By Author | [ A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z | Other Symbols ] |
By Title | [ A B C D E F G H I J K L M N O P Q R S T U V W X Y Z | Other Symbols ] |
By Language |
Download this book: [ ASCII | HTML | PDF ] Look for this book on Amazon Tweet |
Title: Les femmes et les livres Author: Cim, Albert Language: French As this book started as an ASCII text book there are no pictures available. *** Start of this LibraryBlog Digital Book "Les femmes et les livres" *** Note sur la transcription: Les erreurs clairement introduites par le typographe ont été corrigées. L'orthographe d'origine a été conservée et n'a pas été harmonisée. LES FEMMES ET LES LIVRES OUVRAGES D'ALBERT CIM Romans et Nouvelles _Jeunesse_ 1 vol _Service de Nuit_ 1 -- _Les Prouesses d'une Fille_ 1 -- _Les Amours d'un Provincial_ 1 -- _La Petite Fée_ 1 -- _Un Coin de Province_ 1 -- _La Rue des Trois-Belles_ 1 -- _Bonne Amie_ 1 -- _Histoire d'un Baiser_ 1 -- _Joyeuse Ville_ (Collection des Auteurs Gais) 1 -- _Le Célèbre Barastol_ (Collection des Auteurs Gais) 1 -- _Césarin_, Histoire d'un Vagabond 1 -- _Jeunes Amours_ 1 -- _Farceurs_ (Collection des Auteurs Gais) 1 -- _Galante Aventure_ 1 -- Ouvrages pour la jeunesse _Mes Amis et Moi_ (Couronné par l'Académie française) 1 -- _Entre Camarades_ 1 -- _Fils Unique_ 1 -- _Grand'Mère et Petit-Fils_ (Couronné par l'Académie française). 1 -- _Mademoiselle Cœur d'Ange_ 1 -- _Contes et Souvenirs de mon Pays_ 1 -- _Mes Vacances_ 1 -- _Le Petit Léveillé_ 1 -- _Les Quatre Fils Hémon_ 1 -- _La Revanche d'Absalon_ 1 -- _Disparu!_ Histoire d'un enfant perdu 1 -- _Le Gros Lot_ 1 -- _Deux Cousins_ (sous presse) 1 -- Études documentaires _Deux Malheureuses_ 1 -- _Institution de Demoiselles_ 1 -- _Bas-Bleus_ 1 -- _Demoiselles à marier_ 1 -- _Émancipées_ 1 -- Bibliographie et divers _Une Bibliothèque_, l'Art d'acheter les livres, de les classer, de les conserver et de s'en servir (Couronné par l'Académie française) 1 -- _Amateurs et Voleurs de livres_ 1 -- _Le Livre_, Historique, Fabrication, Achat, Classement, Usage et Entretien (Couronné par l'Académie française) 5 -- _Petit Manuel de l'Amateur de livres_ 1 -- _Le Chansonnier Émile Debraux, roi de la Goguette_ 1 -- _En pleine Gloire_, Histoire d'une mystification 1 -- _Le Dîner des Gens de Lettres_, Souvenirs littéraires 1 -- _Bureaux et Bureaucrates_, Mémoires d'un employé des P.T.T. 1 -- _Mystifications littéraires et théâtrales_ 1 -- _Récréations littéraires_ (sous presse) 1 -- [Illustration: Attribué à J.-S. Duplessis (1725-1803). Portrait présumé de Madame LENOIR. (MUSÉE DU LOUVRE.)] ALBERT CIM BIBLIOTHÉCAIRE HONORAIRE DES POSTES ET DES TÉLÉGRAPHES BIBLIOTHÉCAIRE DE LA SOCIÉTÉ DES GENS DE LETTRES LES FEMMES ET LES LIVRES PARIS ANCIENNE LIBRAIRIE FONTEMOING ET Cie E. DE BOCCARD, ÉDITEUR 1, RUE DE MÉDICIS, 1 1919 _Tous droits réservés. Copyright by E. de Boccard, Éditeur._ A MADAME BLANCHE JABLONSKA, NÉE HENRY MARET. _En témoignage d'une très respectueuse et bien cordiale affection._ ALBERT CIM. _Ce livre n'est que le résumé ou l'esquisse d'un travail plus développé, entrepris par moi depuis longtemps, sur_ les Femmes et les Livres. _Après quelques pages consacrées aux femmes ennemies des livres,--«bibliophobes», selon le terme employé par George Sand,--je passe en revue, autant que possible dans l'ordre chronologique, les nombreuses amies des livres ou bibliophiles, non seulement celles qui ont rassemblé d'importantes ou luxueuses collections, mais celles aussi qui ont laissé témoignage de leur goût pour la lecture et l'étude._ _Nul n'étant obligé, en matière bibliographique surtout, de croire quelqu'un sur parole, j'ai indiqué en notes les sources précises où j'ai puisé mes renseignements, et je prie le lecteur d'excuser les omissions et les erreurs que j'ai forcément commises._ A. C. I FEMMES BIBLIOPHOBES[1] I De tout temps les bibliographes se sont montrès sévères à l'égard des femmes, et les ont considérées comme d'instinctives et irréductibles ennemies des livres. Le plus ancien d'entre eux, celui qu'on peut considérer comme le père de la bibliophilie, Richard de Bury (1287-1345), évêque de Durham et grand chancelier d'Angleterre, leur adresse, presque au début de son _Philobiblion_[2], une très véhémente mercuriale, qu'il suppose débitée par les livres eux-mêmes, et où ceux-ci énumèrent leurs plus notables griefs: «A peine cette bête (c'est de ce gracieux nom que l'illustre évêque qualifie ou fait qualifier le beau sexe), à peine cette bête, toujours nuisible à nos études, toujours implacable, découvre-t-elle le coin où nous sommes cachés, protégés par la toile d'une araignée défunte, que, le front plissé par les rides, elle nous en arrache, en nous insultant par les discours les plus virulents. Elle démontre que nous occupons sans utilité le mobilier de la maison, que nous sommes impropres à tout service de l'économie domestique, et bientôt elle pense qu'il serait avantageux de nous troquer contre un chaperon précieux, des étoffes de soie, du drap d'écarlate deux fois teint, des vêtements, des fourrures, de la laine ou du lin. Et ce serait avec raison, surtout si elle voyait le fond de notre cœur,» etc. [1] L'épithète est de George Sand, qui, plus sans doute pour plaisanter que pour attester sa «haine du livre», ajoutait ce mot à sa signature. (Voir ci-dessous, p. 26.) [2] Chap. IV, p. 39-40; traduction Cocheris. Le bibliophile Jacob (1806-1884), si expert en ces matières, et d'habitude si courtois et si indulgent, atteste nettement aussi que «les femmes n'aiment pas les livres et n'y entendent rien: elles font, à elles seules, l'enfer des bibliophiles: Amour de femme et de bouquin Ne se chante au même lutrin[3].» [3] Cité par Octave UZANNE, _Zigzags d'un curieux_, Les femmes bibliophiles, p. 31. Et M. Octave Uzanne, à qui j'emprunte cette citation, s'écrie, de son côté[4]: «Les femmes bibliophiles!... Je ne sache point deux mots qui hurlent plus de se trouver ensemble dans notre milieu social; je ne conçois pas d'accolade plus hypocrite, d'union qui flaire davantage le divorce! La femme et la _bibliofolie_ vivent aux antipodes, et, sauf des exceptions aussi rares qu'hétéroclites,--car les filles d'Ève nous déroutent en tout,--je pense qu'il n'existe aucune sympathie profonde et intime entre la femme et le livre; aucune passion d'épiderme ou d'esprit; bien plus, je serais tenté de croire qu'il y a en évidence inimitié d'instinct, et que la femme la plus affinée sentira toujours dans «l'affreux bouquin» un rival puissant, inexorable, si éminemment absorbant et fascinateur, qu'elle le verra sans cesse se dresser comme une impénétrable muraille entre elle-même et l'homme à conquérir... Voyez de quel ton pitoyable une femme minaude cette exclamation digne de figurer dans le _Dictionnaire des lieux communs_: «Mon mari! je le vois si peu!... Il vit fourré dans ses livres!» Ou encore, écoutez cette voix ironique qui soupire bourgeoisement: «Si je le laissais faire, il mettrait ses vilains bouquins jusque dans Mon Salon!» [4] _Ouvrage cité_, p. 30-32. Paul Eudel (1837-1911) remarque de même que «la collection (des livres particulièrement) a toujours eu pour ennemies jurées nos chères compagnes: «C'est autant de moins, disent-elles pour la toilette et pour le train de la maison[5].» [5] Paul EUDEL, _le Truquage_, Livres et Reliures, p. 275 (Paris, Dentu, 1887). Dans son intéressant petit volume _Bouquiniana, notes et notules d'un bibliologue_[6], B.-H. Gausseron (1850?-1914?) déclare, lui aussi, que «les livres, jusque dans la maison du bibliophile, ont un implacable ennemi, c'est la femme... La femme, l'ennemie-née du bibliophile». [6] Pages 36 et 94. «L'amour des livres, c'est une marque de délicatesse, mais c'est une délicatesse d'homme: les femmes, pour la plupart, ne le comprennent pas, observe, à son tour, M. Porel[7]. Pour les ouvrages du dix-huitième siècle, qu'elles veulent acquérir maintenant parce qu'ils sont à la mode, elles ont été depuis longtemps particulièrement malfaisantes.» [7] Préface du catalogue de sa bibliothèque: dans le journal _le Temps_, 25 février 1901. Dans sa préface de la réimpression de l'opuscule de Charles Nodier (1780-1844) _le Bibliomane_[8], faite par Conquet en 1894, M. René Vallery-Radot nous avertit également, et avec une virulente insistance, de l'irrémédiable antipathie de la femme pour le livre: «... Il y a un plus dangereux encore (que le feu, l'eau, le gaz, etc.), le plus difficile à vaincre, ennemi de tous les jours, de toutes les heures, furetant partout, décidé à toutes les luttes ouvertes ou à toutes les ruses sournoises: la femme. En dehors de rares et très nobles exceptions, les femmes sont antibibliophiles. Un livre, à leurs yeux, n'est pas plus qu'un journal: elles le plient, elles le froissent, elles le retournent. Un coupe-papier manque-t-il? elles prennent une carte, une épingle, même une épingle à cheveux. S'agit-il de livres rares? le moindre bibelot les intéresse plus que toutes les premières éditions[9]. Elles préfèrent un bout de ruban à la plus exquise reliure. Ne leur confiez pas, en le retirant du rayon sacré qu'un bibliophile appelait «le reliquaire», un petit livre à faire pâlir de joie: elles l'ouvriraient en lui cassant le dos. Le meilleur des maris peut donner la clef de son coffre-fort à sa femme; il ne doit pas lui donner la clef de sa bibliothèque. Il ne faut jamais laisser une femme seule avec un livre.--Tels devraient être les principes de presque tous les bibliophiles mariés.» [8] Pages XI-XII. [9] «Pourquoi les livres coûtent-ils si bon marché et les bibelots si cher? C'est que les femmes adorent les bibelots et qu'elles ne s'intéressent pas aux livres. Le bibelot est décoratif, on le met dans son salon, on l'accroche aux murs; tout le monde le remarque et s'extasie...» (Adolphe BRISSON, _Portraits intimes_, Un amateur de vieux livres [Xavier Marmier], p. 24.) Ailleurs encore (_le Livre et la Femme_, dans _la République française_, 3 octobre 1899), M. Adolphe Brisson est revenu à la charge: «Les jouissances dues aux livres demeurent inaccessibles à la plus belle moitié du genre humain. Non seulement elle ne les apprécie pas, mais je doute qu'elle les soupçonne. C'est un domaine qui lui est en quelque sorte étranger... Les femmes d'aujourd'hui adorent le bibelot; elles recherchent avec fureur les meubles, les faïences, les bois sculptés, les soies, les dentelles, les éventails, les verres de Bohême et de Venise, les porcelaines de Saxe, les bijoux, les chiffons, les lustres de cristal taillé; elles font des folies pour une gouache de Lancret ou une gravure à toutes marges de Moreau le jeune. Les livres les laissent indifférentes. Ils ont le tort de ne pas parler aux yeux. On ne les aperçoit pas du premier coup en entrant dans le salon. Il faut se donner la peine de les découvrir au fond de la cachette où ils abritent leur modestie.» Comme vient de nous en avertir M. Vallery-Radot, les épingles à cheveux sont fréquemment le coupe-papier de la femme;--à moins qu'elle ne préfère se servir, pour le même office, de son index ou de son pouce, ce qui, d'une façon comme de l'autre, taille en dents de scie les bords du livre. «Ne confiez jamais, ô bibliophiles, le soin de couper un livre que vous tenez en estime particulière à d'autres qu'à vous-mêmes, recommande un rédacteur anonyme du _Magasin pittoresque_[10]; défiez-vous, pour accomplir cette opération si simple en apparence, mais en réalité si délicate, de cette main mignonne qui excelle dans l'art de la broderie, et qui ne connaît point de rivale dans mille travaux élégants. Tout habile qu'elle est, cette main charmante, à laquelle on peut confier sans crainte la réparation du tissu le plus fin, vous fera le plus innocemment du monde d'innombrables festons aux marges que vous voulez respecter; bien heureux si le couteau, en déviant de la ligne marquée, ne tranche cette marge jusqu'au texte, et perde ainsi à tout jamais un livre qui n'est plus présentable aux yeux d'un véritable bibliophile.» [10] Année 1875, p. 262; article intitulé: _Les ennemis des livres_. Et les papillotes? Combien étaient commodes pour cet usage les feuillets des livres! «Nous avons en main un bel ouvrage où l'on avait coupé de quoi se faire des papillotes, écrit Alkan aîné (1809-1889)[11]. Les femmes surtout sont les bourreaux des livres. (Il y a bien, ajoute entre parenthèses le même bibliographe, _quelques_ exceptions).» [11] _Les livres et leurs ennemis_, p. 15. «J'ai connu un bibliophile qui venait d'acquérir un livre, à la recherche duquel il était depuis longtemps, nous conte Étienne Mulsant (XIXe siècle) dans son charmant petit volume _les Ennemis des livres_[12]. Il eut l'imprudence de le laisser sur la table de son cabinet. Le lendemain du jour de son acquisition, il trouva sa femme, entrée par hasard dans son lieu de travail, occupée à déchirer les feuillets de ce livre pour en faire des papillotes aux boucles de ses cheveux.» [12] Page 15. Cet élégant opuscule de 64 pages, publié à Lyon, chez H. Georg, en 1879, et devenu extrêmement rare, est anonyme: Étienne Mulsant l'a signé: UN BIBLIOPHILE. II Mme DE CHATEAUBRIAND (1774-1847) partageait l'aversion de son illustre époux pour les livres,--aversion singulière et inexplicable, surtout de la part d'un historien[13]. [13] Cette antipathie de Chateaubriand pour les livres serait incroyable, si elle n'était avouée et proclamée par lui-même et par Mme de Chateaubriand. La quantité de citations répandues dans le _Génie du Christianisme_, l'_Analyse raisonnée de l'Histoire de France_, les _Études historiques_, etc., attestent, au contraire, que Chateaubriand avait beaucoup lu et continuait de beaucoup lire, surtout des Mémoires sur l'Histoire de France. Remarquons aussi que, lorsqu'il fut arrêté et conduit à la Préfecture de Police, en juin 1832, il ne manqua pas de se faire envoyer, par sa femme, «des bougies et des livres pour lire la nuit». (Cf. _Mémoires d'Outre-tombe_, t. V, p. 521; édition Edmond Biré; in-18.) «Le bon abbé Deguerry vous aura dit que nous sommes très contents de notre appartement, écrivait Mme de Chateaubriand à son vieil ami de Lyon, l'abbé de Bonnevie, le 10 juillet 1839. M. de Chateaubriand surtout en est enchanté, parce qu'il n'y a pas moyen d'y placer un livre: vous connaissez l'horreur du patron pour ces nids à rats qu'on appelle bibliothèques[14].» [14] Cf. SAINTE-BEUVE, _Chateaubriand et son groupe littéraire_, vingtième leçon, t. II, p. 70-71, note. Dans cette même note, Sainte-Beuve écrit: «Chateaubriand était capable, avait surtout été capable, dans sa jeunesse, de ces poussées et de ces fougues d'érudition; mais il ne savait ni revoir, ni vérifier, ni donner le dernier coup d'œil aux choses. Aussi, dans les parties d'ouvrage qu'il a publiées dans sa vieillesse, et qui auraient exigé ce genre d'attention, y a-t-il des erreurs et des inexactitudes sans nombre. La plupart des pages érudites qui s'y glissent ou qui s'y _fourrent_ lui ont été procurées par des amis. Lui, il avait une antipathie et une aversion bien singulières de la part d'un quasi-historien: il ne pouvait souffrir les livres.» Ce qui n'empêcha pas Chateaubriand d'insérer, dans une note de son _Itinéraire de Paris à Jérusalem_ (t. II, p. 48; Paris, Didot, 1877), ces très judicieuses considérations, toujours d'actualité: «Aujourd'hui, dans ce siècle de lumières, l'ignorance est grande. On commence par écrire sans avoir rien lu, et l'on continue ainsi toute sa vie. Les véritables gens de lettres gémissent en voyant cette nuée de jeunes auteurs qui auraient peut-être du talent s'ils avaient quelques études. Il faudrait se souvenir que Boileau lisait Longin dans l'original, et que Racine savait par cœur le Sophocle et l'Euripide grecs. Dieu nous ramène au siècle des pédants! Trente Vadius ne feront jamais autant de mal aux lettres qu'un écolier en bonnet de docteur.» Ajoutons que, malgré son antipathie pour les livres, Chateaubriand,--c'est lui du moins qui le raconte,--faillit être nommé par Napoléon _surintendant général de toutes les bibliothèques de France_: «Il (Bonaparte) déclare à Fontanes que, puisque l'Institut ne me trouve pas digne de concourir pour le prix, il m'en donnera un, qu'il me nommera surintendant général de toutes les bibliothèques de France, surintendance appointée comme une ambassade de première classe.» (_Mémoires d'Outre-tombe_, t. III, p. 52; édition Edmond Biré; in-18.) «Mme de Chateaubriand était «adverse aux lettres», selon le mot de son mari, qui ajoute: «Mme de Chateaubriand m'admire sans avoir jamais lu deux lignes de mes ouvrages». Il advint même qu'elle vendit au rabais, petit à petit, au profit de ses pauvres, la bibliothèque de son mari, ce dont celui-ci, d'ailleurs, ne fut pas autrement fâché. Ses lectures se bornaient à quelques ouvrages de piété «où elle trouvait ses délices». Sa grande affaire, c'était la charité, c'était la visite des pauvres ou l'OEuvre de la Sainte-Enfance, c'était surtout l'Infirmerie de Marie-Thérèse, fondée par elle et où elle passait presque toutes ses journées. En fait de livres, ce qui la préoccupait surtout, c'était de vendre beaucoup de livres... de chocolat. Elle en avait établi une fabrique dans son Infirmerie, et ses amis n'avaient pas le droit de se fournir ailleurs, quitte à eux, pour se consoler, à l'appeler la _vicomtesse_ _Chocolat_, titre dont elle était aussi fière que de celui de vicomtesse de Chateaubriand. Ses succès comme marchande ne se comptaient pas; il lui arriva même un jour de faire un vrai miracle: elle vendit à Victor Hugo trois livres de chocolat, au prix fort! Il est vrai que Victor Hugo était jeune en ce temps-là[15].» [15] _Mémoires d'Outre-tombe_, t. II, Appendice, p. 595, édition Edmond Biré. Voici l'aventure, telle qu'on la trouve dans l'ouvrage _Victor Hugo raconté par un témoin de sa vie_ (1818-1821, p. 239; Paris, Hetzel-Quantin, s. d., in-16): «... Mme de Chateaubriand entra dans le cabinet de son mari. Elle n'avait jamais paru connaître Victor (Hugo); il fut donc fort étonné de la voir venir à lui, le sourire aux lèvres, «Monsieur Hugo, lui dit-elle, je vous tiens, et il faut que vous m'aidiez à faire une bonne action. J'ai une infirmerie pour les vieux prêtres pauvres. Cette infirmerie me coûte plus d'argent que je n'en ai; alors j'ai une fabrique de chocolat. Je le vends un peu cher, mais il est excellent. En voulez-vous une livre?--Madame,» dit Victor, qui avait sur le cœur les grands airs de Mme de Chateaubriand et qui éprouva le besoin de l'éblouir, «j'en veux trois livres.» Mme de Chateaubriand fut éblouie, mais Victor n'eut plus le sou.» «Mme de Chateaubriand n'estimait guère les livres qu'au poids, écrit, de son côté, Danielo, le secrétaire de Chateaubriand[16]. A dix sous le chef-d'œuvre pour qui en voulait! Je connais un bouquiniste, qui, dans ce commerce, a fait, avec elle, une bonne partie de sa fortune. C'est ainsi qu'elle dévastait, au profit des pauvres, la bibliothèque de M. de Chateaubriand, si toutefois l'on peut dire que M. de Chateaubriand eût une bibliothèque[17]. Lui-même ne faisait pas grand cas d'un livre quand il n'en avait pas besoin. Il n'était pas de ceux qui, sans se tuer à lire, aiment néanmoins à faire de belles collections, et se plaisent au luxe distingué d'une belle bibliothèque... [16] Cité par François FERTIAULT, _les Amoureux du livre_, p. 197-198. [17] Au début de la Restauration, Chateaubriand possédait une bibliothèque, qui fut vendue à Paris, à la salle Sylvestre, rue des Bons-Enfants, le 29 avril 1817 et les jours suivants. (Cf. _Mémoires d'Outre-tombe_, t. IV, p. 145 et note 1, édition Edmond Biré.) Dans un appendice du même ouvrage (t. VI, p. 563), on lit: «Peu de temps avant sa mort, Chateaubriand tint à donner à Henri de France un dernier témoignage de sa fidélité. Par une disposition _à part son testament_, disposition particulière recommandée à sa famille, et dont un double fut remis au comte de Chambord, il donna à ce dernier le petit nombre de ses livres de choix, quelques-uns _annotés_, ceux _qu'il relisait_, disait-il, afin de servir aux loisirs et à l'instruction du prince.» «Je ne crois pas même qu'il ait jamais eu une édition bien complète de ses œuvres. «Quand il avait besoin d'un livre ou d'une recherche, j'étais là pour aller aux bibliothèques publiques... «Mme de Chateaubriand ne se montrait donc nullement émerveillée des livres... Elle eût été bien fâchée de perdre son temps à lire...» III Il y a des femmes, et elles ne sont pas rares, dit-on, qui, non seulement ne s'intéressent pas aux livres, ainsi que le notait tout à l'heure M. Adolphe Brisson, mais qui empêchent les autres de s'y intéresser, qui empêchent surtout leurs maris d'en acheter. Tout argent détourné de la communauté au profit des libraires ou bouquinistes est considéré par elles comme scandaleusement gaspillé et perdu. On cite, parmi ces bibliophobes, la marquise de X... (XIXe siècle), qui, exaspérée de la coûteuse affection que son mari, un délicat et fervent bibliophile, portait à «ces maudits bouquins», lui avait signifié qu'elle n'en voulait plus voir un seul entrer dans la maison: «Assez comme cela!» Le malheureux époux, qui tenait à rester fidèle à son culte, avait fini par s'entendre secrètement avec son libraire, M. T. D....., et à imaginer avec lui ce stratagème. Chaque fois que le marquis demandait à ce libraire un volume annoncé sur un de ses catalogues, M. T. D....., au lieu de lui faire porter cet ouvrage, ou de le lui expédier par la poste, ce qui n'aurait pu échapper à l'inquisition de la terrible dame, se glissait, le soir, entre chien et loup, sous la voûte de l'hôtel occupé par M. et Mme de X..., et déposait le livre, très soigneusement enveloppé et ficelé, dans la boîte aux ordures, la «poubelle» de la maison, d'où le marquis, aux aguets, ne tardait pas à l'aller retirer[18]. [18] Renseignement verbal fourni par le libraire T. D...... Un exemple analogue nous est conté par un des libraires parisiens les mieux placés pour être initiés à ces détails, M. H. Floury, dans une conférence faite par lui, il y a quelques années, au Cercle de la Librairie[19]. [19] _Bibliographie de la France_, 3 juillet 1908, supplément. Conférence sur «la Clientèle». «Pour beaucoup de femmes, nous dit-il, le libraire est une sorte d'ennemi; dans nombre de ménages, la vocation du jeune bibliophile n'a pu résister à l'épreuve du mariage, et, si elle a persisté, elle est devenue, dans beaucoup, l'occasion de conflits. Bien des maris arrivent à les éviter en usant de ruses d'apaches pour introduire à domicile leurs nouvelles acquisitions. «Nous avons tous, plus ou moins, des clients qui, ayant acheté et payé leurs livres, les laissent en pension chez nous en attendant une occasion favorable de les faire entrer chez eux, vacances, cérémonie, etc., occasion qui met quelquefois des mois à se produire. «Un amateur de ma connaissance a trouvé un moyen élégant de résoudre la question en s'improvisant son propre sommelier, sous prétexte qu'il n'aime pas voir toucher à sa cave; il en a constamment la clef en poche, et chacun de ses achats descend préalablement aux enfers, pour être remonté fragmentairement avec la provision de vin du jour. Il arrive ainsi à dérouter tous les soupçons, jusqu'au jour où il est constaté que la bibliothèque s'est considérablement enrichie de nombreux titres inconnus jusqu'alors, et où il est obligé de subir la scène inévitable. Mais ces scènes se trouvent, de ce fait, espacées, notre ami étant très prudent.» Un libraire de province,--ou, pour préciser, une dame libraire dans un de nos chefs-lieux départementaux,--femme intelligente et lettrée, judicieuse observatrice, très «avertie», comme nous disons aujourd'hui, me déclarait dernièrement sans ambages, avec sa grande expérience de son commerce, que «les femmes sont les pires ennemies des livres», et, à l'appui de sa formelle et rigoureuse assertion, elle me contait diverses anecdotes, celles-ci, entre autres: Un de ses clients, jeune homme riche et aimant à lire, fait un brillant mariage, et vient, quelques semaines après, accompagné de sa femme, dans le magasin de librairie. Il s'informe des volumes récemment parus; on lui en apporte plusieurs, il les feuillette, en choisit un et l'achète: un volume de 3 fr. 50,--3 francs avec la remise alors d'usage. A ce moment, l'aimable et jeune épousée intervient: «Comment! tu dépenses comme ça trois francs _pour rien_? Sans même me consulter? J'espère bien que cela ne se renouvellera plus!» Une autre fois, à la veille des étrennes, arrive un autre jeune couple, qui désire un livre illustré pour un garçonnet de treize ou quatorze ans. Le mari avise un volume qui lui semble intéressant et artistement illustré. «Oui, voici qui fera l'affaire. N'est-ce pas, Madame, qu'il est de bon goût? ajoute-t-il en s'adressant à la patronne de la maison. --Fort bien! Vous ne pouviez mieux choisir, répond celle-ci. --Mieux choisir!» se récrie l'épouse avec une sorte d'ironie ou d'indignation. Et, saisissant un lourd in-quarto, à la reliure criarde, mais coûtant moitié moins cher, et qu'elle guignait depuis un moment: «Est-ce que celui-ci ne fera pas plus d'effet? Est-ce qu'il ne conviendrait pas mille fois mieux? Dites, Madame!» La patronne, ainsi interrogée, contrainte de prendre parti et sommée de se déjuger, tente de se dérober, hoche discrètement la tête. «Cependant, insinue le mari, je t'assure, ma chère, que celui-ci... --Non, non! interrompt la jeune femme. Et, puisque c'est comme ça, tiens, pour nous mettre d'accord, nous ne _lui_ donnerons pas de livre, _nous lui donnerons un mouton_.» Un mouton à roulettes... à un garçon de quatorze ans! Dans ses charmantes lettres parisiennes, signées «le vicomte de Launay», Mme Émile DE GIRARDIN (1804-1855) a fait, il y a plus d'un demi-siècle, les mêmes sévères constatations. «Une femme élégante et riche, une femme d'esprit, écrit-elle[20], attend patiemment deux mois pour lire un roman de George Sand, et l'idée ne lui vient pas de l'acheter [elle préfère avoir recours aux cabinets de lecture]; et, dans son élégante demeure, vous trouverez toutes les splendeurs imaginables... Cependant, il est une justice à rendre à nos jeunes élégantes: elles n'ont point de livres, c'est vrai, mais elles ont de superbes _bibliothèques_, des armoires de Boule d'un grand prix, auxquelles on a laissé, par respect, le nom menteur de bibliothèque. Mais ne craignez pas que ces belles armoires restent inutiles; non, certes; on leur donne un très noble emploi; voyez, dans celle-ci, les chapeaux, les bonnets et les turbans de Madame... Au fond des plus petites armoires, sur les étagères, pas un livre non plus... Vous trouvez des bergers en flacon, des chiens de porcelaine, des magots chinois... Mais à quoi bon des livres? O progrès! Que voulez-vous? les jeunes femmes ne lisent plus, et, chose plus terrible, hélas! celles qui, par exception, lisent encore un peu... ÉCRIVENT!!» [20] Mme ÉMILE DE GIRARDIN, le _Vicomte de Launay_, Lettres parisiennes, 16 décembre 1837, t. I, p. 288-289 (Paris, Calmann Lévy, 1878). On connaît le mot de la MARÉCHALE LEFEBVRE, duchesse de Dantzig (XIXe siècle),--Mme Sans-Gêne,--comme elle visitait un hôtel dont elle venait de faire l'acquisition. En pénétrant dans la pièce où le précédent propriétaire avait installé sa bibliothèque, et en voyant les rayons dégarnis de livres, elle se prit à dire,--et ici je cède la parole au poète-bibliophile François Fertiault[21]: Lefebvre est peu _lisard_; moi, rien du tout _lisarde_; Tiens! dit-elle, achevant son opinion _bizarde_, Ces rayons sont très forts... J'en vas faire un fruitier! A propos de cette même grande dame improvisée, les Goncourt écrivent dans leur _Journal_[22]: «Penguilly racontait encore que la fameuse maréchale Lefebvre, cette _haute gueule_ de la première cour impériale, apporta, un beau matin, le bâton du maréchal au Musée d'artillerie, et comme le conservateur, tout en la remerciant, s'étonnait que la famille ne conservât pas une telle relique: «Ah! bien oui, ma famille, vous ne les connaissez pas!»--Et faisant le geste: «Ils seraient capables de s'en servir pour abattre des noix!» [21] _Les Légendes du Livre_, p. 27 (Paris, Lemerre, 1886). [22] Année 1867, t. III, p. 170. D'autres dames imposent aux livres mêmes les fonctions les plus inattendues. «Je me suis permis, Madame, de vous envoyer le volume que je viens de publier, les derniers-nés de ma Muse, disait à une jeune mère, qui avait près d'elle son petit garçon âgé de cinq ans, certain poète, étonné de n'avoir reçu et de ne recevoir aucune nouvelle de cet envoi. --C'est vrai, Monsieur, veuillez m'excuser: j'aurais dû vous remercier... D'autant plus que vos vers sont délicieux, sont ravissants, exquis! J'en suis encore tout extasiée... Mais où l'ai-je donc mis, ce charmant petit volume?» Et l'enfant--enfant terrible!--de répondre: «Mais, maman, tu sais bien? ce livre, aussitôt que tu l'as reçu, tu l'as glissé sous le pied de la table de ton cabinet de toilette... Elle boitait, et cela t'agaçait. Tu te rappelles?[23]» [23] Renseignement verbal. Notons, en passant, cette instante et suprême recommandation d'une autre excellente mère de famille--la femme d'un chroniqueur scientifique cependant!--à ses deux garçons, externes au lycée de...: «Surtout, mes petits amis, ne me rapportez pas de prix! Il y a assez de livres ici[24].» [24] Renseignement verbal. Combien de femmes se comportent avec les livres, les plus précieux livres surtout, d'une façon analogue à celle qu'employa la petite-nièce de Callot (1593-1635), la mère de Mme de Graffigny, à l'égard des admirables planches de cuivre qu'elle avait trouvées dans l'héritage de son grand-oncle! Beau legs qu'il m'a fait là! Ça se tord, ça s'encrasse. Vite et tôt j'aurais dû le vendre, l'an dernier. Oui, j'ai bien réfléchi; ce métal m'embarrasse... Jeanne, fais-moi venir sur l'heure un chaudronnier[25]. [25] François FERTIAULT, _les Légendes du Livre_, p. 110 et 201; et le poète ajoute plaisamment: «N'est-ce pas à les déshériter toutes?» Oui, mieux vaut vendre tout ce métal, le racler soigneusement et le transformer en poêlons et casseroles. C'est ainsi que la célèbre Mlle MARS (1779-1847) troqua contre écus sonnants l'admirable bibliothèque qui lui venait du marquis de Chalabre. Le marquis de Chalabre, qui fut un passionné bibliophile, eut l'idée peu judicieuse de léguer ses chers livres à la personne la moins capable de les respecter et de les apprécier, et l'idée, plus singulière encore, de mourir du désespoir qu'il éprouvait de ne pouvoir se procurer un volume _qui n'existait pas_, une Bible, «qu'en un moment d'humour, avait inventée Charles Nodier[26]». [26] Gustave MOURAVIT, _le Livre et la Petite Bibliothèque d'amateur_, p. 28. Au lendemain ou surlendemain de ce décès, Mlle Mars se trouva donc mise en possession de cette bibliothèque, qui «était réellement du plus grand prix; mais Mlle Mars lisait peu ou plutôt ne lisait pas du tout»[27]. Elle chargea un de ses amis et familiers, nommé Merlin, «de classer les livres du défunt et d'en faire la vente». [27] «A Paris, les femmes ne lisent jamais,» déclare formellement Balzac, dans sa _Physiologie du mariage_ (Méditation XI, p. 120; Paris, Librairie nouvelle, 1876);--ce qui ne l'a pas empêché d'écrire beaucoup _pour_ les femmes. «Merlin s'acquitta de cette mission en toute conscience; il feuilleta et refeuilleta si bien chaque volume, qu'un jour il entra dans la chambre de Mlle Mars, tenant trente à quarante billets de mille francs, qu'il déposa sur une table. «Qu'est-ce que cela, Merlin? demanda Mlle Mars. --Je ne sais, Mademoiselle, dit celui-ci. --Comment, vous ne savez? Mais ce sont des billets de banque! --Sans doute. --Où donc les avez-vous trouvés? --Mais dans un portefeuille pratiqué sous la couverture d'une Bible très rare. Comme la Bible était à vous, les billets de banque sont aussi à vous.» «Mlle Mars prit les billets de banque, qui, en effet, étaient bien à elle, et eut grand'peine à faire accepter à Merlin, en cadeau, la Bible dans laquelle les billets de banque avaient été trouvés. «Quant aux autres livres, auxquels il semble que cette aubaine inattendue aurait dû servir de rançon, ils n'en furent pas moins vendus aux enchères et à beaux deniers comptants, au profit de la légataire[28].» [28] Paul DUPONT, _Histoire de l'imprimerie_, t. II, p. 177;--et Alexandre DUMAS, _Mémoires_, t. V, p. 123. La première de nos romancières, la plus autorisée et la reine de nos dames écrivains, GEORGE SAND (1804-1876), y allait, elle, sans biaiser, et se proclamait tout franchement _bibliophobe_: «Merci toujours, cher bibliophile, et au revoir. Votre amie, G. S., _bibliophobe_!» Ainsi termine-t-elle une lettre datée de Nohant, 27 juin 1875, et adressée au vicomte de Spoelberch de Lovenjoul[29]. [29] George SAND, _Correspondance_, t. VI, p. 348. La réponse que fit à Napoléon la célèbre danseuse BIGOTTINI (1784-1858) paraîtra, à plus d'un lecteur, résumer assez bien la question des rapports de nombre de femmes avec les livres et leurs sentiments à ce sujet. Napoléon ayant un jour chargé Fontanes, grand maître de l'Université, d'envoyer un présent de sa part à la Bigottini, ledit grand maître fit remettre à cette dame la collection des classiques--celle de Firmin Didot sans doute--superbement reliée. C'était, convenons-en tout de suite, un singulier cadeau pour une prêtresse de la danse et de l'amour. Quelques jours plus tard, l'Empereur, qui avait certainement ses motifs pour désirer connaître l'opinion de la Bigottini sur cette offrande, lui demanda si elle en était contente, si les choses avaient été convenablement faites: «Pas trop, Sire! répliqua celle-ci. Il m'a payée en _livres_; j'aurais préféré en _francs_[30].» [30] Cf. le journal _le Temps_, 12 novembre 1909, article relatif à une monographie de M. Félix Bouvier consacrée à la fameuse ballerine de l'Opéra, qui mérita d'être surnommée «la Malibran de la danse». La Bigottini passe pour avoir eu quantité d'adorateurs et des rejetons de divers lits. Parmi les soupirants, on cite: Eugène de Beauharnais; Duroc, le grand maréchal du palais, dont elle eut deux enfants; le comte de Fuentès, dont elle eut une fille. Elle eut encore un fils, que d'aucuns attribuaient au duc de Berry, mais que M. Félix Bouvier restitue (avec des semblants de probabilité) à un archiduc autrichien de passage à Paris. Bourbon ou Habsbourg, ce fils vécut jusqu'à l'âge de quatre-vingt-cinq ans. Il est mort en 1903 à Passy, rue des Vignes, dans l'hôtel qu'il avait hérité de sa mère et qui a été récemment démoli. Associé d'agent de change, il laissa toute sa fortune à l'Assistance publique, qui, avec les fonds, a créé, à Aulnay-sous-Bois, l'asile Bigottini. II FEMMES BIBLIOPHILES I Mais, ainsi que le disait tout à l'heure le brave Alkan aîné, «il y a _quelques_ exceptions», et ce sont ces exceptions, ces femmes qui ont aimé les livres et contribué à les faire aimer, que je voudrais à présent passer en revue. Une des plus anciennes de ces bibliophiles[31] est SAINTE RADEGONDE (521-587), fille de Berthaire, roi de Thuringe, femme de notre roi Clotaire Ier, que le poète latin Fortunat a maintes fois célébrée et dont il a écrit la vie. [31] J'aurais pu remonter plus haut, chercher, dans l'antiquité grecque et dans l'antiquité latine, les rares femmes amies des livres et des lettres, nommer Aspasie, Leontium, Hypatie, etc. A défaut de ces préliminaires, voici d'intéressantes considérations empruntées à SAINTE-BEUVE (_Nouveaux Lundis_, t. IX, p. 390): «Dans l'Antiquité..., si quelques femmes s'éprenaient hautement pour le talent, pour le génie, pour la sagesse, c'est parmi les femmes libres qu'il les faut chercher, parmi les _hétaïres_ ou courtisanes. Aspasie, Leontium, qui s'éprirent pour Périclès ou pour Épicure, étaient de cette classe brillante et vouée à une publicité qui ôtait au don du cœur son plus grand charme et son prix. Passons vite. C'est un sujet de thèse que je propose à d'autres: _la passion littéraire et le goût de l'esprit chez les femmes dans l'Antiquité_. La femme de Mantinée, Diotime, qui est invoquée dans _le Banquet de Platon_, et qui dit de si belles choses par la bouche de Socrate, est une initiée, une sorte de prêtresse ou de femme docteur ès sciences amoureuses et sacrées, et elle sort des conditions ordinaires. En général, les femmes honnêtes, renfermées dans le gynécée, pouvaient orner leur esprit, mais elles contenaient leurs prédilections au-dedans. Les Pénélope ne filaient et ne brodaient, même en matière d'esprit, que pour leurs époux. Chez les Romains, en ceci assez pareils aux Grecs, Calpurnie, la femme de Pline le Jeune, était assurément une femme lettrée et des plus cultivées par l'étude, mais à l'usage et en l'honneur de son mari seulement: à force de tendresse conjugale et de chasteté même, elle s'était faite tout entière à son image, lisant et relisant, sachant par cœur ses œuvres, ses plaidoyers, les récitant, chantant ses vers sur la lyre, et, quand il faisait quelque lecture publique ou _conférence_, l'allant écouter comme qui dirait dans une loge grillée ou derrière un rideau, pour y saisir avidement et boire de toutes ses oreilles les applaudissements donnés à son cher époux.» Radegonde était encore tout enfant, elle atteignait à peine sa huitième année, quand, dans un partage de butin et de prisonniers, elle tomba entre les mains de Clotaire. Sa grâce et sa beauté produisirent sur le roi frank une si vive impression qu'il décida de la faire instruire et de la prendre plus tard pour épouse. Elle reçut ainsi, «non la simple éducation des filles de race germanique, qui n'apprenaient guère qu'à filer et à suivre la chasse au galop, mais l'éducation raffinée des riches Gauloises. A tous les travaux élégants d'une femme civilisée, on lui fit joindre l'étude des lettres latines et grecques, la lecture des poètes profanes et des écrivains ecclésiastiques. Soit que son intelligence fût naturellement ouverte à toutes les impressions délicates, soit que la ruine de son pays et de sa famille et les scènes de la vie barbare dont elle avait été le témoin l'eussent frappée de tristesse et de dégoût, elle se prit à aimer les livres comme s'ils lui eussent ouvert un monde idéal meilleur que celui qui l'entourait[32].» [32] Augustin THIERRY, _Récits des temps mérovingiens_, cinquième récit; t. II, p. 146-147 (Paris, Furne, 1868; in-18). Devenue femme de Clotaire et reine--ou plutôt l'une des reines des Franks neustriens, car, selon les mœurs de la vieille Germanie, Clotaire ne se contentait pas d'une seule épouse,--elle prit en haine ses richesses et sa condition, au point que le roi disait: «C'est une nonne que j'ai là, ce n'est pas une reine!» Radegonde fit si bien qu'elle amena l'évêque de Noyon à rompre son mariage,--cet étrange mariage toléré et même consacré par l'Église, qui ne voulait pas s'aliéner les rois franks; et, après s'être mise sous la sauvegarde du tombeau de saint Martin, à Tours, elle se réfugia à Poitiers, où, en dépit de la colère et des violences de son époux, que les influences religieuses ne tardèrent pas d'ailleurs à calmer, elle fonda le monastère de Sainte-Croix. Alors commença, pour cette pieuse et savante femme, l'existence calme, austère et studieuse qu'elle avait toujours rêvée. «L'étude des lettres figurait au premier rang des occupations imposées à toute la communauté; on devait y consacrer deux heures chaque jour, et le reste du temps était donné aux exercices religieux, à la lecture des livres saints et à des ouvrages de femme. Une des sœurs lisait à haute voix durant le travail fait en commun, et les plus intelligentes, au lieu de filer, de coudre ou de broder, s'occupaient, dans une autre salle, à transcrire des livres pour en multiplier les copies.[33]» [33] Augustin THIERRY, _ouvrage cité_, p. 157-158. Les auteurs favoris de Radegonde étaient, nous apprend Fortunat[34], saint Grégoire de Nazianze, saint Basile, saint Athanase, saint Hilaire, saint Ambroise, saint Jérôme, saint Augustin, Sedulius et Paul Orose. [34] Dans Augustin THIERRY, _ouvrage cité_, p. 159, note 2. Radegonde ne voulut pas demeurer à la tête de la congrégation qu'elle avait fondée, et elle fit élire pour abbesse une femme beaucoup plus jeune qu'elle et qui lui était toute dévouée, Agnès, fille de race gauloise, qu'elle avait depuis longtemps prise en affection. «Volontairement descendue au rang de simple religieuse, Radegonde faisait sa semaine de cuisine, balayait à son tour la maison, portait de l'eau et du bois comme les autres; mais, malgré cette apparence d'égalité, elle était reine dans le couvent par le prestige de sa naissance royale, par son titre de fondatrice, par l'ascendant de l'esprit, du savoir et de la bonté[35].» [35] Augustin THIERRY, _ouvrage cité_, p. 159. Le poète Fortunat,--Venantius Fortunatus,--né en Italie vers l'an 530, étant devenu l'hôte de Radegonde et d'Agnès, et se voyant comblé par elles de soins, d'égards et surtout de louanges, se trouva si bien dans cette retraite qu'il ne songea plus à la quitter. Il s'établit à Poitiers, prit les ordres, devint prêtre de l'église métropolitaine, et aussi le conseiller, l'intendant et le secrétaire de la reine et de l'abbesse. La vie que menaient ces trois personnes, vie pieuse et chaste, mais non triste, tant s'en faut, où le goût des choses de l'esprit, les agréments d'une conversation délicate, enjouée et instructive, se mêlaient à de joyeux festins, a été racontée jour par jour par l'épicurien Fortunat, qui donne volontiers à la reine et à l'abbesse les noms de mère et de sœur, et aussi ceux de «ma vie, ma lumière, délices de mon âme», ce qu'on aurait tort d'interpréter comme des témoignages de charnelle tendresse, nous avertit Augustin Thierry[36], et ce qui n'était au fond «qu'une amitié exaltée, mais chaste, une sorte d'amour intellectuel». [36] _Ouvrage cité_, p. 164. Si, à Athènes et à Rome, le goût des lettres et des choses de l'esprit était surtout l'apanage des courtisanes, nous ne voyons guère, dans les premiers siècles du moyen âge, que des religieuses dignes de figurer parmi les amies des livres. Après sainte Radegonde nous mentionnerons sainte Gertrude, sainte Odile, sainte Wiborade, et les abbesses Relinde et Herrade de Landsberg. SAINTE GERTRUDE (626-659), fille de Pépin de Landen, maire du palais du roi d'Austrasie, première abbesse du monastère de Nivelles (Belgique, Brabant), qu'avait fondé sa mère en 645, était en relations avec des savants, et elle fit entreprendre à plusieurs d'entre eux de longs voyages pour se procurer des livres[37]. [37] Cf. Ludovic LALANNE, _Curiosités bibliographiques_, p. 150. SAINTE ODILE (657?-720?), qui est une des patronnes de l'Alsace, établit, après maintes miraculeuses aventures, un couvent dans le château de ses pères, le château de Hohenbourg, et imposa à ses religieuses, issues, pour la plupart, de la noblesse austrasienne et bourguignonne, l'obligation de copier des manuscrits et de les orner de miniatures. Aucun monastère de femmes--sauf peut-être à Poitiers, où les bonnes traditions de sainte Radegonde avaient pu se maintenir--ne se livrait alors à ce genre de travail, et le couvent de Hohenbourg ou de Sainte-Odile conserva longtemps son caractère artistique, sa savante et glorieuse renommée. Aussi «l'imagination populaire, avide de tout personnifier, a fait de la patronne de l'Alsace le type du savoir et de l'étude, en même temps que le modèle de toutes les vertus monacales[38]». [38] René MÉNARD, _l'Art en Alsace-Lorraine_, p. 242. C'est à une abbesse de ce couvent de Sainte-Odile, à HERRADE DE LANDSBERG (....-1195), que l'on doit les monuments les plus importants de la peinture alsacienne au moyen âge; c'est elle qui, notamment, composa et calligraphia de sa propre main le célèbre _Hortus deliciarum_, sorte d'encyclopédie des connaissances humaines au point de vue religieux, admirable manuscrit de 648 feuillets, orné d'un grand nombre de dessins et de figures coloriées, qui formait le plus précieux joyau de la bibliothèque de Strasbourg, et a péri, en 1870, durant l'incendie allumé par les obus prussiens. Herrade connaissait le grec et le latin et plusieurs langues vivantes; elle lisait non seulement les saintes Écritures et les Pères de l'Église dans le texte original, mais Aristote, Platon et Cicéron; elle enseignait aux jeunes filles confiées à ses soins la grammaire, la géométrie, l'astronomie, etc. Elle était poète, et grand poète, paraît-il, et chantait en vers latins les louanges de Dieu; elle mettait elle-même en musique ses pieux cantiques, et excellait à jouer de divers instruments. Quant à son talent de calligraphe et de miniaturiste, elle le tenait de l'abbesse qui l'avait précédée dans le gouvernement du monastère de Hohenbourg, de l'abbesse RELINDE (....-....), au dire d'une tradition. «Il existe, dans l'ancien cloître de Hohenbourg, écrit M. Gérard[39], un monument qui nous rappelle l'abbesse Relinde. C'est un bas-relief du douzième siècle, représentant Relinde et son amie Herrade à genoux devant la Vierge, qui tient l'enfant Jésus dans son giron. Les deux abbesses soutiennent un livre, emblème de leur savoir et de leurs travaux, qu'elles déposent comme un hommage aux pieds de la Vierge. Ce témoignage de la double fraternité dans la science et dans la piété qui lia les deux saintes femmes a été posé par Herrade. J'y aperçois la preuve que Relinde a préparé avec Herrade l'œuvre qui a illustré sa jeune compagne. Ce livre, solennellement offert par la maîtresse et son élève chérie à la mère de Dieu, n'est-ce pas le _Hortus deliciarum_ lui-même?» [39] _Histoire des artistes de l'Alsace pendant le moyen âge_, dans René MÉNARD, _ouvrage cité_, p. 18-31, où l'on trouve de nombreux et intéressants détails sur le _Hortus deliciarum_, «l'exemple le plus complet des traditions byzantines dans la miniature», et plusieurs reproductions de dessins ou de miniatures provenant de ce célèbre manuscrit et calqués avant sa destruction.--On pourrait rappeler encore ici le nom de l'abbesse du monastère de Gandersheim (Brunswick), ROSWITH ou ROSWITA (Xe siècle), auteur de poésies religieuses écrites en latin, et de celle du monastère de Saint-Rupert de Bingen (près de Mayence), SAINTE HILDEGARDE (1098-1180), qui composa, sous le titre de _Jardin de santé_, un répertoire de recettes médicales, souvent des plus bizarres. Hildegarde, exaltée mystique, s'est principalement occupée de botanique et d'histoire naturelle. Antérieurement à Herrade de Landsberg, au dixième siècle, vivait une autre religieuse, une sainte, originaire de la Souabe, SAINTE WIBORADE (_Weibrath_, femme sage et de bon conseil), vierge et martyre, pour laquelle on a revendiqué le glorieux titre de «patronne des bibliophiles». C'est le baron Ernouf qui a formulé cette revendication, il y a une cinquantaine d'années[40]. [40] _Bulletin du bibliophile_, 14e série, 1860, p. 1429-1446; article intitulé: _Une martyre bibliophile_. Sainte Wiborade, qui appartenait à une riche et puissante famille, se retira dans une cellule voisine du monastère de Saint-Gall, et s'occupa à broder et orner les étoffes destinées à couvrir les nombreux et somptueux manuscrits que possédait ce monastère. Une horde de barbares et de païens, des Hongrois, ayant envahi le pays, la noble recluse courut chez les moines en poussant ce cri, qui remplissait d'enthousiasme le baron biographe, et mérite encore la reconnaissance de tous les bibliophiles: «Sauvez d'abord les livres! Cachez-les! Vous vous occuperez ensuite de mettre à l'abri les vases sacrés!» Est-ce cette préférence qui valut à Wiborade un si prompt châtiment,--ou une si soudaine récompense céleste? Tant il y a que, les barbares partis, cette grande et passionnée amie des livres fut trouvée morte dans sa cellule, la tête fracassée par trois coups de hache, et baignant dans son sang. II Les anciens ducs de Bourbon avaient réuni, dans la capitale de leur duché, à Moulins, une collection de livres qui s'enrichit de plus en plus et devint, au quinzième siècle, une des plus belles et des plus considérables qu'on pût voir. La femme de Louis Ier de Bourbon, MARIE DE HAINAUT (....-1354), possédait déjà de beaux livres: son nom se lit sur un manuscrit du roman de _Lancelot_ qui se trouve aujourd'hui à la Bibliothèque nationale[41]. Le véritable fondateur de cette bibliothèque des ducs de Bourbon, à Moulins, fut un petit-fils de cette princesse, Louis II dit le Bon (1337-1410). [41] Cf. Eugène ASSE, _les Bourbons bibliophiles_, p. 3. La sœur de Louis II, JEANNE DE BOURBON (1338-1378), qui épousa notre roi Charles V, le créateur de notre Bibliothèque nationale, était, avant même son mariage, une fervente bibliophile. Entre autres trésors, elle apporta en dot à son mari «une vingtaine de manuscrits précieux, richement reliés, qui contribuèrent à former le premier fonds de la Bibliothèque que ce prince rassembla plus tard dans la grosse tour du Louvre[42]». On est même tenté d'admettre que c'est elle qui inspira à Charles V ce goût pour les livres dont ce monarque a donné de si grandes preuves. En tout cas, et selon la locution connue, «elle n'y a pas nui», ce qui est quelque chose. [42] Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 67-68. MARGUERITE DE FLANDRE (1350-1405), épouse du duc de Bourgogne Philippe le Hardi, «...partageait les nobles goûts de son époux, avait sa bibliothèque à part, où les _Belles-Lettres_ comptaient 54 volumes, dont 39 romans; la _Théologie_, 45; les _Sciences et Arts_, 26; l'_Histoire_ et la _Jurisprudence_, chacune 6»[43]. [43] Gustave MOURAVIT, _ouvrage cité_, p. 415. CHRISTINE DE PISAN (1363?-1431?), toute jeune, lisait déjà Virgile et Cicéron dans leur texte. Elle était venue en France à l'âge de cinq ans, amenée par son père, Thomas de Pisan, conseiller de la république vénitienne, appelé à la cour de Charles V, en qualité de conseiller ou d'astrologue du roi. Elle reçut une brillante éducation et étudia surtout l'antiquité. A quinze ans, elle épouse un gentilhomme picard, Etienne du Castel, qui la laisse veuve à vingt-cinq ans avec trois enfants. Après s'être adonnée à l'étude par goût et par plaisir, elle s'y livre alors par nécessité; elle a recours à sa plume pour gagner sa vie et celle de ses enfants. Elle écrivit quantité d'ouvrages, dont une chronique du règne de Charles V, _le Livre des faits et bonnes mœurs du roi Charles V_, qui a été réimprimée dans la _Collection des Mémoires relatifs à l'histoire de France_ de Petitot et Monmerqué et dans celle de Michaud et Poujoulat, et est encore souvent consultée[44]. [44] Cf. LAROUSSE, _Grand Dictionnaire_;--MICHAUD, _Biographie universelle_;--Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_;--etc. Je profite du nom de Christine de Pisan, originaire de Venise, pour remarquer que, de même que j'ai laissé en dehors de mes recherches les femmes bibliophiles de l'antiquité, je ne m'occupe qu'accidentellement des bibliophiles étrangères à la France. Sur les femmes qui ont aimé les livres et cultivé les lettres en Italie, à l'époque de la Renaissance, on trouve d'intéressants détails dans l'ouvrage de M. Lefebvre Saint-Ogan, _De Dante à l'Arétin_, principalement au chapitre X, p. 249-281 (Paris, Quantin, 1889). Dans son _Roland furieux_, l'Arioste donne une longue liste d'illustres italiennes amies des lettres, liste reproduite par M. Lefebvre Saint-Ogan, dans ledit volume, p. 254. Christine de Pisan s'était retirée dans un monastère, et elle y vivait depuis vingt ans, raconte-t-on, lorsqu'elle entendit parler de Jeanne d'Arc; «elle sortit de son silence pour faire, en l'honneur de la Vierge du triomphe, des vers qui furent sa dernière œuvre et couronnèrent dignement sa vie[45]». [45] Charles ROZAN, _Petites Ignorances historiques et littéraires_, p. 82, note 5. La duchesse MARIE DE BERRY (....-1434), fille d'un frère de Charles V, apporta à son époux, le duc de Bourbon Jean Ier, «quarante et un des plus beaux manuscrits que son père avait réunis dans son château de Mehun-sur-Yèvre. Ces livres lui furent comptés pour une somme de 2500 livres tournois dans la succession de celui-ci. Les autres furent malheureusement dispersés par les créanciers de ce prince[46]...» Cet amour des livres, la duchesse Marie le transmit à son fils et à son petit-fils, les ducs Charles Ier et Jean II, qui furent l'un et l'autre de grands bibliophiles. [46] Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 68-70. La femme de l'infortuné Charles VI, ISABEAU DE BAVIÈRE (1371-1435), jugea convenable, malgré ses scandaleux débordements, de placer un exemplaire de la _Somme des vices et des vertus_ «en l'église des Innocens à Paris, afin que ceste matière fust sceue comme souveraine de tous ceulx qui là le vouldroient lire». En 1398, fut faite pour elle une traduction de la Passion, dont il y a trois exemplaires[47]. Nous voyons aussi que la reine Isabeau ne se séparait point de ses livres en voyage, ses comptes ou «factures» l'attestent à plusieurs reprises: «...Articles vendus par Pierre du Fou (1387), coffretier et huchier,... un coffre de bois garni de cuir pour porter en chariot les livres et romans de la Royne[48]...» [47] Cf. Léopold DELISLE, _le Cabinet des manuscrits_, t. I, p. 50. [48] Cf. Gustave MOURAVIT, _ouvrage cité_, p. 378;--et A. DE CHAMPEAUX, _le Meuble_, t. I, p. 76-77. YOLANDE DE FRANCE (1434-1478), fille de Charles VII, sœur de Louis XI, femme d'Amédée IX, duc de Savoie, enlevée par Charles le Téméraire après la défaite de Morat, aimait passionnément les livres, les arts et le luxe. Tout comme aujourd'hui nos grandes élégantes de Londres et de Berlin, «elle faisait venir ses robes de Paris», et elle avait en quelque sorte à ses gages un orfèvre et un enlumineur de missels. Les livres de sa bibliothèque, contenus dans trois coffres qui la suivaient partout, sont dignes d'une âme qui ne craignait pas «de se blesser aux épines de la vie pour leur dérober une fleur», comme disait si joliment le rimeur Marquet. On voyait, dans cette bibliothèque, les _Épîtres_ de Sénèque, les _Tusculanes_ de Cicéron, Valère-Maxime, Dante, saint Bernard, le _Vieil Digeste_, la _Consolation_ de Boèce, les _Chroniques de Savoie_, le livre de _la Belle Hélène_, les _Cent Nouvelles_ en toscan, quatre _Bibles_, et quantité de missels à miniatures[49]. [49] Cf. COMMINES, _Mémoires_, p. 766, édition Chantelauze;--et _le Magasin pittoresque_, avril 1869, p. 111. ANNE DE FRANCE (1462-1522), fille de Louis XI, mariée à Pierre de Bourbon, sire de Beaujeu, avait fait «de très belles nourritures (études, éducation), nous dit Brantôme[50], et n'y a guères eu dames et filles de grande maison de son temps qui n'aient appris leçon d'elle, estant alors la maison de Bourbon l'une des grandes et splendides de la chrestienté». [50] _OEuvres complètes_, Recueil des Dames, t. X, p. 273 (Bibliothèque elzévirienne). C'est à Anne de France[51], qu'on attribue cette galante et fameuse comparaison. Une de ses demoiselles d'honneur s'étant laissé séduire, ayant fait «la folie aux garçons», Anne lui reprocha sa faute et lui demanda pourquoi elle avait ainsi manqué à ses devoirs. La jeune fille lui ayant répondu «que l'autre lui avait fait par force», Anne lui fit la comparaison d'«une espée desgaisnée, qui ne se peut jamais engaisner si le fourreau se remue deçà et delà, et ne demeure ferme; ainsi est-il d'une femme en cela, et lui en fit monstrer l'expérience de l'espée devant elle et toutes les dames et filles[52]», de façon à leur donner à toutes une leçon. [51] Et aussi à Élisabeth d'Angleterre et à Catherine II de Russie: cf. BRANTÔME, _ouvrage cité_, t. X, p. 272, note 2. [52] BRANTÔME, _ouvrage cité_, t. X, p. 272; et _Vies des dames illustres_, p. 263 (Paris, Garnier, 1877). PHILIPPE DE GHELDRES ou PHILIPPINE DE GUELDRE (1463-1547), fille d'Adolphe d'Egmont, duc de Gheldres ou Gueldre, et de Catherine de Bourbon; duchesse de Lorraine par son mariage avec le duc René II, devenue veuve en 1508, s'enferma, quelques années plus tard, au couvent de Sainte-Claire de Pont-à-Mousson, où elle vécut dans la plus austère retraite. Elle avait réuni une bibliothèque ascétique, qui, après sa mort, fut conservée par les sœurs de Sainte-Claire, et ne fut dispersée qu'à la Révolution[53]. [53] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _les Femmes bibliophiles de France_, t. II, p. 368. ANNE DE BRETAGNE (1477-1514), femme de Charles VIII, puis de Louis XII, rois de France. Elle avait été «nourrie (élevée) par Mme de Laval, très habile et accomplie dame, qui lui avait esté donnée par le duc François, son père, pour gouvernante[54].» Sa «librairie» (bibliothèque) se composait de treize à quinze cents volumes, dont les livres conquis en Italie par Charles VIII formaient la plus grande partie[55]. [54] BRANTÔME, _ouvrage cité_, t. X, p. 5. [55] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 374. Le _livre d'heures_ d'Anne de Bretagne, manuscrit rempli de miniatures d'une admirable exécution, est universellement connu. On peut considérer ce manuscrit «comme le testament de la miniature française expirante, a dit un juge autorisé[56]. L'image de la vertueuse épouse de Louis XII, coiffée à la mode de son pays, entourée de sa patronne, de sainte Ursule et de sainte Hélène (ou sainte Marguerite?), suffirait pour faire mettre ce volume hors de pair. Cinquante et un grands sujets en couvrent les pages, sans compter une multitude de dessins d'ornement, de fleurs, de fruits, etc.» Ces chefs-d'œuvre, d'abord attribués à Jean Poyet, disciple de Jehan Fouquet, sont, d'après Léopold Delisle, de «Jehan Bourdichon, painctre et valet de chambre de monseigneur (Louis XII)», qui, en vertu d'un mandement daté de Blois, le 14 mars 1508, reçut la somme de mille cinquante livres tournois, pour avoir, dit la reine, «richement et somptueusement historié et enlumyné une grans Heures pour notre usaige et service, où il a mis grant temps[57].» [56] LECOY DE LA MARCHE, _les Manuscrits et la Miniature_, p. 240 (Paris, Quantin, s. d.). [57] Cf. ID., _ouvrage cité_, p. 242. Paul Lacroix reproche à Anne de Bretagne d'avoir eu pour la poésie, et comme toutes les princesses de son temps, un goût très vif, il est vrai, «mais peu délicat... Anne de Bretagne ne montrait pas beaucoup de finesse en ses jugements, pervertis par la mauvaise influence des rimeurs flamands et bourguignons sur la littérature française...[58].» [58] Paul LACROIX (bibliophile Jacob), _Louis XII et Anne de Bretagne_, p. 381-382. «Souvent, continue-t-il, Anne de Bretagne, environnée de ses dames, dans une salle _parée_, accueillait le livre et l'auteur: celui-ci, vêtu du costume doctoral, robe noire à larges manches, le chaperon fourré sur l'épaule, venait s'agenouiller devant la reine, tel qu'il s'était fait peindre par un enlumineur au frontispice du manuscrit qu'il présentait relié en velours avec fermoirs d'argent. Souvent un des poètes valets de chambre demandait une audience pour réciter une pièce de vers en forme de panégyrique sur quelque sujet désigné par la reine, sur quelque question de morale, de religion ou de fantaisie, que la reine avait laissé tomber, à la veillée ou bien à table. C'étaient les seuls instants accordés à la lecture et aux _devis_, le jour aux heures de repas, le soir parmi les travaux de quenouille et d'aiguille; là, un secrétaire lisait, à voix haute et claire, des romans, des histoires, des légendes de saints, des poésies; là, docteurs et savants dissertaient et disputaient, avec toutes les ressources de la dialectique; là, chaque auditeur s'instruisait en se récréant.» Comme si elle eût pressenti l'avènement de notre _féminisme_ moderne, Anne de Bretagne aimait à entendre et à faire l'apologie du sexe féminin, «qu'elle avait pris à cœur d'exalter bien au-dessus de l'autre sexe, en le protégeant contre les attaques des poètes; elle s'était placée à la tête des dames contemporaines, par ses vertus, son esprit et sa force d'âme; elle voulait faire partager à son sexe, dans la société, la position d'estime et de respect qu'elle avait acquise à la Cour; car elle supportait impatiemment l'injustice des hommes à l'égard des femmes. Elle chargea donc ses poètes de venger la _maternelle secte_, et de lui faire des champions bardés et cuirassés de rimes: à ce signal, les représailles commencèrent contre tous les livres satiriques faits en haine ou en mépris des femmes, surtout contre le _Roman de la Rose_, dont le continuateur, Jean de Meung, avait, dit-on, été fustigé par les dames de la cour de Philippe le Bel, à cause de ses audacieuses épigrammes, attentatoires à l'honneur féminin[59].» [59] Paul LACROIX, _ouvrage cité_, p. 386-387. GABRIELLE DE BOURBON (....-1516), fille de Louis Ier, comte de Montpensier, mariée en 1485 avec Louis II, duc de la Trémoille, fut aussi une des femmes les plus distinguées de son temps, et cultiva les lettres avec succès[60]. [60] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 366. LUCRÈCE BORGIA (1480-1519) avait reçu une forte instruction. Elle savait l'espagnol et le français, assez de latin pour lire au Vatican les lettres du pape Alexandre VI, son père; «assez de grec pour s'intéresser à toutes les études philhellènes de la Renaissance. Elle était bonne musicienne. Elle dessinait, et Ferrare a longtemps admiré ses broderies de soie et d'or. Peut-être était-elle poète, s'il faut en croire les _canzone_ espagnoles adressées à Bembo. Gregorovius veut que son instruction religieuse ait été très soignée. Le fait est que, dans l'inventaire de sa bibliothèque (classé dans les archives de Modène), figurent, outre le bréviaire, les psaumes, les évangiles, les _Lettres_ de sainte Catherine de Sienne, _le Miroir de la Foi_, Dante, _la Légende des saints_, et une _Vie du Christ_ en espagnol[61].» [61] _Le Courrier littéraire_, 10 mars 1877, p. 12, article intitulé: _Lucrezia Borgia_, signé: M. CORIOLIS. Un jour Pierre Bembo, le cardinal-poète, ami de l'illustre imprimeur Alde Manuce, de Venise, et familier de sa maison, entra mystérieusement dans le cabinet d'Alde; «il était accompagné d'une femme à la taille imposante, au regard froid et clair, à la chevelure blonde, longue à lui servir de manteau. «Seigneur Aldo, dit cette visiteuse, je n'ai pas voulu passer à Venise sans voir l'un de ses plus grands hommes. Votre imprimerie vous coûte plus qu'elle ne rend, m'a-t-on dit; permettez-moi de m'associer à votre noble entreprise, et de vous aider de mes deniers, de ma protection au besoin.» Alde accepta avec empressement ces offres surprenantes, et partout il célébra les mérites, les vertus immaculées, de cette patronne inattendue. C'était dona Lucrezia Borgia[62]. [62] Cf. Auguste VITU, _Histoire de la typographie_, p. 92 (Paris, Delagrave, 1892). MARGUERITE D'AUTRICHE (1480-1530), fille de Maximilien d'Autriche, gouvernante des Pays-Bas, a laissé un grand nombre de poésies, restées manuscrites. Fiancée d'abord au dauphin de France (Charles VIII), puis à l'infant d'Espagne, Marguerite d'Autriche n'épousa ni l'un ni l'autre, et faillit périr dans une furieuse tempête en se rendant auprès de son second fiancé. C'est au milieu de ce danger suprême qu'elle se composa l'épitaphe maintes fois citée: Ci-gît Margot, la gente demoiselle, _Qu'eut_ deux maris et _si morut_ pucelle. (_et pourtant mourut..._)[63] [63] Cf. François FERTIAULT, _les Amoureux du livre_, p. 341;--et LAROUSSE, _ouvrage cité_. SUZANNE DE BOURBON (1491-1521), fille d'Anne de France et épouse du fameux connétable, dont les biens, après sa trahison, furent confisqués au profit de la couronne, aima les beaux livres, à l'exemple de sa mère[64]. [64] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 363. Bibliophile aussi JACQUETTE DU PESCHIN (XVe siècle), mariée, en 1416, à Bertrand, seigneur de la Tour, comte d'Auvergne et de Boulogne[65]. [65] Cf. MORÉRI, _le Grand Dictionnaire historique_, article Tour, t. X, p. 279 (Paris, Libraires associés, 1759);--et Joannis GUIGARD, _Nouvel Armorial du bibliophile_, t. I, p. 171. III Ernest Quentin-Bauchart, qui a écrit un ouvrage de grand luxe et d'une importance capitale sur les femmes bibliophiles des seizième, dix-septième et dix-huitième siècles, en cite environ cent vingt et examine leurs bibliothèques surtout au point de vue de la reliure, de l'élégance et de la richesse des volumes[66]. Malgré le titre donné par lui à son œuvre, il nous avertit,--et il convient de rappeler ici cet avertissement,--que ce titre n'est pas exact: «Beaucoup de grandes dames ont eu des livres aux siècles passés, mais _presque toutes_ en ignoraient le contenu, et le titre de bibliophile ne leur est guère applicable. Le livre acquis, relié et rangé avec plus ou moins de méthode dans une armoire luxueuse, l'effet était produit, et elles s'en tenaient là[67].» [66] Ernest QUENTIN-BAUCHART, _les Femmes bibliophiles de France_, XVIe, XVIIe et XVIIIe siècles; Paris, Damascène-Morgand, 1886; 2 vol. in-8. Nombreuses planches de reliures aux armes, reproduites en héliogravure. Tirage à 350 exemplaires. J'ai déjà eu et j'aurai encore fréquemment et amplement recours à ce grand ouvrage, ainsi qu'à celui de Joannis GUIGARD, _Nouvel Armorial du bibliophile_, Guide de l'amateur des livres armoriés; Paris, Émile Rondeau, 1890, 2 vol. in-8. Une partie du tome I du _Nouvel Armorial_ (pages 87-210) est tout entière et exclusivement consacrée aux femmes bibliophiles ayant fait apposer leurs armoiries sur leurs livres. [67] Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, Avertissement, t. I, p. 3. Joannis Guigard, dans son _Nouvel Armorial du bibliophile_[68], fait absolument la même remarque et les mêmes réserves: «Ici, le mot _bibliophile_ ne veut pas dire que les personnes auxquelles il s'applique, à quelques exceptions près, aimaient et recherchaient les productions de l'intelligence humaine à la façon des d'Hoym, des La Vallière, des Charles Nodier, et autres bien connus, anciens et modernes: non. Les exigences du temps, les usages de la société d'alors, imposaient en quelque sorte aux femmes, et même aux hommes du monde, la nécessité d'une bibliothèque. On avait des livres moins pour les jouissances de l'esprit que pour les satisfactions de l'œil: c'était un meuble...[69]. C'est pourquoi, conclut notre bibliographe, nous avons étendu le sens du mot, afin de comprendre toutes les femmes dont nous avons trouvé les armes sur des volumes.» [68] Tome I, p. 87. [69] Ces considérations s'appliquent surtout à la société du dix-huitième siècle: voir plus loin, p. 240, une note relative à la bibliothèque de Mlle Le Duc. Cette réserve formulée une fois pour toutes, et que nous prions le lecteur de ne pas oublier, nous continuerons, de notre côté, à donner à ces princesses ou patriciennes ce nom de «bibliophile» que la plupart d'entre elles ne méritent que très imparfaitement. La première mentionnée par Ernest Quentin-Bauchart est LOUISE DE SAVOIE (1476-1531), régente de France et mère de François Ier et de Marguerite d'Angoulême. Auteur de l'_Heptaméron_, des _Marguerites de la Marguerite_, etc., MARGUERITE D'ANGOULÊME (1492-1549), aussi bien que sa nièce MARGUERITE DE SAVOIE (1523-1574), et sa petite-nièce MARGUERITE DE VALOIS (1552?-1615), la reine Margot, première femme de Henri IV, furent toutes trois de grandes amies des livres et des lettres. «Il y eut au seizième siècle les trois Marguerite, remarque Sainte-Beuve[70]: l'une, sœur de François Ier et reine de Navarre, célèbre par son esprit, ses Contes dans le genre de Boccace, et ses vers moins amusants;--l'autre Marguerite, nièce de la précédente, sœur de Henri II, et qui devint duchesse de Savoie, très spirituelle, faisant aussi des vers, et, dans sa jeunesse, la patronne des nouveaux poètes à la Cour;--la troisième Marguerite enfin, nièce et petite-nièce des deux premières, fille de Henri II, première femme de Henri IV, et sœur des derniers Valois.» C'est la _reine Margot_. [70] _Causeries du lundi_, t. VI, p. 182. Au quinzième siècle, nous avons eu une autre Marguerite, à qui nous devons un particulier et célèbre témoignage de son affection pour les lettres; c'est MARGUERITE D'ÉCOSSE (1424-1444), fille du roi d'Écosse Jacques Ier, qui fut la première femme de Louis XI, alors dauphin. Ayant un jour aperçu le poète et chroniqueur Alain Chartier endormi sur une chaise, elle s'approcha de lui et lui donna un baiser, «chose dont s'estant quelques-uns esmerveillés, parce que nature avait enchâssé en lui un bel esprit dans un corps laid,» la princesse leur répondit qu'elle n'avait pas baisé l'homme, mais la bouche d'où sortaient tant de _mots dorés_. Marguerite d'Écosse, qui avait douze ans quand elle épousa Louis XI, et qui mourut à vingt ans, trouva si peu de bonheur dans ce mariage qu'elle s'écria, à ses derniers instants: «Fi de la vie! qu'on ne m'en parle plus!» (LAROUSSE, _ouvrage cité_;--Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_.) Tout en travaillant à quelque ouvrage d'aiguille, Marguerite d'Angoulême, qui avait adopté pour devise une fleur de souci tournée vers le soleil, avec cette légende: _Non inferiora secutus_ (ne s'arrêtant pas aux choses de la terre)[71], avait coutume de garder près d'elle un secrétaire qui lui faisait la lecture (histoire ou poésie le plus souvent), ou à qui elle dictait «quelque méditation qu'il mettait par escrit»[72]. [71] P. L. JACOB, notice en tête de l'_Heptaméron_, p. IV (Paris, Delahaye, 1858). [72] BRANTÔME, _ouvrage cité_, t. X, p. 284, note 2.--Sur Marguerite d'Angoulême, voir Félix FRANK, _Dernier voyage de la reine de Navarre Marguerite d'Angoulême, sœur de François Ier, avec sa fille Jeanne d'Albret, aux bains de Cauterets_ (1549) (Paris, Lechevalier, 1897; in-8, 112 pages). Le même chroniqueur, parlant de la reine Margot, nous dit[73] qu'«elle est fort curieuse de recouvrer tous les beaux livres nouveaux qui se composent, tant en lettres sainctes qu'humaines; et quand elle a entrepris à lire un livre, tant grand et long soit-il, elle ne le laisse ni s'arreste jamais, jusqu'à ce qu'elle en ayt veu la fin, et bien souvent en perd le manger et le dormir. Elle-mesme compose fort, tant en prose qu'en vers...» [73] BRANTÔME, _ouvrage cité_, t. X, p. 247. On sait que la reine Margot possédait parfaitement la langue latine. Lorsque les Polonais, envoyés en ambassade à Paris, «lui vinrent faire la révérence, il y eut l'évesque de Cracovie, le principal et le premier de l'ambassade, qui fist l'harangue pour tous, et en latin, car il estoit un savant et suffisant prélat. La reine lui respondit si pertinemment et si éloquemment, sans s'aider d'aucun truchement, ayant fort bien entendu et compris son harangue, que tous en entrèrent en si grande admiration, que d'une voix il l'appelèrent une seconde Minerve ou déesse d'éloquence[74].» [74] BRANTÔME, _ouvrage cité_, t. X, p. 205. On l'appelait aussi volontiers chez elle _Vénus-Uranie_[75], ce qui lui faisait bien des surnoms. [75] Cf. SAINTE-BEUVE, _ouvrage cité_, t. VI, p. 191. «Elle aimait les beaux discours sur des sujets relevés de philosophie ou de sentiment. Dans ses dernières années, pendant ses dîners et ses soupers, elle avait ordinairement quatre savants hommes près d'elle, auxquels elle proposait, au commencement du repas, quelque thèse plus ou moins sublime ou subtile, et, quand chacun avait parlé pour ou contre et avait épuisé ses raisons, elle intervenait et les remettait aux prises, provoquant et s'attirant à plaisir leur contradiction même...[76]. [76] SAINTE-BEUVE, _ouvrage cité_, t. VI, p. 191. «Ce qu'il faut rappeler à l'honneur de la reine Marguerite, ajoute Sainte-Beuve, dans la conclusion de son article[77], c'est son esprit, c'est son talent de bien dire, c'est ce qu'on lit à son sujet dans les Mémoires du cardinal de Richelieu: «Elle étoit le refuge des hommes de lettres, aimoit à les entendre parler; sa table en étoit toujours environnée, et elle apprit tant en leur conversation qu'elle parloit mieux que femme de son temps et écrivoit plus élégamment que la condition ordinaire de son sexe ne portoit.» [77] _Ouvrage cité_, p. 200. Tallemant des Réaux nous conte que la reine Margot «estoit belle en sa jeunesse, hors qu'elle avoit les joues un peu pendantes et le visage un peu trop long. Jamais, continue-t-il, il n'y eut une personne plus encline à la galanterie. Elle avoit d'une sorte de papier dont les marges estoient toutes pleines de trophées d'amour; c'estoit le papier dont elle se servoit pour ses billets doux. Elle parloit phébus selon la mode de ce temps-là, mais elle avoit beaucoup d'esprit. On a une pièce d'elle qu'elle a intitulée: _La Ruelle mal assortie_, où l'on peut voir quel estoit son style de galanterie. «Elle portoit un grand vertugadin qui avoit des pochettes tout autour, en chascune desquelles elle mettoit une boiste où estoit le cœur d'un de ses amants trespassés; car elle estoit soigneuse, à mesure qu'ils mouroient, d'en faire embaumer le cœur. Ce vertugadin se pendoit tous les soirs à un crochet qui fermoit à cadenas, derrière le dossier de son lict. «Elle devint horriblement grosse, et avec cela elle faisoit faire ses quarrures et ses corps de jupe beaucoup plus larges qu'il ne falloit, et ses manches à proportion... Elle estoit coiffée de cheveux blonds d'un blond de filasse blanchis sur l'herbe; elle avoit été chauve de bonne heure. Pour cela, elle avoit de grands valets de pied blonds que l'on tondoit de temps en temps... «Durant ses repas, elle faisoit tousjours discourir quelque homme de lettres. Pitard, qui a escrit de la morale, estoit à elle, et elle le faisoit parler assez souvent...» Et Tallemant termine son «historiette» de la reine Margot par cette gauloise anecdote: «J'ay ouy faire un conte de la reine Marguerite qui est fort plaisant. Un gentilhomme gascon, nommé Salignac (Jean de Gontaut, baron de Salignac), devint, comme elle estoit encore jeune, esperdument amoureux d'elle, mais elle ne l'aimoit point. Un jour, comme il luy reprochoit son ingratitude: «Or ça, luy dit-elle, que feriez-vous pour me tesmoigner vostre amour? «--Il n'y a rien que je ne fisse, respondit-il. «--Prendriez-vous bien du poison? «--Ouy, pourvu que vous me permissiez d'expirer à vos pieds. «--Je le veux!» reprit-elle. «On prend jour; elle luy fait préparer une bonne médecine fort laxative. Il l'avale, et elle l'enferme dans un cabinet, après lui avoir juré de venir avant que le poison opérast. «Elle le laissa là deux bonnes heures, et la médecine opéra si bien que, quand on luy vint ouvrir, personne ne pouvoit durer autour de luy[78].» [78] TALLEMANT DES RÉAUX, _les Historiettes_, t. I, p. 101-106 (Paris, Techener, 1862). Une aventure analogue survint à l'abbé de Voisenon (1708-1775), devenu passionnément amoureux d'une dame Potron, dont le mari s'avisa, dans un dîner, de servir au galant abbé certain plat copieusement et traîtreusement assaisonné. Dans son roman _Si jeunesse savait_ (chap. XXII), Frédéric Soulié a aussi eu recours à ce «relâchant» procédé. (Cf. B. JULLIEN, _Thèses d'histoire_, p. 472 et suiv., et p. 475, note 1.) ANTOINETTE DE BOURBON-VENDÔME (1494-1583), qui épousa, en 1513, Claude de Lorraine,--fils de René II, le vainqueur de Charles le Téméraire,--premier duc de Guise, et fut la mère de toute cette lignée des Guises qui donna tant de soucis aux derniers Valois, au point que ses petits-fils faillirent enlever la couronne à Henri IV, dont elle était la grand'tante,--Antoinette de Bourbon-Vendôme posséda une bibliothèque nombreuse dont la plupart des volumes avaient été reliés par le célèbre Nicolas Ève. «Quelques-uns portaient sur les plats son chiffre formé d'un V et d'un A enlacés (Antoinette de Vendôme), accompagné d'un autre chiffre composé de deux [Grec: LL] (_Lorraine_)[79].» [79] Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 70-72. Sur cet usage de mettre en lettres grecques ses initiales sur le plat des livres, voir Édouard FOURNIER, _l'Art de la reliure en France_, p. 147 (Paris, Dentu, 1888). MARIE D'ANGLETERRE (1497-1534), troisième femme de Louis XII, roi de France. On cite deux beaux manuscrits qui lui ont appartenu[80]. [80] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 382-383;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 88. ÉLÉONORE D'AUTRICHE (1498?-1558), sœur aînée de Charles-Quint; devenue veuve d'Emmanuel le Grand, roi du Portugal, elle épousa, en 1530, François Ier, veuf de Claude de France[81]. [81] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 387. CLAUDE DE FRANCE (1499-1524), fille aînée de Louis XII, reine de France par son mariage avec François Ier[82]. [82] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 384. DIANE DE POITIERS (1499-1566): c'est à elle que revient en partie l'honneur d'avoir créé la magnifique bibliothèque d'Anet[83]. [83] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 62 et suiv. IV ANNE DE BOLEYN ou BOULEN (1500-1536), dont on connaît la fin tragique, a laissé un exemplaire du Nouveau Testament (édition de Tyndall), conservé aujourd'hui au _British Museum_, et dont les tranches portent son nom en grandes lettres rouges[84]. [84] Cf. Ludovic LALANNE, _Curiosités bibliographiques_, p. 286. Sur les derniers moments de cette princesse, victime des passions du roi d'Angleterre Henri VIII, son mari, voici quelques émouvants détails que Bossuet, dans son _Histoire des variations_[85], a empruntés à l'historien anglais Burnet: [85] Livre VII (_OEuvres choisies_, t. III, p. 13; Paris, Hachette, 1865). «La malheureuse espéra en vain de fléchir le roi, en avouant tout ce qu'il voulait. Cet aveu ne lui sauva que le feu. Henri lui fit couper la tête. Le jour de l'exécution, elle se consola, sur ce qu'elle avait ouï dire que l'exécuteur était fort habile; «et d'ailleurs, ajouta-t-elle, j'ai le cou assez petit». «Au même temps, dit le témoin de sa mort, elle y a porté la main et s'est mise à rire de tout son cœur,» soit par l'ostentation d'une intrépidité outrée, soit que la tête lui eût tourné aux approches de la mort; et il semble, quoi qu'il en soit, que Dieu voulait, quelque affreuse que fût la fin de cette princesse, qu'elle tînt autant du ridicule que du tragique.» Si habile et si endurci que fût l'exécuteur, deux fois, paraît-il, il essaya de lever la hache, et deux fois ses bras défaillirent, car Anne le regardait. «Oh! milord, dit-il à Thomas Cromwell, si elle me regarde toujours, je ne pourrai jamais frapper.» Il fallut qu'Anne détournât sa tête charmante, pour que le bourreau reprît du cœur et accomplît sa fatale mission[86].» [86] Gilbert BURNET, _Histoire de la réformation en Angleterre_, dans LAROUSSE, _ouvrage cité_, article Boulen ou Boleyn. CATHERINE DE MÉDICIS (1519-1589), rassembla, dans sa somptueuse résidence de Saint-Maur-des-Fossés, une excellente bibliothèque, qu'elle mettait à la disposition des savants: Ceste royne d'honneur, de telle race issue, Soigneuse, a fait chercher les livres les plus vieux, Hébreux, grecs et latins, traduits et à traduire, Et par noble despense elle en a fait reluire Son chasteau de Saint-Maur, afin que sans danger Le François fust vainqueur du sçavoir estranger[87]. [87] RONSARD, _le Bocage royal_, dans BRANTÔME, _OEuvres complètes_, t. X, p. 77, note 1. ANNE DE LORRAINE (1522-1568), mariée, en 1540, au prince d'Orange, et, en secondes noces, en 1548, à Philippe, sire de Croy[88]. [88] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 388. FRANÇOISE-RENÉE DE LORRAINE (1522-1602), abbesse de Saint-Pierre de Reims et du royal monastère de Montmartre[89]. [89] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 390. Mme JEAN D'AUBIGNÉ, Catherine de l'Estang, mère d'Agrippa d'Aubigné (1530?-1550?), morte dans sa vingtième année, en donnant le jour à son fils, a laissé un volume, un saint Basile en grec, annoté de sa main, et qui atteste l'érudition de cette jeune femme[90]. [90] Cf. le journal _le Temps_, 21 mai 1914, article signé Samuel Rocheblave. On voit au _British Museum_ une Bible française, imprimée à Lyon en 1566, qui a appartenu à la reine ÉLISABETH D'ANGLETERRE (1533-1606). «Les livres de cette princesse, dit Ludovic Lalanne[91], étaient en général reliés avec un grand luxe, comme le montre l'inventaire de son trésor, fait la seizième année de son règne. On y remarque surtout le _Golden Manual of prayers_, relié en or massif, et qu'elle portait suspendu à sa ceinture par une chaîne d'or. Sur un des côtés est représenté le jugement de Salomon; sur l'autre, le serpent d'airain entouré des Israélites blessés. Ce livre, dans l'inventaire, est évalué à cent cinquante livres sterling.» [91] _Curiosités bibliographiques_, p. 287. L'infortunée JEANNE GREY (1537-1554), morte si jeune et si courageusement, qui lisait le _Phédon_ en grec, et à qui l'amour de l'étude et de la science faisait oublier ses malheurs, a droit aussi d'être mise au nombre des plus nobles amies des livres[92]. [92] Cf. François FERTIAULT, _les Amoureux du livre_, p. 340. DIANE DE FRANCE, duchesse d'Angoulême, fille légitimée de Henri II (1538?-1619)[93]. [93] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 392;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 117. MARIE STUART (1542-1587), «estant en l'aage de treize à quatorze ans, desclama devant le roy Henry, la royne et toute la Cour, publiquement en la salle du Louvre, une oraison en latin qu'elle avoit faicte, soubtenant et deffendant, contre l'opinion commune, qu'il estoit bien seant aux femmes de sçavoir les lettres et arts libéraux. «Songez--c'est toujours Brantôme qui parle[94]--quelle rare chose c'estoit et admirable de voir ceste belle et sçavante reine ainsi orer (parler: d'où pérorer) en latin, qu'elle entendoit et parloit fort bien; car je l'ai vue là; et fust si curieuse de faire faire à Antoine Fochin (Fouquelin), de Chauny en Vermandois (et l'adresse [il dédie cet ouvrage] à ladite reine), une rhétorique en françois, que nous avons encore en lumière... Aussi la faisoit-il bon voir parler, fust aux plus grands ou fust aux plus petits. Et tant qu'elle a esté en France, elle se réservoit tousjours deux heures du jour pour estudier et lire: aussi il n'y avoit guères de sciences humaines qu'elle n'en discourût bien. Surtout elle aimoit la poésie et les poètes, mais sur tous M. de Ronsard[95], M. du Bellay et M. de Maisonfleur, qui ont fait de belles poésies et élégies pour elle, et mesme sur son partement (départ) de la France, que j'ai vu souvent lire à elle-mesme en France et en Écosse, les larmes à l'œil et les souspirs au cœur. [94] _Ouvrage cité_, t. X, p. 112 et suiv. [95] Voyez, dans les _OEuvres_ de Ronsard, la place importante qu'il fait à Marie Stuart. «Elle se mesloit d'estre poëte, et composoit des vers, dont j'en ai vu aucuns (quelques-uns) de beaux et très bien faicts, et nullement ressemblants à ceux qu'on lui a mis à sus avoir faicts (qu'on lui a attribués) sur l'amour du comte Baudouel (Bothwell): ils sont trop grossiers et mal polis pour estre sortis de sa belle boutique. M. de Ronsard estoit bien de mon opinion en cela, ainsi que nous en discourions un jour, et que nous les lisions. Elle en composoit bien de plus beaux et de plus gentils, et promptement, comme je l'ai vue souvent qu'elle se retiroit en son cabinet, et sortoit aussitôt pour nous en monstrer à aucuns honnestes gens que nous estions là[96]. De plus, elle escrivoit fort bien en prose, surtout en lettres, que j'ai vues très belles et très éloquentes et hautes.» [96] Ses poésies ne sont pas arrivées jusqu'à nous. On ne connaît guère d'elle qu'une pièce, très touchante complainte, publiée par Brantôme (t. X, p. 118-120), et quelques stances. (Note de l'édition de Brantôme de la Bibliothèque elzévirienne, t. X, p. 114.) Quant aux célèbres _Adieux de Marie Stuart à la France_: Adieu, plaisant pays de France, O ma patrie La plus chérie, Qui as nourri ma jeune enfance! Adieu, France; adieu, mes beaux jours; Etc., etc., ils ne sont pas de Marie Stuart, mais du polygraphe Meusnier de Querlon (1702-1780). (Cf. STAAFF, _la Littérature française_, t. I, p. 28.) LOUISE DE LORRAINE (1553-1601), fille de Nicolas de Lorraine, comte de Vaudémont et de Marguerite d'Egmont; femme de Henri III, roi de France. Devenue veuve, elle se retira dans son château de Chenonceaux, et y rassembla une bibliothèque composée de livres splendidement reliés[97]. [97] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 615;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 89. La sœur de Henri IV, CATHERINE DE BOURBON (1559-1604), qui épousa Henri II de Lorraine, duc de Bar, avait étudié les langues anciennes, l'hébreu même, et était aussi habile à chanter qu'à toucher du luth. Elle vécut longtemps au château de Pau, et en enrichit notablement la bibliothèque. On y remarquait surtout une belle collection de classiques grecs et latins, de rares manuscrits et quantité de lettres autographes des principaux personnages de l'époque. «La plupart des livres de Catherine de Bourbon, dit le bibliographe Joannis Guigard[98], étaient reliés à la manière de Clovis Ève, qui, bien certainement, a dû travailler pour elle. Beaucoup d'entre eux portaient sur les plats six doubles C entrelacés formant croix, avec une flamme au centre, le tout dans un ovale feuilleté.» [98] _Ouvrage cité_, t. I, p. 119. MARIE DE JARS DE GOURNAY (1565-1645), qui est restée célèbre surtout par son affection et son culte pour Montaigne, dont elle devint la _fille d'alliance_. Elle publia, en 1595, une édition complète des _Essais_, qu'elle réédita quarante ans plus tard[99]. [99] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 395. Tallemant des Réaux a consacré à Mlle de Gournay une de ses amusantes _historiettes_[100], et je ne répéterai pas ici la farce que lui jouèrent, à elle et à Racan, deux endiablés amis de ce poète, et que j'ai contée dans mes _Mystifications littéraires et théâtrales_[101]. Voici, en revanche, une originale et très juste remarque de critique littéraire faite par Mlle de Gournay, et citée et confirmée par Sainte-Beuve: «La vraie touche des esprits, c'est l'examen d'un nouvel auteur; et celui qui le lit se met à l'épreuve plus qu'il ne l'y met[102].» [100] Tome II, p. 151-154 (Paris, Techener, 1862). [101] Pages 152-159 (Paris, Fontemoing, 1913).--Cf. aussi TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. II, p. 158 et suiv. (Racan). [102] Dans SAINTE-BEUVE, _Chateaubriand et son groupe littéraire_, t. II, p. 116, 21e leçon. GABRIELLE D'ESTRÉES, duchesse de Beaufort, maîtresse de Henri IV (1571?-1599)[103]. [103] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 159. MARIE DE MÉDICIS (1573-1642), deuxième femme de Henri IV, donna aussi des preuves de son amour pour les livres[104]. [104] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 610. CATHERINE DE BOURBON, marquise d'Isle, fille de Henri de Bourbon (1574-1594)[105]. [105] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 111. La PRINCESSE DE BOURBON-CONTI, Louise-Marguerite de Lorraine, fille du duc de Guise, dit le Balafré, mariée en secondes noces au maréchal de Bassompierre (1577-1631)[106]. [106] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 116. RENÉE DE LORRAINE, fille de Henri Ier de Lorraine, duc de Guise, assassiné à Blois, abbesse de Saint-Pierre de Reims (1585?-1626)[107]. [107] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 120. La MARQUISE DE RAMBOUILLET (1588-1665) et sa fille JULIE-LUCINE[108] D'ANGENNES, DUCHESSE DE MONTAUSIER (1607-1671): «La marquise lit toute une journée sans la moindre incommodité, et c'est ce qui la divertit le plus,» au dire de Tallemant des Réaux[109], un de ses familiers. [108] «Mme de Montausier s'appelle Julie-Lucine d'Angennes. Lucine est le nom d'une sainte de la maison des Savelles. Sa mère et sa grand'mère l'ont porté toutes les deux; et, pour l'ordinaire, dans cette maison, on adjoustoit tousjours ce nom à celuy qu'on donnoit aux filles en les baptisant.» (TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. II, p. 286.) [109] _Ouvrage cité_, t. II, p. 285. «Elle a toujours aimé les belles choses, écrit-il encore[110], et elle alloit apprendre le latin, seulement pour lire Virgile, quand une maladie l'en empescha. Depuis, elle n'y a pas songé, et s'est contentée de l'espagnol. C'est une personne habile en toutes choses. Elle fut elle-mesme l'architecte de l'hostel de Rambouillet, qui estoit la maison de son père... [110] _Ouvrage cité_, t. II, p. 261. «Il n'y a pas au monde de personne moins intéressée. Elle dit qu'elle ne conçoit pas de plus grand plaisir au monde que d'envoyer de l'argent aux gens, sans qu'ils puissent sçavoir d'où il vient. Elle passe bien plus avant que ceux qui disent que donner est un plaisir de roy, car elle dit que c'est un plaisir de Dieu[111].» [111] _Ouvrage cité_, t. II, p. 264. Une particularité de Mme de Rambouillet, particularité assez rare à son époque, c'était d'apprécier les charmes de la campagne, d'aimer la nature: «Personne n'a jamais tant aimé à se promener et à considérer les beaux endroits du paysage de Paris[112].» [112] TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. II, p. 280. Ajoutons qu'elle se montrait, non seulement très charitable et généreuse, comme on vient de le voir, mais de la plus grande bienveillance, d'une extrême indulgence, envers tous: «Personne ne fut plus aimé de ses gens ni des gens de ses amis, que Mme de Rambouillet[113]». [113] ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 443. L'hôtel de Rambouillet fut, comme on le sait, le rendez-vous de quantité d'écrivains; il fut aussi le quartier général des _Précieuses_. C'est de l'hôtel de Rambouillet que sortit _la Guirlande de Julie_, ce très curieux et superbe manuscrit, qui appartient aujourd'hui à Mme la duchesse d'Uzès. Voici quelques détails sur la formation et la genèse de ce chef-d'œuvre. «Le marquis de Montausier, qui se préparait à partir pour l'armée avec le maréchal de Guébriand (1641), avait imaginé une galanterie en l'honneur de Julie d'Angennes, qui lui avait promis de l'épouser dès qu'il aurait abjuré la religion protestante. Il fit peindre sur vélin, par Robert, excellent miniaturiste, une suite de belles fleurs, que Julie avait choisies elle-même, et que les poètes de l'hôtel de Rambouillet faisaient parler en vers pour célébrer ses grâces, ses talents et ses vertus. Ces pièces de poésie, écrites de la main du fameux Jarry au-dessous des fleurs, étaient signées par le marquis de Montausier, Arnauld d'Andilly père et fils, Conrart, Mme de Scudéry, Malleville, Colletet, les trois Habert, Arnauld de Corbeville, Tallemant des Réaux, Gombauld, Godeau, le marquis de Briot, Pinchesne, Desmarets. Deux pièces ne portaient pas de nom: on les attribua toutes deux au grand Corneille, et Voiture, que Montausier ne pouvait souffrir, fut seul excepté dans l'hommage collectif que les amis de Mme de Rambouillet rendaient à sa fille. Ce précieux recueil avait pour titre: _La Guirlande de Julie. Pour Mademoiselle de Rambouillet, Julie-Lucine d'Angennes_. «Montausier ne quitta pas sans regret Julie d'Angennes, en lui laissant ce beau livre relié en maroquin et couvert de ses chiffres en or: il fut fait prisonnier et ne recouvra la liberté qu'au bout de dix mois. De retour en France, il s'empressa d'embrasser la religion catholique, et se maria enfin, le 4 juillet 1645, à l'âge de trente-cinq ans, avec Mlle de Rambouillet, qui en avait trente-huit. «Ce mariage, dit Rœderer, fut la première cause qui mit fin à ce qu'on peut appeler _le règne de l'hôtel de Rambouillet_[114].» [114] Paul LACROIX, _XVIIe Siècle_, Lettres, Sciences et Arts, p. 184. Voir aussi TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. II, p. 294.--La _Gazette des beaux-arts_ a récemment publié un article très détaillé sur la célèbre _Guirlande de Julie_; voici un résumé de cet article, emprunté au _Mémorial de la librairie française_ (2 juillet 1914, p. 418-419): «On connaît trois copies manuscrites de _la Guirlande de Julie_, toutes datées de 1641. La plus intéressante, sur vélin in-folio, appartient aujourd'hui à Mme la duchesse d'Uzès. C'est le manuscrit définitif et complet offert à la belle Julie. M. C. Gabillot vient d'en donner, dans la _Gazette des beaux-arts_, l'analyse détaillée et des reproductions. Il se compose de huit feuillets préliminaires, portant les titres et la miniature qui représente la guirlande, et de quatre-vingt-dix feuillets, dont chacun contient une des vingt-neuf fleurs ou l'un des soixante et un madrigaux dont est formée cette double guirlande, à la fois picturale et poétique. Le texte est dû au plus fameux des calligraphes français, Nicolas Jarry, écrivain et noteur de la musique du roi; il imita avec une perfection incomparable les caractères d'imprimerie. On a soutenu que les fleurs elles-mêmes étaient aussi l'œuvre de ce même calligraphe; mais la main d'un botaniste et d'un peintre de métier s'y reconnaît sans peine. Nicolas Robert, qui dessinait des plantes pour les brodeurs, a exécuté les miniatures de la «guirlande»; elles lui valurent une telle réputation que Gaston d'Orléans le prit à son service dans ses jardins de Blois, et qu'ensuite Louis XIV lui fit achever le recueil de dessins commencé pour Monsieur. Montausier avait confié le soin de la reliure à l'un des maîtres du temps, surnommé le Gascon, qui, de son vrai nom, s'appelait sans doute Florimond Badier. C'est une reliure doublée, en maroquin rouge du Levant, ornée sur les plats et les gardes d'un semis de J. L., initiales de Julie. Après la mort des Montausier, le manuscrit passa aux mains de leur fille, la duchesse de Crussol d'Uzès, puis à Moreau, à Gaignières et à l'abbé de Rothelin, qui en fit présent à M. de Boze. En 1784, il figurait dans la vente du duc de La Vallière; la duchesse de Châtillon le racheta, et, depuis cette époque, il n'est plus sorti de la maison d'Uzès. HENRIETTE DE LORRAINE, fille de Charles de Lorraine, comte d'Harcourt, abbesse de Notre-Dame de Soissons (1592-1669)[115]. [115] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 120. CHARLOTTE-MARGUERITE DE MONTMORENCY, princesse de Bourbon et de Condé, mère du Grand Condé (1594-1650)[116]. [116] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 396;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 113. Mme SÉGUIER, Madeleine Fabri, femme du chancelier Pierre Séguier (1597-1683). Veuve en 1672, Mme Séguier conserva religieusement la magnifique bibliothèque rassemblée par son défunt mari, et la rendit plus riche et plus belle encore[117]. [117] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 200. Autres bibliophiles: MARIE D'ALBRET (XVIe siècle), femme de Charles de Clèves, comte de Nevers, mort en 1521[118]. [118] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 383. ÉLISABETH CRABBE, mère du grand anatomiste Vésale (XVIe siècle). Vésale a toujours parlé de sa mère avec attendrissement et grand éloge. Elle aimait les livres, et était parvenue à conserver la bibliothèque de famille, les ouvrages de médecine du père et du grand-père de Vésale, «au prix des plus grands sacrifices»[119]. [119] Cf. _la Chronique médicale_, 1er mai 1914, p. 262. La COMTESSE DE FROULAY DE TESSÉ, Marie d'Escoubleau de Sourdis (XVIe siècle)[120]. [120] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 162. ANNE DE GRAVILLE (XVIe siècle), belle-mère d'Honoré d'Urfé (1568-1625), auteur de _l'Astrée_, posséda un grand nombre de manuscrits. En outre, elle arrangea, d'après un vieux roman en prose, le poème d'Archita et Palamon, qui fit sa réputation[121]. [121] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 386. La COMTESSE DE LA ROCHEFOUCAULD, Anne de Polignac (XVIe siècle)[122]. [122] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 170;--et Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 59. CLAUDE DE LA TOUR (XVIe siècle), fille aînée de François de la Tour, vicomte de Turenne, mariée, en 1535, à Just de Tournon, comte de Roussillon. Elle témoigna un grand courage au siège de Tournon, qu'elle fit lever aux huguenots révoltés. Le roi Charles IX la donna pour dame d'honneur à sa sœur Marguerite de Valois, reine de Navarre. Il est longuement question d'elle et de ses filles dans les _Mémoires_ de cette princesse, dont elle partageait la passion pour les lettres[123]. [123] Cf. MORÉRI, _ouvrage cité_, t. X, p. 285;--et Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 393, qui date le mariage de Claude de la Tour de 1555, au lieu de 1535. MARIE DES MARQUETS (XVIe siècle), amie de Ronsard. «Il est probable que Marie des Marquets est cette Marie du deuxième livre des _Amours_, qui fit oublier Cassandre au poète infidèle, et qui fut elle-même trop vite oubliée pour Sinope[124]». [124] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 389. CATHERINE DE ou DU SOLEIL, fille de François Mandelot, seigneur de Passé, gouverneur du Lyonnais en 1571, de la famille du célèbre bibliophile Grolier (XVIe siècle)[125]. [125] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 392;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 156. ANNE DE THOU, abbesse de Saint-Antoine des Champs, à Paris, fille d'Augustin de Thou, président au Parlement de Paris, mort en 1544 (XVIe siècle)[126]. [126] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 203. V Nous voici arrivés au dix-septième siècle, et, avec les hôtes de l'hôtel de Rambouillet dont nous venons de parler, nous rencontrons, parmi les amies des livres, la reine ANNE D'AUTRICHE (1602-1666)[127]. [127] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 189. La DUCHESSE D'AIGUILLON (1605-1675), Marie-Madeleine de Vignerot, nièce du cardinal de Richelieu, mariée en premières noces à M. de Combalet, sur laquelle cette mauvaise langue de Tallemant des Réaux conte plus d'une bonne histoire, figure aussi au nombre des femmes bibliophiles. On avait fait courir le bruit que le mariage de Mlle de Vignerot avec Combalet n'avait point été consommé, et le poète Dulot composa cette anagramme sur cette prétendue virginité: MARIE DE VIGNEROT, _Vierge de ton mari_[128]. [128] Cf. TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. II, p. 29. «On a fort mesdit de son oncle et d'elle, rapporte encore Tallemant[129]; il aimoit les femmes et craignoit le scandale. Sa nièce estoit belle, et on ne pouvoit trouver estrange qu'il vescut familièrement avec elle. Effectivement, elle en usoit peu modestement;» etc. [129] _Ouvrage cité_, t. II, p. 29. CHRISTINE DE FRANCE, fille de Henri IV et de Marie de Médicis, femme de Victor-Amédée Ier, duc de Savoie (1606-1663)[130]. [130] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 402. MADELEINE DE SCUDÉRY (1607-1701), toute jeune, avait déjà la passion de la lecture, de la lecture des romans principalement, et il lui survint à ce propos une aventure qu'elle conta depuis à Tallemant des Réaux, et que celui-ci nous a transmise. Un moine feuillant, qui était le confesseur de la jeune fille, lui enleva un jour un roman «où elle prenoit bien du plaisir», et offrit de lui prêter un livre plus utile. Au lieu de ce livre si utile et profitable, il lui apporta un autre roman moins honnête, et où, par précautions, il y avait «des marques» aux endroits les plus scabreux[131]. La jeune Madeleine ne manqua pas, la première fois qu'elle revit le moine, de lui reprocher sa conduite et de lui montrer ces marques. [131] «Une fille (Mlle Armenauld) disoit que quand elle trouvoit des ordures dans un livre, elle les marquoit pour ne pas les lire.» (TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, Suite des Naifvetez, bons mots, etc., t. VI, p. 330.) «Ah! elles ne sont pas de moi! protesta aussitôt le saint homme. Elles viennent d'une personne à qui j'ai pris ce livre.» Quelques jours plus tard, le moine confesseur rendit à sa pénitente le roman qu'il lui avait enlevé, et dont il avait eu apparemment le loisir de prendre connaissance, et il dit à la mère de Mlle de Scudéry qu'elle pouvait laisser lire à sa fille tout ce que voudrait celle-ci, que Madeleine avait l'esprit trop bien fait pour jamais se le laisser gâter, et qu'il n'y avait pas de lectures dangereuses pour elle[132]. [132] Cf. TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. V, p. 390. On sait que, par modestie, ou à cause de la réputation de son frère, dont les livres se vendaient bien, Mlle de Scudéry publia ses premiers et volumineux ouvrages, _Ibrahim_ ou _l'Illustre Bassa_ (1641, 4 vol.), _Artamène_ ou _le Grand Cyrus_ (1649-1653, 10 vol.), _Clélie, histoire romaine_ (1656, 10 vol.), sous le nom dudit frère, qui avait, lui, moins de talent qu'elle, mais acceptait de bon cœur cette substitution[133]. [133] Cf. TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. V, p. 395 et suiv. N'oublions pas que des lettrés, des gens de goût et d'un esprit délicat, comme Huet, l'évêque d'Avranches, Ménage, Mascaron, etc., proclamèrent que le _Cyrus_ et _Clélie_ étaient des chefs-d'œuvre, et qu'ils se complaisaient dans la lecture de ces interminables romans, si délaissés et oubliés aujourd'hui. Mascaron plaçait même «très souvent» Mlle de Scudéry à côté de saint Augustin et de saint Bernard, et la citait volontiers dans ses sermons. Ajoutons que Mlle de Scudéry tenait chez elle, à Paris, le samedi, une réunion littéraire qui fut célèbre, et continuait les traditions de l'hôtel de Rambouillet[134]. [134] Le duc de Montausier, gendre de la marquise de Rambouillet, était un des habitués des samedis de Mlle de Scudéry. (Cf. TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. II, p. 302;--LAROUSSE, _ouvrage cité_;--Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_.) Une particularité bien digne d'intéresser tous les amis des livres, c'est que c'est à l'occasion de Mlle de Scudéry qu'il est pour la première fois question (on le suppose du moins) de CABINETS DE LECTURE en France. Voici ce qu'Eugène Muller (1823-1914) relève dans ses _Curiosités historiques et littéraires_[135]: «La première idée de la location des livres est signalée ainsi par Jacquette (ou Jaquette) Guillaume, femme de lettres du dix-septième siècle, dans son histoire des _Dames illustres_, publiée en 1665: «Ne voyons-nous pas que les livres de Mlle de Scudéry sont de plus grande estime et se débitent à de plus grands prix que ceux des plus renommés historiens? Son libraire a taxé à une demi-pistole (cinq francs de notre monnaie actuelle) _pour lire seulement_ une histoire de cette illustre savante.» [135] Pages 203-204 (Paris, Delagrave, 1897). «M. Édouard Fournier, qui n'a pas connu cette particularité de l'histoire littéraire du dix-septième siècle, continue Eugène Muller, a parlé, lui aussi, dans son _Vieux-Neuf_, de la location des livres par les libraires. Il n'en fait remonter l'origine qu'au dix-huitième siècle, à l'époque où les romans de l'abbé Prévost et de Jean-Jacques Rousseau passionnaient tous les esprits.» HENRIETTE-MARIE DE FRANCE, aussi fille de Henri IV et de Marie de Médicis, épouse du roi d'Angleterre Charles Ier (1609-1669)[136]. [136] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 403. La DUCHESSE DE MONTBAZON, princesse de Guéméné (vers 1610-1657)[137]. [137] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 184. C'est elle qui inspira à M. de Rancé une si vive passion, et qui a donné lieu à la légende fameuse, contée par Saint-Simon[138]. [138] _Mémoires_, t. I, p. 375 (Paris, Hachette, 1871). Tallemant a consacré à Mme de Montbazon une de ses plus savoureuses _Historiettes_ (t. IV, p. 4-14), dont il m'est malheureusement impossible de citer les plus saillants passages: «... Vous verrez si elle a fait mentir le proverbe que bon chien chasse de race. C'estoit une des plus belles personnes qu'on pust voir, et ce fut un grand ornement à la Cour; elle desfaisoit toutes les autres au bal... Dans la grande jeunesse où elle estoit quand elle parut à la Cour, elle disoit qu'on n'estoit bon à rien à trente ans, et qu'elle vouloit qu'on la jetast dans la rivière quand elle les auroit. Je vous laisse à penser si elle manqua de galants... M. d'Hocquincourt, ayant gaigné une femme de chambre, se mit un soir sous le lict de la belle... Quand elle se sentoit grosse, après qu'elle eust eu assez d'enfans, elle couroit au grand trot en carrosse partout Paris,» etc. «La princesse de Guéméné, morte duchesse de Montbazon en 1657, mère de M. de Soubise, était cette belle Mme de Montbazon dont on a fait ce conte, qui a trouvé croyance, que l'abbé de Rancé, depuis ce célèbre abbé de la Trappe, en était fort amoureux et bien traité; qu'il la quitta à Paris se portant fort bien, pour aller faire un tour à la campagne; que, bientôt après, y ayant appris qu'elle était tombée malade, il était accouru, et qu'étant entré brusquement dans son appartement, le premier objet qui y était tombé sous ses yeux avait été sa tête, que les chirurgiens, en l'ouvrant, avaient séparée; qu'il n'avait appris sa mort que par là; et que la surprise et l'horreur de ce spectacle joint à la douleur d'un homme passionné et heureux, l'avait converti, jeté dans la retraite, et de là dans l'ordre de Saint-Bernard et dans sa réforme. Il n'y a rien de vrai en cela, mais seulement des choses qui ont donné cours à cette fiction. Je l'ai demandé franchement à M. de la Trappe... et voici ce que j'en ai appris. «Il était intimement de ses amis, ne bougeait de l'hôtel de Montbazon... Mme de Montbazon mourut de la rougeole en fort peu de jours. M. de Rancé était auprès d'elle, ne la quitta point, lui vit recevoir les sacrements, et fut présent à sa mort. La vérité est que, déjà touché et tiraillé entre Dieu et le monde, méditant déjà depuis quelque temps une retraite, les réflexions que cette mort si prompte firent faire à son cœur et à son esprit achevèrent de le déterminer, et peu après il s'en alla en sa maison de Véret en Touraine, qui fut le commencement de sa séparation du monde.» La DUCHESSE DE LONGUEVILLE, Anne-Geneviève de Bourbon, fille de Henri II de Bourbon, prince de Condé, et sœur du Grand Condé (1619-1679). Son esprit, sa beauté, son goût pour les choses intellectuelles, l'influence qu'elle exerça sur la société du dix-septième siècle ont marqué sa place parmi les femmes célèbres de son époque[139], ce qui ne l'empêcha pas de mener longtemps une vie des plus scandaleuses. [139] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 396. «La très jolie madame de Longueville, la future reine de la Fronde», entretenait avec ses deux frères, le Grand Condé, «figure crochue... très sinistre figure d'oiseau de proie, la plus bizarre du siècle,» et le prince de Conti, «prêtre et bossu[140]», des relations incestueuses. «Les deux garçons naquirent amoureux de leur sœur, écrit Michelet[141]. Condé, éperdument, jusqu'à lui passer tout, adopter ses amants, puis jusqu'à la haïr. Conti, sottement, servilement, se faisant son jouet, ne voyant rien que ce qu'elle lui faisait voir, dupé, moqué par ses rivaux.» [140] MICHELET, _Histoire de France_, t. XIV, p. 226-227 (Paris, Marpon et Flammarion, 1879). [141] _Ibid._ On trouve trace, dans les _Rapports inédits_ du lieutenant de police René d'Argenson[142], d'une aventurière surnommée _la Princesse_, qui se prétendait fille du prince de Condé et de sa sœur la duchesse de Longueville. [142] Pages 54, 252, 290, etc. (Bibliothèque elzévirienne, Paris, Plon, 1891). La VICOMTESSE DE TURENNE, Charlotte de Caumont de la Force de la Tour (1623?-1666)[143]. [143] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 172. C'était la femme du maréchal de France et grand homme de guerre. CHRISTINE DE SUÈDE (1626-1689) estimait que «la lecture est une partie du devoir de l'honnête homme». Elle écrivait à Bayle: «Je vous impose pour pénitence qu'à commencer du mois prochain vous m'enverrez les livres nouveaux, en toutes langues, sur toutes sortes de sujets; je n'excepte ni romans ni satires; surtout s'il y a des livres de chimie, faites-m'en part au plus tôt.» Elle adressait à Heinsius les mêmes recommandations: «Envoyez-moi les catalogues des livres que vous avez achetés et des manuscrits que vous avez fait copier, et la dépense pour vous et pour les achats. Je vous ferai tout payer[144]...» [144] Cf. François FERTIAULT, _les Amoureux du livre_, p. 190. On sait quelles étaient les mœurs plus que libres de la reine Christine; on sait aussi quels étaient ses livres favoris, outre «les livres de chimie», dont elle vient de parler. Elle professait, nous apprend Gui Patin[145], un vrai culte pour Pétrone, «qu'elle mettait au-dessus de tous les auteurs latins», et, dans la fleur même de sa jeunesse, à vingt-trois ans, «elle savait Martial tout entier par cœur». [145] Cf. Adolphe RETTÉ, _la Revue_ (ancienne _Revue des Revues_), 1er octobre 1904, p. 349;--et Gabriel PEIGNOT, _Manuel du bibliophile_, t. I, p. 131. «Saumaise étant à Stockholm, et au lit, malade de la goutte, lisait, pour se désennuyer, _le Moyen de parvenir_; la reine Christine entre brusquement chez lui sans se faire annoncer: il n'a que le temps de cacher sous sa couverture le petit livre honteux (_perfacetum quidem, at subturpiculum libellum_). Mais Christine, qui voit tout, l'a vu; elle va prendre hardiment le livre jusque sous le drap, et, l'ouvrant, se met à le parcourir de l'œil avec sourire; puis, appelant la belle de Sparre, sa fille d'honneur favorite, elle la force de lui lire tout haut certains endroits qu'elle lui indique, et qui couvrent ce noble et jeune front d'embarras et de rougeur, aux grands éclats de rire de tous les assistants. Huet tenait l'histoire de la bouche de Saumaise, et il la raconte en ses mémoires[146].» [146] SAINTE-BEUVE. _Tableau de la poésie française au seizième siècle_, p. 272, note 3. Ajoutons que «Christine de Suède avait la manie d'écrire sur ses livres. Il y a à la bibliothèque du Collège romain, à Rome, plusieurs livres annotés de sa main, entre autres, un Quinte-Curce, un Sénèque»[147], etc. [147] Ludovic LALANNE, _Curiosités bibliographiques_, p. 347. NINON DE L'ENCLOS (1615-1705), qui fut, sinon une amie de la reine de Suède, du moins une de ses relations,--Christine ne manqua pas de l'aller voir lors de son voyage à Paris, en 1654,--mérite de ne pas être oubliée ici. Voltaire lui ayant été présenté par son parrain, l'abbé de Châteauneuf, un des intimes de Ninon, jadis adorateur et familier de Mme Arouet, elle lui légua par testament deux mille francs «pour acheter des livres»[148]. [148] CONDORCET, _Vie de Voltaire_, au début. (_OEuvres complètes de Voltaire_, t. I, p. 1, édition du journal _le Siècle_.) Ce legs n'empêcha pas Voltaire de juger plus tard très cavalièrement et indiscrètement sa bienfaitrice. Dans son ouvrage _la Défense de mon oncle_[149], il écrit: «Personne n'est plus en état que moi de rendre compte des dernières années de Mlle de l'Enclos... Je suis son légataire; je l'ai vue les dernières années de sa vie (c'est-à-dire à plus de quatre-vingts ans), elle était sèche comme une momie. Il est vrai qu'on lui présenta l'abbé Gédoyn... J'allais quelquefois chez elle avec cet abbé, qui n'avait d'autre maison que la nôtre. Il était fort éloigné de sentir des désirs pour une décrépite ridée qui n'avait sur les os qu'une peau jaune tirant sur le noir. [149] Chap. VIII, D'Abraham et de Ninon de l'Enclos (t. V, p. 326-327, même édition). Voir aussi l'opuscule de Voltaire, _Sur Mademoiselle de l'Enclos_ (t. IV, p. 717-719, même édition). «Ce n'était point l'abbé Gédoyn à qui on imputait cette folie; c'était à l'abbé de Châteauneuf, frère de celui qui avait été ambassadeur à Constantinople. Châteauneuf avait eu, en effet, la fantaisie de coucher avec elle vingt ans auparavant. Elle était encore assez belle à l'âge de près de soixante années. Elle lui donna, en riant, un rendez-vous pour un certain jour du mois. «Et pourquoi ce jour-là plutôt qu'un autre? lui dit l'abbé de Châteauneuf. «--C'est que j'aurai alors soixante ans juste», lui dit-elle. «Voilà la vérité de cette historiette, qui a tant couru, et que l'abbé de Châteauneuf, mon bon parrain, à qui je dois mon baptême, m'a racontée souvent dans mon enfance _pour me former l'esprit et le cœur_.» Certains des amis de Ninon, Charleval et Miossens, entre autres, avaient «fort contribué à la rendre libertine (incrédule, libre penseuse, comme nous dirions aujourd'hui). Elle dit qu'il n'y a point de mal à faire ce qu'elle fait, fait profession de ne rien croire, se vante d'avoir esté fort ferme en une maladie où elle se vit à l'extrémité, et de n'avoir que par bienséance reçu tous ses sacrements. Ils luy ont fait prendre un certain air de dire et de trancher les choses en philosophe; elle ne lit que Montaigne, et décide de tout à sa fantaisie[150]». [150] TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. IV, p. 420. C'est Ninon, «la moderne Leontium», comme l'appelait Saint-Évremond[151], qui disait «qu'elle rendait grâces à Dieu tous les soirs de son esprit, et le priait tous les matins de la préserver des sottises de son cœur[152]». [151] L'ancienne Leontium avait été disciple et amie d'Épicure: cf. Saint-Évremond, _OEuvres choisies_, p. 430, édition Gidel.--Voir aussi ci-dessus, p. 30, note. [152] DES MAIZEAUX, _Vie de Saint-Évremond_, p. 199 (La Haye, Abraham Troyel, 1711). Encore un joli mot d'elle, et en même temps une très judicieuse constatation: «La joie de l'esprit en marque la force[153]». [153] Dans SAINTE-BEUVE, _Premiers lundis_, t. II, p. 295. C'est plutôt la lecture que les livres mêmes qu'a aimée et que recommande et prône, en maint endroit de ses lettres, Mme DE SÉVIGNÉ (1626-1696), et toujours de la plus charmante façon, et souvent avec de fins aperçus et les plus sagaces remarques. «Aimer à lire... la jolie, l'heureuse disposition! On est au-dessus de l'ennui et de l'oisiveté, deux vilaines bêtes[154].» [154] Lettre du mercredi 14 décembre 1689; t. IX, p. 353 (édition des Grands Écrivains). «Qu'on est heureux d'aimer à lire![155].» [155] Lettre du mercredi 15 juin 1689; t. IX, p. 84. «Je plains ceux qui n'aiment point à lire. Votre enfant est de ce nombre jusqu'ici; mais j'espère, comme vous, que, quand il verra ce que c'est que l'ignorance à un homme de guerre, qui a tant à lire des grandes actions des autres, il voudra les connaître, et ne laissera pas cet endroit imparfait. La lecture apprend aussi, ce me semble, à écrire...[156]» [156] Lettre du dimanche 17 juillet 1689; t. IX, p. 120. «Je poursuis cette _Morale_ de Nicole, que je trouve délicieuse... Je trouve ce livre admirable. Personne n'a écrit comme ces messieurs (de Port-Royal), car je mets Pascal de moitié à tout ce qui est beau... Nous lisons aussi l'histoire de France depuis le roi Jean; je veux la débrouiller dans ma tête, au moins autant que l'histoire romaine, où je n'ai ni parents ni amis; encore trouve-t-on ici des noms de connaissance. Enfin, tant que nous aurons des livres, nous ne nous pendrons pas[157].» [157] Lettre du mercredi 23 septembre 1671; t. II, p. 369. «...Pour Pauline, cette dévoreuse de livres, j'aime mieux qu'elle en avale de mauvais, que de ne point aimer à lire; les romans, les comédies, les Voiture, les Sarrasin, tout cela est bientôt épuisé: a-t-elle tâté de Lucien? est-elle à portée des _Petites Lettres_? Après il faut l'histoire; si on a besoin de lui pincer le nez pour lui faire avaler, je la plains. Pour les beaux livres de dévotion, si elle ne les aime pas, tant pis pour elle; car nous ne savons que trop que même sans dévotion on les trouve charmants. A l'égard de la morale, comme elle n'en ferait pas un si bon usage que vous, je ne voudrais point du tout qu'elle mît son petit nez, ni dans Montaigne, ni dans Charron, ni dans les autres de cette sorte; il est bien matin pour elle. La vraie morale de son âge, c'est celle qu'on apprend dans les bonnes conversations, dans les fables, dans les histoires, par les exemples; je crois que c'est assez[158].» [158] Lettre du dimanche 15 janvier 1690; t. IX, p. 413. «...Je ne veux rien dire sur les goûts de Pauline (pour les romans); je les ai eus avec tant d'autres (personnes), qui valent mieux que moi, que je n'ai qu'à me taire. Il y a des exemples des bons et des mauvais effets de ces sortes de lectures: vous ne les aimez pas, vous avez fort bien réussi; je les aimais, je n'ai pas trop mal couru ma carrière: _tout est sain aux sains_, comme vous dites. Pour moi, qui voulais m'appuyer dans mon goût, je trouvais qu'un jeune homme devenait généreux et brave en voyant mes héros, et qu'une fille devenait honnête et sage en lisant _Cléopâtre_. Quelquefois il y en a qui prennent un peu les choses de travers; mais elles ne feraient peut-être guère mieux, quand elles ne sauraient pas lire: ce qui est essentiel, c'est d'avoir l'esprit bien fait; on n'est pas aisée à gâter; Mme de la Fayette en est encore un exemple. Cependant il est très assuré, très vrai, très certain que M. Nicole vaut mieux; vous en êtes charmée: c'est son éloge; ce que j'en ai lu chez Mme de Coulanges me persuade aisément qu'il vous doit plaire... Cela supposé, je vous conjure, ma chère Pauline, de ne pas tant laisser tourner votre esprit du côté des choses frivoles, que vous n'en conserviez pour les solides, et pour les histoires; autrement votre goût aurait les pâles couleurs[159].» [159] Lettre du mercredi 16 novembre 1689; t. IX, p. 314-316. La DUCHESSE DE MONTPENSIER, Anne-Marie-Louise d'Orléans, la GRANDE MADEMOISELLE (1627-1693), une des plus originales figures du dix-septième siècle, est digne d'être inscrite aussi au nombre des amies des livres. Ce qui lui a manqué, selon la remarque de Sainte-Beuve[160], c'est le goût, c'est la grâce, c'est la justesse: «il y a du pêle-mêle dans ses admirations: elle prise fort Corneille, elle fait jouer chez elle _le Tartuffe_, mais elle reçoit aussi l'abbé Cotin. «J'aime les vers, de quelque nature qu'ils soient», déclarait-elle. Elle se recommande à nous principalement par ses _Mémoires_, «Mémoires véridiques et fidèles, et dans lesquels elle dit tout sur elle-même ou sur les autres, naïvement, hautement, et selon qu'il lui vient à l'esprit[161].» [160] _Causeries du lundi_, t. III, p. 524. [161] SAINTE-BEUVE, _ouvrage cité_, t. III, p. 525. On raconte--n'est-ce pas ce terrible bavard de Tallemant des Réaux?[162]--que le carrosse de Mlle de Montpensier se trouvant pris un jour dans un embarras de voitures, rue Saint-Honoré, un mendiant profita de l'occasion pour venir gémir à la portière: «Ayez pitié d'un pauvre homme... d'un pauvre homme qui a perdu toutes les joies de ce monde? --Il est donc eunuque?» demanda la Grande Mademoiselle. [162] C'est à lui que Lorédan LARCHEY (_l'Esprit de tout le monde_, t. II, p. 263) dit emprunter cette «naïveté». Mme JEAN DESMARETS, Marie Colbert, sœur du ministre J.-B. Colbert (1627?-1703)[163]. [163] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 148. Une autre sœur de Colbert, CATHERINE COLBERT (XVIIe siècle), figure aussi parmi les femmes bibliophiles[164]. [164] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 408. La PRINCESSE DE CONDÉ, Claire-Clémence de Maillé, femme du Grand Gondé (1628?-1694)[165]. [165] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 112;--et M.-N. BOUILLET, _Atlas universel d'histoire et de géographie_, p. 520. ÉLISABETH DE MELUN, prieure des Dominicaines de Montargis (1630?-1717)[166]. [166] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 183. Mme DE MAINTENON (1635-1719) n'a jamais eu la pensée de former une bibliothèque proprement dite; elle avait d'autres préoccupations. «Les rares volumes qui lui ont appartenu, écrit Ernest Quentin-Bauchart[167], présentent du moins le grand avantage d'avoir été reliés par un des maîtres du temps, Du Seuil, dont la facture un peu lourde, mais noble, se trouve toujours en harmonie parfaite avec le caractère des ouvrages qui lui étaient confiés.» [167] _Ouvrage cité_, t. I, p. 277. LOUISE-CHARLOTTE DE LA TOUR, demoiselle de Bouillon (1638-1683)[168]. [168] Cf. MORÉRI, _ouvrage cité_, t. X, p. 281;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 171. MARIE-THÉRÈSE D'AUTRICHE, femme de Louis XIV (1638-1683). Ce n'est que par un excès de complaisance qu'on peut classer cette reine parmi les bibliophiles. Le goût des livres «lui était absolument étranger, avoue Ernest Quentin-Bauchart[169], et sa bibliothèque, qui contenait de très jolis volumes à ses armes, mais à laquelle il est vraisemblable qu'elle ne toucha jamais, fut celle que l'étiquette du temps lui commandait d'avoir.» Elle était ignorante et niaise, et, comme on l'a très bien dit, «le roi et le chocolat furent ses seules passions». [169] _Ouvrage cité_, t. I, p. 293-294. AMÉLIE DE LA TOUR D'AUVERGNE, religieuse carmélite (1640-1696 ou 1698), sœur de Louise-Charlotte de la Tour, demoiselle de Bouillon, précédemment nommée[170]. [170] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 171. La MARQUISE DE MONTESPAN (1641-1707), plus célèbre par ses relations avec Louis XIV que par sa bibliothèque[171]. [171] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 301. «Il n'étoit pas possible, écrit Saint-Simon[172], d'avoir plus d'esprit, de fine politesse, des expressions singulières, une éloquence, une justesse naturelle qui lui formoit comme un langage particulier, mais qui étoit délicieux et qu'elle communiquoit si bien par l'habitude, que ses nièces et les personnes assidues auprès d'elle, ses femmes, celles que, sans l'avoir été, elle avoit élevées chez elle, le prenoient toutes, et qu'on le sent et on le reconnoît encore aujourd'hui dans le peu de personnes qui en restent. C'étoit le langage naturel de la famille, de son frère et de ses sœurs.» [172] _Mémoires_, t. IV, p. 11 (Paris, Hachette, 1865). MARIE-CASIMIRE DE LA GRANGE D'ARQUIEN (1641?-1716). Veuve de Jacques Radziwill, prince Zamoyski, elle épousa, en 1665, Jean Sobieski, roi de Pologne[173]. [173] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 123. Mme DE CAUMARTIN, Catherine-Madeleine de Verthamon (1642?-1722)[174]. [174] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 143. HENRIETTE-ANNE D'ANGLETERRE, duchesse d'Orléans, belle-sœur de Louis XIV (1644-1670)[175]. [175] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 409. Dans ses _Mémoires_[176], Mme de la Fayette nous parle en détail du charme et de toutes les qualités d'esprit de cette princesse, et trace d'elle ce joli portrait: «Le changement funeste de cette maison royale (d'Angleterre) fut favorable en quelque chose à la princesse d'Angleterre. Elle étoit encore entre les bras de sa nourrice, et fut la seule de tous les enfants de la reine sa mère qui se trouva auprès d'elle pendant sa disgrâce. Cette reine s'appliquoit tout entière au soin de son éducation, et, le malheur de ses affaires la faisant plutôt vivre en personne privée qu'en souveraine, cette jeune princesse prit toutes les lumières, toute la civilité et toute l'humanité des conditions ordinaires, et conserva dans son cœur et dans sa personne toutes les grandeurs de sa naissance royale. «...La princesse d'Angleterre possédoit au souverain degré le don de plaire et ce qu'on appelle grâces; les charmes étoient répandus en toute sa personne, dans ses actions et dans son esprit; et jamais princesse n'a été si également capable de se faire aimer des hommes et adorer des femmes.» [176] Deuxième partie, p. 25-26 (Paris, Jouaust, 1890). Mlle DE LA VALLIÈRE (1644-1710) eut toujours aussi le goût des livres et des choses de l'esprit. Retirée au couvent des Carmélites du faubourg Saint-Jacques, elle a laissé des _Lettres_ et des _Réflexions sur la miséricorde de Dieu_, qui ont été souvent réimprimées[177]. [177] Cf. Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. La DUCHESSE DE BOUILLON (1646-1714), amie et protectrice de La Fontaine[178]. [178] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 411. Dans une lettre datée de Paris, novembre 1687, La Fontaine[179] constate que la duchesse se plaît avec «toutes sortes de livres, pourvu qu'ils soient bons», et, sur le point de terminer sa lettre par un éloge de Mme Mazarin, qui ferait suite ou pendant à l'éloge de Mme de Bouillon, il se ravise et conclut par ce quatrain: L'or se peut partager, mais non pas la louange. Le plus grand orateur, quand ce seroit un ange, Ne contenteroit pas, en semblables desseins, Deux belles, deux héros, deux auteurs, ni deux saints. [179] _OEuvres_, t. IX, p. 390 et suiv. (édition des Grands Écrivains). La MARQUISE DE LOUVOIS (1646-1715), Anne de Souvré, femme du ministre secrétaire d'État[180]. [180] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 412;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 179. La PRINCESSE DE SOUBISE, Anne de Rohan-Chabot (1648-1709)[181], maîtresse de Louis XIV, femme vénale et sans scrupules, dont Mme de Caylus, dans ses _Souvenirs_, et Saint-Simon, dans ses _Mémoires_, parlent en termes sévères: «Mme de Soubise étoit trop solide pour s'arrêter à des délicatesses de sentiment, que la force de son esprit ou la froideur de son tempérament lui faisoit regarder comme des foiblesses honteuses. Uniquement occupée des intérêts et de la grandeur de sa maison, tout ce qui ne s'opposoit pas à ses vues lui étoit indifférent... Pour dire la vérité, je crois que Mme de Soubise et Mme de Montespan n'aimoient guère plus le roi l'une que l'autre. Toutes deux avoient de l'ambition; la première pour sa famille, la seconde pour elle-même. Mme de Soubise vouloit élever sa maison et l'enrichir; Mme de Montespan vouloit gouverner et faire sentir son autorité[182].» [181] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 413. [182] Mme DE CAYLUS, _Souvenirs_, p. 88-89 (édition Jannet-Picard). Et Saint-Simon[183]: «Elle (Mme de Soubise) avoit passé sa vie dans le régime le plus austère pour conserver l'éclat et la fraîcheur de son teint. Du veau et des poulets ou des poulardes rôties ou bouillies, des salades, des fruits, quelque laitage, furent sa nourriture constante, qu'elle n'abandonna jamais, sans aucun autre mélange, avec de l'eau quelquefois rougie, et jamais elle ne fut ........ comme les autres femmes, de peur de s'échauffer les reins et de se rougir le nez. Elle avoit eu beaucoup d'enfants, dont quelques-uns étoient morts des écrouelles... Elle mourut à soixante et un an, le dimanche matin, 3 février, laissant la maison de la cour la plus riche et la plus grandement établie, ouvrage dû tout entier à sa beauté et à l'usage qu'elle en avoit su tirer.» [183] _Mémoires_, t. IV, p. 294-295. ANNE DE BAVIÈRE, PRINCESSE DE CONDÉ, fille d'Édouard de Bavière et d'Anne de Gonzague-Clèves (1648-1723)[184]. [184] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 307. Son mari, fils du Grand Condé, était un homme singulier et terrible, une espèce de fou, dont Saint-Simon décrit longuement et magnifiquement toutes les bizarreries de caractère et les méchancetés: «Fils dénaturé, cruel père, mari terrible, maître détestable, pernicieux voisin, sans amitié, sans amis, incapable d'en avoir, jaloux, soupçonneux, inquiet sans aucun relâche, plein de manèges et d'artifices à découvrir et à scruter tout..., colère et d'un emportement à se porter aux derniers excès même sur des bagatelles, difficile en tout à l'excès, jamais d'accord avec lui-même...[185]» [185] _Mémoires_, t. IV, p. 342. Sa femme, «Mme la Princesse, étoit sa continuelle victime. Elle étoit également laide, vertueuse et sotte; elle étoit un peu bossue, et avec cela un gousset fin qui se faisoit suivre à la piste, même de loin. Toutes ces choses n'empêchèrent pas M. le Prince d'en être jaloux jusqu'à la fureur, et jusqu'à sa mort. La piété, l'attention infatigable de Mme la Princesse, sa douceur, sa soumission de novice, ne la purent garantir ni des injures fréquentes ni des coups de pied et de poing qui n'étoient pas rares...[186]» [186] SAINT-SIMON, _ouvrage cité_, t. IV, p. 344. «Elle étoit laide, bossue, un peu tortue et sans esprit, nous dit ailleurs Saint-Simon[187], mais douée de beaucoup de vertu, de piété, de douceur et de patience, dont elle eut à faire un pénible et continuel usage tant que son mariage dura, qui fut plus de quarante-cinq ans.» [187] _Ouvrage cité_, t. XIII, p. 21. MARIE D'ASPREMONT (1651-1692)[188], qui, à l'âge de treize ans, épousa presque clandestinement le duc de Lorraine Charles IV, alors dans sa soixante-deuxième année, et fameux par tant de surprenantes et folles aventures, «la figure la plus étrange de l'histoire de Lorraine, et peut-être de l'histoire générale de l'Europe», a-t-on très justement dit de ce souverain[189]. [188] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 34. [189] Ernest MOURIN, _Récits lorrains_, Histoire des ducs de Lorraine et de Bar, p. 219 et 283 (Paris, Berger-Levrault, 1895);--cf. Marquis DE BEAUVEAU, _Mémoires pour servir à l'histoire de Charles IV, duc de Lorraine_, p. 267 et suiv. (Cologne, Pierre Marteau, 1690). Mme DACIER (1651-1720), fille du savant philologue Tanneguy Lefebvre ou Lefèvre, mariée à un philologue non moins érudit, André Dacier, et elle-même très érudite philologue, a rendu de grands services aux lettres par ses éditions et traductions des auteurs anciens; malheureusement, son esprit critique et son goût furent loin d'être à la hauteur de sa science. «Son livre _De la corruption du goût_, écrit contre La Motte à propos de son imitation en vers de l'_Iliade_ et de son _Discours sur Homère_, est un modèle de mauvais style..., et d'inintelligence des questions qui se présentent,» remarque B. Jullien, dans ses _Thèses de critique_[190]; et Sainte-Beuve a de même, à plusieurs reprises, reproché à Mme Dacier ses erreurs de jugement et de goût[191]. Avant eux, La Harpe s'est aussi montré très dur pour «cette madame Dacier, à qui Dieu fasse paix, mais à qui les amateurs des anciens et d'Homère ne pardonneront jamais sa malheureuse érudition[192]». Etc. [190] Page 40 (Paris, Hachette, 1858). [191] Cf. _Causeries du lundi_, t. IV, p. 139; t. XII, p. 80; et _passim_. Dans son _Étude sur Virgile_, p. 303, Sainte-Beuve dit encore: «Mme Dacier, à qui l'on devait la meilleure traduction d'Homère en français, celle qui permettait le mieux d'en juger approximativement, resta marquée d'une légère teinte de ridicule;» etc.--Voir aussi, sur Mme Dacier, son pédantisme et son acrimonie, VOLTAIRE, _Dictionnaire philosophique_, article Épopée, De l'Iliade (t. I, p. 347; édition du journal _le Siècle_);--et LA HARPE, _Lycée ou Cours de littérature_, t. I, p. 67 (Paris, Verdière, 1817). «Il ne nous est rien resté, écrit ce dernier, des invectives que Zoïle vomissait contre Homère; mais elles ne pouvaient guère être plus grossières que celles dont Mme Dacier accable La Motte. On est d'autant plus révolté qu'une femme écrive d'un ton si peu décent, que celui de son adversaire est un exemple de modération et de politesse.» Etc. Qui croirait, après cela, que la bouillante helléniste avait pris pour devise ce vers de Sophocle: «Le silence est l'ornement des femmes»? [192] _Ouvrage cité_, t. III, 2e partie, p. 372. La savante traductrice d'Homère, «pensant avoir trouvé dans les auteurs grecs toutes les indications les plus précises sur la cuisine de l'antiquité, eut l'idée de convier un jour la plupart de ses amis à un repas qu'elle prépara elle-même d'après les formules anciennes. Faisant contre mauvaise chère bonne contenance, après s'être efforcés de simuler une certaine satisfaction de la façon dont ils avaient été servis, les convives eurent tous bientôt la conviction d'être empoisonnés. Et l'histoire du festin grec de Mme Dacier est restée légendaire[193].» [193] Eugène MULLER, _Voyages à travers l'histoire et le langage_, p. 121 (Paris, Delagrave, 1889). La PRINCESSE PALATINE, Charlotte-Élisabeth de Bavière (1652-1722), femme de Philippe Ier, duc d'Orléans (Monsieur), frère de Louis XIV, devenu veuf en 1670 par la mort d'Henriette d'Angleterre[194]. [194] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 349. C'est elle qui fut la mère du Régent. On connaît sa très curieuse et très libre correspondance, qui a été en partie traduite--car Madame sut toujours fort mal le français et employait de préférence sa langue maternelle--par l'érudit bibliographe Gustave Brunet (Paris, Charpentier, 1869; 2 vol.), et par Ernest Jaeglé (Paris, Quantin, 1880; 2 vol.). Saint-Simon a tracé d'elle plusieurs portraits; en voici un: «Madame tenoit en tout beaucoup plus de l'homme que de la femme. Elle étoit forte, courageuse, Allemande au dernier point, franche, droite, bonne et bienfaisante, noble et grande en toutes ses manières, et petite au dernier point sur tout ce qui regardoit ce qui lui étoit dû. Elle étoit sauvage, toujours enfermée à écrire, hors les courts temps de cour chez elle; du reste, seule avec ses dames; dure, rude, se prenant aisément d'aversion, et redoutable par les sorties qu'elle faisoit quelquefois, et sur quiconque; nulle complaisance, nul tour dans l'esprit, quoiqu'elle ne manquât pas d'esprit...[195]» [195] SAINT-SIMON, _ouvrage cité_, t. XIII, p. 16. Voir aussi la silhouette tracée dans le tome VII, p. 363: «Madame était une princesse de l'ancien temps, attachée à l'honneur, à la vertu, au rang, à la grandeur, inexorable sur les bienséances.» Etc. Elle-même, avec sa courageuse franchise, s'est dépeinte en ces termes: «Je dois être fort laide; je n'ai aucuns traits, de petits yeux, un nez court et gros, les lèvres longues et plates; tout cela ne peut former une jolie figure; j'ai de grandes joues pendantes et une longue figure; je suis très petite, grosse et épaisse, le corps et les jambes courtes; en somme, je dois être une vilaine petite laideron. Si je n'avais un assez bon caractère, personne n'aurait pu me souffrir. Pour voir si j'ai de l'esprit dans les yeux, il faudrait qu'on les regardât avec un microscope ou tout au moins avec une lorgnette, ou plutôt il faudrait être sorcier pour le deviner[196].» [196] _Correspondance de Mme la duchesse d'Orléans, princesse Palatine_, 9 août 1718, t. I, p. 442-443 (édition Gustave Brunet). Elle était très peinée d'être femme: «J'aurais bien voulu être un garçon[197].» [197] _Ouvrage cité_, 18 août 1718, t. I, p. 445. La princesse Palatine avait l'habitude de lire chaque jour plusieurs pages de la Bible, et elle revient souvent, dans sa correspondance, sur cette lecture: «Je ne manque jamais de lire la Bible; hier je lus les psaumes 54 et 55, les chapitres 14 et 15 de saint Matthieu, et 3 et 4 de saint Jean. Ce matin, je n'ai pu rien lire, car nous avons été à la chasse du cerf[198].» [198] _Ouvrage cité_, 18 avril 1705, t. I, p. 78, et _passim_. Voici, pour égayer quelque peu mon sujet, une plaisante anecdote contée par la princesse Palatine, dans une de ses lettres, si abondamment assaisonnées de gros sel, et qui rappellent à la fois Tallemant des Réaux, Gui Patin et Rabelais. Le héros est le fils du chevalier de Lorraine, un écolier de douze ans, écolier terrible, faisant le désespoir des bons Pères, et qui, toute la nuit, se promenait dans le collège, au lieu de dormir dans sa chambre. «Les Pères, écrit la princesse[199], le menacèrent, s'il n'y restait pas la nuit, de le fouetter d'importance. Le gamin s'en va chez un peintre et le prie de lui peindre deux saints sur les deux fesses, à savoir saint Ignace à droite, saint François-Xavier à gauche; ce que fait le peintre. L'autre remet bonnement ses hauts-de-chausse, s'en revient au collège, et commence cent méchantes affaires. Les Pères l'appréhendent au corps et disent: «Pour cette fois-ci vous aurez le fouet.» «Le gamin se débat et supplie; mais ils lui répondent que les supplications n'y feront rien. Alors l'écolier se jette à genoux et s'écrie: «O saint Ignace! ô saint Xavier! ayez pitié de moi et faites quelque miracle en ma faveur pour montrer mon innocence!» «Là-dessus, les Pères lui descendent la culotte, et, comme ils lui lèvent la chemise pour le fesser, le gamin dit: «Je prie avec tant de ferveur que je suis sûr que mon invocation aura effet!» «Quand les Pères aperçoivent les deux saints, ils s'écrient: «Miracle! celui que nous croyions un fripon est un saint!» «Et ils se jettent à genoux, et ils impriment des baisers sur le postérieur, et ils réunissent tous les élèves...» [199] _Correspondance de Madame, duchesse d'Orléans_, édition Ernest Jaeglé; dans la _Revue bleue_, 17 avril 1880, p. 1000. La DUCHESSE DE NOAILLES, Marie-Françoise de Bournonville (1654?-1748). «Femme d'un esprit supérieur», dit d'elle Ludovic Lalanne. Elle donna le jour à vingt et un enfants, et mourut à quatre-vingt-quatorze ans[200]. [200] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 190;--et Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_, article Noailles (Anne, comte puis premier duc de). La DUCHESSE DE LESDIGUIÈRES, Paule-Françoise Marguerite de Gondi de Retz (1655-1716)[201]. [201] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 361. Elle est surtout connue par son intimité avec l'archevêque de Paris François de Harlay, qui la voyait «tous les jours de sa vie, ou chez elle ou à Conflans, dont il avoit fait un jardin délicieux, et qu'il tenoit si propre, qu'à mesure qu'ils s'y promenoient tous deux, des jardiniers les suivoient à distance pour effacer leurs pas avec des râteaux... La duchesse de Lesdiguières n'y couchoit jamais (à Conflans), mais elle y alloit toutes les après-dînées, et toujours tous deux tout seuls. Le 6 août (1695), il (l'archevêque) passa la matinée à son ordinaire jusqu'au dîner. Son maître d'hôtel vint l'avertir qu'il étoit servi. Il le trouva dans son cabinet, assis sur un canapé et renversé; il étoit mort[202].» [202] SAINT-SIMON, _ouvrage cité_, t. I, p. 180. La duchesse de Lesdiguières avait rassemblé une belle bibliothèque dans son hôtel de la rue de la Cerisaie. ÉLÉONORE-MAGDELEINE-THÉRÈSE, fille de Philippe-Guillaume, comte palatin DE NEUBOURG, femme de Léopold Ier, empereur d'Allemagne (1655?-1720)[203]. [203] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 122. La MARQUISE DE CHAMILLART, Isabelle-Thérèse Le Rebours, femme du secrétaire d'État et ministre de Louis XIV (1657-1731). Dans son domaine de l'Étang-la-Ville, la marquise de Chamillart avait rassemblé une bibliothèque fort remarquable[204]. [204] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 143-144. Elle était très liée avec Mme de Maintenon, «dont elle subissait l'influence et qui lui avait inculqué ses habitudes de piété froide et de sévère étiquette». Elle aimait la simplicité, et ce goût se remarque dans les livres qui «sont jansénistes, et ne portent ordinairement pour toute décoration extérieure que son chiffre: deux C entrelacés, frappés en or aux quatre coins des plats. Les armes sont dans la doublure encadrée dans une simple roulette, à laquelle elle a laissé son nom[205].» [205] Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 6 et 372-373. Les filles de Mme de Chamillard: 1º CATHERINE-ANGÉLIQUE, femme du marquis DE DREUX-BREZÉ (1683?-1739). 2º MARIE-THÉRÈSE, femme du duc DE LA FEUILLADE, maréchal de France (1684-1725?). 3º ÉLISABETH-GENEVIÈVE, femme du duc DE DURFORT DE LORGES (1685-1714)[206]. [206] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 428. Cette troisième fille de Mme de Chamillard porte les prénoms de Geneviève-Thérèse dans Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 153. Saint-Simon, dont cette dernière, la duchesse de Lorges, était la belle-sœur, a tracé d'elle un vivant, et vigoureux, et superbe portrait, où nous voyons que cette grande dame était sans doute encore plus passionnée pour le jeu que pour les riches reliures: «La duchesse de Lorges, troisième fille de Chamillard, mourut à Paris, en couche de son second fils, le dernier mai (1714), jour de la Fête-Dieu, dans sa vingt-huitième année. C'étoit une grande créature, très bien faite, d'un visage agréable, avec de l'esprit et un naturel si simple, si vrai, si surnageant à tout, qu'il en étoit ravissant; la meilleure femme du monde et la plus folle de tout plaisir, surtout du gros jeu. Elle n'avoit quoi que ce soit des sottises de gloire et d'importance des enfants des ministres; mais tout le reste elle le possédoit en plein. Gâtée dès sa première jeunesse par une cour prostituée à la faveur de son père, avec une mère incapable d'aucune éducation, elle ne crut jamais que la France ni le roi pût se passer de son père. Elle ne connut aucun devoir, pas même de bienséance. La chute de son père ne put lui en apprendre aucun, ni émousser la passion du jeu et des plaisirs. Elle l'avouoit tout le plus ingénument du monde, et ajoutoit après qu'elle ne pouvoit se contraindre. Jamais personne si peu soigneuse d'elle-même, si dégingandée: coiffure de travers, habits qui traînoient d'un côté, et tout le reste de même, et tout cela avec une grâce qui réparoit tout. Sa santé, elle n'en faisoit nul compte; et, pour sa dépense, elle ne croyoit pas que terre pût jamais lui manquer. Elle était délicate, et sa poitrine s'altéroit. On le lui disoit: elle le sentoit, mais de se retenir sur rien, elle en étoit incapable. Elle acheva de se pousser à bout de jeu, de courses, de veilles en sa dernière grossesse. Toutes les nuits elle revenoit couchée en travers dans son carrosse. On lui demandoit en cet état quel plaisir elle prenoit. Elle répondoit d'une voix qui de foiblesse avoit peine à se faire entendre qu'elle avoit bien du plaisir. Aussi finit-elle bientôt. Elle avoit été fort bien avec Mme la Dauphine, et dans la plupart de ses confidences. J'étois fort bien avec elle; mais je lui disois toujours que pour rien je n'eusse voulu être son mari. Elle étoit très douce, et, pour qui n'avoit que faire à elle, fort aimable[207].» [207] SAINT-SIMON, _ouvrage cité_, t. VII, p. 60-61. MARIE-BÉATRIX-ÉLÉONORE D'ESTE-MODÈNE (1658-1718)[208]. [208] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 124. La DUCHESSE DE BEAUVILLIERS, ou DE SAINT-AIGNAN-BEAUVILLIERS, fille de Colbert, femme du duc de Beauvilliers, ami intime de Saint-Simon (1658?-1733)[209]. [209] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 413;--SAINT-SIMON, _ouvrage cité_, t. IV, p. 73, et t. VII, p. 130 et suiv.;--Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. La DUCHESSE DE VENTADOUR, Charlotte-Éléonore-Madeleine de la Mothe-Houdancourt (1661?-1744)[210]. [210] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 205. MARIE-LOUISE D'ORLÉANS (1662-1689), sœur consanguine du Régent, qui épousa le roi d'Espagne Charles II, possédait de beaux livres, qu'elle faisait timbrer des armes d'Espagne, accolées à celles d'Orléans[211]. [211] Cf. Eugène ASSE, _les Bourbons bibliophiles_, p. 49-50. LOUISE-FRANÇOISE DE MORTEMART, fille du maréchal de Vivonne, abbesse de Fontevrault en 1704 (1664-1742)[212]. [212] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 188. MADEMOISELLE DE BLOIS, Marie-Anne de Bourbon, fille légitimée de Louis XIV et de Mlle de La Vallière, qui épousa Louis-Armand de Bourbon, prince de Conti, est citée parmi les femmes bibliophiles (1666-1739)[213]. [213] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 416. De même pour une autre MADEMOISELLE DE BLOIS, Françoise-Marie de Bourbon, fille légitimée de Louis XIV et de Mme de Montespan, qui épousa Philippe, duc d'Orléans, et eut ainsi pour belle-mère la princesse Palatine (1677-1749): elle aussi eut le goût des beaux livres[214]. [214] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 5. MARIE-ANNE-FRANÇOISE BIGNON DE VERTHAMON (1669?-1739)[215]. [215] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 207. La COMTESSE DE VERRUE (1670-1736), la fameuse _Dame de Volupté_, fille du duc de Luynes, et maîtresse du roi de Sardaigne Victor-Amédée II de Savoie. Elle avait la passion des collections d'art, et, lorsqu'elle vint habiter Paris, elle réunit, moitié dans son somptueux hôtel de la rue du Cherche-Midi, moitié dans son château de Meudon, une des plus belles bibliothèques de son temps, riche surtout en pièces de théâtre. Nous en savons la composition exacte grâce au catalogue dressé par Gabriel Martin, et qui se trouve à la Bibliothèque nationale. Ses livres, au nombre d'environ 18.000, étaient «d'un choix exquis», dit Joannis Guigard[216] et, pour la plupart, «habillés par les meilleurs artistes de l'époque». [216] _Ibid._ La comtesse de Verrue annotait volontiers ses livres, ce qui prouve l'attention avec laquelle elle les lisait, et son goût pour l'étude: un exemplaire de l'ouvrage de Lenglet-Dufresnoy, _De l'usage des romans_, conservé jadis au dépôt du Louvre, était littéralement couvert de notes de sa main[217]. [217] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 207. Elle-même avait composé son épitaphe: Ci-gît, dans une paix profonde, Cette Dame de Volupté, Qui, pour plus grande sûreté, Fit son paradis en ce monde[218]. [218] Cf. G. DE LÉRIS, _la Comtesse de Verrue_, p. 208-226 et _passim_ (Paris, Quantin, 1881);--et Édouard FOURNIER, _l'Art de la reliure en France_, p. 189. ÉLISABETH-ROSALIE D'ESTRÉES, fille de Jean, comte d'Estrées (1672?-1750)[219]. [219] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 159. Mme DE CAYLUS, Marthe-Marguerite Le Valois de Villette de Mursay, nièce à la mode de Bretagne de Mme de Maintenon (1673-1729)[220]. [220] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 418;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 143. Elle a laissé de très intéressants souvenirs, remplis d'anecdotes, de portraits, de fines et judicieuses remarques. Sainte-Beuve, qui lui a consacré un article[221], l'a intitulé: _Mme de Caylus et de ce qu'on appelle_ URBANITÉ, confirmant un jugement de l'abbé Gédoyn qui «trouvait, dans Mme de Caylus, l'image la plus achevée et le plus parfait modèle de l'_urbanité_[222]». [221] _Causeries du lundi_, t. III, p. 56 et suiv. [222] Cf. M. DE LESCURE, _Notice sur la marquise de Caylus_, en tête de ses _Souvenirs_, p. 30 (édition Jannet-Picard). MADEMOISELLE DE NANTES, Louise-Françoise de Bourbon, fille légitimée de Louis XIV et de Mme de Montespan, femme de Louis III, duc de Bourbon, prince de Condé (1673-1743). Elle lisait beaucoup et annotait ses livres, et elle avait rassemblé une intéressante bibliothèque[223]. [223] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 320. De son mariage avec le duc de Bourbon, prince de Condé, Mademoiselle de Nantes eut plusieurs enfants, dont cinq filles, qui témoignèrent des mêmes goûts que leur mère pour les livres: 1º MARIE-ANNE-GABRIELLE-ÉLÉONORE, religieuse à Fontevrault, puis abbesse de Saint-Antoine des Champs (1690-1760)[224]; 2º LOUISE-ÉLISABETH, dite MADEMOISELLE DE CHAROLAIS; mariée, en 1713, à Louis-Armand DE BOURBON, prince DE CONTI (1693-1775). [224] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 113;--et M.-N. BOUILLET, _Atlas universel d'histoire et de géographie_, p. 520-521. La bibliothèque de la princesse de Conti, dont le catalogue, dressé par Prault fils, comprenait 1711 nos, fut vendue à Paris le 14 septembre 1775 et jours suivants. «Le catalogue très rare de cette bibliothèque mérite à bon droit d'être recherché, écrit M. Maurice Tourneux[225]. On y remarque, au milieu d'une foule de bons livres, un recueil de pièces de l'ancien théâtre français en 50 volumes in-4, maroquin bleu; une collection singulièrement riche de romans, nouvelles et contes (nos 535-955); et la série complète du _Mercure_ (y compris les extraordinaires) de 1673 à 1774, en 853 volumes in-12.» [225] _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 350. 3º MARIE-ANNE, dite MADEMOISELLE DE CLERMONT (1697-1741); 4º HENRIETTE-LOUISE-FRANÇOISE-GABRIELLE, dite MADEMOISELLE DE VERMANDOIS, religieuse (1703-1772); 5º ÉLISABETH-ALEXANDRINE dite MADEMOISELLE DE SENS (1705-1765)[226]. [226] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 432;--Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 114-115;--et Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_, article Condé (Louis III, prince de). La MARQUISE DE GRIGNAN, Anne-Marguerite de Saint-Amant ou Saint-Amand (1674?-1736)[227]. [227] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 164. Son mari, qui était petit-fils de Mme de Sévigné, et fils du lieutenant général ou gouverneur de la Provence, avait reçu les prénoms de Louis-Provence: on lui avait donné, comme à un fils de souverain, le nom de cette province[228]. [228] Cf. Paul MESNARD, notice biographique, en tête des _Lettres de Mme de Sévigné_, édition des Grands Écrivains, t. I, p. 228. Mlle de Saint-Amand avait dix-huit ans, lors de son mariage, et était, au jugement de Mme de Sévigné, «jolie, aimable, sage, bien élevée, raisonnable au dernier point[229].» Au bout de quelques mois, comme il advient souvent dans ces unions formées par la vanité des uns et les vues intéressées des autres, il y avait déjà mésintelligence dans le ménage[230]. [229] ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 298. [230] Cf. Paul MESNARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 298. Louis-Provence de Grignan, né en 1671 et mort en 1704, brigadier des armées du roi, fut l'ami de Saint-Simon, et voici en quels termes le grand mémorialiste parle du marquis et de la marquise de Grignan: «Je perdis un ami avec qui j'avais été élevé, qui était un très galant homme, et qui promettait fort: c'était le fils unique du comte de Grignan et de cette Mme de Grignan si adorée dans les lettres de Mme de Sévigné, sa mère, dont cette éternelle répétition est tout le défaut. Le comte de Grignan, chevalier de l'ordre en 1688, s'était ruiné à commander en Provence, dont il était seul lieutenant général. Ils marièrent donc leur fils à la fille d'un fermier général fort riche. Mme de Grignan, en la présentant au monde, en faisait ses excuses; et avec ses minauderies en radoucissant ses petits yeux, disait qu'il fallait bien de temps en temps du fumier sur les meilleures terres. Elle se savait un gré infini de ce bon mot, qu'avec raison chacun trouva impertinent, quand on a fait un mariage, et le dire entre bas et haut devant sa belle-fille. Saint-Amant, son père, qui se prêtait à tout pour leurs dettes, l'apprit enfin, et s'en trouva si offensé qu'il ferma le robinet. Sa pauvre fille n'en fut pas mieux traitée; mais cela ne dura pas longtemps. Son mari, qui s'était fort distingué à la bataille d'Hochstedt, mourut au commencement d'octobre (1704), à Thionville; on dit que ce fut de la petite vérole. Il avait un régiment, était brigadier et sur le point d'avancer. Sa veuve, qui n'eut point d'enfants, était une sainte, mais la plus triste et la plus silencieuse que je vis jamais. Elle s'enferma dans sa maison, où elle passa le reste de sa vie, peut-être une vingtaine d'années, sans en sortir que pour aller à l'église, et sans voir qui que ce fût[231]». [231] SAINT-SIMON, _ouvrage cité_, t. III, p. 121-122. ÉLISABETH-CHARLOTTE D'ORLÉANS, sœur du Régent Philippe d'Orléans, et femme de Léopold Ier, duc de Lorraine (1676-1744)[232]. [232] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 421. La DUCHESSE DU MAINE, Anne-Louise-Bénédicte de Bourbon, femme de Louis-Auguste de Bourbon, duc du Maine, fils naturel de Louis XIV et de Mme de Montespan (1676-1753). Elle aimait beaucoup les livres, et elle tint à Sceaux une véritable cour littéraire, où Fontenelle, Malézieux, La Fare, Sainte-Aulaire, Chaulieu, et plus tard Voltaire faisaient avec elle assaut d'esprit[233]. [233] Cf. Mme DE CAYLUS, _Souvenirs_, p. 193-194 (édition Jannet-Picard);--Mme DE STAAL-DELAUNAY, _Mémoires_, p. 112 et suiv. et _passim_ (édition Jannet-Picard);--Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 107-108;--et Eugène ASSE, _les Bourbons bibliophiles_, p. 93-94. Ces goûts littéraires ne l'empêchèrent pas de s'occuper de politique, comme le prouve cette conspiration de Cellamare dont elle fut l'inspiratrice. Souvent même, ainsi qu'on l'a remarqué[234], «la littérature fut pour elle le masque de la politique; et l'emblème dont elle timbrait ses livres était aussi le ralliement de ses alliés, les chevaliers de la Mouche à miel. Sur ses livres, en effet, étaient frappées des abeilles d'or, avec, autour de leur ruche, cette devise, tirée de _l'Aminte_ du Tasse: _Piccola si ma fa pur gravi le ferite_ (Je suis petite, mais je fais cependant de graves blessures),--allusion à la petite taille de la princesse et à l'ordre galant de la Mouche à miel, qu'elle avait fondé en 1703.» [234] Eugène ASSE, _ibid._ La DUCHESSE DE BRANCAS, Marie-Angélique Frémyn de Moras, femme de Louis-Antoine de Brancas, duc de Villars, comte de Lauraguais (1676-1763). Sa bibliothèque, dont le catalogue, dressé par Prault, comprenait 750 nos, fut vendue, à Paris, peu après la mort de la duchesse, le 14 novembre 1763 et jours suivants[235]. [235] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 140;--et la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 349, article de M. Maurice Tourneux: _Bibliothèques féminines au XVIIIe siècle_. La duchesse de Brancas, qui porta longtemps le titre de duchesse de Villars, a écrit ou plutôt dicté, dans sa vieillesse, de très piquants _Mémoires_, qui ont été publiés pour la première fois, en 1802, par son petit-fils le comte de Lauraguais; puis réédités, en 1865, par Louis Lacour, et, en 1890, par Eugène Asse. La duchesse de Brancas était bien une femme de son époque, et que la sévérité des mœurs n'embarrassait guère. Saint-Simon nous a laissé d'elle et de son digne époux, qui était livré à «une infâme débauche[236]», ce sanglant et admirable portrait: «Le duc de Villars et sa femme, sans estime réciproque, qu'en effet ils ne pouvoient avoir, vivoient fort bien ensemble dans une entière et réciproque liberté, dont elle usoit avec aussi peu de ménagement de sa part que le mari de la sienne, qui le trouvoit fort bon, et en parloit même indifféremment quelquefois et jusqu'à elle-même devant le monde, et l'un et l'autre sans le moindre embarras. Mais elle étoit méchante, adroite, insinuante, intéressée comme une crasse de sa sorte, ambitieuse, avec cela artificieuse, rusée, beaucoup d'esprit d'intrigue, mais désagréable plus encore que son mari; et tous les deux bas, souples, rampants, prêts à tout faire pour leurs vues, et rien de sacré pour y réussir, sans affection, sans reconnaissance, sans honte et sans pudeur, avec un extérieur doux, poli, prévenant, et l'usage, l'air, la connaissance et le langage du grand monde[237].» [236] SAINT-SIMON, _ouvrage cité_, t. VIII, p. 438. [237] ID., _ibid._ «En 1740, la duchesse de Villars, qui, depuis deux ans, portait le titre de duchesse de Brancas, par suite de la mort de son beau-père, avait soixante-quatre ans. C'était, écrit Eugène Asse[238], une femme à l'esprit gaulois, dont l'anecdote suivante peut aider à se faire une idée: «Hier, M. de Richelieu, raconte d'Argenson[239], donna un grand souper à sa petite maison, par delà la barrière de Vaugirard. Tout y est en galanteries..., les lambris... ont des figures fort immondes. Le beau du début de ce souper étoit de voir la vieille duchesse de Brancas vouloir voir ces figures, mettre ses lunettes, et, avec une bouche pincée, les considérer froidement, pendant que M. de Richelieu tenoit la bougie et les lui expliquoit.» [238] _Mémoires de la duchesse de Brancas_, Préface par Eugène Asse, p. XXXI (Paris, Jouaust, 1890). [239] _Journal_, 22 novembre 1740 (édition Rathery). La MARQUISE DE VIEUXBOURG ou DE VIEILBOURG, Louise-Françoise de Harlay de Cély (1680-1735). «La marquise de Vieilbourg, remarquable par son intelligence et sa beauté, était passionnée pour les hautes spéculations de l'esprit. Elle avait colligé un superbe cabinet d'objets d'art et de curiosité, et une bibliothèque du meilleur goût[240].» [240] Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 208.--Voir aussi Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 422. Cette bibliothèque fut vendue après le décès de la marquise, en 1735; le catalogue, comprenant 1043 nos, avait été dressé et rédigé en latin par le libraire et bibliographe Gabriel Martin[241]. [241] _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 348, article de M. Maurice Tourneux. La MARQUISE DE VASSÉ, Anne-Bénigne-Fare-Thérèse de Beringhen, femme d'Emmanuel-Armand, marquis de Vassé, brigadier des armées du Roi (1682?-1749). Sa bibliothèque, riche surtout en romans de chevalerie, et dont le catalogue comprenait 184 articles, fut vendue en 1750, peu après la mort de la marquise[242]. [242] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 425;--Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 204;--et la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 349, article de M. Maurice Tourneux. La COMTESSE DE BISSY, Sylvie-Angélique Andrault de Langeron (1684?-1771)[243]. [243] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 137. La DUCHESSE DE LA VALLIÈRE, Marie-Thérèse de Noailles (1684-1784). Son mari était le neveu de la maîtresse de Louis XIV, sœur Louise de la Miséricorde. La duchesse de la Vallière eut deux enfants, dont l'un fut Louis-César, duc de la Vallière, le bibliophile si connu[244]. [244] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 173-174. La DUCHESSE DE BOURGOGNE, Marie-Adélaïde de Savoie (1685-1712)[245]. [245] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. I, p. 620. On sait l'influence que la duchesse de Bourgogne, la Dauphine, exerça sur Louis XIV et Mme de Maintenon. Elle avait «beaucoup d'esprit naturel, dit Saint-Simon[246], beaucoup de qualités aimables... Douce, timide, mais adroite, bonne jusqu'à craindre de faire la moindre peine à personne, et, toute légère et vive qu'elle étoit, très capable de vues et de suite de la plus longue haleine, la contrainte jusqu'à la gêne, dont elle sentoit tout le poids, sembloit ne lui rien coûter. La complaisance lui étoit naturelle, couloit de source; elle en avoit jusque pour sa cour.» [246] _Ouvrage cité_, t. VI, p. 230-231. ÉLISABETH-MARGUERITE-ARMANDE DU PLESSIS ou DUPLESSIS DE RICHELIEU, dite Mademoiselle de Fronsac, prieure perpétuelle des Bénédictines de la Présentation, à Paris (1686-1744)[247]. [247] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 195. Mme LE PELLETIER ou LE PELETIER, Marie-Madeleine de Lamoignon, femme du ministre d'État (1687?-1744)[248]. [248] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 176. La COMTESSE DE TOULOUSE, Victoire de Noailles, femme du comte de Toulouse, fils légitimé de Louis XIV et de Mme de Montespan (1688-1766)[249]. [249] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 429. La PRINCESSE DE BAUFFREMONT, Hélène, princesse de Courtenay (1689-1768)[250]. [250] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 134. MARIE-GABRIELLE-ÉLISABETH DU PLESSIS ou DUPLESSIS DE RICHELIEU (1689-....). Amie des livres, comme sa sœur Élisabeth-Marguerite-Armande (Mademoiselle de Fronsac) précédemment nommée, Marie-Gabrielle-Élisabeth du Plessis de Richelieu a d'abord été religieuse à Port-Royal, puis, en 1724, abbesse du Trésor (abbaye cistercienne du diocèse de Rouen)[251]. [251] Cf. le Père ANSELME, _Histoire généalogique et chronologique de la maison royale de France..._;--_Gallia Christiana_;--et Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 428, qui date de 1714 la nomination de cette religieuse comme abbesse du Trésor. VICTOIRE-MARIE-ANNE DE SAVOIE, mariée, en 1714, à Victor-Amédée de Savoie, prince de Carignan (1690-1766)[252]. [252] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 129. «Victoire-Françoise», dit M.-N. BOUILLET, _Atlas universel d'histoire et de géographie_, p. 753 et 754. MARIE-URANIE DE NOAILLES, fille du duc de Noailles, pair et maréchal de France, religieuse au couvent de la Visitation de Paris (1691-1710)[253]. [253] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 190. CHARLOTTE-FRANÇOISE DE DIENNE (1691-....)[254]. [254] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 150. ÉLISABETH FARNÈSE, fille d'Édouard II Farnèse, prince de Parme, mariée, en 1714, à Philippe V, roi d'Espagne (1692-1766)[255]. [255] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 126. La DUCHESSE DE BERRY, Marie-Louise-Élisabeth, fille aînée du Régent, Philippe d'Orléans (1695-1719). On connaît sa vie scandaleuse et toutes les folies commises par cette princesse. Quoique morte très jeune, et malgré sa dissipation et ses débauches, elle trouva le temps de se former une belle et luxueuse bibliothèque[256]. [256] Cf. Eugène ASSE, _les Bourbons bibliophiles_, p. 49. «La duchesse de Berry, si connue par ses goûts singuliers et l'excentricité de son caractère, dit de son côté Joannis Guigard[257], aimait beaucoup les livres; mais, si l'on en croit les _Mémoires_ de la princesse Palatine, sa grand'mère, elle n'eut guère le temps de les lire, tant elle avait besoin de divertissements. Quoi qu'il en soit, ses livres étaient nombreux, choisis et bien reliés.» [257] _Ouvrage cité_, t. I, p. 101. Trois autres filles du Régent, Philippe II d'Orléans, ont été classées au nombre des bibliophiles: LOUISE-ADÉLAÏDE D'ORLÉANS, dite MADEMOISELLE DE CHARTRES, seconde fille du Régent (1698-1743). Elle devint abbesse de Chelles, en 1719, «épouse de Jésus-Christ», et c'est à son sujet que le Régent déclarait être brouillé avec son gendre[258]. [258] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 20. Une autre, LOUISE-ÉLISABETH D'ORLÉANS, dite MADEMOISELLE DE MONTPENSIER (1709-1742), qui fut reine d'Espagne, devint veuve en 1724, puis regagna la France en 1725, où elle se plongea dans une profonde dévotion, «fit exécuter un assez joli livre d'heures quelque temps avant sa mort»: d'où son titre de bibliophile[259]. [259] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 26. Une autre encore, PHILIPPE-ÉLISABETH D'ORLÉANS, dite MADEMOISELLE DE BEAUJOLAIS (1714-1734), morte très jeune et sans alliance, a été, comme ses susdites sœurs, réputée pour son amour des livres[260]. [260] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 110. Bibliophile également, LOUISE-ADÉLAÏDE DE BOURBON-CONTI, dite MADEMOISELLE DE LA ROCHE-SUR-YON (1696-1750)[261]. [261] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 434;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 116. LA MARQUISE DU DEFFAND, née Marie de Vichy-Chamrond (1697-1780)[262]. [262] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 437. Sa correspondance, qui est très volumineuse (2 vol. in-8, édition M. de Lescure; Paris, Plon, 1865;--3 vol. in-8, édition Sainte-Aulaire; Paris, Calmann-Lévy, 1877; etc.) est des plus intéressantes pour l'histoire des mœurs et des lettres au dix-huitième siècle. Devenue aveugle en 1753, Mme du Deffand, chez qui se réunissaient nombre d'hommes et de femmes remarquables, se faisait faire de longues lectures: «...Je suis obligée de lire cinq ou six heures par jour; je commence à six heures du matin, et cela dure souvent jusqu'à onze heures ou midi; les insomnies allongent mes jours et abrègent ma vie. On en pourrait faire une énigme[263].» [263] Lettre du 22 février 1772; t. II, p. 219 (édition M. de Lescure). «Je passe des nuits sans dormir, et ce n'est le plus souvent qu'à midi que j'attrape le sommeil; je me fais lire cinq heures de suite...[264].» [264] Lettre du 2 avril 1773; t. II, p. 380 (édition Sainte-Aulaire). Pessimisme et égoïsme, ces deux sentiments apparaissent fréquemment sous la plume de Mme du Deffand: «Ceux qu'on nomme amis sont ceux par qui on n'a pas à craindre d'être assassiné, mais qui laisseraient faire les assassins[265].» [265] Lettre du 8 mars 1767; t. I, p. 415 (édition M. de Lescure). «Je jouis d'une sorte de plaisir, qui est d'observer l'orgueil et la vanité de tout le monde; il n'y a presque personne qui ne prétende à jouer un rôle; il y a peu de bons acteurs[266].» [266] Lettre du 19 novembre 1771; t. II, p. 87 (édition Sainte-Aulaire). «...Le plus beau jour de la vie est celui où on la quitte. Cela revient à peu près, Madame, à ce que vous me dites si souvent: que _le plus grand malheur est d'être né_[267].» [267] Lettre de d'Alembert à la marquise du Deffand, 25 juin 1763; t. I, p. 276 (édition M. de Lescure). Mme du Deffand déclarait assez cyniquement «qu'elle n'avait _ni tempérament ni roman_, ce qui ne l'empêcha pas d'être galante avant d'être philosophe[268].» [268] M. DE LESCURE, notice en tête des _Mémoires de Mme de Staal-Delaunay_, t. I, p. 7 (édition Jannet-Picard). Sainte-Beuve, dans un de ses articles des _Causeries du lundi_[269], fait grand éloge du style et de la valeur littéraire des lettres de Mme du Deffand: «Mme du Deffand est un de nos classiques par la langue et par la pensée... Elle est avec Voltaire, dans la prose, le classique le plus pur de cette époque, sans même en excepter aucun des grands écrivains.» [269] Tome I, p. 412 et suiv. La MARQUISE D'AMBRES, Henriette-Antoinette de Mesmes (1698-1715)[270]. [270] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 132. La MARQUISE DE PRIE, née Agnès Berthelot de Pleneuf (1698-1727)[271].» [271] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 438. Fille d'un financier, «qui s'était gorgé par bien des métiers», dit Saint-Simon[272], cette amie des livres eut une existence très mouvementée. En 1713, elle épouse le marquis de Prie, qui fut ambassadeur à Turin; rentre à Paris, en 1719, et devient la maîtresse du duc de Bourbon, qu'elle domina bientôt entièrement. Elle était belle, très ambitieuse, et quand son amant fut nommé premier ministre après la mort du Régent, elle exerça un pouvoir absolu, dont elle ne fit guère usage que pour satisfaire ses passions et sa rapacité. Dame du palais de Marie Leszczynska, qu'elle avait contribué à faire monter sur le trône, elle voulut faire chasser Fleury, alors évêque de Fréjus. Elle échoua; le duc de Bourbon fut disgracié (juin 1726); et, exilée en Normandie, la marquise de Prie ne put supporter son malheur et s'empoisonna l'année suivante. [272] _Mémoires_, t. XII, p. 429; voir aussi pages suivantes;--et Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. La COMTESSE DE GÉLAS, Henriette-Antoinette de Mesmes (1698-....)[273]. [273] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 163. * * * * * La VICOMTESSE D'AUCHY, Charlotte des Ursins (....-1646). Jamais personne ne fut si avide qu'elle de lectures--lectures en public--de toutes sortes, comédies, lettres, harangues et sermons même, dit Tallemant des Réaux[274]. Elle avait le goût des réunions littéraires, et «prestoit son logis avec un extresme plaisir pour de telles assemblées». Elle s'avisa même de créer chez elle «une certaine académie, où tour à tour chacun liroit quelque ouvrage». Cette académie paraît n'avoir été, au commencement du moins, qu'«une vraie cohue», selon l'expression de Tallemant, qui y alla une fois, «par curiosité». [274] _Les Historiettes_, t. I, p. 228. On examinait et discutait de singulières questions dans ces séances. Un jour, un certain Boutard, qui devint dans la suite «président des trésories de France, à Montpellier,» et qui se plaisait à berner et mystifier les gens, «traita des diverses façons de cracher; il en trouva cinquante-deux, dont il fit la démonstration aux dépens du tapis de pieds de la vicomtesse[275].» [275] TALLEMANT DES RÉAUX, _ouvrage cité_, t. IV, p. 135. LOUISE NOGARET DE LA VALETTE, abbesse à Metz (....-1647)[276]. [276] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 192. La DUCHESSE DE VILLARS-BRANCAS, Julienne-Hippolyte d'Estrées, mariée, en 1597, à Georges de Brancas, duc de Villars (XVIIe siècle, décédée après 1657)[277]. [277] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 139. Très coquette, et encore plus dévergondée, c'est ainsi que Tallemant des Réaux nous dépeint la duchesse de Villars. «C'estoit la plus grande escroqueuse du monde, ajoute-t-il[278]. Quand il fallut sortir du Havre, pour ne point faire crier toute la ville, car ils (son mari et elle) devoient à Dieu et au monde, elle fit publier que tous leurs créanciers vinssent un certain jour parler à elle. Elle parla à tous en particulier, leur avoua qu'elle n'avoit point d'argent, mais qu'elle avoit, en deux ou trois lieux qu'elle leur nomma, des magasins de pommes à cidre pour dix ou douze mille escus; qu'elle leur en donneroit pour les deux tiers de leur debte, et une promesse pour le reste payable en tel temps. Elle disoit cela à chacun avec protestation qu'elle ne traitoit pas les autres de la sorte, et qu'il se gardast bien de s'en vanter. Les pauvres gens, les plus contents du monde, prirent chascun en paiement un ordre aux fermiers de donner à l'un pour tant de pommes et pour tant à l'autre; mais quand ils y furent, ils ne trouvèrent en tout que pour cinq cents livres de pommes.» [278] _Ouvrage cité_, t. I, p. 145. MARIE-ANNE CHRISTINE DE BAVIÈRE, femme du Grand Dauphin, fils de Louis XIV et de Marie-Thérèse (....-1690). Elle avait des goûts sérieux, aimait les lettres, et elle protégea Racine[279]. [279] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 415. MARIE-CATHERINE LE CAMUS DE NICOLAI (....-1698)[280]. [280] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 189. CHARLOTTE D'ALBERT D'AILLY DE CHAULNES, religieuse à l'Abbaye-aux-Bois, puis à Poissy (....-1707)[281]. [281] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 130. LOUISE-ISABELLE D'ANGENNES DE RAMBOUILLET, religieuse, abbesse de Saint-Étienne de Reims, décédée presque nonagénaire (....-1707)[282]. [282] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 132. Mme FRANÇOISE DOUJAT, Madeleine Tiraqueau, dont le mari était maître d'hôtel du roi (....-1709)[283]. [283] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 151. La MARQUISE DE LAMOIGNON-BAVILLE, Marie-Jeanne Voysin, mariée, en 1674, à Chrétien-François Lamoignon, marquis de Baville (....-1727). Conseiller au Parlement, puis avocat général, puis président à mortier, Chrétien-François Lamoignon fut nommé membre de l'Académie des inscriptions, en 1704. Comme son père, il était lié avec les beaux esprits du temps, et c'est à lui que Boileau a adressé sa sixième épître. La bibliothèque du président Lamoignon, qui renfermait d'importants manuscrits, est passée en Angleterre[284]. [284] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 169:--et Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. * * * * * DIANE-FRANÇOISE D'ALBRET, abbesse de Sainte-Croix de Poitiers de 1650 à 1680 (XVIIe siècle)[285]. [285] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 130. La COMTESSE DE BERLAYMONT, Marguerite de Lalaing (XVIIe siècle)[286]. [286] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 137. Mme NICOLAS BOUCOT, née Néthine (XVIIe siècle)[287]. [287] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 138. La MARQUISE DE BULLION-WIDEVILLE, Marie-Catherine de Beauveau (XVIIe siècle). Sa bibliothèque contenait une fort belle collection d'œuvres dramatiques[288]. [288] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 141. HONORÉE DE BUSSY (XVIIe siècle)[289]. [289] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 406. Mme DUGAS DE BOIS-SAINT-JUST, née Maindestre (XVIIe siècle). Son mari était échevin de la ville de Lyon en 1658 et prévôt en 1696[290]. [290] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 153. Mme LOUISE DE DURFORT, fille de Jean de Durfort, mariée, en 1683, à Jean-Louis de Durfort, son cousin (XVIIe siècle)[291]. [291] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 153. La MARQUISE DE FOUQUET, Marie-Jeanne Guyon (XVIIe siècle)[292]. [292] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 161. N. DE GROSSOLLES DE FLAMARENS, abbesse des Bénédictines (XVIIe siècle)[293]. [293] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 165. La PRINCESSE DE GUÉMÉNÉ, mariée, en 1617, à Louis VII de Rohan, prince de Guéméné, son cousin germain (XVIIe siècle)[294]. [294] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 399. La DUCHESSE DE LA ROCHEFOUCAULD, femme de l'auteur des _Maximes_ (XVIIe siècle)[295]. [295] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 406. MADELEINE DE LÉRIS (XVIIe siècle)[296]. [296] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 408. ERNESTINE DE LIGNE, mariée à Jean, comte de Nassau-Dillenbourg-Siegen, général de la cavalerie de Flandre (XVIIe siècle)[297]. [297] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 178. CLAUDE DE LORRAINE, fille du duc Henri II de Lorraine, mariée en 1634 (XVIIe siècle)[298]. [298] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 404. Mme THÉVENOT, femme de Melchisédech Thévenot, garde de la Bibliothèque du roi (XVIIe siècle). Melchisédech Thévenot (vers 1620-1692), qui avait beaucoup voyagé, avait rapporté en France quantité de livres rares et de manuscrits précieux. Il tenait, dans sa maison d'Issy, des réunions périodiques, où chaque invité rendait compte des expériences et découvertes scientifiques qu'il faisait: ce fut là, dit Ménage, l'origine de l'Académie des sciences. Un neveu de Melchisédech Thévenot, Jean de Thévenot (avec la particule nobiliaire) (1633-1667), qui fut aussi un infatigable voyageur et qui mourut en Arménie, passe pour être l'introducteur du café en France[299]. [299] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 202, et t. II, p. 447-448;--MICHAUD, _Biographie universelle_;--Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_;--etc. VI La reine MARIE LESZCZYNSKA, femme de Louis XV (1703-1768). Cette princesse, victime résignée, vertueuse, se réfugia dans la religion et aussi dans le culte des arts. Le roi, dans sa froideur était avec la reine «d'une régularité impitoyable. D'Argenson écrit: Il lui fit sept enfants sans lui dire un mot.[300]» [300] MICHELET, _Histoire de France_, t. XVIII, chap. VII, p. 119 (Paris, Marpon et Flammarion, 1879). Non seulement elle s'occupait de peinture, de gravure et de musique, mais elle lisait beaucoup, même des ouvrages ardus, principalement des livres pieux et des récits historiques. Sa bibliothèque, peu nombreuse, était composée de volumes traitant surtout de ces deux sujets: religion et histoire. Ses livres, reliés par Padeloup, sont conservés pour la plupart à la Bibliothèque nationale[301]. [301] Cf. Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 118. La reine Marie Leszczynska avait fait établir une petite imprimerie dans son cabinet, et elle se plaisait à composer et à imprimer de jolis livres de piété, dont elle faisait cadeau à son entourage. Elle avait ainsi fait de l'imprimerie un amusement, et mis cet amusement à la mode[302]. [302] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 40 et suiv. et p. 97, note 1.--Voir aussi Antony VALABRÈGUE, _les Princesses artistes_, p. 18 et suiv. (Paris, Dupret, 1888). La DUCHESSE D'ORLÉANS, Auguste-Marie-Jeanne de Bade, femme de Louis, duc d'Orléans, belle-fille du Régent, bisaïeule du roi Louis-Philippe (1704-1726)[303]. [303] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 443. La DUCHESSE DE BOUFFLERS, plus tard DUCHESSE ET MARÉCHALE DE MONTMORENCY-LUXEMBOURG, ou MARÉCHALE DE LUXEMBOURG, Madeleine-Angélique de Neufville de Villeroy (1707-1787)[304]. [304] Cf. Joannis GUIGARD, ouvrage cité, t. I, p. 187;--_Correspondance de Mme du Deffand_, t. III, p. 475, et _passim_ (édition Sainte-Aulaire);--etc. Mariée en 1721, à quatorze ans, à Joseph-Marie, duc de Boufflers, mort en 1747, Madeleine-Angélique de Neufville de Villeroy épousa en secondes noces, en 1750, Charles-François-Frédéric de Montmorency-Luxembourg, maréchal de France[305]. C'est sur elle que le comte de Tressan fit la fameuse chanson: Quand Boufflers parut à la cour, On crut voir la mère d'Amour; Chacun s'empressait à lui plaire, Et chacun l'avait à son tour[306]. [305] Sainte-Beuve, qui la qualifie d'«arbitre souverain de l'usage et de la politesse», dit qu'«elle l'avait pour amant déjà (le maréchal de Luxembourg), depuis quelques années, et n'en faisait point mystère: on a des couplets d'elle, où elle s'en vante à la face de la première duchesse de Luxembourg, laquelle avait pour ami, de son côté, Pont-de-Veyle, de même que Mme du Châtelet avait Voltaire. Toutes ces passions, toutes ces liaisons se mêlaient, s'entre-croisaient, et à ciel découvert... Les mœurs de Mme de Boufflers furent celles du grand monde de son temps, c'est-à-dire plus que légères.» (_Nouveaux Lundis_, t. IV, p. 7 et 8.) [306] Pour que ce quatrain fût régulier, il faudrait une rime à _plaire_; aussi a-t-on proposé diverses corrections, celles-ci, par exemple: /* On croyait voir d'Amour la mère; */ ou bien: /* Venant de l'île de Cythère. */ (Cf. _l'Intermédiaire des chercheurs et curieux_, 7 juillet 1899, col 2.) «Quand Mme de Boufflers chantait plus tard ce couplet, elle s'arrêtait au dernier vers et disait: _J'ai oublié le reste_. Un jour, elle se mit à marmotter cette chanson devant M. de Tressan lui-même, en disant: «Connaissez-vous l'auteur? Elle est si jolie que non seulement je lui pardonnerais, mais je crois que je l'embrasserais.» Tressan y fut pris comme le corbeau de la fable, et il dit: «Eh bien, c'est moi!» Elle lui appliqua deux bons soufflets[307].» [307] SAINTE-BEUVE, _Nouveaux Lundis_, t. IV, p. 11. Il est très fréquemment question de la maréchale de Luxembourg dans les _Confessions_ de Jean-Jacques, qui l'avait connue alors qu'elle était la duchesse de Boufflers, et à qui elle témoigna un vif intérêt. Trois grandes dames du dix-huitième siècle, toutes trois grandes amies des galants plaisirs mais aussi des livres et des lettres, ont porté le nom de Boufflers[308]. [308] J'en trouve même une quatrième, bibliophile tout au moins celle-ci, la DUCHESSE DE BOUFFLERS, Marie-Anne-Thérèse-Philippe de Montmorency-Laval (....-....), mariée, en 1747, à Charles-Joseph de Boufflers, né en 1731, et mort en 1751, à vingt ans. Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 138. «Il y eut trois femmes du nom de Boufflers fort célèbres et très à la mode dans le grand monde et dans le même temps, écrit Sainte-Beuve[309]: la duchesse de Boufflers... qui échangea plus tard son nom contre celui de maréchale-duchesse de Luxembourg. Ce fut la dernière figure tout à fait en vue de vieille femme et de grande dame imposante dans l'ancienne société... [309] _Nouveaux Lundis_, t. IV, p. 164-165. «Il y avait encore la marquise de Boufflers, la digne mère du léger et spirituel chevalier, l'amie du bon roi Stanislas, et qui faisait les beaux jours de la petite Cour de Lunéville à l'époque où Mme du Châtelet et Voltaire y étaient invités. C'est à elle que le bon vieux roi disait un soir en la quittant et en lui baisant plusieurs fois la main, devant son chancelier, qui passait pour en être lui-même amoureux: «Mon chancelier vous dira le reste.» On citait de sa façon maint couplet, des impromptus de société, des épigrammes, et peu de personnes, nous dit La Harpe, ont mis dans ces sortes de bagatelles une tournure plus piquante. Mais... femme aimable et qu'on aime à rencontrer dans ce monde-là, elle n'a pas, dans l'histoire de la société d'alors, le degré d'importance des deux autres. «La comtesse de Boufflers, qu'on a souvent confondue avec la précédente, et qui, sans qu'on veuille en rien faire tort à celle-ci, lui était, au dire de bons témoins, «supérieure en figure, en agréments, en esprit et en raison»; qui avait aussi, il faut en convenir, plus de prétentions qu'elle au bel esprit et à l'influence, a pour qualité distinctive d'avoir été l'amie du prince de Conti, celle de Hume l'historien, de Jean-Jacques, du roi de Suède Gustave III; elle est perpétuellement désignée dans la Correspondance de Mme du Deffand sous le nom de _l'Idole_: le prince de Conti ayant dans sa juridiction le Temple en qualité de grand-prieur, la dame favorite qui y venait, qui même y logeait et y avait son jardin et son hôtel attenant, s'appelait tout naturellement _l'Idole du Temple_ ou, par abréviation, _l'Idole_.» Voici, toujours empruntées à Sainte-Beuve, quelques anecdotes sur la comtesse de Boufflers: «Un jour, oubliant qu'elle était la maîtresse du prince de Conti, il lui échappa de dire qu'elle méprisait une femme qui avait (c'était le mot d'alors) un prince du sang. Comme on lui faisait sentir l'inconséquence: «Je veux, dit-elle, rendre à la vertu par mes paroles ce que je lui ôte par mes actions.» «Un autre jour, elle reprochait vivement à son amie la maréchale de Mirepoix de voir Mme de Pompadour, et, se laissant emporter à la vivacité de l'altercation, elle alla jusqu'à dire: «Ce n'est, au bout du compte, que la première fille du royaume.»--«Ne me forcez pas de compter jusqu'à trois», répliqua la maréchale. La seconde, en effet, eût été Mlle Marquise, maîtresse du duc d'Orléans, et, par ordre de rang ou de préséance, Mme de Boufflers venait la troisième. La repartie était cruelle»[310]. [310] SAINTE-BEUVE, _Nouveaux Lundis_, t. IV, p. 178-179. Si inconstante et légère qu'elle fût, dans sa jeunesse du moins, la comtesse de Boufflers est l'auteur d'un curieux code de morale mondaine et de sagesse virile, voire stoïque, qui ne laisse pas d'étonner sous sa plume, et dont, souvent et certainement, elle aurait dû mieux faire elle-même son profit: «Dans la conduite, simplicité et raison. «Dans l'extérieur, propreté et décence. «Dans les procédés, justice et générosité. «Dans l'usage des biens, économie et libéralité. «Dans les discours, clarté, vérité, précision. «Dans l'adversité, courage et fierté. «Dans la prospérité, modestie et modération. «Dans la société, aménité, obligeance, facilité. «Dans la vie domestique, rectitude et bonté sans familiarité. «S'acquitter de ses devoirs selon leur ordre et leur importance. «Ne s'accorder à soi-même que ce qui vous serait accordé par un tiers éclairé et impartial. «Éviter de donner des conseils; et, lorsqu'on y est obligé, s'acquitter de ce devoir avec intégrité, quelque danger qu'il puisse y avoir. «Lorsqu'il s'agit de remplir un devoir important, ne considérer les périls et la mort même que comme des inconvénients et non comme des obstacles. «Tout sacrifier pour la paix de l'âme. «Combattre les malheurs et la maladie par la tempérance. «Indifférent aux louanges, indifférent au blâme, ne se soucier que de bien faire, en respectant, autant qu'il sera possible, le public et les bienséances. «Ne se permettre que des railleries innocentes, qui ne puissent blesser ni les principes ni le prochain. «Mépriser le crédit, s'en servir noblement et mériter la considération[311].» [311] Dans SAINTE-BEUVE, _Nouveaux Lundis_, t. IV, p. 227-228. La DUCHESSE DE MIREPOIX, Anne-Marguerite-Gabrielle de Beauveau-Craon (1707-1791)[312]. [312] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 183;--et la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 351, article de M. Maurice Tourneux sur _les Bibliothèques féminines au XVIIIe siècle_. La DUCHESSE DE MONTMORENCY-BOUTEVILLE, Anne-Angélique de Harlus de Vertilly (1709?-1769)[313]. [313] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 186. La DUCHESSE DE RUFFEC, Marie-Jeanne-Louise Bauyn d'Angervilliers, veuve en premières noces du président de Maisons, ami de Voltaire, et en second lieu d'Armand-Jean de Saint-Simon, duc de Ruffec, pair de France, maréchal de camp, grand d'Espagne de première classe (1711?-1761). Très instruite dans l'histoire et les lettres, douée d'un esprit vif et d'un jugement sûr, la duchesse de Ruffec avait rassemblé une collection de livres qui passait, avec raison, pour l'une des plus remarquables de son temps. La vente de cette importante bibliothèque eut lieu à Paris, le 8 mars 1762 et jours suivants, peu après le décès de la duchesse[314]. [314] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 198;--et la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 349, article de M. Maurice Tourneux. La DUCHESSE DE BRANCAS ou DE VILLARS-BRANCAS, Louise-Diane-Françoise de Clermont-Gallerande (1711-1784). Sa bibliothèque, composée de 3000 à 4000 volumes, tous d'un très bon choix, bien conditionnés, dont beaucoup étaient reliés en maroquin, et qui contenait «quelques livres d'histoire naturelle enluminés avec soin», fut mise en vente à Paris, après le décès de la duchesse, le 28 décembre 1784 et jours suivants[315]. [315] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 140;--et la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 350, article de M. Maurice Tourneux. La DUCHESSE DE BRANCAS-LAURAGUAIS, Diane-Adélaïde de Mailly (1714-1769). Sa bibliothèque fut mise en vente à Paris le 21 mai 1770[316]. [316] _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 350, article de M. Maurice Tourneux. Mme DE WATTEVILLE (ou VATTEVILLE), Marie-Louise-Rosalie Phelypeaux de Pontchartrain, marquise de Conflans (1714-....)[317]. [317] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 205. Mme DUREY DE NOINVILLE, Marie-Suzanne-Françoise-Pauline de Simiane (1715-....)[318]. [318] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 153. La DUCHESSE DE BEAUVILLIERS DE SAINT-AIGNAN, Marie-Suzanne-Françoise de Creil de Bournezeau (1716-....). «Pieuse et riche, dit le duc de Luynes, la duchesse de Beauvilliers avait réuni un grand nombre d'ouvrages, la plupart sur des matières religieuses[319].» [319] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 136. La PRINCESSE DE LA TOUR D'AUVERGNE, Louise-Henriette-Gabrielle de Lorraine, dite Mademoiselle de Marsan (1718-....)[320]. [320] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 443;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 172.--Marsan était une branche de la maison de Lorraine: cf. Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_, article Marsan. Mme THIROUX D'ARCONVILLE, Marie-Geneviève-Charlotte Darlus (1720-1805). Mariée à quatorze ans à Thiroux, conseiller au Parlement, elle fut atteinte de la petite vérole à vingt-trois ans, et on la vit alors abandonner les plaisirs du monde, prendre le costume d'une vieille femme, et ne plus s'occuper que des plaisirs de l'esprit. Elle étudia l'histoire, la médecine, la physique, la chimie, etc., suivit les cours d'anatomie et de botanique du Jardin du roi, et acquit des connaissances aussi étendues que variées. Elle réunissait dans son salon les hommes les plus distingués de son temps, et elle a publié de nombreux ouvrages: romans, histoire, morale, etc.[321]. [321] Joannis GUIGARD (_ouvrage cité_, t. I, p. 203) donne à Mlle Marie-Geneviève-Charlotte Darlus le nom de Thiroux de Lailly et la fait mourir en 1766.--Cf. Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_:--MICHAUD, _ouvrage cité_;--LAROUSSE, _ouvrage cité_;--etc. Comme la reine Marie Leszczynska, sa rivale auprès du roi, la MARQUISE DE POMPADOUR (1721-1764) avait le goût des arts, s'amusait à dessiner et à graver, et on avait constaté que le burin de la maîtresse triomphait de celui de l'épouse[322]. [322] Cf. Antony VALABRÈGUE, _ouvrage cité_, p. 25. La marquise de Pompadour aimait aussi les livres et la lecture. Elle protégea les artistes, les philosophes, les savants, et elle a été l'inspiratrice du goût artistique de son époque. Sa bibliothèque était considérable: «la partie du théâtre est la plus complète qui ait existé avant La Vallière»[323]. Ses livres, bien choisis, «habillés avec soin par Biziaux, qui fut plus tard le relieur de Beaumarchais, sont tous fort recherchés. Quelques-uns portent une inscription qui fait sourire quand on pense à la favorite qui les posséda la première. On lit au-dessus de ses armes: _Menus plaisirs du Roi!_ C'est un souvenir de leur passage dans l'établissement où fut portée, après la mort de Mme de Pompadour, une partie de sa bibliothèque[324].» [323] Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 65. [324] Édouard FOURNIER, _ouvrage cité_, p. 193. Encore une remarque empruntée au grand ouvrage d'Ernest Quentin-Bauchart (Avertissement, p. 3): «Diane de Poitiers, Catherine de Médicis, au XVIe siècle,--la Grande Mademoiselle et la comtesse de Verrue, au XVIIe,--Mme de Pompadour, au XVIIIe,--sont les seules qui aient laissé de véritables bibliothèques; et si d'autres, telles que Marie de Médicis, Anne d'Autriche, la duchesse de Bourgogne, la marquise de Maintenon, etc., ont possédé des livres qui jouissent également d'une grande faveur auprès des amateurs, c'est moins à leur valeur intrinsèque que cette faveur est due qu'à la beauté de leur reliure et à leur origine.» Mme de Pompadour s'est, tout comme Marie Leszczynska, occupée d'imprimerie. «Elle fit imprimer à Versailles, dans sa chambre, sous ses yeux, le _Cantique des Cantiques_ et le _Précis de l'Ecclésiaste_ paraphrasés par Voltaire; elle fit aussi imprimer _Rodogune, princesse des Parthes_, AU NORD, 1760, in-4, pour l'édition de laquelle M. de la Fizelière rapporte la curieuse note de M. de Marigny, qui se trouvait sur l'exemplaire du comte d'Ourche, de Nancy: «Ma sœur eut un jour la curiosité de voir imprimer. Le Roi fit venir un petit détachement de l'Imprimerie royale, et l'on fit imprimer dans la chambre de Mme de Pompadour, à Versailles, et sous ses yeux, la présente tragédie de _Rodogune_. Il en a été tiré très peu d'exemplaires.» «Comme l'appartement de ma sœur était situé au Nord, on a mis pour lieu d'impression: _Au Nord_. «Elle a gravé elle-même à l'eau-forte, d'après Boucher, la planche qu'on voit en tête du volume[325].» [325] Edmond et Jules DE GONCOURT, _Mme de Pompadour_, p. 255, note 1 (Paris, Firmin Didot, 1888, in-4). La DUCHESSE DE FLEURY, Anne-Madeleine-François (sic) d'Auxy de Monceaux (1721-....)[326]. [326] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 160. La MARQUISE DE GAMACHES, Jeanne-Gabrielle de la Mothe-Houdancourt, chanoinesse d'honneur du chapitre des dames de Neufville, diocèse de Lyon (1723?-1777)[327]. [327] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 162. MARIE-LOUISE DE MONTMORENCY-LAVAL, dernière abbesse de l'abbaye de Montmartre (1723-1794). Elle périt sur l'échafaud, durant la Révolution, et comme elle était d'une surdité complète, Fouquier-Tinville fit sur elle ce sinistre jeu de mots: «Elle a dû conspirer, mais elle a conspiré sourdement[328].» [328] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 448. La MARQUISE DE LA CROIX DE CASTRIES, Marie-Louise-Angélique de Talaru de Chalmazel (1723-....)[329]. [329] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 166. Mme DE CLERMONT, Alison ou Alise Tranquille (1724-1752)[330]. [330] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 147. MARIE-AMÉLIE-CHRISTINE DE SAXE, fille de Frédéric-Auguste II, électeur de Saxe et roi de Pologne, mariée, en 1738, à Charles III, roi d'Espagne (1724-1760)[331]. [331] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 127. La DUCHESSE DE NOAILLES, Catherine-Françoise-Charlotte Cossé-Brissac, morte sur l'échafaud (1724?-1793)[332]. [332] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 191. Mme D'ÉPINAY, Louise-Florence-Pétronille d'Esclavelle de la Live, marquise d'Épinay (1725-1783). Elle avait épousé un fermier général, et a été l'amie de J.-J. Rousseau, de Voltaire, de Diderot, de Duclos, de Grimm, de Saint-Lambert, de l'abbé Galiani, etc. Elle a laissé des _Mémoires_, qui, a-t-on dit, «sont peut-être l'ouvrage qui nous fait le mieux connaître la société polie du dix-huitième siècle[333]». [333] Paul BOITEAU, Introduction aux _Mémoires de Mme d'Épinay_, t. I, p. 1 (Paris, Charpentier, s. d.).--Cf. aussi Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 449. MARIE-THÉRÈSE-ANTOINETTE D'ESPAGNE, première femme du Dauphin, Louis de France, fils de Louis XV (1726-1746)[334]. [334] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 448. La MARQUISE DE VASSÉ, Louise-Madeleine Courtarvel de Pezé (1727-1763)[335]. [335] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 205. La MARQUISE DE DURFORT-CIVRAC, Marie-Françoise de Pardaillan de Gondrin d'Antin (1728-1764)[336]. [336] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 154. La PRINCESSE DE GRIMALDI, Marie-Christine-Chrétienne de Saint-Simon de Rouvray (1728-1774)[337]. [337] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 165. La DUCHESSE DE NOAILLES, Anne-Claude-Louise d'Arpajon, duchesse de Mouchy et de Noailles; morte, ainsi que son mari, sur l'échafaud (1728?-1794)[338]. [338] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 191;--et Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 450. La CHEVALIÈRE ou plutôt le CHEVALIER D'ÉON, Charles-Geneviève-Louis-Auguste-André-Timothée de Beaumont d'Éon (1728-1810), célèbre aventurier, a laissé une bibliothèque intéressante[339]. [339] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. II, p. 451-452. En 1763, Louis XV l'autorisa ou lui ordonna, on ne sait trop pourquoi, de porter des habillements de femme, et ce costume, que le chevalier d'Éon conserva le reste de sa vie, fit naître, sur la nature de son sexe, des doutes qui ne furent levés définitivement qu'après sa mort et par le procès-verbal de son autopsie. On a de lui treize volumes d'histoire, d'économie politique, etc.[340]. [340] Cf. Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_.--Voir aussi une note de la _Correspondance de la marquise du Deffand_, édition M. de Lescure, t. II, p. 111, note 3. Louis Jourdan a publié, sur le chevalier d'Éon, une sorte de roman, _un Hermaphrodite_ (Paris, Dentu, 1861), dont la paternité lui a été contestée par Frédéric Gaillardet: cf. LORENZ, _Catalogue général..._ 1840-1865. t. III, p. 47, article Jourdan (Louis). L'IMPÉRATRICE CATHERINE II, de Russie (1729-1796). Elle avait orné son esprit et fortifié son caractère par les lectures les plus sérieuses: Tacite, Plutarque, Bayle, Montesquieu, Voltaire, etc. Voltaire la nommait _la Sémiramis du Nord_. Elle attira Diderot à sa cour, mais ne put l'y retenir que quelques mois. Elle lui vint très délicatement en aide, en lui achetant sa bibliothèque au prix de 15.000 francs, «mais à la condition qu'il la garderait sa vie durant, et consentirait à en être le bibliothécaire avec un traitement annuel de 1.000 francs». Elle poussa même la générosité jusqu'à lui payer cinquante ans d'avance,--soit 50.000 francs[341]. [341] Cf. LAROUSSE, _ouvrage cité_, article Diderot. Mme D'ALIGRE, Françoise-Madeleine Talon, première femme du président d'Aligre (1730-1767)[342]. [342] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 131. La DUCHESSE DE GRAMONT-CHOISEUL, Béatrix de Choiseul-Stainville, l'altière et impérieuse sœur du duc de Choiseul, ministre de Louis XV (1730-1794). Elle posséda une belle bibliothèque, bien composée, et témoigna de son amour pour les arts et les lettres. Il est très fréquemment question d'elle dans la correspondance de Mme du Deffand. Incarcérée pendant la Révolution, la duchesse de Gramont (ou Grammont) fut interrogée par Fouquier-Tinville, qui lui demanda si elle n'avait pas envoyé d'argent aux émigrés. «J'allais dire non, répondit-elle, mais ma vie ne vaut pas un mensonge.» Elle périt sur l'échafaud, fièrement, comme elle avait vécu[343]. [343] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 108;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 163. La COMTESSE D'HOUDETOT, Élisabeth-Françoise-Sophie de la Live de Bellegarde (1730-1813), qui était la belle-sœur de Mme d'Épinay, se plaisait à versifier[344], et elle est surtout connue par sa longue liaison avec le poète Saint-Lambert, et la passion qu'elle inspira à Jean-Jacques. [344] Elle a même composé une scabreuse pièce de vers, dont Diderot parle dans une de ses lettres à Mlle Voland (Lettre XLI, 30 septembre 1760, t. I, p. 282-283; Paris, Paulin, 1830): «Mme d'Houdetot fait de très jolis vers; elle m'en a récité quelques-uns qui m'ont fait grand plaisir. Il y a tout plein de simplicité et de délicatesse. Je n'ai osé les lui demander; mais si je puis lui arracher un _Hymne aux tétons_ qui pétille de feu, de chaleur, d'images et de volupté, je vous l'enverrai. Quoiqu'elle ait eu le courage de me le montrer, je n'ai pas eu celui de le demander.» La bibliothèque de «Mme veuve d'Houdetot» fut vendue à Paris le 18 mai 1813 et jours suivants. Le catalogue en avait été dressé par Merlin. «Le no 596 était le manuscrit de _Julie ou la Nouvelle Héloïse_ (6 vol. in-8) transcrit par Jean-Jacques pour Mme d'Houdetot de 1757 à 1758, c'est-à-dire deux ans avant la publication. «La grande netteté qui règne dans les six volumes, dit une note de Merlin, atteste le soin que Rousseau apporta dans ce travail. On peut juger, par une note de Mme d'Houdetot mise en tête du premier volume, du cas que cette dame faisait du livre et de l'auteur[345].» [345] _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 351, article de M. Maurice Tourneux. La comtesse d'Houdetot avait une belle-fille du même nom, la VICOMTESSE D'HOUDETOT, «femme aimable, spirituelle, morte de très bonne heure; elle laissa quelques vers que ses amis se plurent à recueillir après elle et à faire imprimer en un tout petit volume (_Poésies de la vicomtesse d'Houdetot_, 1782). Or, on y lit en tête une notice, qu'on sait être de la plume du cardinal Loménie de Brienne. Le prélat, le croirait-on? y loue cette jeune dame de son incrédulité: «Jamais on n'a vu, dit-il, dans une si jeune personne autant de philosophie; et cette philosophie influait également sur ses opinions et sur sa conduite. Elle n'admettait que ce qui lui paraissait évidemment prouvé, aimait à disputer, parce qu'elle avait presque toujours une opinion à elle, et ne cédait qu'à la conviction ou enfin à la convenance.» «Et lorsqu'il en vient à raconter la dernière maladie de cette jeune femme, le cardinal écrit: «Elle craignait la mort parce qu'elle devait la séparer de tout ce qui lui était cher. _Ma vie peut être remplie de peines_, disait-elle, _mais il est affreux de n'être rien; je crois la souffrance préférable au néant_.» «Le cardinal n'ajoute rien qui corrige cette opinion du néant après la mort, ni qui avertisse qu'il ne la partageait pas; c'est qu'il la partageait en effet,» conclut Sainte-Beuve[346]. [346] _Causeries du lundi_, t. XV, p. 229. Mme DE SARTINE, Marie-Anne Hardy du Plessis (1730-....). Son mari était le lieutenant général de police Sartine (1729-1801), qui, avec un zèle opiniâtre, avait rassemblé une collection considérable de documents sur l'histoire de Paris[347]. [347] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 200. MARIE-JOSÈPHE DE SAXE, seconde femme du Dauphin, fils de Louis XV, et mère de Louis XVI, de Louis XVIII et de Charles X (1731-1767). Elle fut mariée à quatorze ans, et son mari passa sa nuit de noces à pleurer sa première femme. Elle vécut toujours très retirée, et possédait une réelle érudition. Elle avait le goût des livres, et elle en imprima elle-même quelques-uns, sous la direction de Ch.-J.-B. Delespine, ancien imprimeur du roi, devenu l'huissier de son cabinet[348]. [348] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 97. «En 1758, sous la direction de Delespine, paraît un livre exécuté à Versailles, dans l'imprimerie de la Dauphine, mère de Louis XVI, intitulé _Élévation du cœur à Jésus-Christ_, etc., _imprimé de la main de madame la Dauphine_, in-16.» (Ambroise FIRMIN-DIDOT. _Essai sur la typographie_, colonne 847; Paris, Didot, 1851.) La PRINCESSE DE CONTI, Fortunée-Marie d'Este, fille du duc de Modène (1731-1803)[349]. [349] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 117. La DUCHESSE DE VILLEROI ou DE NEUFVILLE DE VILLEROY ou DE NEUVILLE-VILLEROI, Jeanne-Louise-Constance d'Aumont (1731-1816), a laissé une très importante bibliothèque, composée surtout de poésies et de romans, et qui se distinguait par la beauté des exemplaires et l'élégance des reliures. «Elle eut, de son temps, une grande réputation d'indépendance et d'originalité, et fournit des articles piquants aux _Actes des apôtres_ et au _Petit-Gauthier_, deux feuilles royalistes des premiers temps de la Révolution. On lui doit aussi une traduction de l'_Histoire de la Grèce_ de Gillies, Goldsmith et Gast, revue par Leuliette (Paris, 1808, 2 vol. in-8)[350]. [350] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 454-455;--Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 189;--et LAROUSSE, _ouvrage cité_. La DUCHESSE DE CRUSSOL, Madeleine-Julie-Victoire de Pardaillan-Gondrin (1731-....)[351]. [351] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 148. MESDAMES DE FRANCE, filles de Louis XV: MARIE-ADÉLAÏDE (1732-1800); VICTOIRE-LOUISE-MARIE-THÉRÈSE (1733-1799); SOPHIE-PHILIPPINE-ÉLISABETH-JUSTINE (1734-1782). Madame Adélaïde (Marie-Adélaïde), que son père appelait familièrement _Loque_, apprit l'anglais, l'italien, les hautes mathématiques, etc. Au dire de Quentin-Bauchart, c'est la seule des trois qui «fut une véritable bibliophile[352]». Elle faisait relier ses livres en maroquin rouge. [352] _Ouvrage cité_, t. II, p. 131. Madame Victoire, surnommée de même _Coche_ par Louis XV, faisait relier ses livres en maroquin vert. Madame Sophie, _Graille_ pour son père, les faisait relier en maroquin citron[353]. [353] Cf. Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 123. Tous ces volumes étaient timbrés aux armes de France dans un écu en losange[354] surmonté d'une couronne ducale. [354] «L'écu des filles non mariées a la forme d'un losange; plus généralement elles le portent en ovale.» (H. GOURDON DE GENOUILLAC, _l'Art héraldique_, chap. I, p. 14; Bibliothèque de l'enseignement des beaux-arts.) Les trois sœurs étaient de grandes liseuses: «elles faisaient, dit le duc de Luynes, des entreprises de grande lecture, dont elles venaient à bout[355].» [355] Dans Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 120. Les catalogues manuscrits des livres de «Mesdames» se trouvent actuellement à la Bibliothèque de l'Arsenal. Celui de la bibliothèque de Madame Adélaïde, daté de 1786, comprend 430 pages et 5286 articles; il forme un superbe in-folio, écrit en belle bâtarde et en ronde, et est orné d'un frontispice colorié, où Madame Adélaïde est représentée en Minerve, casque en tête, devant un bureau chargé de livres, de cartes et d'instruments de physique. Notons que Madame Victoire contractait volontiers des emprunts dans les collections publiques et ne restituait pas toujours ce qui lui avait été prêté. «Nombre d'estampes demandées par elle en communication ne sont jamais rentrées», nous apprend un ancien conservateur de la Bibliothèque nationale, Henri Bouchot[356]. [356] _Les Reliures d'art à la Bibliothèque nationale_, p. XXI.--Voir aussi, sur Mesdames Adélaïde, Victoire et Sophie,--«que l'on connaissait sans envie du bien, sans âme, sans caractère, sans franchise, sans amour pour leur père... Madame Sophie était une manière d'automate, aussi nulle pour l'esprit que pour le caractère...»--le DUC DE LA ROCHEFOUCAULD-LIANCOURT, _Mémoire sur la mort de Louis XV_, _dans_ SAINTE-BEUVE, _Portraits littéraires_, t. III, p. 533;--et _Nouveaux Lundis_, t. VIII, p. 326, article sur Marie-Antoinette. Une autre fille de Louis XV, la dernière, Madame LOUISE (Louise-Marie: 1737-1787), qui fut religieuse aux Carmélites de Saint-Denis, était encore plus passionnée que ses sœurs pour la lecture. A une certaine époque, «Mme Campan la lui faisait cinq heures par jour; et comme ce n'était pas sans fatigue, la princesse lui préparait elle-même de l'eau sucrée, et s'excusait de la faire lire si longtemps, sur la nécessité d'achever un cours de lecture qu'elle s'était prescrit»[357]. [357] Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 122. C'est Madame Louise, qui, durant ses derniers moments, redevenue princesse dans son délire sans cesser d'être nonne, et croyant toujours commander à son cocher ou à son écuyer, lui intimait cet ordre, de sa voix défaillante: «Au paradis, vite, vite! au grand galop!»[358]. [358] Cf. SAINTE-BEUVE, _Nouveaux lundis_, t. VIII, p. 130, note 1. La MARQUISE DE LAMETH, Marie-Thérèse de Broglie (1732-1819)[359]. [359] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 169. La DUCHESSE DE ROHAN-CHABOT, Émilie de Crussol d'Uzès (1732-....)[360]. [360] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 197. La MARQUISE DE VOYER D'ARGENSON, Jeanne-Marie-Constance de Mailly (1734-1783)[361]. [361] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 209. La DUCHESSE DE MAZARIN, Louise-Jeanne de Durfort (1735-1781). La vente de ses livres eut lieu à Paris, peu après sa mort, le 12 janvier 1782 et jours suivants[362]. [362] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 182;--et la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 350, article de M. Maurice Tourneux. La DUCHESSE DE CHOISEUL-STAINVILLE, Louise-Honorine Crozat du Châtel, femme du ministre de Louis XV (1735?-1802). De même que son père, que son mari, et que sa belle-sœur, la duchesse de Gramont-Choiseul, mentionnée ci-dessus à son rang chronologique, la duchesse de Choiseul aima passionnément les livres. Elle protégea les savants et les gens de lettres et particulièrement l'abbé Barthélemy[363]. C'est elle qui, en vrai philosophe de son siècle, écrivait un jour à son amie Mme du Deffand qu'«il ne faut parler de Dieu ni en bien ni en mal»[364]. [363] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 452-453;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 146. [364] Lettre à Mme du Deffand, 23 juin 1771 (_Correspondance de Mme du Deffand_, t. I, p. 443; édition Sainte-Aulaire). La DUCHESSE DE RIOCOURT ou RIOCOUR, Madeleine-Jeanne-Claire Morel, dame de Vitry-la-Ville, Vauciennes, Chappes, etc., baronne du Bois ou de Boys (1735-1812)[365]. [365] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 197;--et Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. La PRINCESSE DE CONDÉ, Charlotte-Godefride-Élisabeth de Rohan-Soubise, femme de Louis-Joseph, duc de Bourbon, prince de Condé (1737?-1760)[366]. [366] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 453. Mme LE PELLETIER ou LE PELETIER, Louise-Suzanne de Beaupré (1737?-1762). Son mari était président à mortier au Parlement de Paris[367]. [367] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 176. Mme DE MONTESSON, Charlotte-Jeanne Béraud de la Haie de Riou, marquise de Montesson (1737-1806). Devenue veuve, en 1769, du marquis de Montesson, elle inspira à Louis-Philippe, duc d'Orléans, petit-fils du Régent, une passion si vive qu'il l'épousa secrètement. «Le roi, écrit M. Paul Chaponnière[368], donna son consentement verbal (à ce mariage), à condition que la marquise ne prendrait jamais le nom de duchesse d'Orléans ni les armes de la famille. Elle n'en habita pas moins le Palais-Royal, mais la famille royale s'abstint d'assister aux spectacles organisés par le duc d'Orléans. Celui-ci, selon un mot de l'ambassadeur de Naples, ne pouvant faire Mme de Montesson duchesse d'Orléans, s'était fait lui-même M. de Montesson.» [368] _Madame de Montesson et ses œuvres anonymes_, dans la _Revue des livres anciens_, année 1894, t. II, p. 111-112. La marquise de Montesson était sœur utérine de la mère de Mme de Genlis, par conséquent tante de cette dernière. Bien que, au dire de sa nièce, «elle fût d'une ignorance extrême et n'eût pas la moindre instruction», elle eut l'idée singulière de devenir auteur[369], et elle a composé, après avoir sommairement étudié sans doute les règles de la grammaire et de la prosodie, un grand nombre de pièces de théâtre, qu'elle faisait représenter chez elle, et où elle jouait elle-même. Elle a laissé une importante bibliothèque qui a été acquise par M. de Soleinne[370]. [369] Cf. Paul CHAPONNIÈRE, _ouvrage cité_, p. 112-113. [370] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 456;--et Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. Alexandre Dumas, qui a eu occasion, dans son enfance, d'aller chez Mme de Montesson et de la voir de près, donne sur elle, dans ses _Mémoires_[371], d'intéressants renseignements: «Le caractère excellent de Mme de Montesson fit longtemps le bonheur de ce prince (du duc d'Orléans) et son propre bonheur. «Elle s'occupait de musique et des chasses, dont elle partageait les plaisirs avec le prince. «Elle avait un théâtre dans l'hôtel qu'elle habitait à la Chaussée d'Antin, théâtre sur lequel elle jouait avec lui. Le duc d'Orléans, né bonhomme et naïf, réussissait dans les rôles de paysan, et Mme de Montesson dans ceux de bergère et d'amante. «Feu Mme la duchesse d'Orléans avait prostitué cette maison au point que les dames n'y venaient qu'avec des réserves étudiées et suivies. Mme de Montesson y rétablit le bon ton, la dignité, rouvrit la porte aux plaisirs délicats, et ranima le goût des arts, du bel esprit, et y ramena souvent la gaieté et la bonhomie.» [371] Tome I, chap. I, p. 11. Voir aussi même tome, chap. XVIII, p. 215. En mourant, Mme de Montesson laissa toute sa fortune au comte de Valence, qui avait épousé Mlle de Genlis. Celle-ci, qui l'appelait sa _tantâtre_, a parlé d'elle dans ses Souvenirs, et généralement, ainsi que nous l'avons vu tout à l'heure, elle ne la juge pas très favorablement. «Mme de Montesson, dit-elle encore, jouait à mon gré fort mal la comédie, parce qu'en cela, comme en toutes choses, elle manquait de naturel.» Entre autres ouvrages, on doit à Mme de Montesson un recueil intitulé _OEuvres anonymes_ (Paris, 1782-1785, 8 vol. in-8), comprenant des mélanges et des pièces de théâtre, qui n'a été tiré qu'à douze exemplaires, est devenu très rare, et, à cause de cette rareté, est recherché des bibliophiles[372]. [372] Cf. LAROUSSE, _ouvrage cité_;--MICHAUD, _ouvrage cité_. M. Paul CHAPONNIÈRE (_ouvrage cité_, p. 114 et suiv.) donne en détail la bibliographie des œuvres de Mme de Montesson. ANNE-THÉRÈSE-PHILIPPINE D'YVE (1738-1814), dame belge, née à Bruxelles. Elle fut «un des beaux esprits de son temps», dit Joannis Guigard[373]; ses idées démocratiques et l'amour du bien la rendirent célèbre en Belgique. Sa bibliothèque passait, à juste titre, pour l'une des plus riches de l'Europe, soit par la rareté des ouvrages, soit par l'excellence de la condition des volumes. [373] _Ouvrage cité_, t. I, p. 209-210. MADELEINE-CHARLES-ÉMILIE LE FÈVRE-CAUMARTIN DE LA COUR (1738?-1814)[374]. [374] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 166. La MARQUISE DE PIGNATELLI D'EGMONT, Jeanne-Sophie-Élisabeth-Louise-Armande-Septimanie de Richelieu (1740-1773)[375]. [375] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 192. La MARQUISE DE FOUQUET, Hélène-Julie-Rosalie Mancini-Mazarini, dite Mademoiselle de Nevers (1740-1780?)[376]. [376] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 161. Mme DU BARRY, Marie-Jeanne Gomard Vaubernier, comtesse du Barry, maîtresse de Louis XV (1743-1793)[377]. [377] La date de naissance de la fameuse courtisane a été très contestée: les uns ont dit 1744, d'autres 1746. Les Goncourt, dans leur ouvrage sur _La Du Barry_, pages 6 et 25 (Paris, Charpentier, 1891) ont traité cette question et publié l'acte authentique. «Jeanne, fille naturelle d'Anne Béqus dite Quantiny, est née le dix-neuvième août de l'an mil sept cent quarante-trois...» Elle était fille naturelle d'une couturière nommée Bécu ou Béqus, dite Quantiny ou Cantigny; elle savait à peine lire, et écrivait plus mal encore qu'elle ne lisait. «La Du Barry, quoique fort belle, n'était guère en état de former, seule, une bibliothèque, remarque Joannis Guigard[378], elle qui ne pouvait pas écrire un mot sans faire une faute d'orthographe: son libraire se chargea de la formation de cette bibliothèque. On y remarqua d'abord de bons ouvrages d'histoire, de littérature et même de morale; puis des productions plus légères, que son fournisseur y fit entrer sans doute pour distraire les instants du monarque blasé. Louis XV, dit-on, parut enchanté du goût littéraire de sa nouvelle maîtresse, et, lorsque celle-ci envoya sa collection au château de Versailles, il s'écria: «La marquise de Pompadour avait plus de livres que la comtesse, mais ils n'étaient pas si bien reliés ni si bien choisis; aussi nous la nommerons bibliothécaire de Versailles.» [378] _Ouvrage cité_, t. I, p. 152. La bibliothèque de Mme du Barry, bibliothèque sans importance,--«des livres sans intérêt bibliographique, mal reliés, et qui ne se recommandent que par la célébrité de mauvais aloi de celle qui les a possédés», déclare Ernest Quentin-Bauchart[379], a été étudiée en détail par M. Léon de Labessade[380] et par Paul Lacroix. [379] _Ouvrage cité_, t. II, p. 190. «Elle se composait de 1068 volumes de toutes grandeurs», dit Paul Lacroix (bibliophile Jacob) dans une lettre adressée au _Monde illustré_, 31 mars 1860, p. 214-215, et citée par Édouard FOURNIER, _l'Art de la reliure_, p. 194, note 1. [380] Dans les _Miscellanées bibliographiques_, 2e partie, p. 103-132 (Paris, Rouveyre, 1879). La Du Barry inscrivait sur ses livres cette fière, galante et plaisante devise: _Boutez en avant!_ Ils étaient au nombre d'un millier, et, pour la plupart, reliés en maroquin rouge[381]. Parmi ces volumes, il y en avait paraît-il, d'un genre spécial; la noble dame possédait _un enfer_, qui, dit-on, est devenu la propriété d'un amateur tourangeau[382]. [381] Cf. Paul LACROIX (bibliophile Jacob), _lieu cité_. [382] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 190-191. «Aimer le livre, l'acquérir, le conserver, lui procurer le vêtement et le couvert, écrit M. Léon de Labessade en terminant son étude sur la bibliothèque de la Du Barry, c'est travailler pour l'avenir, c'est faire œuvre d'artiste et de savant. Mme du Barry, elle, conserva les livres; il lui sera beaucoup pardonné, parce qu'elle prodigua avec intelligence[383] le maroquin et les petits fers. Que la terre lui soit légère: elle aima le livre!» [383] «Avec intelligence» me semble contestable. La PRINCESSE DE CHIMAY, Laure-Auguste Fitz-James (1744-1814)[384]. [384] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 146. La DUCHESSE DE DURFORT-CIVRAC, Adélaïde-Philippine de Durfort de Lorges (1744-1819)[385]. [385] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 155. La DUCHESSE DE DURFORT DE DURAS, Louise-Henriette-Charlotte-Philippine de Noailles (1745-1832)[386].» [386] Cf. Joannis GUIGARD. _ouvrage cité_, t. I, p. 156. La DUCHESSE DE LA ROCHEFOUCAULD, Félicité-Sophie de Lannion (1745-....). Le duc François-Alexandre-Frédéric de la Rochefoucauld, duc de Liancourt, qu'elle épousa en 1764, fut pair de France, membre de l'Académie des sciences, et le fondateur ou promoteur de nombre d'établissements utiles[387]. [387] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 170. Mme DE GENLIS, marquise de Brulard ou Brulart, née Stéphanie-Félicité Ducrest de Saint-Aubin (1746-1830)[388]. [388] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 141. Mme de Genlis a beaucoup écrit[389] et encore plus menti, dans ses _Mémoires_ et ailleurs. On a très justement dit d'elle qu'elle était «le mensonge incarné». «Nul écrivain peut-être n'a poussé plus loin le brigandage littéraire que Mme de Genlis. Elle eut, à ce sujet, en 1830, un procès déplorable avec le libraire Roret, éditeur de la collection des _Manuels_. Elle s'était engagée, moyennant 400 francs, à composer pour lui un _Manuel encyclopédique de l'enfance_. On allait imprimer le manuscrit, qui avait été payé, lorsqu'on s'aperçut qu'il était la copie exacte d'un livre du même genre, publié, en 1820, par M. Masselin. Il fallut un jugement pour que le libraire obtint la restitution de son argent[390].» [389] «On n'a jamais été plus décidément _écriveuse_ que Mme de Genlis.» (SAINTE-BEUVE, _Causeries du lundi_, t. III, p. 25.) [390] Ludovic LALANNE, _Curiosités littéraires_, p. 142.--Voir aussi Honoré BONHOMME, _Mme la comtesse de Genlis, sa vie, son œuvre, sa mort_ (Paris, Jouaust, 1885). On trouve dans _Choses vues_ de Victor Hugo (année 1844, le roi Louis-Philippe, p. 79-82; Paris, Charpentier, 1888), de curieux détails sur Mme de Genlis, que Victor Hugo tenait de la bouche même de Louis-Philippe, ancien élève, comme on le sait, de cette illustre dame et maîtresse femme: «C'était un rude précepteur, je vous jure. Elle nous avait élevés avec férocité, ma sœur et moi. Levés à six heures du matin, hiver comme été, nourris de lait, de viandes rôties et de pain; jamais une friandise, jamais une sucrerie, force travail, pas de plaisir. C'est elle qui m'a habitué à coucher sur des planches. Elle m'a fait apprendre une foule de choses manuelles; je sais, grâce à elle, un peu faire tous les métiers, y compris le métier de frater. Je saigne mon homme comme Figaro. Je suis menuisier, palefrenier, maçon, forgeron. Elle était systématique et sévère. Tout petit, j'en avais peur; j'étais un garçon faible, paresseux et poltron; j'avais peur des souris! elle fit de moi un homme assez hardi et qui a du cœur. En grandissant, je m'aperçus qu'elle était fort jolie. Je ne savais pas ce que j'avais près d'elle. J'étais amoureux, mais je ne m'en doutais pas. Elle, qui s'y connaissait, comprit et devina tout de suite. Elle me traita fort mal. C'était le temps où elle couchait avec Mirabeau. Elle me disait à chaque instant: «Mais, monsieur de Chartres, grand dadais que vous êtes, qu'avez-vous donc à vous fourrer toujours dans mes jupons!»--Elle avait trente-six ans, j'en avais dix-sept.» Ce qui n'empêcha pas, comme le prouve Gaston Maugras, dans l'_Idylle d'un gouverneur_ (la comtesse de Genlis et le duc de Chartres; Paris, Plon, 1904), ladite gouvernante ou _gouverneur_ de parfaire l'éducation de son élève «jusqu'à et y compris la suprême éducation de l'amour». «Les dernières années de Mme de Genlis, continue Victor Hugo, furent pauvres et presque misérables. Il est vrai qu'elle n'avait aucun ordre et semait l'argent sur les pavés. Le roi (Louis-Philippe) la venait voir souvent; il la visita jusqu'aux derniers jours de sa vie. Sa sœur, Mme Adélaïde, et lui ne cessèrent de témoigner à Mme de Genlis toute sorte de respect et de déférence. Mme de Genlis se plaignait seulement un peu de ce qu'elle appelait la ladrerie du roi. Elle disait: «Il était prince, j'en ai fait un homme; il était lourd, j'en ai fait un homme habile; il était ennuyeux, j'en ai fait un homme amusant; il était poltron, j'en ai fait un homme brave; il était ladre, je n'ai pu en faire un homme généreux. Libéral, tant qu'on voudra; généreux, non.» La marquise THIROUX DE CROSNE, Anne-Adélaïde de la Michodière (1747-....)[391]. [391] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 203. La PRINCESSE DE LAMBALLE, Marie-Thérèse-Louise de Savoie-Carignan (1748-1792). La princesse de Lamballe inspira, comme on le sait, une vive tendresse à Marie-Antoinette, lui témoigna un grand dévouement, et fut massacrée à la prison de la Force le 3 septembre 1792. Elle a laissé un petit nombre de livres, qui sont de condition médiocre[392]. [392] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 223. La MARQUISE DE MAILLY, Marie-Anne de Talleyrand-Périgord (1748-....)[393]. [393] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 179. La DUCHESSE DE POLIGNAC, Yolande-Martine-Gabrielle de Polastron, femme du duc de Polignac et gouvernante des enfants de France (vers 1749-1793). Amie intime et favorite de Marie-Antoinette, qui la combla d'honneurs, elle, son mari et sa famille, ce qui n'empêcha pas le duc et la duchesse de Polignac d'être des premiers à émigrer et à abandonner leur bienfaitrice (16 juillet 1789)[394]. [394] Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. Elle est rangée par Quentin-Bauchart[395] et par Joannis Guigard[396] au nombre des femmes bibliophiles. [395] _Ouvrage cité_, t. II, p. 457. [396] _Ouvrage cité_, t. I, p. 193. Sans doute par suite d'une faute d'impression, Joannis Guigard fait naître la duchesse de Polignac en 1739. MARIE-LOUISE-THÉRÈSE DE BOURBON, fille de Philippe, duc de Parme, femme de Charles IV, roi d'Espagne (1751-1819)[397]. [397] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 128. Mme CARLIN LE BRET, née Hue de Miromesnil (1751-....)[398]. [398] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 142. La COMTESSE D'ALBANY, femme du prétendant anglais Charles-Édouard Stuart, puis du poète Alfieri, et amie du peintre Xavier Fabre, de Montpellier (1752-1824). Elle avait la passion de la lecture, et une passion qui ne fit que s'accroître avec l'âge. Dans sa retraite de Florence, après sa promenade matinale aux Cascine, elle se réfugiait au milieu de ses livres, et ne les quittait pour ainsi dire plus. «C'est un grand plaisir, écrivait-elle en décembre 1802, que de passer son temps à parcourir les différentes idées et opinions de ceux qui ont pris la peine de les mettre sur le papier. _C'est le seul plaisir d'une personne raisonnable à un certain âge; car les conversations sont médiocres et bien faibles, et toujours très ignorantes..._ Je passe ma journée, au moins une grande partie, au milieu de mes livres... Je ne trouve pas de meilleure et plus sûre compagnie: au moins on peut penser avec eux.» «_Les livres_, disait-elle encore, _ont toujours plus d'esprit que les hommes qu'on rencontre_.» La comtesse d'Albany faisait de Montaigne sa lecture habituelle: «C'est mon bréviaire que ce Montaigne, ma consolation, et la patrie de mon âme et de mon esprit», déclarait-elle[399]. [399] Cf. SAINTE-BEUVE, _Nouveaux Lundis_, t. V, p. 437, 424 et 426; et t. VI, p. 55;--et Edmond et Jules DE GONCOURT, _Portraits intimes du dix-huitième siècle_, la comtesse d'Albany, p. 442 et 446. La COMTESSE DE PROVENCE, Marie-Joséphine-Louise de Savoie, fille de Victor-Amédée III, roi de Sardaigne, mariée, en 1771, à Louis-Stanislas-Xavier, comte de Provence, plus tard Louis XVIII (1753-1810). Comme son époux, elle eut le goût des lettres et des arts. Sa bibliothèque était composée avec beaucoup d'intelligence, et comprenait 1665 volumes, la plupart reliés en maroquin rouge, qui ont été dispersés à la Révolution[400]. [400] Cf. ERNEST QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 314. Mlle RAUCOURT (1753-1815), la fameuse tragédienne si décriée pour ses mœurs, a donné, en certaine occasion, un témoignage de son affection pour ses livres. Après avoir fait, à ses débuts, «les délices de tout Paris», elle s'était vue huée sur la scène, à cause de ses scandales, et peu à peu sa situation était devenue des plus obérées. «Avec mille écus de rente, elle a trouvé le moyen de faire pour cent mille écus de dettes depuis quatre ans qu'elle était à la Comédie[401].» [401] Cf. Jean DE REUILLY, _La Raucourt et ses amies_, p. 63-64 (Paris, Daragon, 1909). Dans le courant de l'année 1779, tout fut saisi chez elle; et, désireuse de sauver quelques débris de sa fortune, c'est à ses livres et à ses estampes que Mlle Raucourt donna la préférence. Elle fit transporter chez son intime amie et émule Mme de Sourques, «une grande malle renfermant quantité de livres couverts en maroquin rouge, livres de théâtre et estampes des meilleurs auteurs... Ce fut avec beaucoup de peine que le commissaire Boullanger en obtint la restitution et la réintégration au logis de la tragédienne, à la Chaussée d'Antin[402].» [402] Jean DE REUILLY, _ouvrage cité_, p. 217. Parmi les ouvrages figurant dans la bibliothèque de Mlle Raucourt,--et tous prouvent que cette bibliothèque était des mieux composées,--nous citerons: le dictionnaire de Trévoux, le dictionnaire de Moréri, le théâtre de Corneille, le théâtre de Voltaire, Molière, La Chaussée, Grécourt, Racine, Destouches, Boileau, l'_Héloïse_ de Jean-Jacques Rousseau, Regnard, Crébillon, Virgile, Anacréon, Sapho[403], etc. [403] «C'était fatal!» ajoute ici, en note, M. Jean DE REUILLY, _ouvrage cité_, p. 218, à qui j'emprunte cette nomenclature, et qui donne, en cet endroit, le catalogue détaillé de cette bibliothèque. La DUCHESSE D'ORLÉANS, Marie-Adélaïde de Bourbon-Penthièvre, femme de Louis-Philippe-Joseph, duc d'Orléans, dit _Égalité_ (1753-1821). Elle fut la mère du roi Louis-Philippe et de Madame Adélaïde (Eugène-Louise)[404]. [404] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, p. 458. Dès son bas âge, Mme ROLAND, Marie ou Manon, Jeanne Phlipon (1754-1793), témoigna le goût le plus vif pour la lecture. Ainsi que son maître Rousseau, elle ne sait non plus comment elle apprit à lire: «Vive sans être bruyante, et naturellement recueillie, je ne demandais qu'à m'occuper, écrit-elle dans ses _Mémoires_[405], et saisissais avec promptitude les idées qui m'étaient présentées. Cette disposition fut mise tellement à profit que je ne me suis jamais souvenue d'avoir appris à lire; j'ai ouï dire que c'était chose faite à quatre ans, et que la peine de m'enseigner s'était, pour ainsi dire, terminée à cette époque, parce que, dès lors, il n'avait plus été besoin que de ne pas me laisser manquer de livres. Quels que fussent ceux qu'on me donnait ou dont je pouvais m'emparer, ils m'absorbaient tout entière, et l'on ne pouvait plus me distraire que par des bouquets. La vue d'une fleur caresse mon imagination et flatte mes sens à un point inexprimable; elle réveille avec volupté le sentiment de l'existence. Sous le tranquille abri du toit paternel, j'étais heureuse dès l'enfance avec des fleurs et des livres: dans l'étroite enceinte d'une prison, au milieu des fers imposés par la tyrannie la plus révoltante, j'oublie l'injustice des hommes, leurs sottises et mes maux, avec des livres et des fleurs[406]... [405] Tome III, p. 11-12 et 23-29 (Paris, Bibliothèque nationale, 1869). [406] «Des livres et des fleurs», ce rapprochement, cette dualité, se retrouve plus d'une fois dans l'histoire littéraire, dans la vie et les goûts des bibliophiles. C'est d'abord Cicéron traçant le portrait de «l'homme heureux»: _Si hortum in bibliotheca habes, deerit nihil_, écrit-il (_Ad familiares_ [_Varroni_], No 451; CICÉRON, _OEuvres complètes_, t. V, p. 411; collection Nisard; Paris, Didot, 1881). Puis Urbain Chevreau (1615-1701), qui avait été secrétaire de la reine Christine de Suède (dans Charles NODIER, _l'Amateur de livres_, les Français peints par eux-mêmes, t. II, p. 83; Paris, Delahays, s. d.): «Je ne m'ennuie point dans ma solitude, où j'ai une bibliothèque assez nombreuse pour un ermite, et admirable pour le choix des livres... J'y ai des tableaux, des estampes; un grand parterre tout rempli de fleurs, des arbres fruitiers;» etc. Et M. Octave Uzanne (_Nos amis les livres_, p. 268): «Seigneur, s'écriait un ancien, accordez-moi une maison pleine de livres, un jardin plein de fleurs!» Il semble que, dans cette prière, soit contenue toute la quintessence de la sagesse humaine: les fleurs et les livres masquent les tristesses de cette vie, et nous font aller en souriant, l'œil égayé, l'esprit bienheuré, jusqu'au jour de la grande échéance définitive, au vrai quart d'heure de Rabelais.» Cf. aussi le célèbre sonnet de l'imprimeur Plantin (1514-1589) sur «le Bonheur de ce monde»: Avoir une maison commode, propre et belle, Un jardin tapissé d'espaliers odorants, Etc. (Cf. mon ouvrage _le Livre_, t. I, p. 181, note 1.) «Avec les livres élémentaires dont on avait soin de me fournir, j'épuisai bientôt ceux de la petite bibliothèque de la maison. Je dévorais tout, et je recommençais les mêmes lorsque j'en manquais de nouveaux. Je me souviens de deux in-folio de _Vies des Saints_, d'une _Bible_ de même format en vieux langage, d'une ancienne traduction des _Guerres civiles_ d'Appien, d'un _Théâtre de la Turquie_ en mauvais style, que j'ai relus bien des fois. Je trouvai ainsi _le Roman comique_ de Scarron et quelques recueils de prétendus bons mots, que je ne relus pas deux fois; les _Mémoires_ du brave de Pontis, qui m'amusaient, et ceux de Mlle de Montpensier, dont j'aimais assez la fierté, et quelques autres vieilleries, dont je vois encore la forme, le contenu et les taches. La rage d'apprendre me possédait tellement, qu'ayant déterré un _Traité de l'Art héraldique_, je me mis à l'étudier; il y avait des planches coloriées qui me divertissaient, et j'aimais à savoir comme on appelait toutes ces petites figures: bientôt j'étonnai mon père de ma science en lui faisant des observations sur un cachet composé contre les règles de l'art; je devins son oracle en cette matière, et je ne le trompais point. Un petit _Traité des Contrats_ me tomba sous la main; je tentai aussi de l'apprendre, car je ne lisais rien que je n'eusse l'ambition de le retenir; mais il m'ennuya, je ne conduisis pas le volume au quatrième chapitre. «La _Bible_ m'attachait, et je revenais souvent à elle. Dans nos vieilles traductions, elle s'exprime aussi crûment que les médecins; j'ai été frappée de certaines tournures naïves qui ne me sont jamais sorties de l'esprit. Cela me mettait sur la voie d'instructions que l'on ne donne guère aux petites filles; mais elles se présentaient sous un jour qui n'avait rien de séduisant, et j'avais trop à penser pour m'arrêter à une chose toute matérielle qui ne me semblait pas aimable. Seulement je me prenais à rire quand ma grand'maman me parlait de petits enfants trouvés sous des feuilles de choux, et je disais que mon _Ave Maria_ m'apprenait qu'ils sortaient d'ailleurs, sans m'inquiéter comment ils y étaient venus. «J'avais découvert, en furetant par la maison, une source de lectures que je ménageai assez longtemps. Mon père tenait ce qu'on appelait son _atelier_ tout près du lieu que j'habitais durant le jour; c'était une pièce agréable, qu'on nommerait un salon, et que ma modeste mère appelait la salle, proprement meublée, ornée de glaces et de quelques tableaux, dans laquelle je recevais mes leçons. Son enfoncement, d'un côté de la cheminée, avait permis de pratiquer un retranchement qu'on avait éclairé par une petite fenêtre; là, était un lit si resserré dans l'espace que j'y montais toujours par le pied, une chaise, une petite table et quelques tablettes; c'était mon asile. Au côté opposé, une grande chambre, dans laquelle mon père avait fait placer son _établi_, beaucoup d'objets de sculpture et ceux de son art, formait son atelier. Je m'y glissais le soir ou bien aux heures de la journée où il n'y avait personne; j'y avais remarqué une cachette où l'un des jeunes gens (des jeunes apprentis ou ouvriers employés par son père, le maître graveur Phlipon) mettait des livres. J'en prenais un à mesure; j'allais le dévorer dans mon petit cabinet, ayant grand soin de le remettre aux heures convenables, sans en rien dire à personne. C'était, en général, de bons ouvrages. Je m'aperçus un jour que ma mère avait fait la même découverte que moi; je reconnus dans ses mains un volume qui avait passé dans les miennes; alors je ne me gênai plus, et, sans mentir, mais sans parler du passé, j'eus l'air d'avoir suivi sa trace. Le jeune homme qu'on appelait Coursou, auquel il joignit le _de_ par la suite en se fourrant à Versailles instituteur des pages, ne ressemblait point à ses camarades; il avait de la politesse, un tact décent, et cherchait de l'instruction. Il n'avait jamais rien dit non plus de la disparition momentanée de quelques volumes; il semblait qu'il y eût entre nous trois une convention tacite. «Je lus ainsi beaucoup de voyages que j'aimais passionnément, entre autres ceux de Renard (Regnard), qui furent les premiers; quelques théâtres des auteurs du second ordre, et le _Plutarque_ de Dacier. Je goûtai ce dernier ouvrage plus qu'aucune chose que j'eusse encore vue, même d'histoires tendres qui me touchaient pourtant beaucoup, comme celle des époux malheureux de La Bédoyère, que j'ai présente, quoique je ne l'aie pas relue depuis cet âge. Mais Plutarque semblait être la véritable pâture qui me convînt. Je n'oublierai jamais le carême de 1763 (j'avais alors neuf ans), où je l'emportais à l'église en guise de Semaine sainte. C'est de ce moment que datent les impressions et les idées qui me rendaient républicaine, sans que je songeasse à le devenir. «_Télémaque_ et _la Jérusalem délivrée_ vinrent un peu troubler ces traces majestueuses. Le tendre Fénelon émut mon cœur, et le Tasse alluma mon imagination. Quelquefois je lisais haut, à la demande de ma mère: ce que je n'aimais pas; cela me sortait du recueillement qui faisait mes délices, et m'obligeait à ne pas aller si vite; mais j'aurais plutôt avalé ma langue que de lire ainsi l'épisode de l'île de Calypso, et nombre de passages du Tasse. Ma respiration s'élevait, je sentais un feu subit couvrir mon visage, et ma voix altérée eût trahi mes agitations. J'étais Eucharis pour Télémaque, et Herminie pour Tancrède; cependant, toute transformée en elles, je ne songeais pas encore à être moi-même quelque chose pour personne; je ne faisais point de retour sur moi, je ne cherchais rien autour de moi; j'étais elles et je ne voyais que les objets qui existaient pour elles; c'était un rêve sans réveil... «Ces ouvrages dont je viens de parler firent place à d'autres, et les impressions s'adoucirent; quelques écrits de Voltaire me servirent de distraction. Un jour que je lisais _Candide_, ma mère s'étant levée d'une table où elle jouait au piquet, la dame qui faisait sa partie m'appela du coin de la chambre où j'étais et me pria de lui montrer le livre que je tenais. Elle s'adresse à ma mère, qui rentrait dans l'appartement, et lui témoigne son étonnement de la lecture que je faisais; ma mère, sans lui répondre, me dit purement et simplement de reporter le livre où je l'avais pris. Je regardai de bien mauvais œil cette petite dame, à figure revêche, grosse à pleine ceinture, grimaçant avec importance, et depuis oncques je n'ai souri à Mme Charbonné. Mais ma bonne mère ne changea rien à son allure fort singulière, et me laissa lire ce que je trouvais, sans avoir l'air d'y regarder, quoiqu'en sachant fort bien ce que c'était. Au reste, jamais livre contre les mœurs ne s'est trouvé sous ma main; aujourd'hui même je ne sais que les noms de deux ou trois, et le goût que j'ai acquis ne m'a point exposée à la moindre tentation de me les procurer. «Mon père se plaisait à me faire de temps en temps le cadeau de quelques livres, puisque je les préférais à tout; mais, comme il se piquait de seconder mes goûts sérieux, il me faisait des choix fort plaisants, quant aux convenances; par exemple, il me donna le traité de Fénelon sur l'éducation des filles, et l'ouvrage de Locke sur celle des enfants; de manière qu'on donnait à l'élève ce qui est destiné à diriger les instituteurs. Je crois pourtant que cela réussissait très bien, et que le hasard m'a servie mieux peut-être que n'auraient fait les combinaisons ordinaires.» MARIE-PAULINE DE LÉZARDIÈRE (1754-1835) fut moins une bibliophile qu'une amie passionnée de la science historique. Elle a laissé un ouvrage considérable, originairement publié en huit volumes, la _Théorie des lois politiques de la France_, destiné à compléter une section de l'_Esprit des lois_ de Montesquieu, et qui a mérité les éloges d'Augustin Thierry. Voici ce que le grand historien écrit à ce sujet: «Il y avait, en 1771, dans un château éloigné de Paris[407], une jeune personne éprise d'un goût invincible pour les anciens monuments de notre histoire, et qui, selon le témoignage d'un contemporain[408], s'occupait avec délices des formules de Marculfe, des capitulaires et des lois des peuples barbares. Blâmée d'abord et combattue par sa famille, qui ne voyait dans cette passion qu'un travers bizarre, Mlle de Lézardière, à force de persévérance, triompha de l'opposition de ses parents, et obtint d'eux les moyens de suivre son penchant pour l'étude et les travaux historiques. Elle y consacra ses plus belles années, dans une profonde retraite, ignorée du public, mais soutenue par le suffrage de quelques hommes de science et d'esprit[409], et par l'ambition, un peu téméraire, de combler une lacune laissée par Montesquieu dans le livre de l'_Esprit des lois_[410].» [407] Au château de la Verrie (ou de la Vérie, Vendée, arrondissement de la Roche-sur-Yon). C'est là que naquit Mlle de Lézardière. Elle mourut au château de la Proutière (même département, arrondissement des Sables-d'Olonne, commune de Poiroux), qui appartient encore à la famille de Lézardière. [408] GAILLARD, dans le _Journal des savants_, avril 1791. [409] Malesherbes, entre autres, qui fit envoyer à Mlle de Lézardière des livres de la bibliothèque du roi et du couvent des bénédictins de Poitiers. [410] Augustin THIERRY, _Considérations sur l'histoire de France_, chap. III, p. 104 (Paris, Furne, 1868). Bien que terminé en 1791, et tout imprimé, le grand travail de Mlle de Lézardière ne put paraître à cette époque, les magasins du libraire ayant été pillés durant une émeute et l'édition à peu près détruite. Quelques exemplaires furent recueillis, puis circulèrent en 1801; mais ce n'est que longtemps après, en 1844, qu'un frère de Mlle de Lézardière publia une nouvelle édition, en quatre volumes in-8, de l'ouvrage de sa sœur[411]. [411] Cf. ID., _ouvrage cité_, p. 113;--LAROUSSE, _ouvrage cité_;--et Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. La REINE MARIE-ANTOINETTE, femme de Louis XVI (1755-1793). Elle avait rassemblé deux importantes bibliothèques, l'une au petit Trianon, l'autre au château des Tuileries. Ces volumes sont, pour la plupart, reliés en maroquin rouge aux armes de France et d'Autriche accolées. Le catalogue de la bibliothèque de Trianon a été publié par Louis Lacour, sous le titre de: _Livres du boudoir de la reine Marie-Antoinette_ (Paris, Gay, 1862, in-16). Un inventaire de cette même bibliothèque, dressé par ordre de la Convention, a été publié, d'après le manuscrit de la Bibliothèque de l'Arsenal, par Paul Lacroix, sous ce titre: _Bibliothèque de la reine Marie-Antoinette au petit Trianon_. Ces livres furent déposés, en 1800, à la Bibliothèque publique de Versailles, et les doubles vendus, en vertu d'une délibération du Conseil municipal de cette ville. On a prétendu que beaucoup des volumes de la bibliothèque de Trianon étaient d'un genre ultra-léger; Ernest Quentin-Bauchart conteste, avec raison, cette assertion, et estime que ces volumes ne sont pas plus «scandaleux» que ceux de tant d'autres grandes dames de cette époque. Ils n'ont même rien de scandaleux du tout[412]. [412] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 279.--Sur cette bibliothèque de Marie-Antoinette, on consultera avec intérêt un article de Jules Janin (sous le pseudonyme d'Éraste), publié dans _l'Indépendance belge_ et reproduit dans le journal _le Voleur_, no du 24 octobre 1862, p. 409-411. Il en ressort que Marie-Antoinette a possédé surtout des livres futiles, légers même, _Faublas_, par exemple; mais pas de livres obscènes, pas de livres «scandaleux». On rencontrait, en revanche, sur ses rayons, très peu de chefs-d'œuvre, très peu de bons ouvrages: rien de Bossuet, rien de Pascal, de J.-J. Rousseau, de Buffon, etc. Les livres de la seconde bibliothèque de Marie-Antoinette, de la Bibliothèque du château des Tuileries, «portaient presque tous, soit au dos, soit sur les plats, au bas des armes, les initiales couronnées C. T. [Château des Tuileries]. Ils furent transportés, en 1793, à la Bibliothèque nationale, où ils sont aujourd'hui[413].» Le catalogue de cette bibliothèque a été dressé, et forme un volume manuscrit, conservé à la Bibliothèque nationale; il comprend 146 pages in-4. Dans l'avertissement placé au début de ce catalogue, on trouve d'intéressants détails sur le classement et le rangement des livres de la reine: «Son cabinet de livres est composé de dix armoires séparées chacune par une cloison, et chaque armoire contient huit tablettes ou rayons. Chaque armoire est marquée par une lettre de l'alphabet, à commencer par celle que Sa Majesté a à sa main gauche en passant la porte par laquelle elle va de sa chambre dans sa bibliothèque. Cette armoire est désignée par la lettre A. Celle qui se trouve à droite de la même porte est l'armoire B, et ainsi de suite en faisant le tour jusqu'à la lettre K[414].» [413] Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 126. [414] Cf. ID., _ouvrage cité_, p. 127. Ce catalogue est divisé en deux parties; dans la première les livres sont inscrits par ordre de matière, dans la seconde ils sont rangés par ordre alphabétique. Les divisions par ordre de matière avaient été faites par le roi lui-même: «Pour ces divisions, on a suivi celles que le roi a indiquées lui-même, en faisant le premier arrangement des livres, qui a épargné au bibliothécaire plus de la moitié de son travail[415].» [415] Cf. Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 127-128. Les divisions sont au nombre de quatre: Religion, Histoire, Arts (Sciences et Arts), Belles-Lettres. La division de la Religion comprenait d'abord 53 articles, qui, plus tard, ont été portés à 69; l'Histoire, 140; les Sciences et Arts, 60; les Belles-Lettres, 93. On remarque, dans cette dernière division: _les Femmes illustres_, de Scudéry; _la Princesse de Clèves_ et _Zaïde_, de Mme de la Fayette; _les Aventures de Télémaque_; les _Mémoires du Chevalier de Grammont_, par Hamilton; _Gil-Blas_; les _Contes moraux_, de Marmontel; presque tous les romans de Mme Riccoboni; _Robinson Crusoé_, _Gulliver_, _Tom Jones_, de Fielding; _Clarisse Harlowe_ et _Grandisson_, de Richardson; les _Contes_ _de fées_, de Mme d'Aulnoy; la traduction de Shakespeare, par Letourneur; etc. La COMTESSE D'ARTOIS, Marie-Thérèse de Savoie, seconde fille du duc Victor-Amédée III, mariée en 1773 au comte d'Artois, futur Charles X, sœur de la comtesse de Provence (1756-1805). Sa bibliothèque, une des plus importantes de l'époque, fut formée par les soins du littérateur François-Félix Nogaret, l'auteur du _Fond du sac_. Ses livres étaient reliés en maroquin rouge, avec un simple «trois filets», comme ceux de sa sœur, avec lesquels on les confond souvent[416]. [416] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 335. Le duc de DEVONSHIRE, William (1748-1811), épousa en premières noces la fille du comte Spencer, GEORGINA (1757-1806), et en secondes noces la fille de lord Hervey, ÉLISABETH (1759-1824), qui, toutes les deux, montrèrent un vif penchant pour les lettres et les livres[417]. [417] Cf. LAROUSSE, _ouvrage cité_, article Devonshire. LOUISE-ADÉLAÏDE DE BOURBON-CONDÉ, tante du duc d'Enghien (1757-1824). Elle témoigna toute sa vie d'une austère piété, fut abbesse de Remiremont, et vécut pour ainsi dire dans les couvents,--ce qui ne l'empêcha pas d'entretenir, en 1786 et 1787, avec un jeune officier, M. de la Gervaisais, une correspondance galante, qui a été publiée, en 1834, par Ballanche[418]. [418] Cf. Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_, article Condé. On l'a dite aussi amie des livres. MADAME ÉLISABETH, Philippine-Marie-Hélène de France, sœur de Louis XVI (1764-1794). Sa bibliothèque était «la plus considérable après celle de la reine» (Marie-Antoinette). Madame Élisabeth, qui périt sur l'échafaud, après son frère, «vécut retirée, fuyant les plaisirs, s'appliquant avec ardeur à l'étude des mathématiques»: elle composa même une table de logarithmes très ingénieuse, admirée par le savant Lalande[419]. [419] Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 298, note 1. «Madame Élisabeth, écrit de son côté Eugène Asse[420], avait reçu une éducation sévère, sous la surveillance de la comtesse de Marsan, gouvernante des Enfants de France, et surtout de la baronne de Mackau, sous-gouvernante. C'est à leurs soins patients que fut due la transformation qui eut lieu dans le caractère de la jeune princesse, née emportée et violente: ce fut une répétition de ce qu'autrefois Fénelon avait fait pour le duc de Bourgogne... Toutefois il est juste de dire, en ce qui concerne Madame Élisabeth, que si l'éducation en fit la plus vertueuse des princesses, elle laissa subsister en elle une énergie qu'on aurait souhaitée à son frère. [420] _Ouvrage cité_, p. 129 et suiv. «Elle reçut de Guillaume Le Blond des leçons d'histoire et de géographie, suivit même assidûment les cours de physique de l'abbé Nollet. Le docteur Le Monnier, médecin des Enfants de France, et le docteur Dassy lui apprirent la botanique, dans les longues excursions qu'ils faisaient avec elle dans la forêt de Fontainebleau, pendant les séjours de la cour dans cette résidence royale. La fille de la célèbre Mme Geoffrin, la marquise de la Ferté-Imbault, lui avait donné un goût très vif pour Plutarque, en composant pour elle une analyse des _Vies des hommes illustres_. «Devenue, à quatorze ans (1778), maîtresse de ses actions, elle s'était arrangé dans sa maison de Montreuil, près de Versailles, une vie toute d'étude et de charité pratique. «Elle a, pour secrétaire ordinaire et de cabinet, Chamfort l'académicien; pour page, ce jeune Adalbert de Chamisso de Boncourt, que l'émigration jettera en Allemagne, et qui écrira plus tard le roman de _Pierre Schlemihl_ (1814). «Madame Élisabeth aima les livres. Ceux de sa bibliothèque étaient élégamment reliés, timbrés d'un écusson en losange[421] aux armes de France, surmonté d'une couronne ducale. La Bibliothèque de l'Arsenal en possède un, l'_Office de Saint-Symphorien_, qui rappelle les habitudes pieuses de la jeune princesse, et qui a dû l'accompagner bien souvent dans ses visites à sa paroisse. Cette église de Saint-Symphorien était celle de Montreuil: église très simple, assez laide, au style de temple grec, surmontée d'une sorte de pigeonnier carré, où sonnait une unique cloche, dont Madame Élisabeth avait été la marraine. Comme la maison de Montreuil n'avait pas de chapelle, la princesse s'y rendait à pied par les ruelles, souvent «par une crotte indigne», car l'accès en était difficile aux carrosses.» [421] Voir ci-dessus, p. 180, note 3. C'est à propos de cette église que Madame Élisabeth écrivait à Mme de Raigecourt, un lundi de Pâques: «J'ai l'air d'une vraie campagnarde: c'est que je suis à Montreuil depuis midi. J'ai été à vêpres à la paroisse. Elles sont aussi longues que l'année dernière, et ton cher vicaire chante _O Filii_ d'une manière aussi agréable. Des Essarts a pensé éclater [de rire], et moi de même.» Les vraies fêtes, les seules fêtes même de l'humble château de Montreuil étaient celles de l'étude et de l'amitié. Entre Mme de Mackau et son vieux maître Le Monnier, qui tous deux habitaient dans le voisinage, «la princesse passait des heures délicieuses». «Le Monnier, raconte Mme d'Armaillé, associait Madame Élisabeth à ses recherches de botanique dans son jardin, à ses expériences de physique dans son cabinet. Le jeune Chamisso y assistait souvent à la suite de la princesse, et il en acquit des connaissances qui, plus tard, ne furent pas inutiles à sa carrière et à sa réputation. «Chez elle, nous voyons souvent Madame Élisabeth adonnée à de vrais plaisirs de bibliophile. Plus d'une de ses matinées est occupée par le rangement de ses livres. «Ma bibliothèque est presque finie, écrit-elle à Mme de Raigecourt; les tablettes se placent; tu n'imagines pas quel joli effet font les livres[422].» [422] Cf. Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 133. La DUCHESSE DE MONTESQUIOU-FEZENSAC, Louise-Joséphine de la Live (1764-1832)[423]. [423] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 185. CHARLOTTE CORDAY, Marianne-Charlotte de Corday d'Armans ou d'Armont, qui assassina Marat (1768-1793). Elle était arrière-petite-nièce de Corneille et fut élevée à Caen, à l'abbaye des Dames. «Ses vrais amis étaient ses livres, écrit d'elle Michelet[424]. La philosophie du siècle envahissait les couvents. Lectures fortuites et peu choisies. Raynal pêle-mêle avec Rousseau. «Sa tête, dit un journaliste, était une furie de lectures de toutes sortes.» [424] _Histoire de la Révolution française_, livre XII, chap. IV, t. VII, p. 321 et suiv. (Paris, Marpon et Flammarion, 1879). En quittant le domicile de sa tante, à Caen, pour se rendre à Paris et y exécuter son sinistre dessein, «elle distribua ses livres, sauf un volume de Plutarque, qu'elle emporta avec elle», ajoute Michelet, et, la veille du 13 juillet, où elle assassina Marat, «elle passa le jour à lire tranquillement les _Vies_ de Plutarque, la bible des forts». On a trouvé un volume ayant appartenu à Charlotte Corday: _Typus mundi..._, dont le feuillet de garde porte son nom: C. CORDAY DARMONT[425]. [425] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 462. MADAME ROYALE, Marie-Thérèse-Charlotte de France, dite Madame Royale, fille de Louis XVI et de Marie-Antoinette, mariée en 1799 à son cousin le duc d'Angoulême (1778-1851). Elle est mise aussi au rang des bibliophiles par Quentin-Bauchart[426]. [426] Cf. _ouvrage cité_, t. II, p. 459. Dans ses _Mémoires d'outre-tombe_, particulièrement dans le tome VI, pages 139 et suivantes (édition Edmond Biré), Chateaubriand donne d'abondants et curieux détails sur la duchesse d'Angoulême. Mme SWETCHINE, née Anne-Sophie Soymonoff (1782-1857). «C'était une grande liseuse, et qui (chose rare chez son sexe) savait lire, ne perdant rien de ses lectures, crayonnant, écrivant à la marge du livre, prenant des notes, copiant des extraits, rédigeant des résumés, tenant des journaux intimes, se formant des recueils de renseignements et d'arguments», dit le critique Jules Levallois[427]. [427] _La Piété au dix-neuvième siècle_, p. 21 (Paris, Michel Lévy, 1864). On possède trente-cinq de ces cahiers d'extraits de lectures, nous apprend Sainte-Beuve qui a consacré à Mme Swetchine deux importants articles (_Nouveaux Lundis_, t. I, p. 209-254). M. de Falloux a raconté la vie et publié la correspondance et diverses œuvres de Mme Swetchine, qui, de son vivant, a joui d'une grande réputation dans le monde religieux: il a même été question de la canoniser. Elle poussait la piété jusqu'au plus singulier mysticisme, à l'hallucination ou à l'enfantillage, et nombre d'anecdotes ont couru à ce sujet. Elle obligea un jour son mari, de vingt-cinq ans plus âgé qu'elle, à se priver d'une montre à laquelle il tenait beaucoup: «Il faut vous mortifier!» lui déclara-t-elle. Une mouche tombait-elle dans sa baignoire, elle la retirait de l'eau, la mettait au soleil, lui faisait reprendre vie: «N'est-ce pas une petite créature du bon Dieu?[428]» [428] Cf. Jules LEVALLOIS, _ouvrage cité_, p. 31-32;--et SAINTE-BEUVE, _ouvrage cité_, t. I, p. 254. MARIE-AMÉLIE DE BOURBON, femme de Louis-Philippe Ier, roi des Français (1782-1866), est aussi classée au nombre des bibliophiles[429]. [429] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 100. De même, HORTENSE DE BEAUHARNAIS, mariée, en 1802, à Louis Bonaparte, roi de Hollande (1783-1837)[430]. [430] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 123. Mme DE TRACY, Sarah ou Sara Newton (1789-1850), femme en premières noces du colonel puis général Le Tort, et en secondes noces du marquis Alexandre-César-Victor-Charles Destutt de Tracy, qui fut ministre de la marine en 1848-1849 et protesta contre le coup d'État de Napoléon III. On a publié d'elle trois volumes d'_Essais, Lettres et Pensées_[431], auxquels Sainte-Beuve a consacré un très intéressant article[432]. [431] Paris, Plon, 1852; non mis en vente. [432] _Causeries du lundi_, t. XIII, p. 189-209. Mme de Tracy, qui appartenait à la famille du grand Newton, avait la passion de la lecture et de l'étude, et dissertait longuement sur ce double sujet avec son amie Mme de Coigny. «Mme de Coigny me donne des leçons de prononciation, de ponctuation, et me recommande de faire des notes sur tout ce que je lis, et d'écrire tous les jours ce que je pense: c'est une façon de savoir si on est bête[433].» [433] Cf. SAINTE-BEUVE, _ouvrage cité_, t. XIII, p. 195. C'est à Mlle Newton que l'helléniste Boissonade adressait un jour ce reproche et ces très sagaces conseils: «Vous ne savez pas lire. _Vous lisez comme si vous mangiez des cerises._ Une fois la lecture faite, vous ne pensez plus à ce que vous avez lu, et il ne vous en reste rien. Il ne faut pas lire toutes sortes de choses au hasard; il faut mettre de l'ordre dans ses lectures, y réfléchir, et s'en rendre compte[434].» [434] Cf. SAINTE-BEUVE, _ouvrage cité_, t. XIII, p. 195-196. Les notes recueillies par Mme de Tracy sont, au point de vue de l'étude et de la lecture, très dignes d'attention, des plus fructueuses, et prouvent bien qu'elle était loin d'«être bête». «J'ai organisé mon travail, et je suis décidée à traduire tout de bon le livre des _Offices_ de saint Ambroise, dont je n'avais fait que de courts extraits. Quel bonheur d'avoir de la volonté et de l'aptitude pour une occupation quelconque. Que de charme à voir là, devant moi, cette multitude de gros volumes que je n'aurai jamais le temps de lire jusqu'au bout!» «...Je retire chaque jour de mes lectures un fruit inappréciable. Je goûte le bonheur d'avoir devant moi une occupation plus longue que la vie. _Ne pas savoir se créer une occupation sérieuse lorsque la vieillesse commence, c'est vouloir mourir d'une mort anticipée._ Que font de leur vie les femmes oisives, quand elles ne peuvent plus la dépenser dans le monde? elles la passent dans leur lit. La vieillesse est pour elles comme l'Enfer de Dante, à la porte duquel on laisse toutes les espérances[435]. [435] Cf. SAINTE-BEUVE, _ouvrage cité_, t. XIII, p. 203-204. «La vraie philosophie, écrit-elle encore[436], c'est de préférer ce qu'on a, et de voir toutes choses du bon côté. De même, le vrai Christianisme consiste à faire à tous les êtres animés, bêtes et gens, le plus de bien possible, et à attendre la mort sans crainte comme sans impatience.» [436] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. XIII, p. 207. Une étrange particularité à signaler à propos de cette femme remarquable: «elle regretta si vivement son premier mari, le général Le Tort, qu'elle s'obstina à garder, assure-t-on, le cercueil du mort dans sa chambre à coucher, jusque dans les premiers temps de son second mariage[437]». [437] ID., _ouvrage cité_, t. XIII, p. 209, note 1. La PRINCESSE D'ISENGHIEN, Marguerite-Camille Grimaldi (1790-....)[438]. [438] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 166. La DUCHESSE DE BERRY, Marie-Caroline, fille du roi de Naples Ferdinand Ier, mariée, en 1816, à Charles-Ferdinand de Bourbon, duc de Berry, deuxième fils du comte d'Artois, depuis Charles X (1798-1870). Elle avait un esprit très vif et l'amour des lettres et des arts, remarque Eugène Asse, dans son étude sur _les Bourbons bibliophiles_[439]. Même après l'assassinat de son mari, frappé d'un coup de poignard par Louvel, à la porte de l'Opéra, en 1820, elle resta la protectrice des artistes et des gens de lettres. Sa collection de tableaux et la bibliothèque qu'elle s'était formée au château de Rosny, près de Mantes, furent également célèbres. Les événements de 1830 les dispersèrent l'une et l'autre. [439] Page 134. «La bibliothèque du château de Rosny fut une des mieux choisies, des plus élégantes par ses exemplaires et par ses reliures, que l'on ait comptées dans la première moitié du dix-neuvième siècle. Les livres en étaient presque tous timbrés sur le plat recto aux armes de la duchesse: _de France à la bordure engrêlée de gueules qui est de Berry, accolé des Deux-Siciles_; sur le plat verso, de son chiffre C couronné[440].» [440] Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 134-135. La vente de cette bibliothèque eut lieu en 1837. Le _Catalogue_, où figurent, sur la feuille de titre, les armes de la duchesse, très finement gravées en taille-douce, entourées de la cordelière des veuves et de deux branches de lis, comprend 2578 numéros pour les livres et 74 pour les estampes. La théologie y est représentée par 141 articles, la jurisprudence par 36, les sciences et arts par 445, les belles-lettres par 565, l'histoire par 1163; les manuscrits sont au nombre de 86 et les lettres autographes de 54. L'auteur de la préface de ce _Catalogue_[441] considère comme «superflu» l'éloge de cette bibliothèque, où chaque article annonce presque toujours le plus bel exemplaire, enrichi de gravures, de portraits ou d'une somptueuse et élégante reliure. Les manuscrits doivent exciter la curiosité à un très haut degré. Depuis plus de trente ans, ajoute l'auteur de cette préface, il ne s'est pas présenté de collection aussi précieuse sous le rapport de l'antiquité historique; une grande partie de ces richesses proviennent du célèbre Pithou et ont été recueillies par lui. [441] Paris, Bonange père, Techener et Bataillard, in-8, 264 pages. Parmi ces manuscrits nous mentionnerons: le _Code Théodosien_, du sixième siècle, qu'une note de Pithou (XVIe siècle) dit avoir servi à Cujas pour sa publication des Codes;--le _Roman de la Rose_, manuscrit sur vélin, du treizième siècle;--le _Roman de Gaides_, en vers, manuscrit de la fin du treizième siècle. Quelques années avant la mort de la duchesse de Berry, survenue en 1870, eut lieu une seconde vente de manuscrits lui ayant appartenu. Cette collection avait été distraite de la première, et ne comprenait que 35 articles. La vente produisit 98.085 francs. Un seul _Livre d'heures_--l'incomparable _Livre d'heures_ de Henri II et de Catherine de Médicis,--fut adjugé au prix de 60.000 francs pour le Musée des Souverains[442]. [442] Cf. Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 139;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 106-107. La COMTESSE DE CHESSY-FOURCY, Madeleine Boucherat (....-1714). Son mari était prévôt des marchands de Paris en 1684[443]. [443] Cf. ID. _ouvrage cité_, t. I, p. 161. La DUCHESSE DE DURFORT DE DURAS, Marguerite-Félicité de Lévis-Ventadour (....-1717)[444]. [444] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 154. Mme DE SÉGUR, Charlotte-Émilie Le Fèvre de Caumartin, femme du président de Ségur (....-1729)[445]. [445] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 201. La DUCHESSE DE NOAILLES, Françoise-Charlotte-Amable d'Aubigné, nièce de Mme de Maintenon, épouse du duc de Noailles, maréchal de France (....-1739)[446]. [446] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 190. ÉLISABETH DE LA ROCHEFOUCAULD DE ROYE DE ROUCY, religieuse, abbesse de Saint-Pierre de Reims (....-1744)[447]. [447] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 170. La MARQUISE D'ARGOUGES, Françoise Le Pelletier (....-1745)[448]. [448] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 133. ÉLISABETH-ÉLÉONORE DE LA TOUR D'AUVERGNE, abbesse de Thorigny, en Normandie (....-1746)[449]. [449] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 172. La DUCHESSE DE MONTMORENCY-LUXEMBOURG, Marie-Sophie-Honorate Colbert de Seignelay (....-1747)[450]. [450] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 187. MARIE-ANNE DE LA VIEFVILLE, abbesse de Gomerfontaine (....-1751)[451]. [451] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 424. La DUCHESSE D'AUMONT, Victoire-Félicité de Durfort-Duras (....-1753)[452]. [452] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 133. La MARQUISE DE MONTMORENCY-LAVAL, Marie-Thérèse de Hautefort (....-1753)[453]. [453] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 188. La COMTESSE ou MARQUISE D'ANGENNES, Marie-Françoise de Mailly (....-1760). La vente de ses livres eut lieu à Paris, après son décès, le 21 juillet 1760[454]. [454] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 132;--et la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 349, article de M. Maurice Tourneux. La MARQUISE DE GALLIFET ou GALLIFFET, Marie-Denise-Élisabeth Pucelle (....-1761)[455]. [455] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 162. La DUCHESSE DE LUYNES ET DE CHEVREUSE, Marie Bruslart ou Brûlart (....-1763)[456]. [456] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 179. Mme THIROUX DE LAILLY, Claude Buffaut de Millery (....-1766), femme de Jean-Louis-Lazare Thiroux de Lailly, seigneur d'Arconville (1682-1742), fermier général, puis trésorier général de la maison du Roi, qu'elle avait épousé en 1709 et dont elle eut trois fils. La vente de ses livres eut lieu à Paris, après son décès, le 12 mai 1766 et jours suivants[457]. [457] Cf. la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 349, article de M. Maurice Tourneux.--Il ne faut pas confondre, comme on l'a fait parfois, Mme Thiroux de Lailly, née de Millery, décédée en 1766, avec Mme Thiroux d'Arconville, née Darlus (1720-1805), ni non plus Mme Thiroux de Crosne, née de la Michodière (1747-....). La MARQUISE DE MANCINI, Gabrielle-Yolande-Claude-Martine de Polastron (....-1773?) La vente de sa bibliothèque eut lieu à Paris, et sans doute après son décès, le 26 juillet 1773 et jours suivants[458]. [458] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 182;--et la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 350, article de M. Maurice Tourneux. Mme DE LA HAYE, Marie-Adélaïde-Victoire Bouret de Valroche (....-1776). Son mari était fermier général[459]. [459] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 168. Mme DE L'ÉPINETTE LE MAIRAT ou DE LESPINETTE DE MEIRAT, Marie-Thérèse-Geneviève, marquise de Bruyères, Pecquot de Saint-Maurice (....-1783). Son mari était président à la Cour des comptes en 1755[460]. [460] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 177. La DUCHESSE DE DURFORT-CIVRAC, Anne-Marie de la Faurie de Monbadon (ou Monbardon?) (....-1786)[461]. [461] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 155. La COMTESSE DE VERGENNES, Anne de Vivier (ou du Vivier?) (....-1787)[462]. [462] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 206. La CITOYENNE MONTESQUIEU; peut-être Françoise-Catherine de Narbonne,--ou Jeanne-Marie Hocquart (....-1793). Quel que soit le nom véritable de cette femme, elle a laissé une importante bibliothèque dont Quentin-Bauchart donne la liste des ouvrages[463]. [463] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 461. Mme DE PÉRUSSE D'ESCARS (ou DE PEYRUSSE DES CARS), Marie-Élisabeth de Lastic (....-1793)[464]. [464] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 192. Mme D'ALIGRE, Madeleine-Catherine Boivin de Bonnetot, mariée, en 1711, à Étienne d'Aligre (XVIIIe siècle)[465]. [465] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 131. MARIE DE BASTARD DE LA FITTE, abbesse du monastère royal de Favas, diocèse de Comminges, en 1722 (XVIIIe siècle)[466]. [466] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 134. Mme DE BAUYN D'ANGERVILLIERS, née Mathefelon (XVIIIe siècle)[467]. [467] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 135, qui ne donne aucune date relative à cette bibliophile. ANNE-MARIE-LOUISE DE BELZUNCE (ou BELSUNCE), grande prieure de l'abbaye de Saintes, puis abbesse du Roncerai, à Angers, vers 1709 (XVIIIe siècle)[468]. [468] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 136. La VICOMTESSE DE BELZUNCE (ou BELSUNCE), N. de la Live d'Épinay (XVIIIe siècle)[469]. [469] Cf. ID., _ibid._ Mme BLONDEL D'AUBERS, Marie-Anne de Calonne, sœur du ministre de Louis XVI (XVIIIe siècle)[470]. [470] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 138. HENRIETTE DE BOURBON DE LA GUICHE, dite Mademoiselle de Verneuil, fille naturelle et légitimée de Louis-Henri de Bourbon,--prince de Condé, premier ministre de Louis XV (XVIIIe siècle)[471]. [471] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 168. Mme GUILLAUME DE BURE, mère des deux libraires de Bure (XVIIIe siècle). «Deux classes de livres surtout composaient sa précieuse bibliothèque: les livres de piété et les livres espagnols», écrit Silvestre de Sacy[472]. [472] _Variétés littéraires, morales et historiques_, t. I, p. 246 (Paris, Didier-Perrin, 1884, 2 vol. in-12, 5e édition). Mme CAMUS DE PONTCARRÉ, Angélique-Élisabeth, fille de Geoffroy-Macé (XVIIIe siècle)[473]. [473] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 142. La DUCHESSE DE CHATILLON, Adrienne-Félicité de la Baume Le Blanc de la Vallière, fille unique du célèbre bibliophile, le duc Louis-César de la Vallière, petit-neveu de la maîtresse de Louis XIV, et qui, mort en 1780, à soixante-douze ans, rassembla, dans son château de Montrouge, «la plus riche bibliothèque que jamais particulier ait possédée en France[474]». La duchesse de Châtillon avait ainsi reçu le goût des livres en héritage[475] (XVIIIe siècle). [474] Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. Le duc de la Vallière aimait tellement les livres qu'il passe pour ne pas s'être toujours montré fort scrupuleux sur les moyens de s'en procurer, du moins dans sa vieillesse et lorsque sa passion était devenue manie. «N'est-il pas arrivé maintes fois que son valet de chambre reportât le lendemain aux divers marchands les bijoux (bibliographiques) qu'il trouvait dans les poches de son maître sans que celui-ci les eût achetés?» (Paulin PARIS, _Notice sur Tallemant des Réaux_, les Historiettes, t. VI, p. 427, Paris, Techener, 1862). [475] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 145-146. La MARQUISE CROZAT DU CHATEL; Marguerite Legendre, mariée, en 1696, à Antoine Crozat, marquis du Châtel, receveur des finances à Bordeaux (XVIIIe siècle)[476]. [476] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 147. Mme VEUVE DIEZ (XVIIIe siècle)[477]. [477] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 150. Originaire d'une famille espagnole, mère d'un des pères de l'ancien collège des Jésuites de Paris, ou collège de Clermont, devenu depuis le lycée Louis-le-Grand, elle fit don à cet établissement de 72 volumes,--ce qui a paru suffisant à Joannis Guigard pour inscrire le nom de cette pieuse veuve sur le livre d'or des femmes bibliophiles. La COMTESSE DU DRENEUC, Catherine de Martin de Champoléon (XVIIIe siècle)[478]. [478] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 151. CLAUDE DE DURFORT, religieuse, abbesse de Faremoutier, diocèse de Meaux, et dernière abbesse de cet établissement, détruit en 1792 (XVIIIe siècle)[479]. [479] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 156. La DUCHESSE DE DURFORT DE LORGES, Marie-Marguerite-Reine de Butault de Marzan (XVIIIe siècle)[480]. [480] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 155. Mme FAURIS, Julie de Villeneuve de Vence, femme du président Fauris (XVIIIe siècle)[481]. [481] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 159. La BARONNE DE FONTAINE-CHALANDRAY (ou CHALENDRAI), Marie-Antoinette du Mas (ou Dumas) (XVIIIe siècle). Le baron de Fontaine-Chalandray était receveur général des finances de Lorraine et Barrois en 1749[482]. [482] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 160. LA MARQUISE DE KERHOENT, née N. de Champagne (XVIIIe siècle)[483]. [483] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 166. Mme DE LA BORDE (XVIIIe siècle). La vente de ses livres eut lieu à Paris, le 20 mai 1799 et jours suivants. Le catalogue, dressé par G. de Bure l'aîné, comprenait 167 numéros[484]. [484] Cf. la _Revue des livres anciens_, année 1914, fascicule IV, p. 351, article de M. Maurice Tourneux;--et l'_Intermédiaire des chercheurs et curieux_, 20 juin 1908, col. 926. La COMTESSE DE LA FEUILLADE, Catherine-Scholastique Bazin de Bezons (XVIIIe siècle)[485]. [485] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 167. La MARQUISE DE LA QUEUILLE, Louise-Jacqueline de Lastic de Saint-Jal (XVIIIe siècle)[486]. [486] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 169. La DUCHESSE DE LA TRÉMOILLE-THOUARS, Marie-Maximilienne-Louise-Françoise-Sophie, princesse de Salm-Kirbourg (XVIIIe siècle)[487]. [487] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 173. Mme LE BAS DE MONTARGIS, Henriette-Catherine Hardouin-Mansart, femme de Claude Le Bas de Montargis, conseiller d'État en 1722 (XVIIIe siècle)[488]. [488] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 174. Mlle LE DUC, marquise de Tourvoie, danseuse à l'Opéra, maîtresse puis femme de Louis de Bourbon-Condé, comte de Clermont (XVIIIe siècle). Elle rassembla un grand nombre d'ouvrages de théologie,--ce qui est assez étrange, vu la profession de ladite marquise,--et habilla richement ses volumes de maroquin avec dentelles[489]. [489] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 446;--et Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 174. A propos de la bibliothèque de Mlle Le Duc, Joannis Guigard écrit: «La _Bibliophilie_... faisait partie de l'existence mondaine au dix-huitième siècle. Les grandes dames surtout auraient cru manquer à tous leurs devoirs si elles n'avaient pu montrer, dans un salon richement orné, des livres aux fers merveilleux des Derome ou Padeloup.» Le catalogue des livres de Mlle Le Duc, daté de 1757, et dressé par Prault fils aîné, libraire, quai de Conty (_sic_), se trouve actuellement à la Bibliothèque de l'Arsenal; c'est un très beau manuscrit in-4 de 225 pages. Mme LEFÉBURE DE LA BASSE-BOULOGNE, née N. Couthier (XVIIIe siècle)[490]. [490] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 176. La MARQUISE DE LESTEVENON, Marie-Wilhelmine van der Duyn (XVIIIe siècle). Son mari était ambassadeur de la province de Hollande en France 1740[491]. [491] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 177. La COMTESSE DE LÉVIS-CHATEAU-MORAND, Philiberte de Languet de Gergy (XVIIIe siècle)[492]. [492] Cf. ID., _ibid._ La PRINCESSE DE LIGNE, Henriette-Eugénie de Béthisy (ou Béthizy) de Mézières (XVIIIe siècle)[493]. [493] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 178. CUNÉGONDE DE MAILLÉ DE KERMAVAN (ou KERMAOUEN, ou KERMAN, ou CARMAN), abbesse de Monré, près d'Amboise (XVIIIe siècle)[494]. [494] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 179;--et Ludovic LALANNE, _Dictionnaire historique de la France_. Mme MÉGRET OU MAIGRET, Françoise-Thomas de Pange, femme de Mégret ou Maigret, baron d'Étigny et de Theil (XVIIIe siècle)[495]. [495] Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 183. MARIE-ALEXANDRINE DE MONTJOUVENT, abbesse de l'abbaye de la Déserte, à Lyon (XVIIIe siècle)[496]. [496] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 186. La DUCHESSE DE MONTMORENCY-LUXEMBOURG, Charlotte-Anne-Françoise de Montmorency-Luxembourg, mariée au duc de Montmorency-Luxembourg (XVIIIe siècle)[497]. [497] Cf. ID., _ibid._ La DUCHESSE DE MONTMORENCY-LUXEMBOURG, Marie-Jeanne-Thérèse de l'Espinay (XVIIIe siècle)[498]. [498] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 187. La COMTESSE DE RIEUX, Suzanne-Henriette-Marie de Boulainvilliers de Bernard (XVIIIe siècle)[499]. [499] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 137. Mme ROLAND DE CHALLERAUGE (ou DE CHALLERANGES?), née N. de Brosses, femme d'un conseiller au Parlement (XVIIIe siècle?)[500]. [500] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 198, qui ne donne aucune date relative à cette bibliophile. _L'Intermédiaire des chercheurs et curieux_, No du 20 juin 1908, colonne 926, donne Rolland de Challerange, et non Roland de Challerauge. Ludovic Lalanne, dans son _Dictionnaire historique de la France_, donne Challeranges. La MARQUISE DE SAINTE-MAURE, Marie des Chiens de la Neuville (ou Neufville) (XVIIIe siècle)[501]. [501] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 198. La DUCHESSE DE SAULX DE TAVANNES, Marie de Choiseul-Gouffier (XVIIIe siècle)[502]. [502] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 200. MARIE-AUGUSTE DE SULTZBACH, femme de Charles-Philippe de Sultzbach, son cousin-germain, comte palatin du Rhin (XVIIIe siècle)[503]. [503] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 122. La DUCHESSE DE TALLEYRAND-PÉRIGORD, Marie-Françoise de Rochechouart, femme de Jean-Charles Talleyrand, duc et pair de France (XVIIIe ou XIXe siècle)[504]. [504] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 202, qui ne donne aucune date relative à cette bibliophile. La PRINCESSE DE TALMONT, Marie-Jablonowska, fille du comte Jablonowski, grand enseigne de la couronne de Pologne; mariée, en 1730, à Frédéric de la Trémouille, prince de Talmont (XVIIIe siècle). Elle possédait une belle bibliothèque qui fut vendue en 1774[505]. [505] Cf. Ernest QUENTIN-BAUCHART, _ouvrage cité_, t. II, p. 444. La MARQUISE DE VALBELLE DE TOURVES, Marguerite-Delphine (XVIIIe siècle)[506]. [506] Cf. Joannis Guigard, _ouvrage cité_, t. I, p. 204. _L'Intermédiaire des chercheurs et curieux_ a publié, dans son numéro du 20 juin 1908[507], et au-dessus de la signature Sy, «une liste d'ex-libris de dames, dont la plupart ont vécu au dix-huitième siècle». [507] Colonnes 926-927. Voici cette liste, de laquelle je me borne à supprimer les noms mentionnés par moi précédemment: La MARQUISE D'ALIGRE (Mme de Saint-Germain). Mme DE BEAUMANOIR. -- ÉLISABETH-HENRIETTE DE BESSET. -- DE BOUCHARD. -- BROCHET DE SAINT-PREST. La MARQUISE DE BROGLIE, née Besenval. Mme VIRGINIE CHARDON. Mlle CHAUDOT. La COMTESSE CHARLES DE DAMAS. Mme DE DAMAS, née Rochechouart. -- DU BU DE LONGCHAMP. La MARQUISE DE FLEURY, née du Bois de Courval. Mlle L.-E. GUENET DE LOUYE. Mme HAUTEFORT DE BERINHEN (Beringhen?). -- DE JOANNIS. -- CATHERINE HUNTER DE CADIGNAN. La DUCHESSE DE LA FORCE. Mme de LAIDET, née du Pont. La COMTESSE DE LANGEAC, née de la Quenille (Queuille?). La DUCHESSE DE LA TRÉMOILLE, née de la Tour d'Auvergne. Mme LE BAS DE GIRANGY. LA BARONNE DE LERCHENFELD, née comtesse de Haslang. La COMTESSE DE LIPONA. La COMTESSE DE MELLET. Mlle DE MORETON DE CHABRILLAN. La DUCHESSE DE MOUCHY. Mme DE PARIS, née Boula. -- PIGNATELLI, née Durfort. La MARQUISE DE PONS, née de Brissac. Mme DE PREYSING. -- RONDÉ. -- DE ROUGEMONT. -- DE SAINT-GERMAIN, marquise d'Aligny[508]. -- DE SAUTEREAU-MOINTESSUY. Mlle DE SAYVE. La VICOMTESSE HENRY DE SÉGUR. Mme SILVA. -- DE VASSAL. -- DE VINTIMILLE, née Talbot. [508] Au lieu de d'Aligny, peut-être faut-il lire d'Aligre; voir la page précédente: La MARQUISE _d'Aligre_. VII Au dix-neuvième siècle et de nos jours, le nombre des femmes bibliophiles, presque restreint jusqu'ici à la classe élevée, noblesse et finance, s'est étendu à tous les rangs et est devenu considérable. Voici d'abord une liste publiée par _l'Intermédiaire des chercheurs et curieux_, dans le numéro du 10 juillet 1908[509], signée J.-G. Wigg, et dont je me borne à ranger les noms dans l'ordre alphabétique: Mme D'ALLERAY. -- BAILLEU. -- BARTET, de la Comédie-Française. La COMTESSE X. DE BLACAS. La VICOMTESSE DE BONNEMAINS. Mme DE BORNIOL. -- MINA DELHOMME. -- HÉLÈNE DUCHÉ. La MARQUISE DU COUDRAY. La COMTESSE D'ERCEVILLE. Mme E.-M. GALLET. -- MARIE GEORGEL. -- L. GUIONNEAU-PAMBOUR. -- HENRY-ANDRÉ. -- L.-H. DE LA CONDAMINE. -- M.-CH. DE LAMETH. -- LANGE. -- C. LEBIENVENU-DUBOURG. -- L. LE DOULCEUR. -- M. LE VERDIER. Mmes OU Mlles JEANNE ET JEANNINE MARCHAND. Mme MINARD DE VELARS. -- MOYE. -- MOYNEL. La COMTESSE DE NADAILLAC. Mlle ALICE OZY. Mme MARIE PASTOR. -- RENÉE PINGRENON. -- L. SCHULTZ. -- ZOÉ SEILLIÈRE. -- M. SOUVESTRE. -- DE STAËL. La PRINCESSE DE TALMONT[510]. Mme THOURNOUER. -- VASSE-DUSAUSSAY. -- DE VILMORIN. -- MARQUISE VINTIMILLE. -- WEIGEL, d'Arras. [509] Colonnes 34-35. [510] Peut-être la même que nous avons mentionnée p. 244. La MARQUISE DE LA GRANGE, Constance-Madeleine Nonpart de Caumont de La Force (1801-1869)[511]. [511] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 168. LOUISE-MARIE-THÉRÈSE D'ARTOIS, fille de la duchesse de Berry, mariée, en 1845, à Charles III, duc de Parme (1819-1864). Comme sa mère, qui avait formé la belle bibliothèque de Rosny, Louise-Marie-Thérèse d'Artois, appelée jusqu'en 1830 Mademoiselle, collectionna des livres: ils étaient timbrés de l'écusson en losange, symbole des filles, aux armes de France, _à la bordure crénelée de gueules_[512]. [512] Cf. Eugène ASSE, _ouvrage cité_, p. 138-139;--Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 104;--et ci-dessus, p. 180, note 3. La PRINCESSE MATHILDE BONAPARTE, Mathilde Lætitia-Wilhelmine Bonaparte, fille de Jérôme Bonaparte, roi de Westphalie, mariée au prince russe Anatole Demidoff de San-Donato, dont elle ne tarda pas à se séparer (1820-1904). Elle témoigna toujours d'un goût très vif pour les arts et les lettres; elle exécutait notamment des aquarelles; elle exposa au Salon, de 1859 à 1867, un certain nombre de portraits et des copies d'après les maîtres, et obtint une médaille en 1865. Elle est aussi l'auteur d'un petit livre, l'_Histoire d'un chien_ (1876)[513]. [513] Cf. la _Revue universelle Larousse_, année 1904, p. 81; article de M. H. Castets. Dans son hôtel de la rue de Courcelles et son château de Saint-Gratien, et, après la guerre de 1870, dans son hôtel de la rue de Berri, elle reçut quantité d'hommes de lettres et d'artistes: Sainte-Beuve, avec qui elle entretint une correspondance publiée par Jules Troubat, le dernier secrétaire de Sainte-Beuve[514],--Gustave Flaubert, Théophile Gautier, les Goncourt, Hippolyte Taine, Paul de Saint-Victor, Émile Augier, Gavarni, Jules Sandeau, le critique d'art Ernest Chesneau, le peintre Hébert, etc., etc. [514] SAINTE-BEUVE, _Lettres à la Princesse_ (Paris, Michel Lévy, 1873, 5e édit.). «Séparée à vingt-cinq ans de son mari, le comte Demidoff (Anatole Demidoff, prince de San Donato, dont elle n'eut point d'enfants, et qui mourut en 1870), adulée, d'un tempérament fougueux, la princesse Mathilde devait avoir fatalement des liaisons de cœur. On en connaît au moins deux avec certitude: la première, très retentissante, avec le comte de Nieuwerkerke, surintendant des Beaux-Arts sous l'Empire; la seconde, plus discrète, avec le peintre et poète Claudius Popelin. Si l'on consulte l'Almanach Gotha de 1879, on y trouve la mention que la princesse Mathilde avait épousé Claudius Popelin, en Angleterre, en décembre 1871; mais cette information, démentie, fut supprimée dans l'Almanach de 1880[515].» [515] _Revue universelle Larousse_, année 1904, p. 82; article de M. H. Castets. A défaut d'une bibliothèque célèbre, la princesse Mathilde eut un illustre bibliothécaire, Théophile Gautier, à qui, en le gratifiant de cette sinécure, elle trouva moyen de rendre délicatement service. On lit à ce propos dans le _Journal des Goncourt_[516]: «En descendant, ce soir, l'escalier de la princesse, Théophile Gautier, nommé bibliothécaire de Son Altesse, m'adresse cette question: «Mais, au fait, dites-moi, en toute sincérité, est-ce que la princesse a une bibliothèque?--Un conseil, mon cher Gautier, faites comme si elle n'en avait pas.» [516] Année 1868, t. III, p. 240. L'illustre tragédienne RACHEL (1821-1858) a été inscrite au nombre des amies des livres par le poète-bibliophile François Fertiault[517]. [517] Dans son beau volume _les Amoureux du livre_, p. 341.--Saluons ici, au passage, ce nom de François Fertiault, cher à tous ceux qui ont le culte des livres et des lettres. Né en juin 1814, à Verdun-sur-Doubs, «le cher petit pays», décédé à Paris en octobre 1915, c'est-à-dire dans sa cent-deuxième année, François Fertiault, l'auteur des _Amoureux du livre_, des _Légendes du livre_, des _Drames et Cancans du livre_, de la _Vie du livre_, des _Soirs du Doyen_, _A cent ans_, etc., a eu le très rare privilège, non seulement de mourir centenaire, mais de rester en possession de toutes ses facultés, de toute sa finesse d'esprit, de toute sa souriante accortise, de toute sa bonne humeur et de toute sa bonne grâce, jusqu'à son dernier jour. Il a été longtemps le doyen d'âge de la Société des gens de lettres, et il laisse, dans le monde des bibliophiles et des lettrés, un ineffaçable souvenir. Le chroniqueur Paul d'Ivoi, père du romancier récemment décédé (1915), a rendu compte, dans un de ses articles du _Courrier de Paris_[518], de la vente des objets mobiliers, des livres par conséquent, laissés par Rachel, et voici quelques-uns des renseignements qu'il nous donne à ce sujet: La vente des livres a duré deux jours. La première journée a produit 6900 francs, la seconde à peu près le double. Les livres qui n'avaient pas d'autre indication de leur origine que l'estampille de la vente, le chiffre de Mlle Rachel--un R entouré d'un bracelet avec la devise _Tout ou Rien_,--ces livres-là se vendaient un peu au dessus de leur valeur. Les livres reliés avec le chiffre R imprimé à froid sur le plat se vendaient beaucoup plus cher, environ une fois et demie ou deux fois leur valeur. Les livres adressés à Rachel par leurs auteurs, avec envoi autographe de l'auteur à la première page, se sont vendus six ou huit fois leur valeur. Enfin les brochures ayant servi à Rachel pour étudier ses rôles, celles surtout qui portaient des annotations de sa main, ont atteint des prix extrêmement élevés, de 40 à 80 francs chacune. Nous nous bornerons à quelques exemples: Le _Théâtre des Grecs_, traduction du P. Brumoy, avec le chiffre sur le plat: 160 francs. Le _Théâtre des Latins_, traduit par Levée et l'abbé Lemonnier, chiffre: 135 francs. Le _Répertoire du Théâtre français_; Paris, Foucault, 1817: 200 francs. Le _Théâtre de Corneille_; Paris, Didot l'aîné, 1805: 120 francs. Les _OEuvres de Racine_, édition Lefèvre: 80 francs. Le _Théâtre de Ponsard_; Paris, Michel Lévy, 1852; in-8, avec envoi autographe: 42 francs. Le _Théâtre d'Émile Augier_; in-18, avec envoi autographe: 27 francs. Le _Théâtre d'Alexandre Dumas_; 3 vol. in-18, avec envoi autographe: 41 francs. _Rosemonde_, tragédie en un acte et en vers, par Latour Saint-Ybars; in-18, avec envoi autographe: 26 francs. _Macbeth_, traduction en vers d'Émile Deschamps, avec envoi autographe: 20 francs. _Charlotte Corday_, tragédie de Ponsard; vol. broché, avec envoi autographe: 13 francs. Etc., etc. [518] Reproduit dans le journal _le Voleur_, 7 mai 1858, p. 11. ALICE OZY (1821-1893)[519], que nous avons vue figurer dans la liste des femmes bibliophiles donnée par _l'Intermédiaire des chercheurs et curieux_, a souvent et longuement occupé la chronique de son époque[520]. De son vrai nom elle s'appelait Julie-Justine Pilloy, nous apprend Hippolyte de Villemessant[521], et était fille d'un bijoutier parisien. Alidor Delzant, qui l'a particulièrement connue, dont elle a fait un de ses héritiers[522], et qui, sans doute avec raison, car il était bien placé pour être renseigné à ce sujet, orthographie toujours son nom avec un i au lieu d'un y, a tracé d'elle le portrait suivant[523]: «Ce n'était pas une personne vulgaire que Mlle Alice Ozi; elle a tenu une place dans la chronique littéraire, et Théophile Gautier l'a appelée quelque part _l'Aspasie moderne_. Victor Hugo a écrit pour elle des vers exquis. Elle a éveillé dans le cœur d'un jeune homme bien doué, Charles Hugo, un amour qui s'est éventé, comme un parfum, dans une suite de poèmes gracieux, qui mériteraient d'être connus... «Elle aimait les lettres, et le jeune major général (le duc d'Aumale) qui préludait, par le goût de la poésie, aux lauriers académiques qu'il devait aussi conquérir, écrivait, sur l'album de Mlle Alice Ozi, une chanson qu'avait composée un de ses lieutenants M. Lafaguette: elle avait pour titre _Khradoujah_. Cette copie lointaine des _Contes d'Espagne_ et des _Orientales_ était alors fort répandue. Le jeune prince l'avait rapportée de l'Algérie, où les soldats en avaient fait une chanson de marche. «Mais la vraie gloire de Mlle Alice Ozi a été l'amitié que lui avait vouée Théophile Gautier. Il a fait pour elle, d'après nature, des quatrains dignes du voisinage des petits camées de l'_Anthologie grecque_, et qui n'ont pas été recueillis dans ses poésies complètes... Pentélique, Paros, marbre neigeux de Grèce, Dont Praxitèle a fait la chair de ses Vénus, Vos blancheurs suffiraient à des corps de déesse: Noircissez, car Alice a montré ses seins nus!» Villemessant insiste aussi sur la réputation de femme d'esprit d'Alice Ozy. «Cette réputation était si bien établie, qu'Alice a passé pour avoir collaboré aux _Causeries_ de l'ancien _Corsaire_, signées F...[524]». [519] Dates données par la _Revue encyclopédique Larousse_, année 1893, colonne 367. [520] Voir notamment H. DE VILLEMESSANT, _Mémoires d'un journaliste_, Première série, chap. VI, p. 134-152;--_Journal des Goncourt_, année 1893, t. IX, p. 114 et 173-174;--Alidor DELZANT, _Paul de Saint-Victor_, p. 98-108 (Paris, Calmann Lévy, 1886);--Louis LOVIOT, _Alice Ozy_ (Paris, Bibliothèque fantaisiste, 1910);--etc. [521] _Ouvrage cité_, p. 135. [522] «_Mercredi 22 mars 1893._--Aujourd'hui, Alidor Delzant vient me voir. Naturellement la conversation est sur l'actrice Ozy, dont il vient d'hériter de 50.000 francs, qu'il destine à faire trois pensions à trois hommes de lettres. Il hérite aussi de papiers, parmi lesquels il y a des correspondances amoureuses de Gautier, de Saint-Victor, de Doré, et surtout tout un gros paquet de lettres d'About, qu'il déclare tout à fait charmantes de passion et d'esprit.» Etc. (_Journal des Goncourt_, année 1893, t. IX, p. 114-115.) «_Mercredi 6 décembre 1893._--... Parmi ces lettres des contemporains amants ou amoureux d'Alice Ozy, il y a tout un volume de lettres de Charles Hugo, de lettres très intéressantes, de lettres très belles, au moment où Ozy, courtisée par le vieil Hugo, est prête à lui céder, et où le fils lui écrit qu'il ne veut pas partager cet incestueux commerce, et qu'il se retire, le cœur déchiré.» (_Ibid._, p. 174.) [523] _Ouvrage cité_, p. 98-99. [524] H. DE VILLEMESSANT, _ouvrage cité_, p. 149. Mme DOCHE, Marie-Charlotte-Eugénie de Plunkett, née à Bruxelles le 19 novembre 1821, morte à Paris le 12 juillet 1900[525]. [525] Dates données par la _Revue encyclopédique Larousse_, année 1900, p. 715. D'origine irlandaise, sœur d'un ancien directeur du Palais-Royal, et d'une danseuse de l'Opéra, qui épousa M. Dalloz, du _Moniteur_, Eugénie de Plunkett fut élevée à Paris, et résolut, très jeune, de devenir comédienne. Elle débuta le 8 janvier 1838, au Vaudeville, et épousa, en 1839, le chef d'orchestre et compositeur Doche, dont elle se sépara au bout de quelques années, et qui mourut du choléra, à Saint-Pétersbourg, en 1849. Mme Doche obtint son plus grand succès au théâtre dans le rôle de Marguerite de _la Dame aux camélias_ (1852). Elle quitta la scène vers 1879, et vécut depuis lors dans la retraite. Dans son appartement de la rue Picot, à Paris, elle avait réuni des tableaux, des gravures, des portraits, et quantité de livres rares et curieux. C'est ce qui lui a valu l'honneur d'être classée par Joannis Guigard au nombre des femmes bibliophiles[526]. [526] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 150;--et la _Revue encyclopédique Larousse_, lieu cité. Mme Doche a possédé les dessins originaux de l'édition des _Contes_ de La Fontaine dite «des Fermiers généraux», et voici, au sujet de ce chef-d'œuvre de la librairie, d'intéressants détails[527], qu'on ne jugera pas déplacés dans cette étude bibliographique. [527] Cf. _la Revue_ (ancienne _Revue des Revues_), 1er août 1914, p. 336-337; article sur _les Fermiers généraux_, par Louis Pépin. Cette célèbre édition des _Contes_ de La Fontaine, qui porte le nom des Fermiers généraux, est précédée d'une notice de Diderot (non signée), et elle est ornée de figures d'Eisen. Elle fut imprimée par les soins et aux frais des Fermiers généraux, en 1762, à Paris, chez Barbou, sous la rubrique d'Amsterdam, en vertu d'une autorisation tacite[528]. «La gravure des estampes fut confiée aux plus habiles artistes du temps (Longueil, Choffard, Lemire, Lafosse). Les quatre-vingts dessins originaux qu'elle comprenait, exécutés, les uns à l'encre de Chine, relevés de plume ou touchés d'une légère aquarelle, les autres à la mine de plomb, furent recueillis, dit-on, par un amateur qui les fit relier en un splendide volume in-8, en maroquin vert, doublé de tabis et fermant à secret. [528] «C'est peut-être le plus beau livre illustré publié au dix-huitième siècle», dit M. Édouard Rahir (_La Bibliothèque de l'amateur, Guide sommaire à travers les livres..._ p. 261). «Ce volume a son histoire dans les annales des ventes publiques. «Vendu pour la somme de 77.000 livres (en assignats), il finit, après diverses aventures, par tomber entre les mains de Mme Doche, du Vaudeville, d'où il passa ensuite dans la collection de M. Double. Le portefeuille à secret avait été remplacé par une reliure de Thouvenin. «Ces admirables vignettes, passablement osées, comme on sait, et «moins chastes encore que le texte» (on dit que Charles Eisen en fit amende honorable à sa dernière heure), conformes toutefois à l'esprit et aux mœurs du temps, offrent cette particularité piquante qu'elles sont «à clefs», c'est-à-dire que bon nombre des figures qui les composent ont été dessinées d'après des modèles vivants, non les moins illustres, facilement reconnaissables aux yeux des contemporains. C'est ainsi, notamment qu'on a vu Louis XV et Mme de Pompadour dans _la Chose impossible_, et plusieurs des Fermiers généraux ou leurs femmes: Joseph de la Borde dans _le Contrat_, Le Riche de la Popelinière dans _le Remède_ et ailleurs, Mme Lalive d'Épinay dans _le Berceau_, etc. «L'impression achevée, on fit relier par Derome les exemplaires que les participants devaient se partager entre eux, en même temps que ceux qui avaient été tirés pour divers personnages de marque. Que sont devenus les uns et les autres? Beaucoup ont péri sans doute, ou sont restés enfouis dans les bibliothèques, ignorés de leurs possesseurs. Toujours est-il qu'on en connaît bien peu. On sait, par exemple, que le duc d'Aumale en possédait un qui avait appartenu à la Dubarry et qui portait sa devise: _Boutez en avant!_ qu'un autre a été acquis par M. Quentin-Bauchart, etc. En somme, ils sont rarissimes, et quand, par hasard, ce bijou d'impression et de gravure apparaît à l'Hôtel des Ventes, aussitôt toute la gent bibliophile d'être en rumeur. Une lutte d'enchères effrénées s'engage, et le livre se paie au poids des billets de banque.» La COMTESSE DE RAYMOND, Marie-Henriette-Françoise, chanoinesse du chapitre de Sainte-Anne de Munich (1825-1886). Née à Agen, la comtesse et chanoinesse de Raymond a légué aux archives de Lot-et-Garonne les manuscrits composés par elle, ainsi que sa riche bibliothèque, dont la majeure partie des volumes sont reliés en maroquin rouge et frappés à ses armes[529]. [529] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 195. La COMTESSE DE PARIS, Marie-Isabelle-Françoise d'Assise d'Orléans, fille du duc de Montpensier, mariée, en 1864, à son cousin germain Louis-Philippe-Albert d'Orléans, comte de Paris (1848-....)[530]. [530] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 113;--et M.-N. BOUILLET, _Atlas universel d'histoire et de géographie_, p. 477. La PRINCESSE DE BAUFFREMONT, Marie-Christine-Isabelle-Ferdinande Osorio de Moscoso et Bourbon (1850-....)[531]. [531] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 134. La PRINCESSE VICTORIA (1868?-....). «La princesse Victoria de Grande-Bretagne, qui vient de célébrer son quarante-deuxième anniversaire, est renommée en Angleterre comme une des plus habiles relieurs amateurs. «La princesse possède une petite bibliothèque d'ouvrages qu'elle a reliés très artistement de ses propres mains. «Comme exposante, cette ouvrière princière a déjà obtenu plusieurs prix et distinctions honorifiques sous le pseudonyme de Miss Matthews[532].» [532] La _Gazette de France_, dans la _Bibliographie de la France_, 19 août 1910, p. 161. La MARÉCHALE et DUCHESSE DE BROGLIE, Louise-Augustine Salbigothon-Crozat (....-1813)[533]. [533] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 141. La PRINCESSE DE GRIMALDI, Marie-Catherine de Brignole (....-1813)[534]. [534] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 165. PHILIPPINE-LÉONTINE POTIER DE NICOLAI (....-1820)[535]. [535] Cf. ID., _ouvrage cité_. t. I, p. 190. LA MARQUISE DE ROUGÉ, Nathalie-Delphine de Rochechouart-Mortemart, mariée en 1777 (....-1828)[536]. [536] Cf. Joannis GUIGARD, _ouvrage cité_, t. I, p. 198. La COMTESSE DE BEAUHARNAIS, Auguste-Eugénie-Françoise, dame chanoinesse du chapitre royal de Bavière (....-1831)[537].» [537] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 135. LA DUCHESSE D'ALBUFÉRA, Honorine-Antoine de Saint-Joseph, mariée en 1808, à Louis-Gabriel Suchet, duc d'Albuféra (XIXe siècle)[538]. [538] Cf. ID., _ouvrage cité_, t. I, p. 131. Comme la jolie et avenante Alice Ozy, la non moins belle et sémillante ANNA DESLIONS (ou DÉLION) (XIXe siècle) se classe parmi les bibliophiles. «Surnommée Marie-Antoinette, à cause de la ressemblance frappante de son profil avec celui de cette reine»[539], Anna Deslions, qui mourut jeune, dans une misère complète, eut, en 1869, un procès avec le grand libraire Fontaine, du passage des Panoramas, à propos d'achats de livres montant à la somme de 10.000 francs, qu'elle hésitait ou se refusait à payer. Nous relevons, parmi ces précieux volumes: un livre d'heures de 1000 francs, une Bible de 600 francs, une _Imitation de Jésus-Christ_ de 600 francs, etc., qui firent dire à la galerie que Mlle Deslions sacrifiait d'une main à Dieu et de l'autre au démon[540]. [539] ZED (comte de Maugny), _le Demi-Monde sous le second empire_, p. 52 (Paris, Kolb, s. d.). [540] Cf. le journal _le Voleur_, 6 août 1869, p. 495. Une autre galante dame du XIXe siècle, ESTHER GUIMONT (....-1879), surnommée _le Lion_, et que ce surnom ne doit pas faire confondre avec la précédente, a possédé aussi une bibliothèque, «mais bien maigre, sans aucun luxe d'éditions ni de reliures, nous apprend Joseph d'Arçay[541], et dans laquelle on est assez étonné de trouver les _Classiques latins_ de Panckoucke, à côté des _Questions de mon temps_ d'Émile de Girardin, et des _Nouvelles à la main_ de Roqueplan [deux de ses intimes amis], dont la présence s'y explique mieux». [541] Pseudonyme du docteur Bonnet de Malherbe. _Indiscrétions contemporaines, Souvenirs intimes_, p. 390 (Paris, Calmann Lévy, 1885). C'est Esther Guimont qui disait: «Conçoit-on ce Girardin? J'ai huit cents lettres de lui, toutes compromettantes, et il ne veut pas me les racheter![542].» [542] _Journal des Goncourt_, année 1879, t. VI, p. 59. Il est fait mention, dans le _Journal des Goncourt_[543], de Mme DE POIX (XIXe siècle), mère du prince de Poix, «qui était une bibliophile passionnée». Le prince de Poix et sa mère possédaient une collection «qui fut brûlée, lors de l'incendie du _Pantechnicon_ à Londres. Avec les livres, il y avait aussi quelques tableaux, quelques porcelaines, et il arriva cela de bizarre, qu'il n'y eut qu'une tasse de Sèvres qui resta intacte, mais dont le _bleu de roi_ fut changé en le plus beau noir du monde: tasse qui fut offerte au Musée de Sèvres, comme témoignage de la solidité de la porcelaine.» [543] Année 1893; t. IX, p. 125. On cite encore, au nombre des dames bibliophiles de notre temps: Mme BENJAMIN-DELESSERT[544]; Mlle DOSNE, belle-sœur de M. Thiers[545]; La DUCHESSE DE MOUCHY[546]; La VICOMTESSE DE NOAILLES[547]; La DUCHESSE DE RAGUSE[548]; La COMTESSE Cl.-CASALGRASSO SOLAR[549]; La MARQUISE MARIANA-FLORENZI WADDINGTON[550]; Mme JULIETTE ADAM, qui figure, avec Mme JULIA BARTET, de la Comédie-Française, sur la liste des sociétaires du «Livre contemporain». [544] Cf. François FERTIAULT, _les Amoureux du livre_, p. 340-341. [545] Cf. ID., _ibid._ [546] Cf. ID., _ibid._ [547] Cf. ID., _ibid._ [548] Cf. ID., _ibid._ [549] Cf. ID., _ibid._ [550] Cf. ID., _ibid._ Mme RENÉE PINGRENON s'est beaucoup occupée de la fabrication du livre, du livre illustré notamment; elle a fait, il y a quelque dix ans, des conférences sur ce sujet, et a publié de nombreux articles sur les livres et «la vénération» qu'on leur doit[551]. [551] Cf. la _Revue biblio-iconographique_, février 1904, p. 88 et suiv. Mais il est une femme qui a droit à une mention toute spéciale et à une place tout à fait à part dans cette galerie, c'est Mlle MARIE PELLECHET (1840-1900), qui a dressé le _Catalogue général des incunables des bibliothèques de France_[552], et à qui ses longues et laborieuses recherches, ses importants et admirables travaux bibliographiques, ont valu le titre officiel, qu'aucune femme n'avait reçu avant elle, de bibliothécaire honoraire à la Bibliothèque nationale. [552] Dont trois volumes sont parus: Paris, Alphonse Picard, 1897, 1906 et 1909. Ce vaste répertoire, qui présente un intérêt de premier ordre pour ceux qui s'occupent de l'histoire de l'imprimerie, formera sept volumes. «Chef-d'œuvre de la nouvelle école bibliographique», a dit Léopold Delisle en parlant de cet ouvrage, dans l'introduction du _Catalogue général des livres imprimés de la Bibliothèque nationale_, t. I, p. LXXVI. Mlle Pellechet n'a pu que publier «le premier volume de ce grand ouvrage, qu'elle avait entrepris à ses frais, mais dont elle a assuré l'achèvement par un legs spécial. M. Louis Polain continue dignement l'œuvre de celle dont il avait été le collaborateur et l'ami.» (_Bulletin officiel de l'Union syndicale des maîtres imprimeurs de France_, avril 1914, p. 167, note 2; article de M. Paul Lacombe sur l'_Histoire de l'imprimerie en France_.) ADDENDA _Page 36, avant Herrade de Landsberg (...-1195), lire_: La femme de Geoffroi Martel (fils de Foulques Nerra ou le Noir, comte d'Anjou; Geoffroi Martel: 1006 ou 1007-1060) aimait la lecture, mais telle était alors la rareté des livres, qu'elle fut obligée de donner deux cents moutons, cinq quartiers de froment et autant de seigle et de millet pour avoir un manuscrit renfermant des homélies. (Cf. Victor DURUY, _Histoire de France_, t. I, p. 247; Paris, Hachette, 1898.) Tout le monde connaît le nom d'Héloïse, l'amante passionnée d'Abélard (1101-1164), qui, toute jeune, avait étudié, à l'abbaye d'Argenteuil, le latin, le grec, l'hébreu et la philosophie. _Per abundantiam litterarum erat suprema_, dit d'elle Abélard. (Cf. MICHELET, _Histoire de France_, t. II, p. 324; Paris, Marpon et Flammarion, 1879;--et VILLENAVE, Notice, en tête des _Lettres d'Héloïse et d'Abélard_, p. 10; Paris, Charpentier 1865.) INDEX ALPHABÉTIQUE ABOUT (Edmond): 255. ADAM (Mme Juliette): 267. ADÉLAÏDE (Madame), fille de Louis XV: 179, 180, 181. ADÉLAÏDE (Mme), sœur de Louis-Philippe: 194, 200. AGNÈS (abbesse): 33, 34. AIGUILLON (duchesse D'): 85. ALBANY (comtesse D'): 196, 197. ALBERT D'AILLY DE CHAULNES (Charlotte D'): 150. ALBRET (Diane-Françoise D'): 151. ALBRET (Jeanne D'): 59. ALBRET (Marie D'): 81. ALBUFÉRA (duchesse D'): 264. ALDE MANUCE: 52. ALEMBERT (D'): 145. ALEXANDRE VI (pape): 51. ALFIERI: 196. ALIGNY (ou ALIGRE?) (marquise d'): 246. ALIGRE (Étienne D'): 234. ALIGRE (Mme D'), Madeleine-Catherine Boivin de Bonnetot: 234. ALIGRE (Mme D'), Françoise-Madeleine Talon: 174. ALIGRE (marquise D'), Mme de Saint-Germain: 245, 246. ALIGRE (président D'): 174. ALKAN aîné: 8, 29. ALLERAY (Mme D'): 247. AMBRES (marquise D'): 145. AMBROISE (saint): 33, 224. AMÉDÉE IX, duc de Savoie: 44. ANACRÉON: 199. ANGENNES (comtesse ou marquise D'), Marie-Françoise de Mailly: 231. ANGENNES (Julie-Lucine D'): 76, 78, 79, 80. ANGENNES DE RAMBOUILLET (Louise-Isabelle D'): 150. ANGOULÊME (duc D'): 220. ANGOULÊME (duchesse D'), dite Madame Royale: 220, 221. ANNE D'AUTRICHE: 85, 168. ANNE DE BAVIÈRE, princesse de Condé: 111. ANNE DE BOLEYN: 66, 67. ANNE DE BRETAGNE: 47, 48, 49, 50. ANNE DE FRANCE: 45, 46, 53. ANNE DE LORRAINE: 68. ANSELME (le Père): 140. APPIEN: 202. ARÇAY (Joseph D'): 265. ARGENSON (René D'): 93, 136, 155. ARGOUGES (marquise D'): 229. ARIOSTE: 42. ARISTOTE: 37. ARMAILLÉ (Mme D'): 218. ARMENAULD (Mlle): 87. ARNAULD D'ANDILLY: 78. ARNAULD DE CORBEVILLE: 78. AROUET (Mme): 96. ARTOIS (comte D'): 214, 226. ARTOIS (comtesse D'): 214. ARTOIS (Louise-Marie-Thérèse D'), dite Mademoiselle: 249. ASPASIE: 29, 30. ASPREMONT (Marie D'): 112. ASSE (Eugène): 40, 41, 43, 64, 125, 133, 134, 136, 141, 155, 180, 182, 212, 213, 216, 219, 226, 228, 249. ATHANASE (saint): 33. AUBIGNÉ (Agrippa D'): 68. AUBIGNÉ (Mme Jean D'): 68. AUCHY (vicomtesse D'): 147. AUGIER (Émile): 250, 254. AUGUSTIN (saint): 33, 88. AULNOY (Mme D'): 214. AUMALE (duc D'): 256, 261. AUMONT (duchesse D'): 230. BADIER (Florimond): 80. BAILLEU (Mme): 247. BALLANCHE: 215. BALZAC (H. DE): 24. BARTHÉLEMY (abbé): 183. BARTET (Mme Julia): 247, 267. BASILE (saint): 33, 69. BASSOMPIERRE (maréchal DE): 76. BASTARD DE LA FITTE (Marie DE): 234. BAUFFREMONT (princesse DE), Hélène, princesse de Courtenay: 139. BAUFFREMONT (princesse DE), Marie-Christine-Isabelle-Ferdinande Osorio de Moscoso et Bourbon: 262. BAUYN D'ANGERVILLIERS (Mme DE): 234. BAVIÈRE (Anne DE), princesse de Condé: 111. BAVIÈRE (Édouard DE): 111. BAVIÈRE (Marie-Anne-Christine DE): 149. BAYLE: 94, 173. BEAUHARNAIS (comtesse DE): 264. BEAUHARNAIS (Eugène DE): 27. BEAUHARNAIS (Hortense DE): 222. BEAUJEU (sire DE): 45. BEAUJOLAIS (Mademoiselle DE): 142. BEAUMANOIR (Mme DE): 245. BEAUMARCHAIS: 167. BEAUVEAU (marquis DE): 113. BEAUVILLIERS (duc DE): 124. BEAUVILLIERS (duchesse DE), fille de Colbert: 124. BEAUVILLIERS DE SAINT-AIGNAN (duchesse DE): 165. BÉCU ou BÉQUS (Anne), mère de Mme du Barry: 189. BELZUNCE ou BELSUNCE (Anne-Marie-Louise DE) (abbesse): 234. BELZUNCE ou BELSUNCE (vicomtesse DE): 235. BEMBO (Pierre): 51, 52. BENJAMIN-DELESSERT (Mme): 267. BERLAYMONT (comtesse DE): 151. BERNARD (saint): 45, 88. BERRY (duc DE): 27. BERRY (duchesse DE), Marie, nièce de Charles V: 43. BERRY (duchesse DE), fille du Régent: 141. BERRY (duchesse DE), Marie-Caroline, fille du roi de Naples Ferdinand Ier: 225-228, 249. BERTHAIRE: 29. BERTRAND, seigneur de la Tour: 54. BESSET (Élisabeth-Henriette): 245. BIGNON DE VERTHAMON (Marie-Anne-Françoise): 126. BIGOTTINI (Mme): 26, 27. BIRÉ (Edmond): 9, 11, 12, 13, 221. BISSY (comtesse DE): 137. BIZIAUX, relieur: 167. BLACAS (comtesse X. DE): 247. BLOIS (Mademoiselle DE), Françoise-Marie de Bourbon: 125. BLOIS (Mademoiselle DE), Marie-Anne de Bourbon: 125. BLONDEL D'AUBERS (Mme): 235. BOCCACE: 58. BOÈCE: 45. BOILEAU: 11, 151, 199. BOISSONADE: 223. BOITEAU (Paul): 171. BOLEYN ou BOULEN (Anne DE): 66, 67. BONAPARTE: 11; voir NAPOLÉON Ier. BONAPARTE (Jérôme): 250. BONAPARTE (Louis): 222. BONAPARTE (princesse Mathilde): 249, 250, 251. BONHOMME (Honoré): 193. BONNEMAINS (vicomtesse DE): 247. BONNET DE MALHERBE (docteur): 265. BONNEVIE (abbé DE): 9. BORGIA (Lucrèce): 51, 52. BORNIOL (Mme DE): 247. BOSSUET: 66, 211. BOTHWELL (comte): 71. BOUCHARD (Mme DE): 245. BOUCHER, peintre: 169. BOUCHOT (Henri): 181. BOUCOT (Mme Nicolas): 151. BOUFFLERS (Charles-Joseph DE): 158. BOUFFLERS (comtesse DE): 160, 161. BOUFFLERS (duchesse DE): 156, 157, 158, 159, 161. BOUFFLERS (Joseph-Marie, duc DE): 156. BOUFFLERS (marquise DE): 159. BOUILLET (M.-N.): 104, 129, 140, 262. BOUILLON (duchesse DE): 108, 109. BOULLANGER, commissaire: 199. BOURBON (Catherine DE): 73, 75. BOURBON (duc DE): 146. BOURBON (Henri DE): 75. BOURBON (Marie-Louise-Thérèse DE), femme de Charles IV, roi d'Espagne: 196. BOURBON (Pierre DE), sire de Beaujeu: 45. BOURBON-CONDÉ (Louis DE): 240. BOURBON-CONDÉ (Louise-Adélaïde DE): 215. BOURBON-CONTI (Louise-Adélaïde DE), dite Mademoiselle de la Roche-sur-Yon: 143. BOURBON-CONTI (princesse DE), Louise-Marguerite de Lorraine: 75. BOURBON DE LA GUICHE (Henriette DE): 235. BOURBON-VENDÔME (Antoinette DE): 64. BOURDICHON (Jehan): 48. BOURGOGNE (duc DE): 216. BOURGOGNE (duchesse DE): 138, 168. BOUTARD: 147. BOUVIER (Félix): 27. BOZE (M. DE): 80. BRANCAS (duc DE): 134. BRANCAS (duchesse DE): 134, 135, 136, 164. BRANCAS-LAURAGUAIS (duchesse DE): 165. BRANTÔME: 45, 46, 47, 59, 60, 68, 70, 72. BRIOT (marquis DE): 78. BRISSON (Adolphe): 5, 6, 15. BROCHET DE SAINT-PREST (Mme): 245. BROGLIE (maréchale et duchesse DE): 263. BROGLIE (marquise DE): 245. BRUMOY (le Père Pierre): 254. BRUNET (Gustave): 116, 117. BUFFON: 211. BULLION-WIDEVILLE (marquise DE): 151. BURE (Mme Guillaume DE): 235. BURE (les frères DE), libraires: 235, 239. BURNET (Gilbert): 66, 67. BURY (Richard DE): 1. BUSSY (Honorée DE): 152. _Cabinets de lecture_: 89. CALLOT: 23. CALPURNIE: 30. CAMPAN (Mme): 182. CAMUS DE PONTCARRÉ (Mme): 236. CARLIN LE BRET (Mme): 196. CASTETS (H.): 250, 251. CATHERINE DE BOURBON: 46, 47, 73. CATHERINE DE MÉDICIS: 67, 168, 228. CATHERINE II, impératrice de Russie: 46, 173. CATHERINE DE SIENNE (sainte): 52. CAUMARTIN (Mme DE): 106. CAYLUS (Mme DE): 109, 110, 127, 128, 133. CHALABRE (marquis DE): 24. CHAMBORD (comte DE): 13. CHAMFORT: 217. CHAMILLARD ou CHAMILLART (marquise DE): 121, 122. CHAMILLARD, ministre de Louis XIV: 122. CHAMISSO DE BONCOURT (Adalbert): 217, 218. CHAMPEAUX (A. DE): 44. CHAPONNIÈRE (Paul): 185, 187. CHARBONNÉ (Mme): 207. CHARDON (Mme Virginie): 245. CHARLES Ier (duc): 43. CHARLES Ier, roi d'Angleterre: 90. CHARLES II, roi d'Espagne: 125. CHARLES III, duc de Parme: 249. CHARLES III, roi d'Espagne: 170. CHARLES IV, duc de Lorraine: 113. CHARLES IV, roi d'Espagne: 196. CHARLES V, roi de France: 40, 41, 42, 43. CHARLES VI, roi de France: 44. CHARLES VII, roi de France: 44. CHARLES VIII, roi de France: 47, 53. CHARLES IX, roi de France: 83. CHARLES X, roi de France: 178, 214, 226. CHARLES LE TÉMÉRAIRE: 44, 64. CHARLES-QUINT: 65. CHARLEVAL: 97. CHAROLAIS (Mademoiselle DE): 129. CHARRON: 100. CHARTIER (Alain): 58. CHARTRES (duc de): 194. CHARTRES (Mademoiselle DE): 142. CHATEAUBRIAND: 9, 10, 11, 12, 13, 221. CHATEAUBRIAND (Mme DE): 9, 10, 12, 14. CHATEAUNEUF (abbé DE): 96, 97. CHATILLON (duchesse DE): 80, 236. CHAUDOT (Mlle): 245. CHAULIEU: 133. CHESNEAU (Ernest): 250. CHESSY-FOURCY (comtesse DE): 228. CHEVREAU (Urbain): 201. CHIMAY (princesse DE): 191. CHOFFARD, graveur: 259. CHOISEUL (duc DE): 174. CHOISEUL-STAINVILLE (duchesse DE): 183. CHRISTINE DE FRANCE: 86. CHRISTINE DE PISAN: 41, 42, 43. CHRISTINE DE SUÈDE: 94, 95, 96, 201. CICÉRON: 37, 41, 45, 201. CLAUDE DE FRANCE, fille aînée de Louis XII: 65. CLAUDE DE LORRAINE, premier duc de Guise: 64. CLERMONT (Mme DE): 170. CLERMONT (Mademoiselle DE): 129. CLÈVES (Charles DE): 81. CLOTAIRE Ier: 29, 31, 32. COCHERIS: 1. COIGNY (Mme DE): 223. COLBERT: 103, 124. COLBERT (Catherine): 103. COLLETET: 78. COMBALET (M. DE): 85. COMMINES: 45. CONDÉ (princes DE): 81, 92, 93, 104, 111, 128, 184, 235. CONDÉ (princesses DE): 104, 111, 184. CONDORCET: 96. CONRART: 78. CONTI (princes DE): 93, 125, 129, 160. CONTI (princesses DE): 129, 178. CORDAY (Charlotte): 219, 220. CORIOLIS: 52. CORNEILLE: 79, 102, 199, 219, 254. COTIN (abbé): 102. COULANGES (Mme DE): 101. COURSOU: 205. COURTENAY (princesse DE): 139. CRABBE (Élisabeth): 82. CRÉBILLON: 199. CROMWELL (Thomas): 67. CROY (Philippe DE): 68. CROZAT DU CHATEL (marquis): 237. CROZAT DU CHATEL (marquise): 237. CRUSSOL (duchesse DE): 179. CUJAS: 228. DACIER (André): 113, 205. DACIER (Mme): 113, 114, 115. DALLOZ: 258. DAMAS (comtesse Charles DE): 245. DAMAS (Mme DE), née Rochechouart: 245. DANTE: 45, 52, 225. DANTZIG (duchesse DE): 21. DARLUS (Marie-Geneviève-Charlotte): 166. DASSY (docteur): 216. DEGUERRY (abbé): 9. DELESPINE (Ch.-J.-B.): 178. DELHOMME (Mme Mina): 247. DÉLION: voir DESLIONS. DELISLE (Léopold): 44, 48, 268. DELZANT (Alidor): 255. DEMIDOFF (prince Anatole): 250, 251. DEROME, relieur: 240, 261. DESCHAMPS (Émile): 254. DES ESSARTS: 218. DESLIONS ou DÉLION (Anna): 264, 265. DES MAIZEAUX: 98. DESMARETS: 78. DESMARETS (Mme Jean), née Marie Colbert: 103. DESTOUCHES: 199. DESTUTT DE TRACY: 223. DEVONSHIRE (duc DE): 214. DIANE DE FRANCE: 70. DIANE DE POITIERS: 65, 167. DIDEROT: 171, 173, 175, 259. DIENNE (Charlotte-Françoise DE): 140. DIEZ (Mme veuve): 237. DIOTIME: 30. DOCHE, compositeur: 258. DOCHE (Mme): 257, 258, 260. DORÉ (Gustave): 255. DOSNE (Mlle): 267. DOUBLE, collectionneur: 260. DOUJAT (Françoise): 150. DREUX-BREZÉ (Catherine-Angélique DE): 122. DUBARRY ou DU BARRY (Mme): 189, 190, 191, 261. DU BELLAY: 71. DU BU DE LONGCHAMP (Mme): 245. DU CASTEL (Étienne): 42. DU CHATELET (Mme): 157, 159. DUCHÉ (Mme Hélène): 247. DUCLOS: 171. DU COUDRAY (marquise): 247. DU DEFFAND (marquise): 143, 144, 145, 160, 173, 174, 183, 184. DU DRENEUC (comtesse): 237. DUGAS DE BOIS-SAINT-JUST (Mme): 152. DULOT, poète: 85. DUMAS (Alexandre): 25, 186, 254. DU PESCHIN (Jacquette): 54. DUPLESSIS ou DU PLESSIS DE RICHELIEU (Élisabeth-Marguerite-Armande): 139. DUPLESSIS ou DU PLESSIS DE RICHELIEU (Marie-Gabrielle-Élisabeth): 139, 140. DUPONT (Paul): 25. DUREY DE NOINVILLE (Mme): 165. DURFORT (Claude DE), religieuse: 237. DURFORT (Jean DE): 152. DURFORT (Jean-Louis DE): 152. DURFORT (Mme Louise DE): 152. DURFORT-CIVRAC (Adélaïde-Philippine... duchesse DE): 191. DURFORT-CIVRAC (Anne-Marie... duchesse DE): 233. DURFORT-CIVRAC (marquise DE): 172. DURFORT DE DURAS (Louise-Henriette... duchesse DE): 192. DURFORT DE DURAS (Marguerite-Félicité... duchesse DE): 229. DURFORT DE LORGES (Élisabeth-Geneviève, duchesse DE): 122. DURFORT DE LORGES (Marie-Marguerite... duchesse DE): 238. DUROC (maréchal): 27. SEUIL, relieur: 104. EGMONT (Adolphe D'): 46. EGMONT (Marguerite D'): 73. EISEN (Charles): 259, 260. ÉLÉONORE D'AUTRICHE: 65. ÉLISABETH (Madame), sœur de Louis XVI: 215-219. ÉLISABETH D'ANGLETERRE: 46, 69. EMMANUEL LE GRAND, roi de Portugal: 65. ENGHIEN (duc D'): 215. ÉON (le chevalier ou la chevalière D'): 172, 173. ÉPICURE: 30. ÉPINAY (Mme D'): 171, 175, 260. ERCEVILLE (comtesse D'): 248. ERNOUF (baron): 39. ESPAGNE (Marie-Thérèse-Antoinette D'): 171. ESTE-MODÈNE (Marie-Béatrix-Eléonore D'): 124. ESTRÉES (comte D'): 127. ESTRÉES (Élisabeth-Rosalie D'): 127. ESTRÉES (Gabrielle D'): 75. EUDEL (Paul): 4. EURIPIDE: 11. ÈVE (Clovis), relieur: 73. ÈVE (Nicolas), relieur: 64. FABRE (Xavier), peintre: 196. FALLOUX (M. DE): 221. FARNÈSE (Élisabeth): 141. FAURIS (Mme): 238. FAURIS (président): 238. FÉNELON: 208, 216. FERDINAND Ier, roi de Naples: 225. FERTIAULT (François): 12, 21, 23, 53, 70, 94, 252, 267. FIELDING: 213. FIRMIN-DIDOT (Ambroise): 178. FLAUBERT (Gustave): 250. FLEURY (évêque): 146. FLEURY (duchesse DE): 169. FLEURY (marquise DE): 245. FLOURY (H.), libraire: 16. FOCHIN ou FOUQUELIN (Antoine): 71. FONTAINE, libraire: 265. FONTAINE-CHALANDRAY (baron DE): 238. FONTAINE-CHALANDRAY (baronne DE): 238. FONTANES: 11, 26. FONTENELLE: 133. FORTUNAT (Venantius Fortunatus): 30, 33, 34. FOU (Pierre DU): 44. FOUQUELIN ou FOCHIN (Antoine): 71. FOUQUET (Jehan): 48. FOUQUET (marquise DE), Marie-Jeanne Guyon: 152. FOUQUET (marquise DE), dite Mademoiselle de Nevers: 188. FOUQUIER-TINVILLE: 169, 175. FOURNIER (Édouard): 64, 89, 167, 190. FRANÇOIS (duc): 47. FRANÇOIS Ier: 57, 58, 59, 65. FRANÇOIS-XAVIER (saint): 118, 119. FRANÇOISE-RENÉE DE LORRAINE: 68. FRANK (Félix): 59. FRÉDÉRIC-AUGUSTE II, roi de Pologne: 170. FRONSAC (Mademoiselle DE): 139, 140. FROULAY DE TESSÉ (comtesse DE): 82. FUENTÈS (comte DE): 27. GABILLOT (C.): 80. GABRIELLE DE BOURBON: 51. GAIGNIÈRES: 80. GAILLARD: 209. GAILLARDET (Frédéric): 173. GALIANI (abbé): 171. GALLET (Mme E.-M.): 248. GALLIFET ou GALLIFFET (marquise DE): 231. GAMACHES (marquise DE), chanoinesse: 169. GAST: 179. GAUSSERON (B.-H.): 4. GAUTIER (Théophile): 250, 251, 252, 255, 256, 257. GAVARNI: 250. GÉDOYN (abbé): 97, 128. GÉLAS (comtesse DE): 147. GENLIS (Mme DE): 185, 187, 192 et suiv. GEOFFRIN (Mme): 216. GEORGEL (Mme Marie): 248. GÉRARD: 37. GERTRUDE (sainte): 35. GHELDRES ou GUELDRE (duc DE): 46. GHELDRES ou GUELDRE (Philippe ou Philippine DE): 46. GILLIES: 179. GIRARDIN (Émile DE): 265, 266. GIRARDIN (Mme Émile DE): 19, 20. GODEAU: 78. GOLDSMITH: 179. GOMBAULD: 78. GONCOURT (Edmond et Jules DE): 21, 169, 189, 197, 250, 251, 255, 266. GONTAUT (Jean DE): 63. GONZAGUE-CLÈVES (Anne DE): 111. GOURDON DE GENOUILLAC: 180. GOURNAY (Marie de Jars DE): 74. GRAFFIGNY (Mme DE): 23. GRAMONT-CHOISEUL (duchesse DE): 174, 183. GRANDE MADEMOISELLE (la): voir MONTPENSIER (duchesse DE). GRAVILLE (Anne DE): 82. GRÉCOURT: 199. GRÉGOIRE DE NAZIANZE (saint): 33. GREGOROVIUS: 51. GREY (Jeanne): 69. GRIGNAN (comte DE): 131. GRIGNAN (Louis-Provence DE): 130, 131. GRIGNAN (marquise DE): 130, 131. GRIMALDI (princesse DE): 172, 263. GRIMM: 171. GROLIER, bibliophile: 84. GROSSOLLES DE FLAMARENS (N. DE) (abbesse): 152. GUÉBRIANT (maréchal): 78. GUELDRE ou GHELDRES (duc DE): 46. GUELDRE ou GHELDRES (Philippe ou Philippine DE): 46. GUÉMÉNÉ (princesse DE), duchesse de Montbazon: 90. GUÉMÉNÉ (princesse DE), épouse de Louis VII de Rohan: 153. GUENET DE LOUYE (Mlle L.-E.): 245. GUIGARD (Joannis), _Nouvel armorial du bibliophile_: 54, 55 et suiv., 65, 70, 73, 75, 76, 81, 82, 83, 84, 90, 93, 103, 104, 105, 106, 109, 120, 121, 122, 124, 125, 126, 127, 129, 130, 133, 134, 137, 138, 139, 140, 141, 143, 145, 147, 148, 149, 150, 151, 152, 153, 154, 156, 158, 163, 164, 165, 166, 169, 170, 171, 172, 174, 175, 177, 178, 179, 182, 183, 184, 188, 189, 191, 192, 194, 195, 196, 219, 222, 225, 228, 229, 230, 231, 232, 233, 234, 235, 236, 237, 238, 239, 240, 241, 242, 243, 244, 249, 258, 262, 263, 264. GUILLAUME (Jacquette ou Jaquette): 89. GUIMONT (Esther): 265, 266. GUIONNEAU-PAMBOUR (Mme L.): 248. GUISE (duc DE): 64, 75, 76. GUSTAVE III, roi de Suède: 160. HABERT: 78. HAINAUT (Marie DE): 40. HAMILTON: 213. HARLAY (François DE), archevêque: 120. HAUTEFORT DE BERINHEN (ou BERINGHEN?) (Mme): 245. HÉBERT, peintre: 250. HEINSIUS: 94. HÉLÈNE (sainte): 48. HENRI II: 58, 70, 228. HENRI III: 73. HENRI IV: 57, 59, 64, 73, 75, 86, 90. HENRI VIII, roi d'Angleterre: 66. HENRIETTE-ANNE D'ANGLETERRE, duchesse d'Orléans: 107, 115. HENRIETTE-MARIE DE FRANCE: 90. HENRY-ANDRÉ (Mme): 248. HERRADE DE LANDSBERG (abbesse): 35, 36, 38. HERVEY (Élisabeth): 214. HILAIRE (saint): 33. HILDEGARDE (sainte): 37, 38. HOCQUINCOURT (M. D'): 91. HOMÈRE: 114. HOUDETOT (comtesse D'): 175, 176. HOUDETOT (vicomtesse D'): 176. HOYM (D'): 56. HUET, évêque d'Avranches: 88, 95. HUGO (Charles): 256. HUGO (Victor): 12, 193, 194, 256. HUME: 160. HUNTER DE CADIGNAN (Mme Catherine): 245. HYPATIE: 29. IGNACE (saint): 118, 119. ISABEAU DE BAVIÈRE: 44. ISENGHIEN (princesse): 225. IVOI (Paul D'): 252. JABLONOWSKI (comte): 244. JACOB (Bibliophile): voir LACROIX (Paul). JACQUES Ier: 58. JACQUETTE DU PESCHIN: 54. JAEGLÉ (Ernest): 116, 118. JANIN (Jules): 211. JARRY (Nicolas), calligraphe: 78, 80. JEAN, roi de France: 100. JEAN Ier, duc de Bourbon: 43. JEAN II (duc): 43. JEANNE d'Arc: 43. JEANNE DE BOURBON: 40. JÉRÔME (saint): 33. JOANNIS (Mme DE): 245. JOURDAN (Louis): 173. JULLIEN (B.): 64, 114. KERHOENT (marquise DE): 238. LA BÉDOYÈRE: 206. LABESSADE (Léon DE): 190, 191. LA BORDE (Joseph DE): 260. LA BORDE (Mme DE): 239. LA CHAUSSÉE: 199. LACOMBE (Paul): 269. LA CONDAMINE (Mme L.-H. DE): 248. LACOUR (Louis): 134, 210. LACROIX (Paul) (Bibliophile Jacob): 2, 48, 49, 51, 59, 79, 190, 211. LA CROIX DE CASTRIES (marquise DE): 170. LAFAGUETTE: 256. LA FARE: 133. LA FAYETTE (Mme DE): 101, 107, 213. LA FERTÉ-IMBAULT (marquise DE): 216. LA FEUILLADE (comtesse DE): 239. LA FEUILLADE (Marie-Thérèse DE): 122. LA FIZELIÈRE (M. DE): 168. LA FONTAINE: 108; _les Contes_ de ----, édition dite «des Fermiers généraux»: 258-261. LA FORCE (duchesse DE): 245. LAFOSSE, graveur: 259. LA GERVAISAIS (M. DE): 215. LA GRANGE (marquise DE): 249. LA GRANGE D'ARQUIEN (Marie-Casimire DE): 106. LA HARPE: 114, 159. LA HAYE (Mme DE): 232. LAIDET (Mme DE): 245. LALANDE: 215. LALANNE (Ludovic): 35, 42, 58, 66, 69, 88, 96, 108, 119, 120, 124, 130, 146, 151, 154, 166, 173, 184, 186, 193, 196, 210, 215, 236, 241, 243. LAMBALLE (princesse DE): 195. LAMETH (Mme M.-Ch. DE): 248. LAMETH (marquise DE): 182. LAMOIGNON (Marie-Madeleine DE), Mme Le Pelletier ou Le Peletier: 139. LAMOIGNON, marquis de Baville: 150, 151. LAMOIGNON-BAVILLE (marquise DE): 150. LA MOTTE: 113. LANCRET: 6. LANDSBERG (Herrade DE) (abbesse): 35, 36, 38. LANGE (Mme): 248. LANGEAC (comtesse DE), née de la Quenille ou de la Queuille: 246. LA POPELINIÈRE: 260. LA QUEUILLE (marquise DE): 239. LARCHEY (Lorédan): 103. LA ROCHEFOUCAULD (comtesse DE): 83. LA ROCHEFOUCAULD (duchesse DE), Félicité-Sophie de Lannion: 192. LA ROCHEFOUCAULD (duchesse DE), femme de l'auteur des _Maximes_: 153. LA ROCHEFOUCAULD-LIANCOURT (duc DE): 181, 192. LA ROCHEFOUCAULD DE ROYE DE ROUCY (Élisabeth DE), religieuse: 229. LA ROCHE-SUR-YON (Mademoiselle DE): 143. LAROUSSE, _Grand Dictionnaire_: 42, 53, 58, 67, 88, 166, 174, 179, 187, 210, 214. LA TOUR (Bertrand, seigneur DE): 54. LA TOUR (Claude DE): 83. LA TOUR (François DE): 83. LA TOUR (Louise-Charlotte DE): 104, 105. LA TOUR D'AUVERGNE (Amélie DE): 105. LA TOUR D'AUVERGNE (Élisabeth-Éléonore): 230. LA TOUR D'AUVERGNE (princesse DE): 166. LATOUR SAINT-YBARS: 254. LA TRÉMOILLE (duchesse DE): 246. LA TRÉMOILLE-THOUARS (duchesse DE): 239. LAUNAY (vicomte DE): 19, 20. LAURAGUAIS (comte DE): 134. LAVAL (Mme DE): 47. LA VALLIÈRE (duc DE), bibliophile: 56, 80, 138, 167, 236. LA VALLIÈRE (duchesse DE): 138. LA VALLIÈRE (Mlle DE): 108, 125. LA VIEFVILLE (Marie-Anne): 230. LE BAS DE GIRANGY (Mme): 246. LE BAS DE MONTARGIS, conseiller d'État: 239, 240. LE BAS DE MONTARGIS (Mme): 239. LEBIENVENU-DUBOURG (Mme C.): 248. LE BLOND (Guillaume): 216. LE CAMUS DE NICOLAI (Marie-Catherine): 149. LECOY DE LA MARCHE: 48. LE DOULCEUR (Mme L.): 248. LE DUC (Mlle): 56, 240. LEFÉBURE DE LA BASSE-BOULOGNE (Mme): 241. LEFEBVRE (la maréchale): 21. LEFEBVRE ou LEFÈVRE (Tanneguy): 113. LEFEBVRE SAINT-OGAN: 42, 43. LEFÈVRE ou LEFEBVRE (Tanneguy): 113. LE FÈVRE-CAUMARTIN DE LA TOUR (Madeleine-Charles-Émilie): 188. LE GASCON, relieur: 80. LEMIRE, graveur: 259. LEMONNIER (abbé): 254. LE MONNIER (docteur): 216, 218. LENCLOS ou L'ENCLOS (Ninon de): 96, 97, 98. LENGLET-DUFRESNOY: 127. LEONTIUM: 29, 30, 98. LÉOPOLD Ier, duc de Lorraine: 132. LÉOPOLD Ier, empereur d'Allemagne: 121. LE PELLETIER ou LE PELETIER (Mme), Louise-Suzanne de Beaupré: 184. LE PELLETIER ou LE PELETIER (Mme), Marie-Madeleine de Lamoignon: 139. L'ÉPINETTE LE MAIRAT ou LESPINETTE DE MEIRAT (Mme DE): 232. LERCHENFELD (baronne DE): 246. LÉRIS (G. DE): 127. LÉRIS (Madeleine DE): 153. LESCURE (M. DE): 128, 145, 173. LESDIGUIÈRES (duchesse DE): 120, 121. L'ESTANG (Catherine DE): 68. LESTEVENON (marquise DE): 241. LESZCZYNSKA (Marie), femme de Louis XV: 146, 155, 167, 168. LE TORT (général): 222, 225. LETOURNEUR: 214. LEULIETTE: 179. LEVALLOIS (Jules): 221, 222. LEVÉE: 254. LE VERDIER (Mme M.): 248. LÉVIS-CHATEAU-MORAND (comtesse DE): 241. LÉZARDIÈRE (Marie-Pauline DE): 208, 209, 210. LIGNE (Ernestine DE): 153. LIGNE (princesse DE): 241. LIPONA (comtesse DE): 246. LOCKE: 208. LOMÉNIE DE BRIENNE (cardinal): 176. LONGIN: 11. LONGUEIL, graveur: 259. LONGUEVILLE (duchesse DE): 92, 93. LORENZ: 173. LORRAINE (Charles DE): 80. LORRAINE (Claude DE), fille du duc Henri II de Lorraine: 153. LORRAINE (Henri Ier, duc DE): 76. LORRAINE (Henri II, duc DE): 73, 153. LORRAINE (Henriette DE): 80. LORRAINE (Louise DE): 73. LORRAINE (Nicolas DE): 73. LORRAINE (Renée DE): 76. LOUIS XI: 44, 45, 58. LOUIS XII: 47, 48, 49, 65. LOUIS XIV: 80, 105, 107, 109, 115, 121, 125, 126, 128, 133, 138, 139, 149, 236. LOUIS XV: 171, 173, 174, 178, 179, 180, 181, 183, 189, 235, 260. LOUIS XVI: 178, 210, 215, 220, 235. LOUIS XVIII: 178, 198. LOUIS-PHILIPPE, roi de France: 156, 193, 194, 200, 222. LOUIS DE FRANCE, dauphin, fils de Louis XV: 171. LOUIS Ier, duc de Bourbon: 40. LOUIS II, duc de Bourbon: 40. LOUIS Ier, comte de Montpensier: 51. LOUIS II, duc de la Trémoille: 51. LOUISE (Madame), fille de Louis XV: 181, 182. LOUISE DE LORRAINE: 73. LOUISE DE SAVOIE: 57. LOUVEL: 226. LOUVOIS (marquise DE): 109. LOVENJOUL: voir SPOELBERCH DE LOVENJOUL. LOVIOT (Louis): 255. LUCIEN DE SAMOSATE: 100. LUXEMBOURG (duchesse DE): 157, 159. LUXEMBOURG (maréchal DE): 157. LUXEMBOURG (maréchale DE): 156, 158, 159. LUYNES (duc DE): 126, 165, 180. LUYNES ET DE CHEVREUSE (duchesse DE): 231. MACKAU (baronne DE): 216, 218. MADAME ROYALE, fille de Louis XVI: 220. MADEMOISELLE: voir MONTPENSIER (duchesse DE). MAIGRET (Mme): 242. MAILLÉ DE KERMAVAN (ou KERMAOUEN, ou KERMAN, ou CARMAN), (Cunégonde DE) (abbesse): 241. MAILLY (marquise DE): 195. MAINE (duc DU): 133. MAINE (duchesse DU): 132. MAINTENON (Mme DE): 104, 121, 127, 138, 168, 229. MAISONFLEUR (M. DE): 71. MAISONS (président DE): 163. MALESHERBES: 209. MALÉZIEUX: 133. MALLEVILLE: 78. MANCINI (marquise DE): 232. MANDELOT (François), seigneur de Passé: 84. MARAT: 219, 220. MARCHAND (Jeanne et Jeannine): 248. MARCULFE: 209. MARGUERITE (sainte): 48. MARGUERITE D'ANGOULÊME: 57 et suiv. MARGUERITE D'AUTRICHE: 53. MARGUERITE D'ÉCOSSE: 58. MARGUERITE DE FLANDRE: 41. MARGUERITE DE SAVOIE: 57, 58. MARGUERITE DE VALOIS (la reine Margot): 57 et suiv., 83. MARIE-AMÉLIE, femme de Louis-Philippe: 222. MARIE D'ANGLETERRE: 65. MARIE-ANNE-GABRIELLE-ELÉONORE, religieuse, fille de Mademoiselle de Nantes: 129. MARIE-ANTOINETTE, reine de France: 181, 195, 210-212, 215, 220, 264. MARIE DE HAINAUT: 40. MARIE DE MÉDICIS: 75, 86, 90, 168. MARIE-THÉRÈSE D'AUTRICHE, femme de Louis XIV: 105, 149. MARIGNY (M. DE): 168. MARMIER (Xavier): 5. MARMONTEL: 213. MARQUET: 45. MARQUETS (Marie DES): 83. MARQUISE (Mlle): 161. MARS (Mlle): 24, 25. MARSAN (comtesse DE): 216. MARSAN (Mademoiselle DE): 166. MARTIAL: 95. MARTIN (Gabriel), libraire et bibliographe: 126, 137. MARTIN (saint): 32. MASCARON: 88. MASSELIN: 193. MATTHEWS (miss): 263. MATTHIEU (saint): 117. MAUGRAS (Gaston): 194. MAXIMILIEN D'AUTRICHE: 53. MAZARIN (duchesse DE): 183. MAZARIN (Mme): 109. MÉDICIS: voir CATHERINE, MARIE. MÉGRET (Mme): 242. MELLET (comtesse DE): 246. MELUN (Élisabeth DE): 104. MÉNAGE: 88, 154. MÉNARD (René): 36, 37. MERLIN: 24, 25, 175-176. MESNARD (Paul): 130, 131. MEUNG (Jean DE): 50. MEUSNIER DE QUERLON: 72. MICHAUD, _Biographie universelle_: 42, 154, 166, 187. MICHELET (Jules): 93, 155, 219, 220. MINARD DE VELARS (Mme): 248. MIOSSENS: 97-98. MIRABEAU: 194. MIREPOIX (duchesse DE): 163. MIREPOIX (maréchale DE): 161. MOLIÈRE: 199. MONTAIGNE: 74, 98, 100, 197. MONTAUSIER (marquis ou duc DE): 78, 79, 80, 88. MONTAUSIER (duchesse DE): 76. MONTBAZON (duchesse DE): 90, 91, 92. MONTESPAN (Mme DE): 105, 110, 126, 128, 133, 139. MONTESQUIEU: 173, 208, 210. MONTESQUIEU (citoyenne): 233. MONTESQUIOU-FEZENSAC (duchesse DE): 219. MONTESSON (marquise DE): 185, 186, 187. MONTJOUVENT (Marie-Alexandrine DE) (abbesse): 242. MONTMORENCY (Charlotte-Marguerite DE): 81. MONTMORENCY-BOUTEVILLE (duchesse DE): 163. MONTMORENCY-LAVAL (Marie-Louise DE) (abbesse): 169. MONTMORENCY-LAVAL (marquise DE): 230. MONTMORENCY-LUXEMBOURG (Charles-François-Frédéric DE), maréchal de France: 157. MONTMORENCY-LUXEMBOURG (duc DE): 242. MONTMORENCY-LUXEMBOURG (duchesse et maréchale DE): 156. MONTMORENCY-LUXEMBOURG (duchesse DE), Charlotte-Anne-Françoise: 242. MONTMORENCY-LUXEMBOURG (duchesse DE), Marie-Sophie-Honorate: 230. MONTPENSIER (duc DE): 262. MONTPENSIER (duchesse DE), Anne-Marie-Louise d'Orléans, dite MADEMOISELLE et la GRANDE MADEMOISELLE: 102, 103. MONTPENSIER (Mademoiselle DE), Louise-Élisabeth d'Orléans: 142, 202. MOREAU: 80. MOREAU LE JEUNE: 6. MORÉRI, _Grand Dictionnaire historique_: 54, 83, 104, 199. MORETON DE CHABRILLAN (Mlle DE): 246. MORTEMART (Louise-Françoise DE): 125. MOUCHY (duchesse DE): 167, 246. MOURAVIT (Gustave): 24, 41, 44. MOURIN (Ernest): 113. MOYE (Mme): 248. MOYNEL (Mme): 248. MULLER (Eugène): 89, 115. MULSANT (Étienne): 8. NADAILLAC (comtesse DE): 248. NANTES (Mademoiselle DE): 128. NAPOLÉON Ier: 11, 26. NAPOLÉON III: 223. NASSAU-DILLENBOURG-SIEGEN (Jean, comte DE): 153. NEUBOURG (Éléonore-Magdeleine-Thérèse DE): 121. NEUFVILLE DE VILLEROY ou NEUVILLE-VILLEROI (duchesse DE): 178. NEVERS (Mademoiselle DE): 188. NEWTON: 223. NEWTON (Sarah): 222, 223. NICOLAI (Philippine-Léontine Potier DE): 263. NICOLE: 99, 101. NIEUWERKERKE (comte DE): 251. NOAILLES (duc DE): 140, 229. NOAILLES (duchesse DE), Anne-Claude-Louise d'Arpajon: 172. NOAILLES (duchesse DE), Catherine-Françoise-Charlotte Cossé-Brissac: 170. NOAILLES (duchesse DE), Françoise-Charlotte-Amable d'Aubigné: 229. NOAILLES (duchesse DE), Marie-Françoise de Bournonville: 119. NOAILLES (Marie-Uranie DE): 140. NOAILLES (vicomtesse DE): 267. NODIER (Charles): 5, 24, 56, 201. NOGARET (François-Félix): 214. NOGARET DE LA VALETTE (Louise) (abbesse): 148. NOLLET (abbé): 216. ODILE (sainte): 35. ORANGE (prince D'): 68. ORLÉANS (ducs D'): 115, 126, 132, 141, 142, 161, 185, 186. ORLÉANS (Gaston D'): 80. ORLÉANS (duchesse D'), Auguste-Marie-Jeanne de Bade, belle-fille du Régent: 156. ORLÉANS (duchesse D'), Henriette-Anne d'Angleterre, belle-sœur de Louis XIV: 107. ORLÉANS (duchesse D'), Marie-Adélaïde de Bourbon-Penthièvre, mère du roi Louis-Philippe: 186, 200. ORLÉANS (Élisabeth-Charlotte D'), sœur du Régent, femme de Léopold Ier, duc de Lorraine: 132. ORLÉANS (Louise-Adélaïde D'), dite Mademoiselle de Chartres: 142. ORLÉANS (Louise-Élisabeth D'), dite Mademoiselle de Montpensier: 142. ORLÉANS (Marie-Louise D'), sœur consanguine du Régent, femme du roi d'Espagne Charles II: 125. ORLÉANS (Philippe-Élisabeth D'), dite Mademoiselle de Beaujolais: 142. OROSE (Paul): 33. OURCHE (comte D'): 168. OZY ou OZI (Alice): 248, 255-257, 264. PADELOUP, relieur: 240. PALATINE (princesse), Charlotte-Élisabeth de Bavière, duchesse d'Orléans, mère du Régent: 115, 116, 117, 118, 126, 141. PARIS (comte DE): 262. PARIS (comtesse DE): 262. PARIS (Mme DE), née Boula: 246. PARIS (Paulin): 236. PASCAL: 99, 211. PASTOR (Marie): 248. PATIN (Gui): 94, 118. PEIGNOT (Gabriel): 94. PELLECHET (Mlle Marie): 268. PÉNÉLOPE: 30. PENGUILLY: 21. PÉPIN (Louis): 259. PÉPIN DE LANDEN: 35. PÉRICLÈS: 30. PÉRUSSE D'ESCARS ou PEYRUSSE DES CARS (Mme DE): 234. PÉTRONE: 95. PHILIPPE LE BEL: 51. PHILIPPE LE HARDI: 41. PHILIPPE V, roi d'Espagne: 141. PHILIPPE ou PHILIPPINE DE GHELDRES ou DE GUELDRE: 46. PIERRE DE BOURBON, sire de Beaujeu: 45. PIGNATELLI (Mme), née Durfort: 246. PIGNATELLI D'EGMONT (marquise DE): 188. PILLOY (Julie-Justine): 255. PINCHESNE: 78. PINGRENON (Mme Renée): 248, 268. PISAN (Christine DE): 41, 42, 43. PISAN (Thomas DE): 41. PITARD: 62. PITHOU: 227, 228. PLATON: 30, 37. PLANTIN, imprimeur: 202. PLINE LE JEUNE: 30. PLUNKETT (Eugénie DE): 257, 258. PLUTARQUE: 173, 206, 217, 220. POIX (Mme DE): 266. POIX (prince DE): 266. POLAIN (Louis): 268. POLIGNAC (Anne DE), comtesse de La Rochefoucauld: 83. POLIGNAC (duc DE): 195. POLIGNAC (duchesse DE), Yolande-Martine-Gabrielle de Polastron: 195, 196. POMPADOUR (marquise DE): 161, 167 et suiv., 190, 260. PONS (marquise DE): 246. PONSARD: 254. PONT-DE-VEYLE: 157. PONTIS: 202. POPELIN (Claudius): 251. POREL: 4. POTIER DE NICOLAI (Philippine-Léontine): 263. POTRON (Mme): 63. POYET (Jean): 48. PRAULT, libraire: 129, 134, 240. PRAXITÈLE: 257. PRÉVOST (abbé): 90. PREYSING (Mme DE): 246. PRIE (marquis DE): 146. PRIE (marquise DE): 146. PROVENCE (comtesse DE): 198, 214. QUENTIN-BAUCHART (Ernest), _les Femmes bibliophiles de France_: 47, 51, 53, 55 et suiv., 56, 57, 65, 68, 70, 73, 74, 75, 81, 82, 83, 84, 85, 86, 90, 92, 103, 104, 105, 107, 108, 109, 111, 112, 115, 120, 122, 124, 125, 126, 127, 128, 130, 132, 137, 138, 139, 140, 142, 143, 146, 149, 152, 153, 156, 166, 167, 170, 171, 172, 175, 178, 179, 180, 183, 184, 186, 190, 191, 195, 196, 198, 200, 211, 214, 215, 220, 230, 233, 240, 244, 261. QUINTE-CURCE: 96. RABELAIS: 118, 202. RACAN: 74. RACHEL, tragédienne: 252, 253. RACINE: 11, 149, 199, 254. RADEGONDE (sainte): 29, 30, 32, 33, 34, 35, 36. RADZIWILL (Jacques): 106. RAGUSE (duchesse DE): 267. RAHIR (Édouard): 259. RAIGECOURT (Mme DE): 218, 219. RAMBOUILLET (marquise DE): 76, 77, 79. RAMBOUILLET: voir ANGENNES. RANCÉ (abbé DE): 90, 91, 92. RAUCOURT (Mlle): 198, 199. RAYMOND (comtesse et chanoinesse DE): 261. RAYNAL: 219. REGNARD: 199, 205. RELINDE (abbesse): 35, 37, 38. RENÉ II, duc de Lorraine: 47, 64. RETTÉ (Adolphe): 94. REUILLY (Jean DE): 198, 199. RICCOBONI (Mme): 213. RICHARDSON: 213. RICHELIEU (cardinal DE): 61, 85. RICHELIEU (M. DE): 136. RICHELIEU: voir DUPLESSIS ou DU PLESSIS DE RICHELIEU. RIEUX (comtesse DE): 242. RIOCOUR ou RIOCOURT (duchesse DE): 184. ROBERT (Nicolas), miniaturiste: 78, 80. ROCHEBLAVE (Samuel): 69. ROEDERER: 79. ROHAN (Louis VII DE): 153. ROHAN-CHABOT (duchesse DE): 182. ROLAND (Mme): 200-208. ROLAND DE CHALLERAUGE (ou DE CHALLERANGES?) (Mme): 243. RONDÉ (Mme): 246. RONSARD: 68, 71, 72, 83. ROQUEPLAN: 265. RORET, libraire: 193. ROSWITA ou ROSWITH (abbesse): 37. ROTHELIN (abbé DE): 80. ROUGÉ (marquise DE): 264. ROUGEMONT (Mme DE): 246. ROUSSEAU (Jean-Jacques): 90, 158, 160, 171, 175, 176, 199, 200, 211, 219. ROYALE (Madame): voir MADAME ROYALE. ROZAN (Charles): 43. RUFFEC (duc DE): 163. RUFFEC (duchesse DE): 163, 164. SACY (Silvestre DE): 235. SAINT-AIGNAN-BEAUVILLIERS (duchesse DE): 124. SAINT-AMAND ou SAINT-AMANT (M. DE): 132. SAINT-AMAND ou SAINT-AMANT (Mlle DE), marquise de Grignan: 130. SAINT-ÉVREMOND: 98. SAINT-GERMAIN (Mme DE): 245, 246. SAINT-LAMBERT, poète: 171, 175. SAINT-PREST (Mme Brochet DE): 245. SAINT-SIMON: 90, 106, 109, 110, 111, 112, 116, 120, 122, 124, 131, 132, 134, 135, 138, 146. SAINT-VICTOR (Paul DE): 250, 255. SAINTE-AULAIRE: 133. SAINTE-BEUVE: 10, 29, 58, 60, 61, 74, 75, 95, 98, 102, 103, 114, 128, 145, 157, 158, 159, 160, 161, 163, 177, 181, 182, 192, 197, 221, 222, 223, 224, 225, 250. SAINTE-MAURE (marquise DE): 243. SALIGNAC (Jean de Gontaut, baron DE): 63. SAND (George): VII, 1, 20, 26. SANDEAU (Jules): 250. SANS-GÊNE (Mme): 21. SAPHO: 199. SARRASIN: 100. SARTINE, lieutenant général de police: 177. SARTINE (Mme DE): 177. SAULX DE TAVANNES (duchesse DE): 243. SAUMAISE: 95. SAUTEREAU-MONTESSUY (Mme DE): 246. SAVELLES: 76. SAVOIE (Victoire-Marie-Anne DE): 140. SAVOIE (Victor-Amédée DE): 126, 140. SAXE (Marie-Amélie-Christine DE): 170. SAXE (Marie-Josèphe DE): 178. SAYVE (Mlle DE): 246. SCARRON: 202. SCHULTZ (Mme L.): 248. SCUDÉRY: 213. SCUDÉRY (Madeleine DE): 78, 86, 87, 88, 89. SEDULIUS: 33. SÉGUIER (Mme): 81. SÉGUIER (Pierre), chancelier: 81. SÉGUR (Mme DE), Charlotte-Émilie Le Fèvre de Caumartin: 229. SÉGUR (président DE): 229. SÉGUR (vicomtesse Henry DE): 246. SEILLIÈRE (Mme Zoé): 248. SÉNÈQUE le philosophe: 45, 96. SENS (Mademoiselle DE): 130. SÉVIGNÉ (Mme DE): 99, 100, 101, 102, 130, 131. SHAKESPEARE: 214. SILVA (Mme): 246. SOBIESKI (Jean): 106. SOCRATE: 30. SOLAR (comtesse Cl.-Casalgrasso): 267. SOLEIL (Catherine DE ou DU): 84. SOLEINNE (M. DE): 186. SOPHIE (Madame), fille de Louis XV: 179, 180, 181. SOPHOCLE: 11, 114. SOUBISE (M. DE): 91. SOUBISE (princesse DE): 109, 110. SOULIÉ (Frédéric): 64. SOURDIS (Marie d'Escoubleau DE): 82. SOURQUES (Mme DE): 199. SOUVESTRE (Mme M.): 248. SPARRE (Mlle DE): 95. SPENCER (Georgina): 214. SPOELBERCH DE LOVENJOUL (vicomte DE): 26. STAAFF: 72. STAAL-DELAUNAY (Mme DE): 133. STAËL (Mme DE): 248. STUART (Charles-Édouard): 196. STUART (Marie): 70, 71 72. SUCHET, duc d'Albuféra: 264. SULTZBACH (Mme Marie-Auguste DE): 243. SUZANNE DE BOURBON: 53. SWETCHINE (Mme): 221. TACITE: 173. TAINE (Hippolyte): 250. TALLEMANT DES RÉAUX: 61, 62, 63, 74, 76, 77, 78, 79, 85, 86, 87, 88, 90, 98, 103, 118, 147, 148. TALLEYRAND-PÉRIGORD (duchesse DE): 243. TALLEYRAND (Jean-Charles): 244. TALMONT (princesse DE): 244, 248. TASSE (le): 133, 206. THÉVENOT (Jean DE): 154. THÉVENOT (Mme): 154. THÉVENOT (Melchisédec): 154 THIERRY (Augustin): 31, 33, 34, 208, 210. THIERS: 267. THIROUX, conseiller au Parlement: 166. THIROUX D'ARCONVILLE (Mme): 166, 232. THIROUX DE CROSNE (marquise): 194, 232. THIROUX DE LAILLY (Jean-Louis-Lazare), fermier général: 231. THIROUX DE LAILLY (Mme), née de Millery: 166, 231, 232. THOMAS DE PISAN: 41. THOU (Anne DE): 84. THOU (Augustin DE): 84. THOURNOUER (Mme): 249. TIRAQUEAU (Madeleine): 150. TOULOUSE (comte DE): 139. TOULOUSE (comtesse DE): 139. TOURNEUX (Maurice): 129, 134, 137, 163, 164, 165, 176, 183, 231, 282, 239. TOURNON (Just DE): 83. TRACY (Mme DE): 222, 223, 224. TRESSAN (comte DE): 157, 158. TROUBAT (Jules): 250. TURENNE (vicomte DE): 83. TURENNE (vicomtesse DE): 93. URFÉ (Honoré D'): 82. URSULE (sainte): 48. UZANNE (Octave): 2, 3, 201. UZÈS (duchesse D'): 78, 79, 80. VALABRÈGUE (Antony): 156, 167. VALBELLE DE TOURVES (marquise DE): 244. VALÈRE-MAXIME: 45. VALLERY-RADOT (René): 5, 6. VALOIS (Marguerite DE): 83. VASSAL (Mme DE): 246. VASSÉ (marquis DE): 137. VASSÉ (marquise DE): 137, 171. VASSE-DUSAUSSAY (Mme): 249. VATTEVILLE (Mme DE): 165. VAUDÉMONT (comte DE): 73. VENTADOUR (duchesse DE): 125. VERGENNES (comtesse DE): 233. VERMANDOIS (Mademoiselle DE): 130. VERNEUIL (Mademoiselle DE): 235. VERRUE (comtesse DE): 126, 127, 168. VERTHAMON (Catherine-Madeleine DE), Mme de Caumartin: 106. VERTHAMON (Marie-Anne-Françoise Bignon DE): 126. VÉSALE, anatomiste: 82. VICTOIRE (Madame), fille de Louis XV: 179, 180, 181. VICTOR-AMÉDÉE Ier, duc de Savoie: 86. VICTOR-AMÉDÉE III, duc de Savoie et roi de Sardaigne: 198, 214. VICTORIA (princesse): 262. VIEILBOURG ou VIEUXBOURG (marquise DE): 136. VIGNEROT (Marie-Madeleine DE): 85. VILLARS (duc DE): 134, 135, 148. VILLARS (duchesse DE): 134, 135. VILLARS-BRANCAS (duchesse DE): 148, 164. VILLEMESSANT (Hippolyte DE): 255, 257. VILLEROI (duchesse DE): 178. VILMORIN (Mme DE): 249. VINTIMILLE (Mme DE), née Talbot: 246. VINTIMILLE (marquise): 249. VIRGILE: 41, 76, 199. VITU (Auguste): 52. VOISENON (abbé DE): 63. VOITURE: 79, 100. VOLAND (Mlle): 175. VOLTAIRE: 96, 114, 133, 157, 159, 163, 168, 171, 173, 199, 207. VOYER D'ARGENSON (marquise DE): 183. WADDINGTON (marquise Mariana-Florenzi): 267. WATTEVILLE (Mme DE): 165. WEIGEL (Mme): 249. WIBORADE (sainte): 35, 38, 39. WIGG (J.-C.): 247. YOLANDE DE FRANCE: 44. YVE (Anne-Thérèse-Philippine D'): 188. ZAMOYSKI (prince): 106. ZED (comte de Maugny): 264. ZOÏLE: 114. TABLE DES MATIÈRES I FEMMES BIBLIOPHOBES PAGES I 1 II 9 III 15 IV 21 II FEMMES BIBLIOPHILES I 29 II 40 III 55 IV 66 V 85 VI 155 VII 247 ADDENDA 270 INDEX ALPHABÉTIQUE 271 ALENÇON.--IMP. GEO. SUPOT. *** End of this LibraryBlog Digital Book "Les femmes et les livres" *** Copyright 2023 LibraryBlog. All rights reserved.