, 87.
  --non boulies (Chap. des), 229.
  --plus fortes en hiver, 236.

_Saulsisses_, _b_, 91, 92.
  --Manière de les faire, 266.

_Saultier._ V. _Psaultier_.

_Saumons_, _b_, 101.
  --(Dalles de), 198.
  --farcis, 96, 103.
  --frais, 198.

_Saupiquet_, _a_, LXXXVI; _b_, 181, 233.

_Saussier_, _b_, 122.
  --Ce qu’il fournit, _b_, 111.

_Saut_ de l’épervier, _b_, 280.

SAUVAL, _a_, LXXIV, LXXVIII, LXXXV, 174; _b_, 80, 84, 116, 253, 254, 255.

_Sauvegarde_ singulière pour une femme, _a_, 69.

_Savoie_ (Bœufs de) amenés à Paris en 1422, _a_, XLVI.
  --(Brouet de), _b_, 166.

SAVOIE (Agnès de), _a_, LIX.

SCAPPI (Barth.), cité, _b_, 207.

SCHEFER (M.), cité, _a_, LI.

SCHNEIDER (Jo.-Gott.), _a_, LXIX.

_Seaulx_ pour recueillir les restes, _b_, 114.

_Sèche_ à un gravé, etc., _b_, 103.
  --conrée, 205.
  --(Étaux à), 200.
  --fraîche, 206.
  --frite, 103.
  --salée, consolation du carême, 206.

_Seconds_, _b_, 106, 109.

SECOUSSE (D. F.), _a_, LXXIV.

_Secrets_ du mari à garder, _a_, 179.

_Sedile_ (bloc), _b_, 289.

_Seiche._ V. _Sèche_.

_Seigneur_ abusant d’une bourgeoise, _a_, 139.

_Seigneurs_ à fuir, _a_, 77.
  --(Gens de cour de) à éviter, 177.
  --(ou oncles du roi). Rissoles faites chez eux, _b_, 226.

_Seimier_ de cerf, _b_, 87, 129, 156, 157, 264.

_Seine_ (Eau de), _b_, 68, 243.

_Sel_ armoniac, _b_, 250.
  --blanc, 113, 250.
  --gros, 113.
  --noir, 190.

_Semer_ (Quand), _b_, 43.

_Semier._ V. _Seimier_.

SENDABAD, _a_, 158.

_Senlis_, _a_, LXIX.

_Sens_, _a_, 68.

_Septembre_ (Chasse en), 310, 311.

_Septembresse_, (_quid_?), _b_, 49.

_Sept sages de Rome_, cités, _a_, 158.

_Serceaux_ (plumes), _b_, 89, 294.

_Serge_, _b_, 118.

_Sergens_ pour garder les portes, _b_, 115, 124.

_Serpentine_, _b_, 49.

_Serres_ de l’épervier, _b_, 294.

_Servans._ Leur dîner, _b_, 107.

_Serviettes_, _b_, 108.
  --(Petites), _b_, 107.

_Service_ des domestiques à organiser, _b_, 60.

_Serviteurs._ Comment doivent être pour leurs maîtres, _b_, 22.
  --de trois espèces, 53.

_Setier._ V. _Sextier_.

_Seun_ (Feuille de), _b_, 251.

_Seur_ (Feuille de), _b_, 223, 251.

_Seurfrire_, expl., _b_, 151.

_Seurmontain_, _b_, 67.

_Sextier_, expl., _b_, 68, 237.

_Seymé_, _b_, 100, 151, 173.

_Seymier_ de cerf. V. _Seimier_.

SICILE (Le roi de), duc d’Anjou, _a_, 174.

_Siffler_ l’oiseau, _b_, 297, 308.

_Signes_ douteux, _b_, 247.

_Siller_, expl., _b_, 315.

SILVESTRE (Israël), _a_, XX.

_Simonie_, _a_, 46.

_Simplicité_ de mœurs d’un procureur général en 1383, _b_, 104.

_Singes_ apprivoisés, _a_, 144.

_Singularité_, _a_, 31.

_Sizain_, (_quid_?), _b_, 248.

_Sobriété_, _a_, 59.

_Société de l’histoire de France_, _a_, LXXVI.

_Société des bibliophiles._ Sa composition,
   _a_, préliminaires; publie le _Ménagier_, _a_, LIV.

_Société des bibliophiles de Reims_, _a_, LXX.

_Sodomie_, _a_, 52.

_Soie_ (Robe de), _b_, 66.

_Soieurs_, _b_, 54, 57.

_Soins d’une femme pour son mari_, _a_, 169.

SOISSONS (Comtesse de), _a_, LXXI.

_Soles_, _b_, 101, 160, 203.
  --(Coulis de), 242.

_Solidarité_ de deux époux, _a_, 184.

_Sommières_, _a_, XXI.

_Son._ Comment donné aux chevaux, _b_, 77.

_Songe de pestilence._ Ce que c’est, _a_, LXXII; cité, _a_, 29.

_Sonnettes_, _b_, 315.

_Sorcelleries._ Quelles sont les meilleures, _a_, 170, 171.

_Sorées_ (Plumes), _b_, 316, 318.

_Soret_, _b_, 106.
  --au vinaigre, _b_, 101.

_Soringue_ d’anguilles, _b_, 91, 93, etc.; 173.
  --(Potage liant comme), 164.

SOTTENGHIEN (Jehan de), _a_, 139.

_Soubtil brouet d’Angleterre_, _b_, 166.

_Soubuse_, _b_, 307.

_Soucié_, _b_, 203, 231.
  --Étymologie de ce mot, 231.
  --vergay, à garder poisson de mer, 231.

SOUDANT (Jean), _b_, 116.

_Souliers_, _a_, 169, 239.

_Soupe_ dans le sens actuel, _b_, 121.
  --dépourvue, 145, 146.
  --en moustarde, 175.

_Souper_ en juillet, _b_, 147.
  --fait en hâte, 170.
  --(Heure du), 39.

_Soupers_ (Devis de), _b_, 100.
  --de noces, 108.

_Souppis_ de bœuf, _b_, 131.

_Source_ (Vol à la), _b_, 280.

_Souricières_, _b_, 64.

_Sous_ de pourcelet, _b_, 215, 231.

_Souterraine_ (La), _a_, 94.

_Soux._ V. _Sous_.

STADLER (M. de), _a_, 68.

_Statistique_ du _Ménagier_ peu sûre, _a_, XLIII et suiv.
  --(Mauvaise) de l’ouvrage intitulé les _Rues et églises de Paris_, XLV.

_Stipulation_ (Objets donnés en témoignage de), _a_, 132, 133.

_Stockfisch_, _b_, 195.

_Stofix_, _b_, 195.

_Style_ de l’auteur et du XIVe siècle, _a_, XXIX et XXX.

_Subtilité_ des femmes, _a_, 167.

_Sucre_ en pierre, _b_, 122.
  --en roche, 238.
  --(Prix du), 111.
  --rosat, 112, 122, 274.
  --vieil, 92.

_Sucreries_, _a_, XLIII.

_Suffisance_ (contentement de peu), _b_, 21.

_Supplément aux corrections_, _b_, 380.

_Supplications_, _b_, 107, 110.

_Sur_, pris pour chez, _b_, 154, 186, 220, 246.

_Surcot_, _a_, 13, 14.

_Surlonge_, _b_, 86, 87, 130, 131.

_Surlonges_, _b_, 295.

_Suros_ du cheval, _b_, 74, 75.

SUSANNE (Histoire de), _a_, 64.

_Suzerain_ qui veut être embrassé, _a_, LXXVIII.


T

_Table_ de ce livre (Remarques sur la), _a_, LXII.

_Table_ (Détails sur le service de), _a_, XL, et suiv.; _b_, 118.

_Tables_ au XIVe siècle, _a_, XL, LXXXIII; _b_, 116.
  --louées, _b_, 123.

_Taches._ Comment les ôter, _b_, 65.

_Taille_ (Créance ou crédit sur), _b_, 56, 86.
  --à la boucherie, 132.

TAILLEVENT (Guill. Tirel dit), _a_, XIX, XXXIII, 237.
  --Édition et manuscrits de son ouvrage, _a_, XXXV, LXXIV.
  --encore réimprimé en 1602, XXXVIII.
  --figure à tort dans le P. Anselmé, XL.
  --rappelle l’ouvrage d’Apicius, XXXVII.
  --cité, _b_, 166, 168, 172, 211, 240, 241.
  --Plats analogues à ceux de Taillevent ou copiés,
   _b_, 148, 154, 163, 166, 173, 176, 183,
   211, 212, 213, 214, 234, 242 (2), 262 (2).

_Taillis_, _b_, 92, 102, etc., 211.

_Talemouse_, _b_, 96.

_Taloches_, _b_, 119.

_Talon_ de collier, _b_, 86.

TANCARVILLE (Comte de), _a_, LXVI.

_Tanche_ de mer, _b_, 203.

_Tanche_ (Coulis de), _b_, 242.
  --de mer, 203.
  --frite, 187.
  --renversée, 187.

_Tanches_, _b_, 160.
  --à un bouli lardé, 96, 103.
  --aux soupes, 92, 93.

_Tanné_, _a_, LXXXVII.

_Tante_ (poisson), _b_, 203.

_Tapisseries_, _b_, 118. V. _Guise_.

TARDIF (Gme), cité, _b_, 316, 321.

_Tartarie_, _a_, LI; _b_, 323.

_Tarte_ de la farcissure d’un cochon, _b_, 217.
  --jacobine, _b_, 217.

_Tartelettes_, _b_, 111, 121.

_Tartes_, _b_, 101, 102.

TASON, _a_, 70.

_Taverne_ est l’église du diable, _a_, 48.

_Temple_ (Boucherie du), _b_, 83, 4.

_Temps_ pluvieux. A quoi bon, _b_, 43.

_Tenoisie_, _b_, 207.
  --(Œufs à la), _b_, 209.

_Tenue_ d’une femme dans la rue, _a_, 15.

_Térébentine_, _a_, 171.

_Termes_ de cuisine, _b_, 87, 125.

_Terre_ à foulons, _b_, 65.
  --de Beauvais, 251, 252.
  --de robes, 65.

_Tesmoings_ de lard, _b_, 270.

_Teste_ de mouton, _b_, 267.
  --de sanglier, 98.
  --du cheval, 73.

_Testes_ (Demies), dorées (de chevreaux?), _b_, 108.
  --d’oiseaux, données aux faucons, 182.

_Tétines_ de vaches, _b_, 270.

THEUX (M. de), _a_, LV.

THIBERT (Louis), _b_, 82.
  --(Famille), _ib._ et 83.

THOMAS (Jehan), _a_, LXXXII.

_Tierce_ (Heure de), _a_, 48; _b_, 305.

_Tiercelet_ d’autour et de faucon, etc., _b_, 318, 324, 325.

_Tiers_ (jeu), _a_, 72.

_Tieule._ V. _Tuile_, _b_, 94.

_Tinel_, expliqué, _a_, 163.

_Tire_ (poisson), _b_, 201.

_Tire-d’aîle_ (Vol à), _b_, 309.

TIREL (Gme). V. _Taillevent_.

_Tirer_ (Faire) l’oiseau, _b_, 319, 320, 322.

_Tiron_ (Censive de), à Paris, _b_, 253 et 254.

TITE-LIVE, cité, _a_, 70.

_Tizanne_ doulce, _b_, 237.

TOBIE (Le jeune), _a_, 91.

_Toile cirée_ aux fenêtres, _a_, 173.

_Toise_ (Vol à la), _b_, 280.

_Tombe_ (poisson), _b_, 197.

_Tombes_ de marbre noir, _b_, 257.

_Ton_, _b_, 196.

_Tonnelet_ à compote, _b_, 52, 244, 260.

_Tonnelliers_, _b_, 54.

_Torches_ à allumer, _b_, 108, 124.
  --Leur prix, 112, 113, 122.

_Tostées_, _b_, 91.

_Touailles_ changées, _b_, 107, 108.

_Tour_, prison d’Aubriot, _a_, XX.

TOUR-LANDRY (Geoffroy de là). Son ouvrage, _a_, XXXV, LXVII, 240.

_Touret_ (rouet), _a_, 237.

_Touret_, expl., _b_, 295.

_Tournay_, _b_, 195.
  --(Bailli de), _a_, LXXIX, 139; _b_, 381.
  --(Cameline de), _b_, 230.
  --(Crespes à la guise de), 227.

_Tournesis_ (Bailli de). V. _Tournay_.

_Tournesot_, _b_, 220, 225.

_Tourny_ près Vernon, _b_, 191.

_Tourte_, _b_, 218.
  --de lait, 98 (p. e. _Croutes_).
  --lombardes ou pisaines, 93, 95, etc.

_Toussaint_ (La), _b_, 43.

_Toutebonne_, _b_, 44.

_Trailles_, expl., _b_, 288.

_Tranchées_ du cheval, _b_, 78.

_Tranchoirs_, _a_, XLI, LXXXII; _b_, 105, 114.
  --englués, _a_, 171.

_Tranchoisons_ (tranchées), du cheval, _b_, 78.

_Trehoigner_, _a_, 26.

_Trente-six tableaux_ (Les), (livre sur les jeux), _a_, LXXVII.

_Trépiers_, _b_, 115, 123.

_Trésor_ de Dom Villevieille, _a_, LXXIV.

_Trésor de Santé._ Note sur ce livre, _a_, LXXV.
  --cité, _a_, XLII; _b_, 108, 183, 203, 211, 219, 228.

_Trésor de Vénerie_, _a_, LXXV; cité, _b_, 99, 129, 157, 211.

_Tressier_ (mot difficile à expliquer), _b_, 118.

_Tréteaux_ loués, _b_, 116, 123.

TRINQUANT, _a_, 151.

_Triperie_, _b_, 128.

_Tripes_ au jaunet, _b_, 149, 260.
  --Comment vendues, 129, 161.
  --de chevreaux, 227.

TRIPIER (M. Léon), _a_, LXII.

_Trois-Fontaines_ (Albéric de), _a_, LXV; _b_, 124.

_Trot_ du cheval, _b_, 75.

_Trotignons_, (_quid_?), _b_, 216.

_Truans_, _a_, 39.
  --montrent leurs plaies, _a_, 25.

_Truites_ en pasté, 190.
  --Leur queue, meilleure partie, 190.
  --Leur saison, _a_, LXXXIV; _b_, 90, 190.
  --vermeilles, 190.

_Trumeau_ de bœuf, _b_, 86, 109; au jaunet, 149.
  --de veau, 109.

_Trumel._ V. _Trumeau_.

_Tubesches_, _b_, 100.

_Tuile_ de chair, _b_, 94, 96, etc., 170.
  --d’écrevisses, 152.

_Tumbe_ (poisson), _b_, 197.

_Tumbes_ de marbre, _b_, 257.

_Turbos_, _b_, 203.
  --à la sauce verte, _b_, 97, 103.
  --à la soucie, _b_, 100, 102.
  --au soucié, _b_, 102.

TURGOT (M. Et.). V. _Plan_.

_Turkestan_, _a_, LI.

_Turtres_, _b_, 256.
  --Comment les garder et les manger, _b_, 261
  --non vidées, 183.


U

_Ueil_ (œil), d’un fruit, expl., _b_, 247.

_Université_ de Paris. Vers pour elle contre Aubriot, _a_, LXXXVII.

_Usure_, _a_, 46.

UXELLES (Le Mis d’), gourmet, _a_, XXXVIII.


V

_Vacher_, _b_, 57.
  --(Arnoul le), 62.

_Vachers_ savent où est le gibier, _b_, 301.

_Vaches_, _b_, 62.
  --(Oreilles de), nécessaires au serviteur, 23.
  --(Tétines de), 270.

_Vaine_ gloire, _a_, 30.

_Vair_ (Menu), _b_, 118.

_Vaisselle_ de cuisine, combien louée, _b_, 124.
  --de cuisine, d’argent, _a_, XLI.
  --d’étain, louée, 115, 123.
  --Où placée, _a_, XL.
  --Par qui serrée, _b_, 117.
  --volée en 1406, 62.

_Vanité_, _a_, 41.

_Vanneaux_ (Plumes dites). Ce que c’est, _b_,
   89, 294. V. _Couteaux et Serceaux_.

VARENNE (La), _a_, XXXVIII.

_Variétés historiques_, _a_, LXXV; _b_, 80.

_Varlet_ pour tirer le vin, _b_, 117.
  --prêchant à table (proverbe), 70.

_Varlets_ d’hôtel, _b_, 56.
  --du duc de Berry. Leur nourriture, 85.
  --tranchans, _a_, 163.

_Veau_ (ainsi écrit), 186, 221. V. _Veel_.

_Veaux_ consommés à Paris, _a_, XLIII; _b_, 82 et suiv.

_Veel_, _b_, 92, 160, 168.
  --aux herbes, 150.
  --en gravé ou seymé, 151.
  --en manière d’esturgon, 200.
  --en pasté, 186.
  --entrepelé, 200.
  --(Fraise et issues de), 128.
  --(Prix du), 221.
  --rosti, 179.

_Veiller_ l’oiseau, _b_, 314, 315; sans se fatiguer trop, 315.

_Venaison._ V. _Venoison_.

_Vendangeurs_, _b_, 54.

_Vendoises_ (goujons?), _b_, 194.

_Vendredi absolu_, _b_, 85.

_Vénerie_ peu convenable aux femmes, _a_, XLIX.

VENETTE (Jean de), _a_, LXXVI, 148; _b_, 380.

_Vengeance_ défendue aux domestiques, _b_, 60.

_Venise_ (Douceur d’un mari de), _a_, 182.

_Venneaulx_ (plumes), _b_, 89, 294.

_Venoison_, _b_, 93, 94, etc., 121.
  --à la queue de sanglier, 100.
  --à la froumentée, 101.
  --aux soupes, 94.
  --Comment apprêtée, 129, 130, 156.
  --de cerf, 154.
  --d’ours (en bœuf), 155, 179.
  --en pasté, 155, 185.
  --Par qui vendue, _b_, 109, 110.
  --rôtie, 180.
  --salée, 155, 157.
  --vendue au pied quarré, 109.

_Vent_ emporte l’épervier, _b_, 302, 317.
  --nourriture du pluvier, 183.

_Ver_ (vérat), mangé comme sanglier, _b_, 259.

_Vérés_, expl., _b_, 300.

_Verge_ d’un jaugeur, _b_, 126.

_Verjus._ V. _Vertjus_.

VERJUS (Gme Lefèvre, dit), _a_, XL; _b_, 81.

_Vermandois_, _a_, LXXIX.

_Vernon_, _a_, 149, 152.

_Verre_ (Bassins de), _b_, 252.
  --moulu, jeté dans l’œil du cheval, 78.
  --(Prix du), _a_, LXXXII, 173, 174.

VERRIER (Le), de la Conterie, _a_, LXVI.

_Verrières._ V. _Verre_.

_Vers._ D’où naissent, _b_, 65.

_Vertjus_, _b_, 66, 67.
  --à Noël sur la treille, 249.
  --à visiter le soir, 71.
  --Comment mélangé, 232.
  --(Consommation énorme de), 249.
  --de blé, 229.
  --de bourgeon de vigne, 229.
  --d’oseille, 111, 229.
  --Grains de vertjus sur un potage, 161.
  --le meilleur, 232.

_Vertus_ (Les sept), _a_, 28.

_Vêtemens_, _a_, 13. (Voir les noms de chaque vêtement.)

_Vétir_ (Se bien), _b_, 26.

_Veufs_ mariés en deuil, _b_, 123.

_Veuve._ Son triste état, _a_, 168.

_Viande_ vendue au morceau, _b_, 132.
  --vendue par semaine dans un étal, _a_, XLVI.
  --Comment la choisir, _b_, 87.

_Viandier._ Ce que c’est, _a_, LXXVI; _b_, 80.
  --Son importance, _a_, XXXV, XXXIX.

_Viandier_ de Saint-Lô, cité, _a_, XXXV, XLII.

_Vices_ de la femme à cacher, _a_, 181.
  --du mari aussi, 178.

_Videcoqs_ (bécasses), _b_, 183, 311.

_Vieil_ homme, vindicatif, _a_, 265.

_Vielz-sucre_, _b_, 92.

_Vierge_ (La sainte). Prière à elle adressée, _a_, 11.
  --Son obéissance, 128.

_Vieux_ aiment les jeunes femmes, _a_, 158.

_Vigne_ (Bourgeon de), en vertjus, _b_, 229.
  --entée sur cerisier, 51.
  --gêne la chasse, 308.
  --Quand plantée, 44.

_Vignerons_, _b_, 56.

VILAIN (L’abbé), cité, _b_, 113.

_Village_ (Vie au), _b_, 62.

VILLARS (M. de), _a_, LXXV.

_Villedieu_, _a_, LXXXVII; _b_, 251.

VILLEOILLE (M. A. de La), cité, _a_, XXXV.

_Villeneuve-lès-Avignon_, _a_, LXXXI.

VILLEVIELLE (Dom), _a_, LXXIV.

_Vin_ aux chevaux (eau), _b_, 38.
  --à visiter le soir, 71.
  --blanc devenu vermeil, 249.
  --capary, _a_, XXXIX.
  --Comment conservé et servi, _a_, XLI; _b_, 117.
  --Comment séparé de l’eau, 259.
  --Comment soigné et guéri, 67.
  --cuit, 260.
  --de Beaune, 38, 273.
  --de divers lieux, 38.
  --des domestiques, 70.
  --(Espèces de), 109.
  --et épices, _a_, XLIII; _b_, 121, etc.
  --(Fleur du), 260.
  --franc, 236.
  --plain, 174, 193.
  --Pour le faire fort, 68.
  --Tirer le vin sans lui donner vent, 69.

_Vinaigre_ (Provision de), _b_, 268.

_Vinaigrette_, _b_, 108, 164.

_Vincennes_, _a_, 135.

VIOLE (Famille), _a_, 151.

_Violette_, _b_, 43, 45, 113, 114.
  --mise sur de la gelée, _b_, 221.

_Virginité._ Son prix, _a_, 75.

_Visage_. Cacher son visage à l’oiseau, _b_, 308.
  --Épervier y sautant, 293.

_Vitres._ V. _Verre_.

VITRY (Michelle de), _a_, XXVI.

_Vive_ (poisson), _b_, 201.

_Vives_ (avives), maladie du cheval, _b_, 78.

VIVONNE (Armes de), _a_, LVIII.
  --(Hughes de), 95.

_Voirre._ V. _Verre_.

_Vol_ de l’épervier (Obstacles au), _b_, 302,
  --pour champs, _a_, LXXXVIII.
  --premier de la perdrix, rapide, b, 309. V.
   _Faisan_, _Perdrix_, _Tire d’aîle_, _Vols_, _Voulon_, etc.

_Volaille_, _b_, 167, 211, 215, 216.
  --en gravé ou seymé, 151.
  --(Hochepot de), 163. V. _Comminée_, _Poulaille_.

_Voler_ pendant combien de temps en septembre, _b_, 310.

_Voleurs_ de chiens, _b_, 281.
  --d’oiseaux, 285.

_Vols_ de l’épervier. Lesquels sont possibles, _b_, 310. V. _Vol._

_Voulon_, expl., _b_, 280, 309.


W

_Wertaing_, _a_, LXXX.

_Windesore_, _a_, LXXXII.


Y

_Yenville_ en Beauce, _a_, 149.

_Yeux_ de l’épervier, _b_, 293, 294, 299.
  --du cheval, 73.

YOLENT le Pelletier, _b_, 52.

_Ypocras_, _a_, XLIII; _b_, 92, 94, etc., 107, 121, 122, 273.
  --hors de saison en hiver, 108.
  --(Pouldre d’), 248 (_bis_).
  --(Prix de l’), 112.

YSMAEL, _a_, 83, 84.

_Ysope_, _b_, 49.

_Yssue._ V. _Issue_.

_Yvresse._ V. _Ivresse_.


Z

ZELPHAN, _a_, 86.


FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES.



SUPPLÉMENT AUX CORRECTIONS.


Tome I, p. VI, l. 13, au lieu de _philantrophie_, lisez
_philanthropie_.

Tome I, p. XXI, ligne 16 de la note, avant _J’ai
appris_, ajoutez:

     Dans un mémoire très-curieux sur le meurtre du duc d’Orléans, lu à
     l’Académie des Inscriptions en 1748 (tome XXI, p.
     519), le savant Bonamy a parlé en passant de cette maison et dit
     qu’on voyoit encore, lorsqu’il écrivoit, un grand corps de logis
     de l’hôtel d’Aubriot. Il est fâcheux qu’il n’ait pas donné plus de
     détails sur ce sujet.

Tome I, p. XLVII, note 1, _Ne pour roi, ne pour roc._

     Cette expression se trouve encore dans les contes de Bonaventure
     des Périers (Conte 125. Des épitaphes de l’Arétin... et de son
     amie Madelaine)... _Étant du tout enclin à la médisance, il
     n’épargnoit (comme on dit en commun proverbe), ni roi ni roc._

Tome I, p. LVI, ligne 4 de la note.

     Au lieu de: Après la mort de Charles V, lisez: Au commencement du
     XVe siècle, surtout.

Tome I, p. LXVI, ligne 11, note sur Ayala. L’auteur
avoit été en France, _ajoutez_:

     En 1378. Il conclut à Paris, comme plénipotentiaire du roi Jean
     de Castille, un traité avec la France, le 4 février 1378-9.
     (_Histoire de du Guesclin_, 1666, in-fº, p. 403.) Il est nommé
     dans cet acte messire Pierre Louppe d’Ayalla, chevalier et
     banicour (_vexillarius_) du roi de Castille, gouverneur de la
     province de Guipuscoa (_sui presidis in provincia Guispuque_).
     Bureau de la Rivière étoit un des plénipotentiaires françois.

Tome I, p. LXXVI, l. 3, Venette..., _avant_ M. Géraud,
_ajoutez_:

     La Curne de Sainte-Palaye, dans deux mémoires (Acad. des Inscr.,
     VIII, 570 et XIII, 520).

Tome I, ligne 6, au lieu de _semble_, lisez _semblent_.

Tome I, p. LXXVII et 76, passages relatifs aux reines de
France.

     L’étiquette de la cour était bien changée à l’égard des reines au
     XVIe siècle. L’auteur d’un journal de l’année
     1562, qui a été imprimé dans la _Revue rétrospective_ (1re
     série, tome V), raconte que le prince de Condé étant sur le point
     de traiter avec la cour au commencement de juillet 1562, l’amiral
     de Coligny et son frère d’Andelot demandèrent à se retirer hors de
     France jusqu’à la majorité du roi. La reine Catherine de Médicis
     eut, le 5, le 6 ou le 7 juillet, une entrevue avec l’amiral près
     d’Orléans, dans le but de changer cette détermination. L’auteur
     du journal, qui fréquentait la cour puisqu’il rapporte en deux
     endroits les paroles que lui adressèrent directement la reine mère
     et le roi de Navarre, raconte (p. 178) que l’amiral ayant mis pied
     à terre pour faire la révérence à la reine, cette princesse _le
     recueillit humainement et le baisa à la bouche comme les reines de
     France ont accoutumé de baiser les grands officiers du roi_.

Tome I, p. LXXX, ajoutez à la note sur le bailly de
Tournay:

     Messire Tristan du Bos fut, suivant Froissart (I, 374) et l’auteur
     de la chronique Mss du Roi 9656 et 10297, chargé de garder le
     roi de Navarre, Charles le Mauvais, dans la tour d’Arleux, en
     1356. L’auteur de cette chronique dit que Tristan, qu’il qualifie
     de _chevalier de renom_, fut pris à Amiens par la bourgeoisie de
     la ville (en 1357) et forcé de délivrer Charles le Mauvais. Selon
     d’autres auteurs cette délivrance eut lieu à force ouverte et à
     main armée.

     Il fut bailli de Troyes et de Meaux en 1360 et 1362 et chargé
     de prendre possession des forteresses occupées par les Anglois
     en Champagne, Brie, etc., bailli de Vermandois en 1373, maître
     des requêtes et réformateur de la province de Reims en juin 1383
     (Titres de Clerambaut).

     Le même Tristan du Bos est encore cité dans Froissart à l’occasion
     de la position qu’il occupa à Tournay. Froissart raconte (éd. du
     Panthéon, II, 223), que le roi se préparant à aller en Flandre,
     envoya à Tournay, en octobre 1382, les évêques de Beauvais,
     d’Auxerre et de Laon, messire Guy de Honcourt et _messire Tristan
     du Bois_, comme commissaires pour traiter avec les Flamands et les
     empêcher de s’allier aux Anglois. On trouve dans cet historien
     le texte de la lettre écrite le 16 octobre par les commissaires
     à Philippe d’Artevelt, et la réponse de celui-ci en date du 20.
     Il ajoute que cette réponse fut communiquée par messire Tristan
     du Bois, _gouverneur de Tournay_, aux prévôts et jurés (_voy._ t.
     I, p. 139), et que les commissaires allèrent ensuite rejoindre la
     cour à Péronne.

     Tristan du Bos fut encore, en 1389, un des trois commissaires
     chargés d’instruire le procès d’Audoin Chauveron, prévôt de Paris
     (_Acad. des Inscr._, XX, 492). Il a du mourir fort âgé, s’il est,
     comme je pense, le même qui gardoit le roi de Navarre en 1356.

     Henri le Masier (_voy._ t. I, p. 140), nommé en 1388 bailli de
     Tournay, et qui est celui cité dans le _Ménagier_, si ce n’est
     pas Tristan du Bos, étoit, en 1399, chevalier, sire de Beausart,
     maître d’hôtel du roi et encore bailli de Tournay (Titres de
     Clerambaut).

Tome II, p. 118, note sur Jean de Hautecourt, ajoutez:

     Je serois porté à croire que ce Hautecourt étoit avocat au
     parlement et que c’est lui qui est cité (malgré la différence des
     noms qui peut tenir à une écriture négligée) dans les registres du
     parlement (Matinées III, 66 vº, 4 février 1400-1), comme avocat,
     et ayant obtenu un congé de huit jours pour aller à Étampes. Son
     nom y est écrit Me Jehan de _Hanucourt_.

Tome II, p. 217, note 1, au lieu de _du gingembre_, lisez:

     Peut-être de la cloche de gingembre, peut-être aussi de la loche
     (poisson).


ACHEVÉ D’IMPRIMER, A PARIS, CHEZ CRAPELET ET LAHURE,
LE XXVI NOVEMBRE MDCCCXLVII.


NOTES:

[1] Voir la Notice ci-après, page 1.

[2] La Société des Bibliophiles ne publiant plus de volumes de mélanges
dans lesquels les notices nécrologiques de ses membres prenaient
naturellement place, a décidé que cette notice sur un de ses membres les
plus illustres et les plus regrettés serait imprimée en tête de
_Ménagier de Paris_, qui était déjà sous presse à l’époque de la mort de
M. le duc de Poix. (_Note de la Société._)

[3] Il était de l’Académie française, et particulièrement occupé de
grammaire.

[4] Il prit ce nom après la mort de son père et de son frère aîné, qui
l’avaient porté.

[5] Le 12 mai et jours suivants. Elle produisit en cinq vacations 3188
livres sterling 14 sch. 6 d. Le catalogue, contenant 952 numéros et 72
pages, est intitulé: _Catalogue of the splendid library (imported from
Paris) of a distinguished collector; which will be sold by auction by
Mr. Evans_. 1835, in-8º.

[6] La seconde bibliothèque de M. le duc de Poix, formant un ensemble de
plus de douze mille volumes, se trouve maintenant à Mouchy le Châtel
chez Mme la vicomtesse de Noailles, M. le duc de Poix ayant disposé par
testament de sa bibliothèque en faveur de son petit-fils, possesseur
futur de Mouchy le Châtel.

[7] C’est la partie des Chroniques de Saint-Denis qui traite des règnes
de Jean II et de Charles V (tome VI de l’édition donnée par M. Paris).
Voir, à se sujet, le mémoire de M. Lacabane, t. II, p. 57 de la
bibliothèque de l’École des chartes.

[8] Jean de Brie, natif de Villiers sur Rongnon, près Coulommiers, qui
écrivit en 1379 le traité du _bon Bergier, que_, dit-il, _il n’eust
voulu bailler et manifester à nul autre qu’au roy_ (éd. Ve Trepperel et
J. Janot, s. d. fº A 8 vº). Il étoit alors au service de Jean de
Hestomesnil, conseiller au parlement en 1373 et ensuite maître des
requêtes, mort au commencement de mars 1380-1, qui a pu l’aider à écrire
ce traité dont le style et les pensées sont remarquables. Au reste, Jean
de Brie n’étoit plus berger quand il écrivit son livre.

[9] Voy. ci-après, p. XXXV.

[10] T. I, p. 148.

[11] _Ibid._, p. 93.

[12] On trouve dans tous les historiens la mention des services
qu’Aubriot rendit à la ville de Paris pendant sa prévôté, ainsi que le
récit de sa disgrâce. J’aurai cependant occasion de parler de lui avec
détail dans mon mémoire sur les Maillotins (voir t. I, p. 136). Je
préciserai et j’appuierai de faits inédits les causes de ses malheurs.
En attendant, je crois devoir consigner dans cette note l’extrait d’un
récit contemporain de sa délivrance, que j’ai rencontré dans mes
recherches, et qui donne sur le procès, la fuite et le lieu de la
résidence de cet homme éminent des renseignemens qui paroissent avoir
été inconnus à tous les historiens. Voici ce curieux document: «.....Il
a commis hérésie et en fu en procès devant l’évesque et devant le
maistre des hérites. Avant la sentence il supplia à l’ecglise qu’il fust
réintégrez, et y fu receus et fu absols: et fu déclaré qu’il avoit esté
hérites, et pour pénitence on li assigna les prisons de l’évesque de
Paris; et pour la grant repentance qu’il avoit, l’évesque et le maistre
des hérites le relevèrent de ce qui (_qu’ils_) porent et se li
réservèrent la miséricorde de sainte Ecglise, et li ordenèrent pour
prison le plus biau lieu de la tour de la maison épiscopal.» (_C’est
cette grande tour quarrée, crénelée, qu’on voit dans deux vues de
l’église Notre Dame et de l’évêché, gravées par Israël Silvestre, et
surtout dans la planche ayant quatre vers au bas: D’un costé, vous
voyez, etc._) «Il ala voluntairement en prison pour faire sa pénitence
et y demeura l’espace de dix mois. Le jour que les gens de ceste ville
(_Paris_) furent esmeus il alèrent en la maison de l’évesque, et par
force et violence rompirent les prisons. Et quant le giolier dist à
messire Hugues que les gens de la ville l’estoient allé quérir, il dist
que ne s’en iroit point, et li demanda une hache que tenoit; et le
giolier li dist que ne li en bailleroit point, et que se il faisait
semblant de soy mettre à défense, il les feroit tuer. Et finablement les
gens de ceste ville le prindrent et mittrent sus un petit cheval et le
menèrent en sa maison et disoient que le feroient leur capitaine. Après,
il s’en volt retorner en prison, mais il fu conseillez par aucuns de ses
amis qu’il s’en alast devers le pape.... Le suer (_soir_) il se parti de
son hostel et se fist passer l’eaue par deux enfans», (_il est
remarquable de voir secondé dans sa délivrance par deux enfans l’homme
qui avoit rendu aux juifs les enfans que leur avoit enlevés le peuple de
Paris_), «et à peines qu’il ne fu noiez. Il estoit malades et s’en ala
par Bourgoigne, non pas par aucunes de ses maisons, et demoura malades
seize jours à Mucé en Auxois» (_Mussy-la-Fosse, anciennement du
bailliage de Semur-en-Auxois plutôt que Mussy situé à 7 lieues de
Mâcon_), «et de là ala à Mascon, et illec aussin demoura malades et se
fit mettre en l’eaue, et ala jusques à Avignon. Il ne pot pas parler ne
si tost avoir assès (_accès_) au pape, mais il parla à un cardinal et li
dist et exposa tout ce que dit est et se soubmist en l’ordenance du
pape. Le pape et le collége li ordenèrent lieu où il seroit et fu bonne
pièce à Sommières» (_petite ville entre Montpellier et Nîmes. Il y avoit
aussi un lieu ainsi nommé près Saulx en Bourgogne_), «et a tousjours
esté et est par l’ordenance du pape et du collége, etc.» Il est bon de
savoir que ce récit présente la version d’Hugues Aubriot lui-même, et il
semble permis de douter qu’il eût si grande envie de rester dans les
prisons de l’évêque.

J’ai parlé avec détail, t. II, p. 254, de la maison qu’Aubriot habita
rue de Jouy, et j’ai donné la suite des propriétaires de cette maison
(ultérieument rebâtie) de 1369 à 1573. J’ai appris depuis qu’elle avoit
appartenu, à la fin du XVIIe siècle, à M. Nicolas de Jassaud, sieur de
Lalande, conseiller d’État, et à Marie de Flandre, sa femme: puis à leur
fils, M. Augustin Nicolas de Jassaud, marié en 1697 à Marie-Aimée Lottin
de Charny. Une de ses filles, Angélique-Geneviève de Jassaud, la
possédoit en 1772, qu’elle épousa M. Macé, secrétaire du roi. Cette dame
mourut en 1776, et légua à ses deux nièces cette maison, connue encore
dans le quartier sous le nom d’hôtel Jassaud. Elle appartient
aujourd’hui à M. de Courmont, conseiller-maître à la cour des comptes,
qui a bien voulu me la faire voir en détail. Il existe encore dans une
pièce du rez-de-chaussée quelques restes d’ornemens paroissant remonter
au règne de Louis XV. Les lettres A. N. D. J. entrelacées
(Augustin-Nicolas de Jassaud) se font voir au plafond. Il y a sous la
cour deux étages de caves. Cette maison été divisée au XVIIe ou au
XVIIIe siècle; la partie qui fait le coin de la rue Percée paroît être
depuis longtemps une propriété distincte.

[13] T. II, p. 85 et 86.

[14] T. I, p. 135.

[15] Mémoriaux de la chambre des comptes.

[16] Voir T. I, p. 67.

[17] Charles, duc de Guyenne, né le 6 février 1391 (mort le 11 janvier
1400); Isabelle, depuis reine d’Angleterre, née le 9 novembre 1389, et
Jeanne, depuis duchesse de Bretagne, née le 24 janvier 1390. Elle eut
encore une autre fille (Marie, religieuse à Poissy) le 24 août 1393.

[18] T. II, p. 142. Voy. ci-après p. XXXII, note 3.

[19] T. I, p. 3 et 4.

[20] _Ibid._, p. 2.

[21] T. I, p. 3, et t. II, p. 53.

[22] T. II, p. 71, etc.

[23] T. II, p. 61 et suivantes.

[24] T. II, p. 59.

[25] T. I, p. 3.

[26] T. I, p. 125.

[27] T. I, p. 186.

[28] Poules farcies, t. II, p. 269.

[29] J’aurois bien voulu trouver parmi les hommes notables appartenant à
la haute bourgeoisie ou à la magistrature un personnage dont la vie
reproduisît les circonstances qui nous sont connues dans la vie de
l’auteur; plusieurs noms se sont présentés à mon esprit: malheureusement
mes espérances soutenues plus d’une fois par la découverte d’une série
de similitudes, ont toujours fini par être définitivement déçues.
C’est-ainsi qu’après avoir cru longtemps pouvoir présenter une
conjecture raisonnable en attribuant la composition du _Ménagier_ à Sire
Jehan de Fleury dernier prévôt des marchands en 1383 et conseiller au
parlement, j’ai été subitement arrêté par la découverte de la date de sa
mort arrivée en 1389, avant l’époque où cet ouvrage a sûrement été
écrit.--L’intimité dans laquelle le duc de Berry admettoit l’avocat Jean
Jouvenel, père de l’historien, m’avoit donné aussi quelques doutes à son
égard, mais, Jouvenel étant mort en 1431 ne peut guère s’être trouvé à
Melun en 1358, et ce qui rend surtout impossible de lui attribuer le
_Ménagier_, c’est que Michelle de Vitry, sa femme, avoit ses parens
vivans à Paris en 1393, et n’étoit pas d’ailleurs de meilleure maison
que lui.--La position de Jean le Flament, trésorier des guerres en 1371,
et des aides pour la guerre de 1388 à 94, présente aussi plusieurs
analogies avec celle de l’auteur du _Ménagier_, mais ou j’ignore le nom
de sa femme, ou si c’est lui dont il est parlé comme alors décédé, dans
les registres du parlement de Poitiers (plaidoy. du 30 juillet et arrêt
du 17 août 1425), il avoit épousé Marie de Montgison (Montgiron dans
l’arrêt), _damoiselle_. Or Montgison est Montgeron près de Paris, et je
n’en vois pas d’autre existant dans le royaume (voir Expilly). Elle
étoit donc aussi parisienne; ce qui ne concorde pas avec les paroles de
l’auteur (t. I, p. 4).

[30] Il avoit lu tous les ouvrages suivans et en possédoit une grande
partie: la Bible, la Légende dorée, saint Jérôme (_la Vie des Pères_),
saint Augustin, saint Grégoire, l’Histoire sur Bible (_de Pierre Le
Mangeur_), Tite Live, le Roman de la Rose, l’historien Josèphe, le
Catholicon, le Décret (_de Gratien_), l’histoire de Grisélidis par
Pétrarque, les sept Sages de Rome, le Songe de Scipion (par Cicéron,
commenté par Macrobe), le Jeu des échecs moralisé de J. de Cessoles, le
Chemin de pauvreté et de richesse de J. Bruyant, Mellibée et Prudence.
On trouve encore dans son livre la mention du philosophe Cerxès, de Paul
Diacre et du philosophe Bertran le Viel; mais il les cite d’après
d’autres auteurs. Le premier de ces ouvrages n’a peut-être jamais
existé.

[31] Au moins dans sa famille. Voir t. I, p. 156.

[32] Voir surtout t. II, p. 53.

[33] T. I, p. 75 et 76.

[34] Je l’ai trouvé mentionné avec cette qualité depuis que j’ai fait la
note sur lui, t. II, p. 116: Voir les _corrections et additions_.

[35] Dans les registres du conseil surtout, quand la cour compensoit les
dépens.

[36] On en verra la preuve dans l’histoire de Jeanne Hemery et de
Regnault d’Azincourt, publiée par M. de Lincy dans la bibliothèque de
l’École des Chartes (2e S., t. III, p. 316). On en peut dire autant de
certains accords; tel est celui de Jean de Hautecourt, donné t. II, p.
119.

[37] T. I, p. 135.

[38] T. I, p. 44.

[39] T. I, p. 156.

[40] T. II, p. 54.

[41] Que diroient vos amis, _que présumeroit votre cœur_, quant il s’en
apercevroit? (T. I, p. 130.)--Avec son mari, l’en ne doit mie besongner
par aguet ou malice, mais plainement et rondement, cœur à cœur (_ibid._,
p. 158).

[42] Ce compte, qui n’est plus connu que par la mention qu’en a
consignée le père Menestrier, t. II, p. 175 de sa _Bibliothèque
instructive_, ne commençoit qu’à février 1392-3. Le témoignage du
_Ménagier_ composé entre juin 1392 et septembre 1394 (voy. p. XXII),
pourroit donc être antérieur de quelques mois, et s’il est postérieur,
il l’est de bien peu.

[43] Il faut tenir compte, dans ces prix, non-seulement de la différence
considérable de poids qui existoit entre les monnoies de la fin du XIVe
siècle et celles du même nom employées depuis (le marc d’argent, qui
valoit alors 6 livres, valant aujourd’hui 52 francs), mais encore de la
dépréciation de l’argent. Un setier de blé (un hectolitre et demi
environ), qui se vend aujourd’hui, dans les années ordinaires, environ
30 francs, coûtant alors moyennement 16 sous, on peut multiplier par 35
ou 40 les chiffres énoncés, pour avoir idée de ce qu’ils représentoient
pour les contemporains.

[44] J’aurois pu retrancher les deux derniers de ces épisodes sans nuire
beaucoup à l’intérêt du livre, mais j’ai mieux aimé publier le
_Ménagier_ tel que son auteur l’avoit conçu, et sans être _estrippellé_,
comme lui-même aimoit à donner les ouvrages des autres. (Voy. t. II, p.
3.)

[45] On lit (t. II, p. 66), après une recette pour ôter les taches, ces
mots que j’ai mis entre parenthèses: _ce que je ne croy pas_.

[46] Voir t. II, p. 124, l’endroit où il est parlé des _additions_
faites au livre: p. 129, le passage relatif à la signification du mot
_fressure_; même volume, p. 93, sa remarque sur les _tourtes pisaines_,
appelées ailleurs _tourtes lombardes_, et aussi les passages en
italiques, p. 164, 166, 167, etc.

[47] Un passage où il est parlé des choux, t. II, p. 142, dans lequel il
est dit: _et commence à iceulx pour ce que ce sont de_ CELLE _année les
premiers crus_, scilicet _puis avril, et puis_ VA _en descendant vers
vendenges, Nouel et Pasques_, pourroit faire penser que l’auteur s’est
servi, au moins pour une partie du _Viandier_, de notes faites exprès
pour lui et l’année même où le _Ménagier_ a été écrit. En effet, le mot
_va_ prouve que _commence_ n’est pas là à la première personne et que
l’auteur ne parle pas pour lui. Donc, puisqu’il remarque que le
rédacteur primitif de ce passage règcelle ale l’ordre de son discours
d’après le mois où commençoit l’année actuelle (_celle année_), il en
résulte que la note ou l’ouvrage consulté avoit été rédigée cette même
année, et alors, à moins de supposer une coïncidence fortuite bien moins
probable au XIVe siècle qu’elle ne pourroit l’être aujourd’hui, on
seroit porté à conclure que les élémens de cette partie du travail de
l’auteur lui auront été fournis par quelque queux ou écuyer de cuisine
profondément instruit des détails de son art.--Je suis toutefois loin de
rien affirmer à cet égard, et je remarque même que l’auteur ayant dit
dans le _traité de l’Épervier_ (p. 303), l’_alouette de cest an_, pour
l’alouette de l’année, il se pourroit que _celle année_ fût de même
employé pour _l’année_ dans le passage qui donne lien à cette note, et
qu’Avril eût été désigné de préférence, comme étant le mois le plus
habituellement le premier de l’année, au moins le second, et en tout cas
celui où ces choux commençoient à croître.

[48] Jean Bonfons imprimoit, en 1566, _le Voyage de Charles IX_, et son
fils, Nicolas Bonfons, imprimoit en 1574, les _Nouveaux Comptes
moralisés_, à la même adresse que celle où avoient demeuré son père Jean
Bonfons et sa mère, veuve de Jean. Lottin s’est trompé quand il fait
vivre Jean Bonfons en 1606.

[49] Voir sur Guillaume Tirel dit Taillevent, queux de Charles V en 1361
et écuyer de cuisine de Charles VI en 1386, l’article que j’ai publié
dans le _Bulletin_ du bibliophile de Techener, nº de juin 1843. M. de la
Villegille, qui prépare une édition critique réellement la première de
ce curieux ouvrage par la manière dont elle sera exécutée, a bien voulu
me prêter pendant toute la durée de mon travail les copies faites par
lui des deux manuscrits de Taillevent. Il existe dans les archives de la
préfecture de la Manche à Saint-Lô un registre des recettes de la
baronnie de la Haye du Puis pour 1454 à la fin duquel est un _Viandier_
(voir le _Nouvelliste de la Manche_ du 3 février 1847) qui paroît être
une leçon de Taillevent. Je n’en ai eu connoissance qu’après
l’impression de la partie culinaire du _Ménagier_. Il existe encore sur
le même sujet un volume que j’aurois bien voulu consulter, c’est la
_Fleur de toute cuisine... revue et corrigée par Pierre Pidoux_. Paris,
Al. Lotrian, 1543, in-16 goth., mais je n’ai pu le voir.

[50] Ce seigneur qui florissoit en 1350, a écrit en 1372 pour
l’éducation de ses filles un Traité assez célèbre dont les deux imprimés
sont véritablement introuvables et de plus assez défectueux; je
donnerai, soit pour la Société des bibliophiles, soit pour mon propre
compte si les autres publications entreprises par la société ne lui
permettoient pas de s’occuper de celle-ci, une édition nouvelle de ce
livre sur le plan et dans la forme de la présente édition du _Ménagier
de Paris_, et j’ai déjà recueilli quelques renseignemens sur l’auteur,
sa famille et les personnages qu’il cite.

[51] Amsterdam, 1709, in-8º. Il prouve que ce traité ne peut avoir été
écrit par _Marcus Apicius_, fameux gourmand vivant sous Tibère et dont a
parlé Athénée (ce qui n’a pas empêché plusieurs auteurs modernes
d’attribuer à M. Apicius ce traité qu’ils n’ont sûrement pas ouvert); et
d’après certaines expressions employées dans l’ouvrage, il pense qu’il
doit avoir été écrit par un affranchi africain. Le nom d’Apicius
_Cœlius_ peut, suivant lui, être un pseudonyme destiné à rappeler
_Marcus_ Apicius.

[52] Je ne prétends pas dire cependant qu’il n’y ait pas eu au XVIe
siècle surtout quelques modifications au service, quelques introductions
de plats nouveaux. On peut voir sur ce sujet Legrand d’Aussy et un
passage de l’apologie pour Hérodote, d’Henri Estienne, non cité par
Legrand, t. II, p. 16 de l’éd. de 1735. Au reste, Henri Estienne avance
bien des choses démenties par le _Ménagier_. (Il dit par exemple qu’on
jetoit autrefois les issues du veau et du mouton, et qu’on ne mangeoit
pas de perdreaux.)

[53] Boileau dans sa satyre III (1665), tourne en ridicule l’usage des
épices.

[54] Il avoit été pendant dix ans écuyer de cuisine de Louis Chaalon du
Blé, marquis d’Uxelles, tué en 1658 au siége de Gravelines, père du
maréchal, et ayant obtenu lui-même un brevet de maréchal de France. Il
est dit dans la dédicace de ce livre, adressée à ce seigneur, que sa
table avoit été _chérie_ à Paris et dans les armées par les princes, les
maréchaux, etc.

[55] Il faut au reste remarquer que Taillevent étoit réimprimé en 1602 à
Lyon et non à Paris, et il se pourroit que Paris eût été plus _avancé_
que Lyon en fait de cuisine.

[56] On comprendroit bien mieux les ouvrages littéraires écrits au moyen
âge si l’on pouvoit connoître tous les usages de la vie commune à cette
époque, tous les noms techniques des objets qui frappoient journellement
les regards des auteurs et de leurs contemporains. Penseroit-on qu’il
pût être utile de consulter un _Viandier_ pour lire un Noël du XVIe
siècle? Voici cependant un Noël tiré du recueil de _Lucas Le Moigne,
curé de Notre-Dame du Puy la Garde en Poitou_ (volume unique appartenant
à notre confrère M. Cigongne), dont la lecture est singulièrement
éclaircie par celle du _Ménagier_. Ce Noël se chantoit sur l’air de
l’hymne: _Conditor alme siderum_.

    _Conditor_ le jour de Nouel
    Fist ung bancquet le nompareil
    Que fut faict passé a longtemps
    Et si le fit à tous venans. Nouel.

    Il y avoit perdris, chappons,
    Oyseaulx saulvaiges, des hairons:
    Levraulx, congnilx, aussi faisans,
    Pour toutes manières de gens. Nouel.

    Une grant hure de sanglier,
    Ypocras, aussi le mestier,
    Vin Capary et faye Montjeau
    Pour enluminer leur musseau. Nouel.

    Biscuyt, pain d’orge et gasteaulx,
    Fouace, choysne, cassemuseaulx,
    pain de chappitre et eschauldez
    Mangerez si le demandez. Nouel.

    Aussi y avoit aulx, oignons,
    Et ung pasté de potirons
    Avec les choux-maistre-René
    Et des lymatz au chaudumé. Nouel.

    Il y vint ung bon bouteiller
    Qui ne cessa onc de verser,
    Tant que ung barault il aseicha
    _In sempiterna secula_.

    _Amen._ Nouel.


[57] Il y a dans les _Mémoires pour servir à l’Histoire de France et de
Bourgogne_, Paris, 1729, in-4º, IIe partie, p. 58, un article curieux
sur le queux du duc de Bourgogne qui auroit été supérieur aux écuyers de
cuisine; mais ce queux me paroît être un officier dans le genre du
_grand queux de France_, non aussi important toutefois. Dans les
ordonnances de 1386-7 et 1388-9 sur l’organisation de la maison du roi,
les écuyers de cuisine sont nommés avant les simples queux. (Voir sur
les grands queux de France l’_Histoire généalogique des grands officiers
de la couronne_, t. VIII, p. 825, où se trouvent aussi des premiers
queux et même de simples queux qui n’auroient pas dû y figurer, et entre
autres Taillevent et Guillaume Lefèvre, dit Verjus. V. t. II, p. 81 du
_Ménagier_.)

[58] Je crois qu’il faut adopter la leçon du manuscrit B, II, 117, n. 4.

[59] Vases contenant une quarte (deux pintes) de vin.

[60] Voir cependant T. II, p. 114, n. 3.

[61] Ici vases à _couler_, à _passer_, _passoires_, comme cela est bien
expliqué dans du Cange à _Colum_, 3, et non _entonnoir_, comme cela est
dit dans le même ouvrage à _Collum_ 3 et à _Coloeria_.

[62] Il y avoit cependant alors un grand luxe d’argenterie. J’ai vu dans
les registres du Parlement (_Matinées_, 9 avril 1396-7), que Guillaume
des Baux, gentilhomme qui recevoit souvent le duc d’Anjou, avoit
_vaisselle de cuisine_ d’argent. Sa fortune n’étoit cependant évaluée
qu’à 6,000 liv., ce qui, en tenant compte de la diminution du poids et
même de la dépréciation de la monnoie, ne peut représenter plus de
240,000 fr. d’aujourd’hui.

[63] V. T. II, p. 114, n. 1.

[64] A cette époque le vin n’étoit pas mis en bouteilles: on prenoit
directement au tonneau le vin nécessaire à la consommation journalière.

[65] Ce mot a cependant quelquefois aussi la même signification
qu’aujourd’hui (V. T. II, p. 99, n. 6), et il désigne une fois (T. II,
p. 137) un mets solide, sec, par opposition à un mets liquide mis dans
une écuelle.

[66] Au XVIIe siècle c’étoit le maître d’hôtel qui remplissoit cet
office, le chapeau sur la tête, le manteau sur le dos, la serviette sur
l’épaule et l’épée au côté. Voir les _Délices de la campagne_, éd. de
1673, figure de la page 145, et le _Maistre d’hostel_ de la Varenne, à
la suite de son _Cuisinier françois_, éd. d’Amsterdam, Mortier, p. 318.

[67] Placeur, poseur, d’_asseoir_, _poser_.

[68] Ce mot désigne ordinairement dans les récits de festins princiers
une espèce de représentation théâtrale. (Voir Legrand d’Aussy, t. III,
p. 373, et les _Chroniques de Saint-Denis_, t. VI, p. 387), mais la
signification que je lui donne ici résulte des menus X, XIII, XIV, et du
chapitre des entremets du _Ménagier_. Dans le Ms. de Saint-Lô (V. p.
XXXV, n. 1), il est dit que le _porc de mer_ doit être coupé par lesches
et _détourné_ (_atourné_, dressé?) _par manière d’entremets sur un blanc
doublier_ (nappe). Enfin la recette donnée dans le _Grand Cuisinier_
pour dorer et orner un cigne (voir t. II, p. 184, note), est ainsi
intitulée _Entremets d’un cigne doré_. L’usage de servir les paons,
faisans, etc., avec cette recherche, paroît s’être prolongé jusque dans
le XVIIe siècle. Le _Thrésor de santé_, imprimé en 1607, mais qui peut,
il est vrai, avoir été écrit antérieurement, donne encore une recette de
cigne doré. En France, sous la minorité de Louis XIV, le faisan étoit
servi avec une aile non plumée, outre la tête et le col qu’on lui laisse
encore aujourd’hui.

[69] Je ne puis du moins comprendre autrement _l’entremets élevé_ dont
il est parlé dans le Menu XIV.

[70] On voit cependant T. II, p. 108, une _desserte_ composée de
fromentée et de venaison, mais s’il n’y a pas erreur, c’est au moins une
exception.

[71] Ce mot se trouve encore dans l’_Instruction pour les festins_,
insérée dans les _Délices de la campagne_, et avec la même signification
de dessert supplémentaire. Il paroît s’être perdu peu de temps après,
car il n’est plus employé dans la _Maison réglée_ d’Audiger, imprimée à
Paris en 1692, in-12.

[72] V. T. II, p. 99.

[73] Cette consommation a été, en 1846, la population de Paris étant
évaluée à un million d’habitans, de 104,329 bœufs, vaches ou taureaux,
84,260 veaux, et 486,445 moutons. La consommation seroit donc à peu près
triplée.

[74] Je n’ai vu cette boucherie citée que dans une plaidoierie du
Parlement de septembre 1388.

[75] On pourroit cependant répondre qu’il considéroit Saint-Marcel comme
un faubourg et non comme un quartier de Paris.

[76] La dépense ordinaire de l’hôtel du duc de Berry, sans compter celle
de sa garde-robe, des gages et pensions qu’il payoit, et surtout sans
celle de ses bâtimens, s’éleva en juin 1373 à 1165 fr.; en juillet à
1431 fr.; en août à 1535 fr.; en septembre à 1542 fr.; en octobre à 1430
fr.; à 2054 fr. en novembre; à 1654 fr. en décembre. Il est dit dans le
compte qui me fournit ces chiffres (Arch. du Roy. K. 250-1), que cette
dépense comprenoit les gages _des gens de l’ostel qui ne s’étoient pas
armés en la chevauchée de Poitou_. Ceux qui avoient fait l’expédition
n’y étoient donc pas compris. La duchesse avoit sa maison à part et
remboursoit au duc six francs par chaque jour qu’elle et ses gens
vivoient à ses dépens. Il est probable que la dépense du duc de Berry
s’augmenta quand, après la mort de Charles V, il put puiser largement
dans le Trésor.

[77] Ce seroit cependant faire tort à l’auteur que d’assimiler ses
renseignemens à la ridicule statistique de Paris qui se trouve dans les
_Rues et églises de Paris_. On lit dans cet ouvrage, imprimé au
commencement du XVIe siècle, qu’on comptoit à Paris dès le règne de
Charles VI, 872,000 _ménagers_ ou chefs de famille, sans les prêtres,
écoliers et autres extravagans _qui sont sans nombre_. La consommation
de cette multitude est fixée aux chiffres très-insuffisans de 73,000
bœufs, 730,000 moutons, et 365,000 veaux.

[78] Voir sur la diminution, depuis 1789, de la consommation de la
viande par chaque individu, les _Recherches de Benoiston de
Chasteauneuf_, 1821, in-8º, 1re partie, p. 67. Cette diminution
relative, qui date de 1789, a toujours été en croissant depuis, et c’est
là un fait bien remarquable et digne d’être médité.

[79] Il falloit bien au reste que la consommation de Paris fût
très-considérable. J’ai vu dans les registres du Parlement la preuve
qu’en 1422 on amenoit même de Savoie des bœufs à Paris (14 juillet
1422). Une ville pour laquelle des approvisionnemens arrivent de si loin
est nécessairement très-peuplée. Au reste, il existe d’autres données
qui permettent d’établir assez positivement le chiffre de la population
parisienne à la fin du XIVe siècle. On peut, si l’on veut, négliger
comme trop vague ce que dit Froissart (t. II, p. 259 de l’éd. du
Panthéon) à l’occasion du retour de Flandres en 1383, de la partie de
cette population capable de porter les armes, mais, comme Paris comptoit
en 1328 61,098 feux que M. Géraud dans son _Paris sous Philippe le Bel_
évalue par des calculs très-modérés, peut-être même trop modérés, à
275,000 habitans, comme ce chiffre a dû s’élever pendant le règne de
Charles V et les premières années de Charles VI, il semble qu’on ne peut
guère évaluer la population de Paris à la fin du XIVe siècle à moins de
3 ou 400,000 habitans. Voir pour plus de détails sur la population de la
France au XIVe siècle, le mémoire de M. Dureau de La Malle (Acad. des
inscr., T. XIV, 2e p. p. 36); pour Paris l’excellent travail de M.
Géraud, p. 465 de _Paris sous Philippe le Bel_, et pour le XVIe siècle
les _Relations des ambassadeurs vénitiens_.

[80] T. I, p. 7. Ces demandes d’ébatement ou jeux semblent avoir donné
lieu à une manière de parler proverbiale que je trouve consignée dans
les plaidoieries civiles du Parlement à la date du 27 juin 1392. _Acarot
dit que s’il s’en mesloit plus, qu’il lui trancheroit la teste, et dit
que_ pour roy ne pour roc _il ne lairoit que il ne lui couppast la
teste_.

[81] L’ordonnance de Charles VI du 10 janvier 1396-7 ne défend la chasse
qu’aux non-nobles laboureurs et autres non privilégiés, (les habitans
d’un assez grand nombre de villages avoient droit de chasse) et non
autorisés par des personnes ayant elles-mêmes droit de chasse. Cette
ordonnance reconnoit de la manière la plus formelle le droit de chasse
aux _bourgeois vivans de leurs possessions et rentes_.

[82] _Modus_, feuillet 101.

[83] Voir l’article sur lui, p. LXIX.

[84] Ed. Vérard, feuillet X V.

[85] _Ib._, feuillet X IV.

[86] S’il a été aidé par quelque ouvrage antérieur, peut-être seroit-ce
par un traité italien, attendu le nom de _faucon vilain_ qu’il donne au
lanier, et qui lui étoit encore donné en Italie au XVIIe siècle. Voy.
aussi T. II, p. 310, la note sur le vol du faisan par l’épervier.

[87] La chasse à l’oiseau est encore actuellement pratiquée en Syrie.
L’émir Beschir, prince des Druses, avoit des oiseaux dressés qui furent
pillés en 1840, lorsque les événemens le contraignirent à quitter le
pays, et rachetés depuis par M. Catafago, vice-consul d’Autriche à Saïda
(près Beyrouth), qui les possède encore aujourd’hui. A Damas, Choudjà’
Eddaouleh et Seïf Eddaouleh, neveux du schah actuel de Perse, retirés en
Syrie, chassent aux perdrix avec des sacres (voy. T. II, p. 323). M.
Schefer, second drogman du consulat général de Smyrne, a fait avec ces
princes une chasse dans laquelle deux sacres prirent en une heure et
demie quinze ou vingt perdrix. D’après le récit circonstancié qu’il a
bien voulu me faire, ces oiseaux nommés _sacres_ dans le pays,
originaires de Tartarie ou du Turkestan, certainement les _sacres_ de
nos anciens fauconniers, et par conséquent oiseaux de haut vol
(_rameurs_, selon Huber; voy. T. II, p. 318), sont cependant dressés
comme l’étoient autrefois les oiseaux de poing (_voiliers_, selon
Huber); ils partent du poing de leur maître quand le gibier se lève, et
se perchent sur les buissons quand la perdrix s’y est remisée, pour la
prendre plus facilement dès qu’elle en sort. C’est bien là la manière de
l’autour et de l’épervier, mais l’identité d’origine septentrionale et
de nom ne permet pas de douter que ces oiseaux ne soient bien nos
sacres.

M. d’Offémont, dont j’ai parlé dans une note de ma _Chace dou cerf_,
1840, in-8º, comme ayant créé en 1838 une association destinée à faire
renaître la fauconnerie (association dont le siége est en Hollande et
qui continue à prospérer), frappé des difficultés qu’il a dû surmonter
dans _l’affaitement_ des oiseaux, malgré les secours qu’il avoit
rencontrés dans les anciens ouvrages de fauconnerie, a l’intention
d’écrire sur ce sujet un traité assez détaillé pour suppléer aux
omissions des anciens auteurs. Il m’a montré des notes et quelques
dessins qui donnent l’idée la plus avantageuse de son travail.

[88] Par suite de mon goût pour les livres de chasse, j’avois eu
l’honneur de faire la connoissance de M. Huzard. Il m’a bien souvent
admis avec une extrême complaisance dans sa précieuse bibliothèque, mais
le hasard a fait qu’il ne m’avoit jamais montré son manuscrit du
_Ménagier_. Son catalogue (Paris, 1842) forme 3 vol. in-8º. La vente a
eu lieu en 1843.

[89] Paris, 1830, in-4º. Voici les indications données par cet ouvrage:

1º Inventaire de Bruges vers 1467.

Nº 836. Ung autre livre en parchemin couvert d’ais jaunes, intitulé au
dehors: _C’est le Mesnagier de Paris_; comançant au second feuillet,
_Salvacion de l’âme_, et au dernier _n’est autrement_. (C’est le
manuscrit A, voir ci-après p. LIV.)

Nº 1202. Ung autre livre de cuir vermeille, appellé _le Mesnagier_, est
escript partie en longue luigne et partie par deux coulombes;
quemenchant ou second feuillet _Vous moismes_ et le dernier feuillet, _a
dicta aqua_. (C’est le manuscrit B dans lequel se trouve le _Chemin de
povreté_ en effet écrit à deux colonnes (coulombes). Voir ci-après p.
LV.)

2º Inventaire fait à Bruxelles le 15 novembre 1487.

Nº 1758. Ung autre grant volume couvert de cuir, garni à tout deux
cloans de léton, intitulé: _C’est le Mesnagier de Paris_; comenchant ou
second feuillet, _Salvacion de l’âme_ et finissant ou derrenier, _et
oster les entrailles, testes et qhues. Hic finit._ (A)

Nº 1759. Ung autre grand volume couvert de cuir rouge, à tout deux
cloans de léton, intitulé comme le dessus: _Le Mesnagier de Paris et
autres choses de dévotion_; comenchant ou second feuillet, _Vous-mesmes
vo_, et finissant ou derrenier, _et oster les entrailles, testes et
qhues_. (B)

[90] T. I, p. 9.

[91] Les second et dernier feuillets commencent par les mêmes mots que
ceux signalés comme initiaux de ces mêmes feuillets dans le manuscrit de
Bourgogne. C’est ce même manuscrit qui est indiqué comme manquant
ultérieurement dans les inventaires de Bruxelles. (Nº 2269 de la
_Bibliothèque protypographique_.)

[92] Cet article a donc paru peu de mois avant la vente de la première
partie de la Bibliothèque Huzard. Il est singulier qu’un livre si
longtemps inconnu soit remarqué et étudié, on pourroit dire exhumé, dans
la même année, à Bruxelles et à Paris à la fois.

[93] Si l’on entre dans le détail de l’histoire du règne de Charles VI,
il semble (autant qu’on puisse en pareille matière déduire un principe
général de faits particuliers même nombreux) qu’une partie notable de la
haute bourgeoisie parisienne s’étoit attachée après la mort de Charles V
au duc de Berry, prince toujours besogneux, et redoutable par ce motif
aux provinces soumises à son autorité, mais affable et de mœurs faciles,
qualités appréciées de tout temps et souvent au delà de leur valeur
réelle par les classes moyennes et inférieures des villes. On verra
encore que même dans les momens où les exigences de la politique
amenoient ou forçoient le duc de Berry à se réunir aux Bourguignons, les
bourgeois ou parlementaires ses conseillers et partisans, n’en étoient
pas mieux vus du duc de Bourgogne à qui ils rendoient probablement les
sentimens de défiance et de haine qu’ils lui inspiroient.

[94] Les familles de Larivière en Guyenne, et de Bezu le Long, portent
aussi de gueules au chevron d’hermines.

[95] Champagne, Goussencourt, Hargicourt et Vivonne portent également
d’hermines au chef de gueules.

[96] Depuis le XVIe siècle, au lieu d’avoir ainsi un seul écusson parti
(divisé en deux par une ligne verticale) les femmes portent deux écus
dont le premier est celui de leurs maris. Les reines de France ont
continué longtemps à partir leur écusson, et je crois que Marie
Leczinska est la première qui ait porté deux écus accollés.

[97] _L’Histoire généalogique des grands officiers de la couronne_, T.
III, p. 726, l’appelle Jean, ce qui est une erreur.

[98] Elle est enterrée dans l’église paroissiale de Roubais, chapelle de
Sainte-Croix ou des Sept Douleurs. (Cabinet généalogique.)

[99] Chambellan du roi de France, frère du connétable de Saint-Paul
décapité en 1475: il mourut en 1487.

[100] Mon ami M. Eugène Grésy qui s’occupe depuis longtemps de
l’histoire et de la topographie de Melun, me signale un vitrail de la
chapelle Saint-Antoine en l’église Saint-Aspais de Melun, dans lequel
les armes d’Agnès de Savoie, femme, de 1466 à 1508, de François Ier
d’Orléans, duc de Longueville, vicomte de Melun, sont placées dans un
écusson parti, avant celles de son mari. Mais, je le répète, de telles
erreurs sont très-rares, surtout à mesure qu’on s’éloigne des temps
modernes. Si Isabelle de Roubais avoit épousé un Ghistelles en premières
noces, je n’aurois pas hésité à voir en elle la propriétaire de mon
manuscrit. Au reste, il est bien probable que ce manuscrit lui aura été
donné par sa mère, et que les recettes de _Hotin_ auront été recueillies
pour elle.

[101] C’est lui qui prit par surprise, en 1465, la ville de Péronne et
le comte d’Étampes qui s’y étoit renfermé, _Histoire de Bourgogne_, de
dom Plancher, T. IV, p. 337.

[102] Voy. T. II, p. 275.

[103] Quand un ouvrage cité en abrégé dans un endroit du livre est
indiqué ailleurs avec plus de détail, je ne l’ai pas compris dans cette
liste. La table donnera le moyen de retrouver l’endroit où le titre est
donné _in extenso_.

[104] Rymer date ces pièces de 1363, mais c’est de 1363 nouveau style,
c’est-à-dire en faisant commencer l’année au 1er janvier et non à
Pâques. En effet, suivant la Chronique de Saint-Denis, dont l’exactitude
chronologique est irrécusable, le roi Jean, qui étoit entré à Avignon le
20 novembre 1362, s’embarqua à Boulogne le 3 janvier 1363 (1364 nouveau
style) pour retourner en Angleterre, et y mourut le 8 avril suivant.

[105] Il n’y en a que dix-huit.

[106] Le second article relatif à la chasse de l’épervier est le seul
qu’on trouve dans les trois manuscrits du _Ménagier_, encore est-il mal
placé entre les troisième et quatrième articles de la seconde
distinction. Cette circonstance pourroit faire croire que l’auteur n’a
pas suivi jusqu’au bout de son livre le plan et la division établis
ci-dessus, et qu’il a peut-être omis de traiter le sujet des premier et
troisième articles de la troisième distinction.

On comprend de quel genre pouvoient être les ébattemens du troisième
article, et on a dans le _Dodechedron de fortune_ l’exemple de demandes
_avérées et répondues par le sort des dés_. Mais que faut-il entendre
par _rocs_ et par _rois_? On sait que le Roc a été remplacé par la Tour
dans le jeu d’échecs, et n’existe plus que comme pièce héraldique dans
les armoiries de quelques familles. Étoit-ce donc à l’aide des rocs et
des rois d’échecs que ces demandes d’ébattemens étoient répondues?

Il est parlé dans le _Chevalier de la Tour_ (chap. 124 du ms. du roi,
7403) de chevaliers et dames jouant au _roy qui ne ment pour dire vérité
du nom de s’amie_. C’est peut-être d’un jeu analogue que l’auteur du
_Ménagier_ a parlé ou comptoit parler dans cet article.

[107] _Chemise._ Ce mot avoit alors la même signification
qu’aujourd’hui. Voir Du Cange au mot _Camisa_.--_Blanchet_, vêtement
court, sorte de camisole de drap ou flanelle blanche qu’on mettoit
par-dessus la chemise. Ce mot est encore cité dans cette acception par
le dictionnaire de Trévoux. Blanchet signifioit par extension le drap
blanc dont étoit fait le vêtement du même nom.--_Coste_, qui seroit
mieux écrit cotte, comme au-dessous, signifie ici robe, voir Du Cange,
citation de la Vie des Pères, à _Surcotium_.--_Surcot_, vêtement de
dessus, mais en général moins chaud et plus habillé que la houppelande.
J’ai vu dans les _Plaidoiries criminelles du parlement_ une bourgeoise
_venant d’une noce pour laquelle elle avoit vestu un surcot_, à qui une
de ses parentes dit _qu’il est tard_, qu’elle dépouille son surcot et
que elle lui baillera _une houpelande et un chaperon_. (Avril 1404-5.)

[108] La coiffe enveloppoit toute la tête et étoit placée immédiatement
sur les cheveux. Le mot de _cueuvrechief_ paroît désigner ici une sorte
de bonnet placé sous le chaperon. Les couvrechef et coiffes étoient
d’étoffe légère. Un inventaire dressé en 1384 des biens meubles de
Jacqueline de Charny, femme de Jehan Saugete, écuyer, mentionne _quinze
quevrechiefs de soie et trois de lin pour atour et dix-neuf coiffes de
soie jaune, de cendal et de toile ou fil_. (Reg. du P. Jugés XXXII. 94.)
Quant au chaperon, dont la forme a varié, celui dont il s’agit ici me
paroît devoir être la coiffure que porte la femme dans la planche de la
page 9. L’auteur de la plaidoirie citée page 14 parle d’un amant qui
coupa un morceau du chaperon de sa maîtresse pour avoir un souvenir
d’elle. La forme du chaperon représenté dans la planche fait bien voir
comment cela étoit possible.

[109] Il sembleroit par ces mots qu’on n’avoit pas alors de bancs
_réservés_ dans les églises. La mention la plus ancienne que j’aie vu de
cette attribution individuelle des bancs aux paroissiens est dans une
délibération du conseil de fabrique de Saint-André-des-Ars, en date du 2
février 1577, qui parle des bancs affectés aux paroissiens, et de ceux
qui d’_ancienneté_ ont coutume de s’y mettre. Les églises collégiales
n’avoient de bancs qu’autant qu’elles étoient en même temps
paroissiales, c’est-à-dire qu’il y avoit des fonts baptismaux, et qu’on
y faisoit le prône. (_Traité des Droits honorifiques_, par Maréchal,
1762, tom. I, p. 278 et 284). On m’a affirmé qu’avant la révolution il
n’y avoit pas de bancs dans l’église cathédrale de Paris.

[110] Var. B _Gréel_, Graduel.

[111] _Estour_, secours, nourriture du corps, et généralement tout ce
qui sert à la vie. (V. Du Cange, au mot _Estorium_); _lourgable_,
susceptible d’être consommé, de _lurcare_, dévorer.

[112] Avoir soin.

[113] Je n’ai jamais vu ce mot: seroit-il ici pour _trahaigner_,
traîner, tergiverser?

[114] _Reverchier_ signifie retourner: je crois qu’_entreveschier_ veut
dire _intervertir_.

[115] Pour fixer votre idée, pour connoître.

[116] Aussi, également.--Var. B _presque_.

[117] Cette nomenclature des vices et des vertus contraires se retrouve
dans plusieurs ouvrages du moyen âge. Elle est avec de grands
développemens dans le _Calendrier des Bergers_, et elle a donné lieu à
une sorte de roman allégorique curieux et bien écrit dans la suite
mystique du Modus et Ratio, intitulée _le Songe de Pestilence_, et
imprimée sous le titre de _Modus et Ratio de divine contemplacion_.

[118] Vif désir.

[119] Brûlent (de frire). V. ci-après _le Viandier_.

[120] Poêle à frire.

[121] Il paraît manquer quelque chose, comme _perte des âmes_.

[122] Vrai.

[123] Procès.

[124] Manque _se comparer_.

[125] _... d’icelui._

[126] Mal erré, _male erravi_.

[127] Sous son plus mauvais jour.

[128] Loué.

[129] Je ne me souciois pas.

[130] En secret.

[131] De la gloire auprès d’eux, pour qu’ils parlassent de moi.

[132] Je pensois.

[133] Il paroît manquer quelque chose comme: _Je disois mes péchés les
moins grands_.

[134] Parée.

[135] Ce mot n’est que dans B. Faut-il lire _à parties_?

[136] Gourmands et par extension débauchés.

[137] Joyeux.

[138] _Empêcher_ vaudroit mieux.

[139] Défendu, refusé.

[140] Croupit?

[141] Sa fortune.

[142] Antecrist fait les miracles en sa maison tout au contraire: sa
maison est la taverne, et quant ceulx qui voyent bien clair y viennent,
ils s’en partent tous aveugles.--_Modus et Racio_, édit. 1839, feuillet
65 vº.

[143] Chez les Romains, avant la première guerre punique, les jours se
divisoient en quatre parties: 1º de 6 heures à 9 heures, c’était l’heure
de _prime_; 2º de 9 heures à midi, c’est ce qu’on nommoit _tierce_; 3º
de midi à trois heures, c’étoit l’heure de _sexte_; 4º _none_ commençoit
à 3 heures et finissoit au coucher du soleil. Cette ancienne division du
temps fut adoptée par la primitive église et les noms en sont restés aux
offices.

[144] Si chère qu’elle soit.

[145] Pourtant, cependant.

[146] De maintenant à un jour.

[147] Thériaque: remède.

[148] Prochain.

[149] Ennui, désœuvrement. V. Du Cange aux mots _Accidia_, _Acedia_.

[150] Manquent quelques mots, comme: _qui y mettent_.

[151] L’avare.

[152] Peut-être manque-t-il quelques mots comme _ils auront_, _etc._

[153] Il semble que le sens de la phrase exigeroit _gloutonnie_.

[154] En desroi, égaré.

[155] C’est l’ouvrage de Jacques de Voragine, archevêque de Gênes.

[156] De saint Jérôme.

[157] Donner envie, goût.

[158] C’était Sédécias.

[159] Captivité.

[160] Helcias.

[161] Huile.

[162] Doucement, paisiblement.

[163] Serviteurs, _servientes_.

[164] Visage.

[165] Cachées.

[166] La Vulgate dit _sub prino_, c’est le chêne _ilex_, l’yeuse.

[167] _Sub schino_, c’est le lentisque d’où découle dans l’Archipel et
en Perse non le macis, mais le mastic ou encens de Perse, sorte de gomme
aromatique avec laquelle les Perses enduisoient leurs outres, suivant
Strabon. Le _macis_ dont parle ici l’auteur est aussi appelé _fleur de
muscade_; c’est la seconde écorce de la noix muscade. Nous verrons le
macis employé dans _le Viandier_.

[168] Les juifs furent chassés par ordonnance du 17 septembre 1394, et
cette ordonnance fut ponctuellement et promptement exécutée. On en a la
preuve dans des lettres de rémission accordées en janvier 1394(5), à un
certain Guiot Rousseau de Pertes, près Melun, pour avoir assommé et
volé, entre Pont-sur-Yonne et Sens, au bois de Javel, une vieille juive
qu’il s’étoit chargé de conduire sur son cheval, de Melun à Sens, _ne
croyant autant mesfaire que s’elle eust esté chrestienne et se recordant
que par les juifs qui ont demouré ou temps passé à Meleun il avoit esté
destruit presque de toute sa chevance_. Il est dit dans ces lettres, qui
m’ont été communiquées par M. de Stadler, que cette juive _alloit
rejoindre aucuns juifs qui pour certaine ordenance sur ce faicte se
partoient hors du royaume_. (J. Reg. 147, 36.) Ce passage prouve bien
positivement que _le Ménagier_ a été écrit avant septembre 1394.

[169] Philosophe chaldéen qui, suivant Jacques de Cessoles, auteur du
_Jeu des échecs moralisé_, auroit inventé le jeu d’échecs. L’auteur du
_Ménagier_ cite ici l’ouvrage de J. de Cessoles, dans lequel on trouve,
au chapitre de la Reine, les histoires de Romilde, de Lucrèce, de
Papirius, qu’il va raconter aussi, mais en les développant.

[170] Oui.

[171] De Bénévent.

[172] S’en détournèrent, de _desmouvoir_.

[173] Cette duchesse est Romilde, veuve de Gisulfe, duc de Frioul, tué
en 611, dans une bataille contre les Abares. Après la mort de son mari
dont elle avoit eu quatre fils et quatre filles, elle fut assiégée par
le khan des Abares dans Forojulium, aujourd’hui _Civita di Friuli_.
Éprise de la figure du khan, elle lui offrit (et non à un de ses
chevaliers) la place et sa main; son offre fut acceptée, mais le khan,
maître de la place, fit empaler Romilde et emmena ses enfans et les
principaux citoyens en captivité. Les quatre princes s’échappèrent sur
la route. Les deux aînés, Tason et Caccon, furent ducs de Frioul, de 621
à 635. Le troisième, Rodoald, fut duc de Bénévent, de 642 à 647, et le
dernier, Grimoald, fut duc de Bénévent après son frère, et roi des
Lombards en 662; il mourut en 671. On a assez peu de renseignemens sur
l’origine de plusieurs de nos reines de la première race. Je n’ai pas
trouvé qu’aucune d’elles ait été sœur de Grimoald. La même histoire est
racontée avec quelques-unes des inexactitudes de l’auteur du _Ménagier_,
dans le LVIIIe chapitre du _Compendion historial_; Paris, Ant. Vérard,
1509.--Elle est tirée de Paul Diacre.

[174] L’auteur du _Jeu des Échecs moralisé_.

[175] Invita, de _semondre_.

[176] Par telle convention.

[177] État, disposition d’esprit.

[178] Les occupations que l’auteur donne ici aux Romaines étoient sans
aucun doute celles des femmes de son temps, et ce passage est
certainement un des plus curieux de son livre. Le _bric_, qui me paroît
la même chose que la _briche_ ou _bricque_, est déjà cité au XIIIe
siècle dans les œuvres de Rutebeuf (_de Brichemer_), on y jouoit assis
et à l’aide d’un petit bâton.--_Qui féry?_ me paroît évidemment notre
_main chaude_.--Le jeu de _pince-merille_ est écrit _pince-morille_ dans
les jeux de Gargantua (Rabelais, livre I, chapitre XXII), c’est tout ce
que j’en connois.--Le _tiers_ étoit une sorte de colin-maillard dont il
est parlé dans Rabelais, les Arrêts d’amour et des lettres de rémission
de 1391, citées par Du Cange au mot _Tertium_.--La mention des cartes
comme _jeu d’ébatement_, dans un ouvrage écrit sûrement en 1393, est
fort importante, et nous paroît démontrer la réalité de la distinction
établie par M. Duchesne entre les cartes jeux _d’ébatement_, jeux
d’enfans, _naibi_, et les cartes devenues quelques années après jeu de
hasard. En lisant ce passage du _Ménagier_ on comprend que les cartes
aient pu être connues en 1369, et ne pas figurer cependant parmi les
jeux de hasard défendus cette année par Charles V. (Voy. _Jeux de Cartes
tarots_, publiés par la Société des Bibliophiles, 1844, in-folio, p. 4.)

[179] Un peu loin, à une petite distance.

[180] Le visage baissé.

[181] Bleues, violettes.

[182] Poudreux; ou faut-il lire _les gens, pouldres_ (poussière) _et
fumées_, etc.?

[183] Var. Br. _à peine_.

[184] Evite, esquive.

[185] Car le fait (l’adultère) n’est pas à craindre. Je n’ai vu ce
curieux usage mentionné nulle part ailleurs.

[186] Pierre le Mangeur, chancelier de l’Université de Paris, mort en
1179. Voir les _Mss. françois_ de M. Paris, t. II, p. 2.

[187] L’historien Flavius Josèphe.

[188] S’attachera, _adhærebit_.

[189] Prononciation parisienne du mot _mesnie_, suite, famille. Voir H.
Estienne, _Précellence du Lang. françois_, p. 179.

[190] Près, comme _Villers-Coste-Retz_.

[191] Stérile. Encore employé pour les biches en terme de vénerie.

[192] Élève.

[193] Allusion à l’incarnation de N. S. J. C.

[194] Outre ou petit baril, _boucellus_.

[195] Bersabée.

[196] Voyage.

[197] Couché.

[198] Voir sur cette plante et sur la _main de gloire_ les curieux
articles du Dictionnaire de Trévoux.

[199] Ouvrage qui est à la fois une grammaire, une rhétorique, et un
dictionnaire, et qui fut écrit en 1286 par Jehan Balhi de Gênes,
religieux dominicain.

[200] Sauvages.

[201] Sans doute _choucas_.

[202] Var. A, _melles_, faute ou nom d’oiseau que je ne connois pas.
Tiercelet, pris seul, est le nom du faucon mâle.

[203] Domestiques.

[204] Macaire étoit le nom de l’assassin. Aubri de Montdidier étoit le
maître du chien. Bullet, dans une intéressante dissertation sur cette
histoire (_Mythol. fr._, p. 64), remarque qu’elle figure pour la
première fois dans la chronique romanesque d’Albéric de Trois-Fontaines,
auteur du XIIIe siècle, qui la place à l’année 780. Il pense que cet
auteur l’a prise dans quelqu’ancien roman ou chanson de geste.

[205] C’est la portion de l’île Saint-Louis qui est entre la rue des
Deux Ponts et le pont Louis-Philippe, et qui étoit séparée par un petit
bras de la Seine ordinairement à sec en été, de l’autre portion appelée
l’île aux Vaches. Quoique le chapitre de Paris eût des droits à la
propriété de cette île et en fût en tout cas haut justicier, elle
servoit de promenade et de lieu de réjouissance publique. Le 8 mars
1400, le procureur du roi parlant pour les marchands de Paris et les
droits de la navigation, contre le chapitre, et faisant peut-être
allusion au prétendu combat de Macaire et du chien, disoit que _dès
Charlemaine l’île dessus dite fut appliquée à la chose publique_ (Reg.
du Parl., Plaid. civ.). Les lices qu’y voyoit à la fin du XIVe siècle
l’auteur du _Ménagier_ pouvoient bien provenir de la grande fête
(mystères, tournois d’enfans au-dessous de dix ans, etc.) qui y fut
donnée à la Pentecôte de 1313, lorsque Philippe le Bel et ses trois
fils, et le roi d’Angleterre prirent la croix (_Chron. métrique_ de God.
de Paris, 1827, p. 188), ou peut-être aussi de quelque autre solennité
plus récente.

[206] Les ducs de Berry, de Bourgogne et de Bourbon et le connétable du
Guesclin conquirent presque tout le Poitou sur les Anglois, en 1372: ils
revinrent à Paris le 11 décembre, et le lendemain le duc de Berry fit
hommage au roi son frère du comté de Poitiers (Reg. du Parl., Plaid.
civ.).

Mais Niort et quelques autres places étoient restées au pouvoir des
Anglois. Du Guesclin ayant défait à Chisay les garnisons angloises
réunies sous le commandement de messire Jehan d’Esvreux, fit, suivant
Cuvelier, mettre à ses soldats les cottes d’armes des Anglois, et prit
ainsi Niort par surprise.

Froissart (t. I, p. 665 de l’édition du _Panth. litt._ donnée par M.
Buchon) dit que le combat de Chisay eut lieu le 21 mars 1372 (1373, n.
st.), et cette date se trouve en effet confirmée par les comptes du duc
de Berry dans lesquels on voit figurer, à la date du 30 mars, un
messager envoyé par le duc à la duchesse pour lui annoncer que _messire
Jehan d’Esvreux a esté déconfit_. La prise de Niort dut suivre presque
immédiatement le combat de Chisay, surtout si le stratagème raconté par
Cuvelier fut en effet mis en œuvre par du Guesclin. Niort étoit en tout
cas pris au moins dès le 28 avril. Quoique l’occupation de cette ville
ait eut lieu presque sans coup férir, c’est bien certainement en cette
occasion qu’avoit péri le maître du chien dont parle notre auteur, soit
que ce fût un soldat de l’armée françoise, soit qu’il fût un des hommes
de la ville, bons François de cœur suivant tous les historiens.

Le duc de Berry, qui après l’hommage du comté de Poitiers avoit été en
Berry et en Auvergne réunir des hommes et de l’argent (il étoit, le 11
janvier 1372-3, et encore le 22 mars, à Bourges), n’arriva en Poitou que
dans les premiers jours d’avril. Il étoit les 28 et 30 mars et le 2
avril à la Souterraine, petite ville de la Marche, sur la route de
Clermont à Poitiers, attendant probablement ses troupes, et les 15, 18
et 19 avril, à Poitiers. On voit bien dans ses comptes qu’il envoya un
courrier de Niort le 28 avril, mais il partit aussi des courriers ce
même jour de Poitiers, de Saint-Maixent et de Melle, et si le duc a été
le même jour dans ces quatre villes, il a fait une journée de vingt-cinq
lieues, ce qui, sans être impossible, est cependant difficile. Il étoit
à Poitiers le 30 avril, et paroît y être resté tout mai, tout juin, et
jusqu’au 11 ou 15 juillet, mais il étoit le 18 de ce mois à Niort et y
séjourna au moins jusqu’au 23 (il y consomma six setiers de blé; fol.
105 vº). Il étoit de retour à Poitiers le 26.

Il me paroît bien probable que le fait raconté par notre auteur comme
témoin oculaire, a dû se passer à Niort pendant le séjour que fit le duc
dans cette ville _en juillet 1373_. On pourroit opposer qu’au 18 juillet
il y avoit déjà plus de trois mois que Niort étoit pris et le maître du
chien mort, mais cet animal pouvoit continuer depuis lors à vivre sur la
tombe de son maître, et le fait n’en étoit que plus remarquable et plus
digne d’être signalé au duc de Berry. Au reste, si le séjour de ce
prince à Niort le 28 avril 1373 n’étoit pas douteux, il vaudroit
certainement mieux reporter à cette date l’histoire qui a donné lieu à
cette note.

Guillaume de la Mousse, attaché à la maison du duc de Berry, étoit
châtelain de Niort en novembre 1373, et Hugues de Vivonne, chevalier, en
étoit capitaine le 25 juillet 1374.

Le duc de Berry avoit certainement beaucoup de défauts, mais on ne peut
lui refuser d’avoir été charitable. Les comptes qui nous restent de lui
sont remplis de mentions d’aumônes. J’ai entre autres remarqué, à
l’année 1370, beaucoup de dons faits à des chevaliers et écuyers pris
par les Anglois à la belle défense de Limoges, et soixante sols donnés
en août 1370 _à un povre enfant de village qui fu trouvés tout seul en
l’oustel où mondit Sr. se lougha à Saint Denis du Chastel_ (Comptes du
duc de Berry, Arch. du Roy., reg. K, 250, 1).

[207] Sérieusement.

[208] Plutôt.

[209] Surtout.

[210] Le Décret de Gratien, bénédictin du XIIe siècle.

[211] Le trône, fauteuil.

[212] A la fortune.

[213] Écrite d’abord en italien par Boccace, la charmante histoire de
Grisélidis fut ensuite paraphrasée et mise en latin par Pétrarque. Elle
a été traduite plusieurs fois en françois, et même a fourni le sujet
d’un Mystère composé en 1395 probablement par un Parisien, puisque
l’auteur y parle du _beau gibet de Montfaucon_. Bibl. roy., Cangé, 7999,
3. Il y a à la Bibl. Roy. plusieurs manuscrits de traductions anciennes
de Grisélidis. J’en ai examiné quatre. La version du _Ménagier_, toute
différente de celle du nº 7387, diffère légèrement de celles des nos
7403 et 7568, mais est tout à fait la même que celle du nº 7999.

[214] Le Mont Viso.

[215] Comptoit, prisoit.

[216] Volonté, pouvoir, de _potestas_; _femme de poste_, femme non
libre, serve. V. DU CANGE, à _Posta_.

[217] Pareillement.

[218] Voler; chasser avec l’oiseau.

[219] En grandes troupes.

[220] A leur vouloir, à leurs volontés.

[221] Portant doucement son cavalier, ayant le pas doux.

[222] D’une même manière.

[223] Avec la tête baissée.

[224] Avec attrait.

[225] Sincère, vraie.

[226] Exécuter, accomplir.

[227] Var. Mss. A, _quant est de celle de_.

[228] Que fait.

[229] Par bonne disposition, par zèle.

[230] Transporté, placé.

[231] Cette coutume de donner un objet quelconque en témoignage et comme
preuve de stipulation remonte à une haute antiquité. Nos ancêtres
l’avoient conservée des Romains. L’abbé Le Beuf raconte, d’après Étienne
de Paris, un des plus curieux exemples de cet usage. Le roi Louis le
Jeune ayant couché à Creteil qui appartenoit au chapitre de Paris, le
chapitre lui ferma le lendemain les portes de l’église cathédrale: mais
le roi consentit à payer la dépense qu’il avoit faite à Creteil et les
portes lui furent ouvertes. Alors, pour marquer son intention par un
acte extérieur, le roi mit de sa propre main une baguette sur l’autel,
etc. (_Histoire du Diocèse de Paris_, XII, 12.) Voir aussi DU CANGE au
mot _Signum_, 11.

[232] Dissimulées.

[233] Ici, _gâté_ plutôt que _méprisé_.

[234] Pourvu que.

[235] Il n’y a eu, ni sous la régence, ni sous le règne de Charles V, de
révolte dont la punition ait présenté des circonstances semblables à
celles qu’on remarque dans ce passage du _Ménagier de Paris_, mais il me
paroît au contraire s’appliquer parfaitement aux exécutions qui eurent
lieu en 1383, au retour de la campagne de Flandre, et je crois que par
_une des plus grans cités de ce royaume_ il faut entendre Paris et non
pas Rouen qui fut le théâtre de scènes analogues, mais non aussi
sanglantes à beaucoup près. Cette expression aura été suggérée à
l’auteur par sa prudence, afin de ne pas désigner trop clairement à ses
contemporains les personnes dont il parloit.

Suivant le Religieux de Saint-Denis (liv. III, chap. IV), Charles VI
(encore presque enfant, et agissant sous l’influence de ses oncles)
auroit _appris à Rouen_, où il auroit alors séjourné trois jours, la
sédition des _maillotins_ de Paris. Il auroit à cette même époque,
(qu’il faudroit placer dans les premiers jours de mars 1381-2, puisque
la sédition des _maillotins_ commença le 1er de ce mois), puni de mort
les chefs d’une sédition dite _la Harelle_ qui auroit eu lieu
antérieurement à Rouen. Le Moine de Saint-Denis est dans l’erreur au
moins quant à la date et à la durée du séjour de Charles VI dans cette
ville. Il résulte de nombre de pièces du registre 120 du Trésor des
Chartes, que le roi entra à Rouen pour la première fois depuis son sacre
le 29 mars 1381-2 seulement, et qu’il y étoit encore au moins le 4
avril. Il étoit le 1er mars à Vincennes. En tous cas ces exécutions
paroissent avoir été trop peu nombreuses pour qu’on reconnoisse en elles
celles dont parle notre auteur. (Le registre 120 ne contient la mention
que de l’exécution d’un valet à Rouen.) Il en est de même des poursuites
auxquelles donna lieu la même sédition, onze mois après, en mars 1382-3
qui, suivant Farin (_Histoire de Rouen_, 1668, in-12, I, 527), ne
coûtèrent la vie qu’à deux misérables. D’ailleurs le roi n’étoit pas
présent, contrairement à ce que me semble indiquer le récit du
_Ménagier_. Notre auteur paroît en outre avoir eu peu de relations avec
Rouen qu’il ne nomme pas une fois dans son livre, et il résulte de son
récit qu’il connoissoit la bourgeoise dont il parle. Il est donc plus
naturel de supposer qu’elle étoit de la même ville que lui, c’est-à-dire
de Paris.

La sédition des _maillotins_ commença le 1er mars 1381-2. Le prévôt de
Paris fit bien, peu de temps après, quelques exécutions, mais elles ne
portèrent que sur des gens obscurs et furent peu nombreuses. Il n’en est
pas de même de la sanglante punition que le roi infligea à la ville de
Paris à son retour de Flandre à raison des mêmes événemens.

Vainqueur à Rosebecque, le 27 novembre 1382, le roi entre à Paris le 11
janvier 1382-3. Le 12 et les jours suivans trois cents riches bourgeois
sont arrêtés: huit jours après on en conduit deux au supplice, et les
exécutions se succèdent rapidement. On voit dans des lettres de
rémission qu’Audouin Chauveron prévôt de Paris et des gens d’armes
alloient nuit et jour prendre plusieurs bourgeois _dont des aucuns l’on
faisoit hastives exécutions_, et que l’on _faisoit justice de jour en
jour d’aucuns des habitans de Paris_. (Voir ci-après, p. 138. _Chascun
jour._) Le 27 janvier, jour de la publication de l’ordonnance qui
abolissoit la prévôté des marchands, douze notables habitans de Paris,
parmi lesquels étoit le célèbre Jean Desmares, avocat général, victime
innocente de la haine des ducs de Berry et de Bourgogne, périrent encore
sur l’échafaud. Cent personnes furent ainsi exécutées du 19 ou 20 au 27
ou 28 janvier: les autres prisonniers furent condamnés à des amendes
pécuniaires souvent égales ou supérieures à la valeur de tous leurs
biens.

Il me paroît impossible de ne pas reconnoître dans ces événemens ceux
auxquels fait allusion l’auteur du _Ménagier_, mais quel est ce seigneur
et quelle est cette femme _de très grant nom en bourgeoisie_? Pour
découvrir quelque trace de cette mystérieuse histoire, j’ai parcouru les
registres 120 à 128 du Trésor des Chartes depuis mars 1381-2 jusqu’en
avril 1385-6. Parmi les quarante-sept pièces relatives à ces événemens
(sur lesquels je donnerai peut-être un jour un mémoire détaillé), j’ai
remarqué trois et surtout deux lettres de rémission qui pourroient
s’appliquer au mari dont notre auteur nous a transmis l’histoire.

La première, en date d’août 1383, est accordée à Jehan Filleul, notaire
au Châtelet, alors âgé de vingt-six ans, qui avouoit avoir pris part à
toutes les délibérations hostiles au rétablissement des impôts, et avoir
conseillé à Aubert de Dampierre, riche drapier, l’un des suppliciés, de
faire soulever la ville pour empêcher son arrestation.

Il n’est pas dit dans les lettres de rémission qu’il fut emprisonné mais
qu’il s’enfuit de Paris. Cependant il est cité dans le Religieux de
Saint-Denis (en qualité d’avocat au Châtelet, ce qui est une erreur)
parmi les trois cents bourgeois arrêtés depuis le 12 janvier, et si,
comme il y a lieu de le croire, cette assertion est exacte, pour qu’il
ait pu s’absenter de Paris, il faut qu’il ait été relâché au moins
provisoirement. Or, il eut besoin d’une bien forte protection pour
échapper ainsi au châtiment que lui auroient certainement valu les faits
dont il s’avouoit coupable. On mentionne dans la rémission qu’il avoit
une _jeune femme_; son nom de famille n’est pas donné, mais la position
du mari peut faire supposer qu’elle étoit d’une bonne famille
bourgeoise. (R. 123, 83.)

Colin Brun, drapier, étoit _jeunes homs, issu de bonnes gens et de bon
lignage, fils d’Anthoine Brun homme ancien de l’aage de quatre-vingt
seize ans lequel s’estoit bien porté envers les prédécesseurs du roi
qu’il avoit servis en son mestier de draperie_. Il étoit marié depuis
deux ans à une jeune femme qui en avril 1383 venoit d’accoucher de son
premier enfant. Il avoit été condamné à deux mille francs d’amende et au
bannissement. Le roi lui remit le bannissement et la moitié de l’amende.
Il n’étoit coupable que d’avoir assisté aux réunions et aux prises
d’armes. (R. 122, 217.)

Giles Labat, procureur général au parlement, mari d’une femme de
dix-huit ans, et père de deux enfans dont l’aîné n’avoit que trois ans,
obtint, en juillet 1383, des lettres de rémission. Il étoit accusé
d’avoir cherché dans les maisons, et fait conduire en prison, des hommes
d’armes, et fut gracié à la requête du maréchal de Sancerre, mais je
n’ai pas vu qu’il eût été emprisonné; il avoit pris la fuite lors du
retour de Flandre, et de plus, le caractère du maréchal ne permet guère
de lui attribuer cette aventure. (R. 123, 14.)

J’ai bien encore vu des lettres de rémission accordées à des habitans de
Paris mariés à de jeunes femmes, mais leur position ne m’a pas paru
convenir au mari cité en cet endroit du _Ménagier_, et qui devoit
appartenir à la haute bourgeoisie parisienne.

Je suis au reste loin d’affirmer que le mari dont parle notre auteur
soit un de trois Parisiens que je viens de nommer: je me borne seulement
à signaler les rapports qui existent entre leur position (surtout celle
de Jean Filleul) et la sienne.

[236] On sait que cette ville, berceau de notre monarchie, cessa
d’appartenir à la France seulement en 1521, qu’elle fut prise par le
comte de Nassau général de Charles-Quint. Elle fut définitivement cédée
à l’empereur par le traité de Cambray (1529). L’administration et la
juridiction de Tournay ont souvent varié. En 1340, le roi Philippe de
Valois avoit donné la justice aux prévôts et jurés, magistrats
populaires, mais à la charge de ressortir du bailli de Vermandois. En
1370 ils obtinrent le privilége de ressortir directement du parlement de
Paris. Il y avoit alors un bailli de Tournesis officier royal, mais sans
juridiction sur Tournay et sa banlieue. (Tassart de Monstreul l’étoit en
1371, Jehan de Sottenghien en 1379 et Jehan Boutelier en 1380.) Mais, en
1383, Charles VI institua un bailliage royal à Tournay. Les appels des
prévôts et jurés étoient portés devant le bailli qui avoit la haute
administration de la ville et du Tournesis. Tournay se soumit avec peine
à cet état de choses, et les registres du parlement contiennent un grand
nombre de difficultés suscitées au bailli par les prévôts et jurés dans
l’exercice de sa juridiction. En 1389, les prévôts et jurés obtinrent de
nouveau des lettres du roi portant que les appels de leurs jugemens
seroient portés directement au parlement de Paris, mais le procureur du
roi s’opposa formellement à l’entérinement de ces lettres qui n’étoient
pas encore enregistrées en 1394. Toutefois ils avoient obtenu d’autres
lettres du roi pour jouir provisoirement de ce privilége, malgré le
défaut d’enregistrement.

Il est assez difficile de savoir qui est le bailli de Tournay dont parle
l’auteur du _Ménagier_: je ne pense pas qu’on puisse appliquer cette
qualification à un des baillis de _Tournesis_; elle doit désigner un des
baillis nommés de 1383 à 1393. Je n’ai trouvé que le nom de Henri Le
Mazier qui fut reçu à la chambre des comptes comme bailli de Tournay, en
1388. (Mém. E.--Voir sur le bailliage de Tournay, Reg. du Parl. Plaid.
civiles, 25 nov. 1371.--20 nov. 1380.--17 janvier 1390-1.--7 déc. 1394.)

[237] Dom Carpentier explique bourgage par _bienvenue_ (V. Gloss. de Du
Cange au mot _Bourgagium_). Il sembleroit plutôt qu’on doive entendre
par ce mot une partie de plaisir faite avec une somme composée de
contributions individuelles, telle qu’une poule, par assimilation à
l’impôt du même nom que payoient annuellement les bourgeois de quelques
villes.

[238] Glorieuse, qui se rengorge.

[239] En premier, un.

[240] D’esgarder, regarder; _voyons_.

[241] Occasions.

[242] S’engouent, raffolent.

[243] Négligent. _Nonchalance_, indifférence, de _chaloir_, intéresser,
soucier.

[244] Ce _qui_ s’applique aux maris des femmes désobéissantes et
négligées.

[245] Retirer, contraire d’_acharner_.

[246] Voy. ci-après, page 158.

[247] La lumière.

[248] Quand j’aurois dû.

[249] Instrumens que je crois avoir été des petits vases, comme depuis
les _gobelets_, dont les _bateleurs_ se servoient pour faire leurs
tours, et dont ils ont pris leur nom. Voy. Du Cange aux mots _Bastaxius_
et _Batus_.

[250] Allusion à l’opinion suivant laquelle les sorcières alloient au
sabat sur un balai.

[251] Le château de Melun, et par suite la partie de la ville située du
côté du Gâtinois, furent livrés aux Navarrois et Anglois par la reine
Blanche le 4 août 1358, quatre jours après la mort d’Est. Marcel et la
rentrée du Régent à Paris, mais la partie de la ville située en Brie
resta françoise, et messire Jean d’Andresel étoit dès le même mois
d’août capitaine pour le Régent (depuis Charles V) de Melun et de Brie
(J. Reg. 86, 219.--Secousse, II, 89). Il paroît avoir d’abord partagé la
défense de cette partie de la ville avec le premier maréchal Boucicaut
qu’on voit (J. Reg. 86, 458) avoir fait abattre des maisons pour
fortifier cette portion de Melun en août 1358. Il est probable que M.
d’Andresel étoit sous ses ordres à cette époque.

Les circonstances désastreuses où se trouvoit alors la France ne
permirent pas au Régent d’assiéger, au moins immédiatement, le château
de Melun, quoique sa garnison anglo-navarroise génât beaucoup
l’approvisionnement de Paris. Jean d’Andresel dut se borner à garantir
la partie de la ville restée françoise, et autant que possible le reste
de la Brie, des attaques de cette garnison. En juin 1359, le régent
ayant reçu des États assemblés à Paris les moyens de résister plus
efficacement à l’ennemi, se rendit en personne à Melun (_Chron. de
Saint-Denis_, CXII), et fit fortifier l’abbaye du Lys. C’est alors que,
suivant le carme Jean de Venette continuateur de Nangis, Froissart,
Cuvelier et Villani (cité par Secousse, I, 383), Melun auroit été
assiégé dans les formes par le Régent. Le silence que garde sur ce
_siége_ la Chronique de Saint-Denis rédigée pour cette époque par Pierre
d’Orgemont avec une admirable précision, donne tout lieu de douter de
l’exactitude du récit de Froissart, et surtout de la narration
romanesque de Cuvelier. Il paroît bien probable que ce siége ne fut
qu’une espèce de blocus levé peu de temps après, le Régent ayant quitté
l’armée le 31 juillet par suite des propositions de paix du roi de
Navarre, et le traité ayant été signé le 21 août. Au reste, malgré la
conclusion de la paix, les Navarrois occupoient encore Melun en
septembre 1359. Jean de Venette qui prétend que cette ville fut
immédiatement évacuée ne peut balancer à cet égard le témoignage
formellement contraire de Pierre d’Orgemont, mais on peut toujours
induire de son assertion que cette prolongation d’occupation ne fut pas
de longue durée.

D’après ce qui précède, il faut placer la curieuse aventure racontée par
l’auteur du _Ménagier_, entre août 1358 et septembre ou octobre 1359.
Peut-être même pourroit-on remarquer qu’il est difficile de penser que
le sire d’Andresel ait eu avant la cessation des hostilités le loisir ou
le désœuvrement qu’on lui attribue dans ce récit, et ait pu sans crainte
abandonner son commandement pour aller dîner chez lui à quatre lieues de
Melun. Il sembleroit alors qu’on devroit placer cette aventure entre le
départ de Charles V et l’évacuation de Melun, c’est-à-dire du 1er août
1359 à septembre ou octobre suivant.

[252] Jean sire d’Andresel, chevalier, étoit issu d’une ancienne et
illustre maison alliée, au XIIe siècle, à celle de Garlande. Il étoit
fils aîné de Jean d’Andresel, chambellan très-aimé du roi Philippe de
Valois, et fut, à cause de cette similitude de prénom, dit _le Jeune_,
jusqu’à la mort de son père, arrivée entre mars 1344-5 et février
1346-7a. Il fut chambellan du Dauphin, puis du roi Jeana, et ensuite de
Charles V. Compris dans la première promotion des chevaliers de
l’Etoileb en janvier 1351-2, il étoit en 1353 capitaine de l’un des
châteaux de Vernon, et reçut du roi en 1354 deux mille quatre cents écus
d’or comme indemnité de ce qu’il avoit dépensé pour la garde du château
de Landal en Bretagne que le roi lui avoit donné à titre d’héritage et
lui avoit ensuite reprisa. Il avoit épousé, au moins dès 1346, Jeanne
d’Arrablay, fille d’un maître d’hôtel du roi et nièce d’un chancelier de
Francec. En août 1358 il étoit capitaine de Melun et de Bried, en août
1359 capitaine général de cette dernière provincee. Cette même année le
régent lui donna, probablement pour récompense de ses services en Brie,
les paroisses du Chastelier (le Châtelet?), Marchiau (Machault?), Firecy
(Féricy?), Champagne et la Celle (sous Moret?), situées dans cette
provincef, et lui accorda des lettres de rémission dont on n’a conservé
qu’une simple mentiong pour tout ce que lui et ses complices (sans doute
les gens d’armes sous ses ordres) avoient fait en Brie, dans les
châtellenies de Melun et de Moret et au pont de Samois. Après le traité
de Bretigny il fut, avec plusieurs princes du sang et quelques seigneurs
des plus illustres de cette époque, au nombre des otages du roi Jean que
le roi d’Angleterre emmena avec lui de Calais le 31 octobre 1360h. Il
étoit de retour en France au moins au commencement de 1366, car étant en
personnei à Yenville en Beauce, il y passa le 1er avril 1365-6 le
contrat d’un nouveau mariage avec Jeanne de Maligny veuve avec enfans de
Jean seigneur de Rochefort et du Puiset (elle l’avoit épousé en 1347j).
Il prend dans cet acte les qualités de chambellan du roi et de _premier
grand chambellan d’Orlenois et de Valois_. Jean d’Andresel mourut au
commencement de 1368 laissant une succession obérée, malgré ses
nombreuses terres, ses fonctions éminentes et les dons des rois qu’il
avoit servis. Le 7 mars 1367-8 Jeanne de Maligny sa veuve se présenta
devant le Parlement, et jetant sa ceinture dans le parc (espace qui
séparoit les avocats et la cour), déclara renoncer aux meubles et aux
dettes de sa successionk. Elle fut obligée, pour obtenir son douaire
(Tournenfuye, etc.), de recourir à la protection de Charles Vk et de
plaider contre messire Aubert et Guillaume d’Andresel ses
beaux-frèreslm. Elle se remaria ensuite en troisièmes noces à Raoul de
Montigny, chevalier. Jean d’Andresel laissa deux filles, Marguerite et
Jeanne, _nées de deux mères différentes_l, et mariées toutes deux dans
la maison de Montmorency. Six mois après sa mort, sa seconde fille
encore mineure n’avoit pas encore de tuteur, et ses exécuteurs
testamentaires n’avoient pas encore accepté la charge qu’il leur avoit
laisséem.

Quoiqu’on ignore la date de la mort de Jeanne d’Arrablay, il faudroit
lui attribuer l’aventure qui donne lieu à cette note, s’il étoit certain
que Jean d’Andresel n’eût été marié que deux fois. (Nous avons vu en
effet qu’il n’épousa Jeanne de Maligny qu’en 1366.) Mais il faut
remarquer que dans les nombreuses pièces relatives au douaire de Jeanne
de Maligny il n’est dit nulle part que Jeanne d’Andresel, fille encore
mineure de Jean en 1368, ait eu cette dame pour mère, et cependant elle
est citée (mais non nommée) comme _héritière mineure_ de Jean (quorum
unus _aut una_ adhuc minor ætatis) dans l’arrêt du 21 juillet 1368 rendu
au profit de Jeanne de Maligny, et comme fille mineure de Jean dans la
plaidoirie du 5 juin 1368. Si elle eût été fille de Jeanne de Maligny
n’est-il pas naturel de supposer qu’on l’auroit mentionné dans la
plaidoirie et dans l’arrêt? Faut-il donc croire que le sire d’Andresel
eut une seconde femme après Jeanne d’Arrablay et avant Jeanne de
Maligny, et que cette seconde femme, mère de Jeanne d’Andresel, a pu
être en 1359 dame d’Andresel et héroïne de cette aventure? Dom Guillaume
Morin qui a donné dans son _Histoire du Gâtinois_, etc. (Paris, 1630,
in-4º, 461) une généalogie ridicule de la famille Viole dans laquelle il
fait de notre Jean d’Andresel (enté par lui dans cette famille contre
toute preuve et toute raison) deux personnages nommés l’un Pierre et
l’autre Jean, marie le premier à Agnès de Chabannes et le second à Anne
du Bellay. Je me suis demandé à cause de cette assertion si Jean
d’Andresel n’auroit pas été marié en secondes noces à une Chabannes ou à
une du Bellay, mais on ne voit rien de semblable ni dans la généalogie
de Chabannes donnée dans La Chenaye des Bois, ni dans la généalogie
manuscrite de du Bellay par Trinquant, appartenant à la bibliothèque
publique d’Angers et que M. Grille a bien voulu consulter pour moi
exprès sur ce point. Les choses étant ainsi, je crois que jusqu’à ce
qu’on ait une preuve ou au moins un indice plus positif d’un mariage
intermédiaire de M. d’Andresel, il ne faut pas s’arrêter au silence des
plaidoirie et arrêt de 1368, qui est en définitive plutôt une absence de
preuve qu’un argument contraire; on peut donc raisonnablement croire que
Jean d’Andresel fut marié deux fois seulement, que Jeanne sa seconde
fille étoit fille de Jeanne de Maligny, et que Jeanne d’Arrablay est
l’héroïne de l’histoire du _Ménagier_. J’ajouterai en passant que les
expressions réservées dont se sert notre auteur (_du surplus je me tais
et pour cause_) donnent lieu de craindre pour la mémoire de Jean
d’Andresel que cette plaisanterie n’ait été l’occasion d’une scène
violente, si ce n’est tragique.

Il y a au Cabinet généalogique une lettre de ce seigneur qui me semble
présenter tous les caractères d’un autographe. Je crois devoir la donner
ici comme propre à faire connoître avantageusement son éducation et son
style épistolaire. Elle se rapporte à une avance qui lui fut faite le
1er mars 1353-4 par le vicomte de Gisors pour servir à réparer les
fortifications de Vernon. La voici:

«Vicomte, cher ami, je vous envoie un mandement du roy de la somme de
cent livres par. que vous me baillastes et dont vous avez mes lettres
soubs mon scel faisans mention desdites cent livres, car le mandement du
roy fait bien mention comment je les ay mises ès réparations de la ville
de Vernon et comment vous me rendez ma dicte lettre. Si faictes que en
ce par vous n’ait deffaut et je vous en prie, et se vous voulez chose
que je puisse faire, faites-le moi savoir et je le ferai voulentiers et
de cuer. Nostre Sire vous gart. Escript à Paris le mardi au soir VIIIe
jour d’avril (1354).

«J. D’ANDESEL, chambell. le roy.»

Sceau: un lion chargé d’une bande.

  aTitres originaux du Cabinet généalogique.--
  bDu Cange au mot _Stella_.--
  cHist. des gr. of. de la Cour. VI, 307-8.--
  dJ. Reg. 86, 219.--
  eJ. Reg. 90, 326.--
  fTrésor de dom Villevieille.--
  gTable des Mém. de la Ch. des comptes.--
  hChr. de S. Denis, CXXXIV.--
  iJ. 158, nos 25 et 26.--
  jGénéalogie de Courtenay, in-fol. Pr. 366.--
  kReg. du Parl., conseil et plaid. à la date citée.--
  lDuchesne, Montmorency, Pr. 379, 380.--
  mArrêt du 21 juillet 1368, Jugés, XX, 337.


[253] Des ciseaux.

[254] Nager.

[255] Roman dont le premier auteur est l’Indien Sendabad, et qui fut
successivement traduit dans presque toutes les langues. Notre auteur me
paroît avoir ajouté au texte qu’il avoit lu bien des détails qui donnent
des notions curieuses sur les usages de son temps. On peut s’en assurer
en comparant ce passage du _Ménagier_ à l’endroit correspondant d’une
version françoise du même ouvrage écrite en vers au XIIIe siècle, et
imprimée assez incorrectement à Tubingen, 1836, in-8º (V. p. 97). Cette
édition est précédée d’une longue et savante dissertation sur le Roman
des Sept Sages.

[256] Jeune arbre fruitier _enté_, greffé.

[257] Être, exister, _stare_, _je laisserai cela_.

[258] Aujourd’hui courte-pointes, couvre-pieds.

[259] Manteau doublé, ou peut-être aussi manteau _parti_, de draps de
deux couleurs.--En juillet 1401 l’évêque de Paris réclamant comme clerc
un prisonnier que le procureur du roi soutenoit être en habit laïque
citoit à l’appui de son dire un arrêt qui avoit reconnu comme clerc un
boulanger de Montmorency lequel étoit marié et avoit chaperon à cornette
double _de deux divers draps_. (Plaid. criminelles du Parl.) Ces mots
indiquent certainement deux couleurs différentes dans les draps du
chaperon, mais il semble qu’ici (outre qu’il n’y a pas le mot _divers_),
dans l’état où se trouvoit le seigneur rentrant mouillé de la chasse, il
est plus naturel de croire qu’il s’agit d’un manteau doublé.

[260] Grande chaise à dossier.

[261] Coussin, _carreau_.

[262] Escabeau.

[263] Var. B. _roe_.

[264] Piétiner, remuer les pattes.

[265] Lessive.

[266] Peut-être faudroit-il _bagues_, effets, joyaux.

[267] Conseil.

[268] Grande salle à manger, et par extension grand festin, cour
plénière.

[269] Service.

[270] Var. A. _disposer_.

[271] Bas montant très-haut et s’attachant aux _braies_, sorte de
culotte.

[272] Ici, bonnets de nuit.

[273] Sorte de chemise d’homme. On voit dans un compte de la chambre de
Philippe le Bel, en 1307, _des toiles pour draps_ (de lit) _et
robelinges, c’est chemises_ (sic). Il est dit dans la grande ordonnance
des métiers de Paris, rendue par le roi Jean en février 1350-1, que la
façon d’une _robe-linge à homme, d’œuvre commune_, devoit être payée 8
deniers aux couturiers, celle d’une chemise à femme 4 deniers seulement.
(Collect. Leber, XIX, 38, 316.)

[274] Sorte de culotte ou caleçon.

[275] Il est probable qu’au temps où notre auteur écrivoit il y avoit
peu de gens assez éclairés pour avoir une pareille opinion sur les
sorcelleries.

[276] Morceaux de pain plats, _tartines_, qu’on mettoit au fond des
plats et des assiettes de métal pour couper la viande sans les rayer.

[277] Peut-être hérissé, frotté à rebrousse-poil, _estrusser_ signifiant
frotter.--Var. A et C. _estou_.--Le drap _estru_ ou _estou_ me paroît
devoir désigner en tout cas un drap à longs poils dans lesquels les
puces pouvoient s’embarrasser. Les draps étoient d’abord faits à longs
poils et ne devenoient ras qu’après avoir passé par les mains des
_tondeurs de draps_. C’étoit un métier important et riche au moyen âge.

[278] Voy. p. 13.

[279] Paille, et je crois aussi feuillées ou herbes qu’on répandoit dans
l’intérieur des maisons.

[280] Fourrures; nous avons déjà vu p. 169 qu’on en mettoit sur les lits
pour servir de couvertures. On portoit aussi beaucoup de vêtemens
fourrés.

[281] Petite mouche, _cousin_, moustique. On disoit aussi _cincenaude_.
Var. B. _cincerelles_. Voy. DU CANGE à _Zinzala_.

[282] Ou _cincenaudier_, _moustiquière_, grand rideau, sorte de cloche
d’étoffe claire qui enveloppe exactement un lit et empêche les cousins
ou moustiques d’approcher. Var. B. _cincenier_.

[283] Petites touffes, _flocons_ de fougère. Var. A. _bloqueaulx de
feuchelle_.

[284] Fils, ficelles. Var. A. _et afilez_.

[285] Franges, _effiloques_.

[286] Le fiel.

[287] Secouez.

[288] Petites baguettes.

[289] Quoique les vitres aient été connues dès le temps de Théodose le
Grand, qui mourut en 395, elles furent bien longtemps réservées pour les
églises et les palais des rois. Elles étoient ordinairement chargées de
peintures. Les fenêtres vitrées que le duc de Berry fit mettre à son
château de Bicêtre étoient d’assez haut prix pour que les Parisiens,
avant de brûler ce bel édifice, en 1411, aient eu soin de les emporter
_avec les beaux huis_ (peut-être au reste étoit-ce des vitraux
peints.--Juv. des Ursins, in-fol., 230). On voit ici que l’auteur du
_Ménagier_, quoique riche puisqu’il avoit, ainsi que nous le
remarquerons plus tard, un train de maison considérable, n’avoit ses
fenêtres fermées qu’à l’aide de toile ou de parchemin. J’ignore à quelle
époque la fermeture des fenêtres par le moyen de vitres devint d’usage
commun. Une dissertation sur ce sujet, insérée dans _le Mercure de
France_ d’octobre 1738 et réimprimée dans la collection Leber (t. XVI,
p. 410), avec notes et addition, ne traite que des vitres des églises et
des palais, et ne dit rien de celles des particuliers. Le verre étoit
encore d’un très-haut prix au XVe siècle. On voit dans un compte de la
reine Marie d’Anjou de l’année 1454 la mention de deux mains de papier
et _d’huille à l’oindre pour estre plus cler_, achetés pour garnir six
châssis de bois que la reine avoit fait placer dans la chambre où logea
le roi de Sicile à Chinon quand il vint l’y voir. (K. reg. 55, fol. 99
et 102, indiqué par M. d’Arcq.) Sauval (III, 417) cite bien un compte du
domaine de Paris pour 1474 où l’on remarque _deux panneaux de verre
blanc neuf pour le comptouer_ de madame de Montglat (femme de Pierre
Bureau, seigneur de Monglat, trésorier de France et concierge de
Beauté), mais c’étoit une dépense faite aux frais de l’État et qui
pouvoit être assez élevée.

[290] Siéges sans dossier.

[291] Sur le plancher.

[292] Votre mari.

[293] On leur donne du miel? (dans leur eau?) Je ne sais ce que veut
dire ici _mis au bas_ (ordinairement _rabaissé_). Il paroîtroit par ce
passage qu’on déferroit les chevaux quand ils revenoient de voyage.

[294] Les maris, souverains (maîtres) de la maison.

[295] Pénitenciers, ceux qui font pénitence.

[296] Maîtriser, retenir.

[297] Plaisanterie.

[298] A propos? Var. B. _attrait_.

[299] Premièrement.

[300] Un mai à sa porte et de l’herbe verte dans les salles de sa
maison.

[301] Joyeusement. Var. B. _esclatéement_. C. _esbaudement_.

[302] Difficulté.

[303] Il manque le commencement de la phrase dont le sens devoit être:
_Elle prit soin de la fille de son mari, puis quand elle fut en âge_,...

[304] L’_Histoire de Mélibée et de Prudence_, écrite en latin en 1246,
par Albertan, avocat de Brescia, a été traduite au moins trois fois en
françois. (Voir les _Manuscrits français_ de M. Paris, t. V, p. 58.) La
traduction donnée par l’auteur du _Ménagier_ est celle de frère Renaud
de Louens à qui l’on doit une traduction de Boëce écrite en 1366. Ce
passage du _Ménagier_ à été collationné sur le manuscrit du roi,
7072^{3.3.}, qui donne une bonne leçon de _Mélibée et de Prudence_. J’ai
mis entre crochets les passages qui, bien que paroissant devoir faire
partie du texte, sont omis dans les trois manuscrits du _Ménagier_, et
j’ai noté au bas des pages quelques variantes importantes.--L’_Histoire
de Mélibée et de Prudence_ a eu un grand succès au moyen âge, et a été
imprimée plusieurs fois (voy. le _Manuel du Libraire_, qui l’attribue à
tort à Christine de Pisan, au mot _Mélibée_; elle se retrouve aussi à la
suite du _Jeu des Échecs moralisés_, Paris, Michel Le Noir, 1505, in-4º.

[305] Se contînt.

[306] Var. M. du R. _selon ce que dit Jhésu-Syrac_. Cette sentence est
dans les _Proverbes_, XV, 13, et non dans l’_Ecclésiastique_ ni dans
Sénèque.

[307] _Ecclesiast._ XXX, 25.

[308] Vers, mites.

[309] Alliés.

[310] Soutenir une partie, un parti, contre son adversaire.

[311] Espions.

[312] Ordinairement _sentinelles_.

[313] Var. _escharnirent_.

[314] Le bon conseil (la bonne décision) manque quand on en a le plus
besoin.

[315] D’abord Rabbi Moïse Séphardi, né en 1062, à Huesca en Aragon, se
fit chrétien en 1106. Il a composé la _Discipline de clergie_, publiée
par la Société des Bibliophiles, en 1824, et à Berlin, en 1827, in-4.

[316] Var. A. B. C. _Jhérémias_. Cette sentence est en effet dans
l’Ecclésiastique (XXV, 30), livre de la Bible écrit par Jésus fils de
Sirach.

[317] Var. _propos_.

[318] Le M. du Roi ajoute: _à femme que à homme, car il apparut
premier_.

[319] Var. _fumière_.

[320] Var. M. du R. _A l’homme en adjutoire, mais en dommage et en
nuisement_.

[321] Avis, plan, projet.

[322] Var. A. B. C. _Jhérémias_ (c’est l’Ecclésque, XIX, 8).

[323] En parlant à ton conseiller.

[324] Var. _Et de laquelle le prince se desjusne matin_. Le reste de
cette phrase n’est pas dans le manuscrit 7072^{3.3}.

[325] Var. _Lequel conseil je t’ay dit dessus que tu dois eschever et
fuir_.

[326] Var. _Tu l’aies essayé_.

[327] _Le sage qui doubte eschiève tous maux._

[328] Guivre, vipère. Variante mauvaise des manuscrits A. B. C. mure
(souris).

[329] A force de se défier des autres leur ont montré à les tromper.

[330] Var. _d’eschaffaulx_.

[331] Guérites, tourelles à mettre des sentinelles.

[332] Frais.

[333] C’est le secrétaire d’État de Théodoric, m. vers 562.

[334] Combien.

[335] Var. du M. du R.: _de tes ennemis; de la vengence se engendrera
autre vengence, hayne, contens, guerre et dégustemens de tes biens_.

[336] Var. (mauvaise) _David_.

[337] Se retirent, se retiennent.

[338] Négligeant de faire; en ne faisant pas.

[339] Faire droit, rendre la justice.

[340] Au moyen âge, quand les criminels n’étoient pas des gens de la
basse classe, les juges se bornoient le plus souvent à les condamner à
des amendes envers le roi et à des dommages et intérêts envers la partie
lésée; mais ces amendes et dommages étoient souvent très-élevés et de
nature à ruiner ceux à qui on les infligeoit. On voit dans les registres
du Parlement et dans le _Trésor des Chartes_ de fréquens exemples de
cette coutume, souvenir des anciennes lois barbares où l’on trouve le
tarif et la taxe de chaque crime suivant la condition du criminel et
celle de la victime.

[341] Var. _ses péchiés lui semblent plus pesans, sa peine lui
semble_....

[342] Var. _attrempance_.

[343] Sans doute l’auteur du _Liber de Amore_.

[344] Le pape Innocent III, ou Innocent, moine anglois. L’un des deux
est auteur de la _Moralisatio Scaccarii_, voy. Fabricius, 1754, in-4º,
t. IV, p. 34.

[345] Var. _assez légièrement fiert li glaives maintenant l’un, jà
tantost l’autre_.

[346] Transigiez, traitiez.

[347] De longtemps.

[348] Cautions.

[349] Cautions.

[350] C’étoit aussi l’usage le plus fréquent dans la jurisprudence du
Parlement de Paris. On voit constamment dans les registres du Criminel,
des accusés élargis sous caution, tantôt dans l’enceinte du Palais
seulement, tantôt dans celle des bastides (portes) de Paris, à la charge
de se représenter à une époque fixée, quelquefois en personne et
quelquefois par procureur.

[351] Irritation.

[352] Difficilement.

[353] Voy. ci-devant, p. 99.

[354] Provision en général. Voy. Du Cange aux mots _Garnire_,
_Garnisio_. L’ordonnance de l’hôtel du roi, faite au Louvre en janvier
1386-7, défend que personne ne demande aucune chose _sur les garnisons
faites pour la dépense de l’hostel, soit blés, avenes, foing, busche_,
Taillevent (c’est Guill. Tirel, auteur du _Viandier_, et alors écuyer de
cuisine du roi) est chargé par la même ordonnance de _gouverner les
garnisons_ (Den. Godefroy, H. de Ch., VI, 712, 715). La reine avoit
aussi un maître de ses garnisons. Bastin de Breban, revêtu de cet office
en 1371, étoit alors poursuivi pour avoir pris, au nom de la reine (en
vertu du droit de prise), des vins qu’il avoit payés à vil prix et
vendus dans sa taverne à son profit (Plaid. civiles du Parlement, 4
décembre 1371).

[355] Rouet à filer.

[356] D’une bonne famille.

[357] Ce passage, joint à ceux des pages 160 et 169, nous fait bien
connoître la manière dont on étoit couché au XIVe siècle.

[358] Souliers.

[359] L’histoire de Jeanne la Quentine a été reproduite dans les
Nouvelles de la reine de Navarre qui l’attribue à une bourgeoise de
Tours (38e Nouvelle ou 8e de la 4e journée). Mais l’auteur du _Ménagier_
donnant les noms et disant qu’il la tenoit de son père, on ne peut
douter qu’elle ne soit en effet arrivée à Paris. La reine de Navarre a
pu entendre raconter cette histoire à quelqu’un qui l’avoit lue dans le
_Ménagier_, et en placer la scène à Tours. Elle a donné également
(Nouvelle 37e), en l’attribuant à une dame de Laval-Loué, et avec
quelques variantes, un exemple analogue d’indulgence conjugale rapporté
par le chevalier de La Tour comme positivement arrivé à la dame de
L’Anguillier sa tante. Le chevalier de La Tour raconte (chap. XVII) que
son oncle étoit «à merveilles luxurieux, tant qu’il en avoit tousjours
une ou deux à son hostel, et bien souvent se levoit de delez sa femme et
aloit à ses foles femmes; et quant il venoit de folie, il trouvoit la
chandelle allumée, et l’eaue et le touaillon à laver ses mains: et elle
lui prioit qu’il lavast ses mains; et il disoit qu’il venoit des
chambres.--Et pour tant Monseigneur que vous venez des chambres,
avez-vous plus grant besoin de vous laver.» C’est autant d’humilité que
la bourgeoise, mais avec une délicatesse qui sent déjà la femme de
qualité.

J’avois espéré trouver le nom et par suite la profession de _Thomas
Quentin_ dans le _Livre de la Taille_ en 1313 (Paris, 1827, in-8º), car
le père de l’auteur du _Ménagier_ et Thomas Quentin qu’il connoissoit,
ont pu vivre dès cette époque, mais son nom n’y figure pas. Je l’ai
aussi cherché inutilement dans les comptes de la prévôté de Paris donnés
par Sauval et dans le recueil manuscrit des _Épitaphes de Paris_.

[360] Vous ne pouvez en cela être remplacée par personne.

[361] Copeau, morceau.

[362] Séparer du reste.

[363] Var. Bryant.--C’est à l’auteur du _Ménagier_ que nous devons de
connoître la profession de J. Bruyant, qui n’est indiquée dans aucun des
deux manuscrits de son poëme qui sont à la Bibliothèque du Roi. Cette
édition du _Chemin de Povreté_, outre qu’elle a été collationnée sur les
trois manuscrits du _Ménagier_, a été revue sur le manuscrit du Roi, nº
7201 (décrit T. VI, p. 240, des Manuscrits françois de M. Paris), qui a
donné souvent d’utiles variantes. Il résulte de l’explicit du second
manuscrit (S.-Victor, 275), cité par M. Paris, et que je n’ai pas pu
voir, que ce poëme a été écrit en 1342.

En 1500 le célèbre Pierre Gringore donna sous le titre de _Chasteau de
Labour_ une imitation _paraphrasée_, mais une imitation très-positive de
ce poëme. C’est le même plan, ce sont les mêmes personnages allégoriques
et souvent les mêmes détails. Le _Chasteau de Labour_ vaut sans doute
beaucoup mieux que le _Chemin de Povreté_, mais il est fâcheux que
Gringore se soit approprié l’idée de Jean Bruyant sans faire part à ses
lecteurs de l’obligation qu’il avoit au poëte de XIVe siècle.

[364] Se garnir, assurer sa subsistance.

[365] Garantir.

[366] Fortune.

[367] Féries, jours de fête.

[368] Mauvais heur, malheur.

[369] Se montra.

[370] Reprirent, de r’avoir.

[371] Tira.

[372] Poussa.

[373] S’attacha? Var. 7201, _destrouça_.

[374] Vite.

[375] Gris de fer. Plus ordinairement employé pour désigner la robe d’un
cheval.

[376] Sorcière.

[377] Poitrine.

[378] manier, pétrir?

[379] Tourmenter.

[380] Bûche.

[381] Réjouit.

[382] Sentive, du sens, maladie morale?

[383] Diablerie.

[384] A aucun prix, d’aucune manière.

[385] Attristé, ému.

[386] Qui doit être pendu ne sera pas noyé, il faut subir son sort.

[387] Aller, marcher.

[388] Faire mal, agir sottement.--Les richesses sont inutiles quand on
les a seulement en sa vieillesse et qu’on n’en peut plus jouir.

[389] Mauvaise, infâme.

[390] Supporter.

[391] Secoué, remué.

[392] Profit.

[393] En en recevant une récompense sur laquelle nul ne peut rien fonder
de solide.

[394] Domination.

[395] Chiens mâtins.

[396] A ton aide. Ce vers ne rime pas avec le précédent à moins qu’on ne
prononce _ayé_.

[397] Moitié, de son côté.

[398] Capitaine.

[399] Cours.

[400] Il manque ici dans les manuscrits un vers qui cependant n’est pas
nécessaire à l’intelligence de la phrase.

[401] Tolérance.

[402] Fermeté.

[403] Retenue.

[404] Murmure.

[405] Mauvais vers mis là pour la rime, et dont le sens est _et de
soi-même ne se modère_.

[406] Mot auquel je ne connois pas de sens. Les manuscrits A, B, C,
portent _ma seur mesure_, ce qui est un contre-sens; le sens exige
_male_, mauvaise.

[407] Les manuscrits A, B, C, portent _brouet_ (sauce). On trouve dans
Roquefort, _brouvette_, tombereau dans lequel étoient conduits les
criminels au supplice.

[408] De bon nid, de bonne race, dont on a fait un seul mot,
_débonnaire_. Voir Henry Estienne, _Précellence du langage françois_, p.
93.

[409] Fin, rusé.

[410] Var. B, _en sa fiance est Couardie_.

[411] Maltraité.

[412] Pourtant.

[413] Énervés; on disoit plus souvent _afétardis_.

[414] Relevé.

[415] Subtilité.

[416] Suit.

[417] Il fait faire mains maux.

[418] L’éducation.

[419] Affamé comme un loup.

[420] Paroît.

[421] Enchérissement sur la médisance.

[422] Libertinage.

[423] Se rebuter.

[424] Horreur.

[425] Gros trait d’arbalète.

[426] Passage, position.

[427] Var. 7201, _deuvier_ (dévier, périr?). En laissant _deviner_ il
semble qu’on peut entendre ces deux vers ainsi: Regard qui fait rêver
les amoureux insensés et dans lequel ils croient follement lire les
sentiments qu’ils inspirent.

[428] Plaît.

[429] Matin.

[430] Vraiment.

[431] C’est la raison qui parle et qui appelle la mesure, la modération,
sa sœur.

[432] Réglée.

[433] Var. B, _défeuillée_.

[434] Var. B, C, _plus attrait_.

[435] En poursuivant, dans la suite.

[436] Escrime.

[437] Bouclier.

[438] Je crois que ce vers doit être écrit ainsi: _En qui veut à parler
emprendre_.

[439] Son.

[440] Fleur de la farine.

[441] Ce _qui_ se rapporte à _l’adresse_. Les vers entre crochets ne
sont que dans 7201.

[442] Var. A, B, C, _paré_.

[443] Demeurer.

[444] S’y soustraire.

[445] Branche d’arbre tordue avec laquelle on lie les fagots.

[446] Laïques.

[447] Défait, en désordre. Var. 7201, _descarré_ (dérangé?) et
_encarré_, au vers suivant.

[448] Bourbiers.

[449] Dedans.

[450] Peut-être.

[451] Acte nuisible.

[452] C’est la raison qui parle.

[453] Se rapporte à _maintient_ au vers précédent. _Il ment celui qui
maintient que destinée, etc._

[454] Détourné.

[455] Déconfit.

[456] Accroupi, retiré.

[457] Conduit.

[458] Var. 7201, _clèrement et apparcevoir_.

[459] Les pans de ta robe.

[460] Coupée en deux, différente. Var B. et 7201, _impartie_.

[461] Excite.

[462] Précipités.

[463] Matés, lassés.

[464] Naturels, naïfs.

[465] En toute situation.

[466] Critiquer.

[467] Trouves.

[468] Le Mes 7201 ajoute:

    La fait crainte à lui obéir:
    Tu le pues clèrement véir.


[469] Moitié, portion.

[470] Mérite son affection.

[471] Fiel.

[472] Aille, quoi qu’il en soit.

[473] Tromperie.

[474] Blâme.

[475] Reproche.

[476] Difficultueux.

[477] De même, tu ne dois pas être difficile.

[478] Si tu penses bien à ce qu’elle t’a dit.

[479] Intelligence, compréhension.

[480] Tromperie.

[481] Chicane.

[482] Droit, puissance.

[483] En arrière: de rester.

[484] Spécial, dévoué.

[485] Sans dépenser ton avoir qu’il faut tenir serré.

[486] Autant que tu le pourras.

[487] Joyeux.

[488] Tromper.

[489] Satisfaire.

[490] Prendre à crédit.

[491] Compte mal (à ton avantage).

[492] Assigner.

[493] Convenablement.

[494] Agréable.

[495] Tromperie.

[496] Observateur.

[497] Mot dont j’ignore le sens ici.

[498] Caresser.

[499] Amasse.

[500] Var. B. _je ment_.

[501] Établir.

[502] Moquerie.

[503] Cacher.

[504] Il me paroît impossible d’entendre par ces mots,
très-distinctement écrits dans tous les manuscrits, _ceux qui habillent
les rois_. Je crois que _rois_ doit désigner ici quelque étoffe
grossière. L’auteur ne termine d’ailleurs que très-rarement deux vers de
suite par le même mot pris dans la même acception.

[505] Exciter, pousser.

[506] Parvenir.

[507] Prendre. (Cela n’est utile qu’à ceux dont la robe est déchirée,
qui n’ont pas de quoi se vêtir?)

[508] C’est le titre de l’ouvrage de Gringore; voy. la note 1, § 2, page
4.

[509] C’est le commencement qui décide de tout l’œuvre. Voir sur ce
très-ancien proverbe, _Livre des proverbes français_ de M. Le Roux de
Lincy, II, 148.

[510] Vers omis dans 7201 qui ajoute après le suivant: _Et, ne
finast-il, détonner_.

[511] Désireux.

[512] Expression usitée jusqu’au XVIIe siècle et dont il est bien
difficile de déterminer le sens précis. Si on adopte l’opinion de
Nicod, ce mot représente quelquefois le μὡν et d’autres fois le μεν des
Grecs; dans le second cas, ce passage signifieroit: _Il n’a certes pas_
(ce défaut).

[513] Var. 7201.

    Lors regarday moult voulontiers
    De ces ouvriers la contenance.


[514] C’étoit du gros pain qu’on apportoit de Corbeil à Paris, le plus
ordinairement par la Seine. Voy. Le Grand d’Aussy, I, 105. Nous verrons
dans le _Viandier_ qu’on s’en servoit pour faire des _tranchouers_.

[515] De l’eau.

[516] Petit pain fait pour une seule personne. Voy. Le Grand d’Aussy, I,
116.

[517] Var. B. _de Bourgongne et Angevin_.

[518] Voir sur ce vin d’Auvergne si estimé au moyen âge, Le Grand
d’Aussy, III, 5.

[519] En passant.

[520] Var. 7201:

    Ne qu’il pourroit sans autre vivre.


[521] Briquet; _esca_, _esche_ signifiant l’amadou ou au moins une
matière inflammable aux étincelles provenant du briquet.

[522] De la lune.

[523] Var. A. _Perrecin_.

[524] Mettre de la terre par-dessus.

[525] Cost, _costus_.

[526] autrement _orvale_; _sclarea, horminum magnum_.

[527] Panais? Var. B. _Pavot_.

[528] C’est ce qu’on appelle _faire blanchir_ les épinards, les faire
bouillir et changer l’eau.

[529] Joubarbe.

[530] Resserrer.

[531] Var. B. _Violiers_.

[532] La _Violette de caresme_ doit être la violette dite de _Mars_ dans
la _Maison rustique_, etc., et dans le singulier livre intitulé le
_Quadragésimal spirituel_, ch. VIII. C’est la violette commune. Quant à
celle d’Arménie, je ne la vois citée que dans le _Ménagier_. Ce pourroit
être la violette de Parme.

[533] Basilic.

[534] Semée l’année précédente.

[535] Il y a de l’art à la cueillir.

[536] Il ne monte pas.

[537] C’est le fameux Bureau de La Rivière, favori de Charles V, mort le
16 août 1400, et enterré dans l’abbaye de Saint-Denis. La laitue
d’Avignon me paroît être sans doute la même que notre Romaine, seule
espèce de laitue à graine blanche qu’on connût encore au XVIe siècle
(voy. _Maison rustique_, 1570, ch. XIV). C’est donc à Bureau de La
Rivière que nous devons cette salade devenue d’un usage si commun.
Bureau de La Rivière a dû aller plusieurs fois à Avignon; mais il y
passa notamment en mai 1389 avec Jeanne, comtesse de Boulogne et
d’Auvergne, qu’il avoit été demander en mariage pour le duc de Berry à
Gaston Phébus, comte de Foix, son tuteur. Cette princesse qui l’avoit
prise en amitié, lui sauva la vie en 1392, quand ce grand homme faillit
être sacrifié aux haines des oncles du roi. (Voir Froissart à l’année
1392.) Est-ce donc ce voyage de 1389 qui nous a valu la Romaine?

[538] C’est quatre pouces. La perche (mesure de longueur) des environs
de Paris étoit de 18 pieds et le _dour_ ou quatre pouces. Je sais bien
que Nicod donne au dour quatre doigts, ou la longueur d’un poing serré,
ou enfin le _quart_ du pied-de-Roi, et le fait venir du grec δὡρον,
et que Du Cange l’évalue aussi à _trois pouces_, mais la valeur de
_quatre pouces_ est constamment attribuée au dour dans tous les anciens
terriers des environs de Paris. Cette circonstance me semble devoir
fixer la longueur du dour à quatre pouces. J’ajouterai que ce passage
du _Ménagier_ me paroît confirmer cette évaluation, puisqu’il est
plus naturel que l’auteur fasse varier la profondeur de la plantation
de quatre à six pouces que de trois à six, ce qui constitueroit une
différence de moitié.

[539] Ou un morceau de drap (au lieu du fétu de paille) afin que l’eau
en découle goutte à goutte sur le pied de la plante.

[540] _Arroches_, plante potagère appelée aussi _Follete_ ou
_Bonne-Dame_.

[541] Aussi.

[542] Du temps de Pâques (à manger à Pâques).

[543] Couper les poirées montées à graine.

[544] La Notre-Dame de septembre?

[545] Var. B. _Dour_.

[546] De la lune.

[547] L’Annonciation, 25 mars.

[548] De la grosseur.

[549] Il semble qu’il faudroit _et_.

[550] A. et C. ajoutent: _qu’elle soit si fort serrée_.

[551] Nos ancêtres faisoient une grande consommation de roses et
d’autres fleurs en général. Nous verrons tout à l’heure dans les menus
de grands repas, l’acquisition de chapeaux ou couronnes de fleurs pour
les convives. On voit dans les comptes du duc d’Anjou pour 1379, un don
de dix francs fait par mandement de ce prince, en date du 8 juin, _à
Yolent, jadis femme de feu Gillet Le Pelletier, en récompensation de ce
que depuis que Monseigneur estoit venus en la ville de Paris_ (c’étoit
en mai seulement) _elle l’avoit très-bien servi de roses et de flours_
(K. 52, 3, fol. 93 vº et 101). L’auteur des _Rues et églises de Paris_,
qui écrivoit tout au commencement du XVIe siècle, estimoit à quinze
mille écus la dépense annuelle qui se faisoit à Paris, «en chapeau de
fleurs, bouquets et may verds tant pour noces que confrairies, baptêmes,
images des églises, audiences de Parlement.... le Trésor, Chastelet et
aussi pour festins et banquets qui se font en l’Université en faisant
les gradués et autrement.»

[552] Ce doit être, sans aucun doute, une pièce de feutre ou un coussin
bourré, que les porte-faix mettoient sur leur tête ou sur leur épaule
afin que les fardeaux ne les blessassent pas. On disoit aussi _la
feutreure_. Voy. Du Cange à _Feutrum_, où ce mot ne semble pas bien
expliqué.--Il me paroît de même que dans les exemples cités dans Du
Cange au mot _Feltrum_, _afeutrement_ signifie le coussin garnissant la
selle, et qu’un cheval _désafeutré_, signifie un cheval privé de sa
selle plutôt que de housse et de couverture. Il est parlé d’un _porteur
d’afeutrure_ dans le mariage des quatre fils Aymon, t. I, pag. 369 des
_Mystères du XVe siècle_, de M. Jubinal.

[553] Maître-d’hôtel ou intendant: _Dispensator_; de là les Spencer en
Angleterre. Froissart appelle toujours Hugues Spencer, _Hue le
Despensier_.

[554] Moqueurs.

[555] Les trois manuscrits ajoutent ici la phrase suivante qui paroît
singulièrement placée en cet endroit: _Et nota que qui veult faire
chandelle de suif, il est neccessaire de très bien faire sécher son
lumignon au feu_.

[556] On trouve dans la grande ordonnance rendue par le roi Jean, en
février 1350-1, pour remédier à l’augmentation de prix de toutes choses
et surtout de la main-d’œuvre, produite par la peste de 1348 et la
disette, le montant des salaires exigibles par quelques domestiques. On
y voit que les chambrières des bourgeois de Paris gagnoient 30 sols par
an et leurs chaussures; un vacher gardant trente vaches, 50 sols; les
meilleurs chartiers sept livres; les soyeurs (scieurs, moissonneurs) de
grain, 2 sols ½ par jour. Les laboureurs ne pouvoient prendre que 24
s. pour la façon d’un arpent à 4 labours, et les faucheurs de prés que 4
s. par arpent, etc. (Le marc d’argent valoit alors 6 fr.: aujourd’hui 52
fr.)

[557] Sorte d’ordre ou association religieuse, tenant le milieu entre la
vie laïque et la vie monastique (voy. _Œuvres de Rutebeuf_, t. I, pag.
160). Nous verrons plus loin (p. 61) que cette dame Agnès la béguine,
quoique sous les ordres de la jeune femme de l’auteur, étoit cependant
pour elle une sorte de duègne ou gouvernante. Il résulte de cet article
que l’auteur du _Ménagier_ avoit un grand nombre de domestiques.

[558] Livre de dépense.

[559] Ses répondans. Il y avoit dès lors et sans doute antérieurement
des _recommanderesses_ ou femmes tenant des espèces _de bureaux de
placemens_. L’ordonnance de 1351, déjà citée p. 56, leur assigne 18
deniers pour leur salaire d’avoir placé une chambrière, et 2 sols pour
une nourrice, _à prendre tant d’une partie comme d’autre_, et leur
défend, _sous peine de pilori_, de louer ou recommander la même
chambrière ou nourrice plus d’une fois dans la même année.

[560] Se quereller.

[561] L’auteur, se sert, en cet endroit, d’expressions qu’il étoit
difficile de reproduire, et manque lui-même au précepte qu’il vient de
donner à sa femme quelques lignes plus haut. Néanmoins la délicatesse
qu’il témoigne ici, _au moins en intention_, est remarquable pour son
époque. On étoit alors si peu scrupuleux que ces expressions étoient
employées pour désigner certains mets de figure fort inconvenante. Voy.
Legrand d’Aussy, t. II, pages 304, 305.

[562] La gentille, la galante. Voir au ch. CXXII du chevalier de La
Tour, la curieuse histoire d’une association amoureuse dite des Galois
et Galoises.

    Par ce point-là je n’entends, quant à moi,
    Tours ni porteaux, mais gentilles Galoises.
          LA FONTAINE, _les Rémois_.


[563] Tabourets de toute la longueur des bancs. Les banquiers et les
formiers étoient des housses placées sur les bancs et les formes
(escabelles). Un _banquier à_ (orné de figures d’) _oiseaux_ est cité
dans l’Inventaire de R. Picque, archevêque de Reims (1389) au ch. des
_couvertoirs et tapis_. On voit dans la planche pag. 9 du t. I, l’auteur
et sa femme assis sur un _banc_ recouvert d’un _banquier_; ils
s’appuient sur des _coustes_ ou _oreillers_, et la femme a les pieds sur
un _marchepié_ qui paroît à la droite de l’homme.

[564] On verra dans les comptes d’Isabeau de Bavière pour les années
1408 et 1409 (Archiv. du Roy. K., 268), dont notre collègue M. de Lincy
donnera de longs et très-curieux extraits dans son appendice de la
première partie des _Femmes célèbres de l’ancienne France_, actuellement
sous presse, que cette princesse dépensoit des sommes considérables en
_bêtes de chambre_, mais des gens de condition plus modeste mettoient
aussi un assez haut prix à de certains oiseaux. En 1406, Augustin
Isebarre, changeur de Paris, accusé d’avoir eu des acointances avec un
certain Sansonet marchand d’oiseaux qui avoit, avec d’autres, volé pour
4,000 liv. de vaisselle et joyaux dans le _retrait_ (cabinet) de la
reine, disoit qu’il l’avoit connu parce qu’_un sien varlet lui dit que
Sansonet avoit une très bonne linotte, et l’acheta 40 sols_. (La valeur
de 2 ou 3 septiers de blé.) Nous verrons plus loin (à la fin du
_Viandier_) l’auteur parler encore d’oiseaux, et notamment de ceux
d’Hugues Aubriot.

[565] _Recipe._

[566] Voir l’art. V de cette distinction au chapitre des _Menues
choses_.

[567] Graisse. Var. A. _Sang_.

[568] Mettre une bête morte là où il mettra ensuite son poison.

[569] Mettre à l’air, sécher.

[570] Provisions en général, voy. t. I, pag. 237.

[571] Aisselles, petits ais, petites planches.

[572] Aconit, en espagnol _rejagar_. (NICOT.)

[573] L’auteur a voulu parler ici de l’_éponge_, car je ne vois pas que
ce qu’il dit de l’_espurge_ puisse convenir en rien à l’herbe qui porte
ce nom (_Cataputia._--Voy. Nicot et le _Grant herbier en françois_).
Plus loin il emploie encore le mot _espurge_ évidemment pour désigner
l’éponge.

[574] La plus grande partie de la poussière.

[575] Var. C. _vergettes_.

[576] Sans doute _terre à foulons_, argile dont on se sert encore
quelquefois pour enlever les taches de graisse, surtout sur le bois.

[577] De couleur bleue.

[578] Ces mots qui se trouvent dans les trois manuscrits me paroissent
être une observation critique, un doute de l’auteur sur une recette
qu’il transcrivoit. Nous trouverons encore de semblables remarques dans
le cinquième article de cette distinction.

[579] Le vêtement (auquel est joint la fourrure). On appelloit souvent
_robe_ un habit complet, et _garnement_ chaque vêtement composant la
_robe_; ainsi, dans ce cas, le surcot, le corset, la cotte, le manteau
étoient dits _garnemens_. Voir la collection Le Ber, XIX, 156, 374, 383,
etc.

[580] Fleur de farine: nous verrons souvent dans le _Viandier_ le mot
fleur employé seul dans ce sens.

[581] Suppléez _tant qu’elle revienne_.

[582] Gros tonneau qui contenoit, à la mesure de Paris, 54 setiers de 8
pintes (la pinte 2 livres pesant d’eau, un peu plus qu’une bouteille
ordinaire, 93 centilitres) ou 391 litres 76.

[583] Nom parisien du raisin noir. Voir le Dict. de Nicot.--Var. B.
_mourillons_.

[584] Var. A. _la sente_.

[585] _Sileos_ ou _siler montanum_ dans le _Grant herbier_.

[586] _Cardamomon_, employé souvent dans le _Viandier_.

[587] Var. B. _d’un_. Percer d’un greffoir ou d’un petit bâton aiguisé?

[588] Vide.

[589] Le setier contenoit 8 pintes.

[590] Coussinet, emplâtre.--Les blancs frappés sous le règne de Charles
VI, avoient 11 à 12 lignes de diamètre.

[591] La quarte ou pot contenoit deux pintes.

[592] Rez-de-chaussée.

[593] Outre le temps convenable: trop longtemps.

[594] S’accouder.

[595] Coudes.

[596] S’en voise, s’en aille, fuie.

[597] Avec un large pied.

[598] Instruire.

[599] En jetant leur chemise dessus? On sait que nos pères couchoient
sans aucun vêtement.

[600] Suppléez: _et pendant que_.

[601] En état d’empêchement.

[602] Il y en a dix-huit. Ces conditions du bon cheval ont été souvent
imprimées au XVIe siècle.

[603] Les hanches. On appeloit en termes de vénerie un chien bien harpé
celui qui avoit les hanches larges et grosses. Voy. Salnove.

[604] Ou _coite_, de _quies_? S’il se tient bien en repos?

[605] Fumier, litière.

[606] Je n’ai pu trouver la signification de ce mot.

[607] Uni.

[608] Qu’il n’ait ni courbes ni fusées.

[609] S’il a des durillons?

[610] Il semble que ce doit être garrot.

[611] Voir ci-après, p. 75, note 1.

[612] De l’autre côté.

[613] Le paturon.

[614] Var. A. _subaudeure_, enflure?

[615] Les manuscrits A et B, répètent ici textuellement ce qui précède
depuis _tu dois aller au costé_ jusqu’à _Fourme sur couronnelle_; il n’y
a de plus ici que les mots _malandre est_, etc., placés, p. 74, entre
crochets.

[616] Var. A. _stourcées_.

[617] Sortir.

[618] Grappe.

[619] A la même hauteur.

[620] Marchandé.

[621] Assuré.

[622] Son.

[623] Pour vendre chèrement. Var. B. _prouvende_, ration.

[624] Phrase obscure qui me paroît signifier que le remède des malandres
sert aussi pour l’enflure des jambes de derrière.

[625] Sorte de résine.

[626] Blancs d’œufs.

[627] Tamisé.

[628] Var. A. _du seing de sain_. J’ignore ce que peut signifier ici le
mot _saing_.

[629] Tuyau, chalumeau.

[630] Avives, glandes derrière la mâchoire.

[631] Cacher?

[632] La valeur de deux setiers de blé environ, donnée au maréchal pour
le traitement assez compliqué de cette maladie.

Les manuscrits donnent ensuite un Traité de l’épervier que l’auteur
avoit annoncé devoir faire le 2e article de la 3e distinction. J’ai
pensé devoir rétablir la division indiquée par l’auteur et suivie
jusqu’ici par lui, et j’ai renvoyé à la fin du livre le Traité de la
chasse à l’épervier.

[633] Le Ms. C porte avant ces mots, _Cy commence le Viandier_. C’est
pourquoi j’ai renvoyé au _Viandier_ dans diverses notes de cet ouvrage.

[634] On appeloit ainsi l’espace placé entre les rues Saint-Denis,
Pierre-à-Poisson et la Grande-Boucherie, devant laquelle il se
prolongeoit jusqu’à la rue Pied-de-Bœuf. (Voir Corrozet, éd. 1543, le
Plan de Turgot, etc.) Cet espace est aujourd’hui compris dans la place
du Châtelet. Mais l’auteur désigne ici sous ce nom, la grande boucherie
de la Porte-Paris, connue sous le seul titre de _Grande-Boucherie_, sur
l’emplacement de laquelle la grande maison de la place du Châtelet qui
fait face au pont au Change, me semble avoir été construite.

On peut voir dans du Breuil (éd. 1612, p. 1053), mais mieux dans Sauval
(I, 623), les _Variétés historiques_ (I, 170), et surtout dans le
_Traité de la Police_ de Lamarre, des détails sur l’origine de cet
établissement dont l’existence signalée dès le commencement du XIIe
siècle remontoit peut-être aux-temps de la domination Romaine. La
propriété des étaux de cette boucherie, au nombre de trente-deux au XVe
siècle, et plus tard de vingt-neuf, et le droit d’être reçu maître
boucher (à sept ans et un jour), appartenoient exclusivement aux
rejetons mâles d’un petit nombre de familles. A leur joyeux avénement
seulement les rois de France pouvoient faire un nouveau maître boucher
comme ils faisoient au reste un nouveau maître de chaque profession.
(C’est ainsi qu’en 1436, Oudin de Ladehors tige d’une de ces familles
dont il est parlé ci-dessus, parvint à la maîtrise par cession de
Guillaume Lefèvre dit _Verjus_ queux du roi Charles VII, que ce prince
avoit créé maître boucher à son joyeux avénement et confirmé à son
entrée dans Paris). Mais plus tard ce droit paroît être tombé en
désuétude, s’il ne fut pas racheté par les bouchers.

Depuis 1358 au moins, la grande boucherie étoit le siége d’une
importante juridiction devant laquelle les bouchers pouvoient évoquer
toutes leurs causes, et dont les appels se relevoient devant le
parlement. Cette juridiction se composoit: 1º d’un _maire_ ordinairement
membre du Châtelet (avocat du roi, conseiller ou avocat au Châtelet),
qui me semble avoir dû être nommé par le roi ou le prévôt de Paris
encore en 1430, car dans le registre de la boucherie pour cette année,
son nom est placé avant celui du _maître_, ce qui n’auroit pas eu lieu,
je crois, s’il n’eût tenu ses pouvoirs que de la communauté. En 1461, il
étoit élu par le _maître_ en présence, et je pense par les suffrages des
quatre jurés, du procureur et du receveur de la communauté, de deux
écorcheurs jurés et des maîtres bouchers; 2º _d’un maître de la grande
boucherie_ (un des bouchers les plus riches) nommé à vie par douze
électeurs désignés eux-mêmes par tous les maîtres bouchers. Le maire, et
le maître ne siégeoient pas ordinairement tous les deux à la fois, et il
n’est pas facile de définir les différences existant entre leurs
attributions. La puissance du maire me semble au reste avoir été
successivement restreinte; ainsi, tandis qu’en 1431 il désigne le
_maître_ pour _tenir ses plais_, ce qui semble placer le pouvoir
judiciaire dans la personne du _maire_, on voit la communauté décider,
en 1470, que _le maître sera nommé et intitulé aux lettres et actes qui
se feront en la justice de la boucherie, excepté quand on besognera
contre le maître, sera nommé et intitulé le maire_ (les actes et
jugemens seront rendus en son nom); 3º d’un procureur (au Châtelet); 4º
d’un tabellion qui étoit aussi ordinairement procureur au Châtelet. Les
quatre jurés nommés annuellement, le vendredi d’après la Saint-Jacques
(25 juillet), par quatre électeurs désignés par la communauté,
remplissoient l’office de ministère public devant ce tribunal, et
pouvoient provisoirement et par eux-mêmes saisir des viandes suspectes,
et comme aussi le _maire_ et le _maître_, envoyer préventivement en
prison les malfaiteurs. Cette juridiction avoit le plus souvent à juger
les violences des garçons bouchers, des malversations commerciales, des
réclamations de dettes contractées par des bouchers, etc. La boucherie
avoit en outre un _conseil de parlement_ et un _conseil de Châtelet_;
c’étoient deux membres de ces juridictions chargés des intérêts de la
communauté et rétribués par elle.--La mairie de la grande boucherie dura
jusqu’en 1673, que Louis XIV la réunit au Châtelet.

Les rejetons mâles des familles propriétaires de cet établissement
étoient tenus d’exercer par eux-mêmes ou au moins _de leurs deniers_ la
profession de leurs pères. On voit dans Lamarre (t. II, p. 560), qu’au
XVIe siècle, beaucoup de descendans de ces anciennes familles occupoient
des positions assez élevées, et avoient abandonné le commerce de la
boucherie; mais il ne faut pas croire qu’aux XIVe et XVe siècle ces
riches bouchers s’occupassent par eux-mêmes des _détails_ de leur
profession. Beaucoup avoient pour tailler et vendre leurs chairs, des
valets répondans du produit de la vente, et se bornoient à les
surveiller et à traiter en grand et par des facteurs le commerce des
bestiaux destinés à l’approvisionnement de Paris.

Un arrêt rendu en 1383 (7 mars) pour Jehan Le Pontonnier et Louis
Thibert héritiers, à cause de leurs femmes, de Guillaume de Saint-Yon,
contre la veuve de ce dernier, établit d’une manière aussi curieuse que
certaine, l’étendue et la nature des richesses très-diverses que
possédoit ce boucher, le plus riche de la Porte-Paris, et la nature de
ses occupations commerciales. Il est dit qu’il étoit propriétaire de
trois étaux: qu’_il y faisoit vendre_ chaque semaine des viandes pour
200 livres parisis, sur quoi il bénéficioit de 20 ou 30 livres; il avoit
une rente de 600 livres, quatre maisons de campagne près Paris, bien
fournies de meubles et d’instrumens aratoires: de grandes coupes, des
hanaps, des aiguières, des tasses d’argent de grand prix, des coupes de
madre avec des pieds d’argent d’une valeur de 100 fr. et plus; sa femme
avoit pour plus de 1 000 fr. de joyaux, ceintures, bourses, épingliers;
des robes longues et courtes bien fourrées, 3 manteaux fourrés de gris:
de très-beau linge. Il possédoit en outre 300 cuirs de bœuf valant bien
24 s. la pièce, 800 mesures de graisse valant 3 s. et demi, et 800
moutons de 10 s.; 5 ou 600 florins d’argent comptant. On évaluoit ses
biens meubles à 12 000 florins. Son sceau étoit d’argent; il avoit donné
2 000 florins de dot à ses deux nièces, et avoit dépensé 3 000 florins à
rebâtir sa maison de Paris (Jugés, XXX, 198 vº). Après cette énumération
de richesses énormes pour le temps, peut-on s’étonner de l’influence si
puissante de ces maîtres bouchers, signalée dans tous les historiens du
XVe siècle?

La famille de ce Guillaume de Saint-Yon, que Du Breuil et l’abbé Lebeuf
ont cru, mais sans preuve, être issue de celle des anciens seigneurs de
Saint-Yon près Montlhéry (Lebeuf, X, 260), étoit la plus puissante de la
grande boucherie. Elle y exerçoit, comme aussi celle Thibert, la
profession de boucher au moins dès 1260 (Reg. de la Boucherie). Au XVIIe
siècle, ces deux familles restées seules des vingt existantes en 1260,
étoient avec celles de Ladehors et Dauvergne, en possession exclusive
des vingt-neuf étaux de la grande boucherie; elles furent réduites à
trois en 1660, par l’extinction des Dauvergne. Plusieurs de leurs
membres étoient sans doute sortis du commerce de la boucherie pour
occuper des emplois plus importans, et étoient seulement propriétaires
d’étaux qu’ils louoient, mais d’autres étoient restés dans ce commerce,
et c’est assurément à un descendant de l’ancienne famille Thibert qu’il
faut attribuer l’histoire singulière du boucher de ce nom chez le
chevalier de Bragelongne, vers 1680. Sandras de Courtilz rapporte dans
les _entretiens de Colbert avec Bouin_ (Bauyn, I, 67), que ce boucher,
qui étoit gros joueur, couroit chez le chevalier dès qu’il avoit vendu
sa viande, et là, avec son tablier et sa camisole rouge, jouoit 3 ou 400
pistoles à la fois. Le duc de Roquelaure (Gaston-Jean-Baptiste, mort en
1683), qui connoissoit cependant Thibert, voulant un jour le plaisanter
sur sa mise, s’écria: _Masse à la camisole rouge!_ en mettant une
poignée de louis sur la table. Le boucher, sans s’émouvoir, accepta le
défi en répondant aussitôt: _Top et tingue au cordon bleu!_ et ayant eu
les dés et les rieurs pour lui, releva gaiement l’argent du duc.

(J’ai consulté pour cette note les 106 premières pages, années 1430 à
1483, de l’extrait du registre de la grande boucherie, nº 290 du Cabinet
généalogique, dont mon ami M. de Lincy m’a signalé l’existence.)

[635] Var. C. _seize_.

[636] Cette boucherie, située sur la Montagne Sainte-Geneviève, existoit
au moins dès 1245, selon Sauval. Elle avoit été fondée par une
émigration des bouchers de Saint-Marcel.--Suivant une plaidoirie du 30
avril 1377 (Félibien, t. IV, p. 532), ces deux boucheries, que l’auteur
du _Ménagier_ a peut-être confondues à dessein à cause de leur
communauté d’origine, existoient de toute antiquité; elles auroient
compté anciennement cent vingt bouchers, mais n’en avoient plus alors
que trente-cinq. Au temps de Sauval, il n’y avoit plus que quatorze
étaux. Les Le Gois, chefs des émeutiers parisiens au XVe siècle, étoient
bouchers de Sainte-Geneviève.

On croit que la boucherie du Parvis était la plus ancienne de Paris.
Lamarre dit que Philippe Auguste en fit don à l’évêque de Paris quand
les bouchers l’eurent abandonnée pour se fixer à la Porte-Paris. Suivant
Sauval, ce prince n’auroit fait que les confirmer dans une possession
antérieure. Caboche étoit écorcheur dans cette boucherie en 1411.

On ignore l’époque du premier établissement de la boucherie de
Saint-Germain; peut-être étoit-elle aussi ancienne que l’abbaye. Elle
n’avoit d’abord que trois étaux, mais en 1274 l’abbé Gérard en fit bâtir
seize autres dans l’endroit où est aujourd’hui la rue des Boucheries.
(Félibien, I, 429.)

La boucherie du Temple fut établie par les Templiers. Ils transigèrent à
ce sujet avec les bouchers de la Porte-Paris en 1182, selon Félibien,
mais seulement en 1282 selon Lamarre que je crois avoir été mieux
informé. Elle étoit rue de Braque et se composoit de deux étaux
seulement.

La boucherie de Saint-Martin me paroît devoir être la même que celle
dite de Saint-Nicolas-des-Champs, et qui étoit située rue Saint-Martin,
au coin de la rue Aumaire. Sauval qui est à ma connoissance le seul
auteur qui en parle, ne cite rien de plus ancien à son sujet que la
réparation faite en 1426 de la maison où elle étoit située.

Il est étonnant que l’auteur du _Ménagier_ n’ait pas parlé ici de la
boucherie de Saint-Éloi établie rue Saint-Paul par le prieur de
Saint-Éloi, en vertu des lettres du régent (depuis Charles V) en date du
30 novembre 1358. (Trés. de Chartres, 90, 131.)

[637] Var. A. _trente-deux_.

[638] Var. A. _trente-deux_.

[639] Cela fait 3130 moutons, 512 bœufs, 528 porcs (538 suivant A), et
306 veaux (310 suivant A et 320 suivant C). Voir dans l’Introduction mes
observations sur ces renseignemens statistiques.

[640] Vendredi saint. C’est encore l’époque _de la foire aux jambons_.

[641] Porcs salés. Voy. Du Cange au mot _Lardum_.

[642] Le duc d’Orléans.

[643] Suppléez: _c’est ainsi_.

[644] Aujourd’hui _talon de collier_, chair levée sur les trois
dernières côtes.

[645] C’est-à-dire comme 20 est à 25 ou un cinquième en moins que le
Roi. Ce devoit donc être par semaine 96 moutons, 12 ou 13 bœufs, autant
de veaux, 9 ou 10 porcs, 160 lards par an, et par jour 480 volailles,
160 paires de pigeons, 40 chevreaux, 40 oisons.

[646] En marquant sur une taille la quantité prise chaque fois, comme
cela se fait encore pour le pain.

[647] _Gros bout_ de poitrine. Voir sur la longe, etc., p. 130.

[648] Les blancs valoient 10 deniers, mais l’auteur doit entendre ici
par ce mot le petit blanc, monnoie de compte de 5 deniers. C’est comme
s’il disoit que le prix de cette pièce varie de 4 sols 2 deniers à 3
sols. Le marc d’argent (52 fr. de notre monnoie) valoit 6 l. 5 s.

[649] Ou trumeau, partie de la cuisse et aussi de la jambe de devant.

[650] Bouillon.

[651] Ligne laissée en blanc dans les manuscrits.

[652] Je n’ai pas vu ce mot dans les anciens auteurs de vénerie; ce doit
être le quoier ou cimier (croupe) du cerf.

[653] Cuisine.

[654] Liaisons.

[655] Passer au tamis.

[656] S’attachent au fond du pot, brûlent.

[657] Les petits sont appelés _lancerons_: les moyens, _brochets_: les
plus gros, _quarreaux_ (_Délices de la campagne_, ch. XVIII).

[658] Plies.

[659] _Oyeurs_, rôtisseurs.

[660] Petite mangeoire portative.

[661] Canards mâles, et ici canards en général.

[662] D’abord lieu où on resserroit _la paille_, et par extension
_basse-cour_.

[663] Var. B. _crouste_.

[664] Nuque.

[665] Suivant l’empereur Frédéric II, chapitre L, les ailes des oiseaux
se composent de vingt-six plumes: 1º quatre plus près du corps dites
_corales_ ou les _coraux_; 2º les douze suivantes, qui sont les
_vanneaux_; 3º dix autres extérieures (_forinsecæ_), dites les
_couteaux_, à l’exception de la dernière qu’on appelle le _cerceau_
(_saxellus_); les fauconniers postérieurs parlent bien du _cerceau_
(seul des oiseaux de proie, l’autour avoit trois plumes portant ce nom),
des _couteaux_ et des _vanneaux_ (d’Arcussia, éd. 1627, p. 248, dit que
ce sont les plumes adhérentes au second os de l’aile, et cette
définition concorde bien avec celle de l’empereur Frédéric II), mais non
des _coraux_ ou plumes corales.

[666] Ventre.

[667] Espace laissé en blanc dans les manuscrits.

[668] Saumonnées.

[669] Jaune.

[670] Recueillir.

[671] Vin de Grenache. Voy. Legrand d’Aussy, t. III, p. 48.

[672] Rôties.--On trouvera, en recourant à la table, les endroits du
_Ménagier_ où sont décrits la plupart des plats qui vont figurer dans
ces menus. Je me dispenserai donc le donner ici des explications qui
feroient presque toujours double emploi.

[673] Ces nombres en chiffres arabes, placés ici entre parenthèses,
devoient renvoyer à des feuillets d’un manuscrit ou à des numéros de
chapitres, et ne se rapportent à rien dans les trois manuscrits que j’ai
sous les yeux.

[674] Sorte d’oublie plus mince que la gaufre, faite de farine, d’eau,
de vin blanc et de sucre, et cuite entre deux fers.

[675] _Scilicet_, savoir.

[676] Ce plat ne se retrouve ni dans _le Ménagier_, ni dans _le Grand
cuisinier_, ni dans Taillevent. Il me semble résulter du menu VI qu’il
pouvoit se faire avec des lamproies.

[677] Ce plat est ainsi écrit dans le Ms. B. Cependant, dans _le Grand
cuisinier de toutes cuisines_, il est écrit _ramolle_.

[678] La phrase comme je l’ai ponctuée ne paroît pas naturelle, mais on
ne peut lire _à la sausse chaude d’oiselets_; peut-être manque-t-il un
mot (_gravé_ ou _pasté_) avant _d’oiselets_.

[679] Sans doute une _tuile de chair_. Voir à l’art. V.

[680] Les mots qui suivent jusqu’à la fin de ce menu ne sont pas dans le
Ms. B.

[681] B. ajoute, après un espace laissé en blanc, _de porc ut pa_ (_ut
proxima?_).

[682] Comme.

[683] J’ignore le sens de cette abréviation, mais comme on trouve plus
loin _un gravé d’aloés en couleur de fleur de peschier_ (voir
l’_Appendice_ à l’art. V), ce doit être ici le même plat.

[684] Var. B. _à sausse_, ce qui me paroît défectueux, à moins qu’on ne
lise _à la sausse chaude_.

[685] D’huîtres.

[686] Croûtes ou crottes au lait, plat sucré.

[687] Var. B. _leschefroies_.

[688] Georgé.

[689] Je ne pense pas que l’auteur parle ici du faisan présenté
solennellement (comme le paon) aux convives pour faire un vœu, car s’il
en étoit ainsi, il n’en auroit pas parlé au pluriel. Il me paroît
seulement indiquer par ces mots que le faisan étoit un gibier recherché,
réservé aux seigneurs (et auquel ne touchoient pas les _servans_ ou ceux
qui dînoient ensuite?). Il ne faudroit cependant pas croire que le
faisan fût autrefois plus rare qu’aujourd’hui. On trouve dans le _Modus_
un chapitre qui enseigne à prendre cet oiseau, et dans un grand nombre
d’aveux rendus par des seigneurs Angevins aux XIVe et XVe siècles, on
voit figurer des garennes à perdrix et _à faisans_. Voir la note sur
Jean de Craon, sieur de La Suze, dans mon édition du _Trésor de
Vénerie_.

[690] Voir l’Introduction.

[691] Oublies.

[692] Estriers, sortes d’oublies.

[693] Clairet, sorte d’hypocras fait avec du miel au lieu de sucre, et
du vin blanc au lieu de rouge.

[694] Quoique ce menu se termine par un etc., il me paroît impossible de
croire qu’il ait pu s’appliquer à un repas de 24 _services_, et je crois
que _mets_, dans cet intitulé, signifie _plat_, comme dans ceux des
menus I et II ci-dessus.

[695] Merles.

[696] Pâtisserie légère, et peut-être sorte d’oublies.

[697] N’est que dans B.

[698] Var. A. C. _au sucre_.

[699] Gros poisson salé.

[700] Aussi.

[701] L’abbé de Lagny.

[702] Les autres membres du conseil du Roi.

Il y avoit, en 1379, un abbé de Lagny qui assistoit au parlement, soit
qu’il en fût membre, soit qu’il fût du grand conseil du Roi (il résulte
en effet d’une ordonnance de Charles VI, adressée le 21 janvier 1388-9
aux présidens du parlement, que les abbés et prieurs membres du conseil
du Roi avoient seuls le droit d’assister aux délibérations du parlement
(_Ord. antiquæ_, A. 119 vº), et il est bien à croire que c’est de lui
qu’il s’agit ici. Je l’ai vu pour la première fois nommé comme assistant
au parlement le 1er mars 1378-9 (_Plaid. civiles_). Il y avoit sans
doute peu de temps qu’il avoit droit d’y venir; il se pourroit donc que
le dîner dont notre auteur nous donne le menu, fût un dîner de bienvenue
qui auroit eu lieu à cette époque. Pâques tombant le 10 avril 1379, on
étoit alors en Carême, et en effet le dîner est maigre.

Si j’ai rencontré vrai dans cette conjecture, et si ce dîner a en effet
eu lieu en 1379, M. de Paris est Aymery de Maignac, évêque de Paris, le
persécuteur d’Hugues Aubriot, le protecteur persévérant de tous les
soi-disant clercs que le prévôt de Paris faisoit arrêter comme accusés
d’assassinat, de vol, etc., qui, dès 1381 (_Plaid. civ._, juillet),
pendant qu’Hugues Aubriot étoit encore dans ses prisons, lançoit des
monitoires contre Audouin Chauveron son successeur, et faisoit dire au
procureur du Roi que si on laissoit faire l’évêque, _il vaudroit mieux
au prévost aller glaner qu’estre prévost_. Le président (sans doute le
premier président) est Arnault de Corbie, depuis chancelier de France,
un des hommes d’État les plus illustres et les plus honorables du XIVe
siècle, mort en 1413 à un âge fort avancé. Le procureur du Roi est
Guillaume de Saint-Germain, d’abord avocat célèbre ou _solennel_ au
Châtelet, puis procureur général au parlement ou procureur du Roi (ce
qui étoit la même chose), depuis 1365 jusqu’à sa mort arrivée en février
1383-4. (Il est du moins affirmé dans la plaidoirie citée plus bas,
qu’il occupa ces fonctions dix-huit ou dix-neuf ans.) Il avoit en cette
qualité 100 fr. de gages fixes et 500 fr. de don annuel. Il étoit au
reste fort simple, car suivant les plaidoiries de ses héritiers, _il
n’estoit que lui cinquiesme en son hostel, et n’avoit cheval ne asne, et
n’y chaloit de quels draps il fust vestus, mais qu’il fust de couleur_.
Sa femme Denisette Mignon ne savoit ni lire ni écrire. (_Plaid. civiles
du Parlement_, mai 1386.) J’ai dit, t. I, p. 137, que Giles Labat étoit
procureur général au parlement en 1381, _parceque cette qualité lui est
donnée dans les lettres de rémission que j’ai citées_, mais à moins
qu’on ne suppose qu’il y a eu interruption dans les fonctions de
Guillaume de Saint-Germain, ce qui me paroît peu probable d’après les
termes de la plaidoirie, il se pourroit que Giles Labat n’eût été que
_procureur_ au parlement, et que _général_ eût été ajouté par erreur par
l’écrivain de la chancellerie. En tout cas, Giles Labat étoit simplement
_procureur au parlement_ en 1385.) Des deux avocats du Roi, l’un peut
être Jean Pastourel, qui exerçoit cet emploi en 1364 et 73, mais l’autre
étoit certainement le célèbre Jean Des Mares ou Des Marès, mort si
malheureusement en 1382. (Voir t. I, p. 136.--_Arch. jud._, tables de
Lenain, t. III, IV, VI, VII.)

J’ai vu avec étonnement que le nom de famille de cet abbé de Lagny et sa
position dans le conseil du Roi, ont été inconnus aux auteurs de la
_Gallia Christiana_. Ils se bornent à citer, dans leur liste des abbés
de Lagny, un Jean IV, vivant en 1357 et 1367, et ensuite Pierre II du
nom, vivant en 1396 (VII, 503). Le nôtre peut être l’un des deux.

[703] Le mot écuelle signifie ordinairement une assiette creuse, mais il
est évident qu’il y a ici et dans d’autres passages de cet ouvrage, un
rapport certain et connu du temps de l’auteur entre le nombre des
écuelles et celui des convives. On sait qu’on mangeoit sur des
_tranchoirs_ ou morceaux de pain plats, mais cet usage qu’on comprend
quand il s’agit de viandes solides, ne pouvoit s’appliquer aux sauces et
potages qui devoient évidemment se prendre à l’aide de cuillers dans des
vases creux. Voici un repas montant à _huit_ écuelles, et qui est servi
à _seize_ convives (voir p. 106, n. 2, et p. 107, n. 3). On pourroit
donc supposer qu’on servoit une écuelle par deux convives, (dans tout
l’Orient on place encore au milieu de la table un grand plat
ordinairement de pilau, etc., dans lequel chacun prend avec les doigts;
puis _entre deux convives_, un petit plat creux contenant des mets
liquides qu’ils prennent tous deux avec des cuillers) que deux personnes
mangeoient ainsi ensemble les mets liquides, et que par suite, un repas
d’un certain _nombre d’écuelles_ signifioit un repas d’un nombre double
de convives. On seroit même d’autant plus porté à penser qu’une écuelle
servoit à deux convives au moins, que l’usage des assiettes creuses
_personnelles_ étoit encore nouveau et peu général sous la minorité de
Louis XIV. On en a la preuve dans les _Délices de la campagne_, ouvrage
de Nicolas de Bonnefons, valet de chambre du Roi dont de la 1re édition
est, je crois, de 1653, et dans lequel on lit (p. 250 de la 5e éd. de
1673, article de l’_Instruction pour les festins_): «Les assiettes des
conviés seront creuses aussi afin que l’on puisse se présenter du potage
et s’en servir à soi-même ce que chacun en désirera manger, _sans
prendre cuillerée à cuillerée dans le plat, à cause du dégoust que l’on
peut avoir les uns des autres de la cueilliere qui au sortir de la
bouche puisera dans le plat sans l’essuïer auparavant_.» Il me paroît
bien résulter de l’instruction donnée en cet endroit par l’auteur sur
l’utilité des assiettes creuses, qu’alors cet usage étoit encore bien
nouveau. (Voir pour plus de détails la note 374 du _Palais Mazarin_, par
M. le comte de Laborde.) Cela étant, il n’est guère possible de supposer
qu’au XIVe siècle on servît une écuelle ou assiette creuse à chaque
convive personnellement. Cependant, nous verrons plus loin, (article du
_Houssebarre de chair_) l’auteur conseiller de mettre ordinairement deux
_lesches_ ou languettes de chair _dans chaque écuelle_, mais quand on a
_plus de convives et moins de chair_, de servir le brouet seul dans des
écuelles, et dans un plat _cinq lesches_ pour _quatre_ personnes. Il
sembleroit positif, d’après ce passage, que deux lesches dans chaque
écuelle étoient un service plus abondant que cinq _lesches_ pour quatre
personnes, et que par conséquent une écuelle de deux lesches étoit pour
une seule personne en temps ordinaire. (Voir en outre p. 114, n. 3.) Il
m’est impossible de faire concorder ces deux passages du _Ménagier_, et
je les livre à l’examen éclairé de mes lecteurs.

[704] Dans des plats couverts, servis seulement pour lui, comme c’étoit
l’usage pour le roi, les ducs, etc.

[705] La quarte contenoit deux pintes et la pinte deux chopines; il y
avoit donc seize convives. Voy. p. 107, note 3.

[706] Mot que je ne comprends pas.

[707] L’abbaye de Lagny avoit droit de pêche dans la Marne.

[708] Une pour chaque convive?

[709] L’auteur veut dire que c’est trop de deux quartes d’hypocras,
comme il a dit plus haut que c’étoit trop de deux quartes de vin de
Grenache.

[710] Sorte d’oublies.

[711] B. ajoute: _et le vin_.

[712] L’auteur du _Trésor de santé_ conseille de n’en user qu’au fort de
l’hiver.

[713] S. e. _dire_ ou _déclarer_.

[714] Var. A. C. _payera_.

[715] Le prix du setier de blé, à l’époque où l’auteur écrivoit, varioit
de 13 à 20 sols. En prenant 16 s. pour prix moyen, et en appliquant à ce
prix le règlement du prix du pain fait par Charles V en 1372, il en
résulte qu’un pain d’un denier de la meilleure qualité pesoit tout cuit
six onces. Cette quantité de pain et de provisions paroît bien
considérable pour un diner de vingt écuelles (quarante personnes?), et
un souper de dix (vingt personnes?), mais on peut supposer qu’elle
servoit aussi à un grand nombre de domestiques, de _compagnons_, etc.

[716] C’étoit du gros pain, et probablement bis. Voir ci-dessus, page
38, note 2.

[717] Nous avons déjà vu plus haut, p. 106, _et que les seconds en
aient_. Je ne sais s’il faut entendre par là les serviteurs ou peut-être
aussi des gens d’une position moins élevée qui dînoient après les
premiers convives.

[718] Nous verrons, pages 110 et 122, que les poulaillers vendoient
aussi de la venaison.

[719] Avec du fromage dedans. Voy. p. 121.

[720] Je ne trouve nulle part ce mot qui paroît désigner une espèce
d’oublies.

[721] L’auteur n’a pas mis de prix aux grenades et aux oranges, sans
doute parce que leur prix varioit. Legrand d’Aussy, I, 250, cite un
compte du dauphin Humbert, de 1333, où il est parlé d’orangers, et passe
ensuite de là au règne de Louis XIV. On voit par ce passage du
_Ménagier_, que les oranges étoient fréquemment servies sur les tables
parisiennes au XIVe siècle.

[722] Var. B. _du teil_. On trouve dans Roquefort _teille_, grande
terrine de bois; nous verrons dans l’Appendice, ce mot désigner un vase
de terre.

[723] Plus loin (chapitre des _Entremets_, _Fromentée_), l’auteur dit
que ce froment mondé coûtoit un _blanc_ la livre chez les épiciers. Je
crois avoir eu de bonnes raisons pour fixer la valeur du blanc à 5
deniers (voir p. 86, n. 4), et en effet la livre de froment mondé, au
prix de 5 d., mettroit déjà le setier au prix de 100 sols, somme assez
supérieure au prix moyen de 16 s. du setier de blé ordinaire au XIVe
siècle (voir p. 109), pour représenter les frais de mondage, le profit
du détaillant, etc. Le prix de 8 deniers donné ici mettroit le setier à
160 s. Au reste, cette différence peut s’expliquer par la qualité du
froment mondé dont on prenoit sans doute le plus beau pour un repas de
noces, et par les variations du prix du blé.

[724] L’auteur, au chapitre des _Sauces non bouillies_, nous apprend que
le _gingembre de mesche_ avoit l’écorce plus brune, étoit plus mou au
couteau, plus blanc, meilleur et plus cher que le _colombin_; et en
effet, on voit ici qu’il coûtoit 20 s. la livre et le _colombin_ 11,
mais je n’ai rien pu trouver sur les différences d’origine ou d’espèce
qui causoient sans doute celle des noms de ces deux gingembres.

[725] Girofle. Je crois que la _graine_ en est aussi, et que l’auteur ne
veut pas parler ici de la graine de paradis, _cardamomon_, qui ne devoit
pas être vendue mêlée au girofle. Nous verrons souvent la graine de
paradis désignée sous le seul nom de _graine_.

[726] Racine de _galanga_, plante des Indes orientales. L’auteur,
chapitre des _Sauces non bouillies_, dit que le meilleur est le plus
dur, le plus pesant, et celui dont la couleur violette est la plus vive.
Ces mots prouvent qu’il parloit du petit _galanga_ qui vient des Indes,
et qui est en effet rougeâtre, tandis que le grand, qui croît en Chine,
est de couleur blanchâtre on cendrée.

[727] Fleur de muscade, deuxième écorce de la noix muscade ou
_muguette_, comme on l’appeloit au temps de l’auteur. Toutes ces épices
figurent dans les ordonnances de février 1349(50) et 3 mai 1351,
relatives à des droits supportés par certaines denrées à l’entrée de
Paris. On y voit que le poivre, le sucre, le gingembre, la cannelle, le
ris, l’anis, le safran et le girofle venoient à Paris par balles, et que
le cubèbe (employé aussi quelquefois dans la cuisine), le macis, la
graine de paradis, le poivre long, les noix muguettes, l’espic (nard),
le garingal, le citonal, les dattes, les pignons, etc., venoient sans
doute par plus petites quantités, puisqu’ils sont taxés par livre (4
deniers en 1350, et 6 en 1351).

[728] C’est-à-dire que l’épicier reprenoit les bouts à raison de 2 s. 6
d. la livre. On ne perdoit donc que 6 deniers par livre pour la façon.

[729] Épices, _bonbons_, servis dans le salon ou _chambre de parement_.

[730] Citron confit?

[731] Sucre blanc clarifié et cuit dans de l’eau de rose.

[732] En comptant seulement ce qu’on brûla de cire, le reste étant rendu
à l’épicier.

[733] Je ne sais comment l’auteur établit son compte, puisqu’il y avoit
vingt écuelles au dîner, dix au souper, et qu’il en compte encore six au
dîner des _servans_.

[734] La Pierre-au-Lait, place où l’on vendoit le lait, auroit été
située devant le portail de Saint-Jacques la Boucherie, et dans la
partie de la rue des Écrivains située entre celles du Petit-Crucifix et
des Arcis, suivant M. Géraud (_Paris sous Philippe le Bel_, p. 256);
mais l’abbé Vilain, auteur d’une très-bonne histoire de Saint-Jacques la
Boucherie, tout en reconnaissant que la grande porte de Saint-Jacques
s’appeloit _la porte de la Pierre-au-Lait_, croit devoir, suivant les
titres qu’il avoit consultés, donner le nom de _Pierre-au-Lait_
seulement à la partie de la rue dite depuis des Écrivains, comprise
entre celle du Petit-Crucifix et celle de la Vieille-Monnoie (ce qui est
nommé _Lormerie_ sur le plan de M. Géraud). Suivant le même abbé Vilain,
la rue dite depuis de _Saint-Jacques la Boucherie_ auroit encore été
dite de la Vannerie au XIVe siècle. Il faudroit en conclure que la rue
Saint-Jacques, nommée dans le rôle de la taille de 1292 comme attenant à
_la Pierre-au-Lait_, seroit la rue du Crucifix, dite autrefois et encore
au XVIe siècle, rue du Porche. Voir l’abbé Vilain, pages 17, 19, 58, 74,
251, 252. L’auteur d’une nomenclature des rues de Paris par tenans et
aboutissans, insérée dans une édition de Corrozet de 1543, confirme
complétement l’assertion de l’abbé Vilain en ce qui touche la position
de _la Pierre-au-Lait_, au moins au XVIe siècle. En effet, suivant cet
auteur, la Pierre-au-Lait touchoit aux rues des Écrivains, de la
Vieille-Monnoie, de la Savonnerie et de la Haulmerie; enfin, entre la
rue de la Vieille-Monnoie et celle de la Savonnerie, il met: _la
Pierre-au-Lait ainsi qu’elle se comporte_.

[735] La place de Grève.

[736] Voir ci-devant, p. 80.

[737] Dans l’ordonnance de 1388 sur l’organisation de la maison du Roi,
on voit figurer à la panneterie, des officiers dits porte-chapes; une de
leurs attributions étoit d’acheter les blés nécessaires à la
consommation du Roi. Leur nom pouvait venir de ce qu’ils portoient le
coffre où l’on enfermoit le pain du Roi, de _capa_, dans le sens de
_capsa_. (Voy. Du Cange à _Capiger_.) Mais ce passage du _Ménagier_
pourroit faire croire qu’il viendroit plutôt d’un instrument à chapeler
le pain qui auroit été dit _chape_ ou _chaple_; _capellare_, _capulare_,
signifiant couper.

[738] Les restes solides.

[739] Il résulte de ce passage que les convives pouvoient avoir aussi
des restes _liquides_ à ôter de devant eux. Cela ne se conçoit guère
avec des écuelles communes à deux personnes, et nécessairement
renouvelées avec chaque mets. Les assiettes _personnelles_ de métal
étoient-elles donc déjà en usage? (Voy. p. 105, n. 1.)

[740] Var. B. _petueil_, pilon.

[741] Vases placés sur la table ou sur un dressoir, et dans lesquels on
faisoit remettre une portion des mets qu’on avoit devant soi pour être
ensuite donnée aux pauvres. C’étoit la même pensée éminemment charitable
et chrétienne qui faisoit donner aux pauvres la première part du gâteau
des Rois, dite pour ce motif _la part de Dieu_. Les pots à aumône
étoient de grande dimension, car on en voit un en argent de 12 marcs 2
onces ½ prisé 40 fr. d’or dans le compte d’exécution de la reine
Jeanne d’Évreux en 1372 (Coll. Leber, XIX, 143), et un aussi d’argent du
poids de 11 marcs, et prisé 60 livres parisis dans l’inventaire de
Richard Picque, archevêque de Reims, mort en 1389 (Reims, 1842, in-8º,
p. 9). On voit encore dans ce même document (p. 63), _une grande
escuelle à aumosne_, et enfin, p. 53, un dressoir pour mettre _la
corbeille à l’aumosne_. Dans l’apologie du duc de Bourgogne par Jean
Petit (Monstrelet, éd. du _Panthéon_, p. 84, c. I), il est aussi parlé
d’une viande prétendue empoisonnée qui fut enlevée de la table du Roi et
mise dans _la corbeille de l’aumône_. (Une telle aumône auroit été peu
charitable, mais il est bien probable que cette histoire étoit tout
entière de l’invention de Jean sans Peur ou de Jean Petit.)

[742] Pour _de_?

[743] C’est l’hôtel de l’évêque de Beauvais, soit celui que paroît avoir
possédé personnellement rue de la Verrerie, le célèbre Miles de Dormans,
évêque de Beauvais, mort en 1387 (Sauval, II, 109), soit plutôt l’hôtel
des évêques de Beauvais, _rue des Billettes_, qui appartenoit à leur
évêché, et que Charles, cardinal de Bourbon, vendit 30 000 livres en
1572 (Père Anselme, II, 303). Sauval n’a pas su où étoit situé cet
hôtel.--On lit dans la relation de l’ambassade de Jérôme Lippomano en
France, en 1577, que les concierges des maisons de Paris les louoient au
jour ou au mois pendant les absences de leurs maîtres (_Amb. vénitiens_,
1838, in-4º, II, 609); c’étoit déjà l’usage au XIVe siècle, car il est
dit plus loin que Jean Duchesne paya les 4 francs mentionnés ici au
_concierge de l’hôtel de Beauvais_, qui lui loua aussi des tables,
tréteaux, etc. _La chapellerie_ signifie ici les chapeaux ou couronnes
de fleurs.

[744] Il y avoit en 1385 un Jehan Duchesne attaché au Châtelet,
peut-être en qualité d’audiencier, qui, suivant toute apparence, est le
même dont l’auteur du _Ménagier_ nous raconte les noces. Il est cité
dans les registres des plaidoiries civiles du parlement de février 1384
(5). Il y est dit qu’il y avoit alors _plusieurs meschans femmes
diffamées d’estre maq......es_, et que le prévôt de Paris avoit ordonné
qu’elles fussent enfermées au Châtelet. Un jour, une femme nommée
Perrette Potarde (femme de J. Potard, chevaucheur de la reine Blanche),
_petitement renommée_, passoit par la rue Simon-le-Franc. Là étoient
Martin Double, avocat du roi au Châtelet, Jehan du Chesne et plusieurs
autres, qui affirmèrent à un sergent qu’elle étoit du métier proscrit
par le prévôt. Quelque temps après, elle vint au Châtelet, _en bas en
l’auditoire des audienciers_; Jehan du Chesne l’ayant aperçue, la montra
du doigt à Jehan Soudant examinateur au Châtelet, _si comme il voulsist
dire: C’est elle, prenez-la_. Soudant l’ayant fait arrêter par un
sergent, on la conduisoit dans les prisons du Châtelet, lorsqu’en
arrivant au guichet elle cria qu’elle en appeloit, mais Martin Double
passant là, dit au sergent: _Boutez hardiment puisqu’elle est si près_.
Perrette plaidoit contre Soudant et le sergent, et les accusoit de
l’avoir sacrifiée aux haines de Jean du Chesne et autres; en effet,
Soudant fut condamné à 40 liv. de dommages et 60 liv. d’amende.

[745] S. e. _renfermées_.

[746] Passage bien curieux pour l’histoire du service de table. Il y
avoit, outre le dressoir de salle où étoit la vaisselle, le vin, etc.,
un dressoir de cuisine où l’on dressoit les plats, et d’où ils étoient
apportés sur la table. Voir sur ce second dressoir, la p. 115, et
l’apologie du duc de Bourgogne déjà citée, p. 115, note 2.

[747] Var. C. _servans_.

[748] Var. B. _laver_.

[749] Pour faire asseoir, pour placer les convives.

[750] Marchande de couronnes de fleurs.

[751] Repas ou fête donnée (quelquefois rendue par les parents des
mariés) le lendemain des noces ou quelques jours après. On disoit en
Normandie _Racroc de noces_ (Voy. du Cange au mot _Receptum_) et à
Troyes _Regaust_. (Parl. Criminel, XI, 5 déc. 1384.) Voy. sur le
_regard_, pages 122 et 123.

[752] On sait qu’autrefois le lit nuptial étoit béni; on voit même dans
une miniature du _Chevalereux comte d’Artois_, reproduite dans l’édition
curieuse qu’a donnée M. Barrois de ce joli roman (p. 27), un prêtre
bénissant le lit dans lequel le comte d’Artois et sa nouvelle épouse
sont déjà couchés.

[753] Tresser, natter. Mais que tressoit-on, et pourquoi est-ce une
lavandière?

[754] Nous verrons plus loin (chapitre des _Menues choses_) ce
Hautecourt nommé _maistre Jehan de Hautecourt_. Il me paroît bien que
c’est le même qui transigea, le 3 juin 1385, avec l’abbesse d’Hyères,
sur un procès que l’abbesse lui avoit intenté (elle concluoit contre
lui, en janvier 1384 (5), à 1 000 fr. d’amende pour elle et 2 000 pour
le Roi, etc., _Plaid. civ._). Sire Jean de Fleury, dernier prévôt des
marchands en 1382, le fameux trésorier Bernard de Montlhéry cité dans
_Christine de Pisan_, et Jehan de Longueil, conseiller au parlement,
étoient ses amis; il y a donc lieu de croire qu’il étoit dans une
position assez élevée pour pouvoir faire une noce aussi dispendieuse que
celle dont nous avons ici le menu. Quant à sa qualité de _clerc_ qui
ressort de la pièce suivante (_Colin Morant pour ce qu’il est lay_),
elle ne doit pas empêcher de croire qu’il ait pu se marier, rien n’étant
à cette époque plus fréquent que de voir des gens mariés, exerçant toute
espèce de profession, et revêtus cependant de la qualité religieuse de
clerc, qui les mettait à l’abri de beaucoup d’éventualités fâcheuses.

Il est dit dans cet accord que maître Jehan de Hautecourt et ses consors
iront le jour de la fête saint Pierre et saint Paul (29 juin) en
l’abbaye d’Hyères, vers madame l’abbesse ayant en sa compagnie autant de
ses religieuses qu’elle voudra et M. de Folleville (conseiller au
parlement, devenu en 1389 prévôt de Paris), maître Jean de Fontaines et
maître Raoul Drobille (son procureur); alors, continue l’accord,
«maistre Jehan et ses consors salueront et feront la révérence à ladite
Madame l’abbesse si comme à son estat appartient, et oultre ledit
maistre Jehan dira pour lui, Aymery Comte, Odinet de Sens, Herlin des
Mares et Colin Morant, teles paroles:

«Madame, vous avez fait proposer contre nous en parlement comment nous
venismes en l’esglise de céans, armés et garnis d’espées, de taloches et
de longs cousteaux, environ demie lieue de nuit, et entrasmes en l’ostel
du Four, tenant nos bastons et espées toutes nues, et je, Jehan de
Hautecourt, demandoie où estoient Colin le Barbier et Jehannin Poitrine
qui avoient batu mon varlet, et que se je les trouvoie, jamais ils ne
mengeroient de pain: et que je feroie pendre ledit Colin le Barbier, et
que vous, Madame, ne teniez avec vous que larrons et murtriers: et
cerchasmes ledit hostel du Four, et frappasmes nos espées et cousteaux
dedans les liz pour savoir se lesdis Colin le Barbier et Jehan Poitrine
y estoient muciés. _Item_, que par la court de céans et jusques à la
chambre de vous, Madame, nous chassasmes lesdis Colin le Barbier et
Jehan Poitrine, en criant après eulx: _A mort! à mort!_ Et que ledit
Poitrine à moy, et par espécial Perrenelle de Machaut, pour cuider
appaisier la noise en disant que lesdites dames, leurs familiers et
esglise, estoient en la sauve-garde du Roy et que je me gardasse de
meffaire à eulx, que je deubs respondre que aussi estoie-je en la
sauve-garde du Roy, et que de vous, Madame, je ne tenoie compte, ne
desdites dames, ne leurs amis, et que vous en feissiez du mieulx que
vous pouriez, et que se je tenoie lesdis Colin et Poitrine, que je les
tueroie. Et pour ce avez fait conclure contre nous en amende honnorable
et prouffitable. Madame, nous créons bien que vous avez esté informée
contre nous, et pour ce vous estes tenue à malcontente de nous. Et en
vérité, Madame, onques jour de nos vies nous ne fusmes en l’esglise de
céans pour vous ne vos gens injurier en fait ne en parole, ne ne
vourrions faire en aucune manière, ainçois nous vourrions et avons
tousjours voulu faire à nos povoirs service et plaisir, et se par aucune
manière vous nous avez sceu aucun mal gré et par ce avons esté hors de
vostre bonne grâce, nous vous supplions qu’il vous plaise à le nous
pardonner.»

«Et après ces choses ainsi dictes, ladicte Madame respondra teles
paroles ou en substance:

«Maistre Jehan, nous avons esté informé des choses dessusdictes
souffisamment, si comme il nous a semblé, et pour ce les avons-nous fait
proposer contre vous en parlement pour garder le droit de nous et de
nostre Esglise, mais nonobstant ce, pour l’amour de sire Jehan de Ruel,
sire Jehan de Fleury, Bernart de Montleheri et de maistre Jehan de
Longueil, vos amis, qui nous en ont escript et requis, et pour ce aussi
que vous vous en excusez à nous, nous le vous pardonnons.»

«_Item_, cedit jour et heure, Colin Morant pour ce qu’il est lay, après
ces choses, le chapperon avalé et un genoul à terre, dira à Madame en
substance les paroles dessus dites en tant qu’il touche l’accusation de
Madame l’abbesse et du procureur du Roy et aussi son excusation, et puis
dira:

«Madame, se en aucune manière je vous ai meffait ne mesdit ès choses
dessus dictes, je le vous amende à vostre pure volenté.»

«En ploiant son gaige (_celui qui faisoit amende honorable plioit une
baguette que lui remettoit l’huissier_): laquelle amende elle recevra et
puis dira:

«Pour l’amour de sire Jehan de Rueil, sire Jehan de Fleury, Bernart de
Montleheri et maistre Jehan de Longueil qui m’en ont escript et requis,
je te quitte l’amende.»fu attains et féru d’un estoc ou costé à sang, et
à plaie ouverte d’une espée. _Item_, pour ce que les dames de céans
furent moult effréées et vindrent

[755] Ligne laissée en blanc dans les manuscrits.

[756] Var. B. _joziers_. _Jugier_ est meilleur.

[757] Du Cange cite, au mot _Manus_, un compte de 1334 imprimé parmi les
preuves de l’_Histoire de Nîmes_, dans lequel on voit deux massepains,
l’un de _manu-christi_, et l’autre de _confiegs_. Il semble que ces mots
doivent désigner un fruit ou une amande, mais je n’ai pu découvrir
lequel.

[758] Var. A. _quatre_.

[759] Les deux nouveaux mariés.--Il est si bien probable qu’alors on
gardoit toute sa vie le deuil de son conjoint.--Les reines portoient
ainsi tout le reste de leur vie le deuil du roi auquel elles
survivoient, et elles le portoient en blanc. On les appeloit alors, pour
les distinguer de la nouvelle reine, _reines blanches_: de là tant de
maisons dites _de la reine Blanche_.

[760] Et autres présens qu’on leur faisoit pendant le repas.

[761] Ce mot doit conserver ici la même signification que ci-dessus,
pages 118 et 122; l’auteur veut sans doute dire que pour ce prix ils
joueront aussi le jour du regard.

[762] Si ce mot ne désigne pas nos _acrobates_ d’aujourd’hui (les
ménétriers étoient aussi danseurs de corde; voir une citation d’Albéric
de Trois-Fontaines à l’année 1237, dans Du Cange, au mot _Ministellus_),
il signifie soit histrions, soit farces ou récits plaisans. Voy. Du
Cange aux mots _Acroama_ et _Acroamata_.

[763] Fleur de farine.

[764] Voir ci-dessus, p. 88.

[765] Au contraire.

[766] Au IVe article, ci-dessus, p. 111, mais ce n’est qu’une
nomenclature incomplète.

[767] J’écris ainsi ce mot à causé des deux _l_. Peut-être _entrecercle_
est-il le vrai nom.

[768] Échanger le linge c’est le mettre dans l’eau et le tordre avant de
le mettre à la lessive.

[769] L’humidité.

[770] Var. B. _estandre_.

[771] Pouliot, herbe odoriférante.

[772] Cueillis.

[773] Boyau.

[774] Oie.

[775] On demande.

[776] Temps de Pâques.

[777] De là le proverbe: _vilain comme lard jaune_.

[778] Ratisser, gratter.

[779] Paré; mais plutôt faute, pour _décolé_.

[780] Cette phrase est évidemment défectueuse. Il semble que l’auteur
veuille dire qu’il y a _la fresure_, puis _le sain_, _la haste-menue_ et
_le chaudun_.

[781] Sans doute deux blancs parisis.--Il y a eu une monnoie d’argent
dite _parisis_, mais, suivant Le Blanc, elle n’a été en usage que sous
Philippe de Valois, et elle avoit d’ailleurs trop de valeur pour que les
issues du mouton aient pu valoir deux de ces pièces.

[782] Cependant l’auteur distingue plus haut la panse de la fraise.

[783] _On demande_, mais l’auteur n’en savoit pas la raison.

[784] Il paroît manquer ici quelque mots comme: _avec de l’eau et_....
Cette recette est répétée plus loin (chap. des _potages à espices_).
Voir sur ce sujet le _Trésor de Vénerie_, p. 62, et note 56.

[785] Mieux _cimier_, c’est la croupe ou quoier (de queue) du cerf;
l’auteur en parle encore plus loin.

[786] On trouve dans les _Délices de la campagne_ (voir pag. 105),
quelques détails sur les différentes parties des bœufs, mais l’auteur
écrivant pour des lecteurs qui connoissoient les noms qu’il emploie, ne
définit pas nettement ces noms, et on ne peut tirer de ses paroles que
des inductions.

La manière de distribuer la chair des bœufs est complétement changée
aujourd’hui, et il est bien difficile, pour ne pas dire impossible, de
donner exactement les noms actuels et la définition des diverses parties
que nomme ici l’auteur du _Ménagier_. Voici cependant le très-foible
résultat de renseignemens soigneusement recueillis sur ce sujet.

On appelle aujourd’hui _flanchet_ la membrane qui retient les intestins,
le bas-ventre, et il semble que ce mot n’a jamais pu désigner en effet
qu’une partie située sur les flancs de l’animal. Cependant, plus haut,
l’auteur place le flanchet au quartier de devant d’un mouton. Le
Dictionnaire de Trévoux définit le flanchet _partie qu’on coupe au
bas-bout du bœuf, vers les cuisses, et qui fait partie de la surlonge_.

La _surlonge_, nécessairement différente de ce qui porte aujourd’hui ce
nom (chair des dernières basses côtes qui se trouve sous l’épaule après
qu’elle est levée), doit être l’extrémité de la longe, c’est-à-dire une
partie de la culotte (_Délices de la campagne_, p. 193).

La longe, valant le double de la surlonge (pages 86, 87), comprenoit les
aloyaux et le filet. Les Anglois ont conservé le mot _loin_ pour
désigner le filet.

Dom Carpentier pense que nomblet, _numbile_, désigne la _longe_,
_l’eschinée_. Mais ce passage du _Ménagier_ prouve que cette opinion est
erronée, puisque l’auteur distingue le nomblet de la longe, et qu’on ne
peut supposer qu’à aucune époque la partie du bœuf dite aujourd’hui le
filet ait été le profit de l’écorcheur et _de petite valeur_. Faisant
ensuite allusion à la définition des veneurs, Dom Carpentier exprime
l’idée que le mot nomblet, s’il ne signifie pas la longe, pourroit venir
d’_umbilicus_, nombril, à raison de l’endroit où le nomblès est levé.
Des anciens veneurs, l’auteur anonyme du _Roi Modus_, qui a été copié en
cet endroit par Phébus, est le plus explicite. Les nomblès sont, suivant
lui, _une char et une gresse avec les rognons, qui est par dedens,
endroit les longes, près des deux cuisses_. Cette définition, de même
que les expressions de l’auteur du _Ménagier_, concordent avec la
position et la nature du morceau dit aujourd’hui _onglet_, peut-être par
corruption de _nomblet_, dans la boucherie de Paris: c’est un morceau de
viande de douze à quinze pouces de long (l’auteur donne la dimension de
la longueur du morceau de viande qui forme l’onglet, mais quand il dit
qu’il touche d’un bout au _col_ et de l’autre au rognon, il joint
évidemment à l’onglet la membrane dite la _hampe_, car il est
physiquement impossible qu’il n’y ait qu’un pied de distance entre le
cou et le rognon d’un bœuf) qui forme l’extrémité de la _hampe_ ou
membrane qui sépare le foie et la rate d’avec la panse et les intestins.
L’onglet touche en effet la graisse qui enveloppe le rognon, et la
hampe, continuation nerveuse de l’onglet, va se rattacher, non pas au
cou, mais à la poitrine. Les côtes de l’animal commencent à la hauteur
de l’onglet.

[787] Ce mot n’est que dans le Ms. C, mais est cependant nécessaire au
sens.

[788] Var. A et C, _au dessus_.

[789] A la Porte-Paris, à la grande boucherie.

[790] La taille sur laquelle chaque bourgeois faisoit marquer la viande
qu’il prenoit, sans la payer chaque jour. Voy. ci-dessus, page 88. Je
pense que c’est ainsi qu’on doit entendre ce passage, plutôt que de
croire qu’il s’agit ici d’une taille (impôt) levée sur la viande.

[791] A cause du plus grand nombre de pièces et de l’augmentation de
leur volume résultant de la plus forte dimension de l’animal. Il semble
résulter de ce passage qu’on vendoit la viande au morceau et non au
poids.

[792] L’estomac.

[793] Second estomac.

[794] Le poumon.

[795] 30 novembre.

[796] Peau.

[797] Dans le courant de cet article, _élire_ signifie _éplucher_ (ici
_écosser_) et non choisir. Nous verrons (chap. du _gravé d’écrevices_)
l’auteur dire d’_élire_ des écrevices; _comme si l’on vouloit les
manger_.

[798] Les Mss. ajoutent _et d’eaue de fontaine_; peut-être faudroit-il
lire _et d’eaue de rivière_.

[799] Béans, crevés? Nous verrons plus loin les fèves _bayennes_.

[800] Purer signifie, dans cette partie du _Ménagier_, égoutter, séparer
le liquide du solide, et la purée est la partie liquide. (Voy. p. 137,
n. 4, et p. 139.)

[801] Cuis à part, comme le lard aux jours de chair.

[802] Suppléez, _ainsi_.

[803] Coupés par tranches (morceaux minces).

[804] Baleine salée; voir le chapitre des _poissons de mer ronds_.

[805] Bluteau, grand tamis long composé de plusieurs cercles.

[806] Tamis d’étoffe claire.

[807] Sas, tamis de crin.

[808] Dans la purée.

[809] Tartines de pain.

[810] Voy. le _civé d’huitres_ au chapitre _des Potages lians sans
chair_.

[811] Cette phrase, qui se trouve déjà p. 88, l. 5, paroît placée ici
par une erreur commune aux trois manuscrits.

[812] Var. B. _alaiez_, délayez. La purée étoit évidemment très-claire
et une sorte de bouillon de légumes.

[813] Les manuscrits répètent ici les §§ 1 et 2, p. 88, et §7, p. 87.

[814] Jusqu’à ce qu’elles soient crevées? (béantes). Voy. p. 135, n. 1.

[815] Chaque plat?

[816] On voit page 142 que l’auteur appelle ainsi la réunion de
plusieurs lardons fondans dans la poële.

[817] D’épices. Sans doute poudre fine.

[818] Tout le temps de l’année qui n’est pas le carême.

[819] Donné, avec quelques notables différences cependant, sous le titre
de _Porée de cresson_, dans le manuscrit de Taillevent conservé à la
Bibliothèque Mazarine.

[820] Suppléez _est_.

[821] Ces quatre mots pourroient s’appliquer aux épinards. Il faudroit,
dans ce cas, supprimer l’alinéa.

[822] Voy. pages 48 et 143.

[823] Délayer.

[824] On sait que l’année commençoit alors à Pâques. Les années 1392,
1393 et 1394, dans lesquelles on peut fixer l’époque de la composition
du _Ménagier_ (ainsi que je crois l’avoir démontré dans l’Introduction),
commencèrent toutes trois en Avril.

[825] Les trois manuscrits portent _nommés_; je crois qu’il faut lire
_pommés_ ou _pommes_.

[826] Temps de Pâques.

[827] Déchirer par pièces.

[828] Cotons.

[829] Écrasés.

[830] _Et_ paroît être de trop.

[831] Gruau. Var. A, _grumiau_.

[832] Ces mots ne sont que dans le Ms. C.

[833] Foulque, oiseau de rivière.

[834] Gésiers. Var. mauvaise de B. _josiers_.

[835] On trouve la même recette (_gramouse_), sauf plusieurs mots omis,
dans _le Grand cuisinier de toutes cuisines_, Paris, Ve Jn Bonfons,
in-16, s. d., fº 28. (Voir l’Introduction.)

[836] Var. B. _fait_.

[837] _Gr. Cuis._, fº 28 vº, identique.

[838] Peut-être dans la partie maigre du bouillon, dans _du bouillon
dégraissé_, par opposition avec l’eau grasse dont l’auteur va parler.

[839] A bas, hors du feu.

[840] Var. A. C. _ondée_. (Jeter un bouillon.)

[841] La traduction en vers explique suffisamment le commencement de cet
aphorisme culinaire. _Lazarus_ (ladre) paroît répondre à _teigneux_;
_Martinus_ signifie dur, obstiné (_rebelle_) par allusion à Martin
Grosia, professeur de droit à Bologne au XIIe siècle, dont la dureté et
l’entêtement étoient passés en proverbe au dire du cardinal Baronius,
cité par Du Cange au mot _Martinus_. Il semble donc que _respondens
pontifici_ soit traduit par _pesant_. Est-ce par allusion à la
solennité, à la _gravité_ pontificale? Christine de Pisan a employé le
mot _pontifical_ dans le sens de solennel en parlant du duc d’Anjou.
(_Hault et pontifical en son maintien._ Voy. Du Cange à _Pontifex_.)

[842] Bœuf.

[843] Cotte, vêtement, ici _enveloppe_, extérieur.

[844] Suppléez _in_.

[845] Ainsi, pour le dedans (_ce qui est dedans_). L’auteur, d’après le
même principe, dit plus loin (_lamproie à l’étouffée_): _ce_ dessus
dessous.

[846] _G. C._, 9 vº.--On trouve une recette presque identique dans le
manuscrit de Taillevent conservé à la Bibliothèque royale. (Celles du
Taillevent de la B. Maz. et l’imprimé diffèrent).

[847] Suppléez: _de mouton_. _G. C._, 21.

[848] A la mode d’Ausoerre (d’Auxerre)? ou faut-il lire _au soerre_, au
soir (à souper)?

[849] _G. C._, 31 vº.

[850] _G. C._, _ib._, quelques différences.

[851] Morceau de la cuisse.

[852] _G. C._, 31 vº, quelques différences.

[853] Râpé.

[854] _G. C._, 5.

[855] L’auteur du _Grand Cuisinier_ a remplacé ce mot (article du
blanc-manger de chapon, feuillet 9 vº) par _foie_; et, en effet, cette
interprétation pourroit convenir aux passages du _Ménagier_ où se
rencontre le mot _braon_. Roquefort l’explique par _gras des fesses_,
mais on voit que ce ne peut être la signification de ce mot. Dans
l’exemple cité par Roquefort, il s’agit d’un cerf que les chiens
tiennent aux nerfs et aux _braons_. Je crois que dans cet exemple
_braon_ est synonyme de _daintiers_, et par suite que le mot _braon_
signifie _intestins_ en général.

[856] _Pain_ dans le _G. C._ qui donne cette recette (feuillet 1 vº);
mais _grain_ est répété plusieurs fois dans le _Ménagier_ pour désigner
la partie solide d’un mets composé de solide et de liquide.

[857] Que ce soit chapon ou veau aux herbes, il n’y faut que lard et
safran.

[858] _G. C._, 11 vº.

[859] Sans les mettre dans l’eau chaude, comme on faisoit le plus
souvent et comme on le fait encore en Orient.

[860] Dans la poêle encore vide, sans beurre ou autre graisse mise
préalablement?

[861] _G. C._, 28, dit _graine_ d’oiselés. Cependant j’écris gravé,
parce que ce mot est ainsi dans le Ms. B où les _u_ (ou _v_) sont bien
distincts des _n_ dans les mots écrits en gros caractères, et je mets un
accent sur l’_e_ parce que ce mot étant du masculin (voy. les menus VI
et XII, etc., où il est dit _un_ gravé), il semble qu’on devoit plutôt
dire un grav_é_ qu’un grav_e_.

[862] On devoit prononcer ainsi, car on lit _semée_ dans Taillevent
imprimé.

[863] Délayées, mouillées.

[864] Je crois que cette phrase signifie que la tuille d’écrevisses se
fait comme le gravé, sauf qu’on met dessus les écailles, ou sauf qu’elle
est dressée de manière à représenter des écailles d’écrevisse.

[865] Var. de B, que je crois mauvaise, _broyer_. Il me semble que c’est
une recette aphrodisiaque.

[866] Nuque.

[867] Couleur feuille-morte.

[868] Du bouillon des lapins.

[869] Observation de l’auteur. Voy. p. 162.

[870] Mot de trop.

[871] Seulement.

[872] _G. C._, 17 vº.--Presque pareil mais abrégé dans Taillevent
imprimé, feuille D 4 vº.

[873] Voy. ci-devant p. 150, note 4.

[874] La partie du lard qui ne fond pas à la poêle et se grille: les
_grésillons_. Var. A, _les champs_.

[875] Partie solide du mets. Voy. 150, n. 1.

[876] Var. B, _sang_.

[877] Cèdre rouge.

[878] Bois. C’est sans doute ce cèdre que l’auteur a appelé ci-dessus
_alixandre_ et qui donnoit la couleur au _rosé_.

[879] Faon, très-jeune cerf.

[880] Voy. ci-devant, p. 129.

[881] Sausse ainsi nommée.

[882] Faute. Ce doit être deux lèches ou morceaux.

[883] Et ainsi on le mange au goût d’ours. Voy. ci-après, p. 179.

[884] Ce mot paroît être de trop d’après la fin de ce paragraphe.

[885] _G. C._, 17 vº. Voy. p. 158, §4.

[886] Le 25.

[887] On disoit autrefois: _My-Mai, my-teste: my-Juin, my-graisse.--A la
Magdeleine, venaison pleine._

[888] 3 mai; c’est de ce jour que tous les anciens auteurs font
commencer la saison de chasser le cerf.

[889] Le nom étoit dès lors _daintiers_, et _deytiés_ a toujours été une
faute.

[890] Chair placée entre le cou et les épaules.

[891] Veine du cœur.--Ces différentes parties du cerf constituoient les
menus droits ou morceaux recherchés, réservés au seigneur qui les
mangeoit souvent après la chasse même.

[892] Voir ci-dessus, p. 131. Les _lardés_ sont la longe.

[893] Après la curée, deux veneurs placés à une certaine distance, et
ayant chacun une portion des entrailles du cerf, appeloient
successivement les chiens en criant, en _huant_, et leur donnoient à
manger ces entrailles. Cette opération, dite le _hu_ ou _fort-hu_, avoit
pour but d’accoutumer les chiens à revenir promptement et en toute
circonstance à la voix des veneurs. Voir sur le _hu_, l’art de défaire
un cerf, les noms de ses différentes parties et les droits des veneurs
aux XIIIe et XIVe siècles, _la chace dou cerf_, 1840, in-8º, p. 23, et
le glossaire, _Modus et ratio_, 1839, in-8º, feuillet 22 et suiv.; et le
_Tresor de Venerie_, p. 53 et suiv., et note 51.

[894] Var. A, _tardis_.

[895] Même recette que celle du _chevrel_, p. 155.

[896] Jusqu’à ce qu’ils soient écrasés et réduits en pâte à force de
cuire.

[897] Otez-les de l’eau. Voy. p. 135, n. 2.

[898] On voit que cet usage n’est pas nouveau.

[899] Versés doucement et de haut, de manière à faire filer la liqueur
versée comme on le voit du sirop, etc.

[900] On voit dans Lamarre, t. II, art. _de la Triperie_, que toutes les
tripes de la grande boucherie étoient achetées en gros par des tripiers
(appartenant à six familles seulement), préparées par eux pendant la
nuit, et vendues dès le matin à de pauvres femmes qui les colportoient
dans les rues dans des bassins de cuivre jaune. On rencontre encore
aujourd’hui, au marché des Innocens et ailleurs, des femmes qui vendent
ainsi des tripes cuisant sur un fourneau qu’elles portent sur un
éventaire.

[901] Cumin, écrit encore _comin_ dans le dictionnaire de Nicot. C’est
cette plante qui donnoit le nom de _cominée_ au plat.

[902] Ces deux alinéas sont des observations critiques de l’auteur sur
des recettes qu’il copioit.--Nous avons déjà vu et nous verrons encore
souvent de semblables réflexions.

[903] Des amandes broyées.

[904] Var. B, _hourdouil_.

[905] Griller, sécher, de _sor_.

[906] _G. C._, 29.

[907] Remplacé par _rouelle de beuf_ dans le _G. C._, f. 29, où cette
recette se trouve, mais avec des fautes.

[908] _G. C._, 1 vº., fautif.

[909] Écrit Georget dans le _G. C._, f. 2 (incomplet), et Taillevent
imprimé. Taillevent fait deux articles distincts de ces deux brouets.

[910] Gril.

[911] Voir ci-dessus, p. 148. Il est probable que ce potage était
sursemé de persil, comme les courges l’étoient de safran.

[912] _G. C._, 2.

[913] Ces deux mots ne sont pas dans la même recette donnée par le _G.
C._, f. 29, et, en effet, leur présence rend inutile l’observation qui
suit: _Brune_, etc.

[914] Voy. p. 149, n. 7. Var. A (ici seulement), _bracon_.

[915] Taillevent manuscrit dit cependant aussi que ce brouet doit être
_sur le jaune_, et l’imprimé ordonne le safran pour lui _donner couleur_
(a. IV, vº).

[916] _G. C._, f. 2 vº, presque identique à Taillevent manuscrit.

[917] Le _G. C._, qui donne cette recette (f. 2 vº), la termine ainsi:
Nota _le persil fait le brouet vert et le saffren le fait jaune, par
quoy il est de mauvaise couleur_.

[918] A petit jet, à petit filet.

[919] Var. A, _puis ostez et le dréciez et gettez_, etc.

[920] _G. C._, 3 (fautes).

[921] Le Taillevent, manuscrit (Mazarine), qui donne aussi une recette
pour ce brouet, dit de plus de _le passer par la verdure pour estre
vergay_. Ce potage devoit donc son nom à sa couleur _verd-gaie_.

[922] Dans un linge.

[923] _Sic_ peut-être pour _fait_.

[924] Sup. _pour_.

[925] Du Cange explique _carcasium_, _carcosium_, par _cadaver_,
_intestinum_. Ici le mot _carquois_ signifie évidemment le haut du corps
de l’écrevisse, _la carcasse_. Nous le retrouverons encore deux fois
dans le cours de cet ouvrage, comme signifiant sûrement une fois _la
carcasse_, le corps du poulet, dont on a enlevé les membres et _la
chair_, et une autre fois (_Traité de l’épervier_) le même corps séparé
seulement des membres.

[926] Ce qui est _laissé_, ce qui reste dans l’étamine.

[927] Peut-être faudroit-il écrire et prononçoit-on Houss_é_barr_é_:
brouet _houssé_ (voy. ci-devant p. 163), et _barré_, traversé par
_lesches_ ou languettes de chair. Cependant il n’est pas parlé de persil
dans la recette de ce plat, et l’auteur nous dit qu’on ne disoit
_houssé_ que d’un plat sursemé de persil. (Voir p. 164.)

[928] Voy. p. 106.

[929] Une once.

[930] _G. C._, 5.

[931] _Id est?_ c’est-à-dire.

[932] D’après les nombreux passages du _Viandier_, où ce mot est
employé, et surtout d’après celui-ci, je crois qu’il signifie:
dépouiller l’anguille de sa peau (peut-être en l’exposant à la vapeur de
l’eau, en _l’étuvant_). L’éditeur du _Grand Cuisinier_, qui a reproduit
plusieurs recettes où se trouve ce mot, ne paroît pas l’avoir compris:
tantôt il le supprime, tantôt il le remplace par _échauder_ ou
_entamer_. _Échauder_ remplace également _estauver_ dans la recette de
la _soringue d’anguilles_, donnée par Taillevent. (Voir ci-après, p.
173.) Cependant, d’après l’article des lamproies que nous verrons plus
loin, il est impossible de croire que ce mot soit tout à fait synonyme
d’échauder.

[933] _G. C._, f. 51 vº.

[934] Il manque peut-être ici: _et defaites de vin et_. Ces mots sont en
cet endroit de la même recette donnée f. 51 vº du _G. C._

[935] Il manque sans doute ici: _Pochez œufs en huile_.

[936] En dernier lieu.

[937] Taillevent manuscrit (Bibl. royale) donne une recette presque
identique de ce plat.

[938] Var. B, _refrisiez_.

[939] Le?

[940] Var. A, _purée_.

[941] Var. B, _puis_.

[942] Voy. p. 193, n. 3.

[943] Peut-être faut-il transporter le point après _pochés_ et supposer
que ce mot, qui paroît nécessaire à l’intitulé de la recette, étoit
répété dans l’original. La recette du même plat (presque identique)
commence ainsi dans le Taillevent manuscrit (Bib. Mazarine). L’éditeur
du _Gr. Cuis._ qui donne cette même recette (f. 50 vº), l’intitule _Civé
d’œufs pochés à l’huile_ et commence par ces mots: _Prens des œufs et
les fris en bonne huile_.--Voir ci-après au chapitre des _sauces_
bouillies.

[944] Var. B, _eslire_.

[945] _Lians de chair_, p. 159.

[946] Je ne comprends pas ce mot.

[947] Otez-le du feu.

[948] Le Taillevent manuscrit (Bib. royale), qui donne cette recette,
ajoute ici ces mots qui paroissent omis dans les manuscrits du
_Ménagier_: _Puis le remettez sur le feu et un pou de saffran et mettez
boullir tant_, etc.

[949] S. e. de farine (voir ci-après chap. des _Crêpes_).

[950] Remue.

[951] Cette recette s’arrête ici dans le _G. C._, f. 15.

[952] Jeune porc.

[953] Redoublement du mot tuer qui précède, _acorer_ ou _acourer_
signifiant percer ou ôter le cœur. Voy. Du Cange, au mot _Acorarius_. Le
mot _décoré_ que j’ai cru (p. 128, n. 1) une faute pour _décolé_, doit
avoir la même racine.

[954] _G. C._, 16. Répétition du § 3 de la page 88.

[955] Avoit coutume, _solebat_.--_G. C._, 15 vº.

[956] _G. C_., 15 vº.

[957] Voir ci-devant, p. 158.

[958] Mariner?

[959] Le _G. C._, qui donne cette recette, mais avec beaucoup de fautes,
la termine en ajoutant après ces mots: _et le fait-on lyant de pain_.
Voy. p. 155.

[960] Il semble qu’il s’agit là d’une queue de sanglier véritable
donnant au mets une saveur très-prononcée, et non plus de la sausse du
même nom, comme j’avois cru devoir l’interpréter, p. 155, n. 3, à
l’occasion d’une recette analogue de ce même plat.

[961] Var., Ms. C, _char ou grain_. Voy. p. 150, n. 1.--_G. C._, 16.

[962] Diminuer, perdre de leur graisse.

[963] Ici l’auteur répète dans les mêmes termes ce qu’il a dit page 88,
ligne dernière.

[964] Ce mot se trouve dans tous les ouvrages de cuisine et d’économie
rurale, mais il n’est nulle part clairement expliqué. Il signifie ou de
très-jeunes chapons (Voir Nicot qui le traduit par _capus junior_), ou
plutôt des poulets d’un an ou un peu plus, sur le point d’être chaponnés
(_Maison rustique_, 1570, 28 vº). Le _G. C._ qui donne cette recette p.
18, supprime les trois premiers mots: _Poucins gros comme_.

[965] Voy. ci-devant p. 89--_G. C._, 18.

[966] Amincie, réduite, comme le cuir se durcit et se condense par
l’opération du tannage?

[967] Répétition dans les mêmes termes du § 2 de la page 89.

[968] Comme les oiseaux étoient souvent pris par le moyen de la
fauconnerie, ils ne paroissoient sur la table que privés des portions
qui constituoient les _droits_ de l’oiseau chasseur. La tête de la
perdrix et du canard, la cuisse de la grue, etc., appartenoient à
l’oiseau. Ce qui étoit d’abord le résultat des habitudes des fauconniers
devint plus tard une règle d’étiquette culinaire. C’est pourquoi
l’auteur dit: _Laissez à ceux_ (des oiseaux servis sur la table) _à qui
il appartient_.--Ce qui précède est certain pour les têtes et les pieds,
mais je ne me rappelle pas avoir vu que les queues des oiseaux pris à la
chasse aient quelquefois été le sujet _d’un droit de fauconnerie_. Les
seigneurs ont cependant pu se réserver la queue du héron ou d’autres
oiseaux, mais peut-être aussi laissoit-on la queue simplement aux
oiseaux dont les plumes étoient les plus brillantes et produisoient le
meilleur effet sur la table.

[969] Dressé.

[970] Voy. ci-dessus, p. 89.

[971] Deux sortes, deux espèces.

[972] Je trouve ce même préjugé consigné dans le _Thrésor de santé_,
Lyon, 1616, in-8º, p. 226. «On croit qu’il vit de l’air comme l’oiseau
de paradis, en latin _manucodiata_, qu’on nous apporte des Moluques,
parce qu’on ne luy treuve rien du monde dans le gisier. Il ne se doit
éventrer.» _G. C._, 19.--Le premier alinéa est reproduit presque
identiquement dans Taillevent manuscrit (Bibl. royale).

[973] Voir ci-dessus, p. 90, lignes 6, 7, 8, 12, 13.

[974] _G. C._, 14 vº.

[975] Je crois que ce mot signifie ici attacher à la broche à l’aide de
petites brochettes retenant le rôti comme les arçons d’une selle
retiennent le cavalier. Le _G. C._ qui donne cette recette, f. 19, dit
en effet: _Arçonnez de brochettes_.

[976] Le _Grand Cuisinier_ donne (f. 27 vº) une recette bien plus
détaillée d’un cygne ainsi apprêté. Je crois devoir la reproduire ici.

«Prenez un cigne, et l’appareillez et le mettez rostir tant qu’il soit
tout cuit, puis faictes de la paste aux œufs, aussi claire que papel, et
la coulez dessus ledict cigne en tournant en la broche tant que la paste
se puisse cuire dessus, et gardez qu’il n’y ait rien rompu ne aisles ne
cuisses, et mettez le col du cigne ainsi comme s’il nageoit en eau, et
pour le faire tenir en ce poinct, il faut mettre une brochette en la
teste qui vienne respondre entre les deux aisles, passant tout outre,
tant qu’elle tienne le col ferme, et une autre broche au dessouz des
aisles, et une autre parmy les cuisses, et une autre au plus près des
pates et à chacun pied trois pour estendre les pieds: et quant il sera
bien cuit et bien doré de paste, tirez hors les broches, excepté celle
du col, puis faictes une terrasse de paste bise, qui soit espoisse et
forte, et qu’elle soit d’un poulce d’espaisseur, faicte à beaux carneaux
tout autour, et qu’elle soit de deux pieds de long, et d’un pied et demy
de large, ou un peu plus, puis la faictes cuire sans bouillir, et la
faictes peindre en verd comme un pré herbu, et faictes dorer vostre
cigne de peau d’argent, excepté environ deux doigts près du col, lequel
faut dorer, et le bee et les pieds, puis ayez un manteau volant, qui
soit de sandal vermeil par dedans, et dessus ledict manteau armoyez de
telles armes que vous voudrez, et autour du cigne hait (_ait_ ou
_huit?_) banières, les bastons de deux pieds et demy de long à banières
de sandal, armoyez de telles armes que dessus, et mettez tout en plat de
la façon de la terrasse, et le présentez à qui vous voudrez.»

[977] Blancs d’œufs.

[978] _G. C._, fº 22 vº.

[979] Je n’ai pu trouver la signification de ce mot: il me semble devoir
désigner une espèce de champignon. Il y a ci-après (_chapitre des
entremets_) un article plus détaillé sur les _escheroys_.

[980] Nous avons déjà vu, p. 154, que le cèdre ronge se vendoit _sur_
(pour _chez_) les épiciers.

[981] De service, à servir en grand repas?--Gaces de la Bugne, premier
chapelain des rois Jean, Charles V et Charles VI, mort en 1383 ou 1384,
a donné dans son _Livre des déduits_, commencé en 1359 et fini entre
1373 et 1377, une recette de pâté assez détaillée pour figurer utilement
ici.

    Si puis dire que grant profit
    Peut bien venir de tel déduit,
    Car on peut faire un tel pasté
    Qu’onques meilleur ne fut tasté;
    Et pour ce ne me vueil pas taire
    Qu’au jeune ne l’apreigne à faire.
    Trois perdriaulx gros et reffais
    Ou millieu du pasté me mets,
    Mais gardes bien que tu ne failles
    A moy prendre six grosses cailles
    De quoy tu les apuyeras:
    Et puis après tu me prendras
    Une douzaine d’alouetes
    Qu’environ les cailles me mettes.
    Et puis prendras de ces machès
    Et de ces petis oiselès:
    Selon ce que tu en auras,
    Le pasté m’en billeteras.
    Or te fault faire pourvéance
    D’un pou de lart, sans point de rance,
    Que tu tailleras comme dès:
    S’en sera le pasté pouldrés.
    Se tu le veulx de bonne guise,
    De verjus la grappe y soit mise,
    D’un bien poy de sel soit poudré,
    Si en sera plus sevouré.
    Se tu veulx que du pasté taste
    Fay mettre des œufs en la paste;
    Les croutes, un poi rudement,
    Faictes de flour de pur froument,
    Et se veulx faire comme saige,
    N’y met espices ne fromaige:
    Ou four bien à point chaut le met,
    Qui de cendre ait l’atre bien net;
    Et quant sera bien à point cuit
    Il n’est si bon mengier, ce cuit.


[982] Barbeau, _G. C._, 56, ainsi que la précédente recette et la
suivante.

[983] Écailler?

[984] _G. C._, 68.

[985] Latte. Var. A, _essaugle_. _G. C._, 70 (très-fautif).

[986] _G. C._, 56.

[987] Brochet, Voy. p. 88.

[988] _Franche_ (faute?), ci-dessus, p. 88.

[989] _G. C._, 55 vº.

[990] Var. A, _fenes_.

[991] Stérile.

[992] Répétition du § 3 de la p. 90.

[993] C’est l’endroit où cesse le gosier et commence l’œsophage.

[994] Ici seulement commence la recette du _G. C._, fº 58 vº.

[995] De vapeur?

[996] _G. C._, 58 vº.

[997] Répétition de la fin du § 4 de la p. 90.

[998] _G. C._, 70 (sauf le paragraphe _leur saison_ qui est omis).

[999] Répétition du § 5 de la p. 90.

[1000] _G. C._, f. 52, s’arrête là.

[1001] Retournée, voy. ci-après, p. 191.

[1002] Gros sel gris?

[1003] _G. C._, 52.

[1004] Ciseaux.

[1005] Une main un peu postérieure à celle du corps du volume a ajouté
ici dans le Ms. C: _Quatre onces et trois los de vin pour quatre grosses
anguilles_.

[1006] _Ib._, _une pinte_.

[1007] _Ib._, 3 (demie-) _pinte_.

[1008] _G. C._, 52 vº.

[1009] _G. C._, 67.--Il me semble résulter de ce passage du _Ménagier_
que ce poisson dit par erreur _poisson de mer_ dans le dictionnaire de
Trévoux, est une espèce d’anguille. Il est souvent nommé avec l’anguille
dans les exemples cités par Du Cange au mot _Piprenella_. Ce poisson est
encore cité dans un arrêt du 31 janvier 1365-6, rendu au sujet de la
mort d’un receveur de l’impôt levé pour les fortifications de Mantes,
qu’on disoit avoir été tué par des habitans de Tourny, près Vernon, et
qui paroît être seulement mort d’une indigestion de _pimpreneaux_. (_In
quo quidem prandio, pimprenellos male decoctos comederant; et illuc per
longum tempus steterant, ac vinum de tanto ac tali ad tantum et tale, et
postmodum de poto ad potum, more Normannorum, biberant, etc._)

[1010] Ce mot signifie ici poudré de fleur de farine, ailleurs
_enfleurer_. Le _G. C._ qui donne cette recette f. 63, remplace ces mots
par: _Avant que la frisez, treffeuillez-la de farine_.

[1011] _G. C._, 63.

[1012] Boue, sausse épaisse.

[1013] Dominant.

[1014] _G. C._, 63 vº.

[1015] Vin _uni_ (_planus_), doux, (à boire), par opposition à
_vin-aigre_?

[1016] _G. C._, 64.

[1017] Voy. p. 148, n. 1.

[1018] _G. C._, 64.

[1019] Poisson qui tient de la brême et du gardon suivant Belon (p. 319
de la _Nature des poissons_, 1555, in-8º obl.).

[1020] _G. C._, 62.

[1021] Var. A, _eschauder_.

[1022] _G.C._, 72 vº.

[1023] Belon, qui cite plusieurs espèces de chiens de mer, ne dit rien
de la brette.

[1024] Var. A, _mungon_. Le _G. C._ qui supprime _en Languedoc_, écrit
_mugeon_ (66 vº). Belon dit qu’on le nomme _muge_ à Marseille.

[1025] Cabillau. Cette distinction existe aujourd’hui aussi à Paris.
Belon ne l’a pas connue et se borne à dire qu’on connoît mieux la morue
salée que fraîche (p. 122).

[1026] Stockfisch (_bâton de poisson_ en hollandois.--_Trévoux_).

[1027] Var. B, _le lendemain_ (ce doit être un des plus anciens exemples
de cette locution devenue depuis d’usage général au lieu de
_l’endemain_. Voy. plus loin à la recette des _vingt plats de gelée_).

[1028] Suppléez _sans cela_.

[1029] _G. C._, 65 (fautif).

[1030] Échalotte.

[1031] _G. C._, 65 vº.

[1032] _G. C._, 70 vº.

[1033] Renversée. _G. C._, 64 vº.

[1034] Le Ms. C ajoute: _Refroidier et_...

[1035] _G. C._, 60 (très-fautif.)

[1036] Suivant Belon, _tumbe_ est le nom rouennais du gournault. Ce
dernier est une espèce de rouget, mais il est plus grand, de couleur
plus sombre, et a les ailes bleuâtres et non rouges.

[1037] _G. C._, 60 vº (très-fautif).

[1038] Couleur de tan, feuille-morte.

[1039] Tacheté.

[1040] Fumé. Voy. Du Cange au mot _Baco_.

[1041] Peut-être faut-il lire _pouldre_ en sous-entendant _avec_.

[1042] _G. C._, 69.

[1043] _G. C._, 72 vº.--Suivant Belon, ce poisson, lorsqu’il étoit salé,
s’appeloit du _hadou_, en anglois _hadoch_.

[1044] _G. C._, 72 vº, _arsin_.--Sans doute l’_orphie_, sorte d’anguille
de mer qu’on pêche sur les côtes de Normandie.

[1045] L’auteur semble dire que ces trois noms désignent un même
poisson. Belon fait des deux premiers deux espèces différentes et ne
parle pas du _pourpois_.

[1046] On trouve dans Roquefort _brulliau_, sorte de poisson.

[1047] _G. C._, 67 vº.

[1048] _G. C._, 65 vº.--La merluche est au moins de la famille des
morues, _aselli_ en latin.

[1049] Var. B, _esbolera_.--Réduira à force de bouillir.

[1050] _G. C._, 61 vº.

[1051] _G. C._, 61 vº.--J’ignore ce que signifie _entrepelé_.

[1052] Il est parlé du _craspois_ ou _graspois_ dans bien des auteurs du
moyen âge, mais il n’y a à ma connoissance que l’auteur du _Ménagier_
qui fasse connoître ce que c’étoit. Un procès qui dura plusieurs années
au parlement de Paris et qui étoit relatif à _sept étaux_, dont cinq à
sèches et deux à craspois que le roi possédoit aux halles de Paris, nous
apprend que le craspois ne venoit à Paris qu’en carême: c’étoit le _lard
de carême_, le poisson des pauvres; quarante mille personnes vivoient
pendant le carême de craspois, de sèches et de harans. Ces poissons
étoient vendus par environ mille pauvres marchandes, à qu’il étoit
seulement défendu de se tenir sous _le couvert_ des halles où étoient
les grands étaux (_Plaid. civiles_, 7, 12, 14 et 19 mars 1380-1, 1er
mars 1383-4; _Jugés_, XXXII, p. 93).

Belon ne nomme pas le _craspois_, mais il confirme cependant
l’explication du _Ménagier_. «Ce poisson, dit-il en parlant de la
baleine, est couvert de cuir noir dur et espez sous lequel y a du _lard_
environ l’esposseur d’un grand pied, _qui est ce que l’on vend en
quaresme_.»

Legrand d’Aussy qui a parlé avec détail de la baleine salée comme
nourriture maigre des pauvres, d’après Charles Estienne (II, 83), a
ignoré que le _craspois_ fût le nom de cet aliment. Au reste, l’auteur
du _Trésor de santé_ dit que la baleine salée, quoique cuite pendant
_vingt-quatre heures_, étoit toujours _fort dure et indigestible_.

[1053] Nageoire.

[1054] _G. C._, 68 vº, dit _Cyros_ au lieu de _Tire_, et _naturelle_
pour _notrée_, mais ce doit être une faute. _Notrée_ semble devoir
désigner une espèce de raie comme la raie _bouclée_, _lisse_, etc. Je ne
vois au reste aucune espèce de raie qui ait plus d’une queue.

[1055] _G. C._, 62.

[1056] Plies.

[1057] Presque.

[1058] Flot, _marée_ de mars (la grande marée de l’équinoxe vers le 21
mars).

[1059] De farine.

[1060] _G. C._, 68 (très-fautif).

[1061] Tirant sur le blanc, pâle.

[1062] _G. C._, 65.

[1063] Belon dit que la seule manière de distinguer ces deux espèces est
de les mettre à plat, regardant _contremont_ (en haut, en l’air): dans
cette position la bouche de la pole sera à gauche et celle de la sole à
droite.

[1064] Gril.

[1065] _G. C._, 66, dit _molles_ et _solles_; mais la _molle_ est
différente de la _pole_. Voir _Trésor de santé_, pages 249 et 250, et
surtout Belon.

[1066] Var. A et _G. C._ (70 vº), _au succre_. Je crois qu’on disoit
_une soucie_ et _un soucié_ (voy. _sauces non bouillies_). Ront vient de
_rhombus_, nom latin du turbot, en italien _rombo_.

[1067] _G. C._, 56.

[1068] Var. A, _Barte_. Je ne vois rien sur ce poisson dans Belon, qui
parle de la _brême de mer_.

[1069] _G. C._, 58 vº.

[1070] Peut-être faut-il lire _tance_ pour tanche (de mer).

[1071] Seroit-ce coupées par lanières, par morceaux? Voir t. I, p. 172.
J’ignore ce que c’est que l’_ale_, à moins qu’on ne suppose que c’est
l’anchois, _halecula_ en latin.

[1072] _Flez_ ou flet, espèce de plie.

[1073] Var. A, _quelrel_. Var. C, _quelboe_. Peut-être le quarrelet;
l’auteur auroit-il voulu dire ici: _Quand le carrelet (qui vaut mieux)
est très-commun, se trouve à chaque pas_? Cependant _quarrel_ signifie
en général carreau, _pavé_, mais en prenant ce mot dans son acception
ordinaire, je ne vois plus de sens à la pensée de l’auteur.

[1074] Suivant Belon, c’est le nom rouennais du coquillage dit
_pétoncle_.

[1075] _G. C._, 62 vº, finit en ajoutant après oseille: _ou d’autre
verdure_. La sanemonde est connue; _barbarin_ pourroit être synonyme de
_berberis_, épine-vinette.

[1076] Var. B, _mooles_.

[1077] Sans doute Cayeux, bourg de Picardie situé sur le bord de la mer,
à deux lieues de Saint-Valery. Legrand d’Aussy (t. II, p. 82) dit qu’il
y a un poisson de ce nom différent du coquillage, mais il ne donne pas
le motif de son opinion à cet égard, et je ne vois ce poisson mentionné
nulle part. Il faut d’ailleurs remarquer qu’ici les moules viennent
après les _hanons_, sorte de coquillage.

[1078] Var. B, _nourrist_. Si l’on adopte ce mot qui me paroît beaucoup
moins bon que _noircit_, il faudroit fermer la parenthèse après _non_.

[1079] Préparée (voy. Du Cange au mot _Conredium_), ce doit être la
sèche _confite avec la saulce aigre_ (marinée), comme Belon dit (p. 340)
qu’on l’apprêtoit de son temps _pour la rendre plus facile á manger et à
digérer_. On voit que l’auteur distingue ici la sèche _conrée_ de la
fraîche.

[1080] Plissé, froncé, racorni par la chaleur du feu, _grediller_ dans
Nicot qui le dit synonyme de _grésiller_.

[1081] Voy. p. 154.

[1082] On voit que l’auteur ne fait pas grand cas de ce poisson. Du
temps de Belon comme au XIVe siècle (voy. p. 200, n. 2), il n’étoit
guère mangé que par les pauvres. Bruyère-Champier préfère à la sèche
fraîche la salée qui, dit-il, est la consolation du carême: _jejunia
verna egregie solantur_.

[1083] C’est-à-dire moins d’une feuille ou pas du tout.

[1084] Plante dite _Ténaisie_ dans la _Maison rustique_.--Ce plat aura
été nommé _arboulaste_ à cause des herbes qui entroient dans sa
composition. Les Italiens avoient aussi au XVIe siècle un plat tout à
fait analogue dit _Herbolata_ (Bart. Scappi, cuisinier du pape Paul V,
1570, in-4º, f. 360 vº).

[1085] Aumelette. Le mot _alumelle_, qui vient de _lamella_, diminutif
de _lamina_, signifie ordinairement la lame, le tranchant d’une épée,
d’une hache, etc. (voy. Du Cange à _Alemella_). C’est sans doute à cause
de leur forme aplatie, _laminée_, que les œufs ainsi accommodés auront
été dits _alumelle_, puis par corruption _alumette_ (p. 208, n. 1), et
enfin _aumelette_.

[1086] Râpé.

[1087] Suppléez: _que_.

[1088] Broyeroit.

[1089] Var. A., _alumette_.

[1090] _G. C._, 50 (_aumelette_ au lieu d’_allumelle_).

[1091] _De_ vaudroit mieux, car le nombre de sept étant impair, je ne
crois pas que l’auteur ait voulu dire d’ôter le blanc d’un œuf sur deux.

[1092] Suppléez _les_ (sur les moyeux des deux œufs cassés d’abord).

[1093] En faisant évaporer l’humidité, à l’étouffée?

[1094] Uni, lisse.

[1095] Voy. p. 207.

[1096] Suppléez: _se_.

[1097] Var. A, _Fourmentée_.

[1098] Voy. p. 111, n. 2.

[1099] On trouve des recettes de ce plat très-usité au moyen âge dans le
Taillevent manuscrit et imprimé, dans le _Grand Cuisinier_ (ff. 41, 45),
et dans le _Trésor de santé_, p. 24. Celle du _Ménagier_ est la plus
complète. On mangeoit presque toujours la vénaison à la fromentée. On a
pu le remarquer dans les _Menus_ qui précèdent (p. 93, etc.), et Hardoyn
de Fontaines Guérin le dit positivement dans son _Trésor de vénerie_ (p.
51 et note 56).

[1100] Var. B, _jusiers_, plus conforme à _gésier_ qui a prévalu
aujourd’hui quoique tout à fait dissemblable de _giger_, racine de ce
mot employée par Festus et Lucilius. Le peuple dit _gigier_ avec
beaucoup plus de raison.

[1101] _G. C._, 30. Même recette que dans Taillevent imprimé et
manuscrit.

[1102] Épais à pouvoir le tailler (_à couper au couteau_). _G. C._, 74.
La recette de Taillevent est presque la même.

[1103] Sépare.

[1104] Surjet.

[1105] Obscur.

[1106] Cailles, lait caillé. (_Brique de lait_, _maton_ signifiant
proprement brique. Voy. Du Cange à _Matto_.)

[1107] Lait de beurre.

[1108] Les _carcasses_. Voy. p. 170, n. 1.

[1109] Ce doit être l’estomac où est le grain mangé par l’animal:
_granea_.

[1110] Cette recette est dans Taillevent, imprimé et manuscrit, mais
avec plusieurs différences dont l’une est que Taillevent défend de
_refaire_ les volailles, contrairement à ce qui est dit ici.

[1111] Il faudroit _les_ ou _la_ (la poule); Taillevent dit: _l’enflez,
puis_ la _fendez_.

[1112] Mot qui paroît de trop.

[1113] Ce doit être le _col_ comme dans Taillevent.

[1114] _Broyons_ dans Taillevent, manuscrit Bibl. Mazarine, et _blancs_
dans le manuscrit de la Bibl. Royale.--Foies, intestins. Voy. p. 149, n.
7.

[1115] Je ne sais quel est ce fromage. Le dictionnaire de Trévoux cite
bien un fromage dit d’_Anguin_, mais sa composition ne me paroît pas
convenir à l’emploi fait ici du fromage de gain. Le Taillevent imprimé
dit _fromage de guin_: le manuscrit de la Bibl. Royale, _de gain_, et le
manuscrit de la Bibl. Mazarine, _fin fromage_.

[1116] Ces deux mots ne sont que dans C.

[1117] Il est dit dans la _Maison rustique_, éd. de 1570, p. 105, que
quand on a exprimé au pressoir l’aquosité de la guède, on rédige le marc
_par petites pastilles_ qu’on fait sécher au soleil, et que ces
pastilles sont jetées dans les cuves où l’on met les laines à teindre.
Ce sont ces _pastilles_ ou _pasteaux_, sans doute d’une grosseur fixée
par l’usage et connue, que notre auteur prend ici pour terme de
comparaison.--Cette phrase, depuis _soit recousu_ jusqu’à _et pour les
dorer_, n’est pas dans Taillevent.

[1118] Le manuscrit A ajoute _de bœuf_.

[1119] Ce mot n’est que dans le Ms. C.

[1120] C’est la même recette que celle de Taillevent. (Ms. Bibl.
Royale.)

[1121] Var. B, _pour couleur_, au lieu de _y coulent_.

[1122] Le jarret de devant, ou la dernière, la plus courte articulation?

[1123] Extrémité du pied?

[1124] Ce mot n’est pas dans le manuscrit A.

[1125] Var. C. _où la char aura cuit_.

[1126] Ce mot doit être synonyme de _harlé_, hâlé, grillé.

[1127] Mot qui est de trop, à moins qu’on ne lise _de deus_ (deux).

[1128] Parce qu’il étoit ainsi divisé par une ligne verticale en deux
portions de couleur différente, comme _un écusson parti_ en blason. Le
potage écartelé dont il est question dans les _Menus_ devoit se faire
d’une manière analogue, sauf qu’il étoit _écartelé_ (divisé en quatre
portions par deux lignes en croix), au lieu d’être _parti_. Voy. p. 211
un autre _faulx grenon_.

[1129] Du gingembre.

[1130] Voy. ci-dessus, p. 213.

[1131] Sans doute queues.

[1132] Ce doit être _boulez_, ou plutôt _broyez_.

[1133] Piquez les pattes d’écrevisses dans la tarte.

[1134] A part, séparément.

[1135] Épinards. Voy. p. 141.

[1136] Pressé?

[1137] Râpé.

[1138] Sans doute gingembre de mesche. Voy. p. 230.

[1139] Racine d’arbre autrement dite _zedoaria_, suivant Jacques de
Vitry cité par Du Cange au mot _Zedoaria_.

[1140] C’est le poivre de cubèbe, employé aujourd’hui seulement dans la
pharmacie.

[1141] Le nard, _spica nardi_, dans le _Trésor de Santé_. Voy. aussi Du
Cange à _Spicus_.

[1142] Var. B, _toile_.

[1143] Il semble qu’il faudroit _et la couler deux ou trois fois avant
qu’elle_, etc.

[1144] Peut-être ce mot désigne-t-il la _filicule_, plante astringente
de l’espèce des fougères.

[1145] Tournesol. Fruit de l’_heliotropium tricoccum_. Voy. Trévoux.

[1146] Ce mot désigne ici le poisson du même nom qui semble avoir été
ainsi vendu à la mesure, car nous allons voir (article des _vingt plats
de gelée_) l’auteur parler d’une _chopine_ de loche qui, répartie entre
vingt plats, donnoit six loches par plat. Si son calcul n’est pas erroné
(comme celui qu’il fait des écrevisses), une chopine de loche auroit
contenu cent vingt loches environ.

[1147] Oter le veau.

[1148] Il en faudroit cinq pour employer les cent écrevisses dans vingt
plats.

[1149] Ainsi dans les trois manuscrits. Voy. p. 196, n..

[1150] Frappez, pressez de la paume de la main.--Var. fautive de A,
_paronoyez_.

[1151] Noisetier.

[1152] Farine.

[1153] Var. B, _demeurent_.

[1154] Grenouilles.

[1155] Appât, _esca_.

[1156] _G. C._, 68 vº (tronqué).

[1157] Sureaux, suivant Roquefort. (Voy. plus loin R. de la glux.) Le
_G. C._, qui donne cette recette (f. 73 vº), dit _aux vignes et aux
jardins_.

[1158] On trouve a la fin du _Calendrier des Bergiers_ (Paris, 1493,
in-fº, f. N vj) une pièce très-bizarre sur le limaçon, dans laquelle on
lui dit: _Oncques Lombard ne te mangeat, A telle saulce que (nous)
ferons, Si te mettront en ung grant plat, Au poyvre noir et aux
ongnons_.

[1159] Ainsi écrit dans les trois Manuscrits; mais ce doit être _jalet_,
caillou rond (_galet_) ou balle de plomb qu’on lançoit avec une arbalète
dite arc à jalet: de _jaculum_.

[1160] Suppléez _que dessus_.

[1161] Sans doute _la_ paste et non _le_ past_é_.

[1162] Ce passage confirme l’explication donnée p. 150, n. 5.

[1163] Pour les repas ordinaires?

[1164] Liaison.

[1165] 1er octobre.

[1166] Ce doit être une faute pour _oyers_, rôtisseurs.

[1167] Var. B, _roissoles_.

[1168] Ce mot paroît de trop.

[1169] Var. A, _mettez_.

[1170] _G. C._, f. 74, s’arrête-là: un peu abrégé.

[1171] Fuseau.

[1172] Rouler, sausser. Var. A, _coulez_.

[1173] Var. B, _arboulastre_.

[1174] Service, mets.

[1175] Sans doute faute pour _ou_.

[1176] Voy. p. 129.

[1177] Voy. p. 161.

[1178] J’ai dit p. 185 que ce mot pouvoit signifier une sorte de
champignons; mais je crois que ce sont plutôt les racines du _chervis_
(_siser_) désignées et décrites sous le nom d’_eschervis_ dans le
_Trésor de Santé_, p. 432.

[1179] Enfariner.

[1180] Œufs.

[1181] Se préparer, se faire.

[1182] Peut-être: _en esté_. Var. B, mais résultat d’une correction:
_encores_.

[1183] Rôti.

[1184] Voy. p. 111. J’ai aussi vu du _gingembre vert_, mentionné dans
les registres du parlement (_Plaid. civiles_, 29 avril 1392), à propos
d’une affaire de droit maritime, et aussi dans Du Cange au mot
_Arquinetta_.

[1185] Voy. p. 112.

[1186] Gâté.

[1187] Var. A. C, _noir_. Je ne vois pas qu’il y ait eu du galanga noir.

[1188] Gousse.

[1189] B écrit ici: _raoulmarin_.

[1190] Sans doute _sanemonde_.

[1191] Toute-bonne? Voir ci-devant, p. 44, n. 2.

[1192] Nous avons vu ci-dessus (_Menus_ 15 et 21) des turbots _à la_
soucie. L’auteur faisant ici et ailleurs ce mot masculin, je pense qu’il
faut lire en cet endroit _soucié_, et qu’on disoit _une soucie_ et _un
soucié_, mais plus souvent le dernier.

[1193] Sans doute _pousser_. Nous avons déjà vu, p. 213 (_pour faire
perdriaulx de poucins_) qu’on _poussoit_ les cuisses du poucin _pour
faire la char plus courte_.

[1194] Var. A. C., _puis_.

[1195] P. 230.

[1196] Var. B, _le meigre d’eaue_.

[1197] Voy. p. 223, n. 3.

[1198] Ce mot n’est que dans C.

[1199] Rôties.

[1200] _G. C._, 74 vº.

[1201] _Ib._, réuni avec la recette précédente en un seul article et
fautif.--Cette recette paroît la même que la précédente, mais améliorée
et complétée.

[1202] Presque identique avec la recette de la _sauce poitevine_ dans le
Taillevent manuscrit, défigurée dans l’imprimé.

[1203] Écrasez.

[1204] Cette épice est sans doute la même que l’_arquinetta_ citée dans
des lettres du roi Richard II, en faveur de marchands de Gênes (1380);
mais ce ne peut être un bois sudorifique comme le conjecture dom
Carpentier (voir _Glossaire_ de Du Cange, au mot _Arquinetta_). Je ne
vois pas au reste pourquoi l’auteur parle de cette épice à propos d’une
recette où elle n’est pas employée.

[1205] Var. B, _roux_, au lieu de _dessus_.

[1206] Toujours.

[1207] Gousse.

[1208] Var. B, _ou_.

[1209] Véritable (non aigri); comme nous avons vu p. 193, du vin
_plain_?

[1210] Bourbelier. Voy. p. 158 et 179.

[1211] Var. B, _une_.

[1212] L’auteur veut sans doute dire qu’alors cette sauce se sert avec
du jambon, etc.

[1213] Sans doute le setier de huit pintes plutôt que celui d’une
demi-pinte (ou chopine).

[1214] Il y avoit une petite monnoie d’argent de ce nom valant un denier
un quart.

[1215] Le manuscrit B fait orge masculin; mais c’est par suite de
corrections un peu postérieures au corps du texte.

[1216] En prenant les bases établies ci-dessus, p. 109, n. 2, un pain
brun (ou _debrode_ ou _faitis_, bis,) d’un denier devoit peser tout cuit
dix-huit onces.

[1217] Var. B, _puis_.

[1218] Se faire.

[1219] Ordinairement _origine_ (_interdum urina_): mais ici, sans doute
_globules_.

[1220] A et B répètent _lors_.

[1221] Sans doute levure de bière.

[1222] Domestiques.

[1223] Dans la même proportion.

[1224] Plombé. Ce mot semble signifier ici étamé. Le Taillevent
manuscrit qui donne une recette analogue de ce même plat, dit _plombé
par dedans_. Il résulte de la recette de Taillevent qu’on mettoit dans
ce pot la poule ou chapon sans eau.

[1225] _A_ n’est que dans le manuscrit C.

[1226] Le _G. C._, qui donne la même recette (f. 28 vº) mais avec
quelques modifications, dit ici _avec du vin blanc les deux pars et le
tiers d’eau_. Le vin est également mélangé d’eau dans la recette de
Taillevent.

[1227] En le faisant _filer_. Voy. p. 159, n. 4.

[1228] Voy. p. 271.

[1229] Crevée. Voy. p. 139.

[1230] Le Taillevent manuscrit (Bibl. Roy.) donne cette recette avec
cette différence qu’après _couler_ on lit: _Mettez boulir, et, qui
veult, pouldre de succre pardessus et non pas trop liant_. Il est
probable que ces mots ont été omis dans les manuscrits du _Ménagier_,
car le manuscrit A termine ainsi cet alinéa: _coulez et mette_ (ici un
espace vide) _et du succre_.

[1231] Le manuscrit B ajoute _à fort_.

[1232] Même recette que dans le Taillevent manuscrit.

[1233] Bayen, crevé.

[1234] Répétition du dernier paragraphe de la p. 214.

[1235] Les trois manuscrits portent après cet intitulé: _Fault
commencier à la Sainct Jehan_. Ces mots paroissent une répétition
anticipée de ce qui suit.

[1236] La phrase est obscure et probablement défectueuse. Peut-être
faut-il lire _lez qu’elles_, en prenant l’adverbe _lez_ (_jaxta_,
_secundum_, _ad_,) dans le sens de _jusque_; mais je ne l’ai jamais vu
ainsi employé.

[1237] Le psaume _Miserere_, comme l’auteur dit ailleurs, le temps de
dire une patenôtre, etc.

[1238] Var. B, _ou_.

[1239] Sans doute _sas_.

[1240] Var. B, _trois ou quatre_.

[1241] Id. _quatre_.

[1242] Suppl. _le_ (le miel d’où on a retiré les noix).

[1243] Tonneau contenant une demi-queue. Mais peut-être ici est-ce un
tonneau plus petit. Ce qui augmente mon doute, c’est que l’auteur dit
plus loin, p. 249, qu’il faut deux livres de sauge pour faire un poinçon
d’eau de sauge; il semble que cela ne suffiroit pas pour cent
quatre-vingt-quinze litres d’eau. (_Tonnelet_ est donné comme synonyme
de Poinçon, p. 260.)

[1244] Carottes.

[1245] 30 novembre.

[1246] Ratissez.

[1247] Graine du Carvi (_carvi officinarum_ ou _cuminum pratense_),
plante originaire de la Carie en Asie Mineure.

[1248] Peut-être est-ce le raifort, _raffanus_, _rafan_, dans Crescens
qui dit qu’on _en use principalement à faire compote de navets_.

[1249] Chez les herboristes.

[1250] Gingembre de mesche. Voy. p. 111.

[1251] Nom de lieu. On lit dans le _Dit des pays_ (impr. au XVIe
siècle): _En Orte est le bon saffran_.

[1252] Voir ci-devant, p. 154.

[1253] Var. A, et C, _une livre_.

[1254] Var. B (mais résultat d’une correction postérieure), _cotignac_:
c’est le nom actuel.

[1255] Sans doute le nœud qui est à l’extrémité du fruit, opposé à la
queue.

[1256] Je crois que ce signe, reproduit exactement ici d’après le Ms. B,
est un 4. Il figure aussi dans les _Menus_ I, II, IV, VI. Voy. p. 91, n.
5. Il est remplacé dans le Ms. A par [Illustration: un symbol] (un gros
ou drachme). Voy. pour la _poudre de duc_, aussi estimée que celle-ci au
XIVe siècle, p. 248.

[1257] Au lieu de sauge.

[1258] Goûtée, comme cela est dit p. 196, pour la morue?

[1259] Un sixième d’once plutôt que six noix.

[1260] Var. B, _quarton_.

[1261] _Spicus nardi_, nard.

[1262] En allant toujours en diminuant, c’est-à-dire qu’il y ait moins
de graine de paradis que de girofle, moins de macis que de graine, etc.

[1263] La livre en usage dans le Midi n’étoit que de treize onces;
l’auteur ayant au commencement de ce paragraphe adopté la mesure de
Béziers, prévient ici qu’il reprend les poids en usage à Paris.

[1264] Dominer.

[1265] Voy. p. 244, n. 4.

[1266] Les cotons.

[1267] Var. B, _le_ (saug_é_?)

[1268] On voit par plusieurs passages du _Ménagier_ quelle consommation
nos ancêtres faisoient de verjus. Cependant j’ai vu avec étonnement les
paroles suivantes dans une plaidoirie du 9 avril 1385-6, prononcée pour
Jean II de Neelle, seigneur d’Auffémont et de Mello qui plaidoit contre
les religieux de Saint-Corneille de Compiègne pour conserver le droit de
conduire, par eau et sans droits, de Mello à Auffémont, le vin
nécessaire à sa consommation: _A Auffémont il ne croist pas chascun an
huit queues de vin et n’y croist que pour avoir du vertjus pour l’ostel
d’Auffémont_. L’avocat prétendoit-il donc qu’on usoit à l’hôtel
d’Auffémont six ou sept queues de verjus par an (la queue de 391
litres)? Quelque nombreuse maison qu’ait eue Jean de Neelle, très-grand
seigneur à la vérité, il seroit difficile de croire à une semblable
consommation de verjus.

[1269] Voir la note sur lui, p. 118: et sur deux Hautecourt qui
pouvoient être ses descendans vers 1500, Sauval, III, 605.

[1270] Nous avons déjà vu plusieurs fois cet usage de semer des dragées,
des grains de Grenade, etc. sur de certains mets.

[1271] Je ne sais quelle est cette feuille; le manuscrit A dit _seur_,
mais ce ne peut être la feuille de _sureau_ qui est petite.

[1272] Voy. p. 214, n. 1.

[1273] Dure, telle que l’eau de puits.

[1274] Pétrir.

[1275] M. de Lincy, t. I, p. 210 de ses _Proverbes françois_, cite le
suivant: _On fait des godès à Beauvais et des poales à Villedieu_.
J’ignore quelle étoit la qualité spéciale de la terre de Beauvais.

[1276] Sera bu par les roses, disparoîtra.

[1277] Bien fait, à point.

[1278] Alambic de plomb.

[1279] Au recto de ce feuillet, _schedula_ d’où nous avons fait
_cédule_, (billet, petite feuille volante,) signifiant aussi feuillet.

[1280] Teinture rose? Je n’ai rien trouvé sur ce mot.

[1281] Var. A, _rousse_.

[1282] Feuilles. Du Cange mentionne au mot _Pampa_ une redevance féodale
en 1270, d’un _plain panier de penpes de roses à faire eaue-rose_. Voy.
sur l’usage des roses et des fleurs la note 3 de la page 52, et Sauval,
t. III, p. 517, 521, 526, 632.

[1283] La volière du château d’Hesdin ville d’Artois où les ducs de
Bourgogne de la dernière race résidoient souvent. La ville d’Hesdin,
rasée en 1553 par Charles-Quint, est maintenant un bourg dit le
_Vieil-Hesdin_ situé à une lieue environ du Hesdin actuel qui est
l’ancien village du Mesnil agrandi et fortifié en 1554 par le duc de
Savoie.

[1284] L’hôtel Saint-Paul, rue Saint-Antoine, à Paris. Voy. sur les
volières de cet hôtel et le goût de Charles V pour les oiseaux, Sauval,
II, 282.

[1285] C’est le célèbre prévôt de Paris. Il est fait allusion à son goût
pour les oiseaux dans une curieuse chanson faite contre lui au moment de
sa disgrâce et publiée pour la première fois dans l’édition des
_Chroniques de Saint-Denis_, donnée par M. Paulin Paris (T. VI, p. 478).

    Courroucié es de tes oiseaux
    Qu’oïr ne pues chanter en caige,
    Mais bien pues faire les appeaulx
    Pour chanter en ton geolaige.

Mais où étoit placée cette volière si remarquée au XIVe siècle? Étoit-ce
dans cette maison de plaisir avec jardin qu’Aubriot auroit eue près des
Célestins suivant Sauval? (II, 154.) Mais il semble peu probable,
attendu l’extrême proximité des deux emplacemens, que ce jardin, dont
Aubriot jouissoit en 1366 ou 1368 (S. III, 126) soit resté sa propriété
en même temps que sa maison d’_habitation ordinaire_ aussi avec jardin.
C’est là qu’étoit bien plutôt placée la volière dont parle l’auteur du
_Ménagier_. Ce dernier hôtel est désigné seulement, dans les registres
du Parlement, comme situé _près l’église Saint-Paul et dans la censive
de l’abbé de Tiron_, et il y est dit qu’_Aubriot l’avoit acheté de
Jacques de Pacy et ses frères_, mais c’est bien encore le même que celui
dont il est parlé dans Félibien (T. I, p. 661), et qui est dit _avoir
été donné à Aubriot par Charles V_. Aubriot l’acheta bien effectivement,
mais le Roi le paya, on du moins donna en 1369 quinze cents francs d’or
à son prévôt, afin qu’il l’achetât et vint demeurer plus près de lui
(Sauval, II, 154). Cette apparente différence d’origine (je crois avoir
démontré qu’elle n’est qu’apparente) ne pourroit en outre prévaloir
contre la coïncidence des limites assignées à cet hôtel par Félibien
(entre la rue de Jouy et la rue Percée) et celles de la censive de
l’abbé de Tiron. En effet, parmi les localités soumises à cette censive,
la plus rapprochée de l’église Saint-Paul étoit précisément placée entre
la rue Percée, la rue de Jouy (dite postérieurement à 1543, des _Prêtres
Saint-Paul_, et _Charlemagne_ depuis quelques mois, par suite de
l’incompréhensible et odieuse persistance de l’édilité parisienne à
anéantir les anciens noms des rues), diverses propriétés ayant leur
façade sur la rue Saint-Antoine, et les anciens murs de Paris (_Atlas
des plans de la censive de l’Archevêché_, f. 43.--Archives du roy.
Seine, nº 64). Pierre de Giac, chancelier de France, grand accapareur de
biens, se disposoit à acheter cet hôtel en février 1383-4, et se fit
alors donner par le Roi, pour douze deniers de cens annuel, les anciens
murs de Paris, avec les deux tours y comprises, auxquels joignoit le
jardin. Giac le vendit en 1397 au duc d’Orléans pour 8,000 livres et
deux autres maisons (Champollion, II, 11). Cet hôtel fut alors connu
sous le nom du _Porc-Épic_, sans doute à cause de l’ordre de ce nom
institué par le duc d’Orléans, et dont l’insigne devoit figurer sur la
porte, les vitraux, etc. On peut voir dans les d’_Orléans_ de M. Aimé
Champollion (II, 13) des détails bien curieux sur les vitraux de cette
maison. En 1404, le duc de Berry l’ayant reçue du duc d’Orléans en
échange de l’hôtel des Tournelles, la donna au célèbre et malheureux
Jean de Montaigu (Sauval, II, 153). Après sa mort arrivée le 17 octobre
1409, le roi (ou plutôt le duc de Bourgogne usant du pouvoir royal),
donna l’hôtel du _Porc-Épic_ à Guillaume duc de Hollande et comte de
Hainaut (Sauval, II, 81). Il en jouissoit en 1413 et 1417 (S. III, 281).
En octobre 1418, après la surprise de Paris par les Bourguignons, une
nouvelle donation en fut faite au duc et à la duchesse de Brabant,
gendre et fille du duc Guillaume (J. reg. 170, n. 207). Je n’ai pas vu
qu’il ait été rendu au fils de Jean de Montaigu comme le furent ses
autres biens, mais il ne pouvoit appartenir au duc de Hollande en 1438,
comme on pourroit le croire d’après un compte de cette année donné par
Sauval (III, 655.--Le duc de Bourgogne étoit alors seul duc de
Hollande). Cet hôtel appartint ensuite à l’illustre Arthur de Richemont
connétable de France, dont la femme, Marguerite de Bourgogne, y mourut
en 1441 (Sauval, II, 146). Il passa ensuite à Robert d’Estouteville,
prévôt de Paris (mort en 1479), qui payoit les douze deniers de cens
pour les murs en 1472 et 1476 (S. III, 403 et 425. Il avoit toutefois
une autre maison _à sa vie_, rue de Galilée.--Ib., 338). C’est sans
doute à cause de Robert d’Estouteville, et peut-être de son fils
Jacques, prévôt de Paris après lui de 1479 à 1509, qui a pu posséder le
même hôtel, que cet hôtel fut alors appelé et est désigné sur le plan de
tapisserie (commencement du XVIe siècle), sous le titre d’_Hostel du
Prévost de Paris_. Sauval dit bien qu’il appartenoit en 1533 à leur
cousin Jean d’Estouteville, aussi prévôt de Paris, mais il n’en donne
pas de preuve. Il n’en donne pas non plus au sujet de l’attribution
qu’il fait (II, 152) de ce même hôtel à l’amiral de Graville, mais cela
est très-probable. On sait en effet que l’amiral de Graville, petit-fils
de la fille de Jean de Montaigu, jouit de tous ses biens, et l’on voit
en outre dans Sauval (III, 629) que Pierre de Balsac son gendre, et Anne
de Graville sa fille, cette femme célèbre comme poëte et comme
bibliophile (voy. _les Femmes célèbres de l’ancienne France_, par M. de
Lincy) avoient payé les douze deniers de cens pour les vieux murs de la
ville, et par conséquent très-probablement possédé et habité cet hôtel.
Ils en avoient transporté la jouissance à Guillaume le Gentilhomme,
avocat en parlement, qui payoit le cens en 1573. Si Sauval ne s’est pas
trompé quand il a dit (II, 152) que cet hôtel appartenoit en 1533 aux
héritiers de l’amiral de Graville et à Jean d’Estouteville prévôt de
Paris, il y auroit lieu de croire qu’il avoit alors été divisé.
Aujourd’hui, si l’on entre dans le _Passage Charlemagne_ (rue
Saint-Antoine, nº 102, et rue des Prêtres-Saint-Paul, nº 22), on arrive
après avoir fait quelques pas dans une cour spacieuse, et l’on voit une
belle maison bâtie (suivant toute apparence, par l’amiral de Graville)
sur l’emplacement de l’hôtel du Porc-Épic. On y remarque une charmante
tourelle, mais l’ensemble de cette élégante construction est défiguré
par l’adjonction d’une quantité de replâtrages modernes. L’hôtel
d’Aubriot, auquel succéda celui-ci, occupoit tout le coin de la rue des
Prêtres Saint-Paul (depuis une poterne ouverte dans les vieux murs) et
de la rue Percée, à peu près jusqu’à l’emplacement actuel du nº 8 de
cette rue, où devoit finir la censive de Tiron (en 1418, jusqu’à l’hôtel
de Galeran de Montigny, chevalier, de la maison du duc de Berry,
massacré lors de l’entrée des Bourguignons). Son jardin, compris
aujourd’hui en partie dans le collége Charlemagne (d’abord maison
professe des jésuites), s’étendoit jusqu’aux anciens murs et les suivoit
jusqu’à la rue Saint-Antoine, à la hauteur environ de la rue Culture
Sainte-Catherine.

[1286] C’est sans doute le nom d’un bourgeois de Paris, mais je ne
connois rien sur ce nom.

[1287] Var. B, _sont_.

[1288] Dans le cas où les oiseaux ne couvent pas, comme cela étoit pour
les volières du Roi et d’Aubriot.

[1289] Nourris.

[1290] Au moins de l’eau trop rarement renouvellée.

[1291] Dans le cas où les oiseaux couvent, etc., comme cela avoit lieu
dans la volière de Charlot.

[1292] Var. A et B ajoutent ici _par le pié_, qui est une répétition.

[1293] Tourterelles ou grives (_turdus_).

[1294] Var. B, _chardonnereulx_.

[1295] Ce mot nécessaire au sens n’est que dans le manuscrit C.

[1296] Var. A, C, _tendres_.

[1297] Sans doute: _gratteroit_. Var. B, mauvaise et résultant d’une
correction: _laisseroit_.

[1298] Je pense que ce mot doit signifier ici bouché, fermé (_arcile_,
diminutif d’_arca_, signifie un coffret, voy. Du Cange), et seroit mieux
écrit _arcilié_ qu’ar_s_ilié, ce qui sembleroit le faire dériver
d’_arsé_, brûlé.

[1299] Le pot sans couvercle.

[1300] Mettez vos dents.

[1301] Var. A, _à loges_; B, _alloges_. Il s’agit ici d’horloges à
sablier, sans doute les seules que les particuliers pussent alors se
procurer. Toutefois, on connoissoit les horloges à rouages avant
l’époque où le _Ménagier_ a été écrit.

[1302] L’usage d’empoisonner les flèches remonte aux Gaulois. Il en est
parlé dans Pline et dans Aulugelle. Les Gaulois employoient à cet usage
une plante dite _limeum_, autrement _thora_, que Linnée dit être la
dixième espèce de renoncule (_ranunculus thora_) et aussi de l’ellébore.
(Voy. la Bibl. des Théreuticographes, 1763, p. 168.) Les auteurs du
dictionnaire de Trévoux disent qu’on se servoit encore, de leur temps,
du _thora_, dans les Alpes, pour empoisonner les flèches.--On ne trouve
de recettes semblables ni dans le _Modus_ ni dans _Phébus_; c’est une
recette à l’usage des gens chassant _pour la cuisine_, pour le profit,
et dénués d’équipages suffisans.

La fleur du _thora_ est jaune, ce n’est donc pas de cette plante qu’il
s’agit ici; mais ce peut être l’_aconitum napellus_, qui a la fleur d’un
beau bleu. Quant à l’_ectoire de canarade_, cité p. 63 de ce volume, M.
Adolphe Brongniart, mon cousin, pense que c’est l’_actea_ ou l’ellébore
noire (vulgairement _Rose de Noël_, parce qu’elle fleurit à cette
époque) qui a la fleur blanche et croît dans le midi de l’Europe, ou
plutôt l’_actea spicata_, plus commune dans toute l’Europe, désignée
aussi quelquefois sous le nom d’_ellébore noire_, et qui a de petites
fleurs blanches. La racine de ces deux plantes est un poison violent;
elle est de couleur noire.--Au reste, si les propriétés de ces plantes
conviennent aux _ectoires_ ou _électoires_ (plantes à faire des
électuaires?) dont parle l’auteur, il n’en est pas de même de leur nom,
ce qui doit laisser des doutes sur leur identité avec celles citées dans
le _Ménagier_.

[1303] Tirer à l’arc.

[1304] Les deux barbes ou arêtes du fer qui empêchent la flèche de
sortir de la plaie.

[1305] Dans le cuir.

[1306] Var. B. _bestic_.

[1307] Vérat, porc non coupé.

[1308] Saison de chasser le sanglier qui succédoit aux _cervaisons_,
c’est-à-dire qu’elle commençoit après le milieu de septembre et
finissoit vers le printemps.

[1309] Passer au feu.

[1310] Var. A et C, _de navets, de chastaignes à la venaison_.

[1311] Je pense que ces mots sont le commencement d’une troisième
recette, _pour faire d’un ver bon sanglier_. J’avois d’abord cru qu’il
falloit mettre un point après _chastaingnes_, et comprendre que la
venaison véritable s’accommodoit de la même manière, mais alors le 3º
n’a plus de sens. Avec la ponctuation que j’ai adoptée, venaison
signifieroit ici la chair du prétendu sanglier.

[1312] Son.

[1313] Var. B, _limegnon_; C, _lumignon_. Voy. p. 56, note 1.

[1314] Le Ms. B ajoute ici _foulé_ qui est mauvais, la mère goutte étant
ce qui sort de la cuve avant que le raisin soit foulé. C’est le jus des
raisins les plus mûrs qui s’écrasent en tombant dans la cuve.

[1315] Il semble qu’il faudroit, au contraire, faire réduire plus le vin
quand le raisin n’est pas bien mûr. Peut-être faut-il comprendre qu’on
le fait revenir ou réduire d’_un tiers_ au lieu de _au tiers_, et d’_un
quart_ au lieu de _au quart_.

[1316] Si vous les achetez toutes cuites.

[1317] Répétition du § 2 de la p. 149.

[1318] Échauffent; c’est aussi le sens de ce mot, p. 152, ce qui ne
contredit pas l’explication donnée en cet endroit du but de la recette.

[1319] Râpe?

[1320] Cette recette et la suivante sont dans le Taillevent manuscrit
avec peu de différences.

[1321] Marquer.

[1322] Le mot _arramentum_ a dans la basse latinité plusieurs
significations (_airain_, _arrangement_), mais dont aucune ne me paroît
convenir au sens de cette phrase.

[1323] Ainsi le linge se marquoit alors à l’aide d’une griffe ou d’un
sceau.

[1324] Matière inflammable sous les étincelles du briquet. Voy. p. 42 et
Du Cange, au mot _Esca_.

[1325] Écorce ou peut-être les fleurs du noyer. On ne voit pas pourquoi
l’auteur ayant mis l’_écume_ au singulier, dit ensuite _qui sont
surannées_ au pluriel. J’avois pensé que _noyer_ étoit une faute pour
_noix_ et qu’il s’agissoit là de brou de noix; mais le brou de noix ne
me paroît pas pouvoir se détacher entier, et il me semble difficile
qu’on puisse le couper par _pièces de la largeur de deux_ doigts.

[1326] Var. A, C, _les_.

[1327] Mélange épais d’eau et de cendre qui reste au fond du cuvier
quand on a coulé la lessive.

[1328] Égouttes, presses.

[1329] Éponge.

[1330] Oiseau de rivière.

[1331] Var. B, _i_ (_id est_); le cimier est la croupe du cerf. Voy. p.
129.

[1332] Ce mot et les huit précédens ne sont que dans le manuscrit B.

[1333] C’est beaucoup mieux que _noix de galles_ comme on l’a dit
depuis, puisque les galles ne sont pas un fruit mais une excroissance du
chêne.

[1334] Le Ms. C ajoute _arrabic_.

[1335] Tranquille, stagnante, _quieta_.

[1336] Ce seroit les premières côtes, les plus proches des hanches, si
l’explication que j’ai donnée du filet ou nomblet est bonne.

[1337] On ne trouve dans Belon ni la _bourbotte_ ni le _chavessot_;
seulement cet auteur dit que la lote étoit dite barbotte à Paris. Mais
il ne peut être question ici de la lote qui n’a pas d’écailles et ne
pouvoit, par conséquent, se peler comme la perche.

[1338] Corneilles.

[1339] Plutôt choucas (corneille à dos gris) que chouette.

[1340] Trait d’arbalète.

[1341] Var. (que je crois mauvaise) des Mss. A et B, _ont_.

[1342] Traits d’arbalète non aigus, avec lesquels on tiroit aux oiseaux.
Voy. une citation de Wats dans Du Cange, au mot _Pilatus_.

[1343] Var. B, _cornillaux_.

[1344] Brouillards, temps humides.

[1345] Voy. p. 166.

[1346] Voy. p. 186, § 2.

[1347] Voy. p. 213.

[1348] Non pas, pas même. Ce passage est un de ceux qui établissent la
position que l’auteur occupoit dans la société.

[1349] Ce mot est fautif.

[1350] _Debent._

[1351] Prenez des amandes nouvelles et ôtez adroitement, au couteau,
leur première écorce. Ensuite percez chaque amande d’un trou au milieu.
Ce fait, lesdites amandes soient mises en eau douce et y restent cinq ou
six jours, mais que l’eau soit changée une fois chaque jour. Ensuite,
après cinq ou six jours, lesdites amandes soient tirées de l’eau et
posées sur une (nappe?), où elles restent un jour naturel pour sécher et
ôter l’humidité de l’eau. Ayez ensuite une quantité suffisante
d’excellent miel, proportionnellement à celle desdites amandes;
faites-le bouillir et cuire bien et suffisamment, et l’écumez, et, quant
il sera cuit et réfroidi, mettez dans le trou de chaque amande un clou
de girofle, et ayant replacé toutes les amandes dans un bon vase de
terre, mettez dessus (_item_, pour confire des noix; mais elles doivent
rester neuf jours dans de l’eau renouvelée chaque jour) ledit miel bien
cuit et en quantité suffisante pour couvrir entièrement les amandes qui
pourront être mangées après deux mois.

[1352] Sans être mis dans l’eau chaude.

[1353] Vidés.

[1354] Ce sont évidemment des petites hardes de lard.

[1355] En grain.

[1356] Pétrir.

[1357] Pilon.

[1358] C’est ici que se terminent les deux manuscrits les plus anciens
(A et B) du _Ménagier de Paris_. Cependant mon manuscrit (C) ajoute
encore quelques recettes qui sont tellement analogues à celles qui
précèdent, que je crois devoir les donner comme appendice. Elles
paroissent avoir été écrites peu de temps après le corps du texte; elles
sont dans le dialecte picard ou flamand, et ont évidemment été
recueillies dans la maison de Madame de Roubais (Marguerite de
Ghistelle). Voy. l’Introduction.

[1359] Battu, écrasé.

[1360] Sucre.

[1361] Une chausse.

[1362] Melons. Je ne sais ce que peut signifier _caordes_, peut-être
est-ce _gourdes_, sorte de courge.

[1363] Empans.

[1364] D’un coup, à la fois.

[1365] Rangs.

[1366] Place.

[1367] Ce.

[1368] Jardiniers de Portugal. Il y avoit des Portugais à la cour de
Bourgogne. Vasque Made de Villelobe, Portugais, traducteur du _Triomphe
des Dames_ (imprimé à Paris, chez Pierre Sergent, in-4º, gothique),
étoit écuyer d’écurie du duc de Bourgogne.

[1369] Déface? arrache.

[1370] Répétition presque textuelle, mais fautive, des §§ 4, 5, 6, 7, 8
de la page 275 ci-après.

[1371] Sucre rosat.

[1372] _Et_ [Illustration: un symbol].

[1373] Qu’il file entre deux doigts, si on en prend une goutte.

[1374] Avant qu’on mette bouillir.

[1375] Œuf.

[1376] Laisser rasseoir en eau.

[1377] De la fleur.

[1378] Aussi.

[1379] Esteuf, balle.

[1380] Épande, répande?

[1381] Démené, remué?

[1382] Sucre fondu en eau-rose.

[1383] _Hulle_ signifie en allemand enveloppe. Est-ce ici la gaine d’un
couteau?

[1384] Rayez.

[1385] Une règle?

[1386] Doigts.

[1387] _Rostez-le._ Otez-le hors du bassin?

[1388] Encre.

[1389] Eau de pluie.

[1390] Couperose.

[1391] Et un scrupule?

[1392] La moitié du temps nécessaire pour dire les sept psaumes de la
pénitence, comme nous avons vu dans le _Ménagier_, un _Pater_, un
_Miserere_, etc.

[1393] Les matières qui ont servi à faire l’encre, le marc.

[1394] Poivre.

[1395] Clous de girofle.

[1396] Menues-épices (_species_), moins (que de cannelle et gingembre).

[1397] Teille, vase de terre. Suppl. _avec_.

[1398] Vos poussins ou perdrix.

[1399] Voy. p. 95.

[1400] Tournesol. Voy. p. 220.

[1401] Pêcher. Mettez assez de tournesol pour lui donner la couleur de
fleur de pêcher.

[1402] Œufs.

[1403] Feu.

[1404] Brûle.

[1405] Il semble qu’il faudroit _ou_ puisque ce plat se faisoit avec du
poisson, ou avec des œufs à défaut de poisson.

[1406] Œufs?

[1407] Pochés?

[1408] Hachez.

[1409] Sécher.

[1410] Le seul que contiennent les manuscrits. Voir l’Introduction et T.
I, p. 7, note 1; voir aussi T. II, p. 79, n. 1.

[1411] Augmente sa maison, son train, plutôt que _fatigue_, _use_. Gaces
de La Bugne borne le train de l’épreveteur à quatre chiens et deux
chevaux (Ed. Verard, X 5).

[1412] Cette manière de voler semble bien devoir être celle que
d’Arcussia (Ve partie, ch. XVI, et Confér. 30) appelle voler à _la
toise_ (et aussi Sainte-Aulaire, p. 103) ou _source_, à _lève-cul_ ou à
_la couverte_. C’est quand on lâchoit l’oiseau de poing tout près de sa
proie, au moment où elle s’enlevoit, et qu’il l’empiétoit avant qu’elle
eût eu le temps de se mettre en aile. Les oiseaux de poing prenoient
presque toujours leur gibier de cette manière, soit à son premier
départ, soit _à la remise_, c’est-à-dire au second vol. Dans ce dernier
cas ils attendoient souvent sur un arbre ou sur une haie que les chiens
fissent repartir l’oiseau chassé. Huber, dans ses _Observations sur le
vol des oiseaux de proie_ (1784, in-4º, p. 36), a très-bien expliqué
cette manière de voler qu’il appelle _le saut_ et qui est propre aux
oiseaux de poing. Il dit que le saut résulte d’un élancement qui part de
la plante des pieds puis d’une forte et brusque contraction des ailes.
Il distingue le saut montant, le saut de niveau (tous deux ne portent
que 6 ou 7 toises) et le saut plongeant, qui est le plus puissant.

[1413] Jaillir, s’élancer. Je ne sais si ce mot s’applique ici à
l’épervier ou au brusque départ de l’oiseau chassé. C’est presque la
même expression que celle de _vol à la source_ employée par d’Arcussia:
Le Ms. A porte _fouldre_, mot qui ne seroit pas ici sans signification,
car Huber dit que le départ _au saut_ est aussi prompt que _l’éclair_.

[1414] Éducation, de _duire_, dresser.

[1415] Var. A, _espaingnos_. Chiens d’Espagne dits aujourd’hui
_épagneuls_.

[1416] A côté.

[1417] Il faudroit _l’en_.

[1418] Lier, en terme de fauconnerie, c’est quand l’oiseau a enserré sa
proie. D’Arcussia veut qu’on réserve ce mot pour les oiseaux de leurre
et qu’on dise _empiéter_ pour ceux de poing (p. 177).

[1419] Qui s’éloignent trop.

[1420] Cri, appel.

[1421] Lassé, vaincu.

[1422] Se précipiter avec entraînement, fondre, d’_immittere_.

[1423] Poêle, poêlon.

[1424] Var. A, _abéent_.

[1425] Réclamer l’oiseau c’est le faire revenir sur son poing. On a dit
quelquefois par extension un oiseau _réclamé_ pour un oiseau _dressé_.
Les oiseaux de leurre étoient rappelés à l’aide du leurre: aussi
disoit-on pour eux _leurrer_ et non _réclamer_.

[1426] Var. A, _déchairent_.

[1427] Var. A, _d’espreviers_.

[1428] _Que_ est de trop à moins qu’il ne manque la fin de la phrase
comme: _ne l’ait découvert_.

[1429] Il faudroit: _qu’il_.

[1430] C’est le mâle de l’épervier, beaucoup plus petit que la femelle,
et que l’on employoit beaucoup moins. Gaces de La Bugne dit qu’il
servoit aux apprentis fauconniers à faire leur éducation (Ed. Vérard, L
v).

[1431] Enfoncement, creux, de _claustrum_. Var. B, _crotet_, petite
grotte, trou, de _crypta_.

[1432] Fienter.

[1433] Mince, délicat.

[1434] Filet.

[1435] Surtout.

[1436] Digéré.

[1437] Pour qui.

[1438] Var. A, _fielet_.

[1439] Repas. Sous-entendez _de ce filet de porc_.

[1440] Var. B, _certainement_.

[1441] Sainte-Aulaire dit la même chose (p. 45); il ajoute que ces
_fautes_ ou _marques_ placées en travers des plumes les font rompre
facilement aux premiers efforts de l’oiseau.

[1442] Tirant sur le rond, un peu rond.

[1443] Ces trois mots interrompent le sens et seroient mieux placés
avant _tenir nettement_.

[1444] Var. B, _le pennier_.

[1445] L’auteur entend par ce mot une cage ou caisse de bois dont il
nous donne ci-après les dimensions. Le même mot a été employé par
d’Arcussia, mais sans explication, et par Sainte-Aulaire (p. 180 à 186)
qui paroit en faire un terme général pour désigner un lieu fermé comme
une chambre, etc., et semble dire indifféremment: mettre les oiseaux à
la ferme ou à la mue.

[1446] Treillage, grillage.

[1447] Prendre de la force.

[1448] Se soulèvera.

[1449] Jointures, jarrets.

[1450] Se tiendra debout.

[1451] Large.

[1452] Il y a, il est.

[1453] Billot de bois sur lequel on plaçoit l’oiseau. Sainte-Aulaire dit
qu’il doit avoir deux pieds de haut. Il est vrai qu’il parle de celui à
l’usage des oiseaux parvenus à leur taille (p. 66 et 106). L’empereur
Frédéric II conseille de le faire en forme de cône renversé et ferré, de
manière qu’on puisse l’enfoncer facilement en terre. Il l’appelle
_sedile_. Il dit que le faucon cillé est mieux sur le bloc que sur la
perche, et qu’on ne doit mettre sur le bloc qu’un seul faucon (voy. ch.
L et LI du second livre).

[1454] Phrase qui paroît défectueuse.

[1455] Repu.

[1456] Var. A, _merts_. Je crois que ce sont ces barres ou marques
noires qui traversent les plumes de la queue de l’épervier
(Sainte-Aulaire, p. 25), et dont il est aussi parlé sons le nom de _mers
de la queue_ dans le Modus (feuillet 77 vº). L’auteur veut donc dire ici
qu’il faut pour mettre les jets à l’oiseau, attendre qu’il soit parvenu
au moment de sa croissance où sa queue est assez longue pour qu’on y
voie déjà deux barres noires. Voir ci-après p. 291.

[1457] Petites lanières de cuir qui s’attachoient aux jambes de l’oiseau
et auxquelles on ajoutoit les vervelles, et quand l’oiseau étoit sur la
perche, la longe et le touret.

[1458] Quand après s’être débattu, jeté en avant de sa perche il y est
retenu et rappelé par sa longe.

[1459] Queue des oiseaux de poing. Le mot de queue étoit réservé aux
oiseaux de leurre.

[1460] Var. A, C, _sur luy surviennent_.

[1461] Impétueusement, de _tempête_.

[1462] Depuis _esteuf_, balle de jeu de paume.

[1463] Suppléez _non_.

[1464] Suppléez _a_.

[1465] Si en se débattant il tomboit de la perche et y restoit suspendu
par sa longe.

[1466] Ce passage confirme l’explication donnée précédemment, mais je
n’ai rien trouvé dans les auteurs qui puisse déterminer où sont placés
les sept _merqs_ dont parle l’auteur. Je vois sur un épervier qui est
sous mes yeux 1º 4 barres (ou _merqs_) noires (dont une un peu cachée
par les petites plumes du croupion) _sur_ le balai, 2º 4 id. en dessous;
et enfin 6, mais assez mal marquées sur le dessous des grandes plumes de
l’aile. Mais on sait combien l’âge change le plumage des oiseaux de
proîe, et j’ignore si l’oiseau que j’ai sous les yeux cet un _niais_ ou
un _mué_.

[1467] Graisser, mouiller de sa salive.

[1468] La seconde secousse, le second effort de l’oiseau. Voir
d’Arcussia, Ve partie, ch. IX.

[1469] Var. B, _espoventablement_.

[1470] Paresse.

[1471] Var. A, C, _bas_.

[1472] Espaces laissés vides dans les manuscrits. Peut-être y avoit-il
_marqué à travers de petits cœurs brun tendres ou roux_. La différence
avec l’autre genre de plumage dont il va être parlé auroit donc consisté
dans la dimension et la disposition des marques en forme de cœur;
l’auteur du Modus dit également: _Les uns sont de menues plumes
traversaines et blanches; autres sont de grosses plumes traversaines et
grosses nouées; autres sont de plumes que nous appelons mauvisées_ (mal
disposées, mal semées).

[1473] Semés.

[1474] Var. A, _boueil_. C’est le brayer, le bas-ventre, dit _brayeul_
dans le roi Modus.

[1475] Le manuscrit B ajoute ·_S_· (_scilicet?_).

[1476] _L’espervier a communément l’estomac blanc émaillé de marques
noires faites la plupart en cœur. Le dessus noir ou gris fort obscur
èsquelles y a certaines mailles ou plumes blanchâtres sur les reins_
(Sainte-Aulaire, p. 25). L’auteur a fait le mot _cueureté_ pour dire
semé de cœurs, comme on dit _fleur-de-lise_, _étoilé_, etc.

[1477] En changeant d’ordre, muablement.

[1478] Charrient au couvert, dans un buisson, etc., pour s’en paître,
l’oiseau qu’ils ont pris.

[1479] Je crois que c’est l’oiseau dont les ailes sont bien disposées;
bien jointes au corps et croisant bien sur la queue.

[1480] Voy. sur les vanneaux, couteaux et cerceaux, la note 6 de la page
89.

[1481] Espace laissé vide dans les manuscrits. _Sans_ doit être
défectueux ainsi que _a_: le balay signifiant la queue. L’auteur a dû
écrire quelque chose comme _bonnes pennes, puissans balay et sain_, etc.

[1482] Var. B, _paissonoir_. Ces différens noms des ongles de l’épervier
ne sont à ma connoissance donnés qu’ici. D’Arcussia les désigne
simplement sous la dénomination de premier, second, et troisième, en
commençant par celui du premier doigt de devant: celui de derrière
auroit été dit _avillon_. Ici les _sangles_ pourroient être les serres
du grand doigt du milieu et du doigt de derrière: le _paissoir_, l’ongle
du pouce, et le _charnier_ celui du quatrième doigt.

[1483] Qu’il.

[1484] Instrument de cuivre, quelquefois d’argent, destiné à empêcher la
longe de s’embarrasser. Ce sont deux demi-anneaux en forme d’étriers
réunis par une goupille qui traverse les deux côtés plats, lesquels
tournent l’un sur l’autre. D’Arcussia l’appelle _tournet_ (131), et
l’empereur Frédéric II _tornetum_ (II, 40). Il est représenté dans les
planches de _l’Encyclopédie_ (XII, fig. 2). C’est certainement au touret
qu’est relatif le passage cité dans Du Cange à _Coretum_, et il faut
sans doute y lire _Toretum_.

[1485] Bleu.

[1486] Plus loin _recréance_, filière, longue ficelle attachée aux
longes.

[1487] Aux plaidoiries, au palais.

[1488] Gaces de La Bugne conseille également de porter l’épervier

    Là ou les gens sont amassés,
    Soit en l’église ou autre part.
         (S v, vº, c. 1.)

On voit, d’après ces deux témoignages, qu’il étoit permis à tous les
laïques d’entrer dans l’église avec un oiseau sur le poing. Il en
résulte donc que quand on a remarqué que les barons de La
Ferté-Chauderon et les seigneurs de Chastellux entroient dans le chœur
des églises cathédrales de Nevers et d’Auxerre en costume moitié
militaire, moitié ecclésiastique, et avec un oiseau sur le poing, ce
fait n’étoit (au moins _au commencement du_ XVe _siècle_) une
particularité qu’à cause de leur costume, de la qualité de chanoines
héréditaires de ces églises possédée par ces seigneurs, et peut-être
aussi à cause de la place qu’ils occupoient dans le chœur par suite de
leur dignité. (Voy. à ce sujet les _Mercures_ de juin 1732, p. 1248, de
mars et d’avril 1733, p. 472 et 730, et l’_Histoire d’Auxerre_ de
Lebeuf, T. I, p. 809.) On voit encore, dans une pièce de 1464 citée par
l’abbé Lebeuf (T. II, pièce 241), que les trésoriers des églises
d’Auxerre et de Nevers avoient le droit d’assister aux offices en habit
non ecclésiastique et avec un épervier sur le poing; mais ce droit étoit
dès lors contesté ou au moins remarqué. Il faut donc en conclure ou que
l’usage avoit dès lors changé, ou qu’il étoit borné aux laïques.

[1489] Petits ais, petites planches, lattes.

[1490] On appeloit _plume_, et plus souvent depuis _cure_, une petite
boulette de filasse, de coton, ou de plumes qu’on faisoit avaler à
l’oiseau pour faire passer les parties grossières de sa nourriture qui
seroient restées dans son estomac.

[1491] Probablement les filamens ou nerfs de cette poche que d’Arcussia
appelle la gorge ou sachet supérieur. C’est la partie qui suit
immédiatement le gosier, et qu’on dit vulgairement _la gave_. Voir
d’Arcussia, chap. 1 de la IVe partie, p. 233.

[1492] _L’en_ n’est que dans le Ms. C.

[1493] Préau.

[1494] Aille.

[1495] Sécher.

[1496] Faire jaillir, mais j’ignore la racine de ce mot. Var. B,
_ressortir_.

[1497] Baguette.

[1498] Tréteau.

[1499] Savoir: _utrum_.

[1500] Retiré, accroupi. Voy. p. 20.

[1501] Sup.: _avancez_. V. p. 394.

[1502] Moucheté, de _varius_, comme la fourrure de _vair_ et le _vairé_
du blason.

[1503] Tachetés.

[1504] Jeunes pies.

[1505] Tenailles.

[1506] Peut-être faute, pour _moine_.

[1507] Véritablement, sérieusement.--Var. A, _ensient_.

[1508] Dans le lieu de sa demeure?

[1509] Sans cette précaution.

[1510] L’auteur ne donnoit donc pas tout à fait dans l’opinion erronée,
et cependant générale, suivant laquelle la queue (ou balai, voy. p. 290,
n. 3) servoit de gouvernail à l’oiseau. On a reconnu depuis qu’elle ne
lui sert qu’à monter et à descendre. Voy. Huber, _Observ. sur le vol des
oiseaux de proie_, p. 13.

[1511] Se détourne, fait des crochets.

[1512] Ciseaux.

[1513] Quand elle part. Voy. p. 280, n. 3.

[1514] Entièrement, vraiment _blanches_, comme l’émeut _fin blanc_
ci-dessus, p. 298.

[1515] C’est le moineau suivant Nicot.

[1516] Répétition avec variantes du § 1, p. 300.

[1517] Ce paragraphe, qui paroît hors de propos au milieu des
instructions relatives aux premiers vols de l’épervier, est en outre une
répétition, mais non textuelle, de ce qu’on a déjà vu page 290.

[1518] Il paroît manquer ici _faire_.

[1519] Embrouillez (ses longes dans les branches du buisson où il aura
charrié sa proie).

[1520] Var. B, _pendre_.

[1521] Neuf heures. Voy. t. I, p. 48.

[1522] S. d. faute pour _buisson_.

[1523] A et C ajoutent _vous_.

[1524] Au soir.

[1525] Var. bonne du Ms. B, mais résultat d’une correction postérieure
au corps du texte: _s’essorera_. Au reste, _s’efforcer_ est bon, quoique
je ne l’aie pas vu employé par les autres auteurs dans le sens de
s’essorer, prendre, son _essor_, _s’emporter_.

[1526] Corps, carcasse. Voy. p. 170, n. 1, et p. 213.

[1527] S.-e. l’épervier.

[1528] S.-e. la chair du pigeon.

[1529] Dévider. Ce mot exprime très-bien l’action du chien qui suit une
trace.

[1530] Au lieu remarqué, où les autres perdrix se sont remisées.

[1531] Var. A, _gauchières_.

[1532] Oiseau de proie ignoble (non susceptible d’être dressé), grand
destructeur de perdrix, classé par Huber (p. 16) dans la classe des
harpayes, avec la _Soubuse_, le _Jean-le-Blanc_ et l’_oiseau
Saint-Martin_. Huber semble croire que ces quatre noms désignent le même
oiseau (peut-être à différens âges). G. Bouchet (_Recueil des oiseaux de
proie_) a consacré au _faux-perdrieu_ un article étendu, et on voit dans
d’Arcussia (_Fauconnerie du Roi_, p. 399) que Louis XIII voloit cet
oiseau avec des faucons dressés à voler la corneille.

[1533] Pièces de terre cultivées en pois. _Pisaria._

[1534] _Qui_ ou _et_ sont de trop. Si l’on supprime _et_, il faudroit
une virgule après _remerquent_.

[1535] Au saut. Voy. p. 280.

[1536] Voy. p. 304.

[1537] B ajoute _premier_, qui me paroît inutile et peut être une
correction de _se l’épervier_, qui est dans le Ms. A et est tout à fait
fautif.

[1538] S’accouplèrent. D’Arcussia (1627, p. 209, 220) emploie le même
mot, et dit aussi _le temps de l’adouée_; c’est pourquoi j’aime mieux
lire _adouèrent_ qu’_adonnèrent_, comme l’écrit le Ms. B (_adoñerent_).

[1539] Pour _cochier_ je lis: cochier, cocher.

[1540] En état, à leur taille.

[1541] Tuyaux des plumes pleins de sang comme les jeunes oiseaux.

[1542] Le Ms. B seul ajoute: _et ne sont pas les plumes de leurs eles si
roides comme leurs pères et leurs mères qui ont esté muées_. Ces mots
paroissent être une bonne variante et non la suite du membre de phrase
précédent.

[1543] Il semble qu’il faudroit lire _et_, de manière à restreindre la
possibilité de prendre, même au _voulon_, la perdrix ainsi forte, au cas
où elle est déjà lassée d’un premier vol. Mais on peut aussi comprendre
que l’auteur, en défendant plus bas d’essayer de la prendre, en plein
champ, du premier vol, a seulement entendu défendre de la faire voler _à
tire-d’aile_ (en _tirant après_) par l’épervier. Cette manière de voler
(mouvement répété des ailes) est employée par l’oiseau de poing en ligne
horizontale ou de haut en bas. Dans le premier cas, il n’entreprend
ainsi que le gibier le plus faible, et cette attaque lui réussit bien
moins que le _saut_ (ou _voulon_), qui est son plus grand moyen. (Voy.
Huber, p. 37.)

[1544] Gaces de La Bugne dit aussi (X v) que l’épervier peut prendre le
faisan; mais au XVIIe siècle qu’on peut cependant regarder comme celui
où la fauconnerie atteignit sa plus grande perfection, en France, on ne
faisoit plus voler l’épervier aux faisandeaux: c’est du moins ce qui me
semble résulter d’un passage de d’Arcussia (Ve partie, chap. XXV), dans
lequel il remarque, comme une chose notable, que cette chasse avoit lieu
en Lombardie, où, dit-il, les éperviers sont en plus de réputation qu’en
autre pays.

Quant au vol de l’outarde par l’épervier, il est plus étonnant, et on
seroit tenté de penser ou qu’il y a erreur dans le nom de l’oiseau
chassé ou que l’auteur a entendu parler ici de la chasse de l’outarde
faite avec l’autour, oiseau tout à fait semblable de conformation (sauf
la grosseur), de mœurs et de vol à l’épervier, puisque tous les auteurs
les confondent dans les préceptes qu’ils donnent sur la manière de les
dresser. L’autour, beaucoup plus fort que l’épervier, prenoit l’outarde
ou du moins la retenoit jusqu’à ce que les chiens vinssent le secourir
et la tuer; mais ce fait même étoit regardé avec raison comme
surprenant, attendu la faiblesse relative de l’autour (Voy. Gaces de La
Bugne, f. X 2 vº), et le récit d’une chasse à l’outarde faite par un
faucon sauvage dans d’Arcussia (_Fauconnerie_, p. 227 et aussi là même
_Convy_, p. 52). L’épervier qui est un assez petit oiseau, pouvoit-il
donc égaler l’autour et le faucon dans cette chasse? La même réflexion
se présente à l’esprit pour le vol aux lapereaux et aux levrauts, que je
n’ai vu indiqué dans aucun autre auteur. Remarquons toutefois qu’il y
avoit, suivant d’Arcussia, une espèce d’éperviers venant d’Esclavonie,
et tellement courageux qu’ils entreprenoient _tout ce qu’on leur
montroit_.

[1545] Auj. de genêt.

[1546] Monter à une hauteur telle qu’il perde son maître.

[1547] Var. B, _toutesvoies_.

[1548] Peut-être la marouette.

[1549] Geais.

[1550] Ou _bougon_, flèche à grosse tête, à bout obtus, _sagitta
capitata_, suivant Nicot.

[1551] Afin que.

[1552] Var. A, _tirer_.

[1553] D’Arcussia (Ve partie,, ch. XXV) dit la même chose; seulement il
est question, dans son livre, d’un arc à jalet (arbalète lançant des
balles de plomb) et non d’un arc.

[1554] Avant qu’il ait eu le temps de chasser et de se paître.

[1555] Le garder pendant le temps qu’il est en mue.

[1556] B ajoute: _laquelle plume_.

[1557] Pour le garantir, l’empêcher de se débattre.

[1558] Espace laissé en blanc dans les trois manuscrits: peut-être
est-ce le croupion ou le _brayer_ (ventre), afin d’attendrir la peau où
tiennent les plumes de la queue.

[1559] Gouttière, petit canal (mangeoire avec coulisse dessous).

[1560] Voy. p. 297.

[1561] L’empêcher de dormir.

[1562] L’abaisser, le dompter en le nourrissant peu.

[1563] Muées.

[1564] Les autres auteurs distinguent le _branchier_ du _ramage_. Ce
dernier nom désignoit l’oiseau qui avoit été assez longtemps libre et
vivant de sa chasse: il tenoit le milieu entre le _branchier_ et le
_sor_.

[1565] S.-e. _avant_. C’est seulement quand il sera assez âgé pour avoir
déjà pris des oiseaux qu’il descendra à la _meute des pans_. On appeloit
meute un bâton fourchu auquel étoit attaché un oiseau vivant que
l’oiseleur faisoit remuer pour attirer dans les _pans_, dans les filets,
celui ou ceux qu’il désiroit prendre. (Voy. _Modus_, f. 127.) Plus tard
on appela ainsi l’oiseau attaché au piquet fourchu (_Ruses innocentes_,
1695, in-8, p. 144). Le filet dont il est ici question est certainement
le _rets-saillant_ ou _nappe_.

[1566] _Giesles_, dans le Modus, et plus tard _guide_ ou _guede_. Ce
sont les bâtons qui terminent les pans du rets-saillant et auxquels
s’attachent les cordes qui fixent les extrémités des pans à des piquets
enfoncés en terre. La corde que tire l’oiseleur pour faire rabattre les
pans est aussi attachée aux deux _guilles_ placées de son côté. (Voir le
_Modus_ de 1839, f. 126. Les cages représentées dans la figure indiquent
bien l’endroit où devoient être placés les mouchets dont parle l’auteur
du _Ménagier_.)

[1567] Les manuscrits ajoutent: _comment qu’il soit_. Ces mots me
paroissent une répétition fautive des trois précédens.

[1568] Passer un fil dans la première paupière des deux yeux de
l’oiseau, puis réunir et tordre les deux bouts du fil sur son bec.
L’épervier devait être cillé de manière à voir un peu derrière lui. On
obtenoit ce résultat en lui perçant la paupière plus près du bec que du
milieu de l’œil. (Voy. _Modus_, f. 96, vº.)

[1569] Grelots attachés aux jambes de l’oiseau.

[1570] Peut-être faut-il lire _aasier_.

[1571] On verra ci-après l’explication de ce terme. C’est sans doute ce
que l’auteur du _Roi Modus_ appelle _mué du bois_ (f. 95, vº).

[1572] Var. B, _affaitiés_.

[1573] Il ne revient pas si facilement à son maître.

[1574] L’oiseau de proie _sor_ est celui qui a atteint sa taille, mais
n’a pas encore mué. Son nom lui vient de la couleur jaunâtre (ou
_sorette_, comme dit Tardif, chap. XV) de ses plumes.

[1575] Pondu.

[1576] Les en a empêchés.

[1577] Le Ms. C ajoute: _bons espreveteurs_.

[1578] C. ajoute: _plumes et_.

[1579] V. p. 288, n. 3.

[1580] Les premiers, les meilleurs.

[1581] Var. B, _hault_.

[1582] D’Arcussia (p. 8 et 36) et Sainte-Aulaire (p. 12) disent aussi
que le faucon _hagart_ (on mué des champs) est celui qui a déjà mué une
fois. D’Arcussia fait dériver ce nom du mot hébreu _agar_, signifiant
étranger. Il semble qu’il doit plutôt signifier _égaré_, _sauvage_, à
moins qu’attendu l’explication qu’en donne ici notre auteur, on ne le
fasse venir de _haga_, haie.

[1583] Qu’il a deux ans.

[1584] Var. B, _sores_.--Les plumes qui sont restées de son premier
plumage, de son plumage sor.

[1585] Peut-être l’auteur veut-il dire que cet oiseau se laissoit
emporter par son ardeur et conduisoit le fauconnier à de trop grandes
distances; mais cet inconvénient étoit propre à tous les oiseaux de
haute volerie ou de leurre.

[1586] On appelle _formé_, par opposition à _tiercelet_ (plus petit d’un
tiers), la femelle des oiseaux de proie.

[1587] Leurre, instrument en osier en forme de fer à cheval allongé
qu’on recouvroit des ailes de l’oiseau ou de la peau du quadrupède
(lièvre ou lapin), qu’on vouloit accoutumer l’oiseau de proie à voler.
(Voy. les planches de l’_Encyclopédie_, pl. 12, fig. 4). On plaçoit la
viande destinée à la nourriture de l’oiseau sur le leurre, et il s’y
paissoit. Il en résultoit qu’il connoissoit le leurre et qu’il revenoit
à son maître dès que celui-ci l’appeloit en tournant cet instrument:
c’est ce qu’on appeloit _leurrer_. Les oiseaux, ainsi dressés (le
faucon, le gerfaut, le lanier, le sacre, le hobereau et l’émerillon
étoient seuls susceptibles d’être dressés au leurre), suivoient les
chiens pendant la quete en volant et fondoient sur leur proie aussitôt
qu’elle se levoit, à la différence des oiseaux de poing (autour et
épervier), qui restoient sur le poing de leur maître jusqu’à ce que les
chiens eussent fait lever le gibier. Les oiseaux de leurre ou de haute
volerie étoient en outre seuls propres à certains vols, tels que ceux du
héron, du milan, etc. Huber, dans son excellent ouvrage (malheureusement
trop abrégé et sorte de prospectus d’un autre plus étendu qu’il comptoit
composer) sur le vol des oiseaux de proie, a décrit d’une manière bien
remarquable les différens moyens employés par ces deux espèces d’oiseaux
en conséquence de la forme de leurs ailes, et partant de ce principe
fondamental que les anciens fauconniers n’ont pas connu, il appelle les
premiers _rameurs_ et les seconds _voiliers_. L’instruction de ces deux
espèces d’oiseaux devoit donc différer, et en effet celle des premiers
constituoit l’art de la fauconnerie et celle des autres l’autourserie;
les langues de ces deux arts, comme leurs principes eux-mêmes,
présentoient de notables différences qu’on peut voir dans d’Arcussia, p.
176, et dans _le Veritable Fauconnier_ de Morais, p. 9 et 115. Une des
principales étoit que les oiseaux de leurre étoient chaperonnés, tandis
que ceux de poing ne l’étoient pas. Ces derniers mangeoient sur le poing
de leurs maîtres, les premiers sur le leurre, etc.

[1588] Hobereau.

[1589] Plante bien connue, _ruta_.

[1590] Tirailler, déchirer avec son bec. On donnoit ainsi à _tirer_ aux
oiseaux des morceaux secs et nerveux, tels que pattes de lièvre ou de
lapin et de volailles qu’on appeloit alors _tiroirs_.

[1591] Étoffe ou fourrure. On se servoit ordinairement de peau de lièvre
pour cet usage.

[1592] Changer souvent l’étoffe ou feutre que l’oiseau a sous la patte
et la remplacer par une autre échauffée dans son sein.

[1593] La poitrine, le poitrail. Les oiseaux gras ont, en effet, la
poitrine bombée et séparée au milieu par une petite fente.

[1594] Nom d’un oiseau de proie ignoble (c’est-à-dire non susceptible
d’être dressé); mais je n’ai pas vu qu’on se soit servi de cet oiseau
comme du duc ou de la chouette pour attirer les oiseaux dans les filets;
peut-être est-ce aussi le nom d’un filet ou autre engin, mais je ne le
trouve nulle part avec cette signification.

[1595] Il y a eu quelques exemples d’aigles dressés pour la chasse, mais
on n’a jamais fait un emploi suivi de ces oiseaux. Gaces de La Bugne
parle d’une espèce d’aigle qu’il appelle _milion_ (qui paroît être
l’aigle fauve à marque blanche sur la tête), qui prenoit la grue et
l’oie sauvage (f. X vj). Il dit que cet oiseau étoit rare en France, et
le regardant comme une curiosité plutôt que comme un oiseau utile, il
s’écrie que _ne desplaise au milion. Il n’est vol ne mès de faulcon_ (L.
V). L’illustre connétable Olivier de Clisson avoit un _milion_ dressé
qu’il légua au vicomte de Rohan, son gendre. (Voyez le mot _Milio_ dans
Du Cange où ce mot est mal traduit par _milan_. Le milan n’a jamais pu
être dressé et n’a jamais été redoutable aux faucons comme le dit
l’empereur Frédéric II, l. II, ch. LXIX du _Milion_, associé par lui à
l’aigle et au vautour.) Tardif qui compila un _Traité de fauconnerie_ à
la fin du XVe siècle, s’est assez étendu sur le vol de l’aigle, mais on
ne sauroit conclure de son ouvrage purement théorique et traduit en
partie d’auteurs orientaux que l’aigle fût communément employé de son
temps en France par les fauconniers. Guillaume Bouchet, qui écrivoit en
1567, dit que le poids de l’aigle étoit cause que les fauconniers des
princes en dressoient rarement, et d’Arcussia (_Convy_, p. 28 et XVe
_lettre de Philoïerax_) raconte des essais faits de son temps pour
dresser des aigles. L’aigle n’a donc jamais été employé habituellement
dans la fauconnerie. Quant au _griffon_, ce mot désigne sans doute le
_gerfaut_, ainsi nommé dans Marc-Paule et le plus gros des oiseaux de
leurre; je serois au reste tenté de croire que l’auteur parle ici
d’après des récits exagérés ou fabuleux de chasses faites en pays
étrangers.

[1596] Tardif est le seul écrivain qui dise que l’autour vole le
chevreuil (_il fiert petit chevreul et l’empesche tant que les chiens le
prennent plus faciment_), et je crois qu’il y a tout lieu de douter que
cette chasse, qui s’est faite en Asie, ait jamais été pratiquée en
France.

[1597] Canards.

[1598] Il graisse ses plumes.

[1599] Petites branches d’arbre.

[1600] Comme on a fait d’abord pour les dresser ou comme ci-dessus p.
296.

[1601] Baisser, abaisser signifient _maigrir_. Voy. p. 322.

[1602] Baisser, abaisser signifient _maigrir_. Voy. p. 322.

[1603] Cette qualification n’est pas donnée au lanier par les anciens
fauconniers, et d’Arcussia nous apprend (_Conférence_, p. 7) que de son
temps le lanier étoit appelé, seulement en Italie, _faucon vilain_, par
opposition au _faucon gentil_. Au temps où Buffon écrivoit, on ne se
servoit plus en France ni de laniers ni de sacres, et il n’a pu décrire
ces deux espèces. Il est fâcheux qu’il n’ait pas consulté Sainte-Aulaire
et d’Arcussia qui donnent de grands détails sur ces oiseaux (p. 16, 20,
28, et d’A. 39, 48). Ces deux auteurs n’ont cependant pas su d’où le
sacre était originaire. Franchières a dit (Liv. I, VI) qu’il venoit de
Russie et de Tartarie, et Pedro Lopez de Ayala qui écrivoit à la fin du
XIVe siècle un savant traité de fauconnerie resté inédit, confirme à peu
près cette opinion, puisqu’il le dit originaire de Norwége. Il dit qu’il
y a aussi des sacres en Roménie. Notre auteur dit que cet oiseau est
originaire de Flandre, parce qu’il en voyoit sans doute apporter à Paris
par les marchands venant de ce pays. Ayala nous apprend que ces
marchands d’oiseaux parcouroient d’abord les cours d’Allemagne, puis
venoient à Bruges; de là à Paris, puis en Brabant; de Brabant en
Angleterre, et enfin en Espagne.

[1604] Les mailles (Voy. p. 293) dessinées sur son plumage sont larges.

[1605] C’est une erreur. Le sacre (comme le lanier et le gerfaut) a les
jambes et les pieds bleus.

[1606] C’est le faucon _tagarote_ des Espagnols (voy. d’Arcussia, p. 52)
que du Guesclin rapporta d’Espagne à Charles V, comme on le voit dans
Gaces de La Bugne (f. X iij). Cet auteur, ainsi qu’Ayala, le dit
originaire d’Afrique.

[1607] D’Arcussia s’est élevé le premier contre l’opinion suivant
laquelle les différens noms du faucon (_gentil_, _pèlerin_, _passager_,
etc.) constitueroient des espèces différentes. Il dit que le faucon
_gentil_ est celui qu’on prend du 15 juin au 15 septembre, le _pèlerin_
celui qui est pris du 15 septembre au mois de janvier, et que les
variétés remarquées dans leur plumage proviennent des différences d’âge,
de nourriture, etc. (Voy. p. 7 et 28.) Au reste notre auteur dit aussi
que le faucon pèlerin est le même que le faucon gentil.

[1608] Mais plutôt lanneret. C’est une répétition de ce que nous avons
vu ci-dessus, p. 318 et 319.

[1609] De suite.

[1610] Mauvaise mine.

[1611] Minéral qui se trouve dans les mines d’or et de cuivre et dont on
tire l’arsenic. Le meilleur est celui qui se lève par écailles ou
feuilles comme le talc. L’auteur veut parler de celui-là quand il dit
plus bas que la feuille est meilleure, car il ne me paroît pas qu’il
veuille désigner ici la plante dite _orpin_ ou _anacampseros_ vulgò
_faba crassa_, suivant Bauhin, et _telephium_ ou _crassula major_, dans
le dictionnaire de Nicot. L’auteur du _Roi Modus_ conseille de ne pas
employer l’orpiment, comme trop dangereux (f. 92).

[1612] Je n’ai noté que celles qui me paroissent certaines, mais il y a
bien d’autres passages qui peuvent avoir été ajoutés par l’auteur.





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