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Title: Le Coq D'Or (The Golden Cock) - An Opera in Three Acts
Author: Rimsky-Korsakov, N. (Nikolay)
Language: English
As this book started as an ASCII text book there are no pictures available.


*** Start of this LibraryBlog Digital Book "Le Coq D'Or (The Golden Cock) - An Opera in Three Acts" ***


                               LE COQ D’OR

                            (The Golden Cock)

                                AN OPERA
                            IN THREE ACTS BY
                           N. RIMSKY-KORSAKOV

                COPYRIGHTED, 1918, BY FRED RULLMAN, INC.

                              PUBLISHED BY
                           FRED RULLMAN, Inc.

                                 AT THE
                   THEATRE TICKET OFFICE. 111 BROADWAY
                                NEW YORK



Transcriber’s Note


This book contains the text of the opera both in French and in English.
The original presented the two languages on alternating pages. This is
impractical to reproduce in an e-text. Instead, the acts alternate: Act 1
in French, then in English, followed by Act 2, etc.

It seems obvious from the number of errors in the original text that it
was not checked by a fluent French speaker before publication. Accents
and punctuation have been corrected without note. A fuller list of
changes made appears at the end of this text.



ARGUMENT.


King Dodon, a lazy and gluttonous ruler, is greatly worried by his
warlike neighbors. He seeks advice but his various advisers fail to
comfort him. Finally the Astrologer brings him a wonderful bird, the
Golden Cock, who knows how to foretell events. The bird is placed on a
spire in Dodon’s capital and from hour to hour sends out from his high
perch various messages which either send the crowd scurrying for their
weapons, or cause it to scatter and return to its peaceful activities.
The bird suddenly sounds a war alarm. Dodon assembles his warriors and
they set out on their journey to the enemy’s land.

King Dodon’s army fares rather badly in an encounter with its foe. In the
uncertain light of early morning his warriors retreat into a deep gorge
where the ground is piled high with the bodies of the dead. Suddenly
Dodon and his generals descry a tent. It must be the headquarters of the
enemy’s chief.

They prepare the onslaught when suddenly there comes out of the tent
a beautiful young woman who sings a bold hymn to the sun in which she
dilates complacently upon her own physical beauty. Dodon and his general,
Polkan, are at once attracted and listen with pleasure while she tells
them that she intends to conquer Dodon’s capital. Her task is only too
easy. Dodon is ready and willing to give her anything she may desire,
even Polkan’s head.

Dodon and the strange Queen start for Dodon’s capital: he will make her
his bride. Their honeymoon is not unmixed bliss; the young Queen compels
her old husband to amuse her in ways which are not always as dignified
as would beseem Dodon’s position.

They quarrel. The Astrologer appears once more on the scene. He reminds
the King of his promise to give him anything he wishes in exchange for
the marvelous bird. The Queen herself is the price he demands. Dodon,
indignant, strikes him with his scepter and he apparently falls dead.
Then the bird flies down from the spire, pecks Dodon on the head and
kills him. The Astrologer then resuscitates, informs the audience that
the whole story is a fable, and that only he and the Queen are real human
beings.



DRAMATIS PERSONAE.


    KING DODON.
    AMELFA (_the Royal Housekeeper_).
    PRINCE GUIDON.
    THE ASTROLOGER.
    PRINCE AFRON.
    THE QUEEN OF SHEMAKHAN.
    VOEVODA POLKAN.
    THE GOLDEN COCK.



LE COQ D’OR



PROLOGUE.


          (_Devant le rideau apparaît L’ASTROLOGUE, une clef à la
          main._)

L’ASTROLOGUE (_au public_).

    Par mon art cabalistique,
    Par les lois que je pratique,
    On va voir renaître ici
    Les héros d’un vieux récit.
    Pour vous d’un conte tous les masques
    Revivront, joyeux, fantasques.
    Certes ce n’est qu’une fable,
    Mais la morale en este louable.

          (_Il disparaît._)



ACTE PREMIER.


          (_Avant le lever du rideau, on pressent qu’il va se passer
          quelque chose de grave et de solennel. En effet, on voit
          une vaste salle, dans le palais du ROI DODÔN, qui fut
          jadis maître de tous les steppes de la Russie méridionale.
          Le conseil royal est en séance. La salle est richement
          ornée de peintures, de sculptures, de dorures. Le vert,
          le bleu, le jaune, couleurs favorites des sujets du ROI
          DODÔN, prédominant, sur des bancs recouverts de brocart,
          siègent des seigneurs graves et barbas. Au milieu, sur un
          trône richement orné de plumes de paon, est DODÔN, couronne
          en tête et vêtu d’un habit d’apparat, jaune. Près de lui
          sont assis ses deux fils, APHRÔN et GVIDÔN. Parmi les
          conseillers le général POLKAN, vieux soldat brutal._)

LE ROI DODÔN (_qui paraît accablé de soucis_).

    Chers sujets, le cœur troublé,
    Je vous ai tous rassemblés
    Pour vous apprendre, en personne,
    Combien lourde est ma couronne.
    Mon sort est triste! écoutez:
    Jeune, j’étais redouté.
    Sans scrupule, l’âme fière,
    Je portais au loin la guerre.
    Maintenant, je suis bien vieux;
    Les combats sont périlleux.
    Or, mes ennemis se lèvent.
    Ils m’attaquent tous, sans trêve:
    On dirait qu’ils font exprès!
    Sans répit, nous restons prêts
    A combattre.

          (_Avec désespoir._)

    Nous veillons au Nord: du tout,
    C’est du Sud qu’il fond sur nous!
    On est là: tous ces sauvages
    Viennent par la mar.
    J’enrage: On n’a plus aucun répit,
    J’en sanglote de dépit.
    A ces maux est-il un remède?
    Qu’un de vous me vienne en aide.
    Un conseil!

UN SEIGNEUR (_avec hésitation_).

    Autrefois une vieille, par les fêves,
    Savait expliquer les rêves.

SECONDE SEIGNEUR.

    Allons donc! Cette autre était
    Bien meilleure, qui savait lire,
    Dans le marc, et tout prédire.

GVIDÔN.

    Dans le ciel on peut trouver
    Le sens de ce qu’on a rêvé.

TOUS.

    Par le marc, oui!
    On explique par les fêves.…
    Tous les rêves.

          (_La querelle devient acharnée. Le ROI reste assis, pensif.
          A ce moment apparaît sur l’escalier un vieil ASTROLOGUE.
          Il porte un habit bleu, brodé d’étoiles d’or, et un bonnet
          d’astrakan blanc. Sous son bras il tient un astrolabe et un
          sac bigarré. Tous, silencieux, le regardent. Il s’approche
          du ROI, à pas comptés, et salue jusqu’à terre. Puis il
          s’agenouille._)

L’ASTROLOGUE (_à genoux_).

    Fier Dodôn, salut à toi!
    Je fus, tel que tu me vois,
    Conseiller du roi, ton père.…
    Or, je viens, comme naguère,
    T’offrir mon fidèle appui.
    J’ai appris, tous tes ennuis:
    Ce coq d’or, sur une lance,
    Prouvera sa vigilance.
    Prends-le donc, et crois moi bien:
    Nul n’aura meilleur gardien.
    Lorsque tout sera paisible,
    Tu le verras impassible.
    Dès qu’un noir danger poindra,
    Sans tarder, il étendra
    Les ailes, dressera la tête
    Et d’une voix bien haute et nette.
    Chantera: “Cocoricou!
    Ouvrez l’œil et garde à vous!”

LE ROI DODÔN (_un peu incrédule_).

    A beau mentir qui vient de loin!
    Montre-nous-le, néanmoins.

          (_Tous entourent avec curiosité L’ASTROLOGUE, qui tire de
          son sac un petit COQ D’OR. Le COQ se débat entre ses mains
          et crie._)

LA VOIX DU COQ.

    Cocori! cocorico!
    Règne et dors en ton lit clos!

          (_Tous s’écrient avec étonnement._)

LES SEIGNEURS.

    Quel prodige!
    Quel miracle! il dit vrai:
    C’est un oracle.

LE ROI DODÔN

    Quel prodige! Quel miracle!

          (_À la foule, gaîment._)

    Je me trouve désormais
    Invincible, c’est bien vrai?

          (_Aux domestiques._)

    Plantez-le sur une pique,
    Qu’à veiller vite il s’applique.

          (_À L’ASTROLOGUE._)

    Je ne puis, en vérité
    De ma dette m’acquitter.
    Mon estime, et c’est justice,
    Récompense ton service.

          (_Solennellement._)

    Et je jure d’accomplir
    Sans tarder tous tes désirs.

L’ASTROLOGUE.

    Nul trésor ne sert au sage,
    Les honneurs, pas davantage.
    Ils attirent le souci;
    Mais pour ton serment, merci!

          (_L’ASTROLOGUE salue jusqu’à terre, et se dirige vers la
          sortie._)

LA VOIX DU COQ (_du haut de la flèche_).

    Cocori! Cocorico!
    Règne et dors en ton lit clos!

LE ROI DODÔN (_prête l’oreille, et se promène gaîment, en se frottant les
mains d’aise_).

    O délices! Plus de peines!
    Gouverner tous mes domaines
    Sans bouger, sans m’éveiller,
    Sauf pour rire et festoyer!
    En avant les jolis contes,
    Les jeux, les jongleurs, les danses!
    Je vais oublier, sans honte,
    La tristesse et les souffrances!

          (_L’intendante AMELFA paraît à la porte des chambres du
          fond.--S’étirant au soleil._)

    Ah, Soleil! Ta douce haleine
    Rajeunit les bois, les plaines.
    Vois fleurir les cerisiers.…

          (_Indécis._)

    Dans ce coin, bien volontiers,
    Je ferais un petit somme.

AMELFA (_empressée et avec une infinie sollicitude_).

    Mais bien sûr! Voici les hommes
    Qui t’apportent ton grand lit.

          (_Sur un signe d’elle, les serviteurs se précipitent dans
          le palais et reparaissent, portant un grand lit d’ivoire,
          couvert de fourrures; ils le dressent au soleil. AMELFA
          s’approche de DODÔN; elle apporte un grand plateau chargé
          de sucreries._)

    N’as-tu pas quelque appetit?
    Mange donc ces confitures,
    Quelques noix, ou bien des mûres!
    Bois le cidre: il est tout frais,
    Parfumé, mousseux, sucré.
    Ces fruits plein de miel, d’amandes,
    Et bien cuits au vin, t’attendent.
    Chasse donc tous les soucis,
    Tâte des pruneaux farcis.

LE ROI DODÔN (_bâille et s’installe à portée du plateau_.)

    Hum.… J’accepte.… Mais prends garde,
    Mon aimable babillarde,
    Qu’un pesant sommeil soudain
    N’interrompe mon festin.

          (_Le ROI a fini sa collation, et regarde du côté du lit.
          AMELFA arrange les oreillers et rabat les couvertures._)

AMELFA.

    Dors un peu sur cette couche
    Viens, je chasserai les mouches
    Loin de ton auguste front.

LA VOIX DU COQ.

    Cocori! Cocorico!
    Règne et dors en ton lit clos!

          (_DODÔN ne plut plus résister au sommeil. Il se couche
          et s’endort sans plus, avec autant d’insouciance qu’un
          enfant. L’intendante, penchée au dessus du lit, chasse les
          mouches._)

DES GARDIENS (_dans les coulisses_).

    Règne et dors en ton lit clos!

          (_Les GARDIENS, font l’appel, d’une voix somnolente, mais
          bientôt ils succombent à la douceur enchanteresse du
          sommeil de midi. Tous dorment profondement, sauf AMELFA.
          La capitale entière est possible. Seules les mouches
          infatigables bourdonnent autour du lit royal, que le soleil
          continue d’éclairer d’une lumière égale et douce._)

AMELFA.

    Tous s’endorment, tous sommeillent.
    Cher printemps! paix sans pareille!

          (_Elle s’accoude au lit du ROI et s’endort à son tour.
          DODÔN, dans son rêve, sourit comme à une belle inconnue._)

LA VOIX DU COQ.

    Cocori! Cocoricou!
    Ouvrez l’œil et garde à vous!

          (_Trompettes dans la coulisse.--Bruit. Des gens courent.
          Des trompettes sonnent de divers côtés. Des chevaux
          henissent. La foule se précipite autour du palais. Sur les
          visages interloqués se lit une terreur profonde._)

LA FOULE (_dans la rue_).

    Le coq a donné l’alarme!
    Courez tous, prenez les armes!
    Oh! Malheur, calamité!
    Le royaume est dévasté.

POLKAN (_accourant_).

    Roi puissant, ma voix t’appelle!
    Vois ton général fidèle!
    Ah! Réveille toi! Malheur!

          (_AMELFA va se cacher précipitamment._)

LE ROI DODÔN (_encore à moitié endormi_).

    Quel est donc ce bruit, Seigneur!

POLKAN.

    L’ennemi sur nous s’avance!

LE ROI DODÔN (_se lève en bâillant_).

    Hein? Quoi donc?
    Quelle démence.…
    Est-ce le feu dans mon palais?

POLKAN.

    Foin du vieux niais!
    Notre coq a chanté, il tourne et s’agite.…
    Tous nos gens ont fui. Viens vite!

LA VOIX DU COQ.

    Cocori! Cocoricou!
    Ouvrez l’œil et garde â vous.

          (_DODÔN regarde le COQ._)

LE ROI DODÔN (_au peuple_).

    Bien! Va pour la guerre, enfants!
    Hâtez-vous, courez aux camps.
    Faites vite, qu’on s’empresse!
    Mais d’abord, ouvrez les caisses.

LE PEUPLE (_docilement_).

    Nous serons obéissants!

          (_DODÔN s’assied sur son trône. Des chambres intérieures du
          palais sortent précipitamment APHRÔN et les SEIGNEURS, tous
          armés. GVIDÔN arrive et, tout en courant, boucle le
          ceinturon de son épée.--Il embrasse trois fois chacun de
          ses fils, qui partent, maussades, suivis des SEIGNEURS.--On
          entend le bruit de l’armée qui s’ébranle._)

LA VOIX DU COQ (_lorsque tout s’est calmé on entend la voix du COQ._)

    Cocoricou! Règne et dors en ton lit clos!

LE ROI DODÔN.

    Joli Coq, je te rends grâce.

          (_LE ROI DODÔN, AMELFA, les gardes s’endorment d’un sommeil
          calme et profond._)

GARDES (_dans la coulisse_).

    Règne et dors, en ton lit clos!

          (_Le rêve de DODÔN se précise._)

LA VOIX DU COQ.

    Cocori! Cocoricou!
    Ouvrez l’œil, et garde à vous!

          (_De nouveau s’entendent des cris, des pas précipités.
          Des trompettes sonnent. La foule, en grand désordre, se
          rassemble dans la rue, devant le palais. Trompettes dans la
          coulisse._)

LE PEUPLE (_dans la rue_).

    Ah, tout est perdu! Alerte!

          (_Ils restent tous indécis, n’osant réveiller le
          roi.--Trompettes dans la coulisse._)

    Notre roi qui dort!
    Oui, certes! Quel malheur!
    Vite à genoux!
    Comment faire? Sauvons-nous!
    Et Polkan reste introuvable!

POLKAN (_se précipite, suivi de seigneurs en armes. AMELFA va se cacher
précipitamment._)

    Un destin cruel nous accable,
    Sors enfin, oui, sors de ce doux repos!

LE ROI DODÔN (_réveillé en sursaut_).

    Ah! toujours mal à propos!

POLKAN.

    Dans la ville tous s’irritent
    Et là-haut, ton coq s’agite,
    Clame à pleine voix son chant
    Et regarde le levant.
    Nous ne sommes pas en nombre;
    L’avenir me paraît sombre.
    Fais donner les vétérans!

LE ROI DODÔN (_se frotte les yeux et bâille_).

    Oui! Je vais venir, attends.

          (_Il s’approche de la balustrade et regarde en l’air._)

LA VOIX DU COQ.

    Cocori! Cocoricou!
    Ouvrez l’œil et garde à vous!

LE ROI DODÔN (_d’un ton plaintif_).

    Le coq d’or nous met en garde.
    En avant! Que nul ne tarde.
    Chers amis marchons, vaillants,
    Au secours de nos enfants!

          (_Il se prépare sans empressement; les domestiques
          apportent en hâte son équipement couvert de poussière et de
          rouille. AMELFA regarde le ROI avec tristesse._)

    Mon armet! Puis, ma cuirasse.
    Ouf! L’étroite carapace!
    Cherchez-moi mon bouclier,
    Le beau rouge; un baudrier.…

LA VOIX DU COQ.

    Cocoricou! Ouvrez l’œil et garde à vous!

LE ROI DODÔN (_examinant son bouclier_).

    Mais il est rongé de rouille!
    Mon carquois en vain je fouille.

          (_Il est prêt à partir._)

    Et j’étouffe. Allons toujours.…
    Oh! Ce glaive, qu’il est lourd!

          (_soufflant._)

    Bah! Tant pis. Venez, fidèles!
    Qu’on m’aide à monter en selle.

LA VOIX DU COQ.

    Cocoricou! Ouvrez l’œil et garde à vous!

          (_De nombreux domestiques, soutenant DODÔN par les
          aisselles, lui font descendre l’escalier, au bas duquel
          l’attend un cheval blanc. Le peuple pénètre graduellement
          dans le palais._)

LE ROI DODÔN (_menace du doigt le Coq_).

    Fi, quel importun coq d’or
    Qui me trouble ainsi quand je dors.

          (_Sur l’escalier._)

    Est-il doux?

DEUXIÈME SEIGNEUR.

    Comme un mouton!

LE ROI DODÔN.

    C’est parfait alors: partons!

AMELFA (_d’une voix désespérée_).

    Mais, doux sire, t’en aller à jeun?

LE ROI DODÔN.

    Va, je mangerai.

          (_à POLKAN_.)

    A-t-on des vivres?

LA VOIX DU COQ.

    Cocoricoucou! Ouvrez l’œil et garde à vous!

POLKAN.

    Pour trois ans!

LE ROI DODÔN.

    Officiers, allons, en route!

AMELFA.

    Partez donc demain matin!

          (_DODÔN est à cheval._)

LE PEUPLE (_à tue-tête_).

    Gloire au roi Dodôn!
    Hourra! Hourra! Hourra!
    Ta valeur, chef intrépide,
    Fera fuir l’ennemi perfide.
    Mais surtout, sois bien prudent.
    Ne te mets pas en avant!


RIDEAU.



THE GOLDEN COCK



PROLOGUE


          (_THE ASTROLOGER appears before the curtain with a magic
          key in his hand._)

THE ASTROLOGER (_to the audience_).

I am a magician. By the occult sciences I am endowed with the
extraordinary gift of evoking the shades, and in dead bodies breathing an
enchanted life. Here before you will live again the droll masks of an old
fairy tale. The tale’s not true, but there’s a hint in it; a lesson to
all of you, good people.

          (_Disappears._)



ACT I.


          (_Before the curtain rises there is a feeling that
          something extraordinarily important and solemn is to be
          presented. And in fact one sees a vast hall in the palace
          of the famous KING DODON during the sitting of the Council
          of Boyars. The hall is richly ornamented with Russian
          carving, gilded and painted, by which it is clearly evident
          that green, blue, and yellow are the favorite colors of
          KING DODON’S people. On benches covered with brocade, the
          Boyars are seated in a semicircle,--grave and bearded men.
          Upon a throne in the middle, magnificently decorated with
          peacock feathers, is seated KING DODON himself, wearing a
          golden crown and in royal vestments of yellow. On either
          side of him are the impatient Princes--his sons AFRON and
          GUIDON. Amongst the Boyars is the old and rude VOEVODA[1]
          POLKAN._)

          [1] Voevoda--a head of the army.

KING DODON (_appears overwhelmed with cares_).

    I have summoned you hither, so that everyone
    In the kingdom should know, what a burden it is
    To the mighty Dodon to wear a crown.
    So, listen, my friends!
    From my youth up I have been redoubtable,
    And time and time again I have daringly affronted
    My neighbours.
    But now I wish to rest from warlike deeds,
    And seek repose.
    As if on purpose a neighbour now is disturbing me
    By unceasingly doing evil deeds.
    In order to defend
    The frontiers of my kingdom from attack
    I must maintain a large Army.
    We expect invasion from the North, and lo!
    A force is coming from the South.
    We have mastered these, but evil guests
    Are coming from the sea,
    So that I, Dodon, weep from very anger
    And cannot sleep.
    My life is so anxious. I desire advice and help.
    Counsel me!

ONE BOYAR (_hesitatingly_).

    ’Tis a pity our fortune-teller is dead.
    She would have unravelled the question
    By means of beans.…

SECOND BOYAR.

    Beans? We had--it’s a pity ’twas some time ago--
    A better witch. She divined by dregs.

GUIDON.

    There was also one who knew
    How to foretell things by the stars.

CHORUS OF BOYARS.

    Dregs are better.
    The beans are more to be believed in.

          (_The dispute becomes more violent. THE KING is in a state
          of indecision. At this moment the very old ASTROLOGER
          appears on the stairway, in a white hat and blue garment
          with gold stars. Under his arms he carries an astrolabe and
          bag. All follow the movements of the ASTROLOGER in silence,
          who, with the short steps of an old man, approaches THE
          KING and bows low before him._)

THE ASTROLOGER (_on his knees_).

    Hail, Majesty! Sire!
    Thy father knew me of old,
    But we have not met until now.
    Urged by my duty as a subject,
    And having heard that Dodon
    Was losing sleep by reason of his cares,
    I have brought thee as a gift a bird.
    Place it on a spire,
    And my golden cock will be thy true watchman.
    When all around is peaceful
    He will remain quiet,
    But if from any quarter
    War threatens thee,
    Or the invasion of an armed force,
    Or any other unexpected misfortune,
    In an instant my bird
    Will raise his comb,
    Will flap his wings, and
    Turning in that direction,
    Will begin to crow “Cock-a-doodle-do!
    Beware!”

KING DODON (_still unbelieving_).

    O! That’s a fairy tale!
    Take him out, and we shall have a look at him.

          (_They all surround THE ASTROLOGER, full of curiosity. THE
          ASTROLOGER takes out of his bag the cleverly-made Golden
          Cock, who flaps his wings and crows._)

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do!
    Reign, taking your ease!

          (_Exclamations of delight._)

THE PRINCES AND THE BOYARS.

    It is simply marvellous! Simply wonderful!
    The old man told the truth.

KING DODON

    Marvelous! Wonderful!

          (_with joy, to all_).

    Is it true, that I from this time forth
    Shall repel all my neighbours?

          (_To the servants._)

    Place him on a spire,
    And he will guard my capital.

          (_To THE ASTROLOGER._)

    How shall I thank thee--
    What can I promise thee--
    For such a favour?
    Besides my love and respect
    I shall fulfill thy first wish
    As if it were my own!

THE ASTROLOGER.

    Gifts to the wise are not flattering;
    Power--Riches--High Rank--
    Create only enmity.
    But love is dear to me!

          (_THE ASTROLOGER bows to the earth and goes towards the
          entrance._)

VOICE OF THE BIRD (_from the spire_).

    Cock-a-doodle-do!
    Reign, and take your ease!

          (_DODON walking up and down, rubbing his hands together
          joyfully._)

KING DODON.

    What happiness! With folded hands
    I shall reign, lying at my ease.
    If I wish, I shall sleep,
    And shall give orders not to be awakened.
    I shall give commands to be amused
    With fairy tales--
    With combats--with jesters--and with dancing.
    I shall forget forever
    That in this world there are calamities.

          (_The housekeeper AMELFA appears, standing on the threshold
          of a door leading to the inner apartments._)

          (_Stretching himself out in the sun._)

    How gloriously warm the sun is!
    It is the breath of Spring. All is becoming green.
    The cherry trees are white as milk.

          (_Looking about hesitatingly._)

    I should like to take a nap in this nook,
    And not to go into my bedroom.

AMELFA (_clasping her hands in boundless devotion_).

    Bàtyushka! If thou dost wish
    We shall turn the whole capital into a bedroom!

          (_At a sign from her the servants rush to the palace and
          carry out into the sun a bed of ivory with fur coverings.
          AMELFA herself comes to him with a large tray filled with
          delicacies._)

    See that thou hast an empty tummy.
    Taste a little of these Turkish pods;
    Or some walnuts in honey.
    Drink some cold kvass,
    With mint, hops, ginger.
    Or will it please the royal taste
    To have some prunes stuffed with raisins
    And dipped in wine?
    Try and see if they are tasty.

          (_DODON, yawning, sits down before the dishes._)

KING DODON.

    Oh well! All right! And whilst
    I dally with the dishes, amuse me
    So that I shall not fall asleep.

          (_Having finished the delicacies, he glances at the bed.
          AMELFA shakes up the pillow and arranges the bed._)

    Lie down! I shall from the royal face
    Drive off the annoying flies.

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do!
    Sleep in thy regal bed!

          (_DODON lies down, and instantly goes to sleep, as free
          from care as a child. AMELFA drives away the flies, bending
          over the bed. At first the guards sleepily call out to one
          another the words: “Reign, lying at ease.” Then the sweet
          charm of the mid-day nap overcomes them. All except AMELFA
          indulge in a long, sweet sleep. Silence reigns throughout
          the capital. The indefatigable flies alone buzz about
          DODON, and the everlasting sun shines as before with his
          steady and welcome light._)

AMELFA.

    All are asleep! All are weary!
    All tired by the breath of Spring!

          (_She leans her elbows on the royal bed, and falls asleep
          beside DODON, who smiles in his sleep, dreaming of some
          wonderful beauty who never existed._)

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do!
    Beware!

          (_Uproar, and running to and fro. Horses neigh. Sound of
          trumpets--sometimes here, sometimes there. People appear on
          the street. Terrible fear is depicted upon their pitiful
          faces._)

PEOPLE ON THE STREET.

    The bird is crowing! Get up!
    Saddle your fleet horses!
    Quickly! The enemy does not wait.
    He will trample down the cornfields
    And burn the villages.

POLKAN (_running in_).

    Our King! Father of the people!
    I am thy Voevoda.
    Sire! Awake! A calamity is upon us.

          (_The Housekeeper jumps up and hurriedly disappears._)

KING DODON (_not quite awake_).

    What is it?

POLKAN.

    It must be that a strange foe is advancing.

KING DODON (_getting up and yawning_).

    Eh! What? What calamity?
    Is my palace burning?

POLKAN.

    Devil take him!
    The bird is crowing, turning about on the spire.
    Noise and hubbub throughout the capital.

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do!
    Open your eyes and beware!

          (_His own eyes assure DODON of the restlessness of the
          bird._)

KING DODON (_to the people_).

    Well! My children. It is war.
    We must have assistance.
    No delay! Make haste!
    Unlock your coffers quickly.

PEOPLE ON THE STREET (_abasing themselves_).

    We are yours, body and soul.

          (_DODON sits on his throne. AFRON and the BOYARS rush in,
          armed. GUIDON runs in, buckling his sword belt. DODON
          kisses each of his sons thrice. The sons, much cast down,
          go out with THE BOYARS. The noise of the departing army is
          heard; then all is silent._)

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do!
    Reign, taking your ease.

KING DODON (_yawning_).

    Dear bird! Many thanks.

          (_DODON falls asleep; also AMELFA and the Guards. His
          dreams about the wonderful beauty become more definite and
          insistent._)

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do!
    Beware!

          (_Again noise and running to and fro. Trumpets. A terrified
          crowd of people assemble at the Palace, not daring to awake
          DODON._)

PEOPLE ON THE STREET.

    O! What misfortune! O, brothers, what evils!
    Our King is fast asleep. All is quiet
    In the palace. It is impossible to wake them.
    What shall we do? What will become of us?
    Where is Polkan, our Voevoda?

          (_POLKAN rushes in with armed BOYARS. AMELFA runs away._)

POLKAN.

    Sire! Father of thy people!
    Sire! Another calamity!

KING DODON (_leaping from the bed_).

    Always at the wrong time!

POLKAN.

    Noise and hubbub in all the capital,
    And again the bird high up
    On the spire is playing tricks,
    Turning towards the East.
    It seems the Army has not been successful.
    I suppose it would be the thing
    To call out the old men!

KING DODON (_rubbing his eyes and yawning_).

    Wait! I shall look for myself.

          (_Goes to the balustrade and looks up at the roof._)

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do! Beware!

KING DODON (_plaintively_).

    The golden cock is flapping its wings not in vain;
    A dangerous journey is before us.
    Now, old man, we shall arise quickly
    And go to help our children.

          (_He gets ready without any animation._)

    Where is my helmet? Bring my armour.

          (_The servants quickly fetch the dusty and rusty arms and
          invest DODON._)

    My armour is too tight!
    Look where my favourite red shield is hanging.

          (_They fetch the shield._)

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do! Beware!

DODON (_examining his shield._)

    My shield is all eaten by rust;
    And the quiver is empty of arrows!

          (_Entirely armed._)

    I can scarcely breathe! My old sword
    Has become too heavy for the royal arm.

          (_panting._)

    There is nothing to be done;
    Carry me and put me on my charger.

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do! Beware!

          (A crowd of servants take him under the arms and carry him
          to the staircase, where his white horse awaits him. The
          people little by little penetrate into the palace.)

DODON (_pointing his finger threateningly at the bird._)

    O! If he had only kept that cock
    Hidden in his bag!
    Is the horse quiet?

THE BOYARS.

    As a cow.

KING DODON.

    Just the horse for us!

AMELFA (_in despair_).

    Hast thou eaten something before thy
    Journey, noble Sire?

KING DODON (_seating himself on the horse_).

    I can eat on the way.

          (_To POLKAN._)

    Are there provisions?

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do! Beware!

POLKAN.

    Enough for three years.

KING DODON.

    Then let us start, Voevoda.

AMELFA.

    It would be better to start in the morning.

          (_DODON mounts his horse._)

PEOPLE (_exclaiming_).

    It is the King! Our father! Hurrah!
    Thou art going thyself. Hast thou not
    Any Voevodas to lead the Army against
    The enemy?
    Take care of thyself,--
    And stand well in the background all the time.


CURTAIN.



DEUXIÈME ACTE.


          (_Nuit obscure. Les troubles rayons de la lune éclairent
          de lueurs sanglantes un défilé étroit, parsemé de petits
          buissons, et les roches escarpées. Le brouillard de
          montagne remplit toutes les cavités d’un voile blanc. Parmi
          les buissons ou sur les pentes nues des collines, gisent
          les cadavres des guerriers: on les dirait pétrifiés au
          milieu de leur dernière bataille. Des aigles et d’autres
          rapaces, en bandes, se sont abattus sur les corps; à
          chaque coup de vent, ils s’envolent, effarés. Deux chevaux
          se tiennent immobiles, la tête inclinée sur les cadavres
          de leurs maîtres, les fils de DODÔN. Tout est calme,
          silencieux et menaçant._)

          (_On entend au loin un bruit de pas. C’est l’armée de
          DODÔN qui avance, craintivement. Des guerriers paraissent,
          suivant le défilé. Ils vont deux par deux, s’arrêtent, se
          retournent._)

LES SOLDATS.

    Nuit épouvantable et sombre!
    Tout est calme: seuls, dans l’ombre,
    Les vautours veillent nos morts.
    La lune pourpre sur leurs corps
    Brille comme un cierge funèbre.
    Hou! Le vent, dans les ténèbres,
    Fait entendre un chant de deuil
    Sur les cadavres sans cercueil.
    Triste, il pleure; il geint sans trêve.…
    Sa voix retombe et puis s’élève.
    Il agite doucement
    Leurs cheveux, leurs vêtements.

          (_Le ROI DODÔN, tourmenté par de sombres pensées, arrive au
          pas avec son vieux général. Ils trébuchent contre les corps
          des deux princes._)

LE ROI DODÔN (_se précipitant sur les corps de ses fils_).

    Quel spectacle abominable!
    Mes deux fils!… Le sort m’accable.…
    Désarmés, sanglants et froids,
    Leurs yeux fixes pleins d’effroi.…
    Ils se sont tués l’un l’autre!
    Leurs vaillants coursiers arpentent
    Le gazon souillé, les pentes
    Que rougit le sang des nôtres.…
    Ah, douleur cruelle!
    Mes fils! Mon espoir!
    Quelle erreur mortelle
    Put ainsi vous décevoir?
    Hélas, je n’ai plus qu’à mourir:
    Coulez, coulez mes larmes amères!
    Que la steppe solitaire
    Nous entende tous gémir.
    Les rochers, les bois, la plaine
    Compatiront à notre peine.
    Ah! Ah! Ah!

CHŒUR (_tous sanglotent_).

    Ah! Ah! Ah!

LE ROI DODÔN (_plaintivement_).

    Désormais
    Je vous conduirai moi-même:
    C’est pitié que ceux qu’on aime
    Tombent ainsi, décimés!
    Ah!

          (_Il pleure de nouveau._)

POLKAN (_à DODÔN_).

    Adieu paniers, vendanges sont faites!

          (_Il se tourne vers l’armée._)

    Votre maître est opprimé:
    Vos épées sont-elles prêtes?

CHŒUR.

    L’ennemi sera chassé!
    Mais où diable est-il passé?

          (_Rien ne répond. Le jour commence à poindre. Le brouillard
          se disperse graduellement, et l’on aperçoit, sortant de
          terre une tente. Les rayons de l’aurore se jouent sur les
          arabesques de ses parois de brocart bigarré.--Consternation
          générale._)

LE ROI DODÔN.

    Voyez donc, la belle tente!

          (_Les premiers rayons du soleil paraissent; on voit remuer
          les parois de la tente._)

          (_Les canonniers s’enfuient en débandade, abandonnant leur
          pièce._)

          (_De la tente sort une belle jeune femme à la démarche
          legère, mais majestueuse. Elle est suivie de quatre
          esclaves qui portent des instruments de musique: goussli
          (psalterions), goudok (viole), chalumeau et tambour. Sa
          longue robe de soie rouge est richement brodée d’or. Elle
          porte un turban blanc, orné d’une haute plume. Elle paraît
          ne rien voir, et, les bras levés comme pour la prière,
          chante en s’adressant au soleil qui brille._)

LA REINE DE CHÉMAKHA.

    Salut à toi, soleil de flamme!
    Nous reviens-tu de l’Orient,
    Du doux pays cher à mon âme,
    De ses paysages souriants?
    Ah! Parle-moi des fraîches roses
    Et des buissons ardents des lys;
    Des beaux oiseaux qui se reposent,
    Auprès des lacs bordés d’iris!
    Qui chantent auprès des lacs bordés d’iris!
    Dis-moi: le soir, près des fontaines,
    Quand chaque belle entonne un chant
    D’extase ou d’amoureuse peine
    Qui monte au rouge firmament,
    Voit-on toujours, sous leurs grands voiles,
    Leurs yeux sourire au beau galant,
    Qui, dans la nuit semée d’étoiles,
    Viendra d’un pas furtif et lent?
    Vient-on l’attendre à la fenêtre,
    L’œil attentif, le cœur tremblant?
    A peine l’a-t-on vu paraître,
    Sait-on charmer l’heureux amant?
    Le cœur en flamme,
    Sait-on charmer l’amant, l’heureux amant?

          (_Ayant fini de chanter, elle se retourne vers le roi, et
          le regarde longtemps sans rien dire._)

LE ROI DODÔN (_à voix basse, et poussant POLKAN du coude_.)

    Comme elle chante!
    Qui peut-elle être?

POLKAN (_de même_).

    Si dès qu’elle nous voit paraître
    Son accueil est si charmant,
    Allons-y pour un moment!

          (_DODÔN s’approche gravement de la reine. POLKAN le suit.
          Les autres n’osent point s’approcher._)

LE ROI DODÔN.

    N’aie pas peur de nous, ma belle!
    Dis-moi comment tu t’appelles,
    Quel est ton pays.
    Dis-moi, Viens-tu seule ici?
    Pourquoi?

LA REINE DE CHÉMAKHA (_timide, et les yeux baissés_).

    Je suis libre, et seule ici.
    De Chémakha je suis la reine,
    Et je viens de mes domaines
    Pour soumettre ton pays!

LE ROI DODÔN (_avec stupéfaction_).

    Nous soumettre, sans vergogne?
    Tu vas bien vite en besogne!
    Sans armée tu nous vaincras,
    Par la force de ton bras?

LA REINE DE CHÉMAKHA (_toujours avec timidité_).

    Ma pensée n’est point si folle:
    Mon sourire, mes paroles,
    Ma beauté me suffiront
    Pour faire courber les fronts.

          (_Elle frappe dans ses mains. De la tente sortent deux
          esclaves qui portent des vaisseaux d’argent, et remplissent
          de vin des coupes._)

    Pardonnez à mon audace,
    Mes chers hôtes: prenez place;
    Par faveur, daignez goûter de ce vin.

          (_Elle s’incline et offre une coupe pleine au ROI DODÔN,
          qui recule avec méfiance._)

    A vos santés!

LE ROI DODÔN.

    Bois d’abord, que nul mécompte
    N’en résulte.

LA REINE DE CHÉMAKHA.

    N’as tu pas honte?
    Tiens, regarde dans mes yeux,
    D’un dessein si ténébreux
    Peux-tu m’estimer capable?
    Suis-je donc si haïssable?

          (_Elle lève les yeux, en souriant. DODÔN, troublé, boit,
          et POLKAN suit son exemple. Les esclaves reviennent; elles
          étendent un tapis au milieu de la scène, et disposent
          autour trois coussins en guise de sièges. Sur un signe de
          POLKAN, les soldats, au fond de la scène, s’installent
          commodément. On enlève les cadavres. DODÔN, POLKAN et la
          reine s’assoient. Les deux hommes sont tout décontenancés.
          La reine a un sourire énigmatique._)

POLKAN (_reprenant courage, et se penchant brusquement vers la reine,
avec l’intention d’être aimable_).

    Avez-vous la nuit dernière
    Bien dormi?

LA REINE.

    Merci! Hum guère.…
    Pas trop mal.…
    Mais, au matin,
    Je me réveillai soudain
    L’air plus chaud et plus languide
    Vint troubler mes sens timides;
    Un parfum d’étranges fleurs
    Enivra mon pauvre cœur.…
    A travers la nuit obscure,
    J’entendis un lent murmure.…
    Toi, qu’appelle mon amour,
    Viens! oh, viens, oh!

POLKAN (_jovial_).

    Il viendra un de ces jours.

LA REINE (_bondissant de son siège_).

    Sire, chasse ce vieil homme
    Ses propos grossiers m’assomment.

          (_POLKAN paraît déconcerté._)

LE ROI DODÔN.

    Tu me pousseras à bout!
    Tu es là comme un hibou,
    Et tous tes discours stupides
    Gênent cette enfant timide.
    N’as tu pas compris?
    Va-t’en dans un coin, et puis attends!

          (_POLKAN se lève, docile, et va derrière la tente, d’où à
          chaque moment il sort un peu son nez et sa longue barbe. La
          reine rapproche son coussin de celui de DODÔN._)

LA REINE (_presque à l’oreille de DODÔN_).

    Viens me dire quelque chose.

LE ROI DODÔN (_plus décontenancé que jamais_).

    Quoi donc? parle!

LA REINE.

    Mais je n’ose.…
    Bah! Réponds la vérité:
    On me vante ma beauté,
    On m’accable de fadaises;

          (_Elle regarde DODÔN bien dans les yeux._)

    Qu’en dis-tu?

LE ROI DODÔN (_bégayant_).

    Hein. Oui … vraiment … Certes…

LA REINE.

    Quel beau compliment!
    Tu me vois sous mes parures:
    Je suis belle, j’en suis sûre,
    Par moi même.
    Et tous les soirs
    Je le vois dans mon miroir,

          (_Comme éprise d’elle même, et avec une animation
          croissante._)

    Quand j’ai fait tomber ces robes
    Dont l’étoffe te dérobe
    La splendeur de mes attraits,
    Quand mon corps d’argent paraît.…
    Au milieu de cette tente
    Je me vois, resplendissante.…
    Je dénoue mes longs cheveux,
    Dont le flot tumultueux,
    Comme un noir torrent, s’éplanche
    Sur le marbre de mes hanches,
    Et me fait un lourd manteau
    Pour rafraîchir la peau
    Je m’asperge de rosée,
    Dont les perles irisées
    Se répandent sur mes seins.
    Que n’en vois-tu le pur dessin!
    Ils sont frais comme la rose,
    Fermes, tendres, blancs et roses,
    Si doux, si clairs, si transparents.…
    Tu parais un peu souffrant?
    Aurais-tu mal à la tête?

LE ROI DODÔN (_avec effort_).

    Non.… C’est au foie.… Ça s’arrête!

LA REINE.

    Ce n’est rien. Je vais chanter:
    Tu n’auras qu’à m’écouter.

          (_Fait silence._)

          (_D’un coup d’œil elle ordonne aux esclaves d’accompagner
          son chant._)

    “Viens dans l’ombre, viens dans l’ombre
    De ma tente aux rideaux lourds.
    Marche, glisse, marche, glisse
    Sur mes tapis de velours!”
    Veux tu venir sous ma tente,
    Beau vieillard?

LE ROI DODÔN.

    Tu ris, méchante!
    Beau vieillard?
    Je n’ai pourtant
    Que tout au plus.…

LA REINE.

    Ah! pourquoi me souvenir?
    Mon malheur ne peut finir
    Un destin cruel m’accable,
    Vivre m’est insupportable.

          (_À travers ses larmes._)

    Où trouver quelqu’un qui ose
    Me contredire en toute chose,

          (_Encore comme en rêve._)

    Me soumettre à son désir,
    Me dominer?

LE ROI DODÔN (_solennel_).

    Quel plaisir de te contenter, ma belle!
    Celui que tes vœux appellent
    Est ici, devant tes yeux.
    Tu auras des jours joyeux.
    Je veux être despotique,
    Et te tourner en bourrique.…
    En un mot, je suis tout prêt,
    Tu n’auras aucun regret!

LA REINE (_abasourdie_).

    En bourrique?
    Ha, ha, ha, ha, ha, ha, ha, ha, ha!

          (_D’un ton gai._)

    Quel délice!
    O, le merveilleux service!

          (_Dans l’excès de sa joie, elle saisit les deux mains de
          DODÔN._)

    Crois à ma reconnaissance!
    J’en suis folle! Saute, Danse!

LE ROI DODÔN (_effrayé_).

    Mais je ne sais plus danser!

LA REINE.

    Danse comme en ton jeune âge.

LE ROI DODÔN (_fâché_).

    Non! tous ces gens-là m’agacent.

LA REINE.

    Bien: Polkan prendra ta place.
    Hé, Polkan! Danse avec moi!

          (_POLKAN avance la tête, mais n’ose point bouger de sa
          cachette._)

LE ROI DODÔN (_conciliateur_).

    Non! pardonne à mon émoi.
    Quoique gauche pour la danse,
    Je veux bien, par complaisance.…

LA REINE.

    Commençons! Allons, venez!
    Dodôn va vous fasciner.

          (_Timidement, POLKAN et les guerriers s’approchent du tapis
          et forment le cercle; ils s’efforcent de ne point regarder
          DODÔN. Les esclaves entament un air de danse lente. Un
          tambourin à la main, la reine avance, gracieuse et légère._)

LA REINE (_Elle danse_).

    Sous mon voile, je m’avance,
    Je te fais la révérence,
    Fort timidement. Puis à toi:
    Viens ici, d’un pas courtois,
    Mais sans crainte, l’air bravache,
    Et retrousse en vainqueur tes moustaches.
    Puis, encore trois pas en avant.

          (_DODÔN danse selon ces indications et arrive auprès de la
          reine._)

    Bien!
    Tu viens là, me suivant.
    Je m’échappe, vagabonde,
    Comme un poisson d’or, sous les ondes,
    Fuit le venimeux crapaud
    Qui lui court après.

          (_DODÔN danse de nouveau.--Se fâchant._)

    Mauvais travail!
    Rentre les talons, de grâce!
    Cambre-toi, la tête en place!
    Agite ton éventail,
    Et montre-toi plus dispos!

          (_La danse devient plus animée._)

    Je m’assieds; rien ne te gêne:
    Tourne jusqu’à perdre haleine!

          (_DODÔN, agitant les bras avec désespoir, commence une
          danse frénétique. La reine s’est assise à un bout du tapis;
          elle rit aux éclats en voyant les pirouettes de DODÔN.--De
          petits nègres sortent de la tente et se rangent autour de
          DODÔN.--Exténué, DODÔN se laisse tomber sur le tapis. Les
          musiciens cessent de jouer. Les petits nègres s’enfuient._)

LE ROI DODÔN (_se dressant sur les genoux_).

    C’est assez!
    Je veux souffler!

          (_Debout._)

    Belle enfant, si je te plais,
    Viens régner sur mon empire:
    Tous mes biens pour ton sourire!
    Prends mon royaume;
    Prends, je t’en fais don!

LA REINE (_avec dédain_).

    Bah! mais qu’y ferais-je donc?

LE ROI DODÔN.

    Quoi? Hé bien: manger et boire,
    Dormir, écouter des histoires,
    Obtenir de ton amant
    Tout.… oui, tout sauf le merle blanc!
    Tu verras: l’on s’y goberge.

LA REINE.

    Çà partons, et faisons hâte
    Je veux voir des ciels nouveaux.
    Vite, en marche!

          (_De la tente sortent des esclaves qui portent des miroirs,
          des éventails, des bijoux, des tapis. Ils aident la reine
          à se préparer pour le voyage. Dans le camp de DODÔN, même
          agitation._)

LE ROI DODÔN.

    Mes chevaux! Mon char doré!
    Prenez les rênes!
    Viens près de moi, ma souveraine.

LA REINE (_se plaçant à côté de DODÔN_).

    Je suis prête. Avancez!
    Chantez la gloire du fiancé!

LES ESCLAVES DE LA REINE.

    O, mes sœurs, l’étrange histoire!
    Notre reine, qui l’escorte?
    Un vieillard aux jambes tortes!
    La couronne d’or qu’il porte
    Cache mal son front d’esclave.
    O, cet air pédant et grave!
    Il est tout pareil à l’âne,
    Lourd d’esprit, et dur de crâne.
    Comme un singe il gesticule.
    Mon Dieu, qu’il est ridicule!
    Son aspect hideux effare.

LE ROI DODÔN (_ne se contenant plus_).

    Hé, Polkan! Sonnez, fanfares!
    Je suis fiancé: victoire!

          (_Fanfares; les soldats crient. Le cortège s’ébranle._)

LES SOLDATS.

    Hourra! Hourra! Hourra! Hourra!


RIDEAU.



ACT II.


          (_A dark night. A dim moon casts a ruddy glow over a
          narrow gorge covered with small bushes and hemmed in by
          cliffs. The mountain mist, slightly stirred by the wind,
          fills all the hollows with a milky shroud. In the midst
          of the bushes, and on the bare hillocks, wherever one
          looks, lie in heaps the bodies of dead warriors killed in
          battle. Eagles and other birds of prey sit on the corpses
          in flocks, flying away in fright at every gust of wind.
          Two horses stand motionless with heads lowered over the
          bodies of their masters. All is quiet, silent, and ominous.
          There is heard in the distance the sound of the unsteady
          footsteps of the discouraged army of KING DODON. In the
          gorge, looking about and stopping, the warriors come down
          in a file, two abreast._)

WARRIORS.

    The silent night is whispering fearful things.
    All is waste; only a flock of birds
    Guard the bodies of the fallen.
    The pallid disc of the moon
    Has risen, and is like a funeral taper.
    A mournful and dreary wind
    Steals through the darkness;
    Stumbling on the bodies,
    It blows moaning over the dead.
    At times it is silent; and again dejectedly
    It presses close to the faces of the fallen,
    And plucks at their sleeves.

          (_Enter, riding their horses at a walk, KING DODON with
          his old VOEVODA, plunged in gloomy thoughts, and stumble
          against the bodies of both the PRINCES._)

KING DODON (_throwing himself upon the bodies of his sons_).

    What terrible sight is this?
    It is my sons! My own sons!
    Without their helmets and their armour.
    And both lie dead,--
    The sword of each piercing the other.
    Their horses wander o’er the meadows
    Upon the grass trampled down
    And red with blood.
    Oh! Our support! My children!
    Woe is me! Caught in a net
    Are both my falcons.
    O grief! My death is here.
    Weep ye all, as Dodon does.
    Let the deepest valleys groan
    And the highest mountains shake with
    Grief.

          (_All sob._)

KING DODON (_pitifully_).

    From henceforth I shall lead my army everywhere myself.
    The young men enough have been
    Exposed to the misfortunes of a martial life.

          (_Renewed sobbing._)

POLKAN (_to DODON_).

    Whatever has happened, it is past and done.

          (_To the army._)

    Friends! Let us stand up for Dodon;
    Let us give the enemy a lesson!

WARRIORS.

    We shall! That we shall!
    If only we can find the enemy.

          (_No answer. It begins to grow light. The mist rises
          a little, and the outline of a tent is seen. The rosy
          reflection of the dawn falls upon the bright, many coloured
          patterns of the brocade flaps of the tent. All are amazed._)

KING DODON.

    Good heavens! A tent!
    All in patterns.

(_The first rays of the rising sun._)

          (_The flaps of the tent move. The warriors hastily
          disperse, leaving the cannon. From the tent emerges
          with an easy but imposing gait a beautiful, bright-eyed
          woman, accompanied by four female slaves with dulcimer,
          rebec, reed, and a drum. She wears a long silk garment
          of raspberry colour, plentifully adorned with pearls and
          gold. On her head a white turban with a high feather. The
          beautiful woman, as if she had noticed nothing, turns
          towards the bright sun, raising her hands to it in prayer._)

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    Answer me, bright orb of day!
    Thou com’st to us from the East--
    Hast thou visited my native land,
    The country of fairy dreams?
    Are the roses still glowing there
    And the bushes of burning lilies?
    Do the turquoise dragon-flies
    Kiss the gorgeous leaves?
    In the evening by the waters,
    In the shy songs of the women and the maidens
    Is there still that same intoxicating faintness,
    The passionate dream of forbidden love?
    Is the unexpected guest still welcomed--
    Are there gifts prepared for him--
    A modest feast--a secret look
    Through the interfering veils?
    When the blue night darkens,
    Does the young mistress hasten to him
    With a sweet avowal on her lips,
    Having forgotten both fear and shame?

          (_The song being ended THE QUEEN turns towards THE KING and
          looks for a long time at him in silence._)

KING DODON (_quietly poking POLKAN with his elbow_).

    That’s a song for you!

POLKAN (_with a wink_).

    If the young mistress wishes to entertain us
    It is possible for us to pass a little time here.

          (_DODON gravely goes nearer to the QUEEN. POLKAN follows
          him. The others remain at a distance, not daring to
          approach._)

KING DODON.

    Fair lady! Fear us not.
    Be open with us in everything.
    What is thy name? Who art thou?
    And where is thy land?

QUEEN OF SHEMAKHAN (_modestly lowering her eyes_).

    By your leave I am the
    Virgin Queen of Shemakhan.
    I am stealing like a thief
    To conquer thy city.

KING DODON (_in astonishment, almost roughly_).

    Thou art an amusing jester,
    Wilful maiden.
    To wage war, an army is necessary;
    Without it, it’s a sorry business.

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    In this thou art mistaken.
    An army is not needful for a victory.
    Beauty alone makes all bend low
    Before her.

          (_Claps her hands. Two more slaves come out of the tent
          with silver pitchers and pour wine into goblets._)

    I am glad of unexpected guests.
    The goblets are full of the fiery juice of the vine;
    They are frothing to the rim.

          (_She bows and strikes the face of DODON who recoils in
          distrust._)

    Your Health!

KING DODON.

    Thou shalt drink first,--
    We after.

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    I did not expect this.
    Look in my eyes, which glow
    Brighter than the dawn itself.
    How could I, with such a heavenly look,
    Regale the stranger with poison?

          (_Smilingly she raises her eyelashes. DODON, in confusion,
          drinks the wine. POLKAN does the same. The slaves who
          brought the pitchers again appear, spread out a carpet in
          their midst, and arrange pillows for them to sit on. At
          a sign given by the VOEVODA, the warriors withdraw to a
          distance, for a prolonged rest and to gather the bodies of
          the slain. DODON, POLKAN, and THE QUEEN seat themselves.
          The first two are perplexed and silent. THE QUEEN smiles
          enigmatically._)

POLKAN (_making an effort, suddenly bows to THE QUEEN, trying to be easy
in manner and agreeable_).

    How has the Queen been pleased to
    Pass the night?

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    I thank thee, I slept not badly.
    But at dawn something happened to me;
    The air became intoxicating--
    Moist, heavy, and spicy--
    Like the aroma of night flowers,
    Like the play of tangled dreams.
    Someone unseen was breathing,
    Oppressed by secret passion.
    I heard a voice, tender as the air of Spring,
    Teasing the ear with the words:
    “Dearest! Let me go.”
    Louder--softer--farther--nearer.

POLKAN (_with a smile_).

    They will come. Do not grieve.

          (_THE QUEEN arises in great emotion._)

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    King! Drive away this monster!
    I do not love thy Voevoda.

          (_POLKAN is put out of countenance._)

KING DODON.

    Why, indeed, old dotard,
    Dost thou stare like an owl?
    Thou seest the damsel is put to shame--
    Still fears us men.
    Away with thee! Go!
    Behind the tent.

          (_POLKAN gets up hurriedly and goes behind the tent, from
          where his long beard is seen sticking out from time to
          time. THE QUEEN moves her pillow close to DODON._)

QUEEN OF SHEMAKHAN (_almost in DODON’S ear_).

    My business is with thee.

KING DODON (_still more confused by the danger of propinquity_).

    Well, what is it?

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    I should like to know for certain
    If the virgin beauty of the Queen
    Is really so brilliant;
    Or is it empty talk.

          (_Looks straight into DODON’S eyes._)

    What sayest thou?

KING DODON (_hesitating_).

    I … that is … in truth …

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    Is that all?
    Thou art to be pitied knowing
    The Queen only in her garments.
    I am not so bad without them.
    When I go to sleep, I look a long time in the mirror.

          (_Thoughtfully admiring herself. Becomes more and more
          carried away._)

    I throw off my garments,
    And as a ray of sunlight in the mist
    Falling on a silver statue
    I shine within the tent.
    I look and see if anywhere
    There is a mole or any blemish on my body.
    I remove the pearly fastenings, and
    Wanton masses of hair,
    Not embarrassed with any head-dress,
    Pour forth in black torrent
    Over my supple marble thighs.…
    So that my sleep may be fresh and sweet
    For the night, I sprinkle myself with dew.
    On my breasts fall drops of liquid fire--
    And I have breasts indeed!
    They vie with glory of the southern roses--
    Magnificent and firm--and they are
    As white, light, and transparent as a dream.…
    What is the matter, my friend? Art thou not
    Thyself? Is thy little head turned?

KING DODON (_controlling himself_).

    There is something the matter with my liver.

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    Rubbish! I shall sing.
    Listen to my song!

          (_With a look commands her slaves to accompany her._)

    “Dark and narrow
    Is my gaily-decked tent;
    Warm and soft is the carpet in it.…”
    Dost thou wish, old man, to see
    What is within?

KING DODON.

    Why dost thou wish to offend us? You know
    I am not old. These are not wrinkles, but----

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    Ah! Why do I think of it--
    Only to open the wound afresh?
    My grief is as boundless
    As the wide expanse of the blue sea.
    O! Take my life!

          (_through her tears_)

    Where shall I find someone who will be able
    To contradict me in everything;

          (_as in a dream_)

    Who will place a limit to my desires,
    Firmly and masterfully?

KING DODON (_solemnly_).

    Cease weeping, and rejoice,
    Maiden Queen of Shemakhan.
    Thou hast sought and found.
    Thy life will now be bright.
    I shall thwart thee and
    Contradict thee in everything;
    In fine--without unnecessary words--
    I am ready to do all for thee.

QUEEN OF SHEMAKHAN (_in amazement_).

    Me? Thwart?
    I am very glad

          (_joyfully_)

    Such happiness! Such bliss!

          (_Takes DODON by both hands, who is unutterably happy._)

    And for this occasion let us dance,
    Forgetting our exalted rank.

KING DODON (_in fear_).

    ’Tis true I have not danced from childhood.

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    Well! Be once more a child.

KING DODON (_gloomily_).

    I am not going to dance in the presence of people.

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    Then, Polkan must be with me.
    Here, Polkan! Come hither, my friend!

          (_POLKAN sticks his head out from behind the tent, but
          dares not to approach._)

KING DODON (_seeks a reconciliation_).

    Do not get angry, darling!
    Although I do not know how to dance,
    I shall not spare myself.

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    Well, let us begin. People, come hither!
    Our Dodon is going to dance.

          (_POLKAN and the Warriors cautiously draw near to the
          carpet, stand in a circle and try not to look at DODON.
          The female slaves begin a measured and graceful dance; THE
          QUEEN with a tambourine joins in, slowly and light as air._)

QUEEN OF SHEMAKHAN (_dancing_).

    At first I shall dance.
    Having lowered my veil,
    Modestly, languidly.--Now it is
    Thy turn, Dodon. Come! Step in front
    Like a turkey cock, full of conceit,
    And sideways, as if by accident,
    Knock up against me.

          (_DODON dances as commanded and awkwardly jostles the
          QUEEN._)

    Good! I, striking my tambourine,
    Shall fly away from thee,
    Silently, supple as a little fish,
    And then thou, a loathsome old crab,
    Must try and catch me.

          (_DODON dances again._)

QUEEN OF SHEMAKHAN (_angrily_).

    Not that way! Thou hast the ways of a camel.
    Don’t keep your heels out.

          (_Dance becomes livelier._)

    And now, wave your hand,
    Turn around, take mincing steps;
    Stamp thy feet until thou art ready to fall down;
    Whilst I sit down here.

          (_THE QUEEN sits to one side and laughs continually, amused
          at DODON. DODON waves his hand despairingly and starts the
          mad dance. Black boys run out from the tent and form a
          circle around DODON. His strength exhausted, he falls down
          on the carpet. The dance ends, and the black boys re-enter
          the tent._)

KING DODON (_on his knees_).

    Stop! I have no more strength.

          (_Gets up._)

    If I am so dear to thee,
    Take me and all my Kingdom;
    For all I have is thine, and likewise I myself.

QUEEN OF SHEMAKHAN (_disdainfully_).

    What shall I do with thee?

KING DODON.

    What shalt thou do? Eat sweetmeats--
    Rest, and listen to fairy tales.…
    Except birds’ milk,
    Everything will be provided for my little darling;
    I shall spare nothing.

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    There is no reason to linger;
    My preparations are made quickly.
    Let us be on our way at once!

          (_Out of the tent there come in an endless file, every
          time moving apart the flaps of the tent, the slaves of THE
          QUEEN, carrying looking-glasses, fans, coffers of precious
          things, pitchers, carpets, etc. They array THE QUEEN. The
          army also get ready to move._)

KING DODON.

    Ho! A horse!
    A golden chariot
    To carry the Queen!

QUEEN OF SHEMAKHAN (_standing beside DODON_).

    I am ready. Ha, ha!

          (_To her slaves._)

    Sing the praises of the Bridegroom.

SLAVES.

    Sisters! Who limps beside
    The resplendent beauty?
    He is a King by rank and dress--
    But a slave--by body and soul.
    With what shall we compare him?
    Because of his rolling gait, he is like a camel!
    Because of his wry face and odd ways,
    He is like a real ape!
    He is like a spectre!

          (_They bring in the chariot._)

KING DODON (_beside himself with joy_).

    Ho! Polkan! Sound the trumpets for
    A victory!
    I am going home with a bride!

          (_Trumpets, and cries of the army._)

THE SOLDIERS.

    Hurrah! Hurrah!
    Hurrah!


CURTAIN.



TROISIÈME ACTE.


          (_Journée chaude et ensoleillée; mais à l’est, un lourd
          nuage noir avance lentement; l’air est chargé d’orage.
          De temps en temps arrivent des messagers essoufflés, qui
          apportent les dernières nouvelles. Ils montent l’escalier
          et disparaissent à l’intérieur. Tout le monde attend
          anxieusement l’arrivée du roi._)

LE PEUPLE.

    J’ai grand peur amis!
    Pourquoi?
    Je l’ignore! Tiens-toi coi!
    Nul malheur ne nous menace:
    Voyez! Le coq d’or reste en place.
    Il se prélasse au soleil.
    Il ne donne point l’éveil.
    Et le coq est de bon conseil!
    Un nuage lourd d’orage
    Apparaît à l’orient,
    Noir, obscur, terrifiant!
    Il pleuvra! Il grêlera!
    Voici venir la tempête!
    Oui, la tempête!

          (_Au haut de l’escalier apparaît l’intendante AMELFA; tous
          se précipitent vers elle._)

LE PEUPLE (_avec de grands saluts_).

    Viens-tu rassurer nos cœurs?
    Nos soldats sont-ils vainqueurs?
    Ont-ils chassé les rebelles?
    De l’armée quelles nouvelles?

AMELFA (_d’une voix saccadée_).

    Ça ne vous regarde pas!
    Détournez d’ici vos pas.

LE PEUPLE.

    Grâce! l’attente est cruelle!

          (_Plusieurs assistants s’approchent D’AMELFA et s’efforcent
          de baiser le bas de sa robe. Elle les repousse._)

AMELFA.

    Hé bien!

          (_Pour se défaire d’eux._)

    Voici les nouvelles:
    Quatre rois sont restés sur le carreau:
    Trèfle, pique, cœur, carreau.
    Notre armée triomphe seule.
    Dodôn sauva de la gueule
    D’un dragon la jeune reine
    Qu’en triomphe il vous ramène.

LE PEUPLE (_sans beaucoup de joie_).

    Allégresse!
    Mais les princes?
    Il serait temps qu’ils revinssent!

AMELFA.

    Ils ne vont pas revenir:
    Notre roi les fit mourir.

LE PEUPLE (_avec effroi_).

    Sa justice est implacable!
    Étaient-ils donc bien coupables?

AMELFA (_avec indifférence_).

    Ils sont mal tombés, voilà!

          (_Sur un ton de menace._)

    Votre tour bientôt viendra!

LE PEUPLE (_ils se grattent la nuque et sourient stupidement_).

    Notre roi est seul le Maître!
    Nous devons tous nous soumettre!

          (_On entend le son des trompettes._)

AMELFA.

    Ils viennent. Tournoyez, sautez!
    Montrez votre loyauté
    Par des bonds et des grimaces,
    Mais n’espérez point de grâces!

          (_Les menaçant du doigt, elle rentre dans le palais.
          Dans la rue commence le cortège triomphal. D’abord, les
          miliciens du roi, avec des airs importants et fanfarons;
          puis, la suite de la REINE DE CHÉMAKHA, bariolée et
          bizarre, comme sortie d’un conte oriental: certains
          personnages n’ont qu’un œil, au milieu du front; d’autres
          ont des cornes, d’autres des têtes de chiens. Géants,
          nains. Éthiopiens grands et petits, esclaves voilées
          portant des cassettes et des vaisseaux précieux. Cette
          pompe insolite dissipe pour un instant l’anxiété du peuple.
          Tous s’amusent comme des enfants.--Le cortège de la
          reine._)

          (_LE ROI et LA REINE apparaissent sur leur char doré. LE
          ROI paraît vieilli. Il a perdu sa prestance majestueuse.
          Son air est soucieux. Il regarde continuellement, avec
          tendresse, LA REINE. Celle-ci s’est capricieusement
          tournée de côté et trahit de temps en temps par ses gestes
          brusques, un énervement caché. La foule se trémousse,
          saute, tournoie, pousse de joyeuses acclamations._)

LE PEUPLE.

    Soyez bienvenus! Hourra!
    Longue vie à notre roi!
    Hourra! Hourra!
    Vois tes serviteurs fidèles,
    Dévoués et pleins de zèle,
    Prêts à t’obéir toujours,
    Afin d’embellir tes jours.
    Nous nous mettrons à quatre pattes
    Pour te dilater la rate.
    Nous nous flanquerons des coups.
    Le spectacle sera doux.
    Nous ne sommes sur la terre
    Que pour t’obéir, te plaire,
    Que pour être tes jouets,
    Tes esclaves dévoués!

          (_Sur le perron d’une des maisons apparaît L’ASTROLOGUE,
          toujours vêtu de sa robe bleue et la tête couverte de son
          bonnet.--Ayant aperçu L’ASTROLOGUE, LA REINE l’examine
          longuement et avec attention.--LE ROI s’apprête à
          descendre, mais LA REINE le retient, et, désignant du doigt
          L’ASTROLOGUE._)

LA REINE (_d’un ton inquiet_).

    Quel est donc ce personnage?
    Il a l’air fort grave et sage.

          (_La foule recule devant L’ASTROLOGUE et attend,
          silencieuse. LA REINE observe toujours L’ASTROLOGUE. Coup
          de tonnerre lointain._)

LE ROI DODÔN (_joyeux de reconnaître son vieil ami_).

    Hé, bonjour, devin prudent,
    Mon ami, mon confident!
    Dis-nous, en ce jour propice,
    Tes désirs, qu’ils s’accomplissent.

          (_L’ASTROLOGUE traverse la foule et s’approche du char
          royal. Il ne quitte point des yeux LA REINE._)

L’ASTROLOGUE.

    Roi sublime, j’obéis!
    Liquidons en bons amis.
    Hier, en ta reconnaissance,
    Tu promis sans réticence
    D’exaucer mon premier vœu:
    Voici donc ce que je veux:
    Sans tarder tiens ta promesse,
    Fais moi don de la princesse.

LE ROI DODÔN.

    Par le diable! C’est ainsi?
    Ma réponse, la voici:
    L’insolence est par trop grande,
    Polisson! je te commande
    De vider sans plus ces lieux.
    Chassez-moi d’ici ce vieux!

          (_Les gardes entraînent le vieillard, qui se débat._)

L’ASTROLOGUE.

    C’est donc la.…

LE ROI DODÔN (_furieux._)

    Quoi, tu discutes?
    Tu veux entamer la lutte?

          (_Il lui applique un coup de sceptre sur la tête.
          L’ASTROLOGUE tombe inanimé et rend l’esprit. Frémissement
          dans l’assistance. Des nuages voilent le soleil; le
          tonnerre gronde._)

LA REINE (_à part, éclate de rire_).

    Hihihi! Hahahaha!
    Que c’est drôle, tout cela!

          (_DODÔN est fort troublé, mais il continue de regarder LA
          REINE en souriant._)

LE ROI DODÔN (_avec une terreur superstitieuse_).

    Juste avant le mariage!
    C’est un bien mauvais présage.…
    Ce sang… Un malheur s’ensuivra…

LA REINE (_sèchement_).

    Hé bien, qui vivra verra,
    Voilà tout!

LE ROI DODÔN (_tranquillisé et avec ivresse_).

    Par nos caresses
    Célébrons notre allégresse.

          (_Il veut embrasser LA REINE, mais elle le repousse avec
          fureur et dégoût_).

LA REINE.

    Disparais, monstre hideux,
    Toi et ton peuple odieux!
    C’est assez! ton âme immonde
    Trop longtemps souilla le monde.
    Tu souris, vieux scélérat,
    Mais ton châtiment viendra!

LE ROI DODÔN (_avec un sourire contraint_).

    Ma princesse, tu plaisantes…

LA REINE.

    Non, plus à l’heure présente.

          (_Ils montent l’escalier._)

LA VOIX DU COQ.

    Cocoricocou!
    Je te percerai d’un coup.

CHŒUR.

    Kchi! Kchi! Kchi! Kchi!

          (_Subitement, LE COQ s’envole de sa flèche et voltige
          au-dessus de la foule. Tous, épouvantés, agitent les bras
          pour le chasser.--LE COQ donne un grand coup de bec sur la
          tête du ROI, qui tombe mort. Épouvante générale: violent
          coup de tonnerre.--Une obscurité complète se fait pour un
          moment, durant lequel on entend le rire tranquille de LA
          REINE._)

LA VOIX DE LA REINE.

    Hihihihi! Hahahaha!

          (_Quand la nuit s’est dissipée, on ne voit plus LA REINE,
          ni LE COQ._)

LE PEUPLE (_avec stupéfaction_).

    Où donc est la reine?
    Envolée! Ah! notre âme est affolée.…

          (_avec espoir._)

    Mais le roi?

          (_Tristement._)

    Il est bien mort.
    Quel invraisemblable sort.

          (_Écrasé de douleur, LE PEUPLE entier entonne une
          lamentation funèbre._)

    Il est mort… O peine amère!
    Notre prince! Notre père!
    Notre seigneur sans pareil,
    Qui brillait comme un soleil!
    Il était prudent, sagace,
    Paresseux, rêveur, bonasse!
    Sa colère était terrible,
    Sa fureur incoercible.
    Il nous frappait comme un sourd
    Plus souvent qu’à notre tour.
    Mais l’orage enfin passé,
    L’on pouvait se prélasser
    Sous son ombre tutélaire;
    Il était pour nous un père.

          (_avec un profond désespoir._)

    Quel terrible désarroi!
    Qui va nous donner un roi?

          (_Ils s’écroulent par terre et sanglotent._)


RIDEAU.



CONCLUSION.


          (_L’ASTROLOGUE, écartant le rideau, se présente._)

L’ASTROLOGUE (_aux spectateurs_).

    Nobles spectateurs, mes frères,
    Ce dénouement sanguinaire
    Ne doit point vous émouvoir.
    Ceux que vous venez de voir
    N’étaient que de vains fantômes.
    Sachez que dans le royaume
    De Dodôn, la reine et moi,
    Étions seuls humains… voilà!

          (_Il salue et disparaît._)



ACT III.


          (_Stifling heat. Although the sun is shining, a heavy black
          cloud is creeping from the East and the air is charged with
          a presentiment of a dreadful thunderstorm. From time to
          time runners, out of breath, enter, ascend the staircase
          and disappear within the palace. All await the royal
          cortege in vague alarm._)


PEOPLE (_amongst themselves_).

    It is dreadful! What is it?
    I don’t know myself. There’s nothing to fear;
    Nothing bad will happen to us.
    You see the golden cock is not beating his wings,
    And is sticking up in the sun!
    He warms his back and keeps silent.
    If there was any misfortune he would awaken.
    Look at that sullen, heavy cloud
    Coming up from the East.
    It carries evil in its dark depths.
    There will be rain in the city;
    Yes, and with thunder, even hail as well.

          (_The Royal Housekeeper, AMELFA, appears on the upper steps
          of the stairway. All rush towards her._)

PEOPLE (_bowing_).

    Be kind! Honoured mother,
    And tell us if the Army is safe.
    Are we to have peace, or misfortune?
    You know. There were runners.

AMELFA (_curtly_).

    There were. Only it is no affair of yours.
    Away with you! That is all I have to say.

PEOPLE.

    Be merciful! Our hearts are sore.

          (_Many of them run to AMELFA and try to kiss the hem of her
          dress. She pushes them away._)

AMELFA.

    Go away!

          (_Wishing to get rid of them._)

    Here’s the news!
    You see, there are four Kings--
    Hearts, Spades, Clubs, and Diamonds;
    Our King has conquered them.
    He has saved from the Dragon’s jaws
    A Royal Maiden.
    She will be our Queen!

PEOPLE (_without any special joy_).

    Well! We shall have a holiday!
    But where are our hope--the Princes?

AMELFA.

    The King has put them in chains
    And has punished them with a cruel death.

PEOPLE (_shuddering_).

    Ah! Heavy is the Royal hand!
    What did they do?

AMELFA (_indifferently_).

    They had bad luck.
    Something awaits you, too!

          (_threateningly._)

PEOPLE (_scratching their heads and stupidly smiling_).

    We are yours, body and soul;
    If we are beaten we have deserved it.

          (_A sound of trumpets is heard._)

AMELFA.

    They are coming! Jump like goats--
    Turn somersaults for very joy.
    Greet the King loudly--
    But do not expect mercy.

          (_Threatening them once again with her finger, AMELFA
          enters the palace. The triumphant procession begins to pass
          by. First come the Royal Warriors, on foot and mounted,
          with faces puffed up with pride. Then the suite of THE
          QUEEN of SHEMAKHAN, of as many colours and as fantastic as
          those in Eastern fairy tales. There are giants and dwarfs,
          people with one eye in the middle of their forehead, people
          with horns, with heads like a dog, negros and negro boys,
          female slaves covered with veils carrying coffers and
          precious plate. The curious splendour of the procession
          disperses for a time the weight of expectation. All become
          as gay as children._)

          (_The golden chariot appears with the KING and QUEEN. THE
          KING has aged somewhat, has become restless, has lost his
          majestic carriage, and all the time looks fondly into the
          eyes of the haughty QUEEN. THE QUEEN capriciously turns
          away, expressing her secret impatient irritation by jerky
          movements. The People move about, jump, turn somersaults,
          and shout a joyful welcome._)

PEOPLE (_shouting_).

    Long life to thee! Hurrah!
    May thou have every good thing!

          (_Begin to sing._)

    “We are thy faithful servants,
    Who kiss the Royal feet.
    We are glad to serve thee,
    To amuse thee with our foolishness,
    To box for thee upon a holiday,
    To bark, to crawl on all fours,
    So that thy hours may flow quickly
    And may bring sweet sleep.
    Without thee we should have no
    Reason for existing;
    For thee we were born
    And for thee we have had children.”

          (_The ASTROLOGER appears in the portico of one of the
          houses, in the same blue garment and high hat. Having
          observed the ASTROLOGER, the QUEEN looks at him long and
          steadfastly. THE KING, wishing to descend, is stopped by
          the QUEEN, who points out the ASTROLOGER to him._)

QUEEN OF SHEMAKHAN (_uneasily_).

    Who is that standing there in the white hat
    And with hair as white as a swan?

          (_The crowd parts before the ASTROLOGER, and is dumb with
          expectation. The QUEEN follows his movements._)

KING DODON (_delighted to see his old acquaintance_).

    Ah! It’s thou, my wise man,
    My benefactor and father!
    What hast thou to say to us on this festal occasion?
    Come nearer! What dost thou ask of us?

          (_The ASTROLOGER wends his way through the crowd to the
          chariot, not taking his eyes off the QUEEN._)

ASTROLOGER.

    Great King! It is I.
    Let us settle matters as friends.
    Dost thou remember that in return for an obligation
    Thou didst swear, in transports of delight, to fulfil
    My first wish as if it were thy own?
    Give the maiden to me--
    The Queen of Shemakhan.

KING DODON (_trying to bring THE ASTROLOGER to his senses_).

    What! Has the devil got into thee?
    Or hast thou lost thy senses?
    What has got into thy head?
    Away with thee, before I injure thee!
    Drag the old man away!

          (_The guards drag THE ASTROLOGER away. He resists._)

ASTROLOGER.

    Is it to be thus?

KING DODON (_raging_).

    Art thou going to argue again?
    I shall show thee how to argue with me!

          (_Strikes him on the forehead with his sceptre. He falls
          down dead. All the people shudder. The sun goes behind a
          cloud and a clap of thunder is heard._)

QUEEN OF SHEMAKHAN (_laughing to herself_).

    Ha! Ha! Ha! I am not afraid of sin.

          (_DODON very agitated, but still smiles fondly upon THE
          QUEEN._)

KING DODON (_superstitiously_).

    I hope it will not bring misfortune
    On the eve of marriage!
    It is not good to shed blood upon a wedding day!

QUEEN OF SHEMAKHAN (_curtly_).

    There will be a scuffle at the banquet--
    That is all.

KING DODON (_tranquilly, in a caressing tone_).

    Let us kiss each other--
    To drive away the evil omen!

          (_DODON tries to embrace and kiss THE QUEEN. She, with
          anger and aversion, pushes him away._)

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    May thou perish, wicked monster!
    And thy people!
    How can the earth endure such as you?
    Wait! Grey-headed babbler!
    Thy death is not far off!

KING DODON (_smiling pitifully_).

    Thou art still joking, my dear!

QUEEN OF SHEMAKHAN.

    No! Already we have had a sorry jest.

          (_They ascend the staircase. Suddenly the cock begins to
          fly and circles above their heads. All wave him off with
          their hands._)

VOICE OF THE BIRD.

    Cock-a-doodle-do!
    I shall peck the old man on the crown of his head!

CHORUS.

    Sh! Sh! Sh! Sh!

          (_THE COCK pecks DODON on the head, and he falls dead.
          A clap of thunder. All struck dumb. For a moment total
          darkness, in which is heard the quiet laugh of THE QUEEN.
          When it grows light again neither QUEEN nor the bird is
          seen._)

PEOPLE (_to each other, in astonishment_).

    Where is the Queen?
    She has vanished
    As if she had never been at all!

          (_Hopefully._)

    Is the King groaning?

          (_Sadly._)

    No! He is dead--if it is not all a dream!

          (_Crushed by despair, the people finally break into
          mournful sobbing._)

    The King is dead! Our dear one is killed!
    Our happy, our debonnair, and
    Never-to-be-forgotten King!
    Lord of Lords!
    He was most wise,
    And ruled the Kingdom with his
    Hands folded, lying at his ease.…
    It’s true! Our King in anger
    Was like a thunderbolt from the heaven,
    Which strikes at random,
    Carrying destruction right and left,
    But when the cloud is passed
    The heavy air is fresher,
    And the King, like the golden dawn,
    Lightens all without distinction.

          (_In perplexity._)

    What will a new dawn bring?
    How shall we live without a King?

          (_They fall on their faces and weep inconsolably._)


CURTAIN.



EPILOGUE.


          (_Moving apart the folds of the curtain, THE ASTROLOGER
          looks out._)

ASTROLOGER (_to the audience_).

    There! My story’s ended;
    But the bloody conclusion,
    However sad it may be,
    Need not disturb you.
    Perhaps the Queen and I
    Were the only living people in it;
    The rest were--a delirium, a dream;
    A pale spectre, nothing more.…

          (_Disappears._)



Transcriber’s Note

Liste des modifications au texte (and a few changes to the English too).


Acte premier

“viel” -> vieil (un vieil ASTROLOGUE)

Solonnellement -> Solennellement (_Solennellement._)

chambre -> chambres (à la porte des chambres du fond)

paleis -> palais (les serviteurs se précipitent dans le palais)

prèpicitamment -> précipitamment (_AMELFA va se cacher précipitamment._)

s’endorment d’endorment d’un sommeil -> s’endorment d’un sommeil

e -> et (Règne et dors)

trampettes -> trompettes (Des trompettes sonnent.)

dacher précipitament -> cacher précipitamment (AMELFA va se cacher
précipitamment.)

lours -> lourd (Ce glaive, qu’il est lourd!)

on -> en (allons, en route!)


Deuxième acte

las -> les (on les dirait pétrifiés)

pleine -> pleins (Leurs yeux fixes pleins)

le -> la (la steppe solitaire)

(deux fois) Saint-on -> sait-on (Sait-on charmer)

l’armant -> l’amant (l’amant, l’heureux amant)

Avant -> Ayant (Ayant fini de chanter)

ae -> de (DODÔN s’approche gravement de la reine.)

N’ais -> N’aie (N’aie pas peur de nous)

I -> De (De Chémakha je suis la reine)

Fais -> Fait (_Fait silence._)

viens l’ombre -> viens dans l’ombre

solonnel -> solennel (LE ROI DODÔN (_solennel_).)

appallent -> appellent (Celui que tes vœux appellent)

Le -> La (LA REINE (_abasourdie_).)

bland -> blanc (tout sauf le merle blanc)

ta -> la (Chantez la gloire du fiancé!)

fancé -> fiancé (Je suis fiancé: victoire!)


Act Two

ges -> gets (POLKAN gets up hurriedly)

tht -> the (the blue sea)


Troisième acte

lours -> lourd (un lourd nuage noir avance lentement)

A Grêlera -> Il grêlera (Il pleuvra! Il grêlera!)

bariolé -> bariolée (la suite de la REINE DE CHÉMAKHA, bariolée et
bizarre)

rice -> rire (LA REINE (_à part, éclate de rire_).)

vera -> verra (Hé bien, qui vivra verra)

Parresseux -> Paresseux (Paresseux, rêveur, bonasse!)

So -> Sa (Sa colère était terrible)


Act Three

What is? -> What is it? (It is dreadful! What is it?)

chidren -> children (And for thee we have had children)





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